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REVUE DE PRESSE
Survenue d’événements chez des athlètes ayant
des anomalies marquées de la repolarisation
La présence d’anomalies à l’ECG de repos est fréquente chez les jeunes sportifs,
mais elle n’a pas forcément de lien avec une cardiopathie sous-jacente. Cependant, certaines anomalies (ondes T négatives, profondes et diffuses) avec un
bilan morphologique normal évoquent quand même certaines cardiopathies
(hypertrophique [CMH], dilatée [CMD] ou dysplasie arythmogène du ventricule droit [DVDA]). Cette étude italienne (étude croisée cas-contrôle) cherche
à montrer si de telles anomalies ECG pourraient être prédictives de la survenue
d’une cardiopathie.
À partir d’une banque de données concernant 12 880 athlètes italiens entraînés,
les cas de 81 sujets ayant des ondes T négatives diffuses (d’au moins 2 mm dans
au moins 3 dérivations) sans cardiopathie décelée et suivis régulièrement (examen
clinique, ECG, ETT) sur une moyenne de 9 ± 7 ans ont été étudiés. Ces cas ont
été comparés à 229 sujets contrôles ayant un ECG normal de la même banque
de données, similaires en âge, sexe et durée de suivi. Parmi les 12 880 sujets,
seuls 12 550 ont eu un suivi clinique, électrocardiographique et échographique
suffisant pour être inclus. Cent trente-trois sujets (1 %) présentaient des anomalies de la repolarisation, dont 39 en rapport avec une cardiopathie détectée à
ce moment-là (17 CMH, 6 prolapsus mitraux, 4 DVDA, 4 HTA, 3 CMD, 3 rétrécissements aortiques calcifiés sur bicuspidie) et ont donc été exclus. Parmi les
84 athlètes restant et ne présentant pas de cardiopathie, seuls 81, ayant eu
2 examens cliniques, 2 ECG et 2 échographies cardiaques (suivi suffisant), ont
été inclus dans l’étude.
Des anomalies ECG ont été retrouvées chez ces 81 sujets : ondes T négatives
(54 cas), ondes Q supérieures à 2 mm (42 cas), dilatation auriculaire gauche (6 cas),
rabotage de l’onde R en antérieur (5 cas), et hémi-bloc antérieur gauche (23 cas).
Ces 81 sujets comprenaient 63 hommes et 18 femmes, âgés de 23 ± 6 ans à
l’évaluation initiale et de 32 ± 10 ans au dernier examen. Ces athlètes étaient
principalement des footballeurs (17), des rameurs (16), des coureurs de fond
(7), des nageurs (5), des cyclistes (4). Tous ont participé sur une durée moyenne
de 12 ans à un entraînement intensif et à des compétitions (nationales, internationales, et même les Jeux olympiques pour 14 d’entre eux). Dans le groupe
contrôle, les caractéristiques étaient similaires.
Parmi ces 81 athlètes, 5 (6 %) ont développé une cardiopathie, dont 1 cas a été
mortel (mort subite impliquant l’existence d’une DVDA non détectée, chez un
sujet de 24 ans), 3 ont développé une CMH (épaisseur septale de 13 à 16 mm,
1 SAM [systolic anterior motion) après 12 ± 5 ans (à 27, 32 et 50 ans), dont 1 cas
compliqué d’un arrêt cardiaque récupéré, et 1 a développé une cardiopathie
dilatée (diamètre télédiastolique du ventricule gauche : 62 mm, FEVG de 40 %)
à coronaires saines après 9 ans de suivi. A contrario, aucune cardiopathie n’avait
été observée chez les athlètes du groupe contrôle au terme du suivi (9 ± 3 ans ;
p = 0,001). Dans le groupe étudié, 3 patients ont également développé une HTA,
1 patient, une arythmie supraventriculaire ablatée, 1 autre, une cardiopathie
ischémique athéromateuse motivant des pontages, et 1 dernier, une myocardite.
Dans le groupe contrôle, seuls 4 sujets ont eu un problème cardiaque lors du
suivi (1 myocardite, 1 péricardite, 2 arythmies auriculaires).
On note que chez 54 des 81 sujets, les anomalies ECG initiales n’ont pas changé.
Parmi les 27 restant, 12 ont normalisé leur ECG et 15 ont vu leur aspect s’aggraver.
