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Chapitre 3 - L’intégration par les
mécanismes de marché
L'approfondissement
de l'intégration européenne par des
mécanismes de marché concerne le marché interne communautaire et les
rapports extérieurs avec les partenaires extra - communautaires. Deux
politiques essentielles : la politique de la concurrence et la politique
commerciale extérieure commune. La 1ère concerne la régulation des
marchés domestiques, en particulier aujourd'hui l'activité des grandes
entreprises. La 2ème organise le libre-échange avec les pays tiers, tout en
prévoyant un dispositif de protection des activités sensibles.
Section 1 - La politique de la concurrence
Sans rechercher l'impossible concurrence pure et parfaite,
la Commission s'efforce de réserver aux firmes européennes ou
étrangères de l'union douanière des conditions équivalentes.
Les textes communautaires consacrent plusieurs articles
aux règles de concurrence applicables aux entreprises et aux aides
d'Etat.
De plus, dans la période contemporaine, est intervenu un
processus de déréglementation des monopoles de services publics
marchands (amélioration de la prestation fournie en termes de prix
et de qualité).
L'article 4 du traité modifié sur la Communauté européenne
affirme l'attachement de celle-ci au système de l'économie de
marché.
La politique menée par la Commission sous le contrôle de
la CJE établit l'ouverture de l'union douanière à
tous les
opérateurs économiques et à tous les utilisateurs, et empêche
l'abus
de pouvoir économique par le maintien d'une pluralité
de centres de décision indépendants. En ce qui concerne les
entreprises, la politique de la concurrence vise, d'une part, à
réglementer les ententes et, d'autre part, à interdire l'abus de
position dominante et à contrôler les concentrations.
Le cadre législatif de la politique européenne de concurrence est
constitué par les articles 81 à 89 du traité CE. Des règlements du Conseil et de la
Commission prévoient des règles supplémentaires. La politique européenne de
concurrence comprend les 5 domaines d’action suivants:
- l’interdiction des accords qui restreignent la concurrence tels les
ententes (article 81);
- l’interdiction des abus de position dominante (article 82);
- l’interdiction des concentrations qui créent ou renforcent une position
dominante (règlement sur les concentrations);
- l’interdiction des aides d’État (articles 87 et 88) ;
- la libéralisation des secteurs monopolistiques (article 86).
A - Les règles de concurrence applicables aux entreprises et
aux aides d’Etat
L'article 83 précise que l'application des principes des
articles précédents 81 et 82 se fera par des règlements ou des
directives votés à la majorité qualifiée (différence avec le traité de
Rome requérant l'unanimité).
Au contraire d'un système français acceptant la liberté des
ententes avec des interdictions ponctuelles, le droit communautaire
conformément au système allemand pose le principe d'une
interdiction générale des ententes tempérée par des dérogations
possibles.
1 - L’analyse des comportements d’entreprises
Tout d’abord, examinons le cas de l’entente : accord ou concertation
entre plusieurs entreprises dominant le marché sur le niveau des prix ou la
quantité de la production par exemple. Si quelques entreprises dominantes
s’accordent pour baisser les prix, afin d’attirer une clientèle plus
nombreuse, elles risquent d’entraîner la disparition de plus petites entités.
Les ententes sont donc interdites par l’article 85 du traité de Rome (actuel
art. 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne-TFUE).
Cet article a notamment été appliqué en 1994 lors du démantèlement
du Cartel du carton, qui réunissait tous les grands fabricants européens, ou
de celui du ciment la même année. Ce principe connaît cependant des
dérogations.
Selon l’article 85 (actuel art. 101 TFUE), ce dispositif ne
s’applique pas pour les ententes contribuant à l’amélioration de
la production ou de la distribution, au progrès technique ou
économique et à l’intérêt des consommateurs et qui
n’éliminent pas la possibilité de la concurrence. Ces conditions
sont cumulatives et doivent donc être réunies simultanément pour
échapper au principe de l’interdiction. Des réformes récentes sont
venues modifier ce système :
- un règlement de 1999 a assoupli les règles d’exemptions
des pratiques concertées et des accords verticaux pour le domaine
des fournitures et de la distribution ;
 un règlement du 31 juillet 2002 a fait de même pour les accords
verticaux dans le secteur automobile ;
enfin, à partir du Livre Blanc sur la modernisation de la politique de la
concurrence de 1999, un règlement, adopté le 16/12/2002 et appliqué à
partir du 1/5/2004, modifie le régime applicable aux ententes. Il vise à
remplacer le système
de notification et d’autorisation préalable des
accords par des exceptions légales, à renforcer un contrôle a posteriori
des pratiques des entreprises et à développer une application
décentralisée des règles de concurrence en donnant plus de poids aux
autorités et aux juridictions nationales.
Il s’agit donc de soulager un peu la Commission européenne
aujourd’hui en charge du respect du droit européen de la concurrence.
La réglementation concerne aussi les abus de position dominante.
Il s’agit de contrôler la conduite d’une entreprise en situation
dominante sur un marché donné. Le traité de Rome ne condamne pas en soi
la position dominante (plus de 50 % des parts de marchés), mais seulement
son abus. Est considéré comme abusif tout comportement unilatéral
inéquitable pour les concurrents et nuisant à une situation de concurrence
normale (art. 82 TCE et 102 TFUE).
Exemple : si une entreprise dispose de 80% d’un marché et décide de baisser
massivement ses prix, elle agit clairement de manière abusive et nuisible à la
concurrence.
