Théorème de Carathéodory - Théorème de Mazur Florent Nacry 24 janvier 2015 Références : Oraux X-E.N.S. Algèbre 3, Francinou, Cours d’analyse fonctionnelle de Lionel Thibault (Université Montpellier 2). Notation : Si X est une partie d’un R-espace vectoriel, on note co (X) son enveloppe convexe. Théorème. (Carathéodory) Soient n ∈ N? , X une partie non vide de Rn . Alors, tout point de co (X) est barycentre d’une famille de n + 1 points de X affectés de coefficents positifs. Démonstration. Soit x ∈ co (X) fixé. Puisque co (X) est l’ensemble des combinaisons convexes d’éléments de X, il existe p ∈ N? , x1 , . . . , xp ∈ X, λ1 , . . . , λp ∈ R?+ avec x= p P i=1 p P λi = 1 tels que i=1 λi xi . Si p ≤ n + 1, c’est terminé. Supposons p > n + 1. On a p − 1 > n = dimR Rn . Ainsi, la famille (xi − x1 )2≤i≤p de Rn est R-liée dans Rn , i.e. il existe (α2 , . . . , αp ) ∈ Rp+1 \ {0} tel que p X αi (xi − x1 ) = 0. (1) i=2 Posons α1 = − p P αi . On a i=2 p X α i xi = i=1 = = p X i=2 p X i=2 p X α i xi + α 1 x1 α i x1 + α 1 x1 α i x1 − i=2 p X α i x1 i=2 =0 où la deuxième égalité résulte de (1). Remarquons que pour tout t ∈ R, x= p X λi xi + t i=1 On a p P i=1 p X αi xi = i=1 p X (λi + tαi )xi . (2) i=1 αi = 0 et l’existence de i0 ∈ {2, . . . , p} tel que αi0 6= 0. Ceci entraîne tout de suite l’existence d’un j0 ∈ {1, . . . , p} tel que αj0 < 0 ce qui permet de définir ) ( λi τ = min − : i ∈ {1, . . . , p} , αi < 0 . αi 1 Posons pour tout i ∈ {1, . . . , p}, µi = λi + τ αi . Fixons k ∈ {1, . . . , p}. Soit αk ≥ 0 et dans ce cas µk ≥ 0, soit αk < 0 et dans ce cas 0 ≤ τ ≤ − αλkk puis τ αk ≥ −λk , i.e. µk ≥ 0. On en déduit que p P pour tout i ∈ {1, . . . , p}, µi ≥ 0. Puisque αi = 0, on a i=1 p X µi = i=1 p X λi + τ i=1 p X αi = 1. i=1 Fixons j ∈ {1, . . . , p} tel que τ = − αλjj . Il vient µj = λj + αj τ = λj − λj = 0. Ainsi, on a X µ i xi = 1≤i≤p,i6=j = p X µ i xi i=1 p X (λi + τ αi )xi i=1 =x où la dernière égalité est conséquence immédiate de (2). Il s’ensuit que x est barycentre d’une famille de p − 1 points de X affectés de coefficients positifs. Pour conclure, il reste alors à appliquer m − 1 fois ce même procédé où m est l’entier naturel non nul qui satisfait p − m = n + 1. Application. Soient n ∈ N? , X une partie de Rn compacte. Alors, l’enveloppe convexe de X est compacte. Démonstration. Si X = ∅, c’est terminé. Si X 6= ∅, posons Φ : Rn+1 × Rn+1 −→R ((x1 , . . . , xn+1 ), (λ1 , . . . , λn+1 )) 7−→ n+1 X λi xi i=1 Observons que Φ est continue sur Rn+1 × Rn+1 (par R-bilinéarité et R-dimension finie de Rn+1 × Rn+1 ). Notons ∆n+1 = (λ1 , . . . , λn+1 ) ∈ Rn+1 : n+1 P λi = 1 . L’application i=1 ϕ : X × ∆n+1 −→co (X) ((x1 , . . . , xn+1 ), (λ1 , . . . , λn+1 )) 7−→ n+1 X λi xi i=1 est alors continue (restriction à la source et au but de Φ) sur X × ∆n+1 et ϕ(X × ∆n+1 ) = co (X). La compacité évidente (c’est un fermé borné de Rn+1 !) de ∆n+1 associée à celle de X nous garantit que X × ∆n+1 est compact. Ceci termine la preuve. L’objet de la suite est d’établir que le résultat est faux en dimension infinie. 