Université Paris-Dauphine EDDIMO DFR Mathématiques de la Décision Numéro attribué par la bibliothèque ' $ Étude variationnelle des états électroniques de la molécule de polyacétylène : modèles continu et discret. & THÈSE Pour l’obtention du titre de Docteur en Sciences - Spécialité Mathématiques Appliquées (Arrêté du 7 Août 2006) Présentée par Mauricio GARCÍA ARROYO Soutenue publiquement le 16 novembre 2011 devant le jury composé de Directeur de thèse : Éric SÉRÉ Professeur, Université Paris-Dauphine Rapporteurs : Éric CANCÈS Professeur, Ecole des Ponts - ParisTech Mathieu LEWIN Chargé de Recherches CNRS, Université de Cergy-Pontoise Examinateurs : Isabelle CATTO Chargée de Recherches CNRS, Université Paris-Dauphine Philippe GRAVEJAT Professeur Hadamard, Ecole Polytechnique % L’université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les thèses : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs. A Elsa et Nina Etude variationnelle des états électroniques de la molécule de polyacétylène : Modèles continu et discret. Résumé : Cette thèse porte sur l’étude du modèle relativiste de la molécule de polyacétylène dans sa version discrète et son approximation continue. Nous appliquons des techniques introduites par Kennedy et Lieb, et par Hainzl, Lewin, Séré et Solovej pour résoudre des problèmes du même type en Electrodynamique Quantique. Dans la première partie, nous étudions le modèle continu du polyacétylène. Pour contourner le fait que l’opérateur de Dirac n’est pas borné inférieurement, nous définissons un modèle périodique sur un un intervalle de taille L > 0 et nous introduisons un cut-off ultraviolet en espace de Fourier. Nous prouvons l’existence et l’unicité des états fondamentaux de ce système périodique et nous montrons que les minimiseurs sont invariants par translations. Puis, nous étudions la limite thermodynamique lorsque la période L tend vers l’infini et définissons ainsi les états fondamentaux dans le cas général ainsi que l’énergie par unité de longueur. La seconde partie est consacrée a l’étude du modèle discret introduit par Su, Schrieffer et Heeger. Nous définissons également un problème périodique pour obtenir un Hamiltonien borné inférieurement. Nous présentons une démonstration différente de celle donnée par Kennedy et Lieb du fait que la configuration dimérisée de la molécule minimise l’énergie. Notre approche est constructive et donne des formules explicites pour les minimiseurs globaux et l’énergie fondamentale. Finalement, nous prouvons l’existence des états d’équilibre de type kink pour une molécule infinie. Mots clés : Calcul des variations, chimie quantique, physique mathématique, opérateur de Dirac, physique quantique relativiste, polyacétylène, kink, instabilité de Peierls. Variational study of electronic states of the molecule of polyacetylene : Continuous and discrete models. Abstract : This thesis is devoted to the study of the relativistic model of the molecule of polyacetylene in its discrete version and continuous approximation. We apply some techniques introduced by Kennedy and Lieb, and by Hainzl, Lewin, Séré and Solovej to solve similar type problems in QED. In the first part, we study the continuous model of polyacetylene. To deal with the fact that the Dirac operator is not bounded from below, we define a periodic model on an interval of size L > 0 and we introduce an ultraviolet cut-off in Fourier space. We prove the existence and uniqueness of fundamental states of this periodic system and we show that the minimizers are translation-invariant. Then we study the thermodynamic limit when the period L goes to infinity and we define the fundamental states in the general case as well as the energy per length unit. The second part is devoted to the study of the discrete model introduced by Su, Schrieffer and Heeger. We also define a periodic problem to obtain a Hamiltonian bounded from below. We present a different proof from that given by Kennedy and Lieb of the fact that the dimerized configuration of the molecule minimizes the energy. Our approach is constructive and produces explicit formulas for the global minimisers and the fundamental energy. Finally, we prove the existence of kink type equilibrium states of an infinite molecule. Keywords : Variational calculus, quantum chemistry, mathematical physics, Dirac operator, relativistic quantum physics, polyacetylene, kink, Peierls instability. Remerciements Je tiens à exprimer ma très grande reconnaissance envers Éric Séré pour avoir dirigé ces travaux de recherche avec autant de dévouement. Je le remercie d’avoir su me guider et me stimuler durant toutes ces années avec beaucoup de patience et d’attention. L’achèvement de cette thèse a sans doute été possible grâce à ses conseils avisés et à son encadrement toujours bienveillant. Nos discussions ont été très constructives et m’ont laissé des enseignements précieux, tant sur le plan personnel que scientifique. Ma reconnaissance s’adresse aussi très particulièrement à Mathieu Lewin et Eric Cancès m’ayant honoré en acceptant d’être les rapporteurs de cette thèse. Je tiens à souligner que leur cours sur la modélisation moléculaire a été très utile pour la réalisation de cette dernière. Je remercie également les membres du jury Isabelle Catto et Philippe Gravejat pour avoir examiné ces travaux avec la plus grande attention. Un grand merci à tous les membres du CEREMADE que j’ai rencontrés et qui ont fait de mon séjour à Dauphine une très belle expérience. J’ai apprécié particulièrement l’ambiance conviviale lors de nos matchs de foot les mercredis soir. Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à la famille Monniot pour son soutien tout au long de ces années de thèse. Je lui suis très reconnaissant pour son accueil toujours très chaleureux et affectueux en Savoie. Un grand merci donc à Claude, Domi, Andrée, Caro, Juan, Nico, Bei, Mithou, Georges, Jean-Louis et Hiltrud. Je souhaite également remercier tous mes collègues thésards de Dauphine, et tout particulièrement ceux du bureau C618 avec qui j’ai partagé d’agréables journées. Je garderai un très bon souvenir de nos moments passés ensemble et j’espère que notre amitié perdurera pendant de nombreux années. Je remercie donc Aimé, Andreea, Joana, Vito, Loïc, Simona, Nicolas, Jean-Baptiste, Hugo, Pierre, Anouar, Fetallah, et je fais une mention spéciale à Freddy pour nos discussions très enrichissantes, pour son aide et son amitié. Un grand merci également à Nabil pour son amitié et pour ces beaux moments sur les terrains de foot. Je remercie également mes amis Fabrice (pour ces grands instants musicaux et amicaux), Cécile (merci Mumu !), Isa, Rico, Yann, Audrey, Jerôme, les quatre ailes et tous les Aixois pour avoir été souvent présents et avoir rendu mon séjour en France inoubliable. 9 No me olvido de agradecer a mis amigos latinos, unos matemáticos, otros normales, que compartieron conmigo muchos momentos inolvidables. Muchas gracias a Freddy, Milena, Milton, Carlos, Paulo, Sele, Sambita, Juliana, Gordo, Nati y al resto de los uruguayos por su amistad y su compañía. Por supuesto, mil gracias a Onnis y Emilie por formar parte importante de esta aventura. Un enorme agradecimiento a mi familia por haberme apoyado tanto, aún estando lejos, y darme ánimos para salir adelante. Muchas gracias Patter, Juri, Zigocho y Caro. Agradezco también al Isra por su amistad y por estar siempre presente. Una mención especial también a los tontos que siempre me acompañan. Quiero agradecer al CONACYT por su apoyo financiero a través de una beca de posgrado en el extranjero a lo largo de la mayor parte de mis estudios de doctorado. Igualmente, deseo expresar mi reconocimiento a la SEP por haberme otorgado durante largo tiempo una beca complemento que fue de gran utilidad para llevar a cabo esta tesis. Por último, agradezco de todo corazón a la mujer de mi vida : Elsa, por creer en mí y apoyarme en todo momento. Sin tu presencia y tu amor nunca habría tenido la fuerza para llegar hasta aquí. Mil gracias por tu cariño, tu paciencia y por todo lo que me das que es lo más valioso e importante que tengo en la vida. 10 Table des matières Introduction I Les Polymères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . I.1 Polymères conducteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . I.2 Le polyacétylène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II Les modèles mathématiques fondamentaux . . . . . . . . . . . . . . . . II.1 Equation de Dirac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II.2 Modèle discret du polyacétylène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II.3 L’approximation continue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II.4 L’opérateur de Dirac discret . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III Les premiers résultats rigoureux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III.1 La preuve de Kennedy et Lieb . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III.2 Une autre approche pour un problème du même type : l’approximation du champ moyen de l’Electrodynamique Quantique . . . . 1 Modèle continu 1.1 Modèle périodique avec cut-off ultraviolet . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.1 Définitions et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.2 Problème de minimisation de l’énergie et théorème principal 1.1.3 Recherche d’un minimiseur invariant par translations . . . . 1.1.4 L’énergie de référence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . + est un minimiseur global . . . . . . . . . . . 1.1.5 L’opérateur γinv 1.2 Limite thermodynamique : L → ∞ . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 Modèle discret de la molécule de polyacétylène 2.1 Construction du modèle . . . . . . . . . . . . . . 2.1.1 Espace des états, Hamiltonien et énergie . 2.1.2 Théorèmes et schéma de leur preuve . . . 2.2 Les états fondamentaux . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Configuration initiale . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Chaîne parfaitement dimérisée . . . . . . . 2.2.3 Recherche de la configuration optimale . . 2.2.4 L’énergie de référence . . . . . . . . . . . . 2.2.5 Minimisation globale . . . . . . . . . . . . 11 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 16 16 17 19 19 21 24 26 29 30 . 34 . . . . . . . 47 48 48 50 57 61 64 70 . . . . . . . . . 75 76 76 80 81 81 83 88 90 91 2.3 Etats Kink . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 2.3.1 A model for dimerized chains . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 2.3.2 The kink problem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 A Quelques résultats auxiliaires 123 A.1 Preuve du Lemme 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 A.2 Preuve du Lemme 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 Bibliographie 129 12 Table des figures 1 2 3 4 5 6 Film de polymère conducteur. . . . . . . . . . . Chaîne linéaire de polyacétylène . . . . . . . . . Chaîne linéaire dimérisée de polyacétylène . . . Isomères trans et cis du polyacétylène. . . . . . Trans - Polyacetylène dimérisé avec coordonnées Cis - polyacétylène dimérisé. . . . . . . . . . . . 13 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . de dimérisation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18 18 18 19 22 24 Introduction Cette thèse est consacrée à l’étude mathématique de la molécule du polymère appelé polyacétylène. Nous commençons cette introduction par une description physique des polymères, en soulignant, en guise de motivation pour la réalisation de ces recherches, l’importance que ceux-ci ont dans notre quotidien, ainsi que les nombreuses applications technologiques des matériaux fabriqués à partir de ces plastiques. Nous parlerons brièvement du contexte historique dans lequel est né l’intérêt pour comprendre les propriétés de conductivité électrique des polymères, ainsi que des premiers explorateurs de ce domaine. La seconde partie traite les modèles physique-mathématiques fondamentaux sur lesquels sont basées nos recherches. D’une part, nous discuterons les propriétés élémentaires de l’opérateur de Dirac qui régit la théorie quantique relativiste de l’électron. Ensuite, nous décrirons le modèle discret de la molécule de polyacétylène introduit par Su, Schrieffer et Heeger [36], qui donne le point de départ de ces investigations. Nous donnerons également l’approximation continue du modèle, telle qu’elle a été étudiée par A.R. Bishop et D.K. Campbell dans [3] et par H. Takayama et al. dans [38]. Finalement, dans la troisième partie de cette introduction nous parlerons des premiers résultats mathématiques rigoureux publiés concernant le modèle discret [23], qui seront utilisés plus tard dans nos calculs. Nous ferons également un résumé de trois articles [18, 19, 21] traitant des problèmes de minimisation du même type que celui étudié ici et dont la stratégie de solution servira de base à nos travaux. Contenu I Les I.1 I.2 II Les II.1 II.2 II.3 II.4 III Les III.1 III.2 Polymères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Polymères conducteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le polyacétylène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . modèles mathématiques fondamentaux . . . . . . . . . . Equation de Dirac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Modèle discret du polyacétylène . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’approximation continue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’opérateur de Dirac discret . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . premiers résultats rigoureux . . . . . . . . . . . . . . . . . La preuve de Kennedy et Lieb . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une autre approche pour un problème du même type : l’approximation du champ moyen de l’Electrodynamique Quantique . . 15 16 16 17 19 19 21 24 26 29 30 34 16 I Introduction Les Polymères Les polymères sont des macromolécules composées de molécules plus petites, répétées et liées entre elles par des liaisons covalentes. Ces macromolécules, qui sont des molécules d’une taille supérieure à celle de la plupart des autres espèces moléculaires, sont attachées entre elles par des liaisons beaucoup plus faibles [27]. Les molécules plus petites qui servent à former les polymères sont appelées monomères, et en se liant entre elles peuvent prendre plusieurs formes : des chaînes linéaires ou légèrement ramifiées ou bien former des structures tridimensionnelles complexes [30]. Habituellement, ce sont des composés organiques contenant des atomes de carbone ainsi que des atomes d’hydrogène, d’oxygène ou autres [34], mais il existe aussi des polymères inorganiques. Si l’on trouve des polymères existant dans la nature (amidon, laine, soie, caoutchouc), la plupart d’entre eux sont cependant synthétisés artificiellement par l’homme, le plus souvent comme produit de la pétrochimie [27], pour s’en servir comme matériaux. Le début de l’utilisation industrielle des polymères synthétiques date de 1833, avec la production de nitrate de cellulose, un explosif obtenu à partir de la cellulose, qui est un polymère naturel [7]. De nos jours, les polymères font partie de notre quotidien à tel point qu’il serait difficile d’imaginer notre monde sans eux [28]. On peut comparer l’apparition des polymères synthétiques à la maîtrise de la manufacture du bronze dans l’Antiquité. L’avènement des matériaux fabriqués à base de polymères a provoqué un bouleversement dans la société moderne semblable à celui de la métallurgie au 19ème siècle [27]. L’aisance dans l’élaboration et le moindre coût des produits finis à base de polymères, ainsi que leurs propriétés mécaniques, thermiques et électriques, en font des composés chimiques avec un grand éventail d’applications [7]. Parmi les polymères synthétiques d’utilisation courante, on peut mentionner les suivants, avec quelques-unes de leurs applications : – Silicone : lubrifiants, colles, prothèses, etc. – PVC : tuyaux, revêtements de sol, fabrication de portes et fenêtres. – Polycarbonate : fabrication de CD, DVD, verres de vue. – Polyester : fibres textiles, emballages, fabrication de bateaux. Le terme macromolécule a été forgé autour de 1925 par Hermann Staudinger (prix Nobel de Chimie en 1953) et en seulement vingt ans, après la seconde guerre mondiale, l’impact industriel et économique des polymères synthétiques était déjà immense. La production mondiale annuelle de polymères de synthèse était à l’époque d’environ un million de tonnes. Actuellement, nous avons dépassé les cents millions de tonnes annuelles et l’on a établi un rapport direct entre le produit national brut (PNB) d’un pays et sa consommation de polymères [27]. I.1 Polymères conducteurs Les polymères avaient toujours été considérés comme d’excellents isolants électriques. Puis, dans les années 60 et 70, la découverte des propriétés de conductivité de certains plastiques a donné naissance à un nouveau domaine de recherche en chimie et physique des Introduction 17 matériaux. Les excellentes propriétés mécaniques des plastiques, ainsi que les avantages en termes de traitement et de coût de production réduits ont suggéré une vaste gamme d’applications et de possibilités technologiques. Ceci a encouragé l’étude des polymères conducteurs donnant lieu à un grand développement de cette branche de la science des matériaux et à la découverte d’une variété considérable de ces plastiques [22]. L’un des premiers polymères organiques dont les propriétés de conductivité ont été découvertes est le polyacétylène. Au début des années 70, un étudiant du Professeur H. Shirakawa a confondu les quantités de catalyseur nécessaires pour polymériser l’acetylène, obtenant du polyacétylène sous la forme d’un film argenté similaire au papier aluminum mais avec une grande flexibilité et possédant une importante conductivité électrique. Le chimiste australien Alan G. MacDiarmid, en apprenant ces étonnantes propriétés de conductivité, a suggéré que l’on pourrait s’en servir comme d’un métal synthétique. Dans le but d’étudier ces potentielles applications, Shirikawa et MacDiarmid ont rejoint le physicien américain Alan J. Heeger pour constituer une équipe de recherche. Une des découvertes de ce groupe fût que si l’on se servait de l’iode pour oxyder le polyacétylène, on obtenait une conductivité proche de celle de l’argent, l’un des meilleurs conducteurs connus à l’époque. La découverte des polymères organiques hautement conducteurs, fruit de leur collaboration scientifique, leur a valu l’obtention à tous les trois du Prix Nobel de Chimie en 2000. Cependant, le chemin pour obtenir un matériau stable a été long et difficile. Sans exception, les systèmes de polymères conducteurs initiaux n’avaient pas les propriétés mécaniques attendues et leur haute sensibilité à l’environnement était très décourageante [22]. Au fil des années, un progrès remarquable a été atteint et la classe des polymères conducteurs grandement élargie. Une très bonne compréhension des propriétés moléculaires fondamentales, nécessaires à la conception et au contrôle des propriétés électroniques, a été acquise. On a découvert des polymères solubles dans l’eau et dans des solvants organiques communs, permettant le traitement de films et de fibres de polymères conducteurs. Par ailleurs, des améliorations importantes ont été accomplies dans la qualité des matériaux et leur stabilité dans le milieu [22]. De nos jours, les applications pratiques et technologiques de ces plastiques conducteurs sont nombreuses. Ils sont utilisés dans la fabrication de batteries rechargeables très legères, libres de produits toxiques et polluants [22]. Ils ont également des applications biomédicales dans la conception de muscles et nerfs artificiels. Actuellement, l’utilisation de ces composants organiques dans la fabrication d’ampoules LED, appelées OLED (de l’anglais organique light emitting diode) est une réalité et on les trouve notamment dans les écrans d’appareils électroniques modernes [15] (voir Figure 1). I.2 Le polyacétylène Le polyacétylène (CH)x est une longue molécule constituée de groupements de CH interconnectés. Il s’agit du polymère conjugué linéaire le plus simple [35]. Une structure idéalisée d’une telle chaîne est representée dans la Figure 2. D’après la Physique de l’Etat Solide, cette structure peut être considérée comme un métal quasi unidimensionnel dans 18 Introduction Figure 1 – Film plastique émettant de la lumière [41]. lequel les atomes métalliques sont remplacés par des radicaux de CH [29]. Chaque atome de carbone partage trois de ses quatre électrons de valence avec les deux atomes de carbone voisins et avec un atome d’hydrogène. Ce qui en résulte est une chaîne mi-remplie, où pour chaque groupe de CH on trouve un électron non apparié qui peut voyager à travers la chaîne rendant possible la conductivité électrique [17]. Figure 2 – Chaîne de polyacétylène idéalisée [17]. Comme conséquence du phénomène appelé instabilité de Peierls, la chaîne de polyacétylène subit une dimérisation, qui consiste en la formation de deux types de liaisons entre les atomes de carbone voisins. Chaque atome de carbone se rapproche d’un de ses voisins formant une liaison double, et en même temps il s’éloigne de l’autre voisin en formant une liaison simple. Cette configuration alternant liaisons doubles et simples entre les groupes de CH, représentée dans la Figure 3, est adoptée par la chaîne puisqu’elle minimise l’énergie totale des états électroniques. La compréhension du mécanisme de dimérisation reste fondamentale car cela permet d’expliquer pourquoi ces conducteurs potentiels sont intrinsèquement isolants dans leur état non dopé [29]. Figure 3 – Chaîne dimérisée de polyacétylène [17]. La géométrie de la molécule de (CH)x est en réalité un peu plus complexe. Les chaînes sont en fait en forme de zig-zag, et le polyacétylène se présente sous les deux formes re- Introduction 19 présentées schématiquement sur la Figure 4. Il est possible de préparer du polyacétylène constitué de fibres contenant des molécules toutes orientées parallèlement. La distance entre deux chaînes contigües est néanmoins suffisamment grande pour qu’il soit raisonnable de supposer que les électrons se propagent essentiellement le long des chaînes. En conséquence, les propriétés physiques du polyacétylène préparé de façon orientée peuvent être inférées de celles des chaînes individuelles [17]. Figure 4 – Les isomères trans et cis de la chaîne de polyacétylène [32]. II II.1 Les modèles mathématiques fondamentaux Equation de Dirac Les idées présentées ici ainsi que la notation proviennent essentiellement du livre de B. Thaller [39] et de l’article [18]. La théorie quantique relativiste de particules à spin-1/2 (fermions) est basée sur l’opérateur de Dirac que l’on définira dans cette section. L’opérateur de Dirac libre donne la description physique d’un électron ou un positron se déplaçant librement, en l’absence de champs de forces externes ou d’autres particules [39]. On considère l’équation de Dirac comme une équation d’évolution, définie sur un espace de Hilbert appelé espace des états. Cet espace de Hilbert est H = L2 R3 , C4 . Dans le système d’unités atomiques (i.e. ~ = c = 1 avec la masse de l’électron normalisée à 1), la représentation standard de l’opérateur de Dirac libre est donnée par H0 = −iα · ∇ + β, où α = (α1 , α2 , α3 ) et αj := 0 σj , σj 0 I2 0 β := . 0 −I2 Nous avons utilisé la notation usuelle pour les matrices de Pauli 0 1 0 −i 1 0 σ1 = , σ2 = , σ3 = . 1 0 i 0 0 −1 (1) 20 Introduction Cet opérateurpa été conçu pour garantir qu’il satisfasse la relation relativiste d’énergiemoment Ĥ0 = c2 p2 + m2 c4 . Dans notre système d’unités et en espace direct, cette relation s’écrit H02 = −∆ + I, (2) avec ∆ = ∂x2 + ∂y2 + ∂z2 , le Laplacien. Cette relation est satisfaite du fait que l’on a αj αk + αk αj = 2δj,k I4 , αj β + βαj = 0 et β 2 = I4 . (3) C’est la raison pour laquelle les états sont représentés par des vecteurs à quatre composantes : la dimension minimale d’un espace de matrices où l’on peut trouver quatre éléments auto-adjoints, linéairement indépendants, de trace nulle et satisfaisant (3) est n = 4 [39]. L’opérateur de Dirac est auto-adjoint sur H, son domaine est l’espace de Sobolev H1 et le domaine de forme quadratique est H1/2 . Le spectre de H0 est purement absolument continu et donné par [18] σ(H0 ) = (−∞, −1] ∪ [1, ∞). (4) Notons P0 la projection spectrale associée à la partie négative du spectre de H0 : P0 := χ(−∞,0) (H0 ). Nous pouvons alors écrire l’espace de Hilbert H comme la somme directe des sous-espaces H0− := P0 H et H0+ := (I − P0 )H, H = H0− ⊕ H0+ . Remarque 0.1. (Dirac en dimension quelconque) Nous avons donné jusqu’ici les détails de l’équation de Dirac en dimension 3. Lorsque nous travaillons en dimension quelconque d ∈ N∗ et en unités atomiques, l’opérateur de Dirac libre s’écrit sous la forme générale d X ∂ + β, H0 = −i αk ∂xk k=1 où les αk et β sont des matrices garantissant que la relation (2) est satisfaite. En particulier, en dimension 1 et 2 nous pouvons utiliser les matrices de Pauli pour définir l’opérateur de Dirac. – Dans le cas d = 1 on peut choisir, entre autres possibilités, σ1 et σ3 pour écrire d + σ1 . dx – En dimension d = 2 il suffit d’écrire, par exemple, ∂ ∂ H0 = −i σ1 + σ2 + σ3 ∂x1 ∂x2 H0 = −iσ3 pour garantir que la relation (2) reste vraie. Introduction 21 Une des difficultés majeures dans l’étude de la Mécanique Quantique Relativiste est l’occurrence d’états à énergie négative, due au fait que le spectre de l’opérateur de Dirac n’est pas borné inférieurement [18]. Moyennant une conjugaison de charge (charge conjugation), les solutions à énergie négative peuvent être interprétées comme des solutions à énergie positive d’une équation de Dirac pour les positrons (particules de même masse que l’électron mais de charge opposée). Néanmoins on se retrouve encore une fois avec un problème d’interprétation provenant de la superposition d’états correspondant à des électrons et des positrons dans l’espace de Hilbert [39]. Pour donner une interprétation aux états à énergie négative P.A.M. Dirac a introduit la notion de la Mer de Dirac [9, 10]. Elle consisterait en une infinité d’électrons virtuels qui rempliraient complètement la partie négative du spectre [18]. Les positrons apparaissent alors comme des électrons virtuels manquants, c’est-à-dire comme des trous dans la Mer de Dirac. Cette théorie rend donc compte de plusieurs phénomènes physiques importants, dont la création de paires électron-positron et la polarisation du vide. En termes mathématiques, la Mer de Dirac est définie comme un déterminant de Slater infini noté Ω0 = ψ10 ∧ ψ20 ∧ · · · , où {ψj0 }j∈N est une base orthonormée de H0− . La matrice de densité de Ω0 est précisément le projecteur spectral P0 [18]. II.2 Modèle discret du polyacétylène Dans leurs travaux [35, 36], Su, Schrieffer et Heeger (SSH) ont présenté un modèle unidimensionnel de la molécule de polyactylène (CH)x . Les films de polyacétylène sont formés de nombreuses chaînes parallèles d’unités de CH, présentant un faible couplage entre elles, ce qui justifie la supposition d’un comportement (quasi) unidimensionnel du polymère. Le modèle de la molécule de (CH)x proposé par SSH, part donc de la supposition que l’on peut négliger l’interaction entre les chaînes donnant un système unidimensionnel. Ils admettent aussi que les électrons σ peuvent être traités sous l’approximation adiabatique et donc les seules particules quantiques du système sont les électrons π (voir [42]). Définissons la position d’équilibre des groupes de CH comme celle où la distance entre deux groupes contigus est constante, disons d’une valeur a > 0. L’énergie de la molécule sera une fonction des coordonnées un représentant le déplacement de la n-ème unité de CH à partir de la position d’équilibre (voir la Figure 5). L’énergie de la liaison σ est exprimée comme un développement au deuxième ordre autour de la position d’équilibre, Eσ := KX (un+1 − un )2 2 n où K est une constante de rigidité de la chaîne. Les électrons π sont traités dans l’approximation de type Hükel (liaisons fortes) avec tn+1,n représentant l’amplitude de probabilité d’échange d’un électron entre le n-ème et le (n + 1)-ème groupes de CH (hopping integral ) et pouvant s’écrire au premier ordre autour 22 Introduction Figure 5 – Isomère trans du polyacétylène dimérisé avec les coordonnées de dimérisation un . Nous avons deux états dégénérés (a) et (b), dont les coordonnées un ont un signe opposé [36]. de l’équilibre par tn+1,n := t0 − α(un+1 − un ) (5) Dans cette formule, t0 est l’amplitude de probabilité de saut à l’équilibre et α est la constante de couplage pour le déplacement électron - réseau. Des calculs expérimentaux ont montré que l’approximation linéaire est valable du fait que les changements de longueur des liaisons sont petits. En négligeant l’énergie cinétique du mouvement nucléaire, le Hamiltonien du système est donc donné par H := − X n,s tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ) + KX (un+1 − un )2 , 2 n (6) où c†n,s et cn,s sont les opérateurs de création et d’annihilation d’un électron à spin s = ±1/2 dans le n-ème groupe de CH. Les opérateurs c† et c satisfont les relations d’anticommutation canoniques de Fermi [39]. P Posons Heϕ := − n,s tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ), le Hamiltonien électronique associé à une configuration ϕ = {un }n , et restreint à l’espace des fonctions d’onde à un électron. En notation matricielle, supposant que nous avons une chaîne périodique de période N , Introduction 23 et en omettant la variable s de spin, cet opérateur s’écrit 0 t2,1 0 ϕ 0 He := − . .. t1,N t2,1 0 · · · 0 t3,2 0 t3,2 0 t4,3 0 t4,3 0 0 ··· 0 t1,N 0 0 .. . ··· ··· t5,4 ... 0 tN,N −1 tN,N −1 0 , dans la base canonique de CN . Dans cette thèse nous allons supposer que la dimension N de l’espace de Hilbert sur lequel est défini le Hamiltonien Heϕ est multiple de 4, et nous notons m la moitié de cette dimension, i.e. N = 2m. De la définition de tn+1,n , on remarque que Heϕ est la somme d’une matrice constante h0 et une matrice hϕ1 , dépendante de la configuration, multipliée par α. En effet, pour chaque valeur s du spin et en posant δn = un − un−1 , nous avons tn+1,n = t0 − αδn+1 , d’où l’écriture ϕ He = − 0 t0 t0 0 0 t0 .. . t0 | ··· 0 t0 0 t0 0 0 ··· 0 {z ··· ··· .. . 0 t0 h0 t0 0 0 0 δ2 δ2 0 0 δ3 .. . 0 δ3 0 0 ··· +α t0 δ1 0 } | ··· 0 δ4 ··· ··· .. . δN −1 0 0 δN {z hϕ 1 δ1 0 0 δN 0 . (7) } Cette décomposition sera utile ultérieurement dans nos calculs. Maintenant, nous allons écrire ces matrices dans la base wn := in~en car cela nous permettra de retrouver, plus loin, un opérateur de Dirac discret. La matrice de changement de base vers {wn }n a les coordonnées mp,q = i−p δp,q et dans cette représentation nous avons h00 = − 0 it0 0 ··· −it0 0 it0 0 0 −it0 0 it0 .. . it0 0 ··· 0 ··· ··· ... 0 −it0 −it0 0 0 it0 0 (8) 24 Introduction et 0 hϕ1 = 0 iδ2 0 −iδ2 0 iδ3 0 −iδ3 0 .. . iδ1 0 ··· ··· 0 iδ4 ··· ··· ... −iδN −1 0 0 −iδN −iδ1 0 0 iδN 0 . (9) Les détails de ce changement de base seront donnés dans la section 2.1.1 du second chapitre de cette thèse. Dans les travaux présentés en [36], ainsi que dans cette thèse, nous étudions seulement l’isomère trans du polyacétylène. Or, l’isomère cis peut être traité de façon tout à fait analogue, en introduisant des coordonnées de déplacement des noyaux un perpendiculaires aux liaisons carbone - hydrogène, comme dans la Figure 6. Les deux structures dimérisées montrées dans cette figure, dont les coordonnées un ont le signe opposé, ne sont pas dégénérées pour le polyacétylène cis. Elles n’ont pas la même énergie, contrairement à ce qui se passe pour l’isomère trans. Figure 6 – Les deux chaînes de Cis - Polyacétylène dimérisées, avec les coordonnées de dimérisation un . [36] II.3 L’approximation continue Nous introduisons ici le modèle continu de la molécule de polyacétylène tel qu’il a été traité dans [3] et [38]. Dans ces travaux, les auteurs obtiennent un Hamiltonien qui est une sorte de limite continue de l’opérateur original (6). Ce passage à la limite sera décrit dans la prochaine section de façon formelle en exprimant le Hamiltonien discret convenablement. Nous reproduisons et expliquons ici les formules données dans les articles cités. Introduction 25 Le Hamiltonien de champ moyen de l’approximation continue est donné dans l’espace de Fock des électrons par (on utilise la lettre c comme continu) Z 2 ωQ 2 ∗ c H= ∆ (y) + ψ (y)He ψ(y) dy, g2 où ψ est l’opérateur de champ électronique second-quantifié et Hec est le Hamiltonien électronique de champ moyen donné par Hec := −ivF σ3 d + ∆(y)σ1 . dy (10) 2 /g 2 est la constante effective de couplage électron - phonon et vF est la vitesse de Ici, ωQ Fermi [3]. Nous avons également utilisé la notation usuelle pour les matrices de Pauli 0 1 0 −i 1 0 σ1 = , σ2 = , σ3 = . 1 0 i 0 0 −1 Le Hamiltonien électronique Hec agit sur des fonctions d’onde qui sont des vecteurs à deux composantes ψ : R → C2 u(y) ψ(y) = , v(y) donnant la représentation du spin du champ électronique. En fonction des constantes physiques du modèle discret, nous avons l’écriture [38] g = 4α a 1/2 4K 2 et ωQ = , M M avec a > 0 étant la distance à l’équilibre de la chaîne discrète et M étant la masse d’une unité de CH. Une configuration de la molécule qui alterne des liaisons courtes et longues entre les groupes de CH est appelée configuration dimérisée. Autrement dit, une configuration dimérisée est de la forme un = (−1)n xn , où xn a un signe constant pour tout n. Notons x̃(y) la limite continue de xn . Alors, la fonction ∆(y) de (10) est proportionnelle à cette limite [38] 1 ∆(y) = x̃(y). 