Pathologie cervicale et HPV Prévention, dépistage, diagnostic et suivi Pr Cécile Badoual Service d’ anatomo-pathologie Hôpital Européen G Pompidou Données épidémiologiques • Le cancer invasif du col est le 2ème cancer féminin à l'échelle mondiale. • Human Papillomavirus (HPV) • Incidence : – 4/100.000 en Finlande à 48/100.000 en Colombie – en France, 9,5 /100.000, chez les femmes avant 40 ans et mortalité de 3,5/100 000. – 500 000 nouveaux cas /an : 270 000 décès/an (tiers monde) • Saignement en dehors des règles, rapports vaginaux, écoulements vaginaux, douleur tardive • Dépistage : diminution de mortalité (50%) • Examen clinique – examen au spéculum et toucher vaginal (extension vagin, parois latérales, paramètres) : tumeur évidente – ou colposcopie pour biopsie • Radiologie pour apprécier le volume – Échographie, IRM, Pet scan, scanner HPV et clinique • Un des virus les plus transmis par voie sexuelle à travers le monde. • Peut être transmis par simple contact cutané ou muqueux • Très forte incidence de l’infection à HPV dans le monde (660 millions de personnes infectées dans le monde). • Impliqué dans la survenue de lésion bénignes (verrues…) ou de cancers • Environ 550.000 nx cas / an de cancer HPV dépendant dans le monde HPV et cancer • Prévalence augmentée dans les pays en voie de développement et à niveau socio-économique bas • HPV est responsable de 5% des cancers : cancers du col de l’utérus (++), cancer de la vulve et du vagin, cancer de l’anus (en augmentation chez les sujets immunodéprimés) mais aussi dans d’autres localisations : pénis, ORL, poumon, vessie… Structure générale des HPV • Génome constitué d’une molécule circulaire d’ADN double brin • De 7200 à 8000 paires de bases • Organisation génomique commune: • Trois cadres de lecture utilisés • Une dizaine de phases ouvertes de lecture • Groupées en : – une région E (early) codant pour des protéines non structurales – Une région L (late) codant pour les protéines de capside ROLE DU PAPILLOMAVIRUS L1 : Protéine d’enveloppe qui permet l’internalisation du virus. Cible des vaccins prophylactiques contre HPV E6 et E7 impliquées dans la carcinogénèse. Indispensable à l’immortalisation de la cellule Cible des vaccins thérapeutiques lorsque le virus a déjà infecté la personne Virus à ADN comportant plus de 120 sous types dont certaines à haut risque oncogénique : 16++, 18+, 45, 31, 33, 52, 58, 35 Histoire naturelle de l’infection à HPV Le virus infecte les kératinocytes de la couche basale de l’épiderme. Les particules virales s’assemblent au niveau des couches superficielles de l’épiderme. Pas ou peu de cytolyse et d’effet cytopathogène N Egawa, Viruses 2015, 7(7), 3863-3890 Crow, Nature 2012 Crow, Nature 2012 HPV et cancer aux USA 2004-2007 Aspect histologique général Coupe sagittale Versant endocervical glandulaire Lèvre postérieure Lèvre antérieure Versant exocervical Jonction squamo-cylindrique malpighien Rappel histologique a) L'endocol : bordé de cellules cylindriques hautes mucosécrétantes b) L'exocol : Tapissé par un épithélium malpighien non kératinisé. c) La zone d'affrontement/ transition - C'est à ce niveau que vont se dérouler le plus souvent les processus: de métaplasie de dysplasie de transformation carcinome. Jonction pavimento-cylindrique exocol endocol Glande endocervicale Le trépied cyto-colpo-histologique • Le diagnostic des lésions précancéreuses du col revient encore au trépied cyto-colpo-histologique. • Pour les femmes à risque, ces techniques permettent : – d'ébaucher le pronostic, – de préciser le diagnostic, – d'affiner