Il apparaît donc que dans la population étudiée, la valeur prédictive négative d’un
ECG normal est de 100 % pour exclure l’apparition retardée d’une cardiopathie
et de 98 % pour exclure celle d’un autre problème cardiaque. La valeur prédictive
positive d’un ECG anormal est de 6 % pour l’apparition d’une cardiopathie et
de 14 % pour celle d’un épisode cardiologique. Un ECG anormal même en
l’absence d’anomalie morphologique cardiaque incite donc à une surveillance
cardiologique rapprochée dans une population qui se révèle à risque.
Référence bibliographique
ellicia A, Di Paolo FM, Quattrini FH et al. Outcomes in athletes with marked ECG
P
repolarization abnormalities. N Engl J Med 2008;358:152-61.
L. Sabbah, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
Événements cardiovasculaires chez des patients
présentant un hyperaldostéronisme primaire
après traitement
L’hyperaldostéronisme primaire (HAP) est responsable de plus de 1 % des HTA.
Cette étude prospective cherche à montrer les conséquences cardiovasculaires
d’une exposition chronique à l’aldostérone chez des patients hypertendus traités
et contrôlés, en comparant un groupe de 54 patients présentant un HAP avec un
groupe de 108 patients présentant une HTA essentielle (HTAI).
Dans le groupe HAP, moins de 50 % (24/54) des patients avaient un adénome
surrénalien et ont été traités, après l’inclusion, par chirurgie (adénomectomie).
Les 30 autres patients ont été traités par spironolactone, avec une dose initiale
de 100 mg par jour et majorée jusqu’à normalisation de la pression artérielle
(< 140/90 mmHg).
Les patients ont été évalués à 1, 3 et 6 mois, puis tous les ans (examen clinique,
ECG, ETT). Un ECG holter a été réalisé à 3, 6, 9 et 12 ans. Le suivi moyen a été
de 7,4 ans.
Le critère principal d’évaluation était l’apparition d’un événement cardiovasculaire
(IDM, AVC, revascularisation, arythmie soutenue).
La prévalence d’événements cardiovasculaires à l’inclusion a été plus importante
dans le groupe HAP (35 %) que dans le groupe HTAI (11 %) [p < 0,001].
Le contrôle tensionnel a été identique entre les deux groupes lors du suivi.
Lors du suivi, les événements suivants ont été observés : 1 IDM, 2 AVC, 3 revascularisations et 4 cas d’arythmie soutenue dans le groupe HAP, et 2 IDM, 3 AVC,
5 revascularisations et 9 arythmies cardiaques dans le groupe HAI (p = 0,85).
En analyse univariée, les facteurs associés à la survenue d’un événement sont
un âge supérieur à 52 ans (p = 0,02), une HTA existant depuis plus de 10 ans
(p < 0,08) et un tabagisme persistant (p = 0,004). Les facteurs pronostiques
indépendants sont également un âge supérieur à 52 ans (p < 0,01) et une
HTA existant depuis plus de 10 ans (p < 0,03).
Il n’y a pas de différence entre les patients traités chirurgicalement et ceux
traités médicalement dans le groupe HAP.
L’HAP est donc associé à un taux de complications cardiovasculaires plus
important que celui des HTAI et il est indépendant des niveaux tensionnels
obtenus sous traitement, que celui-ci soit chirurgical ou médical. Cette étude
insiste sur la nécessité d’un dépistage et d’un traitement le plus précoce
possible des HAP en prévention des complications cardiovasculaires.
Référence bibliographique
atena C, Colussi G, Nadalini E et al. Cardiovascular outcomes in patients with primary
C
aldosteronism after treatment. Arch Intern Med 2008;168(1):80-5.
L. Sabbah, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris.
La Lettre du Cardiologue • n° 420 - décembre 2008 | 9
REVUE DE PRESSE
coordonné par
le Dr N. Baubion
Les recommandations européennes
pour le diagnostic d’insuffisance cardiaque
“diastolique” sont-elles adaptées ?