4α Maintenant, le Hamiltonien du système est donné par Z 2 ωQ 2 d † H= ∆ (y) + ψ (y) −ivF σ3 + ∆(y)σ1 ψ(y) dy g2 dy R Z 2 ωQ 2 d d = ∆ (y) − ivF u∗ (y) u(y) + ivF v ∗ (y) v(y) 2 g dy dy R + ∆(y) (u∗ (y)v(y) + v ∗ (y)u(y)) dy, 26 Introduction où ψ(y) = (u(y), v(y))T est l’opérateur de champ second-quantifié des électrons. Le problème de valeurs propres Hec ψ = ψ s’écrit composante par composante comme u(y) = −ivF v(y) = ivF d u(y) + ∆(y)v(y) dy d v(y) + ∆(y)u(y), dy où nous avons pris un vecteur unitaire ψ dans l’espace de fonctions d’onde à un électron (kψk = 1). Dans cette thèse, nous étudierons des systèmes à un nombre variable d’électrons. L’énergie d’un tel système est une fonction de sa matrice densité réduite γ et de la fonction ∆ qui représente les déplacements des atomes de carbone E(γ, ∆) = Tr(Hec γ) 2 ωQ + 2 g Z ∆2 (y)dy. (11) Nous étudierons rigoureusement le modèle continu dans le chapitre 1 de cette thèse. Nous allons trouver les états fondamentaux du système ainsi que l’énergie fondamentale atteinte par E(γ, ∆), en résolvant le problème de minimisation associé. Pour cela, nous appliquerons une approche proposée par C. Hainzl, M. Lewin, E. Séré et J.P. Solovej dans [18], [19], [20], [21]. Leur stratégie, qui sera expliquée plus en détails dans la section III.2 de cette introduction, consiste à restreindre la variable spatiale à une boîte compacte de R3 et à imposer aux fonctions d’onde des conditions périodiques sur les bords (i.e. ils les définissent sur le tore) . Comme il est fait fréquemment dans la littérature, ils introduisent un cut-off ultraviolet dans l’espace de Fourier. Ils étudient des problèmes de minimisation avec ses restrictions, puis ils procèdent à un passage à la limite lorsque la taille de la boîte tend vers l’infini. Nous emprunterons cette méthode pour résoudre le problème de minimisation qui découle de la recherche des états fondamentaux de la molécule de polyacétylène, dans le cadre continu décrit ci-dessus. II.4 L’opérateur de Dirac discret Dans cette section, nous cherchons à étudier de façon heuristique le passage à la limite continue du Hamiltonien discret décrivant la molécule de polyacétylène. Pour cela, nous allons changer la représentation de notre espace de Hilbert de sorte que nous puissions écrire le Hamiltonien électronique Heϕ sous une forme qui nous permette d’identifier un opérateur de Dirac discret. Rappelons que nous travaillons dans l’espace de Hilbert CN muni de la base B := {wn = in~en |n = 1, . . . , N }, où N est multiple de 4 et nous notons m = N/2. Pour une configuration de la molécule de polyacétylène ϕ = {un }, le Hamiltonien électronique s’écrit Heϕ = h0 + αhϕ1 (voir les formules (8) et (9)). Nous avons supprimé la prime de la notation des matrices écrites dans la base B. Introduction 27 Au lieu d’écrire la matrice hϕ1 en fonction des écarts δn = un − un−1 , nous introduisons une nouvelle variable dn = (−1)n+1 δn et nous obtenons 0 −id2 0 ··· −id1 id2 0 id3 0 ··· 0 0 −id3 0 −id4 ··· 0 ϕ h1 = .. . . . . . −id2m−1 0 −id2m id1 0 ··· 0 id2m 0 Ainsi, pour un vecteur v ∈ C2m nous avons 0 it0 0 ··· −it0 v1 −it0 0 it0 0 ··· 0 v2 0 −it0 0 it0 · · · 0 v3 h0 v = − .. . .. . .. . 0 it0 v2m−1 it0 0 · · · 0 −it0 0 v2m v2 − v2m v3 − v1 v4 − v2 = −it0 , .. . v2m − v2m−2 v1 − v2m−1 et pour le deuxième membre de Heϕ , 0 −id2 0 ··· −id1 id2 0 id3 0 ··· 0 0 −id3 0 −id4 ··· 0 hϕ1 v = .. . . . . −id2m−1 0 −id2m id1 0 ··· 0 id2m 0 −d1 v2m − d2 v2 d2 v1 + d3 v3 .. = i . . −d2m−1 v2m−2 − d2m v2m d2m v2m−1 + d1 v1 v1 v2 v3 .. . v2m−1 v2m Maintenant nous allons construire une représentation différente de l’espace C2m : au vecteur v = (vn ) ∈ C2m on associe deux vecteurs φodd , φeven ∈ Cm ayant les coordonnées (φodd )n = v2n−1 et (φeven )n = v2n , 28 Introduction pour tout n = 1, . . . , m. Nous représentons le vecteur v par φodd ψ= ∈ C2m . φeven La matrice h0 . Pour un vecteur φ ∈ Cm , on définit l’opérateur ∂φ par (∂φ)n = φn+1 − φn . P ∗ L’adjoint de δ pour le produit scalaire usuel hv, ui = m n=1 v n un est noté ∂ et défini par (∂ ∗ φ)n = φn−1 − φn . Dans ces définitions nous avons imposé la périodicité des indices, notamment φ0 = φm et φm+1 = φ1 . Si l’on pose h̃0 la représentation de h0 associée à la nouvelle écriture v → ψ, un calcul simple montre que l’on a φodd 0 (−it0 ∂)∗ . h̃0 ψ = φeven −it0 ∂ 0 La matrice hϕ1 . Pour traiter le deuxième terme du Hamiltonien électronique, on définit l’opérateur ∆ agissant sur φ ∈ Cm de la manière suivante (∆φ)n = d2n φn + d2n+1 φn+1 . L’opérateur adjoint est noté ∆∗ et défini par (∆∗ φ)n = d2n φn + d2n−1 φn−1 . Avec ces définitions, la représentation de hϕ1 dans notre nouvelle écriture est donnée par 0 −i∆∗ φodd ϕ h̃1 ψ = . i∆ 0 φeven Calcul heuristique de la limite. Notons que les opérateurs ∂ et ∂ ∗ définis ci-dessus sont des dérivées discrètes (différences finies) à droite et à gauche respectivement. Les opérateurs ∆ et ∆∗ sont interprétés comme des moyennes pondérées par des poids donnés par les quantités dn . Ainsi, en faisant tendre vers zéro la distance entre les élements de CH et après un changement d’échelle adéquat, nous obtenons la convergence (formelle) vers des opérateurs auto-adjoints d dy ∆ −→ ∆(y) −it0 ∂ −→ −i (opérateur de multiplication). Introduction 29 Remarquons également que, pour avoir la convergence de l’opérateur de différences d lorsque la distance entre les atomes tend finies −it0 ∂ vers un opérateur de dérivée −i dy vers zéro, il faut en même temps que l’amplitude de saut t0 → +∞. Dans ce cas, nous avons d 0 −i dy d 0 (−it0 ∂)∗ = −iσ1 h̃0 = −→ d −it0 ∂ 0 0 −i dy dy ainsi que h̃ϕ1 0 −i∆∗ i∆ 0 = −→ 0 −i∆(y) = σ2 ∆(y). i∆(y) 0 De sorte que le Hamiltonien discret h̃ϕ = h̃0 + h̃ϕ1 tend vers un Hamiltonien continu qui s’écrit d D∆ = −iσ1 + σ2 ∆(y). dy Maintenant, pour obtenir la même écriture que l’on a pour le Hamiltonien du modèle continu de la molécule de polyacétylène, on fait un changement de base par la matrice unitaire 1 1 1 − i −1 − i M = (1C2 − i(σ1 + σ2 + σ3 )) = , 2 2 1−i 1+i qui vérifie M −1 = M ∗ , M ∗ σ1 M = σ3 et M ∗ σ2 M = σ1 . Il vient que H∆ := M ∗ D∆ M = −iσ3 d + σ1 ∆(y). dy Nous avons bien que H∆ est l’opérateur de Dirac du modèle continu (10), hormis les constantes physiques que l’on récupère en faisant le changement d’échelle correctement. III Les premiers résultats rigoureux Dans les années 50, Fröhlich [16] et Peierls [31] ont montré qu’une instabilité dans les systèmes électroniques à une dimension avait toujours lieu. Leur idée était de construire un état test ayant une période 2 (c’est-à-dire, un état dimérisé présentant des liaisons de même longueur une fois sur deux) et donnant une énergie inférieure à celle de l’état d’équilibre de période 1 (ayant des liaisons de même longueur tout au long de la chaîne). Cependant, il n’était pas encore démontré qu’une telle périodicité était optimale. Rien n’empêchait en principe qu’une rupture supplémentaire de la symétrie ou même l’absence de périodicité pût faire baisser davantage l’énergie du système. La première démonstration rigoureuse du fait que les états fondamentaux d’un système électronique unidimensionnel, avec le choix du Hamiltonien proposé par SSH [36], sont en effet des états dimérisés, a été communiquée par Kennedy et Lieb (KL) [23]. Dans leurs travaux, ils ont montré que l’instabilité de Peierls a bien lieu, minimisant l’énergie du système, et que ces états fondamentaux dimérisés sont les seuls minimiseurs globaux 30 Introduction de l’énergie. Ils démontrent cela pour toute valeur de la constante de couplage et pour des systèmes finis, sans passer à la limite lorsque le nombre d’atomes tend vers l’infini. Ils considèrent une bande mi-remplie, c’est-à-dire, ils supposent la présence d’un seul électron par atome de la chaîne. III.1 La preuve de Kennedy et Lieb Maintenant, nous allons expliquer la méthode utilisée par Kennedy et Lieb pour démontrer ces résultats, en utilisant leurs propres notations. Le modèle introduit ci-dessous, ainsi que les calculs et la démonstration développés ensuite proviennent de [23]. Considérons une chaîne linéaire périodique de 2N atomes et notons wi la distance séparant les i-ème et (i + 1)-ème atomes. Par périodicité, les indices des atomes sont pris modulo 2N . Soit d > 0 la distance d’équilibre. Autrement dit, d est égal à la longueur totale de la chaîne divisée par le nombre d’atomes 2N . Si la constante κ représente la rigidité de la chaîne et on note {w} = {w1 , . . . , w2N }, l’énergie de distorsion est définie par 2N 1 X (wi − d)2 . U ({w}) = κ 2 i=1 On considère une bande mi-remplie, c’est-à-dire que l’on suppose que l’on a 2N électrons dans la chaîne. Ces électrons peuvent sauter entre atomes voisins avec une amplitude de probabilité ti = t(wi ) de saut du i-ème atome au (i + 1)-ème atome ou vice-versa. Avec cette notation, l’énergie électronique fondamentale est donnée par K({w}) = 2 N X λj (T ), j=1 où λ1 ≤ λ2 ≤ · · · ≤ λ2N sont les valeurs propres de la matrice auto-adjointe T ∈ M2N ×2N , dont les coordonnées sont nulles sauf pour Ti,i+1 = Ti+1,i = ti , i = 1, . . . , 2N , où les indices sont considérés modulo 2N . Ainsi, le Hamiltonien total est défini par H({w}) = U ({w}) + K({w}), (12) et le but est de trouver l’énergie fondamentale ainsi que les configurations {w} l’atteignant. La fonction t(w) considérée par KL, donnant la probabilité de saut des électrons, est affine, comme il a été suggéré par SSH dans [36] (voir la formule (5)). Ici, elle est définie par t(w) = b − c(w − d), où b, c > 0 sont des paramètres. Remarque 1. Observons que les Hamiltoniens (6) et (12) sont équivalents. Dans le modèle de SSH, la distance à l’équilibre est notée a > 0 et le déplacement des atomes à partir de la position d’équilibre est un . Ainsi, la distance séparant deux atomes consécutifs est donnée par a + ui+1 − ui . De leur côté, KL notent cette dernière quantité wi et la Introduction 31 distance à l’équilibre par la lettre d, d’où découle l’égalité entre les deux définitions de l’énergie de distorsion Eσ et U ({w}). Quant à l’équivalence entre les définitions de l’énergie électronique, la comparaison est moins évidente. Il faut remarquer que la matrice X Heϕ := − tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ) n,s proposée par SSH est égale à moins la matrice T de KL. Or, il est moins immédiat de montrer que l’énergie électronique fondamentale associée est égale à deux fois la somme des N premières valeurs propres de Heϕ . Ceci est en effet vérifié et sera démontré dans le second chapitre de cette thèse, section 2.1.1. Nous remarquons également que KL considèrent les quantités wi comme des variables statiques, alors que dans le modèle de SSH les électrons sont considérés comme des particules quantiques et donc ces variables sont traitées comme dynamiques et quantiques [23]. Dans leurs calculs, KL considèrent deux cas possibles. D’un côté, la chaîne de la molécule est supposée avoir P2Nune longueur moyenne fixe ` et donc les variables {w} sont soumises à la restriction i=1 wi = 2N `. Ils appellent ce cadre le cas à longueur fixe. D’un autre côté, ils étudient le cas à longueur variable, où l’énergie est minimisée sans imposer de restriction aux variables {w}. Étant donné que SSH n’ont considéré que le cas à longueur fixe et que cette thèse est basée sur le modèle proposé par ces auteurs, nous allons traiter uniquement ce cas, laissant le lecteur intéressé consulter [23] pour les détails concernant le cas à longueur variable, plus simple du fait que la minimisation est faite sans contrainte. Maintenant, nous énonçons une partie du théorème démontré par KL dans [23] et puis nous donnerons un résumé de la preuve pour le cas à longueur fixe. Théorème 1. Dans le cas à longueur variable, pour toute valeur de b, c, d, κ et N , les seules configurations minimisant H({w}) sont wi = W + (−1)i δ ou wi = W − (−1)i δ, (13) W et δ étant déterminés de façon unique par b, c, d, κ et N . Dans le cas à longueur fixe, on a le même résultat pour tout N , pourvu que les autres constantes satisfassent la condition κ[b − c(` − d)] ≥ c2 . (14) Démonstration. (Résumée) Tout d’abord, on remarque que la matrice T est équivalente à la matrice −T : −T = M −1 T M où Mi,j = (−1)i δi,j . Ce qui implique que le spectre de T est symétrique par rapport à 0 (d’où Tr T = 0) et donc K({w}) est deux fois la somme des valeurs propres négatives de T . Alors, on a 32 Introduction K({w}) = −Tr|T | et, si l’on écrit l’énergie en fonction des {ti } on trouve 2N 1 X H= g (ti − b)2 − Tr|T |, 2 i=1 où g = κ/c2 . Notons Θk l’opérateur de translation de k sites sur R2N , c’est-à-dire la matrice dont la j-ème colonne est le vecteur de la base canonique ~ej+k (en prenant les indices modulo 2N ) : Θk := [~e1+k |~e2+k | · · · |~e2N +k ] . En notant hT 2 i la moyenne de T 2 sur toutes ces translations 2N 1 X Θk T 2 Θ−1 hT i := k , 2N k=1 2 la concavité de la racine carrée implique que ([23]) h h i 1/2 i 1/2 Tr|T | = Tr T 2 ≤ Tr T 2 . (15) On remarque que pour une configuration dimérisée comme (13) nous avons toujours T 2 = Θk T 2 Θ−1 k pour tout k, et dans ce cas l’inégalité ci-dessus devient une égalité. Maintenant, notons que les seuls éléments non nuls de la matrice T 2 sont (T 2 )i,i = t2i + t2i−1 et (T 2 )i,i+2 = (T 2 )i+2,i = ti ti+1 . On introduit la notation x := 2N 1 X ti 2N i=1 y 2 := 2N 1 X 2 t 2N i=1 i z := 2N 1 X ti ti+1 , 2N i=1 et on définit la matrice Ω dont les seuls éléments non nuls sont Ωi,i+2 = Ωi+2,i = 1. Donc, avec cette notation, un calcul montre que l’on peut réécrire hT 2 i = 2y 2 + zΩ, et l’énergie de distorsion devient U = gN y 2 − 2bx + b2 . En somme, nous avons trouvé, comme conséquence de l’inégalité (15), que l’on a un minorant de l’énergie donné par H ≥ gN y 2 − 2bx + b2 − Tr (2y 2 + zΩ)1/2 . (16) Ce minorant est atteint par les configurations dimérisées. P2N 2 1 2 Si l’on pose si = x − ti , alors on a y 2 = x2 + 2N i=1 si ≥ x et de l’inégalité de Cauchy - Schwartz résulte que z = x2 + 2N 2N 1 X 1 X 2 si si+1 ≥ x2 − si = 2x2 − y 2 . 2N i=1 2N i=1 Nous allons considérer deux cas, selon le signe du minorant de z ci-dessus. Introduction 33 Cas 1 : 2x2 − y 2 ≥ 0. On peut prouver que la fonction z 7→ Tr (2y 2 + zΩ)1/2 est décroissante par rapport à |z| (voir [23]). Donc, dans l’inégalité (16) on peut remplacer z par 2x2 − y 2 . L’inégalité résultante est une égalité pour la configuration dimérisée ti := x + (−1)i (y 2 − x2 )1/2 . P P De plus, puisque nous avons i ti = 2N x = i ti , alors les configurations {ti } et {ti } ont la même longueur. Donc, nous avons prouvé que pour toute configuration {ti } satisfaisant 2x2 − y 2 ≥ 0, il existe une configuration dimérisée de la même longueur ayant une énergie inférieure et donnée par (17) H = gN y 2 − 2bx + b2 − Tr (2y 2 + (2x2 − y 2 )Ω)1/2 . Cas 2 : 2x2 − y 2 < 0. Étant donné que l’application z 7→ Tr (2y 2 + zΩ)1/2 est décroissante en |z|, elle atteint son maximum en 0 et donc √ H g ≥ (y 2 − 2bx + b2 ) − 2y. 2N 2 (18) On remarque que fixer la longueur de la chaîne à 2N ` est équivalent à fixer la valeur de x à b −√c(` − d). Dans ce cas, la condition (14) s’écrit gx ≥ 1. Cette inégalité et le fait que y > 2x (hypothèse du Cas 2) impliquent que 1 2 √ gy − 2y > gx2 − 2x. 2 Ainsi, de (18) on déduit que 1 H ≥ gx2 − gbx + gb2 − 2x. 2N 2 (19) Ce minorant de l’énergie est atteint en la configuration dimérisée {ti } définie par t̄i = x + (−1)i x, qui a la même longueur que la configuration originale {ti }. En effet, un calcul simple démontre que 2N 1 X x̄ = t̄i = x, 2N i 2N 1 X 2 ȳ = t = 2x2 2N i i 2 et 2N 1 X z̄ = ti ti+1 = 0, 2N i et en remplaçant ceci dans le membre de droite de (16) on obtient le membre à droite de (19). De plus, la configuration {ti } appartient au Cas 1. Alors, nous avons montré que pour toute configuration appartenant au Cas 2, il existe une configuration dimérisée de moindre énergie et appartenant au Cas 1. On en conclut que H atteint son minimum en une configuration dimérisée, et il nous reste à prouver que ce minimum est atteint seulement en de telles configurations et que W et δ sont uniques. Nous aurons besoin d’un lemme dont nous omettons la démonstration (voir [23]) : 34 Introduction Lemme 1. Avec la même notation introduite ci-dessus nous avons Tr |T | = Tr h T2 1/2 i h i 1 h 2 i ≤ Tr hT i1/2 − kT k−3 Tr T 2 − T 2 . 