nos conduites thérapeutiques. Frottis cervico-utérin Technique conventionnelle Coloration de Papanicolaou Coloration de Papanicolaou Technique en milieu liquide Cellules malpighiennes des différentes couches : au centre, quelques cellules de type basal et parabasal ; autour, cellules intermédiaires et superficielles ; polynucléaires sur le fond Koïlocytes (CIN1) Effet cytopathogène de l’HPV koïlocyte • noyau augmenté de volume très foncé en « tache d’encre » • halo clair périnucléaire à bord ourlé en coquille d’huître • binucléation possible Lésions précancéreuses épidermoïdes ou malpighiennes • Développement du cancer en différentes étapes : lésion précancéreuse vers cancer in situ. • Pour chaque grade de lésion cervicale précancéreuse (CIN1, CIN2 ou CIN3) : probabilité de régression, probabilité de persistance ou de progression vers un stade plus avancé. • Dysplasie légère: entre 10 et 20 ans avant cancer invasif • 60 % ou + des dysplasies légères régressent spontanément • 10 % évoluent vers une dysplasie modérée ou sévère dans les 2 -4 ans • Dysplasies modérées ou sévères peuvent apparaître sans passer stade décelable de dysplasie légère. • Dysplasies sévères ont forte probabilité d’évolution vers un cancer invasif mais moins de 50 % des cas évoluent vers cancer invasif (encore - chez les jeunes femmes) • Lésions précancéreuse glandulaires : L’histoire naturelle de l’adénocarcinome peu connue.. Lésions précancéreuses glandulaires rares et plus difficiles à dépister par la cytologie. Classification de Bethesda -Des frottis " ASC-US " correspondant à des atypies mineures ou mal définies ; - des frottis " ASC-H " où les atypies n'excluent pas une lésion de haut grade ; - des lésions intra-épithéliales LSIL ou de " bas grade ", ou dysplasies légères ; - des lésions de " haut grade " HSIL, ou dysplasies moyennes à sévères ; - des frottis " AGC " suspectant une lésion glandulaire. OMS 2014 Conduite à tenir devant un FCU anormal Recommandations ANAES 2002 Dr Beatrix Cochand-Priollet Conduite diagnostique en cas de frottis avec lésion malpighienne intra-épithéliale de bas grade (LSIL) LSIL Option 2 Option 1 Cytologie de contrôle à 6 mois Positive ColposcopieBiopsie Négative Colposcopie après traitement oestrogénique Négative Cytologie de contrôle à 12 mois Conduite en cas de frottis avec lésion malpighienne intra-épithéliale de haut grade (HSIL) HSIL ColposcopieBiopsie N Cytologie de contrôle à 12 mois P Laser, cryo. (exocervicale, petite, compliance, désir de g) P Conisation Prise en charge des atypies des cellules malpighiennes (ASC) ASC-US Recherche HPV oncogènes Cytologie x2 à 6 mois et 1 an Positive ASC-H Colposcopie Biopsie FP Surtraitement • Recommandations INCa 2016 Littérature actualisée Avis « d’experts » Dr Beatrix Cochand-Priollet Sept points clefs sur l'utilisation du test HPV - Comprendre l'histoire naturelle de l'infection à HPV et être en mesure de conseiller clairement les patientes avant l'utilisation du test. - Rassurer les sujets HPV positifs pour lesquels il n'est pas possible de dire précisément quand ils ont été infectés. - La présence d'HPV à risque ne signifie pas lésion de CIN ou cancer. - Ne rechercher que les HPV à risque. - Le génotypage permettra d'évaluer la persistance virale au-delà de 12 à 18 mois. - Ne pas utiliser le test HPV en dépistage primaire avant 30 ans, après frottis HSIL, AGC, ASC-H ou cancer. - Aucun traitement ne doit être entrepris sur le seul critère de la présence des HPVHR. ANAES / Service des recommandations professionnelles et service évaluation économique / Septembre 2002 Pièce opératoire : conisation Pièce orientée Fil à midi Lèvre antérieure Lèvre postérieure Pièce opératoire de conisation - macroscopie Les carcinomes in situ (CIN3) . 