Maladie d’Alzheimer Comment faire face aux troubles du comportement alimentaire Le refus alimentaire et la perte du poids qui peut débuter assez tôt dans l’évolution de la maladie, accélèrent l’altération de l’état de santé des patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Les professionnels de santé et l’entourage du patient devraient bénéficier d’une information spécifique à ce sujet. L a maladie d’Alzheimer (MA) est caractérisée par une perte progressive des fonctions cognitives et l’apparition de troubles du comportement perturbant la vie quotidienne et l’alimentation. Les patients ont des difficultés à faire les courses (désorientation temporospatiale), à cuisiner, à utiliser les couverts, à peler les fruits (apraxie), etc. Les conduites boulimiques sont relativement rares au cours de la MA ; en revanche, l’anorexie peut survenir dès le début de la maladie. Fréquence de l’anorexie Les causes de l’anorexie sont multiples et souvent intriquées : trouble de l’humeur, diminution de l’appétence, atteinte du jugement, polymédication, altération du goût et de l’odorat. A partir d’une certaine évolution de la pathologie, le refus de s’alimenter peut se manifester par toute une série d’attitudes d’opposition, de réflexes de défense : le patient peut refuser de manger une grande variété d’aliments, mélanger et jouer avec la nourriture plutôt que de l’avaler, mettre ses mains en face de sa bouche ou cracher, fermer la bouche et serrer les dents (dysphagie oropharyngienne liée à la perte de coordination musculaire). Ces comportements de résistance seraient la conséquence directe du déclin cognitif, de l’inattention et de la confusion mentale survenant avec la maladie. Une dysphagie persistante serait un facteur prédictif de décès imminent. Il ressort de plusieurs études que la perte de poids (dénutrition protéino-énergétique) est un problème nutritionnel fréquemment observé chez les patients présentant la MA et qu’il s’accompagne de complications sévères : les patients deviennent plus fragiles et moins résistants aux infections, moins autonomes (risques accrus de chutes et troubles trophiques). C’est dire l’importance d’une surveillance nutritionnelle régulière et de la recherche d’une solution à chaque difficulté rencontrée. Comme l’a rappelé S. Lauque (diététicienne à Toulouse), « dans la mesure du possible, le patient doit participer au choix des aliments, être associé à la préparation du repas et à l’établissement des menus à la fois pour se distraire et pour entraîner sa mémoire. La table doit être adaptée au handicap du malade, être toujours agréable et fonctionnelle, avec les couverts appropriés et les films antidérapants à mettre sous la vaisselle. Si le malade est lent à manger, il peut commencer son repas avant le reste du groupe puis le poursuivre avec les autres convives ». Car le repas n’a pas seulement un intérêt nutritionnel, il structure aussi la journée et maintient le relationnel. Face aux différents troubles du comportement alimentaire, il faut rester calme, disponible, tout en sollicitant le patient verbalement ou par de petites gestes, sans hésiter à faire manger le patient debout, voire en marchant (crêpes, tartes, saucisson, légumes crus en bâtonnets, yaourt à boire...) et, si besoin, savoir reporter le moment du repas. En cas de perte d’appétit ou de poids, il est utile d’enri- chir les préparations (en ajoutant du lait en poudre, des œufs, des poudres de protéines, etc.), de fractionner les prises alimentaires, de relever des plats avec des fines herbes et des aromates pour stimuler l’appétit. Si le patient présente des nausées, des vomissements ou de la diarrhée, il faut proposer de petits plats plus fréquemment, faire boire beaucoup de liquides (bouillons de légumes ou jus de fruits). Penser à l’examen ORL Lorsque le patient ne mâche pas, il faut vérifier l’état des gencives et des dents, donner des aliments mous, l’encourager à mâcher. S’il n’arrive pas à avaler ou tourne les aliments dans sa bouche, il convient de changer la texture et le goût des aliments, mais aussi de prévoir une consultation ORL. Dans le cas où il refuse toute alimentation et s’énerve, il convient de réessayer un moment plus tard. Parfois, sa bouche est sèche ou des aphtes posent problème : dans ce cas, sucer des glaçons peut soulager, et les plats trop vinaigrés et épicés sont à éviter. D’autres fois, le patient fait des fausses routes : la maïzena ou les poudres permettent d’épaissir les liquides. Si le patient a oublié qu’il a déjà pris son repas, il est souhaitable de lui proposer de petites collations, notamment les fruits frais et secs. Quand le patient mélange tout, il vaut mieux lui proposer les plats l’un après l’autre, l’essentiel étant qu’il prenne son repas. Tout cela semble difficile à réaliser dans un établissement au premier abord, mais contribue à atténuer les déficits, sources de travail supplémentaire pour les soignants. Ludmila Couturier Diétécom 2003 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 47 - juin-juillet 2003 11