COURS DE LICENCE STRUCTURES ALG´EBRIQUES 2007/8 5

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COURS DE LICENCE STRUCTURES ALGÉBRIQUES
2007/8
5. Groupes opérant sur un ensemble
On essaie d’écrire une “multiplication” d’un groupe G sur un ensemble X , g ◦ x qui contient les idées décrit ci–dessous.
Définition 5.1. Soit G un groupe, X un ensemble, S(X) le groupe des
bijections de X. On dit que G opère sur l’ensemble X ou G agit sur
l’ensemble X s’il existe un homomorphisme f : G → S(X).
C’est à dire, à tout élément g ∈ G on associe f (g) = fg : X → X,
une application bijective, vérifiant les conditions suivantes:
(i) pour tout x ∈ X, et pour tout g, g 0 ∈ G, on a fgg0 (x) = fg (fg0 (x));
(ii) pour tout x ∈ X, on a fe (x) = x.
Noter qu’on peut déduire que, pour tout x, y ∈ X et pour tout g ∈ G
on a fg (x) = y ⇐⇒ fg−1 (y) = x.
On dit l’action de G sur X est fidèle si l’unique élément g ∈ G tel
que pour tout x ∈ X on a g.x = x, est l’élément neutre de G. L’action
est dite transitive (respectivement simplement transitive) si pour tout
x, y ∈ X il existe un élément (resp. un unique élément) g ∈ G tel que
g.x = y.
On écrira également g · x pour fg (x) — alors,
(i) pour tout x ∈ X, et pour tout g, g 0 ∈ G, on a (gg 0 ) · x = g · (g 0 · x);
(ii) pour tout x ∈ X, on a e · x = x.
La condition fg (x) = y ⇐⇒ fg−1 (y) = x devient g · x = y ⇐⇒
−1
g · y = x.
exemple
(0) L’action triviale: tout groupe G agit trivialement sur tout ensemble X en faisant correspondre à tout élément g ∈ G l’application
identité sur X.
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cos θ − sin θ
(1) Le groupe SO(2) = {
} agit (simplement) transin θ cos θ
sitivement sur le cercle S 1 ⊂ R2 (car ce groupe contient exactement les
rotations autour de l’origine).
(2) Soit E n l’espace vectoriel euclidien Rn ; ceci est d’abord un groupe
abélien. En tant que groupe abélien, il agit transitivement sur Rn par
t~a (x) = x + ~a.
(3) On a souvent parlé du groupe S3 qui est le groupe d’isométrie d’un
triangle équilatéral. Ce groupe “opère sur l’ensemble à trois éléments
{1, 2, 3}”. L’élément neutre ne change rien et si on fait la permutation
qui correspond à l’élément a, suivi de la permutation qui correspond à
a−1 , le triangle n’a pas bougé.
a b
(4) Chaque élément du groupe Gl2 (R) = {
| a, b, c, d ∈
c d
R, ad − bc 6=0} définit
un automorphisme du plan vectoriel R × R.
1 0
La matrice
correspond à l’identité. Cette action n’est pas
0 1
transitive sur R2 , mais l’est sur R2 − {(0, 0)}
Noter qu’un groupe peut avoir beaucoup d’actions sur un seul ensemble.
Proposition 5.2. Soit G un groupe qui agit sur X.
a) La relation binaire R sur X définie par
xRy ⇐⇒ il existe g ∈ G t.q. y = g · x
est une relation d’équivalence.
b) Il en suit que X est la réunion disjointe des orbites, c’est à dire
X = O1 ∪ O2 ∪ . . . et CardX = CardO1 + CardO2 + . . . .
Demonstration. Utilisant (ii) on a xRx; par (ii) on a xRy ⇐⇒ ∃g, g ·
x = y ⇐⇒ g −1 · y = x ⇐⇒ yRx; et la transitivité est garantie par
(i).
Définition 5.3. Les classes d’équivalence s’appellent les orbites ou
classes de transitivité de l’action de G sur X.
S’il n’y a qu’une seule orbite, on dit que G agit transitivement sur X.
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exemple
(1) Sur les sommets du triangle équilatéral, le groupe S3 agit transitivement. C’est à dire, il n’y a qu’une seule orbite.
