Des zones sismiques peu connues Baffin et le Nunavik

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Le 16 février 2001
Des zones sismiques peu connues : Baffin et le Nunavik
L’un des pires tremblements de terre jamais enregistrés au Canada s’est
produit dans le Nunavut. Les experts croient que la région n’est pas au
bout de ses peines.
AARON SPITZER
Nunatsiaq News
IQALUIT — La terre a plié, la mer a tremblé et
un grondement a déchiré l’obscurité hivernale.
C’était le tremblement de terre le plus violent
jamais enregistré dans l’Est du Canada, une
secousse aussi importante que celles qui ont
récemment emporté de nombreuses vies
humaines en Inde et au Salvador.
Et c’est arrivé ici même, au Nunavut.
C’est le 20 novembre 1933 qu’un tremblement
de terre monstre a déchiré le fond océanique de
la baie de Baffin, au large, non loin de Pond
Les régions sismiques inconnues du Canada
Inlet.
Paul Street, sismologue à la Commission
géologique
du
Canada,
installant
un
sismographe, ou capteur sismique, à fjord
Grise l’été dernier. L’appareil fournit des
données à l'Expérience canadienne de
surveillance sismique dans l'Extrême Arctique,
qui a débuté en août 2000.
Les experts en tremblements de terre, appelés
sismologues, croient que la secousse avait
atteint une magnitude de 7,3 sur l’échelle de
Richter. Une secousse aussi puissante peut
projeter les êtres humains au le sol, détruire des
immeubles et déclencher des glissements de
(AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE LA
terrain et des tsunamis géants.
COMMISSION GÉOLOGIQUE DU CANADA)
Partout sur le globe, des instruments sismographiques avaient noté les effets du tremblement de
terre.
Contrairement au tremblement de terre en Inde du mois dernier, qui a tué environ 30 000
personnes, la secousse de la baie de Baffin n’aurait causé aucun dommage ou blessure.
Régions sujettes aux tremblements de terre
Bien que le formidable phénomène n’ait pas été un tremblement de terre dévastateur à l’époque, il
nous rappelle un fait largement inconnu : le Nunavut et le Nunavik sont parmi les régions les plus
sujettes aux tremblements de terre au Canada.
Selon les données recueillies par la Commission géologique du Canada, la côte nord-est de l’île
de Baffin et l’archipel de l’Extrême Arctique sont particulièrement sujets aux tremblements de
terre.
On compte, en moyenne, 40 tremblements de terre au Nunavut chaque année. La plupart sont peu
importants, d’une magnitude inférieure à 4,0. Ils peuvent produire un grondement sourd, mais
font bouger le sol de façon à peine perceptible.
Déjà en 2001, au moins trois secousses ont été notées sur le territoire. L’une d’elles, d’une
magnitude de 2,8 et trop subtile pour être ressentie, a pris naissance à 120 kilomètres à peine au
sud-est d’Iqaluit.
Les forts tremblements de terre dans l’Arctique orientale ne sont pas rares.
En 1989, sur la péninsule d’Ungava, dans le Nunavik, un tremblement de terre d’une magnitude
de 6,3 a ouvert la toundra et a secoué les localités environnantes. Les convulsions de la terre ont
fracassé la pierre, vidé partiellement un lac et en ont créé un autre où il n’y en avait jamais eu
auparavant.
Selon les experts, ce tremblement de terre était particulièrement peu profond. On évalue que son
épicentre se trouvait à trois kilomètres sous la surface terrestre, alors que la plupart des secousses
prennent naissance de 10 à 20 kilomètres sous la terre.
Un autre tremblement de terre violent, d’une magnitude de 6,1 a touché le nord de l’île de Baffin
en 1963.
Impossibilité de prédire les tremblements de terre
Le fait que des secousses aussi marquées se soient produites ici dans le passé indique peut-être
que d’autres sont à prévoir à n’importe quel moment.
