Tableaux 97 et 98 : les lombalgies chroniques ne sont pas

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’article intitulé “Lombalgies
chroniques : maladies professionnelles” paru dans La
Lettre du Rhumatologue de
novembre 2000 (1) nous semble,
essentiellement par son titre, en
opposition avec une analyse
rigoureuse des tableaux 97 et
98 des maladies professionnelles (tableaux) (2).
L‘
La désignation des maladies
(colonne de gauche) ne fait en
aucun cas état des lombalgies chroniques mais restreint très clairement
le champ d’application de ces deux
tableaux aux radiculalgies L4, L5 ou
S1, par hernie discale avec concordance radioclinique. La reconnaissance de maladie professionnelle
suppose donc que, outre le délai de
prise en charge et l’analyse du poste
de travail, le patient souffre d’une
lomboradiculalgie systématisée sur
le plan clinique et en concordance
avec une hernie discale objectivée
par l’imagerie.
Un patient lombalgique chronique ou
souffrant d’une lomboradiculalgie
non systématisée, d’origine arthrosique par exemple, ne pourra prétendre à la reconnaissance de sa
maladie en maladie professionnelle,
en l’état actuel des tableaux 97 et 98,
même si le médecin clinicien admet
fort volontiers l’imputabilité de ces
pathologies, au moins en partie, à un
surmenage professionnel.
Ces deux tableaux représentent une
avancée réelle dans la reconnaissance de certaines pathologies rachidiennes en maladies professionnelles. Ils peuvent être critiqués,
paraître trop restrictifs, mais les
médecins cliniciens se doivent néan6
R I B U N E
se prononcer sur les exigences “d’exposition habituelle” et de “charges
lourdes”.
les lombalgies chroniques Le certificat médical, base de la
déclaration de maladie professionnelle, et que peut rédiger
ne sont pas reconnues
tout médecin traitant, doit, en
priorité, s’attacher à décrire
une situation médicale rappormaladies professionnelles
tée à un risque professionnel,
même si, une fois encore, toutes
P. Bertin
les conditions figurant dans les
Service de rhumatologie, CHU de Limoges,
tableaux ne sont pas réunies.
Tableaux 97 et 98 :
membre du CRRMP du Limousin
moins de les analyser de façon
rigoureuse et de ne pas les interpréter sans fondement.
Faire croire à nos patients lombalgiques chroniques, travailleurs de
force, qu’une reconnaissance en
maladie professionnelle peut leur
être attribuée est une erreur conduisant à une multiplication de dossiers
qui seront rejetés, et à une désillusion
du patient potentiellement négative
sur le plan psychique.
Outre cette opposition de fond,
quelques remarques de forme peuvent être faites. En effet, la déclaration de maladie professionnelle peut
être établie au titre des tableaux 97 et
98, même si les conditions administratives (liste limitative notamment),
ne sont pas remplies : c’est alors au
CRRMP (Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles) de se prononcer. Ce comité
composé de trois médecins s’aide,
entre autres, des données de jurisprudence d’une part, des normes et
recommandations d’autre part, pour
Sans entrer dans de multiples détails,
souvent complexes, nous pensons
que le médecin clinicien doit rester
simple et objectif dans sa
démarche, en proposant une déclaration de maladie professionnelle
lorsqu’il suppose qu’une lomboradiculalgie systématisée par hernie discale (et non une simple lombalgie)
peut être en relation avec une activité
professionnelle sollicitant le rachis
lombaire de façon intensive. Si les
conditions des tableaux 97 et 98 sont
remplies, la CPAM prendra la décision qui s’impose ; dans le cas
contraire, elle sollicitera le CRRMP,
qui rendra un avis autorisé.
Nous pensions utile d’apporter cette
contradiction pour que le message
soit clair et précis : la lombalgie chronique n’est pas, aujourd’hui et dans
le cadre des tableaux 97 et 98, reconnue en maladie professionnelle.
R É F É R E N C E S
B I B L I O G R A P H I Q U E S
1. Teyssier-Cotte C. Lombalgies chroniques : maladies professionnelles. La Lettre du Rhumatologue
2000 ; 266 : 7-10.
2. Décret
N° 99-95 du 15/02/1999 (création des
tableaux 97 et 98 des maladies professionnelles).
La Lettre du Rhumatologue - n° 272 - mai 2001
T
R I B U N E
Tableaux
des maladies professionnelles
Tableau n° 97. “Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier”.
Désignation
Délai de prise
Liste limitative des travaux susceptibles
des maladies
en charge
de provoquer ces maladies
Sciatique par hernie discale L4-L5
ou L5-S1 avec atteinte radiculaire
de topographie concordante.
Six mois (sous réserve d’une durée d’exposition
de cinq ans).
Radiculalgie crurale par hernie
discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5,
avec atteinte radiculaire
de topographie concordante.
Travaux exposant habituellement aux vibrations de basses
et moyennes fréquences transmises au corps entier :
– par l’utilisation ou la conduite des engins et véhicules
tout-terrain : chargeuse, pelleteuse, chargeuse-pelleteuse,
niveleuse, rouleau vibrant, camion tombereau, décapeuse,
chariot élévateur, chargeuse sur pneu ou chenilleuse,
bouteur, tracteur agricole ou forestier ;
– par l’utilisation ou la conduite des engins et matériels
industriels : chariot automoteur à conducteur porté,
portique, pont roulant, grue de chantier, crible, concasseur,
broyeur ;
– par la conduite de tracteur routier et de camion monobloc.
Tableau n° 98. “Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes”.
Désignation
Délai de prise
Liste limitative des travaux susceptibles
des maladies
en charge
de provoquer ces maladies
Sciatique par hernie discale L4-L5
ou L5-S1 avec atteinte radiculaire
de topographie concordante.
Six mois (sous réserve d’une durée d’exposition
de cinq ans).
Radiculalgie crurale par hernie
discale L2-L3 ou L3-L4 ou L4-L5,
avec atteinte radiculaire
de topographie concordante.
La Lettre du Rhumatologue - n° 272 - mai 2001
Travaux de manutention manuelle habituelle de charges
lourdes effectués :
– dans le fret routier, maritime, ferroviaire, aérien ;
– dans le bâtiment, le gros œuvre, les travaux publics ;
– dans les mines et carrières ;
– dans le ramassage d’ordures ménagères et de déchets
industriels ;
– dans le déménagement, les garde-meubles ;
– dans les abattoirs et les entreprises d’équarrissage ;
– dans le chargement et le déchargement en cours
de fabrication, dans la livraison, y compris pour le compte
d’autrui, le stockage et la répartition des produits industriels
et alimentaires, agricoles et forestiers ;
– dans le cadre des soins médicaux et paramédicaux incluant
la manutention de personnes ;
– dans le cadre du brancardage et du transport des malades ;
– dans les travaux funéraires.
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