EXEMPLE
Le numéro un mondial du logiciel Microsoft a été condamné en 2004, 2006
et 2008 par la Commission pour des abus de position dominante concernant la
vente liée de son système d’exploitation Windows avec le logiciel d’accès au fichier
son et video sur Internet RealPlayer et le navigateur Web Internet Explorer.
L’entreprise a dû s’acquitter de plusieurs amendes d’un montant total de
1,676 milliard d’euros. Elle a dû aussi communiquer ses codes source à ses
concurrents et mettre en vente sur l’Espace numérique européen une version de
son système Windows découplée de RealPlayer et proposer un écran de choix de
tous les navigateurs Internet. L’application des articles 101 et 102 se fait a
posteriori à partir de l’évaluation des pratiques des entreprises sur la base du
règlement du 16 décembre 2002, entré en application le 1er mai 2004.
Enfin, les règles communautaires prennent en considération les concentrations des
firmes que nous allons davantage détaillées ci-dessous.
2 – La réglementation en matière de concentration des firmes
L'unification du marché communautaire  les firmes à abandonner leur stratégie
multinationale, fondée sur l'implantation dans chaque pays de filiales autonomes et
diversifiées, pour établir une spécialisation sur une base européenne, c'est-à-dire adopter des
stratégies globales en Europe. Simultanément, les grands groupes européens ont renforcé
leur implantation aux Etats – Unis (intégration européenne n'étant qu'une composante de la
mondialisation de leurs activités). La CE apparaît comme un lieu transitoire de l’intégration
économique mondiale. L'homogénéisation croissante de la demande européenne favorise la
globalisation des firmes dans tous les secteurs. Cette stratégie de globalisation nécessite une
vigilance sur les conditions de concurrence intra-communautaires et un contrôle éventuel
des opérations de concentration.
a - L'analyse coûts - avantages d'une fusion d'entreprise
Plusieurs avantages sont attendus d’une fusion d’entreprises :
- des économies de coût liées à la grande dimension ;
- l'internalisation d'activités qui, réalisées sur le marché, conduiraient à des
coûts de transaction supérieurs (absorption d'un concurrent détenant une
information, une image de marque, un réseau de distribution ou un
management) ;
- la mise en cause des chefs d'entreprise inefficaces par un véritable
marché pour le contrôle des entreprises.
Deux effets peuvent être généralement observés lors d'une fusion
d'entreprises :
- un gain d'efficacité abaissant les coûts de production ;
- l'apparition d'un pouvoir de monopole pouvant se traduire
par une hausse des prix.
Soit la situation initiale suivante de concurrence imparfaite :
D(p) est la demande qui s'adresse à la firme pour son produit ; le
prix P0 est supposé exister avant l'opération de fusion des firmes.
Ce prix est supérieur au coût marginal C0 et donc au prix de
concurrence pure et parfaite. Après la fusion, il se produit à la
fois une baisse du coût marginal au niveau C1 (gain d'efficacité)
et une élévation du prix au niveau P1 (pouvoir de monopole se
traduisant par une hausse des prix, justifiée par la volonté de la
firme de récupérer les sommes dépensées pour la fusion, le plus
rapidement possible). Les conséquences en termes de bien-être
social net peuvent être dégagées à partir de l'évaluation des
surplus des consommateurs et des producteurs :
- la somme des surfaces A et B représente la perte de
surplus des consommateurs due à la hausse du prix ;
- les surfaces A + D - C correspondent aux profits
supplémentaires obtenus par la firme.
L'effet social net de la fusion est :
Surplus net global = (A + D - C) - (A + B) = D - (B + C)
La fusion est socialement bénéfique si D > B
+ C. Des gains limités en termes d'efficacité peuvent
être
suffisants
pour
contrebalancer
les
conséquences négatives dues à l'accroissement du
pouvoir de monopole.
Dans la mesure où la perte des surplus du
consommateur et du producteur (B + C) n'est
établie que sur la réduction de quantités produites,
une réduction de coût limitée, due à un gain faible
d'efficacité sur toute la quantité produite Q1, peut
s'avérer
suffisante
pour
neutraliser
les
conséquences négatives de l'accroissement du
pouvoir de monopole.
b - La concentration des firmes dans l'Union européenne
Les analyses empiriques montrent qu'une intégration
complète du marché européen doit permettre une réduction du
pouvoir de monopole des entreprises sur leur marché national
et entraîner des gains plus élevés que dans le cadre d'une
intégration partielle (en effet, les avantages de la grande
dimension et de la concurrence sont cumulés).
De plus, les hausse de prix induites par une fusion sont
d'autant plus limitées que le nombre de firmes étrangères
exerçant une pression concurrentielle est important. Il existe
des indicateurs généraux établissant une présomption qu'une
fusion présente plutôt un danger d'effet de monopole ou au
contraire des potentialités d'économies de dimension.
Citons quelques facteurs facilitant l’émergence d'un pouvoir
de monopole:
- une part de marché très élevée et une concurrence très dispersée ;
- une faible ouverture aux échanges internationaux et de fortes
barrières de protection à l'entrée du marché ;
- l'existence d'un produit différencié (situation de marché de
concurrence monopolistique).