8 En utilisant ce lemme à la place de l’inégalité (15), on voit que toute configuration donnant le minimum de H satisfait Tr[(T 2 − hT 2 i)2 ] = 0, d’où T 2 = hT 2 i ce qui implique que la configuration est dimérisée. L’unicité de W et δ est une conséquence du fait que la valeur de l’énergie d’une configuration dimérisée est égale au membre de droite de (17), qui est une fonction jointement strictement convexe en les variables X = x2 et Y = y 2 . Cela implique que l’énergie a un unique minimum dans la région Y ≥ X avec X fixé (cas à longeur fixe). Il y a deux configurations donnant ce minimum unique, sauf si x2 = y 2 et dans ce cas on a un seul minimiseur et δ = 0 (position d’équilibre). Ceci termine la preuve du Théorème 1, cas à longueur fixe. III.2 Une autre approche pour un problème du même type : l’approximation du champ moyen de l’Electrodynamique Quantique Dans cette section nous faisons un résumé de trois articles importants, qui servent de base pour la stratégie de solution des problèmes attaqués dans cette thèse. Nous parlerons brièvement des problèmes étudiés dans ces articles, puis des méthodes utilisées pour les résoudre. Ces techniques nous intéressent particulièrement car nous allons les adapter pour les appliquer aux problèmes de minimisation d’énergie traités dans nos travaux de recherche. Dans un premier temps, nous parlerons de deux travaux réalisés par C. Hainzl, M. Lewin et E. Séré concernant l’existence du vide polarisé dans l’approximation dite de Bogoliubov-Dirac-Fock de l’électrodynamique quantique. Il s’agit de deux articles traitant le même problème, mais résolu par des méthodes différentes. Le troisième travail que nous allons résumer a été fait par C. Hainzl, M. Lewin et J.P. Solovej. Ils étudient l’approximation de champ moyen de l’électrodynamique quantique à travers la limite thermodynamique. Les auteurs introduisent un problème périodique auxiliaire et étudient ensuite le passage à la limite lorsque la période tend vers l’infini. Les résultats obtenus dans ce travail s’accordent bien avec ceux des deux premiers articles cités. Toutes les définitions et résultats énoncés dans les deux prochaines sections proviennent des articles [18], [19] et [21]. Toutefois, dans certains cas, le lecteur sera invité à consulter d’autres travaux ou certains ouvrages pour éclaircir des concepts non développés en détail dans ces trois articles. Introduction 35 Travaux sur le vide polarisé par Hainzl, Lewin et Séré Premièrement, parlons des travaux faits par C. Hainzl, M. Lewin et E. Séré dans [18] et [19]. Les auteurs étudient le phénomène de polarisation du vide (vacuum polarization) dans l’approximation dite de Bobogliubov-Dirac-Fock. Cette polarisation a lieu lorsque l’on est en présence d’un potentiel externe qui exerce une influence sur les électrons virtuels, comme nous allons expliquer ci-dessous. Considérons un champ de force créé par un potentiel externe V , qui peut être induit, par exemple, par la présence d’un ensemble de noyaux ponctuels. Dans ce cas le potentiel serait de la forme V = −αϕ, où α est une constante de couplage adimensionnelle, souvent appelée constante de structure fine de Sommerfield, et ϕ := n ∗ 1 , |·| avec n la densité de protons du système de noyaux. L’opérateur de Dirac perturbé par un tel potentiel s’écrit Hαϕ := H0 − αϕ, où H0 est l’opérateur de Dirac libre défini dans (1). En présence d’un potentiel externe, les électrons virtuels de la Mer de Dirac réagissent en occupant les états d’énergie négative de l’opérateur de Dirac avec potentiel, et dans ce cas on dit que le vide est polarisé. En outre, le vide polarisé modifie le champ électrostatique et les électrons virtuels réagissent à leur tour au champ corrigé. Ceci donne lieu à une équation de point fixe que doit satisfaire l’état fondamental du nouveau système, donné par la projection spectrale négative Pscf = χ(−∞,0) (Hαϕ + Veff ), (20) où Veff est le potentiel effectif prenant en compte le champ électrostatique modifié par le vide polarisé. Cette équation auto-consistante a l’avantage d’avoir une interprétation variationnelle, puisqu’elle est satisfaite par le minimiseur de la fonctionnelle de l’énergie de BogoliubovDirac-Fock (BDF), introduite par Chaix et Iracane dans [5]. Cette approximation apparaît comme une amélioration du modèle de Dirac - Fock, dans le but de résoudre des problèmes de calcul en Chimie Quantique. L’approximation de Dirac - Fock a la vertu de donner d’excellents résultats en accord avec les données expérimentales. Par contre, elle a deux inconvénients majeurs. Premièrement, l’énergie associée n’est pas bornée inférieurement entraînant des difficultés de calcul et des soucis dans la définition des états fondamentaux. Deuxièmement, ce modèle n’est pas satisfaisant dans sa dérivation physique car il ne peut être interprété comme une approximation variationnelle de l’électrodynamique quantique, théorie considérée comme étant exacte. C’est dans ce contexte que Chaix et Iracane dérivent leur modèle de champ moyen, BDF, qui tient compte des termes associés à la polarisation du vide, le rendant plus précis que Dirac - Fock. En outre, l’énergie associée est bornée inférieurement, d’où les états 36 Introduction fondamentaux sont définis de la façon usuelle, comme les minimiseurs de cette énergie. Ce sont des projecteurs orthogonaux donnés par la projection spectrale négative du Hamiltonien de champ moyen engendré par la densité de charge des noyaux, en prenant en compte les potentiels dus à la polarisation du vide. Autrement dit, ils sont solution d’une équation de point fixe comme celle donnée en (20). En contrepartie, le modèle BDF présente des difficultés dans la définition de certaines quantités comme la densité de charge du vide et l’énergie de ce dernier. Avant les travaux de Hainzl, Lewin et Séré, les premiers résultats mathématiques rigoureux concernant le modèle de BDF apparaissent dans [6] et dans [1]. Dans ce dernier papier les auteurs négligent les termes correspondant à la polarisation du vide, du fait qu’ils sont petits expérimentalement même si mathématiquement divergents. Dans [6] on démontre que le vide libre est bien un minimiseur de l’énergie de BDF en l’absence d’un potentiel externe. Dans [18] et [19], les auteurs traitent le problème des termes divergents en introduisant un cut-off ultraviolet dans l’espace de Fourier. Autrement dit, ils changent l’espace des états original H par le sous-espace n o HΛ := f ∈ H | supp(fˆ) ⊂ B(0, Λ) , qui reste invariant sous la projection P0 , du fait que, en variable de Fourier, Ĥ0 est un opérateur de multiplication. La matrice de densité d’un état représentant le vide est définie comme un projecteur orthogonal P satisfaisant la condition que Q = P − P0 soit un opérateur de Hilbert - Schmidt. En concordance avec les idées posées par Dirac, ce modèle prend la matrice de densité du vide libre (P0 ) comme référence, et donc Q est interprété comme la vraie matrice de densité normalisée de Ω (le vide polarisé). Formellement, la fonctionnelle de l’énergie de BDF peut s’écrire comme une fonction de la matrice de densité normalisée ZZ Z ρQ (x)ρQ (y) α dx dy E(Q) =Tr(H0 Q) − α ρQ ϕ + 2 |x − y| ZZ α |Q(x, y)|2 − dx dy, (21) 2 |x − y| où ρQ (x) = trC4 Q(x, x) et Q(x, y) est le noyau intégral de l’opérateur de Hilbert-Schmidt Q. Cette définition de l’énergie pose cependant deux problèmes. Premièrement, la densité ρQ n’est pas toujours définie du fait que le noyau intégral Q(·, ·) est un élement de L2 (H × H) qui n’a pas de trace sur la diagonale {(x, x), x ∈ R3 }. C’est pour cette raison que l’on introduit le cut-off ultraviolet et l’on travaille dans l’espace HΛ défini ci-dessus. Introduction 37 Deuxièmement, le terme Tr(H0 Q) n’est pas bien défini car, si P est solution de (20), alors Q = P − P0 n’est pas un opérateur à trace. Pour contourner cette difficulté, Hainzl, Lewin et Séré introduisent une notion qui permet d’étendre le domaine de la trace. Cidessous on reproduit la définition provenant de [18], et dont on tirera parti pour retrouver une décomposition utile d’un espace de Hilbert et des opérateurs définis dessus. Définition 1. Soit P un projecteur défini sur un espace de Hilbert H tel que P et 1 − P soient de rang infini, et soit A un opérateur de Hilbert-Schmidt sur H. On dit que A est un opérateur à P -trace si et seulement si A++ := (1 − P )A(1 − P ) et A−− := P AP sont à trace. Dans ce cas on définit la P -trace de A par TrP (A) := Tr(A++ ) + Tr(A−− ), et on note G1P (H) l’espace des opérateurs de Hilbert-Schmidt à P -trace. Maintenant, supposons que l’on a un projecteur P et un Hilbert H comme dans la définition. On définit (en gardant à l’esprit le contexte de l’opérateur de Dirac) les sousespaces H− = P H et H+ = (1 − P )H, de sorte que l’on a la décomposition en somme directe H = H− ⊕ H+ . C’est-à-dire, ∀f ∈ H, f = f− + f+ , avec f− = P f et f+ = (1 − P )f. Si A est un opérateur défini sur H, on pose A−− et A++ comme dans la définition, ainsi que A+− := (1 − P )AP et A−+ := P A(1 − P ). Avec ces notations, nous avons l’écriture f f= − , f+ puis A−− A−+ f− Af = . A+− A++ f+ Nous pouvons écrire également P = 1 0 0 0 0 0 et 1 − P = . 0 1 Cette décomposition de l’espace de Hilbert et des opérateurs, pour un projecteur P donné, sera utilisée postérieurement dans nos calculs. Dans les articles de référence [18] et [19], on suppose que la densité de charge n du système de noyaux appartient à l’espace C = f ∈ L2 (R3 , R) | D(f, f ) < ∞ , 38 Introduction où par définition Z ˆ f (k)ĝ(k) D(f, g) := 4π dk. |k 2 | p L’espace C est muni de la norme kf kC = D(f, f ) + kf k2L2 . Ainsi, nous pouvons réécrire l’énergie de Bogoliubov-Dirac-Fock comme ZZ α α |Q(x, y)|2 E(Q) = TrP0 (H0 Q) − αD(ρQ , n) + D(ρQ , ρQ ) − dx dy, (22) 2 2 |x − y| où la matrice de densité Q appartient à l’ensemble convexe SΛ = Q ∈ G1P (H) | −P0 ≤ Q ≤ 1 − P0 , ρQ ∈ C . Nous soulignons que ce dernier ensemble, sur lequel on minimise la fonctionnelle de BDF, a une caractérisation simple mais importante que nous donnons dans la proposition cidessous. En effet, cette caractérisation a permis aux auteurs de [1] de montrer que l’énergie de BDF est bornée inférieurement. Proposition 1. Soit Q un opérateur auto-adjoint dans G1P (H). Alors, Q ∈ SΛ ⇔ Q2 ≤ Q++ − Q−− . (23) De plus, nous avons l’égalité dans (23) si et seulement si Q + P0 est une projection orthogonale. Démonstration. Pour simplifier la notation, posons P− = P0 et P+ = 1 − P0 . Prenons un opérateur Q auto-adjoint dans G1P (H) et rappelons les définitions Q−− = P− QP− et Q++ = P+ QP+ . De la définition de SΛ nous avons que Q ∈ SΛ si et seulement si 0 ≤ P− + Q ≤ 1. Ceci est équivalent à dire que (P− + Q)2 ≤ P− + Q. En développant ce carré, nous avons (P− + Q)2 = P− + P− Q + QP− + Q2 ≤ P− + Q ⇔ 2 Q ≤ Q − P− Q − QP− = (1 − P− )Q − QP− = P+ Q − QP− [P− + P+ = 1] ⇒ = P+ Q(P− + P+ ) − (P− + P+ )QP− = P+ QP− + P+ QP+ − P− QP− − P+ QP− = Q++ − Q−− . Ce qui termine la preuve de (23). Finalement, l’opérateur P− + Q étant auto-adjoint, il est une projection orthogonale si et seulement si (P− + Q)2 = P− + Q. D’après le raisonnement ci-dessus, ceci est équivalent à Q2 = Q++ − Q−− , comme nous voulions démontrer. Introduction 39 Schématiquement, ceci est le modèle de Bogoliubov-Dirac-Fock étudié par Hainzl et al. dans leurs travaux. Faisons maintenant une comparaison brève entre les deux articles concernés dans cette discussion. Dans leur premier article à ce sujet [18] les auteurs appliquent un algorithme de point fixe à l’équation (20), comme il est coutume de faire pour résoudre une équation autoconsistante en Chimie et Physique Quantique. Ils démontrent la convergence de ce schéma itératif vers un minimiseur global de la fonctionnelle de BDF en appliquant le théorème de point fixe de Banach. Ceci est fait en imposant néanmoins certaines conditions. D’un côté, ils imposent des restrictions de régularité au potentiel externe ainsi que la condition qu’il ne soit pas trop fort pour empêcher l’algorithme de converger. D’un autre côté,√les auteurs contraignent la valeur de Λ, le cut-off ultraviolet, à satisfaire l’inégalité α log Λ ≤ C, avec C une constante. Cette condition, n’étant pas très contraignante du fait que Λ peut être pris assez grand pour α petit, entrave toutefois l’étude de la limite lorsque Λ → ∞. Dans un souci de clarté, nous transcrivons ici le théorème principal de [18] sur l’existence d’un vide stable pour le modèle de BDF. Ils définissent un vide stable pour l’énergie de BDF comme tout projecteur P tel que P − P0 soit un miniseur de E sur GΛ , puis ils prouvent le résultat suivant. Théorème 2. Soit n ∈ C et b ∈ (0, 1). Alors, pour tout Λ et α tels que √ 2 πknkC ≤ b et α ≤ αb (Λ), où C(1 − b) αb (λ) ∼Λ→∞ √ , log Λ il existe un unique vide stable P , qui est solution de Q(x, y) 1 −α P = χ(−∞,0) (DQ ) = χ(−∞,0) H0 + α(ρQ − n) ∗ |·| |x − y| avec Q = P − P0 . De plus, nous avons TrP0 (Q) = 0. En revanche, dans l’article [19] les auteurs démontrent l’existence du vide polarisé en minimisant la fonctionnelle de BDF (22) sur SΛ en présence d’un potentiel externe, mais cette fois par une méthode directe de minimisation. La façon de traiter les termes divergents est la même : on étend la définition de la trace (voir Définition 1) et on introduit un cut-off ultraviolet Λ. L’avantage de cette approche est que l’on peut prendre la valeur de Λ aussi grande que l’on veut (mais finie) et nous avons toujours l’existence d’un minimiseur de E dans SΛ , qui satisfait l’équation auto-consistante (20). Le seul inconvénient par rapport à la démarche de point fixe est que la méthode directe n’est pas constructive et donc elle n’induit pas un algorithme numérique de façon naturelle. Ces résultats sont compris dans le théorème suivant provenant de [19]. 40 Introduction Théorème 3. Soit 0 ≤ α < 4/π et n ∈ C. Alors la fonctionnelle E satisfait, pour tout Q ∈ SΛ , α E(Q) + D(n, n) ≥ 0 2 et par conséquent elle est bornée inférieurement sur SΛ . De plus, il existe un minimiseur Q̄ de E dans SΛ tel que P̄ = Q̄ + P0 est un projecteur satisfaisant l’équation auto-consistante 1 Q̄(x, y) −α . P̄ = χ(−∞,0) H0 − αϕ + αρQ̄ ∗ |·| |x − y| En outre, si α et n satisfont ( π 1−α 0≤α 4 π 2 s ! )−1 α/2 + π 1/6 211/6 knkC ≤ 1, 1 − απ/4 alors le minimiseur global Q̄ est unique et le vide polarisé associé est neutre : hΩP̄ |Q|ΩP̄ i = TrP0 (Q̄) = 0. En outre, dans ces travaux les auteurs étudient le comportement des solutions lorsque l’on fait Λ → ∞. Ils démontrent que le modèle n’a plus de sens à la limite puisque la densité du vide annule complètement le potentiel externe. De ce fait, la minimisation sans cut-off ultraviolet n’a de sens ni du point de vue mathématique, ni du point de vue physique. La troisième partie de l’article est consacrée à l’étude d’un modèle simplifié où le terme de l’énergie d’échange (Q(x, y)/|x − y|) est négligé. Cette étude renforce la thèse qui établit que le modèle perd son sens lorsque l’on prend la limite Λ → ∞, du fait que cela implique que les interactions électrostatiques disparaissent. Article sur la limite thermodynamique dans l’approximation de champ moyen : Hainzl, Lewin, Solovej Dans leur article [21], C. Hainzl, M. Lewin et J.P. Solovej étudient l’approximation de champ moyen de l’électrodynamique quantique (QED), à travers la limite thermodynamique. Ils considèrent le Hamiltonien de QED en présence d’un potentiel externe, négligeant les photons. En bref, leur stratégie consiste à restreindre le Hamiltonien à une boîte bornée dans R3 , avec des conditions périodiques sur le bord, et à imposer un cut-off ultraviolet dans l’espace de Fourier. Ils obtiennent ainsi un problème de minimisation en dimension finie qui admet une solution. Ensuite, ils calculent la limite thermodynamique lorsque la taille de la boîte tend vers l’infini, c’est-à-dire, ils étudient le comportement des minimiseurs et de l’énergie minimale dans cette limite. Ils considèrent séparément les cas sans potentiel externe et avec potentiel. Le Hamiltonien de l’électrodynamique quantique, sous une interaction de Coulomb et lorsque l’on néglige les photons, s’écrit formellement ZZ Z Z ρ(x)ρ(y) α ϕ ∗ dx dy, (24) H = Ψ (x)H0 Ψ(x)dx − ϕ(x)ρ(x)dx + 2 |x − y| Introduction 41 où Ψ(x) est l’opérateur de champ second-quantisé [39] et ρ(x) est l’opérateur de densité ρ(x) = tr[Ψ∗ (x), Ψ(x)] . 