Université Pierre & Marie Curie Année 2012-2013 Master de mathématiques 1 Module MM020 Théorie des Nombres - TD2 Corps finis Exercice 1 : Montrer les isomorphismes suivants et exhiber un générateur du groupe des éléments inversibles : a) F4 ∼ = F2 [X]/(X 2 + X + 1). b) F8 ∼ = F2 [X]/(X 3 + X + 1). ∼ F2 [X]/(X 4 + X + 1). c) F16 = d) F16 ∼ = F2 [X, Y ]/(Y 2 + Y + 1, X 2 + X + Y ). Exercice 2 : Montrer que dans un corps fini, tout élément est somme de deux carrés. Exercice 3 : a) Soit q = pr , p un nombre premier impair. Montrer que x ∈ F∗q est un carré si et seulement si x q−1 2 = 1. b) En étudiant les diviseurs de (n!)2 + 1, montrer qu’il existe une infinité de nombres premiers de la forme 4k + 1 (k ∈ N). Exercice 4 : Soit p un nombre premier impair. Montrer que 2 est un carré dans Fp si et seulement si p ≡ ±1 [8]. [Indication : on pourra considérer ζ une racine primitive 8-ième de l’unité dans Fp et étudier ζ + ζ −1 .] Exercice 5 : a) Soit k un corps, a ∈ k, p un nombre premier. Montrer que X p − a est irréductible dans k[X] si et seulement si il n’admet pas de racine dans k. [Indication : si X p − a est réductible, on pourra écrire une décomposition de ce polynôme dans k[X], puis utiliser la décomposition de X p − a en facteurs de degré 1 sur k, pour en déduire que a est une puissance p-ième dans k.] b) Soient p, l deux nombres premiers tels que l divise p−1. Soit n ∈ Z tel que la classe de n engendre (Z/pZ)∗ . Montrer que le polynome X l + pX k − n est irréductible dans Z[X], pour tout 1 ≤ k < l. Exercice 6 : a) Si p et l sont des nombres premiers, montrer qu’il existe un morphisme de corps Fpn → Flm si et seulement si p = l et n divise m. b) Ce morphisme de corps est-il unique ? n m c) Fixons, pour tout n, S m tels que n divise m, un morphisme Fp → Fp , de façon compatible. Montrer que Fp := n≥1 Fpn! est une clôture algébrique de Fp . Exercice 7 : Soit p un nombre premier. Montrer que le groupe F∗pn s’identifie à un sous-groupe du groupe GLn (Fp ). Exercice 8 : a) Donner la liste de tous les polynômes irréductibles de degré ≤ 5 sur F2 . 1 b) Donner la liste de tous les polynômes irréductibles unitaires de degré ≤ 3 sur F3 . c) Donner le nombre et la liste de tous les polynômes irréductibles unitaires de degré ≤ 2 sur F4 . Exercice 9 : Montrer (sans utiliser les résultats généraux sur les polynômes cyclotomiques) que le polynôme X 4 + 1 est irréductible dans Q[X], et qu’il est réductible dans Fp [X] pour tout nombre premier p. Exercice 10 : Soit n ≥ 2 un entier. a) Soit p un nombre premier. Montrer que p ≡ 1 [n] si et seulement si Fp contient une racine primitive n-ième de l’unité. b) Soit k ∈ N, et p un diviseur premier de φn (k!). Montrer que p > k et soit p divise n, soit p ≡ 1 [n]. c) Montrer qu’il existe une infinité de nombres premiers p ≡ 1 [n]. Exercice 11 : Soit Irr(n, q) l’ensemble des polynômes irréductibles unitaires de degré n sur Fq et I(n, q) le cardinal de cet ensemble. n a) Montrer que si d divise n, alors pour tout P ∈ Irr(d, q), P divise X q − X. n b) Montrer que si P ∈ Irr(d, q) divise X q − X, alors d divise n. c) En déduire la formule X dI(d, q) = q n . d|n d) On définit la fonction de Möbius µ : N∗ → {−1, 0, 1} par µ(n) = (−1)r si n est le produit de r nombres premiers distincts, et par µ(n) = 0 siP n admet un facteur carré. Montrer que ∗ si f, g :PN → C sont deux fonctions, on a f (n) = d|n g(d) pour tout n si et seulement si g(n) = d|n µ( nd )f (d) pour tout n. e) En déduire la formule I(n, q) = 1 X n d q . µ n d d|n f) Montrer que pour tout n ≥ 1, I(n, q) ≥ 1. g) Montrer le “théorème des nombres premiers pour les polynômes” : ! n qn q2 I(n, q) = +O n n quand n tend vers +∞. √ [remarque : si on pose x = q n , cette formule devient I(x, q) = logx(x) +O log x(x) , qui est l’exacte q q analogue de la forme précise (conjecturée !) du classique théorème des nombres premiers.] Exercice 12 : Soient p, l deux nombres premiers impairs, tels que l ≡ 2 [3] et la classe de p modulo l engendre (Z/lZ)∗ . Montrer que X l+1 − X + p est irréductible dans Z[X]. [Indication : on pourra considérer les réductions de ce polynôme modulo 2 et p.] ExerciceP13 : Soit F un corps fini de cardinal q = pr . Pour tout Q ∈ F[X1 , . . . , Xn ], on pose S(Q) := x∈Fn Q(x) ∈ F. a) Pour a1 , . . . , an ∈ N, calculer S(X1a1 . . . Xnan ). b) Soient P1 , . . . , Pr des polynômes de F[X1 , . . . , Xn ], de degrés d1 , . . . , dr . On note Z := {x ∈ Fn : P1 (x) = · · · = Pr (x) = 0}. Q Si P (x) := ri=1 (1 − Pi (x)q−1 ), exprimer S(P ) en fonction du cardinal #Z de Z. 2 c) En déduire que si d1 +· · ·+dr < n, alors #Z est multiple de p (théorème de Chevalley-Warning). d) En déduire que si les Pi sont des polynômes homogènes non constants (ou au moins si les Pi sont sans terme constant) et si d1 + · · · + dr < n, alors le système P1 (x) = · · · = Pr (x) = 0 a une solution non nulle dans Fn . On dit que le corps F est un corps C1 . e) Montrer l’application suivante (théorème de Erdös-Ginzburg-Ziv) : pour tout n ≥ 1, pour tout a1 , . .P . , a2n−1 ∈ Z, il existe un sous-ensemble I ⊂ {1, . . . , 2n − 1} de cardinal exactement n tel que i∈I ai ≡ 0 [n]. Exercice 14 : On appelle “algèbre à division” (ou “corps gauche”) tout anneau non nul A (pas forcément commutatif) dans lequel tout élément non nul est inversible. Dans tout l’exercice, on fixe une algèbre à division finie A. On souhaite montrer que A est commutatif, c’est-à-dire que A est un corps (théorème de Wedderburn). a) Montrer que le centre Z de A est un corps fini de cardinal q, et que A est un Z-espace vectoriel de dimension n. b) Supposons n > 1, i.e. A non commutative. Écrire l’équation aux classes pour l’action de A∗ sur P q n −1 lui-même par conjugaison. En déduire que q n − 1 = q − 1 + , la somme portant sur un q d −1 certain nombre de diviseurs stricts de n. c) En déduire que φn (q) divise q − 1, où φn est le n-ième polynôme cyclotomique. d) En déduire une contradiction. e) Conclure. Exercice 15 : L’objectif de cet exercice est de montrer une partie du résultat suivant. Soit (Pi )i∈I une famille de polynôme de Z[X1 , . . . , Xn ]. Alors les assertions suivantes sont équivalentes : – les polynômes (Pi )i∈I ont un zéro commun dans Cn . – il existe un ensemble infini de nombres premiers p tels que les (Pi )i∈I aient un zéro commun dans Fnp . – pour tout nombre premier p assez grand, il existe un corps de caractéristique p où les (Pi )i∈I ont un zéro commun. On va montrer que la deuxième assertion implique la première, et que la troisième implique également la première. Pour ce faire, on répondra aux questions suivantes : a) (Nullstellensatz faible) : soient (Qj )j∈J des polynômes dans C[X1 , . . . , Xn ], sans zéro commun dans Cn . i) Montrer que, pour tout (a1 , . . . , an ) ∈ Cn , l’idéal (X1 − a1 , . . . , Xn − an ) ⊂ C[X1 , . . . , Xn ] est maximal. [Indication : on pourra comparer cet idéal avec le noyau du morphisme C[X1 , . . . , Xn ] → C défini par P 7→ P (a1 , . . . , an )] ii) Soit m ⊂ C[X1 , . . . , Xn ] un idéal maximal. Définissons pour 1 ≤ i ≤ n, φi : C[Xi ] → C[X1 , . . . , Xn ]/m =: K. Montrer que K = C, puis que Ker(φi ) est un idéal premier non nul, donc maximal. En déduire qu’il existe (a1 , . . . , an ) ∈ Cn tels que m = (X1 −a1 , . . . , Xn −an ). iii) En déduire que l’idéal engendré par les (Qj )j∈J est C[X1 , . . . , Xn ] tout entier. b) Soit K/k une extension de corps.PSoient (ai,j )0≤i≤n,1≤j≤n des éléments de k. Supposons qu’il existe (x1 , . . . , xn ) ∈ K n tels que ni=1 ai,j xi = a0,j pour tout 1 ≤ j ≤ n. P Montrer qu’il existe (y1 , . . . , yn ) ∈ k n tels que ni=1 ai,j yi = a0,j pour tout 1 ≤ j ≤ n. c) Soient (Pi )i∈I une famille de polynôme de Z[X1 , . . . , Xn ] sans zéro commun dans Cn . En utilisant le Nullstellensatz, montrer qu’il existe un ensemble fini E de nombres premiers tel que pour tout p∈ / E, pour tout corps F de caractéristique p, les (Pi )i∈I n’aient pas de zéro commun dans F . d) En déduire la réponse à la question initiale. 3