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Place de la TEP-TDM au 18-FDG dans les cancers
du sein et ORL
Interest about TEP-TDM with 18 FDG in breast cancer
and head and neck cancer
● Patricia Amsalhem*
D’après les VIIes Biennales monégasques de cancérologie
➣ Orateurs : Pr O. Mundler (service de médecine nucléaire, Centre hospitalo-universitaire de la Timone, Marseille)
et Dr M. Vergé (service de médecine nucléaire, Centre hospitalier Princesse-Grace, Monaco).
a tomographie à émission de positon (TEP) au 18 fluorodésoxyglucose est, on le sait, reconnue de plus en plus performante dans le bilan des cancers, aussi bien pour étudier
l’extension que pour le suivi ou encore la recherche d’un primitif.
Elle complète le scanner (TDM) souvent insuffisant. La TEP-TDM
est l’association de ces deux techniques de haute performance intégrant donc, à la fois, l’imagerie fonctionnelle et l’imagerie morphologique pour de meilleurs résultats. Le Dr M. Vergé du service
de médecine nucléaire au centre hospitalier Princesse-Grâce à
Monaco et le Pr O. Mundler du service de médecine nucléaire au
centre hospitalo-universitaire de la Timone nous résument son application respectivement dans les cancers du sein et les cancers ORL.
Les cellules tumorales se caractérisent par une hyperconsommation de glucose. Le 18 fluorodésoxyglucose (18-FDG) est un analogue du glucose. Phosphorylé en position 6 et porteur d’une
charge négative, il s’accumule dans la cellule sans pouvoir traverser la membrane ni subir de dégradation et en sort finalement
seulement grâce à une déphosphorylation. Cette réaction enzymatique étant quasi inexistante dans les cellules tumorales, le traceur 18-FDG s’accumule ainsi dans la plupart des tumeurs, entraînant une fixation plus ou moins intense. Il existe des fixations
physiologiques dans les cellules cérébrales, musculaires, fortes
consommatrices de glucose, mais aussi dans les cellules des voies
excrétrices où il s’élimine (pyélons, calices, uretères, vessie). Il
existe également des fixations pathologiques non tumorales par
les cellules sièges d’une inflammation (sarcoïdose, réaction postradiothérapie) ou d’une infection (tuberculose, cicatrices infectées). Cependant, a contrario, certaines cellules tumorales peuvent ne pas fixer le FDG : certains types histologiques, ou après
une chimiothérapie par sidération de la concentration cellulaire
du 18-FDG (images faussement négatives), ou si la masse tumo-
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* Service de médecine interne, unité de cancérologie, centre hospitalier intercommunal de Meulan-les Mureaux.
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rale est de trop petite taille, ou encore si la glycémie du patient
est haute par compétition entre le glucose et le FDG.
DANS LES CANCERS DU SEIN
Il n’existe, selon les standards, options et recommandations (SOR),
aucune indication standard, mais au regard des publications et d’une
certaine expérience, certaines tendances se dégagent.
Au stade initial de la maladie
En effet, pour le diagnostic tumoral, sa sensibilité diffère selon
le type histologique : elle est meilleure pour les cancers ductulaires que pour les cancers lobulaires, selon la taille où sa sensibilité est d’environ 57 % si elle est inférieure à 1 cm, et de 91 %
si elle est supérieure à 1 cm. La mammographie et l’IRM ont de
meilleures performances pour des lésions de petite taille (microcalcifications) et peu agressives, découvertes par le dépistage.
Mais pour les lésions TxN1 ou lorsque le T est supérieur à 2 cm,
la TEP-TDM recherche un cancer multifocal ou controlatéral
(figure 1).
Figure 1. Cancer du sein bifocal.
La Lettre du Cancérologue - Volume XV - n° 2 - mars-avril 2006
Dans le bilan d’extension ganglionnaire, selon R.L. Whal et al.