2 (25) Nous rappelons que H0 est l’opérateur libre de Dirac et que [A, B] = AB − BA est le commutateur. La fonction ϕ représente le potentiel externe. Un minimiseur global de Hϕ serait interpreté comme le vide libre si ϕ = 0 ou comme le vide polarisé lorsque ϕ 6= 0. Cependant, ces problèmes de minimisation n’ont pas de sens puisque le Hamiltonien en question n’est pas borné inférieurement. Ceci est dû au fait que le spectre de l’opérateur de Dirac libre en unités atomiques est de la forme σ(H0 ) = (−∞, −1] ∪ [1, ∞), comme on a signalé en (4). Le but de l’article [21] est de donner un sens mathématique précis à la minimisation de Hϕ dans l’approximation de champ moyen. Autrement dit, lorsque nous restreignons le Hamiltonien aux états du type Hartree-Fock (HF) dans l’espace de Fock sous-jacent [39]. Les détails sur l’approximation de Hartree-Fock peuvent être consultés par exemple dans [4, 37]. Un état de HF |Ωi est décrit, à une phase près, par sa matrice de densité P (x, y) := hΩ|Ψ∗ (x)Ψ(y)|Ωi. L’énergie de l’électrodynamique quantique est une fonction qui ne dépend que du projecteur orthogonal P (projection spectrale), comme dans la théorie de Hartree-Fock usuelle. Néanmoins, dans le cadre présent cette énergie aura une écriture plus simple en fonction de la matrice de densité normalisée γ := 1 P − P⊥ =P− , 2 2 où P ⊥ = 1 − P . La matrice γ et le projecteur P = γ + 1/2 associé, sont les objets principaux d’étude dans [21]. Les états seront toujours représentés par l’un de ces deux opérateurs. Remarque 2. Il est important de donner ici une description détaillée du modèle périodique introduit dans l’article [21] pour donner un sens au problème de minimisation, car nous allons reprendre ces notions dans nos calculs. Nous consacrerons donc les paragraphes suivants à un exposé de ce modèle, en développant les concepts qui nous seront particulièrement utiles. Fixons momentanément L > 0 et définissons la boîte 3 L L ⊂ R3 . CL := − , 2 2 Nous imposons des conditions périodiques sur les bords de CL , i.e. nous travaillons sur le tore TL := R3 /(LZ3 ). 42 Introduction 2 (CL , C4 ) s’écrit sous la forme Une fonction ψ ∈ L 2 (TL , C4 ) = Lper ψ(x) = 2π L 3/2 X ψ̂(k)ek (x), k∈ 2π Z3 L avec ek (x) := eik·x /L3/2 et ψ̂(k) ∈ C4 . Nous introduisons un cut-off ultraviolet dans l’espace de Fourier et nous obtenons un sous-espace de L 2 (TL , C4 ) de dimension finie noté HΛL := span ek εj | k ∈ ΓLΛ , j ∈ {1, . . . , 4} , où εj sont les éléments de la base canonique de C4 et l’ensemble d’indices où k varie est ΓLΛ := 2π 3 Z ∩ B(0, Λ). L (26) Notons que tout opérateur linéaire γ : HΛL → HΛL a un noyau intégral de la forme X γ(x, y) = γ b(k, `)ek (x)e` (y), k,`∈ΓL Λ avec γ b(k, `) ∈ M4×4 (C). De sorte que l’image de ek εj par γ est la fonction γ[ek εj ](x) = 4 X X m=1 γ b(`, k)m,j e` (x)εm . `∈ΓL Λ En conséquence, la densité associée est donnée par 1 X ργ (x) = tr C4 (γ(x, x)) = 3 tr C4 (b γ (k, `)) exp(ix · (k − `)). L L k,`∈ΓΛ Maintenant, un opérateur T invariant par translations et agissant sur HΛL a un noyau intégral de la forme Tb(k, `) = g(k)δk` , avec g(k) ∈ M4×4 (C) pour tout k ∈ ΓLΛ . Si on note 3/2 X 2π ǧ(x) = g(k)ek (x), L L k∈ΓΛ on a l’écriture suivante pour le noyau de T 3/2 1 T (x, y) = ǧ(x − y). 2π La densité d’un opérateur invariant par translations est donc une constante 3/2 1 X 1 ρT (x) = tr C4 T (x, x) = tr C4 ǧ(0) = 3 tr C4 g(k). 2π L L k∈ΓΛ Introduction 43 Passons à la description du Hamiltonien périodisé. En s’inspirant de la définition de l’opérateur de Dirac libre H0 = −iα · ∇ + m0 β, (ils considèrent la masse de l’électron m0 non normalisée), Hainzl, Lewin et Solovej définissent l’opérateur de Dirac libre sur le tore, toujours noté H0 , comme un opérateur de multiplication dans l’espace de Fourier par Ĥ0 (k) = α · k + m0 β, k ∈ ΓLΛ . Quant à l’opérateur de Dirac avec potentiel externe sur le tore, la définition est analogue au cas usuel HϕL := H0 − ϕL . Les détails sur la définition rigoureuse du potentiel périodique ϕL ne seront pas donnés ici, mais se trouvent bien évidemment dans [21]. Maintenant, l’espace de Fock associé à l’espace de Hilbert HΛL est l’espace fini-dimensionnel ! m M ^ FΛL := C ⊕ HΛL m≥1 `=1 sur lequel on définit de la manière usuelle [39] l’opérateur de création Ψ∗k,j par Ψ∗k,j (ψ1 ∧ · · · ∧ ψp ) = (ek εj ) ∧ ψ1 ∧ · · · ∧ ψp , pour k ∈ ΓLΛ et j ∈ {1, . . . , 4}. Ainsi, l’opérateur de champ second-quantisé se définit par X Ψ(x)j = ek Ψk,j . k∈ΓL Λ Le Hamiltonien de l’électrodynamique quantique agissant sur HΛL et négligeant les photons est donné par ZZ Z Z α ϕ ∗ ρ(x)ρ(y)WL (x − y)dx dy, HL = Ψ (x)H0 Ψ(x)dx − ϕL (x)ρ(x)dx + 2 T2L TL TL où l’opérateur de densité ρ(x) est défini comme dans (25), et le potentiel de Coulomb sur le tore est noté WL (voir [21] pour les détails). En calculant l’énergie associée à HϕL d’un état de type Hartree-Fock, on obtient l’énergie dite de Dirac-Fock sur le tore en fonction de γ (opérateur auto-adjoint sur HΛL ) : ZZ α α ϕ L EL (γ) = tr(Hϕ γ) + DL (ργ , ργ ) − |γ(x, y)|2 WL (x − y)dx dy, (27) 2 2 2 (TL ) où l’on a introduit ZZ f (x)f (y)WL (x − y)dx dy = DL (f, f ) = (TL )2 1 X b 2c |f (k)| WL (k). L3 2π 3 k∈ L Z 44 Introduction L’objectif du problème périodique est de trouver un minimiseur global de la fonctionnelle ELϕ (γ) dans l’ensemble {γ = P − 1/2|P projection orthogonale}. Pour cela, les auteurs suivent le procédé usuel dans les théories de Hartree-Fock qui consiste à étendre l’ensemble de minimisation à son enveloppe convexe 1 1 L L ∗ , (28) GΛ = γ ∈ L (HΛ ) | γ = γ , − ≤ γ ≤ 2 2 puis à montrer que le minimiseur ne change pas. Autrement dit, le problème périodique consiste à résoudre 1 1 ϕ ∗ L EL (ϕ) := inf EL (γ) γ ∈ L (HΛ ), γ = γ , − ≤ γ ≤ , 2 2 où L (HΛL ) est l’ensemble de transformations linéaires sur HΛL . Ceci termine notre résumé du modèle de Hartree-Fock périodique introduit en [21]. Comme nous l’avons signalé précédemment, ce modèle périodisé est conçu pour donner un sens à la minimisation de l’énergie de l’électrodynamique quantique sur tout l’espace, en passant à la limite thermodynamique lorsque L → ∞. Le reste de l’article est consacré à cette étude. Premièrement, les auteurs considèrent le problème sans potentiel externe (ϕ = 0). Ils démontrent l’existence d’un unique minimiseur γL0 du problème EL (0), pour une période L suffisamment grande. Ce minimiseur est effectivement de la forme γL0 = PL0 − 1/2, avec PL0 un projecteur orthogonal. Puis, ils démontrent que l’énergie par unité de volume EL (0) L3 admet une limite lorsque L → ∞. Ensuite, ils prouvent la convergence, dans un certain sens, de γL0 vers un opérateur invariant par translations γ 0 = P−0 − 1/2 (avec P−0 une projection) défini sur tout l’espace et interprété comme le vide libre de Hartree-Fock. Ils définissent une fonctionnelle de l’énergie par unité de volume sur les opérateurs invariants par translations agissant sur l’espace tout entier et ils démontrent que γ 0 est l’unique minimiseur de cette énergie. Dans un deuxième temps, ils traitent le problème périodique en présence d’un potentiel externe (ϕ 6= 0), en montrant avant tout l’existence d’un minimiseur γL = PL − 1/2 de EL (ϕ). Ensuite, les auteurs prouvent la convergence de la différence des énergies EL (ϕ) − EL (0) lorsque L tend vers l’infini ainsi que la convergence de γL vers un opérateur γ = P − − 1/2 représentant le vide polarisé de Hartree-Fock. Finalement, ils démontrent que l’opérateur γ − γ 0 = P − P−0 est un minimiseur de l’énergie de Bogoliubov-Dirac-Fock, qui est une mesure de l’énergie par rapport à l’énergie infinie du vide libre. Ceci montre que la théorie Introduction 45 de BDF est le modèle approprié pour l’étude des états de Hartree-Fock en QED, en présence d’un potentiel externe. Nous énonçons ici le théorème prouvé dans [21] concernant la limite thermodynamique en présence d’un potentiel externe. Théorème 4. Supposons que 0 ≤ α < 4/π, Λ > 0, m0 > 0, n ∈ C et que n̂ est continue sur B(0, Λ). Alors, pour tout L, ELϕ admet un minimiseur γL = PL − IΛL /2 sur GΛL où PL est une projection orthogonale, et nous avons lim {EL (ϕ) − EL (0)} = EBDF (ϕ) = min{E(Q), Q ∈ QΛ }. L→∞ De plus, à extraction près, QL (x, y) := (γL − γL0 )(x, y) = (PL − P0 )(x, y) converge uniformément sur les ensembles compacts de R6 vers Q̄(x, y), un minimiseur de E sur QΛ . Dans ce théorème les auteurs font référence à certaines notions provenant des articles par Hainzl-Lewin-Séré [18, 19], que nous avons définies dans la section précédente : l’espace de Coulomb C et la fonctionnelle de l’énergie de Bogoliubov-Dirac-Fock en présence d’un potentiel E (voir la formule (22)) définie sur l’ensemble QΛ que nous avons noté SΛ . Ils notent IΛL , l’opérateur identité dans HΛL . Chapitre 1 Modèle continu Ce chapitre présente l’étude du modèle continu de la molécule de polyacétylène. Comme nous l’avons expliqué dans l’introduction, le Hamiltonien électronique qui régit le système physique en question est donné par (voir la formule (10)) Hec := −ivF σ3 d + ∆(y)σ1 . dy Cet opérateur de Dirac n’est pas borné inférieurement et donc nous ne pouvons pas définir directement un état fondamental du système physique associé. Pour donner un sens à la minimisation de l’énergie de ce système, nous allons suivre une stratégie analogue à celle utilisée dans les articles [18], [19] et [21] que nous avons résumés auparavant. Notamment, nous construirons un modèle périodique, avec un cut-off ultraviolet, qui donnera lieu à un problème de minimisation en dimension finie. Nous démontrerons que la fonctionnelle de l’énergie pour le modèle périodique admet exactement deux minimiseurs, et que ceux-ci sont invariants par translations. Dans la dernière section nous allons étudier la limite thermodynamique du modèle. Nous prendrons la limite lorsque la période tend vers l’infini ce qui nous permettra de définir les états fondamentaux dans le cadre non-périodique ainsi que de calculer l’énergie minimale par unité de longueur. Contenu 1.1 Modèle périodique avec cut-off ultraviolet . . . . . . . . . . . . 1.1.1 Définitions et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 1.1.2 Problème de minimisation de l’énergie et théorème principal . . 50 1.1.3 Recherche d’un minimiseur invariant par translations . . . . . . 57 1.1.4 L’énergie de référence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 1.1.5 1.2 48 L’opérateur + γinv est un minimiseur global . . . . . . . . . . . . 64 Limite thermodynamique : L → ∞ . . . . . . . . . . . . . . . . 70 47 48 1.1 1.1.1 Chapitre 1. Modèle continu Modèle périodique avec cut-off ultraviolet Définitions et notations Nous allons définir l’opérateur Hec dans un espace de fonctions périodiques, que l’on munira d’un cut-off ultraviolet dans l’espace de Fourier. Prenons deux constantes positives L > 0 et Λ > 0, et considérons l’espace de fonctions L-périodiques de carré intégrable L2per [−L/2, L/2) , C2 . Une fonction f dans cet espace s’écrit comme 2π 1 X b 2π f n ei L nx , f (x) = √ L L n∈Z avec fb(2πn/L) ∈ C2 pour tout n ∈ Z. L L Λ, 2π Λ ∩Z Pour introduire un cut-off ultraviolet Λ dans cet espace, posons ZLΛ := − 2π et notons les vecteurs de la base canonique de C2 par 1 0 ~e1 = et ~e2 = . 0 1 On définit l’espace de Hilbert, HLΛ , des fonctions périodiques de période L, à valeurs dans C2 et avec cut-off Λ par : HLΛ 1 2π Λ := spanC √ exp i nx , n ∈ ZL ⊗ C2 L L 1 2π 2π 1 Λ = spanC √ exp i nx ~e1 , √ exp i mx ~e2 m, n ∈ ZL , L L L L muni du produit scalaire défini pour u, v ∈ HLΛ par Z L hu, vi = u∗ (x)v(x)dx, 0 où u∗ (x) = u(x)T . Pour chaque j = 1, 2 on définit les fonctions 1 2πn ϕn,j (x) = √ exp i x ~ej , L L avec n ∈ ZLΛ . Un calcul simple démontre que ces fonctions forment une base orthonormée de l’espace de Hilbert HLΛ . Nous notons cette base B := ϕn,j : n ∈ ZLΛ , j = 1, 2 , (1.1) Chapitre 1. Modèle continu 49 et concluons que la dimension de HLΛ est exactement N = 2|ZLΛ | < +∞. Soit L (HLΛ ) l’espace des applications linéaires continues de HLΛ dans lui-même. Tout élément A ∈ L (HLΛ ) a un noyau intégral A(x, y), de sorte que l’on peut écrire l’action de A sur un élément h ∈ HLΛ comme Z L A(x, y)h(y)dy. (Ah)(x) = 0 Plus explicitement, le noyau de A a la forme suivante [21] 2π 1 X b 2π m, n e(i2πn/L)x e(i2πm/L)y A A(x, y) = L L L Λ m,n∈ZL = 1 X b A(m̃, ñ)ei(m̃x−ñy) L Λ m,n∈ZL b m̃, ñ) ∈ M2×2 (C). Dans cette formule nous avons introduit implicitement la notation où A( n pour tout n ∈ ZLΛ , que nous utiliserons désormais. ñ := 2π L Suivant les idées de [21], nous définissons le sous-ensemble convexe Γ de L (HLΛ ) par 1 1 Λ ∗ Γ := γ ∈ L (HL ) − ≤ γ ≤ , γ = γ . 2 2 Cet ensemble, qui est l’enveloppe convexe de {γ = P − 1/2 | P projection orthogonale}, sera le domaine de minimisation de la fonctionnelle de l’énergie que l’on définira plus loin. Il est noté GΛL dans l’article cité. Remarquons que le noyau intégral d’un élément de γ ∈ Γ est de la forme γ(x, y) = 1 X γ b(m̃, ñ)ei(m̃x−ñy) , L Λ m,n∈ZL avec ( − 12 ≤ γ b(m̃, ñ) ≤ 21 γ b(m̃, ñ) = γ b∗ (m̃, ñ), pour tout m, n ∈ ZLΛ . On introduit également l’espace suivant de fonctions à valeurs réelles, L-périodiques et de classe C 2 DL := ∆ ∈ C 2 (R) | ∆ L-périodique . Finalement, nous rappelons la définition des matrices de Pauli 0 1 0 −i 1 0 σ1 = , σ2 = , σ3 = . 1 0 i 0 0 −1 50 1.1.2 Chapitre 1. Modèle continu Problème de minimisation de l’énergie et théorème principal En nous inspirant de ce que font Hainzl, Lewin et Solovej dans [21], nous définissons la fonctionnelle d’énergie pour le modèle périodique décrit ci-dessus par 2 Z L ωQ 1 E(γ, ∆) = TrHLΛ ([−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ]γ) + 2 ∆2 (y)dy (1.2) L g L 0 2 Z L ωQ 1 1 ∆2 (y)dy, = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + TrHLΛ (∆(y)σ1 γ) + 2 L L g L 0 avec γ ∈ Γ et ∆ ∈ DL . Cette fonctionnelle est l’adaptation de l’énergie du modèle continu du polyacétylène (voir la formule (11) de l’introduction) au cadre périodique avec cut-off. Nous voulons donc étudier le problème de minimisation suivant inf E(γ, ∆). (1.3) (γ,∆)∈Γ×DL La solution de ce problème de minimisation constitue le résultat principal de cette section que nous résumons dans le théorème ci-dessous. Théorème 5. Fixons Λ > 0 et soit L > 0 suffisamment grand pour satisfaire L Λ [X 2π ] 1 p=1 2 2πvF ωQ > , p g2 (1.4) L L où 2π Λ est la partie entière de 2π Λ. Alors, la fonctionnelle de l’énergie du modèle continu et L-périodique de la molécule de polyacétylène, donnée par 2 Z L ωQ 1 E(γ, ∆) = TrHLΛ ([−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ]γ) + 2 ∆2 (y)dy, L g L 0 + − possède exactement deux minimiseurs globaux, (γinv , ∆) et (γinv , −∆), sur l’ensemble Γ × + − ± = DL . Les opérateurs γinv et γinv sont invariants par translations et sont de la forme γinv (±) (±) Λ P − 1/2, avec P des projecteurs orthogonaux dans HL . En outre, ∆ est une fonction constante dont la valeur est définie implicitement comme étant l’unique solution positive de 2 2ωQ 1 X 1 p = 2 . L g vF2 p̃2 + ∆2 Λ p∈ZL De plus, pour tout p ∈ ZLΛ , nous avons l’écriture en espace de Fourier pour les opérateurs vF σ3 p̃ + ∆σ1 + γ binv (p̃) = − p 2 2 vF p̃2 + ∆2 et vF σ3 p̃ − ∆σ1 − γ binv (p̃) = − p 2 . 2 vF p̃2 + ∆2 Chapitre 1. Modèle continu 51 L’énergie fondamentale s’écrit + E(γinv , ∆) q 2 ωQ 1 X vF2 p̃2 + ∆2 + 2 ∆2 . =− L g Λ p∈ZL La démonstration du Théorème 5 est faite en quatre étapes : 1. Ci-dessous nous allons établir l’équation d’Euler-Lagrange pour γ ∈ Γ associée au problème (1.3). 2. Dans la sous-section 1.1.3 nous allons restreindre la fonctionnelle de l’énergie E(γ, ∆) à la classe des opérateurs invariants par translations Γinv ⊂ Γ et nous montrerons + − qu’il existe exactement deux minimiseurs (γinv , ∆+ ) et (γinv , −∆+ ) de E dans Γinv × DL . + 3. En 1.1.4 nous prenons comme réference l’énergie de (γinv , ∆+ ). C’est-à-dire, pour un couple (γ, ∆) ∈ Γ × DL quelconque, nous allons étudier la différence des énergies + E(γ, ∆) − E(γinv , ∆+ ), et nous prouverons que cette différence s’écrit comme une + fonction F (γ − γinv ). + 4. La sous-section 1.1.5 est consacrée à la preuve de F (γ − γinv ) ≥ 0, ce qui veut + − dire que (γinv , ∆+ ) et (γinv , −∆+ ) sont deux minimiseurs globaux de l’énergie. Nous démontrons également que ce sont les deux seuls minimiseurs globaux. Pour établir l’équation d’Euler-Lagrange du problème (1.3), commençons par développer le deuxième terme de la dernière expression de E. Nous rappelons que B est une base orthonormée (définie en (1.1)) et donc nous pouvons écrire 1X 1 TrHLΛ (∆(y)σ1 γ) = hv, ∆(y)σ1 γvi L L v∈B Z 1 L = ∆(y)TrC2 (σ1 γ(y, y))dy, L 0 où γ(x, y) est, bien entendu, le noyau intégral de l’application γ. Alors, on peut réécrire la fonctionnelle de la façon suivante 1 E(γ, ∆) = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + L 1 = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + L Z 2 Z L ωQ 1 L ∆(y)TrC2 (σ1 γ(y, y))dy + 2 ∆2 (y)dy L 0 g L 0 Z L 2 ωQ 1 2 ∆(y)TrC2 (σ1 γ(y, y)) + 2 ∆ (y) dy (1.5) L 0 g Nous allons étudier ce problème de minimisation en deux étapes. Tout d’abord, on fixera l’application γ et on fera varier ∆ pour trouver un minimum. Puis, on fixera ∆ pour minimiser par rapport à γ et, en rassemblant ces deux résultats, on trouvera l’équation d’Euler-Lagrange globale du problème. 