Conclusion : anthropologie des apprentissages

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Conclusion : anthropologie des apprentissages
Cours de Maria Teixeira
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http://mariateixeira.hautetfort.com
Traditionnellement, les religions offrent un soutien lors des étapes de passage qui
scandent le cycle de la vie : naissance, adolescence, mariage, mort. Elles proposent, à la fois
une structure de séparation et une représentation de la temporalité humaine et de l'au-delà,
apaisante pour celui qui y adhère.
Trois étapes doivent être franchies selon Van Gennep :
(1) la séparation du groupe (mort symbolique),
(2) la phase de liminarité (mise en marge au cours de laquelle il faudra affronter
dangers et périls, nouvelle gestation),
(3) l’agrégation ou réintégration dans le groupe avec un statut social supérieur, une
identité transformée (réintégration dans la communauté, renaissance symbolique).
Refusant l'alternative "religion, psychothérapie, ou rien", certains aujourd'hui innovent
et mettent en œuvre de "nouveaux" rites de passage. Aussi, il existe des rites sacrés mais aussi
des rites profanes.
Des échanges s’opèrent entre les hommes et l’environnement visible et invisible,
notamment par l’accomplissement de rites aux dieux, aux divinités, aux esprits de la nature,
aux génies et aux ancêtres. Ces paroles et gestes rituels sont performatifs. La notion
d’efficacité symbolique des rituels exposée par Claude Lévi-Strauss (1949) apparaît lorsqu’il
y a adhésion à une structure socioculturelle commune dans toutes ses composantes,
matérielles, humaines, immatérielles et symboliques.
Le rite est habituellement constitué de séquences, d'étapes, s'articulant dans une miseen-scène soigneusement préparée et correspondant à une série de règles implicite au rite en
question : on peut ainsi parler du caractère morcelé du rite.
Le rite se présente comme une activité très formalisée : possédant ses propres codes et
dont les actions s'articulent autour de symboles fortement marqués. Il s'agit de pratiques très
codifiées.
Le rite présente aussi un aspect répétitif, où soigneusement mises en place, les actions
rituelles sont standardisées et reprises à travers un ordre bien établi. Le déroulement d'un rite
est donc prévisible puisqu'il se base sur une série d'étapes bien ancrées, lesquelles devront être
1 minutieusement respectées afin que l'activité prenne forme, qu'elle aboutisse à son but et
puisse apporter sens aux pratiquants qui s'y soumettent. Les activités se déroulent autour
d'objets auxquels ont a attaché une valeur symbolique : le cercueil du défunt, le calice de la
messe, etc.
L’anthropologie couvre tous les aspects du symbole dans le langage, les arts, la
culture, l'anthropologie étudie l'homme, constructeur et manipulateur de symboles, dans son
rapport au monde sensible et immatériel. Ce symbolise est mis en acte lors des grands rituels
initiatiques. Ils sont fastueux et impressionnants et visent à inculquer aux néophytes les règles
de la société, les comportements qu’ils devront adopter et les interdits qu’ils devront
respecter. Il existe aussi des rites du quotidien qu’il est important d’analyser. Ces petits gestes
et ces paroles du quotidien répétés construisent tout autant la personne et ses représentations.
Par exemple, les hommes se sont penchés sur un universel le corps humain pour construire
différents rapports au monde et notamment à la division du féminin et du masculin entre
dichotomie radicale et continuum. Aussi la division genrée du monde est acquise et des
processus d’apprentissage des rôles sociaux sont inculqués dès la petite enfance. Donc il
existe diverses théories locales de la conception du développement in utero et de
l’engendrement ainsi que différentes représentations de la petite enfance après sa naissance,
son modelage à la fois physique social et mental dans l’intention de fabrique un homme ou
une femme qui prenne sa place dans la société.
Ces constructions sociales apprises puis transmises mais aussi parfois remises en
question reflètent un certain rapport au monde et à la cosmognonie. Les systèmes de parenté,
de filiation et les différentes représentations de l’engendrement qui les accompagnent mettent
en œuvre une certaine représentation du rôle des humeurs du corps, humeurs qui sont
marquées de valeurs, On l’a vu par exemple le sperme fluide qui permet de construire les
grands hommes lors de l’initiation Baruya et le sang féminin impur, renvoyant à l’échec de
conception et que les mouvements new age tentent de remettre en cause.