Des situations spécifiques facilitent au contraire l'émergence des
économies de dimension. Ce sont :
- les activités à forte intensité en capital et à contenu
technologique élevé, c'est-à-dire des activités à coûts de
production élevés, requérant la recherche de la grande dimension ;
-la présence d'importants excès de capacité (industries en
déclin où des nationalisations peuvent s'avérer nécessaires).
Les études empiriques sur les effets des fusions donnent des résultats
contrastés et ont conduit la Commission européenne à penser "qu'une
présomption générale favorable aux fusions des firmes n'était pas justifiée".
En décembre 1989, le Conseil des Ministres a adopté un règlement
relatif au contrôle des opérations de concentration donnant à la
Commission
le
pouvoir
d'examiner
les
concentrations avant
leur
réalisation de manière à déterminer si celles-ci vont ou non entraîner une
position dominante.
Le règlement s’applique à toutes les concentrations ayant
européenne». Cela est le cas lorsque:
une «dimension
- le CA total réalisé sur le plan mondial par l'ensemble des entreprises concernées
représente un montant > à 5 milliards d'euros ET
- le CA total réalisé individuellement dans l’UE par au moins 2 des entreprises
concernées représente un montant > à 250 millions d'euros, à moins que chacune des
entreprises concernées réalise plus des 2/3 de son CA total dans l’UE à l'intérieur d'un
seul et même pays.
Si les seuils précités ne sont pas atteints, il s’agit néanmoins d’une
concentration de dimension européenne, si:
- le CA total réalisé sur le plan mondial par l’ensemble des entreprises concernées
représente un montant > à 2,5 milliards d’euros;
- dans chacun d’au moins 3 pays de l’UE, le CA total réalisé par toutes les
entreprises concernées est > à 100 millions d’euros;
- dans chacun d’au moins 3 pays de l’UE, le CA total réalisé individuellement par au
moins 2 entreprises concernées est > à 25 millions d’euros;
- le CA total réalisé individuellement dans l’UE par au moins 2 des entreprises
concernées représente un montant > à 100 millions d’euros, à moins que chacune des
entreprises concernées réalise plus de 2/3 de son CA total dans l’UE à l’intérieur d’un
seul et même pays.
DANS LES FAITS
Depuis le 21/09/1990 jusqu’au 31/12/ 2009, 4317 opérations ont
été notifiées à la Commission, au terme d’une procédure précise quant à
son déroulement et son échéancier. La Commission a assorti son
approbation de conditions destinées à résoudre des problèmes de
concurrence dans 286 cas et elle a pris 20 décisions d’interdiction, soit
0,5% du total.
Notons que 132 opérations ont été retirées. Au final, 3780
opérations ont été jugées compatibles. Cela dit, les interdictions ont eu
un écho assez fort, notamment celle du 3/07/2001 relative au projet de
fusion entre General Electric et Honeywell, 2 groupes américains qui
avaient obtenu l’accord des autorités antitrust aux Etats-Unis et celle
concernant la prise de contrôle de Legrand par Schneider le 10/10/ 2001.
Mais en 2002, la CJCE a annulé 3 des décisions d’interdiction de fusion de la
Commission dont celle relative à la fusion Legrand et Schneider (22/10/2002) en
remettant en question la qualité de l’analyse économique des services de la Commission
et en soulignant son absence de prise en considération des engagements auxquels ces 2
firmes semblaient vouloir souscrire.
En 2004, le veto opposé à la tentative de fusion entre les groupes américains
Worlcom et Sprint a été également annulé par la CJE. Dans une certaine mesure,
l’autorité de la Commission a été atteinte par ces décisions qui s’ajoutent à une critique
de fond sur la difficulté que l’institution européenne rencontre pour concilier politique
de la concurrence et politique industrielle.
Notons qu’en 2007, d’après le classement établi par le Financial Times en
fonction de leur valeur boursière, sur les 500 premières firmes mondiales quant à leur
valeur boursière, 183 étaient américaines, 48 japonaises et seulement 145 européennes
pour un marché pourtant plus important.
3
-
Les
règles
relatives
aux
aides
d'Etat
Cette politique concerne notamment les aides autorisées.
L'intervention financière publique dans une économie de marché doit
rester cohérente avec l'esprit d'une économie de marché. Les aides des
EM
ne
sont
pas
nécessairement
compatibles
avec
le
bon
fonctionnement de l'union douanière. La surveillance communautaire
s'exerce par les articles 87 et 88 (articles 107 et 108 du TFUE). Les
soutiens prohibés ne sont pas nuls de plein droit mais doivent être
supprimés ou modifiés au terme d'une procédure. L'incompatibilité
porte sur les aides accordées par les Etats, ou sur ressources d'Etat
(collectivités et organismes publics), qui affectent les échanges entre les
EM et faussent ou menacent de fausser la concurrence.
Des dérogations importantes  aides pour favoriser le
développement économique des régions en difficulté, celles
appuyant la réalisation d'un projet d'intérêt européen commun
(aides à l'aéronautique dans le cadre du projet Airbus, etc) ou celles
favorisant la promotion de la culture et la conservation du
patrimoine.
Notons que des subventions peuvent être accordées pour
remédier à une perturbation grave de l'économie (crise de la filière
bovine, par exemple), à des calamités naturelles, etc.
Les interventions de la Commission, chargée par l'article 88 de
surveiller les aides d'Etat, se sont progressivement accrues parce que
les EM, en raison de difficultés économiques liées à l'accentuation de
la concurrence internationale et à la crise économique, ont accordé
davantage d'aides.