1) Les critères cytologiques. 2) Les critères architecturaux. 3) Rapport de l'épithélium avec le conjonctif. 4) Les glandes endocervicales Binucléation Koïlocyte Carcinome épidermoïde invasif 80% des cancers du col Age moyen 55 ans mais dans 30% des cas: < 35 ans Adénocarcinome de l’endocol • Fréquence en augmentation 4-5% à 9-17% en 20 ans • 40 ans pour le cancer intra épithélial • 57-65 ans pour le cancer invasif • 18 à 23 ans : passage du cancer in situ au cancer invasif • Dans 33 à 50% des cas, il est associé à un CIN (SIL) • Conisation large, exérèse passant au moins à 5 mm du cancer in situ Prévention • La pratique généralisée des frottis cervico-vaginaux : dépistage précoce et efficace des lésions pré-cancéreuses. • Un frottis préconisé une fois tous les trois ans pour les femmes âgées de 25 à 65 ans. • Depuis 2004, le test de papillomavirus, à l'origine de la plupart de ces cancers, est remboursé en cas de frottis incertain. • Vaccin contre ces papillomavirus humains (HPV). Stratégie de prévention en place depuis 2013 en France via une vaccination antiHPV. • La vaccination contre certains HPV responsables de 70% des cancers du col de l’utérus doit être complétée à partir de 25 ans par le frottis. • Le dépistage par frottis reste ensuite indispensable pour toutes, vaccinées ou non. Vaccination prophylactique anti-HPV pourrait réduire à terme la fréquence de ces cancers Vaccin VLP-L1 (pseudoparticules virales : assemblage de protéines de capside du virus) Vaccin Gardasil (VLP-L1 HPV16, 18, 6 et 11) Vaccin Cervarix (VLP-L1 HPV16 et 18) Nonavalent Le comité technique de vaccination n’a recommandé cette vaccination que pour les filles à l’âge de 14 ans. En raison de ces cancers des VADS associés à HPV, ils ont été également étendus à la vaccination des garçons (USA, Canada). Vers un vaccin thérapeutique anti-HPV ? Rationnel de développement d’un vaccin thérapeutique anti-HPV : - Le vaccin prophylactique coûte cher et la couverture vaccinale est faible - 600 millions de personnes sont déjà infectées contre HPV dans le monde et les vaccins prophylactiques ne sont pas efficaces en cas d’infections pré-existantes contre HPV. L1 Ab Les vaccins préventifs cherchent à induire des Ac ontre la protéine de capside L1 pour empêcher l’entrée du virus dans la T cell Les vaccins thérapeutiques cherchent à induire des LT cytotoxiques contre les proteines virales E6 et E7 exprimées par les cellules transformées. Similarités et differences entre les données épidemiologiques des cancers du col et de l’oropharynx Cervical cancer Oropharyngeal cancer Etiology Oncogenic HPV infection only with or without contravening factors Multifactorial: tobacco, alcohol, HPV (among others) Cases worldwide (2008) 530,000 85,000 Evidence for HPV role Large, robust, diverse Less strong and consistent Etiological HPV fraction 100% 26% Trends Decreasing in most, but not all, countries Sharp increase in US and some NorthEuropean countries Geographical variability in HPV DNA detection None Substantial (4-fold): (North America: 56%; Japan: 52%; Australia: 45%; Northern & Western Europe: 39%; Eastern Europe: 38%; Southern Europe: 17%; rest of world: 13%) Evidence for typespecific carcinogenicity For all high-risk types (16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56, 58, 59) Only for HPV 16 Gillison ML, et al. Int J Cancer 2014;134:497–507 Chaturvedi, JCO, 2011