Ces données biologiques universelles sont à l’origine des catégories cognitives : opération de classement, opposition, qualification, hiérarchisation, grilles où le masculin et le féminin se trouvent enfermés. Ces catégories cognitives, quel que soit leur contenu dans chaque culture, sont extrêmement durables, car elles sont transmises, inculquées très tôt par l’éducation et l’environnement culturel, et rappelées de façon explicite ou implicite dans la vie quotidienne. Toute société est construite sur un ensemble d’armatures étroitement soudées les unes aux autres que sont la prohibition de l’inceste, la répartition sexuelle des tâches, 2 une forme légale ou reconnue d’union stable, et, ajoute Françoise Héritier, la valence différentielle des sexes. Ainsi, en est-il des représentations du masculin et du féminin conçues comme des
éléments interdépendants. Françoise Héritier a théorisé pour la première fois la notion de
« valence différentielle des sexes » dans son ouvrage L’exercice de la parenté, étude qu’elle a
conduite chez les Samo de Haute Volta, devenue aujourd’hui le Burkina Faso. Elle a
poursuivi le développement de cette théorie en analysant comment d’un simple constat, celui
d’une différence physique observable entre les sexes, a été élaboré un classement hiérarchique
du masculin et du féminin. Elle donne l’exemple dans nos sociétés, du doublet
passivité/activité. La passivité est classée comme féminine et l’activité comme masculine. La
passivité féminine est hiérarchiquement classée en dessous de l’activité masculine, mais
ailleurs comme en Inde, la passivité est considérée comme une qualité masculine et elle est
classée hiérarchiquement au-dessus de l’activité, conçue comme féminine. Donc quel que soit
le cas de figure, le féminin a été hiérarchiquement subordonné au masculin. Le fondement de
cette valence différentielle des sexes selon l’auteure, réside dans le fait que pour se
reproduire, les hommes ont besoin de passer par les femmes. Or faire et élever un enfant
prend du temps. Pour que ces femmes ne partent pas, emportant avec elles ce bien précieux
que sont les enfants, les hommes se sont approprié leurs corps. Selon Paola Tabet (1998), en
Afrique, dans le cadre conjugal il existe bien une division sexuelle du travail, les femmes se
doivent de constituer la descendance de leur époux. Ainsi la maternité est paradoxalement
pour elles à la fois source de pouvoir mais aussi d’asservissement et les religions africaines
formulent bien des injonctions aux femmes qui vont dans ce sens.
La notion de personne est l’ensemble des représentations de ses différentes
composantes en tant que constituant un microcosme inséré dans le macrocosme qu’est
l’environnement. Il existe une symbiose entre l’homme et la nature visible et invisible.
Jusqu’à quel point le corps et ses différentes composantes fait l’identité d’un être
humain et pour combien de temps, puisqu’il est destiné à mourir.
Les représentations du corps constituent un ensemble d’idées, d’images, de symboles,
d’émotions et de jugements de valeur qui dans toute société, dans toute culture servent non
seulement à penser ce corps mais aussi à le contrôler. Ces représentations sont autant de
contraintes qui s’exercent à l’intérieur de l’individu, comme à l’extérieur de lui, dès qu’il est
né. Parfois leur identité de personne s’appuie sur des marquages corporels (mutilations
sexuelles, oreilles percées, tatouages, scarifications).
3 Bibliographie
•
Bonte P., Izard M., 1991, Dictionnaire de l’ethnologie et de l’anthropologie, PUF
•
Van Gennep A., 1981 [1909], les rites de passage, Picard
•
Lévi-Strauss C., 1949, l’efficacité symbolique, Revue de l’histoire des religions, 135 :
5-27
•
Héritier F., 1981, L’exercice de la parenté, Gallimard, Le seuil, Hautes Etudes
•
Tabet P., 1998, La construction sociale des l’inégalité des sexes. Des corps et des
outils, L’Harmattan
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