Dossier – Insuffisance cardiaque Insuffisance cardiaque mt cardio 2007 ; 3 (6) : 409-15 Nosologie de l’insuffisance cardiaque diastolique Pierre Dos Santos , François Picard Hôpital cardiologique Haut-Lévêque, Avenue Magellan, 33600 Pessac <[email protected]> Résumé. Malgré des efforts de consensus, l’insuffisance cardiaque diastolique reste une pathologie aux contours imparfaitement définis. Son Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. diagnostic repose sur l’association d’un syndrome clinique d’insuffisance cardiaque, d’une fraction d’éjection normale ou préservée (> 45 %), de signes de dysfonction diastolique et d’un processus de remodelage concentrique. On estime sa fréquence à environ 50 % des cas d’insuffisance cardiaque. Il n’est pas possible de différencier l’insuffisance cardiaque diastolique de l’insuffisance cardiaque systolique sur la base de critères cliniques. Cependant, les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique sont en moyenne plus âgés, plus souvent des femmes, plus volontiers hypertendus et moins souvent coronariens que ceux souffrant d’insuffisance cardiaque systolique. Son pronostic vital paraît moins sévère que celui de l’insuffisance cardiaque systolique. En revanche, sa morbidité, ainsi que le coût de sa prise en charge sont comparables. Mots clés : insuffisance cardiaque diastolique, dysfonction diastolique, fraction d’éjection Abstract. Nosology of diastolic heart failure. Despite significant efforts to reach a consensus, diastolic heart failure is still an imperfectly defined entity. Its diagnosis is based on the association of a clinical syndrome of heart failure, a normal or preserved (> 45%) ejection fraction, signs of diastolic dysfunction, and a concentric remodeling of the left ventricle. About 50% of patients presenting with signs or symptoms of heart failure have a normal or preserved ejection fraction. It is impossible to differentiate between diastolic and systolic heart failure on the basis of clinical criteria. However, patients suffering from diastolic heart failure are usually older, more frequently women, more likely to present with systemic hypertension, and less likely to have coronary artery disease than those suffering from systolic heart failure. Its prognosis appears less severe than that of systolic heart failure. However, its morbidity and economic cost are similar. Key words: diastolic heart failure, diastolic dysfunction, ejection fraction doi: 10.1684/mtc.2008.0121 L’ mtc Tirés à part : P. Dos Santos insuffisance cardiaque congestive peut être définie comme un syndrome clinique associant dyspnée et fatigue, et dont l’origine réside dans une altération de la fonction cardiaque et l’activation de mécanismes neurohormonaux engendrant une rétention hydrosodée. En présence d’un patient présentant des signes et des symptômes d’insuffisance cardiaque, le clinicien s’attend généralement à trouver un ventricule dilaté et faiblement contractile. Cependant, près de la moitié des malades souffrant d’insuffisance cardiaque se présente avec une fraction d’éjection normale (ou préservée) et constitue donc un sousgroupe de patients souffrant « d’insuffisance cardiaque diastolique » (ou insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée). Il est alors commun de considérer dans ces condi- mt cardio, vol. 3, n° 6, novembre-décembre 2007 tions que les signes et les symptômes d’insuffisance cardiaque sont causés par des anomalies de la fonction diastolique. Les études épidémiologiques ont montré que l’insuffisance cardiaque diastolique est une cause fréquente d’insuffisance cardiaque chronique et induit une augmentation importante de la morbidité et de la mortalité cardiovasculaires. Alors que les recommandations des sociétés savantes pour le traitement de l’insuffisance cardiaque systolique s’enrichissent de classes médicamenteuses ayant fait la preuve de leur efficacité sur la réduction de la morbi-mortalité, le pronostic de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, dont la prévalence a augmenté lors des deux dernières décennies, ne connaît pas d’amélioration sensible. 