La Commission a autorisé un régime d’aide temporaire français
jusqu’à la fin 2010, sous forme de taux d’intérêt réduits pour
soulager
les firmes ayant des difficultés de financement
(resserrement du crédit dû à la crise financière) et ceci, au titre
d’ «une perturbation grave de l’économie d’un EM ».
L’article 108 impose aux EM d’informer la Commission des
mesures projetées. La compatibilité de l’aide avec le marché
intérieur est étudiée ainsi que les conditions de son aménagement
ou sa suppression éventuelle.
Exemple : en 1996, l’Etat français avait accordé aux entreprises du textile
(concurrencées par les pays du sud-est asiatique) des aides sous la forme de cotisations
de Sécurité sociale sur les plus bas salaires et d’allègement dégressif sur les salaires plus
élevés pour préserver l’emploi (plan Borotra). Le dispositif a été appliqué sans attendre
la réponse de la commission. La CJCE a condamné le 5/10 /99 l’Etat français à se faire
rembourser les allègements de charges consentis. Autre exemple : la simple annonce en
2002 d’une avance d’actionnaires de 9 milliards d’euros à France Telecom (dans le
cadre d’un plan de recapitalisation de la firme) a été condamnée en août 2004 par la
Commission comme une aide d’Etat incompatible avec le Marché commun. On voit
donc que des contraintes très fortes pèsent sur les EM dans leur politique industrielle.
L’importance des pouvoirs de la Commission dans ce domaine est manifeste. Rappelons
que le Conseil peut autoriser les aides d’Etat à l’unanimité en raison de «circonstances
exceptionnelles ».
B - La déréglementation des monopoles de services publics
marchands dans l'Union européenne
L'article 106 du TFUE affirme cette évolution. Il précise que "les
entreprises chargées de la gestion des services d'intérêt économique général ou
présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles de
concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à
l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été
impartie". La Commission européenne peut édicter des directives pour ouvrir
ces secteurs à la concurrence. Cependant, les entreprises de services publics de
réseaux (transport, énergie, communications) correspondent à des monopoles
naturels, et il est admis que leur gestion peut nécessiter une régulation étatique,
notamment en ce qui concerne la tarification du monopole.
1 - La tarification en situation de monopole naturel
Dans le cas général, le monopole est réprouvé, car il conduit à fixer des
prix supérieurs et des quantités inférieures à l'optimum collectif. Mais un
monopole naturel permet de produire plus efficacement, car à moindre coût : en
effet, le coût minimal du bien ou du service est obtenu par une seule firme qui
assure toute la production. Le défaut de marché associé au monopole naturel
est celui des rendements croissants (graphique ci-dessous).
La fixation des prix au coût marginal qui maximise le bien-être
collectif entraîne une perte pour la firme.
RM est la recette moyenne du producteur (ou fonction de demande
inverse). Rm est la recette marginale du producteur. La fonction de coût
total est de la forme : C(q)= Cf + Cm.q. Cm est le coût marginal, supposé
constant et toujours inférieur au coût moyen. Cf est le coût fixe. La fixation
du prix au niveau du coût marginal, Cm, correspond au point F, (prix OA et
quantité produite q).
Dans cette situation, le monopole vend à perte. Ses ventes
s'élèvent à Cm.q et ses coûts atteignent le montant Cf + Cm.q : le déficit
est égal au montant du coût fixe. La recette ne couvre le coût de
production que lorsque la firme fixe un prix unitaire au moins égal au
coût moyen, c'est-à-dire au point C (coût fixe égal à l'aire ABCD). Cette
situation, plus favorable au producteur, entraîne une diminution du bienêtre de la collectivité (perte nette de bien-être égale à l'aire BFC). La
maximisation du profit du monopole naturel intervient pour un prix
supérieur au coût moyen (prix de service public non praticable) égalisant
la recette marginale au coût marginal (équilibre p*, q*).
Les défaillances de marché légitiment l'intervention de la
puissance publique. La tarification du produit ou du service du
monopole peut connaître plusieurs modalités, par exemple la
tarification administrée, avec intervention d'une autorité fixant le
prix de vente du bien ou service au coût marginal et compensant le
déficit du monopole naturel par une subvention.
L'action des pouvoirs publics peut aussi se traduire par la
nationalisation du monopole naturel, l'attribution de droits
d'entrée dans la branche, la concession de marchés, le contrôle
des ententes et des fusions, etc.
La
réglementation
instaure
donc
un
environnement
contraignant qui incite les producteurs à se comporter comme s'ils
étaient
dans
concurrence
un
contexte
concurrentiel.
L'ouverture
à
la
vise à rendre les activités de réseau plus
performantes en termes de prix et de qualité. Son principe peut
être de limiter le monopole au seul maillon de ses activités en
monopole naturel : les infrastructures restent en situation de
monopole mais l'accès à plusieurs entreprises est autorisé pour
promouvoir la concurrence sur les services.
2 - La conception européenne de la déréglementation
La voie d'ouverture à la concurrence, autorisant l'accès aux
infrastructures à de nouveaux opérateurs (existence d'une concurrence au
moins potentielle) sans exiger le démantèlement des monopoles historiques,
est la voie suivie par la Commission européenne. La concurrence pourra
porter en fait sur les services offerts.