52 Chapitre 1. Modèle continu Minimisation par rapport à ∆ Fixons un élément quelconque γ ∈ Γ et considérons la fonctionnelle définie sur DL F(∆) = E(γ, ∆) 1 1 = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + L L Z L 0 2 ωQ 2 ∆(y)TrC2 (σ1 γ(y, y)) + 2 ∆ (y) dy, g que l’on veut minimiser sur DL . Remarquons que l’on a utilisé ici la formule (1.5) pour E. Le premier terme de la fonctionnelle est une constante, puisqu’il ne dépend pas de ∆. Alors, pour minimiser F il suffit d’étudier le deuxième terme et pour cela, on utilisera un argument variationnel. L’équation d’Euler-Lagrange pour ∆ associée à notre problème de minimisation s’écrit 2 ωQ 2 0 = TrC (σ1 γ(y, y)) + 2 2 ∆(y), g et on en déduit la valeur du minimiseur en fonction de γ ∆min (y) = − g2 TrC2 (σ1 γ(y, y)). 2 2ωQ (1.6) Notons que de la définition du noyau γ(x, y), la fonction minimisante ∆min (y) est bien une fonction réelle et L-périodique. En effet, nous avons TrC2 (σ1 γ(y, y)) = 1 X TrC2 (σ1 γ b(m̃, ñ))ei(m̃−ñ)y , L Λ m,n∈ZL et puisque chaque matrice γ b(m̃, ñ) est auto-adjointe, alors TrC2 (σ1 γ b(m̃, ñ)) ∈ R. De plus, l’opérateur γ étant auto-adjoint, nous avons la symétrie TrC2 (σ1 γ b(m̃, ñ)) = TrC2 (σ1 γ b(ñ, m̃)). D’où la conjugaison complexe de la somme ci-dessus laisse le résultat inchangé et la fonction est réelle. La L-périodicité est évidente de cette expression. Minimisation par rapport à γ Au cours de cette étape, nous allons fixer une fonction ∆ ∈ DL et, en revenant à l’expression (1.2) de E, nous minimiserons la fonctionnelle G(γ) = E(γ, ∆) 2 ωQ 1 = TrHLΛ ([−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ]γ) + 2 L g L Z L ∆2 (y)dy. 0 Ici, le second terme de la fonctionnelle est une constante car il ne dépend pas de γ. Cela implique que nous avons l’égalité 1 TrHLΛ ([−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ]γ) . γ∈Γ L arg inf G(γ) = arg inf γ∈Γ (1.7) Chapitre 1. Modèle continu 53 Dans le but de trouver un minimiseur de G, un premier pas consistera à démontrer que l’opérateur qui est facteur à gauche de γ dans la trace est auto-adjoint. Pour simplifier notre étude, on introduit la notation M = 1/L[−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ], d’où l’écriture simple de notre problème arg inf Tr(M γ). γ∈Γ (1.8) Pour prouver que l’opérateur M est auto-adjoint, on montrera qu’il est la somme de deux opérateurs auto-adjoints, à savoir M = M1 + M2 , avec M1 = −ivF σ3 ∂y L et M2 = 1 ∆(y)σ1 . L M2 est auto-adjoint. Commençons par démontrer que l’opérateur M2 est auto-adjoint. Cela est une conséquence immédiate du fait que l’opérateur de multiplication par ∆(·)/L et la matrice σ1 sont auto-adjoints et du fait qu’ils commutent entre eux : soient ϕ, ψ ∈ HLΛ , alors Z L ∆(y) ϕ∗ (y) σ1 ψ(y)dy L 0 ∗ Z L ∆(y) = σ1 ϕ(y) ψ(y)dy L 0 = hM2 ϕ, ψi, hϕ, M2 ψi = d’où M2 = M2∗ . M1 est auto-adjoint. Pour prouver ce fait, il suffit de montrer qu’il existe une base orthonormée de vecteurs propres de M1 et que ses valeurs propres sont réelles. Rappelons Λ que l’on a une base orthonormée B := ϕn,j : n ∈ ZL , j = 1, 2 dont les éléments sont définis par ϕn,j (x) = √1L eiñx~ej . Nous allons prouver que les fonctions ϕn,j sont précisément les vecteurs propres de M1 et que les valeurs propres associées sont réelles. Calculons l’action de M1 sur les éléments de B : soit q ∈ ZLΛ , alors, vu que σ3~e1 = ~e1 , 54 Chapitre 1. Modèle continu on a ivF ∂x σ3 ϕ1,q (x) L ivF 1 =− ∂x √ exp(iq̃x) σ3~e1 L L ivF iq̃ √ exp(iq̃x) ~e1 =− L L 1 q̃vF √ exp(iq̃x) ~e1 = L L q̃vF = ϕ1,q (x). L M1 ϕ1,q (x) = − Un calcul analogue à ce dernier et le fait que σ3~e2 = −~e2 montrent que M1 ϕ2,q (x) = − q̃vF ϕ2,q (x). L Donc, on a démontré que les vecteurs propres de M1 sont exactement les vecteurs de B, formant une base orthonormée. De plus, les valeurs propres sont réelles puisque ± q̃vLF ∈ R pour tout q ∈ ZLΛ . Ceci implique que la matrice M1 est auto-adjointe. M est auto-adjoint. En conclusion, sachant que la somme de deux opérateurs autoadjoints est un opérateur auto-adjoint, M = M1 +M2 l’est aussi à son tour. En particulier, toutes les valeurs propres de M sont réelles. Le minimiseur de G. Revenons maintenant au problème de minimisation de la fonctionnelle G par rapport à γ. Nous avons montré que ce problème s’écrit sous la forme (1.8) et que M est un opérateur auto-adjoint. Remarque 1.1. Dans le raisonnement que nous allons développer ci-dessous nous allons supposer que l’opérateur M n’a pas la valeur propre λ = 0. Plus loin, (voir la section 1.1.3) nous prouverons que c’est effectivement le cas. L’opérateur M , qui dépend de la fonction ∆(y), n’aura pas de valeur propre nulle pour le choix optimal de cette fonction, i.e. celui donnant l’énergie minimale. Par conséquent, le raisonnement que nous suivons sera justifié a posteriori. La seule conséquence de cette supposition sur l’argument donné ci-dessous est dans l’unicité du minimiseur. Le reste du raisonnement est valable dans le cadre général, lorsque nous consentons l’existence d’une valeur propre nulle. Supposons donc que l’opérateur M n’a pas la valeur propre λ = 0. Soit V := {vj |j = 1, . . . , N } une base orthonormée de vecteurs propres de M , avec λj la valeur propre associée au vecteur propre vj , et ordonnée de façon croissante : si j < k, alors λj ≤ λk . Chapitre 1. Modèle continu 55 Soit λz la plus grande valeur propre négative (λz+1 > 0). Dans cette base, la matrice de M prend la forme diagonale λ1 0 λ2 . . . . 0 λN Nous allons résoudre notre problème de minimisation en cherchant d’abord un minimiseur de la même fonctionnelle Tr(M ·) dans l’ensemble auxiliaire Γ0 := Γ + 1 = γ ∈ L(HLΛ ) | 0 ≤ γ ≤ 1, γ = γ ∗ . 2 Ensuite, nous récupérons la solution du problème original en remarquant que 1 arg inf Tr(M γ) = arg inf Tr(M γ 0 ) − , 0 0 γ∈Γ γ ∈Γ 2 (1.9) et que inf Γ Tr(M γ) = inf Γ0 Tr(M γ 0 )−Tr(M )/2. Ces égalités sont des conséquences directes de la linéarité de la trace. Nous voulons donc résoudre le problème auxiliaire arg inf Tr(M γ 0 ) 0 0 γ ∈Γ dont l’utilité sera mise en évidence en ce qui suit. 0 )1≤j,k≤N la matrice associée à l’application γ 0 ∈ Γ0 écrite dans la Si on note γ 0 = (γj,k 0 base V (i.e. γj,k = hvj , γ 0 vk i), on a 0 Tr(M γ ) = N X 0 λj γj,j . j=1 Or, si γ 0 ∈ Γ0 alors forcément 0 ≤ hv, γ 0 vi ≤ 1, pour tout v ∈ HLΛ . En particulier, nous avons 0 0 ≤ γj,j ≤ 1, pour tout j ∈ {1, . . . , N }. 0 0 Ceci implique P qu’une borne inférieure de la fonctionnelle Tr(M γ ) sur l’ensemble Γ est donnée par j≤z λj , la somme des valeurs propres négatives. Cette borne inférieure est atteinte par notre fonctionnelle précisément en le projecteur 0 γ min = χ(−∞,0) (M ), car – tout projecteur orthogonal appartient trivialement à Γ0 et 0 min0 – les éléments matriciels du projecteur γ min sont nuls sauf exactement γj,j = 1 pour j ≤ z. 56 Chapitre 1. Modèle continu 0 On a donc effectivement Tr(M γ min ) = P j≤z λj , soit arg min Tr(M γ 0 ) = χ(−∞,0) (M ). 0 0 γ ∈Γ Maintenant que nous avons résolu le problème auxiliaire, nous récupérons à l’aide de (1.9) le minimiseur de notre problème original : 1 γ min = χ(−∞,0) (M ) − . 2 La valeur minimale de la fonctionnelle étant N Tr(M γ min0 X 1 1X ) − Tr(M ) = λj − λj 2 2 j=1 j≤z = 1 2 ! X j≤z λj − X λj z<j Ainsi, l’énergie minimale atteinte par la fonctionnelle G est ! 2 Z L X ωQ 1 X min ∆2 (y)dy. G(γ ) = λj − λj + 2 2 j≤z g L 0 z<j Unicité du minimiseur. Nous allons prouver que le minimiseur γ min est unique. Supposons que l’on a une matrice γ 0 ∈ Γ0 minimisante de Tr(M ·). D’après le raisonnement 0 donné ci-dessus, ses éléments diagonaux sont les mêmes que ceux du projecteur γ min 0 0 (γjj = 1 si j ≤ z et γjj = 0 si j > z). Montrons que le reste des éléments de matrice de 0 γ sont nuls. Vu que γ 0 ∈ Γ0 , en particulier γ 0 ≥ 0 et h·, γ 0 ·i satisfait l’inégalité de Cauchy Schwarz : p p |hh1 , γ 0 h2 i| ≤ hh1 , γ 0 h1 i hh2 , γ 0 h2 i, pour tout h1 , h2 ∈ HLΛ . Or, si j > z, on a hvj , γ 0 vj i = 0 ; alors pour tout k ∈ {1, . . . , N } q p 0 |γjk | = |hvj , γ 0 vk i| ≤ hvj , γ 0 vj i hvk , γ 0 vk i = 0. 0 C’est-à-dire que γjk = 0, pour j > z. La positivité de 1 − γ 0 implique de même que p p |hh1 , (1 − γ 0 )h2 i| ≤ hh1 , (1 − γ 0 )h1 i hh2 , (1 − γ 0 )h2 i. Or, si j ≤ z, hvj , (1 − γ 0 )vj i = hvj , vj i − hvj , γ 0 vj i = 1 − 1 = 0. D’où, pour tout k, hvj , (1 − γ 0 )vk i = 0. Si k 6= j, 0 hvj , (1 − γ 0 )vk i = hvj , vk i − hvj , γ 0 vk i = −hvj , γ 0 vk i = −γjk ; 0 0 donc, on a montré que γjk = 0, sauf si j = k ≤ z et dans ce cas γjj = 1. Ceci prouve que 0 min γ =γ = χ(−∞,0) (M ), et le minimiseur est unique. Chapitre 1. Modèle continu 57 Équation de γ Finalement, on est dans la possibilité de donner l’équation auto-consistente que doit satisfaire le minimiseur de notre problème de minimisation original (1.3). Tout d’abord, on réécrit la formule (1.7) en utilisant les calculs ci-dessus et l’égalité (1.9) arg min G(γ) = arg min Tr(M γ) γ∈Γ γ∈Γ 1 = χ(−∞,0) (M ) − 2 1 1 [−ivF σ3 ∂y + ∆(y)σ1 ] − . = χ(−∞,0) L 2 Puis, en remplaçant dans cette formule la valeur de ∆min trouvée en (1.6) en fonction de γ min , nous déduisons que le minimiseur global de la fonctionnelle de l’énergie (1.2) doit satisfaire l’équation auto-consistante γ0 = arg min = χ(−∞,0) 1.1.3 E(γ, ∆) (γ,∆)∈Γ×DL " #! g2 1 1 −ivF σ3 ∂y − 2 TrC2 (σ1 γ0 (y, y))σ1 − . L 2ωQ 2 (1.10) Recherche d’un minimiseur invariant par translations Maintenant, nous cherchons à prouver que le minimiseur global de l’énergie, solution de l’équation de point fixe (1.10), est un opérateur invariant par translations. Cela serait en accord avec les résultats obtenus dans [21]. Pour ce faire, nous allons minimiser la fonctionnelle (1.2) parmi la classe des opérateurs invariants par translations 1 1 ∗ Λ Γinv := γ ∈ L (HL ) − ≤ γ ≤ , γ = γ , γ(x, y) = fγ (x − y) , 2 2 et les fonctions ∆ ∈ DL . Ensuite on démontrera que ce minimiseur du problème sous contrainte est en fait global. Suivant les idées exposées dans l’article [21], nous remarquons que le noyau intégral fγ (x − y) associé à γ ∈ Γinv s’écrit sous la forme fγ (x − y) = 1 X b f (p̃)eip̃(x−y) , L Λ p∈ZL avec fb(p̃) ∈ M2×2 (C) une matrice auto-adjointe satisfaisant −1/2 ≤ fb(p̃) ≤ 1/2 pour chaque p ∈ ZLΛ . Nous constatons que, en raison de la forme particulière du noyau d’un opérateur γ ∈ Γinv , la fonction ∆0 optimale donnée par la formule (1.6) est constante. En effet, nous 58 Chapitre 1. Modèle continu observons que l’expression ∆0 (y) = − =− g2 TrC2 (σ1 γ(y, y)) 2 2ωQ g2 TrC2 (σ1 fγ (0)) 2 2ωQ (1.11) ne dépend pas de la variable y. Appelons cette constante tout simplement ∆0 . Il vient que l’énergie optimale associée à un opérateur γ ∈ Γinv est 2 Z L ωQ 1 1 ∆20 dy, E(γ, ∆0 ) = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + TrHLΛ (∆0 σ1 γ) + 2 L L g L 0 2 ωQ 1 1 = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + TrHLΛ (∆0 σ1 γ) + 2 ∆20 . (1.12) L L g A nouveau grâce à la forme spéciale qu’a le noyau intégral de γ, nous pouvons simplifier le deuxième terme de cette expression Z ∆0 L 1 Tr Λ (∆0 σ1 γ) = TrC2 (σ1 γ(y, y))dy L HL L 0 Z ∆0 L TrC2 (σ1 fγ (0))dy = L 0 = ∆0 TrC2 (σ1 fγ (0)). Donc, en remplaçant ce calcul dans la formule (1.12) de l’énergie optimale pour γ on obtient 2 ωQ 1 E(γ, ∆0 ) = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + ∆0 TrC2 (σ1 fγ (0)) + 2 ∆20 . (1.13) L g Maintenant, d’après (1.10), l’opérateur invariant par translations qui minimise l’énergie (1.13) sur Γinv est celui qui satisfait l’équation auto-consistante " #! g2 1 1 −ivF σ3 ∂y − 2 ∆0 σ1 − (1.14) γinv = χ(−∞,0) L 2ωQ 2 " #! 1 g2 1 = χ(−∞,0) −ivF σ3 ∂y − 2 TrC2 (σ1 fγ (0))σ1 − L 2ωQ 2 1 = Pinv − . 2 Écrivons dans l’espace de Fourier la fonctionnelle de l’énergie (1.13), qui s’écrit en fonction de la constante ∆0 et de la transformée de Fourier du noyau γ(x, y) = fγ (x − y) comme h i ω2 1 X Q (1.15) E(fγ , ∆0 ) = TrC2 (vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 )fˆ(p̃) + 2 ∆20 . L g Λ p∈ZL Chapitre 1. Modèle continu 59 Par commodité, nous ne remplaçons pas encore la valeur connue de ∆0 en fonction du noyau intégral de fγ . Dans l’espace de Fourier et d’après l’équation de point fixe (1.14), l’opérateur invariant par translations optimal s’écrit 1 fb0 (p) = χ(∞,0) (vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 ) − , 2 pour chaque p ∈ ZLΛ . On pose D(p̃) := vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 et on a D2 (p̃) = vF2 p̃2 + ∆20 q ⇒ |D(p̃)| = vF2 p̃2 + ∆20 1 D(p̃) 1 D(p̃) vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 b ⇒ f0 (p̃) = . 1− − =− =− p 2 2 |D(p̃)| 2 2|D(p̃)| 2 vF p̃2 + ∆20 (1.16) En rappelant que les matrices de Pauli satisfont les propriétés σ12 = σ32 = 12 et {σ1 , σ3 } = σ1 σ3 + σ3 σ1 = 0, calculons le produit vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 (vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 )fb(p̃) = −(vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 ) p 2 2 vF p̃2 + ∆20 v 2 p̃2 + ∆20 12 = − pF 2 2 vF p̃2 + ∆20 q 1 =− vF2 p̃2 + ∆20 12 2 Il résulte que q h i b TrC2 (vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 )f (p̃) = − vF2 p̃2 + ∆20 . En remplaçant ceci dans (1.15) on obtient l’expression pour l’énergie minimale en variable de Fourier q 2 ωQ 1 X 2 2 2 E(∆0 ) = E(f0 , ∆0 ) = − vF p̃ + ∆0 + 2 ∆20 . (1.17) L g Λ p∈ZL Maintenant, reprenons l’expression de la fonction (constante) optimale associée au minimiseur f0 . Nous remplaçons dans (1.11) la formule trouvée ci-dessus pour fb0 (p̃) et nous avons l’équation ∆0 = − g2 X TrC2 (σ1 fˆ(p̃)) 2 2ωQ L Λ p∈ZL 2 = X g ∆0 p , 2 2 2 2 2ωQ L v p̃ + ∆ 0 F p∈Z Λ L (1.18) 60 Chapitre 1. Modèle continu car σ12 = 12 et la matrice σ1 σ3 = −iσ2 est de trace nulle. D’un côté, cette équation admet la solution ∆0 = 0. D’un autre côté, si ∆0 6= 0 alors on peut diviser l’équation par ∆0 et on obtient l’équation implicite 2 2ωQ 1 X 1 p = 2 . (1.19) L g vF2 p̃2 + ∆20 Λ p∈ZL Cette équation a exactement une solution positive (et une négative par parité) pour tout L > 0 fixé. En effet, si on fixe L > 0 et on pose pour tout ∆ > 0 1 1 X p , ΨL (∆) = 2 2 + ∆2 L v p̃ Λ F p∈Z L alors on a ∂ 1 X ∆ ΨL (∆) = − < 0, 2 2 ∂∆ L (vF p̃ + ∆2 )3/2 Λ p∈ZL et ΨL est strictement décroissante sur R+ ∗ . De plus, nous pouvons calculer aisément les limites ΨL (∆) −−−−→ +∞ et ΨL (∆) −−−−→ 0. + ∆→+∞ ∆→0 Il vient que l’équation implicite (1.19) a toujours une unique solution positive ∆0 et une négative (−∆0 ) par parité. Nous avons donc montré que l’équation (1.18) a exactement trois solutions pour tout L > 0, i.e. la fonctionnelle (1.17) a trois points critiques. Montrons maintenant que la valeur ∆0 = 0 donne un maximum local pour (1.17), pour L suffisamment grand. En effet, calculons la dérivée seconde de l’énergie par rapport à ∆0 2 ωQ ∆0 1 X ∂ p + 2 2 ∆0 E(f0 , ∆0 ) = − ∂∆0 L g vF2 p̃2 + ∆20 Λ p∈ZL 2 ⇒ ∂ 2 E(f0 , ∆0 ) = − 2 ∂∆0 L X p∈ZLΛ ; p>0 2 ωQ vF2 p̃2 + 2 , (vF2 p̃2 + ∆20 )3/2 g2 et donc en ∆0 = 0, et remplaçant p̃ = 2πp/L, nous avons ∂2 1 E(f0 , 0) = − 2 ∂∆0 πvF X p∈ZLΛ ; p>0 2 ωQ 1 +2 2 <0 p g pour L assez grand. (1.20) Ainsi, pour L assez grand, la valeur ∆0 = 0 donne un maximum local pour l’énergie E. De plus, nous pouvons montrer aisément que E(∆0 ) −−−−−−→ +∞. |∆0 |→+∞ Il en découle que les points critiques non nuls ±∆0 6= 0, solutions de (1.19), donnent des minima globaux pour l’énergie, si L est suffisamment grand. Chapitre 1. Modèle continu 61 Remarque 1.2. Nous remarquons ici que le choix ∆0 6= 0, implique que l’opérateur de Dirac D(p̃) := vF σ3 p̃ + ∆0 σ1 n’a pas de valeur propre nulle. En effet, les valeurs propres de D(p̃) sont données par q ±|D(p̃)| = ± vF2 p̃2 + ∆20 , pour chaque p ∈ ZLΛ . Alors, si ∆0 6= 0, il est évident qu’aucune de ces valeurs propres n’est égale à zéro. Ceci nous permet de conclure que le minimiseur invariant par translations fb0 (p) = χ(∞,0) (D(p̃)) − 12 est unique, lorsque nous fixons la valeur de ∆0 6= 0 (voir la Remarque 1.1). En résumé, nous avons montré que, pour tout L > 0 suffisamment grand et fixe, la fonctionnelle de l’énergie de la molécule de polyacétylène pour ce modèle périodique, restreinte aux opérateurs invariants par translations γ ∈ Γinv , possède exactement deux minimiseurs. En effet, si nous notons ∆+ l’unique solution positive de (1.19) et ∆− = −∆+ l’unique solution négative, alors les opérateurs dont l’écriture en variable de Fourier est donnée par (voir (1.16)) vF σ3 p̃ + ∆± σ1 fb± (p̃) = − p 2 2 vF p̃2 + ∆2± sont les deux seuls minimiseurs de l’énergie sur Γinv . La valeur minimale de cette énergie est donnée par la formule (1.17), que nous recopions ici par souci de clarté Einv q 2 ωQ 1 X 2 2 2 vF p̃ + ∆+ + 2 ∆2+ . = E(f− , ∆− ) = E(f+ , ∆+ ) = − L g Λ p∈ZL 1.1.4 L’énergie de référence Suivant la démarche introduite dans l’article [21], nous voulons montrer que les minimiseurs invariants par translations sont en réalité des minimiseurs globaux de l’énergie. Pour ce faire nous allons définir ici une fonctionnelle auxiliaire comme la différence de l’énergie associée à un opérateur quelconque γ ∈ Γ moins l’énergie d’un des minimiseurs invariants par translations. Autrement dit, nous prenons comme référence l’énergie Einv définie ci-dessus. Fixons donc l’opérateur invariant par translations " #! 