409 Nosologie de l’insuffisance cardiaque diastolique Insuffisance cardiaque Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Si l’ensemble de la communauté cardiologique s’accorde sur l’importance du problème que constitue l’insuffisance cardiaque diastolique, la controverse persiste quant à sa physiopathologie, à la terminologie employée pour définir la maladie et décrire les patients, aux méthodes pour explorer la fonction diastolique, aux critères utilisés pour affirmer le diagnostic, et à son pronostic exact. En conséquence, les essais thérapeutiques ont été délicats à élaborer et longs à mettre en place. La résolution des questions relatives à la nosologie ou à la nosographie de cette pathologie aux contours parfois flous semble donc s’imposer comme un prérequis si l’on veut progresser dans sa prise en charge. Définitions et terminologie Bases de la différenciation entre insuffisance cardiaque diastolique et systolique Les patients souffrant d’insuffisance cardiaque chronique peuvent être classés en deux grandes catégories : « l’insuffisance cardiaque systolique » et « l’insuffisance cardiaque diastolique ». Ces deux catégories trouvent leur origine dans des différences au niveau de la structure et de la fonction du ventricule gauche. L’expression « insuffisance cardiaque systolique » est utilisée pour décrire un groupe de patients souffrant d’insuffisance cardiaque chronique et présentant un remodelage excentrique, aboutissant à une augmentation du volume de la cavité ventriculaire gauche et des anomalies de la fonction cardiaque prédominant sur la fonction ou la performance systolique et la contractilité [1]. Chez ces patients, la pression diastolique du ventricule gauche est augmentée alors que la rigidité passive de la paroi ventriculaire gauche est normale ou diminuée [2]. L’expression « insuffisance cardiaque diastolique » décrit quant à elle un groupe de patients souffrant également d’insuffisance cardiaque chronique mais se présentant avec un remodelage ventriculaire gauche concentrique, un volume diastolique du ventricule gauche normal et des anomalies de la fonction cardiaque portant essentiellement sur ses composantes diastoliques : ralentissement et retard de la relaxation active et augmentation de la rigidité passive du ventricule gauche [3-5]. Chez ces pa- Liste des abréviations BNP : peptide natriurétique de type B ETS : élastance télésystolique PTD : pression télédiastolique VES : volume d’éjection systolique VG : ventricule gauche VO2 : pic de consommation en oxygène à l’effort VTD : volume télédiastolique VTS : volume télésystolique 410 Tableau 1. Comparaison des principales modifications de la structure et de la fonction ventriculaire gauche rencontrées lors de l’insuffisance cardiaque systolique et de l’insuffisance cardiaque diastolique (adapté d’après [9]) Paramètre Remodelage VTD VTS Masse VG Epaisseur pariétale relative Cardiomyocyte Contenu en collagène Propriétés diastoliques PTD Constante de temps de la relaxation Vitesse de remplissage Rigidité Propriétés systoliques Performance VES Travail d’éjection Fonction Fraction d’éjection Vitesse d’éjection Contractilité +dP/dt ETS Réserve de précharge Élastance artérielle effective Insuffisance cardiaque systolique Insuffisance cardiaque diastolique ↑ ↑ ↑ (excentrique) ↓ ↑ (longueur) ↓ → → ↑(concentrique) ou remodelage ↑ ↑ (diamètre) ↑ ↑↑ ↑ ↑↑ ↑↑ ↓ → ou↑ ↓↓ ↑ ↓ ↓ → ou ↓ → ↓ ↓ → → ↓ ↓ ↓↓↓ ↓ → → ou ↑ ↓ ↑ VTD : volume télédiastolique ; VTS : volume télésystolique ; VG : ventricule gauche ; PTD : pression télédiastolique ; VES : volume d’éjection systolique ; ETS : élastance télésystolique. tients, les paramètres de la fonction systolique comme la performance, la fonction et la contractilité, sont normaux. Alors que, comme chez les patients ayant une insuffisance cardiaque systolique, l’élastance artérielle effective est augmentée, le couplage ventriculo-artériel est normal. Il apparaît donc, sur la base de ces considérations, que les expressions « insuffisance cardiaque systolique » et « insuffisance cardiaque diastolique » ne distinguent pas deux groupes de patients sur la base d’une valeur seuil de fraction d’éjection, mais plutôt sur un « cocktail » de caractéristiques, au premier rang desquelles figurent le type de remodelage ventriculaire, la structure du ventricule gauche et l’origine principale des altérations fonctionnelles (tableau 1). Concepts de dysfonction ventriculaire et d’insuffisance cardiaque Le concept de dysfonction systolique se rapporte à une altération de la capacité des fibres myocardiques à se raccourcir contre une charge. Il en découle une anomalie mt cardio, vol. 3, n° 6, novembre-décembre 2007 Insuffisance cardiaque Dysfonction diastolique PressionVG Dysfonction systolique VES Volume VG PressionVG PressionVG Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Fonction normale Insuffisance cardiaque systolique Insuffisance cardiaque diastolique Figure 1. Représentation