2 On note lR2 (N) = (xn )n∈N ∈ R : N +∞ P n=0 x2n < +∞ . Rappelons c’est un R-espace vectoriel et que l’application h·, ·i : lR2 (N) × lR2 (N) −→R ((xn )n∈N , (yn )n∈N ) 7−→ +∞ X xn y n n=0 est un produit scalaire sur lR2 (N). Rappelons aussi que (lR2 (N), h·, ·i) est un R-espace de Hilbert dont on note k·k2 la norme induite par h·, ·i. Pour tout m ∈ N? , posons δm : N −→R n 7−→ 1 si n = m , 0 sinon Posons également ζm : N −→R 1 si n = m sinon, n 7−→ n+1 0 Pour tout n ∈ N? , on a ζn 2 − 0lR2 (N) = 2 +∞ X ζn (k)2 = k=0 1 . (n + 1)2 Ceci permet d’établir que lim ζn = 0lR2 (N) . Posons n→+∞ n A = {ζn : n ∈ N? } ∪ 0lR2 (N) o qui est (résultat classique de topologie !) compact et notons C = co (A). Montrons que A n’est pas fermée dans lR2 (N). Pour tout m ∈ N? , on définit m 6 X ζk (·) ϕm (·) = 2 π k=1 k 2 qui est évidemment un élément de lR2 (N). Remarquons que pour tout m ∈ N? , m m 6 X ζk (·) 6 X 1 ϕm (·) = 2 + 1− 2 02 . 2 π k=1 k π k=1 k 2 lR (N) ! Ceci nous dit que pour tout m ∈ N? , on a ϕm (·) ∈ co (A). Posons l(·) = 6 π2 +∞ P k=1 ζk (·) k2 et observons tout de suite que l(·) ∈ lR2 (N) et que l(·) ∈ / co (A). Fixons n0 ∈ N? . On a pour tout k ∈ N, 6 X ζi (k) 6 +∞ π 2 k2 (k+1)2 l(k) − ϕn0 (k) = 2 = 0 π i=n0 +1 i2 si k > n0 si k ∈ {0, . . . , n0 } . On en déduit que kl − ϕn0 k22 = +∞ X k=n0 +1 3 6 2 2 π k (k + 1)2 !2 . On a donc (reste numérique d’une série convergente !) lim kl − ϕn k22 = 0, n→+∞ i.e. lim ϕn = l. Ainsi, co(A) n’est même pas fermée dans lR2 (N). n→+∞ On a toutefois le résultat suivant : Théorème. (Mazur) Soient (X, k·k) un K-espace de Banach, K un compact de (X, k·k). Alors, l’enveloppe convexe fermée de K est un compact de (X, k·k). Démonstration. Notons U = B(0X , 1) et fixons un réel ε > 0. Il existe m ∈ N? , a1 , . . . , am ∈ K tels que K⊂ = m [ ε B(ak , ) 2 k=1 m [ ε ak + U 2 k=1 ε = {a1 , . . . , am } + U. 2 On en déduit ε ε co(K) ⊂ co({a1 , . . . , am } + U) ⊂ co({a1 , . . . , am }) + U. 2 2 L’application ϕ : Rm × X m −→ X (λ1 , . . . , λm , x1 , . . . , xm ) 7−→ m X λk xk k=1 est évidemment continue sur Rm × X m . On a co({a1 , . . . , am }) = ϕ Λ × ({a1 } × . . . × {am }) , m où Λ = (λ1 , . . . , λm ) ∈ R : m P k=1 λk = 1 . Donc, co({a1 , . . . , am }) est k·k-compact. Il existe n ∈ N? , c1 , . . . , cn ∈ co({a1 , . . . , am }) tels que ε co({a1 , . . . , am }) ⊂ {c1 , . . . , cn } + U. 2 Donc, co(K) ⊂ {c1 , . . . , cn } + εU. Ainsi, co(K) est k·k-précompact. Puisque (X, k·k) est un Kespace de Banach, co(K) est k·k-compact. Ceci termine la preuve. 4