« Cela démontre, sans aucun doute, que le potentiel de tremblements de terre semblables existe »,
affirme Maurice Lamontagne, sismologue à la Commission géologique du Canada.
M. Lamontagne déclare que ce n’est qu’en raison de la chance et de la faible densité de
population qu’aucun décès ou dommages n’aient résulté des secousses au Nunavut.
« C’est une question de chance, explique-t-il. Les communautés sont si éloignées les unes des
autres qu’il est peu probable qu’un tremblement de terre cause des dommages. »
Il n’existe aucune façon de prédire les tremblements de terre à l’heure actuelle. Cependant,
rappelle M. Lamontagne, on peut s’y préparer.
Étant donné la fréquence des secousses le long de la côte nord-est de l’île de Baffin, le Code
national du bâtiment exige que les nouvelles constructions dans la région respectent les exigences
de stabilité et parasismiques les plus strictes.
Même les constructions érigées ailleurs dans la région de Baffin et du Nunavik sont soumises à
des règlements plus sévères que dans d’autres régions du Canada.
Il est utile de savoir quoi faire quand un tremblement de terre se produit. Les experts en
sismologie conseillent de se mettre à l’abri sous un pupitre, une table, un lit ou un cadre de porte
si on se trouve à l’intérieur quand la terre tremble. Si on se trouve à l’extérieur, il faut s’éloigner
de tout ce qui risque de s’effondrer, comme les maisons ou les affleurements rocheux.
La science à la rescousse des secousses
Les experts ne savent pas vraiment pourquoi l’Arctique orientale est autant secoué.
La grande majorité des tremblements de terre, soit 97 %, se produisent aux limites des plaques
continentales ou tectoniques, là où de vastes pans de la surface de la Terre se frottent les uns aux
autres.
Pourtant, le Nunavut se trouve loin, à l’intérieur de la plaque tectonique nord-américaine. Les
tremblements de terre ici se produisent le long des failles internes, ou de points faibles de la
croûte terrestre. Dans de nombreux endroits, de telles failles contiennent peu d’énergie et de
pouvoir de choc. Souvent, ils ne manifestent aucune activité sismique.
« Mais on note de l’activité dans certaines régions, révèle M. Lamontagne. La partie nord de l’île
de Baffin semble assez active. »
L’une des théories expliquant la prévalence de tremblements de terre dans le Grand Nord est
qu’ils seraient le résultat du retrait des glaciers qui recouvraient la majeure partie de la région.
Comme les énormes calottes glaciaires ont fondu au cours des siècles précédents, le poids pesant
sur la terre a été retiré, et le sol s’est relevé. Lorsque certaines zones montent plus vite que
d’autres, la différence cause des déchirures et des frottements à une grande profondeur dans la
terre, ce qui déclenche des secousses importantes.
Les Nunavummuit préoccupés par l’avènement d’un tremblement de terre peuvent dormir sur
leurs deux oreilles; personne n’a jamais été directement tué par un tremblement de terre au
Canada.
Le phénomène sismique le plus violent au pays a été un gigantesque tremblement de terre d’une
magnitude de 8,1 qui a ébranlé les îles de la Reine-Charlotte en Colombie-Britannique, en 1949.
En 1929, à Terre-Neuve, 27 personnes ont péri noyées dans un tsunami créé par une secousse de
7,2 sur l’échelle de Richter.
L’on croit généralement que la magnitude maximale est de 9,5. On a enregistré une telle
magnitude au Chili, en 1960, lorsqu’un tremblement de terre a emporté plus de 2 000 personnes.
Référence :
Spitzer, Aaron. “Canada’s Little-known Earthquake Zones: Baffin and Nunavik”. Nunatsiaq
News. (16 février 2001). 36 pars. Nunatsiaq Online. 13 juillet 2011.
http://www.nunatsiaqonline.ca/archives/nunavut010228/nvt10216_05.html .
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