(J Clin Oncol 2004), T. Zornoza et al. (Eur J Surg Oncol 2004),
E. Baranger et al. (Ann Surg Oncol 2003), la sensibilité atteint
respectivement 61 %, 84 % et 20 % et la spécificité 80 %, 97 %
et 100 %. Cependant, la TEP est moins sensible que le ganglion
sentinelle qui reste la technique de référence à la recherche de
micrométastases. Mais elle a son intérêt pour les ganglions axillaires et la chaîne mammaire interne (selon Zornoza) ou encore
pour les ganglions périclaviculaires ou médiastinaux. Pour les
tumeurs invasives TxN1 ou T supérieures à 2 cm, la TEP-TDM
explore en un seul examen toutes les chaînes ganglionnaires et
aide au choix des traitements adjuvants : radiothérapie des aires
sus-claviculaires ou mammaires internes et/ou chimiothérapie.
Cependant, la résolution de la TEP-TDM n’est pas suffisante pour
répondre à la question du nombre de métastases ganglionnaires
ou la présence d’une effraction capsulaire. Dans le cas du bilan
d’extension métastatique, la TEP-TDM montre une bien
meilleure sensibilité que la TDM-IRM pour les métastases ganglionnaires, osseuses ou encore hépatiques (tableau I, figure 2).
Son intérêt réside en la réalisation d’une seule exploration du
corps entier. La TEP au 18-FDG est meilleure que la scintigraphie osseuse pour détecter les métastases osseuses ostéolytiques
et la TDM peut aussi détecter les zones d’ostéocondensation
Tableau I. TDM-IRM versus TEP-TDM dans le bilan d’extension
métastatique du cancer du sein.
TDM-IRM
Site tumoral
Sensibilité
(%)
Spécificité
(%)
TEP-TDM
Sensibilité
(%)
Spécificité
(%)
Atteinte locale
93
98
80
96
Adénopathies
74
95
97
91
Os
46
98
100
98
Poumons
83
96
83
97
Foie
50
95
100
97
D’après H. Bender et al. Anticancer Research 1997;17:1687-92.
Figure 2. Adénopathies axillaires, médiastinales et métastases osseuses.
La Lettre du Cancérologue - Volume XV - n° 2 - mars-avril 2006
fixant très faiblement le FDG. Le parenchyme pulmonaire est
étudié dans le même temps en TDM. Pour les tumeurs invasives
TxN1 ou T supérieures à 2 cm, le bilan d’extension à distance est
plus efficace que par l’imagerie standard.
Évaluation de la maladie tumorale
Le TEP-FDG trouve aussi sa place. La question posée est celle
de l’efficacité du traitement en cours, puis de la maladie résiduelle en fin de traitement (figure 3).
Avant
Après
4 cures
Figure 3. Cancer du sein disséminé : réponse à la chimiothérapie.
Le SUV (standardized uptake value) diminue significativement
après la première cure de chimiothérapie et cette diminution de
fixation du FDG anticipe la réduction morphologique. Il existe
des délais à respecter pour sa réalisation : d’un mois après une
chimiothérapie en raison de la sidération, de quatre mois après
une radiothérapie en raison d’une fixation faussement positive
des tissus irradiés en poussées inflammatoires réactionnelles, et
parfois plus après une chirurgie. La TEP-TDM peut modifier
l’attitude thérapeutique initialement programmée dans environ
30 % des cas. Mais il faut signaler qu’il existe après une chimiothérapie des petites séries d’études et aucune après une radiothérapie ou une hormonothérapie. Aussi, selon les SOR, les indications restent à confirmer dans ce domaine.
La recherche des récidives
Selon les SOR, la TEP-TDM est une option dans la recherche
des récidives. M. Suarez et al., en 2002, ont trouvé chez
38 patients dont la TEP-TDM a été associée au dosage sérique
des marqueurs, une sensibilité de 92 %, une spécificité de 75 %
et une valeur prédictive positive(VPP) de 82 %. Elle permet la
recherche de métastases à distance grâce à la synthèse : récidive
locale + signes cliniques ayant entraîné un bilan + anomalies biologiques et/ou radiologiques lors des bilans. La TEP-TDM détecte
un plus grand nombre de métastases que les bilans d’imagerie
conventionnelle classique lors de l’élévation inexpliquée du CA15-3. Enfin, la TEP-TDM permet l’étude d’une zone plus étendue et donc la mise en évidence de métastases non suspectées ou
de récidives locales passées inaperçues, mais aussi de cancers
associés ou de récidives de cancers antérieurs. Cependant, la plupart des études sont faites en TEP seule. Dans l’étude réalisée au
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centre hospitalier Princesse-Grace entre le 1er janvier 2002 et le
31 décembre 2004, sur 260 patientes âgées de 28 à 93 ans venues
passer une TEP-TDM pour un cancer du sein, 43 présentaient au
moins un autre cancer (2 en associaient 2 et 1 en associait 3) et
7 d’entre eux ont été découverts fortuitement.
