Douleur et Troubles somatoformes Françoise Radat Bordeaux Eric Serra Amiens Caen le 15 octobre 2013 Plan La douleur en médecine La somatisation Les diagnostics psychiatriques Pas de conflit d’intérêt Les théories en Médecine Référence scientifique logique expérimentale Cl.BERNARD - K.POPPER fait hypothèse confirmation expérimentale psychopath. ou clinique ou thérapeutique logique herméneutique : histoire, psychanalyse • • Modèle de la maladie • • linéaire, pasteurien, anatomo-clinique circulaire, pluridimensionnel, bio-psycho-social moniste ou dualiste Histoire des idées en psychologie • • • psychanalyse FREUD, structuralisme LACAN comportementalisme, psychologie expérimentale => les théories de l ’apprentissage bricolage anthropologique LEVI STRAUSS Définition La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire actuelle ou potentielle, ou décrite dans les termes d’une telle lésion. 4 Composantes: sensorielle, affective, cognitive, comportementale 4 Mécanismes: nociceptif, neuropathique, psychogène, fonctionnel Profil évolutif: aigu, chronique 4 DIMENSIONS - Dimension sensori-discriminative - - Dimension affectivo-émotionnelle - - Douleur Aiguë = anxiété, peur Douleur Chronique = dépression …et anxiété Dimension cognitive - - Neurophysiologie de la nociception Attention portée à la douleur, croyances, attentes thérapeutiques, aptitudes à faire face = coping dont catastrophisme Dimension comportementale - Comportements réactionnels, comportements appris comme la recherche de soins ou comme l’évitement, mais aussi des comportements de bonne santé 4 MÉCANISMES Douleur par excès de nociception Douleur neuropathique neurogène / par désafférentation / neurologique défaut de contrôles traitements spécifiques dont la douleur sympathique Douleur psychogène traitement selon 3 paliers de l ’OMS dont la douleur musculaire affirmation difficile (OMS, 1993) dimensions psychologiques Douleur dysfonctionnelle Douleur psychogène Un des 4 mécanismes de la douleur: peu ou pas étudié! (Atarodi Eur J Integrative Medicine 2010) …plus c’est psy moins c’est organique douleur sine materia (Combes in Boureau 1988)? troubles anxieux (Serra Ann Psychiatr 1999)? dépression masquée? pain prone disorder (Blumer and Heilbronn Psychosomatics 1981)? Tr somatoformes, somatisation psychogenic pain (DSM-III, 1980), somatoform pain (DSM-IV-TR, 2000), somatic complex symptoms disorder (DSM-V 2013)? diagnostic d’exclusion ? NON ! diagnostic psychiatrique positif nécessaire, pour affirmer le mécanisme psychogène Ex= Tr Anxieux, Tr Dépressifs, Tr Somatoformes dimension psychologique toujours présente, d’importance variable = douleur « expérience émotionnelle » Douleur dysfonctionnelle Un des 4 mécanismes de la douleur: de plus en plus étudié! (Yunus 2007) douleur…à la fois sensorielle et émotionnelle douleur sine materia ? Les névroses? dépression masquée? pain prone disorder ? Troubles anxieux ? Tr dépressifs ? Tr somatoformes ? diagnostic d’exclusion ? diagnostic clinique positif nécessaire, pour affirmer le mécanisme dysfonctionnel Mécanisme: sensibilisation centrale, déficit des CIDN (Marchand) Ex= Fibromyalgie, TFI, céphalée tension …SMF, TMS, lombalgies …Migraine …Tr Somatoformes dimension psychologique toujours présente, d’importance variable = douleur « expérience émotionnelle » Modèle pluridimensionnel de la douleur (d’après F. BOUREAU, 1988) DOULEUR MECANISMES GENERATEURS Nociceptif EXPERIENCE SUBJECTIVE Sensation COMPORTEMENTS OBSERVABLES Moteurs Neuropathique Cognition Verbaux Psychogène Dysfonctionnel Émotion Facteurs environnementaux Physiologiques Passé/Présent Génétiques - Psychologiques - Familiaux - Sociaux - Culturels Plan La douleur en médecine La somatisation Les diagnostics psychiatriques Des diagnostics peu utilisés par les psychiatres Patients ne consultant pas les psychiatres Patients réticents à accepter un diagnostic psychiatrique -> notions essentiellement utilisées en médecine somatique Épidémiologie des somatisations dans la population générale française (Hardy 1995) Critères : avoir souffert l’année précédente -pendant au moins 6 mois d’un symptôme somatique, -ayant causé une gêne et ayant motivé une consultation médicale -ayant conclu à l’absence d’étiologie organique ->20 % de la population 2 fois plus fréquent chez la femme que chez l’homme Moins fréquent après 65 ans Plaintes digestives et la douleur sont les plus fréquentes Somatisations, hypochondrie, conversion : la responsabilité des médecins Ring, BMJ 2004 : 420 enregistrements des consultations de patients aux symptômes médicalement inexpliqués avec leurs généralistes La plupart des patients offrent dans leur discours une ouverture vers leurs besoins psychologiques La plupart des médecins suggèrent qu’une affection lésionnelle pourrait être en cause Les interventions portant sur l’aspect lésionnel sont plus souvent proposées par les médecins que par les patients Définitions La Somatisation : Expression d’une maladie psychiatrique au travers de plaintes corporelles Une détresse personnelle ou sociale s’exprimant dans le corps avec recherche de soins médicaux (Kleinman) Symptômes médicalement inexpliqués, prolongés et invalidants (Mayou) Symptômes médicalement inexpliqués attribués par le patient à une maladie physique et Comportement de recours aux soins problématique (Lipowski) Trouble somatisation : axe 1, DSM IV (Troubles somatoformes) Plan La douleur en médecine La somatisation Les diagnostics psychiatriques Troubles somatoformes CONCERNE 15 à 75% DES PATIENTS TRAITES POUR LA DOULEUR CHRONIQUE CONCERNE 10 À 30 % DES PATIENTS CONSULTANT LES MÉDECINS GÉNÉRALISTES CONCERNE 4 % DE LA POPULATION GÉNÉRALE Plaintes ou symptômes somatiques inexpliqués Trouble somatisation Conversion Trouble douloureux Troubles Hypochondrie somatoformes Trouble factice (DSM IV) Simulation Trouble somatoforme indifférencié Trouble : peur d ’une dysmorphie corporelle Trouble somatoforme non spécifié Troubles somatisation (DSM IV) Le trouble est chronique, débutant avant 30 ans et altère de façon significative le fonctionnement social, affectif et professionnel Symptômes somatiques sans causes organiques : Au moins 4 localisations du corps sont l’objet de symptômes douloureux Deux symptômes gastro-intestinaux Un symptôme sexuel Un symptôme pseudo neurologique L’histoire de la maladie est inconsistante, contradictoire, difficile à reconstituer. Les troubles ont donné lieu à de multiples consultations auprès de nombreux spécialistes et à de nombreux examens complémentaires, voir à plusieurs interventions chirurgicales. Trouble de conversion (DSM IV) Symptômes ou déficit touchant électivement La motricité volontaire Les fonctions sensitives ou sensorielles Apparition ou aggravation précédées d’un conflit ou d’un facteur de stress Altérant le fonctionnement social, affectif et professionnel. NB : la douleur seule isolée est exclue. Idem pour les troubles sexuels isolés Névrose hystérique démembrée dans le DSM III Manifestations somatiques : Manifestations psychiques Trouble somatisation Conversion Dissociation Manifestations caractérielles Personnalité histrionique Névrose FREUD Psychiatrie classique H.EY La notion de névrose reste présente dans le DSM II Elle disparaît ensuite dans le DSM III à l’exception de la névrose hystérique qui est encore mentionnée entre parenthèse au chapitre « conversion » et « troubles dissociatifs ». Disparition dans le DSM IV Hypochondrie (DSM IV) Crainte d’être atteint d’une maladie grave fondée sur l’interprétation erronée de symptômes physiques Persistant malgré les bilans médicaux < 0 Altérant le fonctionnement social, affectif et professionnel Chronicité (au moins six mois) Pas mieux expliqué par un autre trouble Spécification : avec peu de prise de conscience -> rien n’est dit du style relationnel médecin/malade -> seule la forme non délirante est considérée Troubles somatoformes HYPOCHONDRIE Délire paranoïaque Schizophrénie Délirant Mélancolie délirante Sd. de Cottard Dépression TOC Non délirant Trouble de l ’adaptation Hypothèses cognitivo-comportementale concernant l’hypochondrie (Warwick, Barsky) Existence de schéma cognitifs basés sur une expérience passée de maladie personnelle ou de l’entourage Hypervigilance par rapport aux sensations physiques Interprétation de symptômes physiologiques comme signal de maladie Filtrage sélectif des informations confirmant cette hypothèse / rejet des informations l’infirmant Généralisation des informations négatives Que deviennent ces patients ? Hartman, 2009 : revue systématique, suivi sur 1 an Symptômes médicalement inexpliqués 10 à 30% des patients s’aggravent 50 à 75% s’améliorent Hypochondrie Trouble somatisation 30 à 50 % s’améliorent 50% s’améliorent La gravité initiale de la symptomatologie, le nombre de symptômes somatiques prédisent le pronostic. Les troubles émotionnels associés ne le prédisent pas. ___________ « Enquête nationale … sur la douleur et sa prise en charge. » ___________ E. Serra, D. Saravane, I. de Beauchamp, JC. Pascal, CS. Peretti, E. Boccard, P. Autret première enquête en France sur la PEC de la douleur en psychiatrie : Douleur et Analgésie, 2007 et L’Information Psychiatrique, 2008 Conclusion La relation médecin/malade est entachée de conflictualité autour de la question de la somatisation. La question de l’étiologie reste dominante dans la pensée médicale tant pour le patient que pour le médecin. La terminologie est influencée par les conceptions mais en retour elle influence les conceptions. Les errances de la terminologie concernant les patients souffrant de troubles du registre des somatisations reflètent les errances conceptuelles concernant ces troubles. Ceci se traduit par une parcimonie de la recherche à propos de ces troubles et une absence de guidelines concernant la prise en charge de ces patients. Françoise Radat, 2013 [email protected]