schématique de courbes pression-volume représentatives des modifications de la fonction cardiaque rencontrées lors de la dysfonction systolique, de la dysfonction diastolique, de l’insuffisance cardiaque systolique et de l’insuffisance cardiaque diastolique (adapté d’après [40]). Noter en cas de dysfonction systolique, la diminution de l’élastance télésystolique (diminution de la pente de la relation pression télésystolique-volume télésystolique), la diminution du volume d’éjection systolique (VES), de la fraction d’éjection, ainsi que du travail d’éjection (diminution de l’aire délimitée par la boucle pression-volume). En cas de dysfonction diastolique, l’augmentation de la rigidité passive du ventricule ± l’altération de la relaxation active du ventricule gauche déplace la boucle pression-volume vers le haut alors que la relation pression-volume en diastole est déplacée vers le haut et la gauche. L’élastance télésystolique n’est pas modifiée mais le travail d’éjection peut être diminué. En cas d’insuffisance cardiaque diastolique, le remodelage excentrique du ventricule gauche engendre une augmentation des volumes du ventricule gauche et déplace la boucle pression volume vers le haut et la droite. En cas d’insuffisance cardiaque diastolique, le remodelage concentrique accentue le déplacement vers le haut et la gauche de la relation presssion-volume en diastole pouvant, à terme, réduire le volume télédiastolique et le volume d’éjection systolique. de l’éjection vers l’aorte. Cette dysfonction peut être appréhendée au travers de l’analyse des boucles pressionvolume (figure 1). La dysfonction systolique se caractérise par : 1) une diminution de la performance systolique, matérialisée par la diminution du travail d’éjection, et illustrée sur la boucle pression-volume par une diminution de sa surface ; 2) une diminution de la fonction ventriculaire engendrant une diminution de la fraction d’éjection ; mt cardio, vol. 3, n° 6, novembre-décembre 2007 411 Nosologie de l’insuffisance cardiaque diastolique Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Insuffisance cardiaque 3) une diminution de la contractilité, illustrée par une diminution de l’élastance télésystolique, c’est-à-dire une diminution de la pente de la relation pression-volume en télésystole. De telles anomalies peuvent, ou non, s’associer à un syndrome clinique d’insuffisance cardiaque ou à des anomalies de la fonction diastolique. Ainsi, le concept de dysfonction systolique se réfère à la présence d’anomalies des propriétés mécaniques du myocarde et en aucun cas à un syndrome clinique. Il en est de même pour le concept de dysfonction diastolique. Ce dernier se rapporte à une altération de la capacité des fibres myocardiques raccourcies à revenir à leur longueur de repos, et donc du ventricule à se remplir normalement dans des conditions de pressions basses. En conséquence, le remplissage ventriculaire est ralenti, incomplet et requiert une élévation de la pression auriculaire (figure 1). La mise en évidence d’une dysfonction diastolique requiert donc l’analyse de la relaxation active du ventricule, par la mesure de la vitesse et de l’amplitude de décroissance de la pression ventriculaire lors de la relaxation isovolumique, ainsi que des propriétés de rigidité passive. La dysfonction diastolique se traduit alors par un déplacement vers la gauche et le haut de la boucle pression-volume. Ainsi, le concept de dysfonction diastolique se réfère à la description d’anomalies des propriétés mécaniques du myocarde, et en aucun cas à celle d’un syndrome clinique. Le concept d’insuffisance cardiaque quant à lui, se réfère exclusivement à un syndrome associant des signes de rétention hydrosodée et d’hypoperfusion tissulaire. L’élucidation des mécanismes physiopathologiques à l’origine de ce syndrome demande l’appréciation des fonctions diastolique et systolique, comme celle du type et de l’importance des processus de remodelage ventriculaire en cours. Lorsque le syndrome clinique d’insuffisance cardiaque s’accompagne d’un remodelage concentrique associé à des anomalies de la fonction cardiaque prédominant sur ses composantes diastoliques, on parlera d’insuffisance cardiaque diastolique. En revanche, lorsque le syndrome clinique d’insuffisance cardiaque s’accompagne d’un remodelage excentrique associé à des anomalies de la fonction cardiaque prédominant sur ses composantes systoliques, on parlera alors d’insuffisance cardiaque systolique. Les modalités à suivre pour établir en pratique le diagnostic d’insuffisance cardiaque diastolique sont développées dans ce numéro par J.