Une difficulté doit néamoins être surmontée : lorsque les services sont
libéralisés et qu’ils font l’objet d’un prix unique sur le territoire, des concurrents peuvent
se manifester pour réaliser des profits là où les tarifs sont supérieurs aux coûts (lignes
fréquentées ou régions peuplées). Or les prix élevés dans les secteurs rentables
servaient à l'ancien monopole historique à éponger les pertes des secteurs non
rentables (régions insulaires, de montagne, zones d’accès difficile); cette nouvelle
concurrence peut l'inciter alors à abaisser les prix dans les zones rentables, supprimant
ainsi les anciennes péréquations tarifaires (ou subventions croisées) avec le risque de
cessation d'activités dans les zones déficitaires.
Une libéralisation à géométrie variable intervient, distinguant les
infrastructures des services: les premières peuvent continuer à être
gérées par des monopoles publics alors que les seconds font l'objet
d'une ouverture à la concurrence modulée selon les secteurs.
Dans le domaine de l'électricité, par exemple, la directive du 19
décembre 1996 a ouvert le marché de façon progressive, à la
différence du transport aérien et des télécommunications.
QUELQUES EXEMPLES
On peut noter la situation suivante pour le secteur aérien : à
partir du 1er janvier 1993, les lignes internationales entre États membres
ont été ouvertes à la concurrence. Ainsi, un vol Paris-Stuttgart, qui ne
pouvait être assuré auparavant que par Air France ou Lufthansa peut
désormais l’être par n’importe quelle compagnie européenne. Depuis le
1er avril 1997, ce sont les lignes internes qui ont été libéralisées :
Lufthansa peut donc desservir Paris-Marseille, Air France Barcelone-Séville.
Et, depuis le 31 mars 2008, toutes les compagnies aériennes de l’UE et des
États-Unis peuvent exploiter des vols directs vers les États-Unis au départ
de n’importe quel aéroport de l’Union et plus seulement à partir de leur
pays d’origine.
Pour le transport ferroviaire, le libre accès a été étendu au
réseau transeuropéen de fret ferroviaire le 1er mars 2003, et à l’ensemble
du réseau international de fret en 2008. Pour les voyageurs, la
libéralisation des voyages internationaux est effective depuis le 1er janvier
2010.
La nécessité de tenir compte des obligations de service
public a fait émerger le concept de service universel qui est,
pour tout utilisateur, un service minimum dont la qualité est
spécifiée à un prix accessible. Il s'applique à des services dont
le caractère économique est reconnu, et répond au souci de
permettre un fonctionnement concurrentiel des marchés avec
un niveau minimum de cohésion sociale. Ces obligations de
service public ont permis la réservation exclusive, aux
prestataires historiques, d'activités rentables permettant un
équilibre d'exploitation (maintien des subventions croisées).
Ainsi, certains services universels (tel le service postal) se
caractérisent par un tarif unique raisonnable sur tout le territoire.
Pour cela, les postes ont bénéficié de l'attribution exclusive du
service de distribution du courrier transfrontalier entrant et du
publipostage, leur permettant de subventionner leurs activités moins
rentables. Dès 1993 et 1994, respectivement les arrêts Corbeau et
commune d'Almelo avaient légitimé la nécessité de services réservés
et de subventions croisées pour éviter que les zones déshéritées ne
perdent leurs services essentiels. Le seul problème est que ces
avantages n’ont été que momentanément consentis.
La question est donc posée de la compatibilité du droit européen
en matière de concurrence et du respect des missions de service
public. Le traité de Lisbonne prévoit que la loi européenne respecte la
compétence qu’ont les États membres, dans le respect des traités, «de
fournir, de faire exécuter et de financer ces services» (art. 14 TFUE).
La solution retenue est la suivante : en échange de l'accès aux
infrastructures et au marché, les nouveaux entrants prennent en charge
une partie des missions de service public (ce qui compense ainsi la
perte des marchés réservés).
Dans le domaine des services publics comme dans celui de la
compétitivité industrielle de l’Union européenne, la politique de la
concurrence se trouve au cœur des grands débats européens.
ANNEXES
Annexe 1 – La spécialisation productive européenne
Pleinement insérée dans la mondialisation, l’UE réalise
des performances inégales sur les marchés extérieurs, qui
méritent un examen approfondi.
Pour rendre compte de cette situation, une étude récente
du CEPII va être reprise ici : «Industries ou services : le
dilemme de la spécialisation européenne», article de C. Herzog, D.
Ünal, Lettre du CEPII, décembre 2011, n°317.
Le commerce mondial est marqué, depuis 2000, par une
forte demande de produits primaires, l’accélération des
exportations des grands pays émergents et l’essor des
échanges de services sous l’impulsion des pays développés.
Comment, dans ce contexte, la spécialisation
internationale de l’Union européenne a-t-elle évolué ?
L’Europe a renforcé sa spécialisation dans le tertiaire
et est restée fortement positionnée sur l’industrie. Elle
occupe une situation intermédiaire entre les Etats-Unis et
le Japon.
L’étude des avantages comparatifs des pays
européens montre une grande diversité et
d’importantes recompositions au cours des dix
dernières années.
La plupart des pays de l’Union ont une solide
spécialisation industrielle et/ou ont renforcé leurs
spécialisations dans les nouveaux services, les
avantages comparatifs de certains Etats membres
restent focalisés sur des échanges de services dont le
potentiel de croissance paraît plutôt limité.
