tion de nombreux cas d’“attaques de sommeil” (sudden sleep
attacks) avec le pramipexole, puis le ropinirole, certains auteurs
ont suggéré l’implication de ce récepteur D3 dans la survenue de
cet effet indésirable des agonistes dopaminergiques. Mais la sur-
venue de tels effets indésirables avec les autres agonistes dopa-
minergiques et l’absence de données expérimentales ou cliniques
sur le mécanisme de cet effet indésirable nouveau ne permettent
pas de conclure dans ce sens aujourd’hui.
Récepteurs D4 et D5
Les conséquences de l’affinité d’un agoniste dopaminergique
pour ces sous-types de récepteur sont inconnues. En fait, il est
probable que leur importance dans le profil clinique antiparkin-
sonien reste faible sinon négligeable.
Récepteurs sérotoninergiques (5HT)
La stimulation des récepteurs sérotoninergiques centraux par
les dérivés ergotés peut expliquer, au moins en partie à côté de
la stimulation dopaminergique, les phénomènes hallucina-
toires ou confusiogènes déterminés par ces médicaments.
L’analyse du profil pharmacologique peut suggérer, au moins
en théorie, une plus grande fréquence de ces effets indésirables
avec le lisuride. Cependant, aucune donnée clinique sérieuse-
ment établie ne vient confirmer cette hypothèse.
Certains effets secondaires des agonistes dopaminergiques à
structure ergotée peuvent aussi s’expliquer par ces propriétés
sérotoninergiques. Il s’agit de l’induction de syndrome fibreux
et inflammatoire, essentiellement des fibroses pleuro-pulmonaires
ou rétropéritonéales. On a estimé l’incidence des atteintes
pleuro-pulmonaires sous bromocriptine à 2 à 6 % des patients
traités. On a aussi décrit des atteintes pleuro-pulmonaires rétro-
péritonéales sous lisuride, pergolide ou cabergolide. Ces effets
indésirables peuvent survenir chez des patients recevant de
faibles doses d’agonistes dopaminergiques. Ils s’avèrent réver-
sibles dans la plupart des cas à l’arrêt du médicament.
Récepteurs adrénergiques (α)
La propriété latérale α-bloquante des ergotés peut expliquer
l’hypotension artérielle,à caractère volontiers orthostatique,
déterminée par ces médicaments. Comme nous l’avons vu plus
haut, la baisse tensionnelle déterminée par les agonistes dopami-
nergiques s’explique en premier lieu par la stimulation périphé-
rique des récepteurs dopaminergiques présynaptiques situés sur
les terminaisons nerveuses orthosympathiques. Cet effet hypo-
tenseur dopaminergique, commun à tous les agonistes dopami-
nergiques, peut être potentialisé par l’effet bloquant α1-adréner-
gique présenté par les dérivés ergotés. Ainsi, en raison de ce
double mécanisme d’action, on peut, au moins théoriquement,
attendre des agonistes dopaminergiques ergotés plus d’hypoten-
sion artérielle (et en particulier plus d’hypotension orthostatique)
qu’avec les produits non dérivés de l’ergot de seigle.
CONCLUSION
Cette revue souligne la grande hétérogénéité de spectre phar-
macodynamique des agonistes dopaminergiques. Si tous stimu-
lent le récepteur D2, les agonistes aujourd’hui disponibles dif-
fèrent ensuite par leur affinité D1, D3, 5HT ou α-adrénergique.
Il s’avère en fait bien difficile de choisir, en fonction de ces
profils différents, entre les divers médicaments. On peut claire-
ment associer la survenue de fibroses pulmonaires ou rétropéri-
tonéales à la structure ergotée, mais cet effet indésirable reste
exceptionnel. Ainsi, la connaissance de ce risque reste de faible
pertinence pour le choix de l’agoniste.
On manque en fait actuellement d’études comparatives bien
conduites et à la méthodologie indiscutable concernant l’effica-
cité comparative des divers agonistes. Certes, il existe quelques
travaux indiquant que la prescription de certains agonistes en
relais d’autres prescrits depuis longtemps s’accompagne d’une
relance de la réponse motrice. Mais ces études souffrent en
général de défauts significatifs dans leur conception et leurs
méthodes. On ne peut conclure formellement à ce jour.
À la question posée au début de l’article, on doit donc répondre
par la négative : il n’existe pas actuellement de transférabilité des
propriétés pharmacodynamiques de base au choix clinique de tel
ou tel agoniste dopaminergique. La même réponse négative pour-
rait aussi être faite si on considère les propriétés pharmacociné-
tiques (tableau I),pourtant fort différentes, de divers agonistes
dopaminergiques. Il faut donc redire une nouvelle fois la nécessité
de poursuivre en phase IV les études pharmacoépidémiologiques
concernant à la fois l’efficacité, la sécurité et le coût des médica-
ments en général et des agonistes dopaminergiques en particulier.
Ainsi, il n’existe à l’heure actuelle aucun argument de pharma-
cologie expérimentale ou clinique pour différencier les agonistes
dopaminergiques. On peut rappeler quelques assertions : la bro-
mocriptine, le pergolide et le ropinirole sont les mieux étudiés
dans leur rapport efficacité/sécurité ; le lisuride possède une trop
courte demi-vie (ce qui nécessite des prises trop rapprochées
pour obtenir une réponse stable dans le nycthémère) ; le prami-
pexole ou la cabergoline ne sont pas encore pleinement évalués
en pratique quotidienne en raison d’un développement récent ;
les agonistes ergotés (bromocriptine, pergolide ou cabergoline)
peuvent déterminer des effets indésirables (fibroses) certes rares
mais graves… On peut recommander au médecin la prescription
de l’agoniste qu’il connaît le mieux en veillant à argumenter son
choix non seulement en fonction des données d’efficacité et de
pharmacovigilance mais aussi de coût (ce qui peut amener à
réfléchir à la prescription des médicaments génériques…). ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
En raison de l’abondance de la bibliographie, nous renvoyons le lecteur à
quelques revues générales ou articles récents.
1.
Montastruc JL, Rascol O, Senard JM. Treatment of Parkinson’s disease
should begin with a dopamine agonist. Mov Dis 1999 ; 14 : 725-30.
2.
Neef C, Van Laar T. Pharmacokinetic-pharmacodynamic relationship of apomor-
phine in patients with Parkinson’s disease. Clin Pharmacokin 1999 ; 37 : 257-71.
3.
Kulkarni SK, Ninan I. Dopamine D4 receptors and development of newer anti-
psychotic drugs. Fundam Clin Pharmacol 2000 ; 14 : 529-40.
4.
Montastruc JL, Rascol O, Senard JM. Current status of dopamine agonists in
Parkinson’s disease management. Drugs 1993 ; 46 : 384-93.
5.
Montastruc JL, Rascol O, Senard JM. New directions in the drug treatment of
Parkinson’s disease. Drugs Aging 1996 ; 9 : 169-84.
La Lettre du Neurologue - n° 3 - vol. VI - mars 2002 101