-M. Tartière. Remodelage ventriculaire et insuffisance cardiaque diastolique De nombreuses études ont décrit les anomalies des volumes ventriculaires gauches chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique, que ce soit par échocardiographie ou par imagerie par résonance magnétique 412 nucléaire [3, 4, 6-8]. Il apparaît à la lecture de ces travaux que le volume télédiastolique du ventricule gauche des patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique est égal ou plus petit que celui de sujets sains de même âge et de même sexe. Ces patients ont une incidence accrue d’hypertrophie ventriculaire gauche (définie par une masse ventriculaire gauche ≥ 125 g/m2). Cependant, la présence d’une hypertrophie ventriculaire gauche n’est pas requise pour le diagnostic d’insuffisance cardiaque diastolique. Toutefois, dans de nombreux cas, les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique et ayant une masse ventriculaire gauche dans les limites de la normale se présentent avec un rapport volume ventriculaire gauche/masse ventriculaire gauche ou diamètre ventriculaire gauche/épaisseur pariétale diminuée, témoignant d’un processus de remodelage concentrique. Ainsi, environ 40 % des patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique ont une épaisseur pariétale du ventricule gauche > 12 mm, environ 60 % ont une épaisseur pariétale relative > 0,45, et 40 % une masse ventriculaire gauche > 125 g/m2. Il est important cependant de noter que près de 35 % des patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique n’ont ni augmentation relative de l’épaisseur pariétale, ni augmentation de la masse ventriculaire au-delà de 125 g/m2, et que près de 45 % ont les deux [3]. Anomalies de la fonction cardiaque et insuffisance cardiaque diastolique Anomalies de la fonction diastolique Les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique (donc symptomatiques) se présentent systématiquement avec une anomalie de la relaxation active caractérisée par un ralentissement de la vitesse de décroissance de la pression ventriculaire en phase de relaxation isovolumique, un ralentissement et une diminution du remplissage diastolique précoce et une élévation compensatrice du remplissage tardif secondaire à une élévation de la pression auriculaire [4, 5]. Il découle de ces anomalies une élévation significative de la pression télédiastolique du ventricule gauche, du rapport pression télédiastolique du ventricule gauche/volume télédiastolique du ventricule gauche, et de la constante de rigidité du ventricule gauche. Anomalies de la fonction systolique Si les anomalies de la fonction diastolique constituent le lit de l’insuffisance cardiaque diastolique, on ne peut pas exclure que des anomalies de la fonction systolique participent à ce syndrome clinique, même en l’absence d’anomalie significative de la fraction d’éjection [9-14]. Il est possible cependant que les anomalies de la fonction systolique observées chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique soient la conséquence, mt cardio, vol. 3, n° 6, novembre-décembre 2007 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Données épidémiologiques et démographiques Prévalence de l’insuffisance cardiaque diastolique L’insuffisance cardiaque systolique et l’insuffisance cardiaque diastolique ne peuvent pas être différenciées sur la base des symptômes et des signes cliniques. Cependant, les études épidémiologiques s’accordent sur le fait que les patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique sont généralement plus âgés, plus souvent de sexe féminin et hypertendus, et moins souvent atteints de coronaropathie que ceux souffrant d’insuffisance cardiaque systolique (tableau 2) [17-23]. Le diabète et l’obésité sont également des facteurs de risque reconnus, mais de manière moins établie. Les études épidémiologiques, réalisées sur la base de critères et de définitions variables de l’insuffisance cardiaque diastolique et/ou de la dysfonction diastolique, estiment entre 13 et 74 % la prévalence de l’insuffisance cardiaque diastolique. Diverses raisons expliquent l’imprécision de cette estimation [23]. En premier lieu, la prévalence de l’insuffisance cardiaque diastolique varie avec l’âge et le sexe. Des biais de sélection sur la base de ces deux critères peuvent donc conduire à des différences d’estimation de la prévalence. En second lieu, l’estimation de la prévalence d’une maladie dépend de la définition que l’on en donne