P. Sartre extrait de « L`existentialisme est un humanisme

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M. Le Guen (2001)
Dégagez l’intérêt philosophique de ce texte en procédant à
son étude ordonnée.
Texte extrait de :
J.-P. Sartre,
L’existentialisme est un humanisme
pp 65 à 67, Nagel éditeur
1/ Repérez dans le texte les différentes unités
d’argumentation. (éventuellement les articulations logiques)
Tout matérialisme a pour effet de traiter tous les hommes y compris soi-même
comme des objets, c’est-à-dire comme un ensemble réactions déterminées que
rien ne distingue de l’ensemble des qualités et des phénomènes qui constituent
une table ou une chaise ou une pierre. Nous voulons constituer précisément le
règne humain comme un ensemble de valeurs distinctes du règne matériel.
Mais la subjectivité que nous atteignons à titre de vérité n’est pas une
subjectivité rigoureusement individuelle, car nous avons démontré que dans le
cogito, on ne se découvrait pas seulement soi-même mais aussi les autres. Par
le « je pense » contrairement à la philosophie de Descartes, |…], nous nous
atteignons nous-mêmes en face de l’autre, et l’autre est aussi certain pour nous
que nous-mêmes. Ainsi l’homme qui s’atteint directement par le cogito
découvre aussi tous les autres, et il les découvre comme la condition de son
existence. Il se rend compte qu’il ne peut rien être (au sens où l’on dit qu’on est
spirituel, ou qu’on est méchant, ou qu’on est jaloux), sauf si les autres le
reconnaissent comme tel. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut
que je passe par l’autre. L’autre est indispensable à mon existence, aussi bien
d’ailleurs qu’à la connaissance que j’ai de moi. Dans ces conditions, la
découverte de mon intimité me découvre en même temps l’autre, comme une
liberté posée en face de moi, qui ne pense, et qui ne veut que pour ou contre
moi. Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons
l’intersubjectivité, et c’est dans ce monde que l’homme décide ce qu’il est et ce
que sont les autres.
2/ Repérez dans le texte, dans chacune des unités
d’argumentation que vous venez de dégager, les concepts les
plus importants, et les éventuelles oppositions de concepts.
Tout matérialisme a pour effet de traiter tous les hommes y compris soi-même
comme des objets, c’est-à-dire comme un ensemble réactions déterminées que
rien ne distingue de l’ensemble des qualités et des phénomènes qui constituent
une table ou une chaise ou une pierre. Nous voulons constituer précisément le
règne humain comme un ensemble de valeurs distinctes du règne matériel.
Mais la subjectivité que nous atteignons à titre de vérité n’est pas une
subjectivité rigoureusement individuelle, car nous avons démontré que dans le
cogito, on ne se découvrait pas seulement soi-même mais aussi les autres. Par
le « je pense » contrairement à la philosophie de Descartes, |…], nous nous
atteignons nous-mêmes en face de l’autre, et l’autre est aussi certain pour nous
que nous-mêmes. Ainsi l’homme qui s’atteint directement par le cogito
découvre aussi tous les autres, et il les découvre comme la condition de son
existence. Il se rend compte qu’il ne peut rien être (au sens où l’on dit qu’on est
spirituel, ou qu’on est méchant, ou qu’on est jaloux), sauf si les autres le
reconnaissent comme tel. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut
que je passe par l’autre. L’autre est indispensable à mon existence, aussi bien
d’ailleurs qu’à la connaissance que j’ai de moi. Dans ces conditions, la
découverte de mon intimité me découvre en même temps l’autre, comme une
liberté posée en face de moi, qui ne pense, et qui ne veut que pour ou contre
moi. Ainsi découvrons-nous tout de suite un monde que nous appellerons
l’intersubjectivité, et c’est dans ce monde que l’homme décide ce qu’il est et ce
que sont les autres.
3/ Quel est le plan du texte ? Dégagez-en le schéma
argumentatif
Tout matérialisme a pour A
effet de traiter tous
les hommes y compris soi-même comme des
objets, c’est-à-dire comme un ensemble
Antithèse1
réactions déterminées
que rien ne distingue
de l’ensemble des qualités et des
phénomènes qui constituent une table ou
une chaise ou une pierre. Nous voulons
constituer précisément le règne humain
comme un ensemble de valeurs distinctes du
règne matériel.