Les échanges de biens manufacturés, de services et de
biens primaires représentaient respectivement 67%, 20 % et
13 % du commerce mondial en 2007. L’industrie reste donc le
secteur majeur du commerce international, même si sa part a
reculé de 3 points depuis 1995, sous l’effet de l’évolution des
prix relatifs : hausse des prix des produits primaires et baisse
des prix dans les branches manufacturières (électronique,
textile...).
Globalement, les échanges de services ont connu un
rythme de croissance similaire à celui de l’ensemble du
commerce mondial (+8,5 % par an en valeur) et ont donc
maintenu leur part. Mais la nature des services échangés s’est
modifiée grâce aux innovations technologiques. La
numérisation systématique de l'information  nouvelles
formes de production et de consommation.
Certains services, qui jusqu’alors ne pouvaient
pas techniquement être échangés, ont pris une part
importante dans le commerce mondial : les «autres
services» qui sont distincts du transport de
marchandises et des voyages (tourisme).
Ces services constituent plus de la moitié des
échanges du secteur tertiaire. Leur croissance est
supérieure à celle des échanges internationaux : +24
% par an de 1995 à 2007 pour les services
d’informatique et d’information, +16 % pour les
services financiers, +11 % pour les services
d’assurance, +10 % pour les redevances et les droits
de licence, les services de communication et les
services culturels (tableau 1).
Les pays développés, qui maîtrisent les évolutions technologiques dans le
secteur tertiaire, dominent les échanges de services. Dans ce domaine, leur part des
exportations mondiales est la plus élevée (77 %) n’ayant concédé aux PED que 4
points sur la période 1995-2007, alors qu’ils en perdaient 13 dans les exportations
manufacturières mondiales. Dans la catégorie « autres services», les pays développés
concrétisent plus de 95 % des exportations mondiales pour les postes « redevances et
droits de licence » et « services financiers ».
Globalement, les pays développés sont exportateurs nets de produits tertiaires.
Dans les services (autres que transports et voyage), leur excédent, en forte croissance
depuis le milieu des années 1990, compense en 2007 près de la moitié de leur déficit
en produits primaires (+372 contre -784 milliards de dollars). Ces services ne sont pas
loin d’atteindre le poids des produits primaires dans le commerce international (10 %
contre 13 %).
Enfin, la crise financière s’est accompagnée d’une chute sévère des échanges
de biens manufacturés (-6 % en moyenne annuelle entre 2007 et 2009, tableau 1) et si
la baisse fut moindre pour les biens primaires (-3,6 %), elle fut très limitée pour les
services dans leur ensemble (-0,8 %), les « autres services » ayant enregistré une
croissance exceptionnelle (+3 %) au regard de la conjoncture.
I - L’Europe, engagée dans le tertiaire, n’a pas réduit sa spécialisation
industrielle
La spécialisation internationale des pays révèle les avantages et
désavantages comparatifs de leurs appareils productifs. Le graphique 1
présente, pour les trois grands secteurs (biens primaires, biens
manufacturés et services), les points forts et les points faibles des ÉtatsUnis, de l'Union européenne et du Japon.
La dynamique en faveur des services est présente dans chacune des
trois zones mais le contraste des profils de spécialisation se fait autour des
positions respectives de l’industrie manufacturière et des services. Ainsi,
le Japon enregistre ses seuls avantages comparatifs dans les produits
manufacturés alors que les points forts des États-Unis sont concentrés
dans le secteur tertiaire. A l’exception des services d’assurance, les EtatsUnis ont des avantages comparatifs dans toutes les catégories de services.
Les «redevances et droits de licence » viennent en tête (leader mondial).
L’UE connaît une position intermédiaire. Elle est fortement
spécialisée dans les services, sans être désengagée du
secteur industriel ; actuellement, les produits manufacturés et
les services constituent pour l’UE des points forts de même
ampleur. Les secteurs de la mécanique, de la chimie et des
véhicules sont des points forts de l’industrie européenne, et le
demeurent.
Mais les services ont effectué une percée remarquable, en
particulier les services financiers, les services d’informatique
et d’information, ainsi que les autres services aux entreprises.
En 2007, au début de la crise financière, les produits
financiers occupaient le premier rang des avantages
comparatifs en Europe, devant les machines spécialisées.
II – La diversité des spécialisations au sein de l’UE à 27
Analysons les positions des pays membres de l’UE sur les
grands secteurs à la fin des années 2000 et les évolutions sur
une dizaine d’années (graphiques 2a et 2b). Pour chaque pays,
sont présentés leurs cinq premiers avantages comparatifs en
pourcentage des avantages comparatifs totaux (graphique 3).
Seuls trois pays de l’UE détiennent des avantages
comparatifs dans les produits primaires (graphique 2a) : le
Danemark (pétrole brut, gaz naturel), l’Estonie (minerais de
fer, produits agricoles) et la Lettonie (produits agricoles). Le
principal point fort de ces deux pays baltes se situe
néanmoins dans le secteur tertiaire (renforcement de leurs
positions dans les «autres services»).
Pour l’industrie et les services, trois types de configuration se
dégagent :
1 - Une forte spécialisation manufacturière. C’est la
caractéristique de l’Allemagne, de la Finlande, de l’Irlande et de
l’Italie. Cependant, l’Italie est, depuis le milieu des années 1990, le
seul de ces 4 pays à avoir accentué son avantage comparatif dans
l’industrie (+10 points). Elle s’est dégagée nettement dans le textilehabillement, mais bénéficie d’une spécialisation forte et croissante
dans la filière mécanique (machines et moteurs). C'est le pays de
l'UE dont la spécialisation est la plus diversifiée (graphique 3).