(2) Le groupe Gl2 (R) agit transitivement sur R × R − {(0, 0)}.
(3) L’orbite de l’action de Z sur R (définie par n · r = r + n) d’un point
r ∈ R est l’ensemble {r + n | n ∈ Z}.
(4) Le groupe Sn : Le groupe Sn de toutes les permutations de
l’ensemble Xn = {1, 2, . . . , n} agit transitivement. Pour a ∈ Sn , le
sous–groupe cyclique hai agit sur Xn .
Par exemple dans S3 , l’élément (123) qui dénote la permutation qui
envoie 1 → 2, 2 → 3, 3 → 1 est un élément d’ordre 3 dans le groupe S3 ,
et le sous–groupe engendré agit transitivement. L’élément b = (12) qui
envoie 1 → 2, 2 → 1, 3 → 3 est un élément d’ordre 2, et une orbite est
{1, 2}, et l’autre est {3}.
(5) Le groupe G opère sur lui–même: c’est à dire on prend pour ensemble X l’ensemble des éléments de G, sur lequel le groupe G agit
(a) par conjugaison (ou automorphisme intérieur)
Pour chaque élément de G, il y a l’automorphisme intérieure
φg : G → G définie par φg (h) = ghg −1 pour tout h ∈ G, qui
s’appelle conjugaison par g. Alors l’application G → Aut(G)
(Aut(G) ⊂ S(G)) ainsi défini donne une action de G sur lui–
même. En générale cette action n’est pas transitive: par exemple
si g ∈ G et G est commutatif (ou g ∈ Z(G)) on a φg = IdG .
Les orbites ici s’appellent les classes de conjugaison de G.
(b) par translation à gauche
La multiplication dans G donne une action de G sur lui–même. Pour
chaque g ∈ G, on a une bijection h → gh pour tout h ∈ G. Cette application n’est pas en général un automorphisme (sauf si g est l’élément
neutre), mais elle est bijective, et elle satisfait les conditions (i) et (ii).
Cette action est transitive.
Dans cette dernière action, si g, g 0 ∈ G, et g 6= g 0 , appartiennent à
G, la multiplication sont deux éléments distincts, on a la propriété que
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la bijection qui correspond à multiplication à gauche par g est différent
de la multiplication à multiplication à gauche par g 0 car en particulier
g = g · e 6= g 0 · e = g 0 .
Donc:
Proposition 5.4. L’opération de G sur lui–même par translation à
gauche est un homomorphisme injectif de G dans S(G) (le groupe de
permutations de l’ensemble G).
Corollaire 5.5. Théorème de Cayley
Tout groupe fini d’ordre n est un sous–groupe de Sn .
Définition 5.6. Soit G un groupe qui agit sur l’ensemble X. Le stabilisateur d’un élément x ∈ X est la collection d’éléments de G qui fixent
x, Fx = {g ∈ G | g · x = x}.
Pour un sous–ensemble A ⊂ X, on a le stabilisateur de A est la
collection d’éléments de G qui fixent A comme ensemble, c’est à dire
FA = {g ∈ G | g · A = A} (on ne suppose pas que g · a = a pour tout
a ∈ A).
exemple
(1) Pour l’action de S3 sur le triangle équilatéral, le stabilisateur du
sommet 1 est le sous–groupe d’ordre 2 engendré par la transposition
qui fixe 1 et échange 2 et 3.
En fait, si x ∈ {1, 2, . . . , n} alors Fx est un sous–groupe de Sn isomorphe à Sn−1 .
(2) Quand on considère l’action de G sur lui–même par conjugaison, le
stabilisateur FA est le normalisateur de A, NA = {g ∈ G | gAg −1 = A}.
Il est claire que e ∈ FA toujours. Une minute de réflexion suffit pour
démontrer:
Proposition 5.7. Soit G un groupe qui agit sur X.
(i) Pour x ∈ X, son stabilisateur Fx est un sous–groupe de G.
(ii) Pour ∅ =
6 A ⊂ X, son stabilisateur FA est un sous–groupe de G.
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Proposition 5.8. Soit X un ensemble, et G un groupe qui agit sur
X. Soit x ∈ X un élément , avec stabilisateur Fx et orbite Ox . Soit
y ∈ Ox , g ∈ G tel que y = g · x.