La TEP-TDM présente donc des avantages vis-à-vis de l’imagerie traditionnelle, car elle associe une imagerie fonctionnelle et
morphologique et permet une étendue de la zone étudiée qui ne
préjuge pas du site lésionnel. Enfin, l’utilisation d’un traceur généraliste comme le 18-FDG permet la visualisation, outre des localisations secondaires, d’éventuelles récidives d’un autre cancer
préexistant ou parfois le diagnostic d’un autre cancer méconnu.
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La TEP-TDM a un intérêt tout particulier pour la recherche de
carcinome de site primitif inconnu (CUPS) en particulier devant
une adénopathie cervicale isolée qui révèle 2 % des cancers ORL
(figure 5).
DANS LES CANCERS ÉPIDERMOÏDES ORL
Les cancers des VADS (voies aérodigestives supérieures) sont la
troisième cause de décès par cancer en France et 60 % sont diagnostiqués à un stade avancé. L’atteinte ganglionnaire joue un rôle
fondamental dans l’évaluation pronostique, et la sous-estimation de
l’extension au bilan initial est en partie responsable de mauvais pronostic. Dans plus de 40 % des cas, les adénopathies métastatiques
sont inférieures à 1 cm. Dans plus de 10 % des cas, les patients ont
une autre tumeur associée.
La TEP-TDM peut donc avoir sa place dans le bilan initial pour
détecter des petites adénopathies, des métastases (figure 4) et
aussi un second cancer où sa puissance est alors 4 fois supérieure
aux autres techniques (tableau II).
Figure 5. Patient âgé de 50 ans. Diagnostic de carcinome épidermoïde
sur adénopathie cervicale gauche TDM initial négatif. Recherche de la
tumeur primitive.
En effet, les explorations conventionnelles découvrent environ
25 % des primitifs. La TEP-TDM augmenterait de 20 à 25 % la
découverte de ces primitifs.
TEP Timone ORL 2004
180
160
140
120
100
TEP
80
60
40
20
0
N
positif
ORL
167
87
Cavité
buccale
96
49
Larynx
Divers
35
20
36
17
Cavum
et massif
facial
Figure 6. Hôpital de la Timone. Patients 2004.
Figure 4. Patient âgé de
60 ans adressé pour un bilan
initial d’extension d’un carcinome de la base de la
langue.
Tableau II. Stadification N.
Méthode
Sensibilité (%)
Spécificité (%)
Examen clinique
60-75
75-85
TDM
66-85
47-96
IRM
64-88
41-69
TEP-FDG
87-90
80-93
E. Kresnik, Eur J Nucl Med 2001 ; T. Stuckensen, J Craniomaxillofac Surg 2000, E. Di Martino, Arch
Otolaryngol Head Neck Surg 2000 ; M.P. Stokkel, Ann Surg 2000 ; S. Adams, Eur J Nucl Med 1998 ;
R.J. Kau, Arch Otolaryngol Head Neck Surg 1999 ; A. Hannah, Ann Surg 2002.
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La TEP-TDM a sa place dans le suivi post-thérapeutique avec
une plus grande sensibilité pour détecter les petites lésions (90 %)
et une plus grande spécificité pour apprécier une cicatrice ou une
récidive. Par ailleurs, cet examen du corps entier permet la détection des métastases et la découverte d’un second cancer proche
de 30 % dans les années qui suivent. Mais il y a des causes de
faux positifs entraînées par les infections (mauvais état dentaire,
hygiène, etc.), les adénopathies en partie nécrosées (très souvent
supracentimétriques), les adénopathies très proches ou de taille
inférieure à 1 cm, les réactions post-thérapeutiques dont les délais
sont très controversés.
Les indications de la TEP-TDM résident dans le bilan d’extension, le diagnostic devant une adénopathie métastatique cervicale isolée et le suivi thérapeutique en cas de suspicion de persistance tumorale ou de récidive.
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La Lettre du Cancérologue - Volume XV - n° 2 - mars-avril 2006
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