et des moyens que l’on met en œuvre pour établir le diagnostic. Le groupe d’étude de l’insuffisance cardiaque diastolique de la Société Européenne de Cardiologie propose de poser le diagnostic d’insuffisance cardiaque diastolique sur la base d’une triade associant Tableau 2. Comparaison des principales caractéristiques démographiques, cliniques et pronostiques de l’insuffisance cardiaque systolique et de l’insuffisance cardiaque diastolique Paramètre Démographique Âge moyen (années) Sexe (% de femmes) Hypertension artérielle (%) Coronaropathie Clinique Durée d’exercice Pression artérielle systolique Pression pulsée VO2 BNP/NT-pro-BNP Pronostique Morbidité Mortalité Insuffisance cardiaque systolique Insuffisance cardiaque diastolique ≈ 60 ≈ 35 ≈ 60 ≈ 85 ≈ 75 ≈ 65 ≈ 85 ≈ 45 ↓ → ou ↓ ↓ ↓ ↑↑ ↓ ↑ ↑ ↓ ↑ ↑↑ ↑↑ ↑↑ ↑ VO2 : pic de consommation en oxygène à l’effort ; BNP : peptide natriurétique de type B. des signes ou des symptômes d’insuffisance cardiaque, une fonction systolique ventriculaire gauche normale et des signes de dysfonction diastolique recueillis par échocardiographie ou par des méthodes invasives [24]. Un deuxième assortiment de critères permet de décliner le diagnostic de certitude en insuffisance cardiaque certaine, probable ou possible. Il s’agit du recueil invasif de paramètres hémodynamiques de dysfonction diastolique, de la durée du délai entre la mesure de la fraction d’éjection et l’apparition des signes d’insuffisance cardiaque et des caractéristiques cliniques des patients. Une revue récente des principales études épidémiologiques réalisées sur l’insuffisance cardiaque place sa prévalence entre 40 et 70 % des cas d’insuffisance cardiaque chronique [25]. Pronostic de l’insuffisance cardiaque diastolique Morbidité de l’insuffisance cardiaque diastolique Il est unanimement reconnu que la morbidité de l’insuffisance cardiaque diastolique est élevée [5, 26-28]. Le taux de réhospitalisation à un an atteint dans certaines études 50 % [29-31]. Ainsi, le coût économique de cette pathologie est considérable. L’étude CHARM-Preserved [32], qui a enrôlé 3 025 patients présentant des signes d’insuffisance cardiaque rapporte un taux d’admission hospitalière pour aggravation de l’insuffisance cardiaque de 18 % pour un suivi moyen de 3,5 années. Une élévation de la morbidité a également été rapportée chez les patients présentant une dysfonction diastolique sans syndrome clinique d’insuffisance cardiaque, y compris chez des sujets jeunes et en l’absence de coronaropathie documentée. En particulier, une étude mt cardio, vol. 3, n° 6, novembre-décembre 2007 413 Insuffisance cardiaque au moins partielle, des perturbations des conditions de charge et de la géométrie ventriculaire gauche liées à la dysfonction diastolique et indépendante d’une altération de la contractilité per se [15, 16]. Ainsi, pour établir de manière fiable si un patient souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique présente une anomalie de la fonction systolique, et dans quelle mesure cette dernière est impliquée dans l’expression clinique de la maladie, il est nécessaire de développer des indices d’analyse de la fonction systolique indépendants des conditions de charge et de remodelage. C’est en utilisant une approche de ce type que Zile et al. ont montré que des paramètres d’évaluation de la performance systolique (comme le travail d’éjection), de la fonction systolique (fraction d’éjection, travail d’éjection recrutable par la précharge), et de la contractilité (+dP/dt, élastance télésystolique du ventricule gauche) ne sont pas significativement différents chez des patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique et des sujets sains « témoins ». Ces premiers résultats plaident donc en faveur d’une implication à la marge des anomalies de la fonction systolique. Nosologie de l’insuffisance cardiaque diastolique Insuffisance cardiaque portant sur 51 patients âgés en moyenne de 55 ans et se présentant avec une dysfonction diastolique ventriculaire gauche, définie par une élévation de la pression télédiastolique du ventricule gauche sans syndrome clinique d’insuffisance cardiaque, montre que 45 % des sujets ont développé des symptômes d’insuffisance cardiaque lors d’un suivi de 5 ans et que 22 % ont dû être hospitalisés en raison de ces symptômes [33]. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017. Mortalité de l’insuffisance cardiaque diastolique La question de savoir si le pronostic de l’insuffisance cardiaque diastolique est différent de celui de l’insuffisance cardiaque systolique est toujours en débat. Si certaines études ne montrent pas de différence de pronostic vital entre les deux formes de la maladie, la plupart rapportent un meilleur pronostic de l’insuffisance cardiaque diastolique avec des différences parfois prononcées, et parfois minimes. D’une manière générale, on peut estimer que la mortalité des patients souffrant d’insuffisance cardiaque diastolique se situe entre 5 et 8 % par an, contre 10 à 15 % par an pour l’insuffisance cardiaque systolique [34, 20, 30, 31]. Il apparaît clairement que le mécanisme physiopathologique à l’origine de la maladie exerce une influence sur le pronostic vital. Comme pour ce qui concerne l’insuffisance cardiaque systolique, le pronostic de l’insuffisance cardiaque diastolique est lié à l’âge et à l’éventuelle existence d’une coronaropathie [21, 30, 33, 35-38]. Ainsi, des études excluant les patients atteints de coronaropathie rapportent une mortalité annuelle de 2 % seulement chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque diastolique [30]. La dysfonction diastolique sans syndrome clinique d’insuffisance cardiaque associé est également une condition pathologique engendrant une surmortalité. Dans l’étude de Redfield et al. [29], la présence d’une dysfonction diastolique augmente le risque de mortalité toutes causes d’un facteur 8 à 10. Indicateurs pronostiques dans l’insuffisance cardiaque diastolique Indicateurs cliniques L’étude de O’Connor et al. [38] qui a suivi une population de patients se présentant avec une insuffisance cardiaque de stade II-IV de la NYHA et une fraction d’éjection ventriculaire gauche > 40 % a pu identifier quelques indicateurs indépendants de mortalité. Ainsi, un âge avancé, des symptômes de classe IV de la NYHA, et l’existence d’une coronaropathie ou d’un diabète étaient associés à une augmentation de la mortalité. Le Digitalis Investigation Group Trial [39], qui a suivi 988 patients souffrant d’insuffisance cardiaque avec une fraction d’éjection > 45 % décrit comme principaux indicateurs d’une mortalité accrue l’insuffisance rénale, des symptômes de classe III ou IV de la NYHA, le sexe masculin et l’âge. 414 Paramètres échocardiographiques La Cardiovascular Health Study a suivi de manière prospective 2 671 patients ne présentant ni signe clinique d’insuffisance cardiaque, ni fibrillation auriculaire, ni signe de maladie coronaire. Au cours d’une période de suivi de 5 ans, 6,4 % de ces patients ont présenté des signes d’insuffisance cardiaque chronique. Quatre-vingtseize pour cent d’entre eux avaient une fraction d’éjection ventriculaire gauche normale à l’inclusion, et 57 % conservaient une fraction d’éjection ventriculaire gauche normale lors de l’apparition de l’insuffisance cardiaque. Les paramètres prédictifs d’insuffisance cardiaque retrouvés étaient une masse ventriculaire gauche élevée, une réduction de la fraction de raccourcissement, et des valeurs extrêmes, < 0,7 ou > 1,5, du rapport E/A sur le flux transmitral [34]. Conclusion L’insuffisance cardiaque diastolique est une pathologie fréquente et invalidante qu’il n’est pas possible de différencier de l’insuffisance cardiaque systolique sur la base de simples critères cliniques. Elle touche davantage de femmes et de personnes âgées et est incontestablement favorisée par l’hypertension artérielle. Sa mortalité élevée et sa morbidité, comparable à celle de l’insuffisance cardiaque systolique, en font un véritable problème de santé publique. Son identification et sa prise en charge nécessitent une estimation précise de la fonction cardiaque pour laquelle l’examen écho-Doppler occupe une place centrale. Références 1. Konstam MA, Mann DL. Contemporary medical options for treating patients with heart failure. Circulation 2002 ; 105 : 2244-6. 2. Konstam MA, Udelson JE, Anand IS, Cohn JN. Ventricular remodeling in heart failure : a credible surrogate endpoint. J Card Fail 2003 ; 9 : 350-3. 3. Baicu CF, Zile MR, Aurigemma GP, Gaasch WH. Left ventricular systolic performance, function, and contractility in patients with diastolic heart failure. Circulation 2005 ; 111 : 2306-12. 4. Zile MR, Baicu CF, Gaasch WH. Diastolic heart failure-abnormalities in active relaxation and passive stiffness of the left ventricle. N Engl J Med 2004 ; 350 : 1953-9. 5. Zile MR, Gaasch WH, Carroll JD, et al. Heart failure with a normal ejection fraction : is measurement of diastolic function necessary to make the diagnosis of diastolic heart failure? 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