(i) L’ensemble des éléments g 0 ∈ G t.q. g 0 ·x = y est la classe latérale
gFx = {g 0 ∈ G | g 0 = gh, h ∈ Fx };
(ii) Fy = gFx g −1 ;
(iii) CardOx = [G : Fx ] (= CardG/CardFx quand CardG est fini).
Demonstration. (i) Si g · x = y = g 0 · x, alors on a (g −1 g 0 ) · x = x ⇐⇒
g −1 g 0 ∈ Fx ⇐⇒ g 0 ∈ gFx .
(ii) Si y = g · x, alors h · x = x ⇐⇒ hg −1 · (g · x) = x ⇐⇒
(ghg −1 ) · (g · x) = g · x ⇐⇒ ghg −1 · y = y.
(iii) On définit une application surjective Φ : G → Ox définie par
g → g · x. Cette application correspond à une relation d’équivalence R
définie sur G par:
gRg 0 ⇐⇒ g · x = g 0 · x ⇐⇒ (g 0−1 g) · x = x ⇐⇒ g 0−1 g ∈ Fx .
Elle est donc associé à un sous–groupe Fx de G, et on a G → G/R →
Ox , où la deuxième application est une bijection. Il est claire que
CardG/R = CardG/CardFx = CardOx = [G : Fx ].
Corollaire 5.9. Si G est un groupe fini qui agit sur l’ensemble X, on
a CardFx divise CardG et CardOx divise CardG.
exemple Le cube est un solide régulier avec 6 faces carrées, 8 sommets,
et 12 arêtes. Considérer le groupe G de symétrie du cube (ceux qui
préservent l’orientation).
(i) Il y a 6 faces, et G agit transitivement sur l’ensemble des faces. Si
P est une face, il y a une rotation d’ordre 4 qui le préserve comme ensemble — c’est à dire CardFP = 4. Alors CardG = CardFP CardOP =
24.
(ii) Il y a 8 sommets, et G agit transitivement sur l’ensemble des
sommets. Si v est un sommet, alors il y a une rotation d’ordre 3 qui le
fixe: CardFv = 3. Alors CardG = CardFv CardOv = 24.
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(iii) Il y a 12 arêtes et G agit transitivement sur l’ensemble des arêtes.
Si a est une arête, alors il n’y a que une rotation d’ordre 2 qui le fixe
(comme ensemble: CardFa = 2. Alors CardG = CardFa CardOa = 24.
Le dodécaèdre est un solide régulier avec 12 faces pentagonales, 20
sommets, et 30 arêtes.
Question: Est–ce que ce groupe est isomorphe à S4 ?
Considérer le groupe de symétrie du dodécaèdre qui préserve
l’orientation.
(i) Il y a 12 faces, et G agit transitivement sur l’ensemble des faces.
Si P est une face (P est un pentagone régulier), et il y a une rotation
d’ordre 5 qui le préserve comme ensemble — c’est à dire CardFP = 5.
Alors CardG = CardFP CardOP = 60.
(ii) Il y a 20 sommets, et G agit transitivement sur l’ensemble des
sommets. Si v est un sommet, alors il y a une rotation d’ordre 3 qui le
fixe: CardFv = 3. Alors CardG = CardFv CardOv = 60.
(iii) Il y a 30 arêtes et G agit transitivement sur l’ensemble des arêtes.
Si a est une arête, alors il n’y a que une rotation d’ordre 2 qui le fixe
(comme ensemble: CardFa = 2. Alors CardG = CardFa CardOa = 60.
En fait ce groupe est isomorphe à A5 un (le) sous–groupe d’indice 2
dans S5 .
exemple Le tetraèdre est un solide régulier avec 3 faces triangulaires, 4
sommets, et 6 arêtes. Considérer le groupe G des symétries du tetraèdre
(ceux qui préservent l’orientation, et les autres).
Les symt́ries qui fixe un sommet et preserve orientation, sont 3 (identité, et les deux rotations). Si on permet les reflexions, on trouve le
groupe S3 qui agit sur les sommets en face.
Le groupe est A4 , ou S4 si on n’oblige pas la preservation de
l’orientation.
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