1 g2 1 + γinv = χ(−∞,0) −ivF σ3 ∂y − 2 ∆+ σ1 − L 2ωQ 2 associé à la constante ∆+ , unique solution positive de l’équation (1.19). D’après nos calculs + faits dans la section précedente, γinv minimise l’énergie sur l’ensemble Γinv . Nous allons prouver ci-dessous que notre fonctionnelle auxiliaire s’écrit en fonction de + la différence Q = γ − γinv et nous pourrons tirer parti des idées provenant de [18, 19] dans le cadre présent. 62 Chapitre 1. Modèle continu Prenons un élément quelconque γ ∈ Γ et soit ∆γ ∈ DL la fonction optimale associée. L’énergie minimale correspondant à γ s’écrit donc E0 (γ) := E(γ, ∆γ ) 2 ωQ 1 1 = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) + TrHLΛ (∆γ (y)σ1 γ) + 2 L L g L Z L ∆2γ (y)dy. 0 Or d’après (1.6) nous avons la formule ∆γ (y) = − g2 TrC2 (σ1 γ(y, y)). 2 2ωQ Développons séparément les deuxième et troisième termes de E0 en remplaçant cette expression : g2 − 2 TrC2 (σ1 γ(y, y))σ1 γ 2ωQ Z L TrC2 (σ1 γ(y, y))2 dy, 1 1 TrHLΛ (∆γ (y)σ1 γ) = TrHLΛ L L =− 2 ωQ g2L Z 0 L 1 g2 2 L 2ωQ 2 ωQ ∆2min (y)dy = 2 g L 2 g = 2 4ωQ L 0 !2 g2 TrC2 (σ1 γ(y, y)) dy 2 2ωQ L Z ! 0 Z L TrC2 (σ1 γ(y, y))2 dy. 0 Donc, en ajoutant ces deux termes on obtient 1 1 g2 E0 (γ) = TrHLΛ (−ivF σ3 ∂y γ) − 2 L L 4ωQ Z L TrC2 (σ1 γ(y, y))2 dy. 0 + Maintenant, calculons la différence des énergies E0 (γ) − E0 (γinv ) et prouvons qu’elle + s’écrit en fonction de γ − γinv comme + E0 (γ) − E0 (γinv )= 1 + TrHLΛ [−ivF σ3 ∂y + σ1 ∆+ ][γ − γinv ] L Z L 2 1 g2 + 2 σ1 [γ − γ ](y, y) dy. − Tr C inv 2 L 4ωQ 0 + + Si on note f+ (x − y) = γinv (x, y) le noyau intégral de γinv , nous avons ∆0 = − g2 TrC2 (σ1 f+ (0)) 2 2ωQ (1.21) Chapitre 1. Modèle continu 63 d’après (1.11). Pour simplifier les choses, posons X = TrC2 (σ1 f+ (0)) et calculons ! 2 1 1 g + + Tr Λ σ1 ∆+ (γ − γinv ) = TrHLΛ −σ1 2 X(γ − γinv ) L HL L 2ωQ Z L g2 TrC2 (σ1 γ(y, y))dy =− 2 X 2ωQ L 0 Z L Xdy − 0 Z L g2 g2 =− 2 X TrC2 (σ1 γ(y, y))dy + 2 X 2 . 2ωQ L 2ωQ 0 (1.22) Développons le dernier terme à droite de (1.21) − 1 g2 2 4L ωQ Z 0 L + ](y, y))2 dy = TrC2 (σ1 [γ − γinv 1 g2 − 2 4L ωQ =− L Z 1 g2 2 4L ωQ 2 0 Z 0 Z TrC2 (σ1 γ(y, y)) dy − 2 L TrC2 (σ1 γ(y, y))2 dy + 0 L Z TrC2 (σ1 γ(y, y))Xdy + g2 2 LX 2ωQ Z 0 L 2 X dy 0 L TrC2 (σ1 γ(y, y))dy − g2 2 (1.23) 2 X 4ωQ Maintenant, nous ajoutons (1.22) et (1.23) et nous obtenons Z g2 2 1 g2 L 2 2 (σ1 γ(y, y)) dy + Tr (1.22) + (1.23) = − X C 2 2 4L ωQ 4ωQ 0 D’après ces calculs et en remplaçant la valeur de X, le côté droit de (1.21) est égal à Z 1 1 g2 L g2 + 2 2 (σ1 γ(y, y)) dy + TrHLΛ − ivF σ3 ∂y [γ − γinv ] − Tr (TrC2 (σ1 f+ (0)))2 , C 2 2 L 4L ωQ 4ω 0 Q + et on vérifie aisément que c’est l’expression de E0 (γ) − E0 (γinv ). Nous avons donc montré que la différence des énergies s’écrit en fonction de la différence + des opérateurs γ − γinv . Appelons F cette fonctionnelle : + ) := F (γ − γinv 1 + TrHLΛ [−ivF σ3 ∂y + σ1 ∆+ ][γ − γinv ] L Z L 2 1 g2 + 2 σ1 [γ − γ − Tr ](y, y) dy C inv 2 L 4ωQ 0 + On déduit de la définition de l’ensemble Γ que l’opérateur Q = γ − γinv est auto-adjoint et satisfait 1 1 + + − − γinv ≤ Q ≤ − γinv . 2 2 64 Chapitre 1. Modèle continu Il est donc naturel de définir la fonctionnelle F sur l’ensemble convexe suivant 1 1 + + + ∗ Λ QΛ := Q ∈ L (HL ) | Q = Q , − − γinv ≤ Q ≤ − γinv = Γ − γinv , 2 2 qui est l’équivalent dans notre contexte de l’ensemble SΛ introduit dans [18, 19]. Pour un opérateur Q ∈ QΛ , nous notons Q(x, y) son noyau intégral et nous avons donc l’écriture Z L 2 1 g2 1 2 σ1 Q(y, y) Tr dy. (1.24) F (Q) = TrHLΛ [−ivF σ3 ∂y + σ1 ∆+ ]Q − C 2 L L 4ωQ 0 1.1.5 + L’opérateur γinv est un minimiseur global + Montrons maintenant que le minimiseur invariant par translations γinv est en fait un minimiseur global de la fonctionnelle de l’énergie sur l’ensemble Γ tout entier. En vue de la discussion présentée dans la section 1.1.4, ceci est équivalent à montrer que F (Q) ≥ 0 pour tout Q ∈ QΛ . Pour ce faire nous allons étudier séparément les deux termes dans l’expression de F (Q). Tout d’abord, analysons le deuxième terme de la fonctionnelle (1.24). Nous réécrivons la fonction intégrée en variable de Fourier 1 X b TrC2 σ1 Q(y, y) = TrC2 σ1 Q(p̃, q̃) ei(p̃−q̃)y , L Λ p,q∈ZL et nous faisons le changement de variable k := p − q et u := p+q . 2 Si nous posons J := max ZLΛ , alors la variable k varie dans l’ensemble {−2J, −2J + 1, . . . , 2J − 1, 2J} et pour chaque k dans cet ensemble, la variable u varie dans U (k) := {−J + |k|/2, −J + |k|/2 + 1, . . . , J − |k|/2 − 1, J − |k|/2}. Alors, dans ces nouvelles variables, nous pouvons écrire " !# 2J X 1 X b ũ + k̃ , ũ − k̃ TrC2 σ1 Q(y, y) = TrC2 σ1 Q eik̃y L k=−2J 2 2 u∈U (k) " !# 2J 1 X ik̃y X k̃ k̃ b ũ + , ũ − TrC2 σ1 Q e = L k=−2J 2 2 u∈U (k) = 2J X 1 eik̃y ϕ b k̃ , L k=−2J (1.25) Chapitre 1. Modèle continu 65 où nous avons introduit la notation pour chaque k ∈ [−2J, 2J] ∩ Z " !# X k̃ k̃ b ũ + , ũ − ϕ( b k̃) := TrC2 σ1 Q . 2 2 u∈U (k) Remarquons que nous pouvons interpréter ϕ( b k̃) comme les coefficients de Fourier d’une fonction ϕ appartenant à l’espace des fonctions complexes, L-périodiques, avec cut-off ultraviolet 2J. Plus explicitement, nous avons la formule 2J 1 X ik̃y ϕ b k̃ e . ϕ(y) = √ L k=−2J Donc, d’après l’identité de Parseval nous avons 2 Z L Z L 2J 2J 2 X X 1 ik̃y √ |ϕ(y)|2 dy = kϕk2 = ϕ( b k̃) k̃ e dy = ϕ b . L k=−2J 0 0 k=−2J Revenons ici à l’étude de l’intégrale dans le deuxième terme de (1.24). D’après les calculs faits ci-dessus, nous avons Z L Z L X 2J 2 2 1 TrC2 σ1 Q(y, y) dy = eik̃y ϕ b k̃ 0 0 L k=−2J 2 Z 2J 1 L 1 X ik̃y e ϕ b k̃ = √ L 0 L k=−2J 2J 2 1 X ϕ( b k̃) L k=−2J " !#2 2J X X 1 b ũ + k̃ , ũ − k̃ TrC2 σ1 Q = L k=−2J 2 2 u∈U (k) = (1.26) Etudions séparément la somme en u de cette dernière expression. On applique une inégalité de Cauchy - Schwartz, en rappelant que σ12 = 12 , pour obtenir " !# 2 X k̃ k̃ b ũ + , ũ − TrC2 σ1 Q 2 2 u∈U (k) " #2 X q σ1 4 b ũ + k̃/2, ũ − k̃/2 = TrC2 q Q vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ 4 vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ u∈U (k) X 2 q (C-S) ⇒ ≤ 2 2 2 vF (ũ + k̃/2) + ∆+ u∈U (k) 66 Chapitre 1. Modèle continu × X h b2 TrC2 Q i q ũ + k̃/2, ũ − k̃/2 vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ . (1.27) u∈U (k) Maintenant, regardons de plus près le terme à gauche dans ce produit. Nous allons montrer que cette somme est majorée par une constante, indépendante de k. Pour ce faire, nous introduisons la variable w := u + k/2 et élargissons l’intervalle de sommation q u∈U (k) J− 2 X =2 vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ |k| X2 1 q u=−J+ J− |k| 2 |k|+k X2 =2 w=−J+ ≤2 (1.19) ⇒ = vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ J X w=−J 2 4ωQ L 2 . g |k|−k 2 1 p 2 2 vF w̃ + ∆2+ 1 p vF2 w̃2 + ∆2+ (1.28) Dans l’avant-dernière ligne nous avons reconnu l’équation implicite (1.19) satisfaite par ∆+ . Cette majoration et celle obtenue en (1.27) impliquent que " X b ũ + TrC2 σ1 Q u∈U (k) 2 4ωQ ≤L 2 g k̃ k̃ , ũ − 2 2 X !# 2 h b2 TrC2 Q i q ũ + k̃/2, ũ − k̃/2 vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ u∈U (k) Nous remplaçons cette inégalité dans (1.26) puis nous revenons aux variables originales p et q pour obtenir Z 0 L TrC2 2J 2 X 4ωQ 2 σ1 Q(y, y) dy ≤ 2 g X TrC2 h i q 2 b Q ũ + k̃/2, ũ − k̃/2 vF2 (ũ + k̃/2)2 + ∆2+ k=−2J u∈U (k) = 2 X 4ωQ g2 h iq 2 b vF2 p̃2 + ∆2+ . TrC2 Q (p̃, q̃) p,q∈ZLΛ Ceci, avec l’inégalité prouvée dans la Proposition 1, Q2 ≤ Q++ − Q−− , + + + + avec Q++ = (1/2 − γinv )Q(1/2 − γinv ) et Q−− = (1/2 + γinv )Q(1/2 + γinv ), implique que Z L 2 X h iq 2 4ωQ b b TrC2 σ1 Q(y, y) dy ≤ 2 TrC2 (Q++ − Q−− ) (p̃, q̃) vF2 p̃2 + ∆2+ . g 0 Λ p,q∈ZL Chapitre 1. Modèle continu 67 Nous avons donc trouvé un minorant pour le deuxième terme de la fonctionnelle F : Z L h iq 2 1 X 1 g2 b b TrC2 σ1 Q(y, y) dy ≥ − − TrC2 (Q++ − Q−− ) (p̃, q̃) vF2 p̃2 + ∆2+ . 2 L 4ωQ L 0 Λ p,q∈ZL (1.29) Pour traiter le premier terme de F , rappelons la décomposition d’un espace de Hilbert que nous avons décrite dans l’introduction de cette thèse, dans la section III.2, juste après la Définition 1 provenant de l’article par Hainzl et al. [18]. Dans le cadre présent, nous travaillons dans l’espace de Hilbert HLΛ et nous regardons la décomposition associée à l’opérateur de Dirac D = −ivF σ3 ∂y + ∆+ σ1 correspondant au + minimiseur invariant par translations γinv . C’est-à-dire, nous décomposons l’espace HLΛ , et les opérateurs définis dessus, à travers la projection orthogonale + P− = χ(−∞,0) (D) = γinv + 1/2 et de sa projection complémentaire P+ = 1 − P− . Nous avons ainsi HLΛ = P− HLΛ ⊕ P+ HLΛ , et pour tout Q ∈ QΛ nous écrivons Q= Q−− Q−+ Q+− Q++ avec les notations données dans la section III.2 de l’introduction. Dans cette décomposition nous avons également −|D| 0 D= , 0 |D| et nous en déduisons l’égalité TrHLΛ (DQ) = TrHLΛ [|D|(Q++ − Q−− )]. Ceci en espace de Fourier s’écrit h i X b q̃) TrHLΛ (DQ) = TrC2 (vF σ3 p̃ + ∆+ σ1 )Q(p̃, p,q∈ZLΛ = X q 2 2 b++ − Q b−− (p̃, q̃) , vF p̃2 + ∆+ Q TrC2 p,q∈ZLΛ p car |D(p)| = vF2 p2 + ∆2+ . Finalement, nous remplaçons ces calculs dans le premier terme de la fonctionnelle F et nous nous servons du minorant (1.29) du deuxième terme pour conclure que F (Q) ≥ 0 68 Chapitre 1. Modèle continu + pour tout Q ∈ QΛ . Autrement dit, l’opérateur invariant par translations γinv donné en (1.14) est un minimiseur global de la fonctionnelle de l’énergie sur l’ensemble Γ tout entier. Bien évidemment, le deuxième minimiseur invariant par translations " #! g2 1 1 − −ivF σ3 ∂y − 2 ∆− σ1 − , γinv = χ(−∞,0) L 2ωQ 2 associé à la solution négative ∆− de l’équation (1.19), est un autre minimiseur global de ± l’énergie de la molécule de polyacétylène. Nous allons montrer que γinv sont en réalité les deux uniques minimiseurs globaux. ± L’unicité des minimiseurs γinv + − Pour démontrer que les deux seuls minimiseurs globaux de l’énergie E0 sont γinv et γinv , nous allons étudier en détail certains pas dans la preuve du fait que F (Q) ≥ 0 donnée dans la section précédente. Notamment, nous allons imposer l’égalité dans des inégalités larges obtenues dans cette preuve et montrer que les objets concernés ont une forme particulière. Commençons par regarder l’inégalité de Cauchy - Schwarz appliquée en (1.27). Par souci de simplicité, écrivons les expressions en fonction des variables p et q. Nous savons qu’une condition nécessaire et suffisante pour avoir une égalité est que, pour chaque valeur de k = p − q, il existe une constante µk telle que q σ1 b Q (p̃, q̃) 4 vF2 p̃2 + ∆2+ = µk p 4 2 2 vF p̃ + ∆2+ C’est-à-dire que l’on a nécessairement b (p̃, q̃) = µk p σ1 Q . vF2 p̃2 + ∆2+ (1.30) Regardons maintenant l’inégalité (1.28). Du fait que tous les termes dans la somme sont strictement positifs, nous ne pouvons avoir une égalité que lorsque k = 0, autrement dit lorsque p = q car par définition k = p − q. Si p 6= q, l’inégalité en question est stricte. De ce fait et de (1.30) on déduit que l’on a l’égalité en (1.28) si et seulement si le noyau de Q est diagonal, ainsi il s’écrit σ1 b Q(p̃) = µ0 p 2 . vF p̃2 + ∆2+ D’un autre côté, nous avons utilisé dans nos estimations en (1.29) le fait que Q2 ≤ Q++ − Q−− . Cette inégalité devient une égalité si et seulement si l’opérateur γ + 1/2 = + Q + γinv + 1/2 est une projection orthogonale, d’après la Proposition 1 de la section III.2 dans l’introduction. C’est-à-dire, puisque tous les opérateurs concernés sont auto-adjoints, si et seulement si + + (Q + γinv + 1/2)2 = Q + γinv + 1/2. (1.31) Chapitre 1. Modèle continu 69 + Remplaçons (1.30) et l’expression en variable de Fourier (1.16) de γinv dans cette égalité et développons le carré pour obtenir après simplification : b+ Q + γ binv + 1/2 2 = σ1 vF σ3 p + ∆+ σ1 1 µ0 q − q + 2 vF2 p2 + ∆2+ 2 vF2 p2 + ∆2+ !2 µ 0 − ∆+ vF σ3 p + ∆+ σ1 1 = µ0 q . − q + +µ0 2 2 2 vF p + ∆2+ vF2 p2 + ∆2+ 2 vF2 p2 + ∆2+ | {z } σ1 b γ + +1/2 Q+b inv Il vient que l’égalité (1.31) est satisfaite si et seulement si µ0 − ∆+ µ0 2 2 = 0. vF p + ∆2+ Cette équation a deux solutions : µ0 = 0 et µ0 = ∆+ . Ainsi, nous concluons qu’il y a exactement deux minimiseurs globaux de l’énergie : µ0 = 0 ⇒ + b=γ Q b−γ binv =0 ⇒ + γ = γinv µ0 = ∆+ ⇒ ∆+ σ1 + b=γ Q b−γ binv =p 2 vF p̃2 + ∆2+ ⇒ ∆+ σ1 + γ b= p 2 +γ binv 2 2 vF p̃ + ∆+ + La première solution nous dit ce que nous savions déjà : γinv est un minimiseur global. La seconde solution nous donne la forme que doit avoir le deuxième minimiseur en espace de Fourier ∆+ σ1 + +γ binv (p̃) + ∆2+ vF σ3 p̃ + ∆+ σ1 ∆+ σ1 p − =p 2 vF p̃2 + ∆2+ 2 vF2 p̃2 + ∆2+ vF σ3 p̃ − ∆+ σ1 =− p 2 2 vF p̃2 + ∆2+ vF σ3 p̃ + ∆− σ1 =− p 2 2 vF p̃2 + ∆2− − =γ binv (p̃) γ b(p̃) = p vF2 p̃2 car ∆− = −∆+ . Nous arrivons donc à la conclusion que la fonctionnelle de l’énergie, pour le modèle périodique de la molécule de polyacétylène, possède exactement deux minimiseurs globaux. + − Ces minimiseurs sont invariants par translations et sont précisément γinv et γinv . La seule condition que nous devons imposer aux paramètres du modèle est que la période L soit suffisamment grande pour satisfaire la condition (1.20). Cette condition se 70 Chapitre 1. Modèle continu réécrit comme L Λ [X 2π ] 1 p=1 2 2πvF ωQ > , p g2 L L Λ est la partie entière de 2π Λ. La période L doit où 2π P être assez grande pour qu’il y ait suffisamment de termes dans la somme (divergente) 1/p pour majorer la constante à droite. Il s’agit bien de la condition (1.4) du Théorème 5 et nous avons donc terminé sa démonstration. 1.2 Limite thermodynamique : L → ∞ Dans cette section nous allons étudier le problème du passage à la limite lorsque la période L tend vers l’infini. Le but est de donner un sens à la minimisation de l’énergie sur l’espace tout entier. Nous allons montrer que les minimiseurs globaux du modèle périodisé convergent dans un certain sens vers des opérateurs définis dans l’espace L2 (R, C2 ) muni d’un cut-off ultraviolet Λ : n o HΛ = ψ ∈ L2 R, C2 | supp ψb ⊂ B(0, Λ) . Valeur limite de ∆± . Commençons par l’étude de l’équation implicite (1.19) en regardant plus en détail la somme qui apparaît à gauche dans celle-ci. Nous rappelons la p, avec p ∈ ZLΛ = [−LΛ/(2π), LΛ/(2π)] ∩ Z. Si nous fixons une valeur de notation p̃ = 2π L ∆ 6= 0, alors cette somme s’écrit comme 1 X q L Λ vF2 p∈ZL 1 2 2π p L . + (1.32) ∆2 On reconnaît donc dans (1.32) une somme de Riemann sur l’intervalle [−Λ, Λ], où le pas de la partition est de longueur 2π/L. Il manque seulement un coefficient 2π devant cette somme pour compléter la somme de Riemann. Autrement dit, en multipliant cette somme par 2π, nous pouvons calculer la limite lorsque L → ∞ pour obtenir Z Λ dp 2π X 1 q p −−−→ . 2 2 + ∆2 L 2 2π 2 2 L→∞ v p −Λ Λ F v ( p) + ∆ p∈ZL F L Nous calculons cette intégrale en utilisant la parité de la fonction intégrée et en faisant Chapitre 1. Modèle continu 71 le changement de variable u = vF p, du = vF dp : Z Λ Z Λ dp dp p p = 2 vF2 p2 + ∆2 vF2 p2 + ∆2 −Λ 0 Z vF Λ du 2 √ = vF 0 u2 + ∆2 ivF Λ h √ 2 = ln u + u2 + ∆2 vF 0 ! p vF Λ + vF2 Λ2 + ∆2 2 = ln vF |∆| 2 vF Λ . asinh = vF |∆| Ainsi, la version limite de l’équation (1.19) est, après multiplication par 2π, 2 4πωQ vF Λ 2 asinh = vF |∆| g2 2 vF 2πωQ vF Λ ⇔ = sinh |∆| g2 v Λ F2πv ω2 . ⇔ |∆| = F Q sinh g2 (1.33) (1.34) Nous avons donc exactement deux solutions à cette équation limite ∆∞ + = sinh v Λ F2πv 2 F ωQ 2 g >0 ∞ et ∆∞ − = −∆+ , tout comme nous avions dans le cas périodique. Lorsque ΛvF ∆∞ + notre formule devient ∆∞ + ≈ exp 2vF Λ 2πv , ω2 F Q g2 ce qui est en accord avec la formule approchée (2.5) de [3]. Etats fondamentaux. Maintenant, nous allons étudier la limite des minimiseurs de l’énergie lorsque L → ∞. Pour alléger la notation, posons momentanément ∆ = ∆∞ +. + Nous reprenons l’expression connue pour le minimiseur γinv invariant par translations écrite en variable de Fourier dans (1.16) vF σ3 p̃ + ∆σ1 fb+ (p̃) = − p 2 . 2 vF p̃2 + ∆2 72 Chapitre 1. Modèle continu D’après nos commentaires faits au début de la section 1.1.3 (voir aussi [21] pour plus de + détails), le noyau intégral de γinv est donné par 1 X b f+ (p̃)eip̃(x−y) L p∈ZLΛ 2π 1 2π X b 2π = f+ p ei L p(x−y) . 