Un consensus d’experts européens a été publié en 2007 concernant le diagnostic d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (IC-FEP). Ce diagnostic est évoqué chez
des patients ayant des manifestations cliniques évocatrices d’insuffisance cardiaque, une
fraction d’éjection ventriculaire gauche supérieure à 50 % sans dilatation cavitaire, et une
dysfonction diastolique. L’échocardiographie doppler a un rôle important dans le diagnostic
de cette dysfonction diastolique, qui est affirmée par un rapport E/Ea supérieur à 15, et est
éliminée par un rapport E/Ea inférieur à 8.
Lorsque le rapport E/Ea est en zone intermédiaire, entre 8 et 15, il faut avoir recours à
d’autres paramètres. Les indices échocardiographiques en faveur d’une IC-FEP sont dans
cette situation : un volume de l’oreillette gauche (OG) supérieur à 40 ml/m², une masse
ventriculaire gauche (MVG) supérieure à 149 g/m² chez l’homme et supérieure à 122 g/­m²
chez la femme, un paramètre Ap-Am supérieur à 30 ms (correspondant à la différence entre
la durée de l’onde A du flux veineux pulmonaire et celle de l’onde A mitrale) et un aspect
de trouble de relaxation sur le flux mitral défini par un rapport E/A inférieur à 0,50 avec un
temps de décélération de l’onde E mitrale (TDM) supérieur à 280 ms.
Le but de cette étude rétrospective a été d’évaluer ces critères sur une série de 1 229 échocardiogrammes consécutifs, en excluant les patients ayant une valvulopathie significative
ou une fibrillation atriale.
Un volume de l’OG supérieur à 40 ml/m² avait une sensibilité de 76 % et une spécificité
de 77 % pour le diagnostic de dysfonction diastolique (en définissant la présence d’une
dysfonction diastolique par un rapport E/Ea supérieur à 15 et son absence par un rapport E/
Ea inférieur à 8). Une MVG supérieure à 149 g/m² chez l’homme et supérieure à 122 g/­m²
chez la femme avait une spécificité de 99 %, mais une sensibilité de seulement 32 % pour
le diagnostic de dysfonction diastolique. En utilisant des valeurs seuils plus basses, correspondant à la limite supérieure de la normale définie par les recommandations de l’American
Society of Echocardiography, c’est-à-dire 116 g/m² chez l’homme et 96 g/m² chez la femme,
la sensibilité diagnostique augmentait à 61 %, sans réduction notable de la spécificité, qui
était de 88 %. Un paramètre Ap-Am supérieur à 30 ms avait une spécificité de 97 % mais
une sensibilité de seulement 3 %, et l’aspect de trouble de relaxation du flux mitral défini
précédemment avait une spécificité de 99 %, mais une sensibilité de seulement 1 %.
B. Gallet, service de cardiologie, CH d’Argenteuil
Commentaire
Selon cette étude, un volume de l’OG supérieur à
40 ml/m² est un signe fiable de dysfonction diastolique. Des valeurs seuils de MVG plus basses
que celles proposées par les experts européens
(116 g/­m ² au lieu de 149 g/m² chez l’homme
et 96 g/m² au lieu de 122 g/m² chez la femme)
augmentent la sensibilité de cet indice pour le
diagnostic de dysfonction diastolique sans perte de
spécificité. Un paramètre Ap-Am supérieur à 30 ms
et un trouble de relaxation tel que défini par les
experts européens sont des signes spécifiques mais
trop peu sensibles de dysfonction diastolique.
Un éditorial de W.J. Paulus, premier signataire des
recommandations européennes de 2007, accompagne cette étude et en souligne les limites. Il
aurait fallu tester les critères étudiés dans une
population de patients suspects d’IC-FEP (ce qui
n’était pas le cas ici), ayant un rapport E/Ea entre
8 et 15 (sans inclure les patients ayant un rapport
E/Ea supérieur à 15 ou inférieur à 8), et en les
confrontant si possible à des données hémodynamiques invasives. Il serait donc prématuré d’extrapoler les résultats de cette étude au diagnostic
d’IC-FEP et de modifier dès maintenant l’algorithme diagnostique proposé en 2007.
Référence bibliographique
Emery WT, Jadavji I, Choy JB, Lawrance RA. Investigating the European Society of Cardiology Diastology Guidelines in a practical
scenario. Eur J Echocardiogr 2008;9:685-91.
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10 | La Lettre du Cardiologue • n° 420 - décembre 2008 
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