Mais la subjectivité que nous atteignons à titre
B pas une subjectivité
de vérité n’est
rigoureusement individuelle, car nous avons
démontréAntithèse2
que dans le cogito, on ne se
découvrait pas seulement soi-même mais aussi
les autres. Par le « je pense » contrairement à
la philosophie de Descartes, |…], nous nous
atteignons nous-mêmes en face de l’autre, et
l’autre est aussi certain pour nous que nousmêmes.
C
Ainsi l’homme qui s’atteint directement par le cogito découvre aussi tous
les autres, et il les découvre comme la condition de son existence. Il se
Thèse1
rend compte qu’il ne peut rien
être (au sens où l’on dit qu’on est spirituel,
ou qu’on est méchant, ou qu’on est jaloux), sauf si les autres le
reconnaissent comme tel. Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il
faut que je passe par l’autre. L’autre est indispensable à mon existence,
aussi bien d’ailleurs qu’à la connaissance que j’ai de moi.
Dans ces conditions, la
découverte de mon intimité me
découvreD
en même temps l’autre,
comme une liberté posée en face
de moi,
qui ne pense, et qui ne
Thèse2
veut que pour ou contre moi.
Ainsi découvrons-nous tout de
suite un monde que nous
E
appellerons l’intersubjectivité,
et
c’est dans ce monde que l’homme
décide ce qu’il est
et ce que sont
Thèse3
les autres.
4/ Reformulation de chaque partie du texte
A
Antithèse1
B
Antithèse1
C
thèse1
D&E
Thèse2 et 3
Antithèse :
Selon les matérialistes, la l’existence humaine serait déterminée,
les comportements et les pensées des hommes seraient le
produit de relations causales (sur le modèle, par exemple, des
lois de la physique)
Antithèse :
Descartes postule bien que notre certitude fondamentale que
nous portons en nous est d’être des sujets, mais il fait de cette
certitude du « je pense » le produit d’une expérience subjective :
le cogito cartésien présenté comme « auto-suffisant »
Thèse principale :
Or « le pour-soi renvoie au pour autrui » (Sartre)
Autrui est la condition de mon existence
Ce que je pense de moi renvoie à un observateur qui le reconnaît
La connaissance que j ’ai de moi-même renvoie à autrui
Thèses conséquentes :
D : Les libertés de l ’autre et de moi se découvrent en même temps.
Dualité de ma relation à autrui : lui et moi pour lui sommes à la fois
amis et ennemis
E : Notre monde, notre patrie commune : l ’intersubjectivité.
En choisissant l’homme que je veux être je choisis aussi l’image que
je veux donner.de l’humain
5/ Plan de l’explication de texte
En quoi ne peut-on réduire la réalité humaine à un simple
déterminisme, conçu à la manière d’une causalité mécaniste,
semblable à celle établie par les sciences de la nature ? (A)
(antithèses A et En quoi ne peut-on pour autant réduire la subjectivité
B)
humaine au solipsisme ? (B)
Première
partie
Seconde
Partie
En quoi peut-on dire d’autrui qu’il est nécessaire à la fois à
mon existence et à la connaissance que j’ai de moi ? (C)
(Thèse
principale C)
Troisième
Partie
(Thèses
corollaires
D et E)
Cette nécessité réciproque d’autrui et de moi nous fondet-elle en tant que libertés, condamnés à n’agir que pour ou
contre l’autre ? (D)
Quel est ce monde de l’intersubjectivité où en façonnant mon
image, je façonne aussi celle d’autrui ? (E)
6/ Reformulation de l’idée principale du texte
Dans le meilleur des mondes d’Aldous Huxley, celui-ci
décrit un univers où les relations sociales sont
entièrement déterminées par un conditionnement
biologique et social. Mais une telle société serait aussi
celle de la mort de l’homme : seule une reconnaissance
de la liberté des individus, de la dignité des personnes,
bref, de la subjectivité peut fonder une société juste.
Ainsi Sartre, dans L’existentialisme est un humanisme
s’oppose à la fois au déterminisme rationaliste et au
subjectivisme absolu. On ne peut pas plus faire de
l’homme un être déterminé de manière mécaniste qu’on
ne peut l’enfermer dans une subjectivité solipsiste. Nous
sommes le fruit de la rencontre avec nos semblables qui
nous font exister et découvrir ce que nous sommes. Par
là même nous nous découvrons solidaires ou
adversaires dans un même monde, où vont s’affronter ou
s’unir nos libertés.
Bon courage !
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