L’Irlande est performante dans l’industrie chimique (produits
organiques de base et pharmaceutiques) et dispose de forts
avantages comparatifs dans les produits électroniques (filiales des
firmes multinationales implantées sur son sol).
Dans le secteur tertiaire, les activités des filiales
produisent des impacts symétriques forts sur le solde irlandais
dans 2 postes de services : ce pays a le plus fort excédent de
l’UE pour les services d’informatique et d’information, et son
plus large déficit pour les redevances et les droits de licence.
Au total, les 5 principaux avantages comparatifs de
l'Irlande représentent 80 % de ses avantages comparatifs
totaux (un des pays les plus spécialisés de l'UE). Autre petit
pays, la Finlande est, grâce à ses ressources naturelles, très
spécialisée dans les produits de la filière du bois et du papier ;
mais, depuis dix ans, elle voit ses avantages comparatifs
diminuer dans cette filière, tandis qu’elle maintient ses
positions dans l’électronique et en acquiert dans les produits
mécaniques et électriques.
Quant à l’Allemagne, elle montre une spécialisation semblable à
celle du Japon au sein de la Triade : ses excédents sont les plus élevés dans
les filières des véhicules, de la mécanique et de la chimie. Dans la filière des
véhicules, l’industrie allemande, auparavant surtout placée sur les produits
haut de gamme, a accru ses avantages comparatifs dans les produits de
gamme moyenne en bénéficiant du travail qualifié et bon marché de soustraitants implantés dans les nouveaux États membres.
2 - Une spécialisation peu marquée, à la fois dans
l’industrie et les services
Parmi les pays de l’UE dont les spécialisations sur les grands secteurs
apparaissent relativement peu marquées, on distingue trois types de
situations.
D’abord celle de la France et des Pays-Bas, qui au milieu des années
1990 avaient des spécialisations peu marquées au niveau des grands
secteurs et qui n’ont, à ce niveau agrégé, guère modifié leur engagement
dans l’industrie et les services.
Ensuite la Suède qui a quasiment inversé ses positions
initiales sur l’industrie et les services au bénéfice de ces
derniers et en particulier des nouveaux services à fort
potentiel de croissance (autres services aux entreprises,
redevances et droits de licence, services d’informatique et
d’information).
Enfin, les pays d’Europe centrale ont sensiblement
renforcé leurs positions dans l’industrie manufacturière
(graphique 2b). L’élargissement à l’Est s’est en effet traduit,
autour de l’Allemagne, par une dynamique industrielle qui a
modifié en profondeur les spécialisations des nouveaux États
membres. Ces économies sont de plus en plus engagées dans
les filières des véhicules (Pologne, République tchèque,
Slovaquie, Hongrie), de la mécanique (Pologne, République
tchèque) et de l’électronique (Hongrie, Slovaquie).
Cette nouvelle dynamique industrielle a eu des effets sur la
spécialisation d’autres pays membres. Les avantages comparatifs de la
France, de l’ensemble Belgique-Luxembourg et de la Suède ont ainsi
sensiblement diminué dans les automobiles. La France, en contrepartie, a
renforcé ses points forts dans les produits pharmaceutiques, de
l’aéronautique et dans les nouveaux services (redevances et brevets). Les
Pays-Bas sont peu spécialisés : ils continuent à dégager d’énormes
excédents dans la filière agro-alimentaire, et ils ont réussi à transformer
un désavantage initial en avantage dans les produits mécaniques
(machines et moteurs), tout en gagnant des positions dans les autres
services aux entreprises.
3 - Une forte spécialisation dans le tertiaire
L’engagement massif, voire total, d’une dizaine de ses pays membres
dans le tertiaire apparaît aujourd’hui comme le talon d’Achille de la
spécialisation de l’UE-27. La plupart d’entre eux, toujours en situation de
rattrapage économique par rapport au noyau dur de l’Union et touchés
par la crise globale, dépendent de services traditionnels à faible potentiel
de croissance.
C’est problématique pour la Grèce : les seuls avantages comparatifs
dans les services de transport et de voyage représentent 85 % des
avantages comparatifs totaux. L’Espagne et le Portugal tirent
respectivement 45 % et 30 % de leurs avantages comparatifs totaux du
tourisme. Mais ils disposent aussi d’avantages comparatifs significatifs
dans l’industrie : l’Espagne pour les véhicules et l’agro-alimentaire, le
Portugal pour le textile et le bois-papier.
L’Autriche apparaît mieux armée. Le tertiaire (voyages et autres
services aux entreprises) est le seul grand secteur, source d’avantages
comparatifs, mais l'Autriche dispose de points forts dans l’industrie, les
biens intermédiaires et d’équipement avec des points faibles dans les
biens de consommation. Le Royaume-Uni s’est désengagé de l’industrie
pour s’impliquer fortement dans les services. Mais la spécialisation
tertiaire britannique n’est pas aussi diversifiée que celle de l’économie
américaine : les services financiers ont une place prépondérante (le tiers de
ses avantages comparatifs). Le premier rang qu’occupent ces mêmes
services dans les avantages comparatifs de l’ensemble de l’UE-27 est
essentiellement dû au tropisme financier du Royaume-Uni.
La spécialisation de l’UE, prise globalement, se
révèle finalement intermédiaire au sein de la Triade : ni
aussi industrielle que celle du Japon, ni aussi tertiaire que
celle des Etats-Unis. Cette position globale n’empêche pas
de forts contrastes nationaux. Parmi les pays fragilisés de la
zone euro, apparaît la Grèce dont les avantages comparatifs
sont beaucoup trop concentrés sur les services
traditionnels.
L’Italie, l’Irlande, l’Espagne et le Portugal ont en
revanche de meilleurs atouts qui découlent d’une
spécialisation plus diversifiée.
Source : C. Herzog, D. Ünal, Lettre du CEPII, article cité plus
haut.
Annexe 2 - Quel constat pour l’industrie française ?
Extrait du rapport L. Gallois, Pacte pour la compétitivité de l’industrie
française, novembre 2012
«L’industrie française atteint aujourd’hui un seuil critique, au-delà duquel elle est menacée
de déstructuration».
- La part de l’industrie (hors construction) dans la VA totale, en France, est passée de 18 %, en
2000, à un peu plus de 12,5 %, en 2011, situant le pays à la 15e place parmi les 17 pays de la zone
euro, loin derrière l’Italie (18,6 %), de la Suède (21,2%) ou de l’Allemagne (26,2 %).
- L’emploi industriel (hors BTP) s’est continuellement dégradé en passant de plus de 26 % de
l’emploi salarié total en 1980 (5,1 millions de salariés) à 12,6 %, en 2011 (3,1 millions de salariés).La
France perd plus de 2 millions d’emplois industriels en 30 ans. L’accroissement de la concurrence
étrangère (pays européens et pays émergents) explique entre 1/3 et la 1/2 des destructions
d’emplois sur la période 2000-2007.
- L’affaiblissement de l’industrie française  pertes de parts de marché considérables à
l’exportation : en Europe, 1er débouché commercial de la France (58,4 % des exportations en
2011), la part de marché des exportations françaises est passée de 12,7 %, en 2000, à 9,3 %,
en 2011. Sur la même période, les exportations intracommunautaires de l’Allemagne ont
progressé de 21,4 % à 22,4 %.
Globalement, le solde de la balance commerciale est passé d’un excédent de 3,5
milliards d’euros en 2002 à un déficit de 71,2 milliards d’euros (3,5 points de PIB), en 2011.
La balance hors énergie était de + 25,5 milliards d’euros en 2002, elle est de –25,4 milliards
d’euros en 2011. Cette situation impacte le déficit public et l’endettement du pays. La perte
de compétitivité a ainsi des conséquences majeures sur l’économie française.
L’industrie française n’a pas une spécialisation internationale sectorielle très différente de celle de
l’Allemagne. Mais hormis certaines niches, elle est plutôt positionnée, à la différence de l’Allemagne , sur
le milieu de gamme en matière de qualité et d’innovation (peu de facteurs différenciant et de ce fait, forte
exposition à la concurrence par les prix, alors que ses coûts sont relativement élevés – à l’exception du
coût de l’énergie – par rapport aux autres pays européens). Elle a donc été aussi très sensible à la hausse
de l’euro au cours de la décennie écoulée.
Elle se retrouve dès lors prise en étau entre :
- d’une part, l’industrie allemande positionnée sur un segment de gamme supérieur, moins sensible
au facteur prix. Déjà protégée par le niveau de gamme de ses productions, l’Allemagne a fait de surcroît
des efforts significatifs sur les coûts, notamment par le transfert d’une partie des charges sociales sur la
fiscalité (ce que commence à faire la France) et une politique de modération salariale au long de la
décennie. Précisons que les activités de services ont été largement dérégulées et offrent des salaires très
bas participant à la compétitivité globale mais «seraient, à juste titre, jugés inacceptables en France».
L’industrie allemande a conforté ses marges, accru
ses investissements et ainsi son avantage comparatif
- d’autre part, des pays émergents, certains pays d’Europe du Sud ou de l’Est, bénéficient
de coûts unitaires de production plus faibles que l’industrie française  renforcement de leur
compétitivité-prix et/ou investissement pour monter progressivement en gamme. Cas de la Chine
ou de la Corée du Sud dont «les capacités technologiques sont, chaque jour, plus
impressionnantes» ; ce processus est également engagé pour l’Inde, le Brésil, le Mexique, la
Pologne, la République Tchèque ou, désormais l’Espagne.
Face à cette concurrence, l’industrie française  préservation de sa compétitivité-prix
au détriment de sa compétitivité hors-prix : pour avoir des prix compétitifs  les industries
françaises rognent leurs marges (baisse de 30 % à 21% sur la période 2000-2011 mais
progression de 7 points en Allemagne). Cette évolution  dégradation de leur taux
d’autofinancement (64 % en France en 2012 contre 85 % en 2000 et près de 100 % en moyenne
dans la zone euro).
La productivité globale des facteurs n’a pas progressé en France au cours de
la dernière décennie du fait de l’insuffisance d’investissements de productivité
(équipement numérique des firmes et robotisation clairement en retard) et
d’innovation dans le processus de production.
Pour les mêmes raisons, les firmes françaises ont reculé sur les facteurs
hors prix – innovation, qualité, service – par rapport aux meilleures industries
européennes. L’industrie française ne parvient pas, sauf exception (luxe,
aéronautique, nucléaire, pharmacie, certains produits agro – alimentaires), à
monter en gamme.
§§§
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