2π L L Λ + γinv (x, y) = p∈ZL Donc, en prenant la limite lorsque L → ∞, nous obtenons + γ∞ (x, y) = lim L→∞ + γinv (x, y) 1 = 2π Z 1 =− 4π Λ fb+ (p)eip(x−y) dp −Λ Z Λ −Λ vF σ3 p + ∆σ1 ip(x−y) p e dp. vF2 p2 + ∆2 + + agis(x, y) comme le noyau intégral d’un opérateur γ∞ Nous interprétons la fonction γ∞ Λ − sant sur l’espace H . Nous construisons l’opérateur γ∞ de façon tout à fait analogue, en remplaçant ∆ par ∆∞ − . Remarquons qu’il s’agit bien d’opérateurs invariants par trans± lations car leur noyau intégral s’écrit sous la forme γ∞ (x, y) = f± (x − y), comme nous pouvons le constater dans la formule ci-dessus. ± De plus, les opérateurs γ∞ sont de la forme 1 ± γ∞ = P± − , 2 avec P ± une projection orthogonale. Ceci se vérifie aisément en considérant leur écriture en espace de Fourier fb± (p). En effet, on a fb(p) = fb∗ (p) et par un calcul simple on obtient 2 1 1 b = fb± (p) + . f± (p) + 2 2 ± Les opérateurs γ∞ sont interprétés comme les états fondamentaux de la molécule de polyacétylène dans le modèle continu avec cut-off ultraviolet Λ. Energie fondamentale. Finalement, regardons l’expression pour l’énergie minimale en variable de Fourier donnée en (1.17) q 2 ωQ 1 X E(∆) = − vF2 p̃2 + ∆2 + 2 ∆2 . L g Λ p∈ZL ∞ De la parité de cette fonction, il est clair que E(∆∞ + ) = E(∆− ), et par le même raisonnement de sommes de Riemann nous définissons l’énergie fondamentale du modèle continu Chapitre 1. Modèle continu 73 de la molécule de polyacétylène comme la limite E∞ = limL→∞ E(∆). Nous avons E∞ [u = vF p] q 2 ωQ vF2 p2 + ∆2 dp + 2 ∆2 g −Λ Z vF Λ √ 2 ωQ 1 2 2 u + ∆ du + 2 ∆2 =− πvF 0 g " ! # p q 2 2 2 2 ωQ v Λ + v Λ + ∆ 1 F F =− vF Λ vF2 Λ2 + ∆2 + ∆2 ln − |∆| + 2 ∆2 2πvF |∆| g q 2 2 2πωQ ωQ 1 |∆| − vF Λ vF2 Λ2 + ∆2 − ∆2 2 vF + 2 ∆2 = 2πvF g g q 1 = |∆| − vF Λ vF2 Λ2 + ∆2 . (1.35) 2πvF 1 =− 2π Z Λ Dans la troisième ligne de cette série d’égalités nous avons reconnu le terme à gauche de (1.34), ce qui contribue à simplifier l’expression finale de E∞ . Nous remarquons que l’énergie définie dans le modèle périodique par la formule (1.2) au début de ce chapitre est en fait une énergie par unité de longueur. Le fait d’introduire un facteur 1/L devant chaque terme dans cette formule nous donne un rapport entre l’énergie et la longueur de la période L fixée au départ. C’est seulement dans ce cas que nous pouvons calculer la limite de l’énergie lorsque L → ∞ et obtenir une valeur finie dans (1.35). Il est important de souligner également que nous ne pouvons pas enlever le cut-off ultraviolet du modèle. Dans la formule (1.35) nous constatons que l’énergie, même considérée par unité de longueur, est divergente lorsque Λ → ∞. Par ailleurs, toutes les intégrales calculées dans cette section sont divergentes dans cette limite. Chapitre 2 Modèle discret de la molécule de polyacétylène Dans ce chapitre nous étudions le modèle discret de la molécule de polyacétylène décrit dans la section II.2 de l’introduction. Nous suivons une démarche analogue à celle du modèle continu du chapitre précédent, inspirée des idées provenant de [18, 19, 21]. Nous définissons un problème périodique, puis nous prouvons qu’il existe exactement deux états fondamentaux et que ceux-ci sont invariants par la translation par deux sites. Autrement dit, la configuration optimale de la molécule de polyacétylène est la configuration parfaitement dimérisée. La différence principale entre la preuve donnée ici et celle de Kennedy et Lieb (voir la section III.1 de l’introduction) est que la nôtre est constructive. Nous donnons des formules explicites pour les minimiseurs globaux et pour l’énergie fondamentale de la molécule. La dernière partie de ce chapitre est consacrée à la démonstration de l’existence d’états de type kink. Nous allons considérer la limite lorsque le nombre d’éléments de CH tend vers l’infini. Les états kink sont définis par le fait qu’ils approchent l’un des états fondamentaux en +∞ et l’autre état fondamental en −∞. Contenu 2.1 Construction du modèle . . . . . . . . . . . . 2.1.1 Espace des états, Hamiltonien et énergie . . . 2.1.2 Théorèmes et schéma de leur preuve . . . . . 2.2 Les états fondamentaux . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Configuration initiale . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Chaîne parfaitement dimérisée . . . . . . . . 2.2.3 Recherche de la configuration optimale . . . . 2.2.4 L’énergie de référence . . . . . . . . . . . . . 2.2.5 Minimisation globale . . . . . . . . . . . . . . 2.3 Etats Kink . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1 A model for dimerized chains . . . . . . . . . 2.3.2 The kink problem . . . . . . . . . . . . . . . 75 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 . . . 76 . . . 80 . . 81 . . . 81 . . . 83 . . . 88 . . . 90 . . . 91 . . 105 . . . 106 . . . 108 76 2.1 2.1.1 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Construction du modèle Espace des états, Hamiltonien et énergie Rappelons brièvement le modèle discret de la molécule de polyacétylène, introduit dans [35] et expliqué plus en détails dans la section II.2 de l’introduction. Nous considérons une molécule avec N groupes de CH, où N est un multiple de 4 et nous posons m = N/2. Nous appelons une configuration de la molécule tout vecteur N ϕ = (un )N n=1 ∈ R , avec un représentant le déplacement du n-ème groupe CH à partir de la position d’équilibre (voir la Figure 5). Tout comme les auteurs de [35], nous considérons dans ce chapitre uniquement le cas à longueur fixe. C’est-à-dire que nous prenons uniquement des configurations ϕ = (un )N n=1 satisfaisant la convention de périodicité des indices u0 = uN et uN +1 = u1 . Nous utiliserons cette convention tout au long de ce chapitre. Comme nous avons expliqué dans l’introduction, l’énergie de ce système est une fonction des coordonnées de la configuration de la molécule. Plus précisément, c’est une fonction des variables δn := un − un−1 , PN qui satisfont n=1 δn = 0. En effet, le Hamiltonien second-quantisé du système est défini par (voir la formule (6)) KX (un+1 − un )2 2 n n,s X X K 2 δn+1 =− tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ) + 2 n n,s Hϕ := − X tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ) + où tn+1,n = t0 − α(un+1 − un ) = t0 − αδn+1 et l’opérateur c†n,s (resp. cn,s ) crée (resp. annihile) un électron π avec spin s = ±1/2 sur le n-ème groupe de CH. L’opérateur X Heϕ := − tn+1,n (c†n+1,s cn,s + c†n,s cn+1,s ) n,s est appelé Hamiltonien électronique du système. On considère un modèle périodisé de la chaîne de polyacétylène, avec période N = 2m, et donc un état à un électron est une suite complexe Z= n∈Z/N Z (zn,s )s∈{+,−} , avec N X X s∈{+,−} n=1 L’espace des états est alors défini par H = `2C (Z/N Z × {+, −}) |zn,s |2 = 1. Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 77 P P et muni du produit scalaire hx, yi = s n xn,s yn,s . Cet espace de Hilbert s’écrit, en fonction du spin, comme une somme directe H = H+ ⊕ H− . Dans cette décomposition le Hamiltonien électronique Heϕ est diagonal par blocs et il agit de façon identique dans chacun des sous-espaces H± , tous deux étant identifiables à l’espace `2C (Z/N Z). Autrement dit, nous avons H± ∼ = `2C (Z/N Z) ainsi que l’égalité des restrictions H̃eϕ := Heϕ |H+ = Heϕ |H− . Donc, pour un élément z = z+ + z− ∈ H , avec z± ∈ H± , nous pouvons écrire ϕ H̃e 0 z+ ϕ . He z = ϕ z− 0 H̃e (2.1) En vue de cette décomposition du Hamiltonien électronique, nous étudierons seulement l’action de Heϕ sur le sous-espace des électrons à spin +, H+ . Nous expliquerons plus loin (voir la Remarque 2.1 plus bas) comment étendre nos résultats à tout l’espace H . Soit hϕ la matrice associée au Hamiltonien électronique (restreint) H̃eϕ . Alors 0 t2,1 0 · · · t1,N t2,1 0 t3,2 0 ··· 0 0 t3,2 0 t4,3 · · · 0 .. . 0 t4,3 0 t5,4 . (2.2) hϕ := − 0 .. . . . . 0 tN,N −1 t1,N 0 · · · 0 tN,N −1 0 Nous rappelons que nous avons la décomposition (7) de la matrice hϕ comme la somme d’une matrice constante h0 (qui ne dépend pas de la configuration ϕ) et une matrice h1ϕ multipliée par α : hϕ = − 0 t0 t0 0 0 t0 .. . t0 | ··· 0 t0 0 t0 0 0 ··· 0 {z h0 ··· ··· .. . 0 t0 t0 0 0 0 δ2 δ2 0 0 δ3 .. . 0 δ3 0 0 ··· +α t0 0 δ1 } | ··· 0 δ4 ··· ··· .. . δN −1 0 0 δN {z h1ϕ δ1 0 0 δN 0 . (2.3) } Nous utiliserons cette notation pour décomposer la matrice hϕ quand cela sera commode. Changement de base Nous désirons réécrire le modèle décrit ci-dessus dans la base B := {wn |n = 1, . . . , N } où wn := in~en , (2.4) 78 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène {~en } étant les vecteurs canoniques de H+ ∼ = CN . Etant donné que ~en = i−n wn , la matrice unitaire qui donne le changement de la base canonique vers la base B est i−1 0 i−2 M := . . . . −N 0 i Ainsi, un élément (z1 , . . . , zN )T ∈ H+ se transforme par M en i−1 z1 i−2 z2 0 z := M z = .. , . i−N zN et une matrice écrite dans la base canonique comme A := (ar,s ) se réécrit dans la base B comme A0 = M AM −1 = (is−r ar,s ). Cette représentation est convenable car elle nous a permis de retrouver un opérateur de Dirac discret et de mieux comprendre le passage à l’approximation continue étudiée dans le premier chapitre de cette thèse. Le lecteur pourra consulter la discussion à ce sujet dans la section II.4 de l’introduction. C’est pour préserver la symétrie des opérateurs concernés après ce changement de base que nous avons supposé que la dimension N de notre espace des états était multiple de 4. Nous pouvons maintenant transformer le Hamiltonien électronique (2.2) par M en h0ϕ := M hϕ M −1 = − 0 −it2,1 0 it2,1 0 −it3,2 0 it3,2 0 ··· 0 it4,3 0 0 −it4,3 0 0 ··· 0 .. . it1,N −it1,N 0 0 .. . ··· ··· it5,4 .. . 0 −itN,N −1 et la décomposition (2.3) prend la forme 0 h0ϕ = h00 + αh1ϕ , avec h00 = − 0 it0 0 ··· −it0 0 it0 0 0 −it0 0 it0 .. . it0 0 ··· 0 ··· ··· .. . 0 −it0 −it0 0 0 it0 0 itN,N −1 0 (2.5) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 79 et 0 h1ϕ = 0 iδ2 0 −iδ2 0 iδ3 0 −iδ3 0 .. . iδ1 ··· 0 ··· 0 iδ4 ··· ··· .. . −iδN −1 0 0 −iδN −iδ1 0 0 iδN 0 . Remarquons que l’on a utilisé le fait que la dimension est multiple de 4 dans le calcul de i1−N = i et iN −1 = −i. Nous utiliserons par la suite cette représentation de l’espace H+ et nous omettrons l’apostrophe dans la notation des matrices. Définition de l’énergie L’énergie est une fonctionnelle dépendant de la configuration moléculaire ϕ et de l’état du système électronique représenté par une matrice densité réduite γ. La configuration ϕ varie dans l’ensemble de configurations à longueur fixe N ( ) X ΦN := (u1 , . . . , uN ) ∈ RN (un − un−1 ) = 0 . n=1 La matrice γ appartient à la classe Γ := {γ ∈ L (H )|γ = γ ∗ , 0 ≤ γ ≤ 1}. Ainsi, la fonctionnelle de l’énergie s’écrit KX (un+1 − un )2 . (2.6) Eϕ (γ) := Tr(Heϕ γ) + 2 n Il s’agit dans ces travaux de résoudre le problème de minimisation suivant min min Eϕ (γ). ϕ∈ΦN γ∈Γ Du fait que l’opérateur Heϕ est auto-adjoint pour tout ϕ et grâce aux propriétés particulières de la classe Γ, nous pouvons montrer, par un raisonnement tout à fait analogue à celui donné dans la section 1.1.2 du premier chapitre de ce texte, que l’énergie minimale associée à ϕ ∈ ΦN est donnée par X KX min Eϕ (γ) = λ+ (un+1 − un )2 , (2.7) γ∈Γ 2 n − λ∈Λ où Λ− := σ(Heϕ )∩(−∞, 0) est l’ensemble de valeurs propres négatives de Heϕ . On démontre également que ce minimum est atteint en le projecteur spectral négatif de Heϕ . C’est-à-dire qu’un minimiseur global de cette énergie est l’opérateur γϕ = χ(−∞,0) (Heϕ ), pour chaque configuration ϕ donnée. Il ne nous reste donc qu’à trouver la configuration des groupes de CH qui donne la plus petite énergie fondamentale. 80 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Remarque 2.1. Nous rappelons que nous allons faire l’étude de l’énergie fondamentale seulement sur les états à spin (+). L’énergie de ces états est donnée par la formule (2.6), mais en remplaçant les matrices Heϕ et γ par leurs restrictions au sous-espace H+ . Ceci est une conséquence de la forme diagonale par blocs (2.1) qu’a l’opérateur Heϕ dans la décomposition H = H+ ⊕ H− . L’apport à l’énergie fondamentale des électrons à spin (−) étant identique à celui des électrons à spin (+), on a tout simplement KX (un+1 − un )2 min Eϕ (γ) = Tr Heϕ χ(−∞,0) (Heϕ ) + γ∈Γ 2 n KX (un+1 − un )2 , (2.8) = 2Tr hϕ χ(−∞,0) (hϕ ) + 2 n où nous rappelons que hϕ est la matrice associée à l’opérateur H̃eϕ qui est la restriction de Heϕ à H+ . En introduisant le facteur 2 devant la trace dans (2.8), nous prenons en compte l’apport énergétique des états à spin (−). En vue de cette remarque importante, et pour ne pas alourdir la notation dans les calculs que nous allons faire par la suite, nous allons simplement ôter les indices ±. Ainsi, nous posons désormais H = `2C (Z/N Z). Avec cette notation, l’ensemble de minimisation s’écrit toujours Γ = {γ ∈ L (H )|γ = γ ∗ , 0 ≤ γ ≤ 1}, le Hamiltonien électronique agissant sur H est noté Heϕ , et l’énergie associée à γ ∈ Γ est KX Eϕ (γ) = 2Tr(Heϕ γ) + (un+1 − un )2 . (2.9) 2 n 2.1.2 Théorèmes et schéma de leur preuve L’objectif principal de la section suivante est de prouver les deux théorèmes ci-dessous : Théorème 6. (Minimiseurs Parfaitement Dimérisés) Pour tout m ∈ 2N suffisamment grand, posons um l’unique solution positive de l’équation m cos2 πk K 1 X m q = . (2.10) 2α2 m k=1 t2 sin2 πk + 4α2 u2 cos2 πk 0 m m Appelons ϕ+ et ϕ− les configurations parfaitement dimérisées associées aux déplacements u+ = um et u− = −um , respectivement. Alors, ϕ+ et ϕ− engendrent la plus petite énergie fondamentale parmi toutes les configurations parfaitement dimérisées. La valeur de cette énergie minimale est donnée par s m X πk πk 2 2 2 2 2 Ep (um ) = −4 t0 sin + 4α um cos + 4mKu2m . m m k=1 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 81 Pour la molécule dans la configuration ϕ+ (resp. ϕ− ) cette énergie est atteinte en le (+) (−) projecteur spectral γp = χ(−∞,0) (hϕ+ ) (resp. γp = χ(−∞,0) (hϕ− )). Théorème 7. Nous nous plaçons sous les mêmes hypothèses que dans le Théorème 6 et nous empruntons la notation de ce dernier. Supposons de plus que l’inégalité Kt0 ≥ α2 est satisfaite. Alors la fonctionnelle de l’énergie de la molécule de polyacétylène Eϕ (γ) possède exactement deux minimiseurs globaux. sont Ces minimiseurs invariants par la translation (+) (−) par deux sites et sont précisément ϕ+ , γp et ϕ− , γp . Autrement dit, nous avons Eϕ+ γp(+) = Eϕ− γp(−) < Eϕ (γ), (±) pour tout (ϕ, γ) ∈ ΦN × Γ r (ϕ± , γp ). La molécule de polyacétylène engrendre donc la plus petite énergie lorsqu’elle est en configuration parfaitement dimérisée. Premièrement, en 2.2.2, nous donnons la preuve du Théorème 6 : Nous trouvons une formule explicite pour l’énergie minimale lorsque la molécule est en configuration parfaitement dimérisée, avec un déplacement quelconque u > 0. Puis, nous calculons l’équation d’Euler-Lagrange (2.10) pour u, ce qui définit les deux minimiseurs dimérisés. Ensuite, pour démontrer le Théorème 7 nous suivons la stratégie suivante : 1. En 2.2.3 nous fixons γ ∈ Γ et trouvons la configuration ϕ ∈ ΦN , écrite en fonction des coordonnées de γ, qui minimise Eϕ (γ). Ceci nous permet de définir une fonctionnelle réduite G(γ) := minϕ∈ΦN Eϕ (γ). 2. Ensuite, à l’image de ce que nous avons fait au chapitre précédent, nous prenons (+) comme référence l’énergie de γp (notation du Théorème 6) et calculons G(γ) − (+) (+) G(γp ). Cette différence s’écrit comme une fonction F (Q), avec Q := γ − γp . 3. Pour conclure la preuve du Théorème 7 nous prouvons en 2.2.5 que F (Q) ≥ 0 pour (+) (+) (+) (+) (−) tout Q ∈ Γ − γp , avec F (Q) = 0 ⇔ Q + γp = γp ou Q + γp = γp . Remarque 2.2. Notons que, dans l’énoncé du Théorème 7, nous avons imposé la condition Kt0 ≥ α2 , alors que dans le Théorème 5 du cas continu nous n’avons pas de condition sur les constantes du modèle. Ceci est dû au fait que, lors du passage à la limite quand la distance entre les atomes tend vers zéro pour obtenir le modèle continu, l’amplitude de saut t0 tend vers +∞, comme nous l’avons expliqué formellement dans la section II.4 de l’introduction. Ainsi, la condition du cas discret est automatiquement satisfaite dans le cas continu. 2.2 2.2.1 Les états fondamentaux Configuration initiale On considère en premier lieu la configuration moléculaire où tous les groupes de CH se situent à la position initiale, c.à.d. un = 0 pour tout n. Dans ce cas, on a tn+1,n = t0 82 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène pour tout n, et le Hamiltonien électronique associé à cette configuration est représenté par la matrice 0 it0 0 ··· −it0 −it0 0 it0 0 ··· 0 0 −it0 0 it0 · · · 0 h0 = − . .. . . .. 0 it0 it0 0 · · · 0 −it0 0 N ×N Maintenant, pour k ∈ {1, 2, . . . , N }, on définit les vecteurs ~zk = N X i −n exp n=1 i2πk n wn , N où les wn sont les vecteurs de la base B de CN (voir (2.4) pour la définition). Calculons maintenant le produit i2π k eN 0 it0 −it0 i4π −it0 k N 0 it0 e i6π 0 −it0 0 it0 h0~zk = − e N k . .. .. . it0 −it0 0 1 i2π k −i2π k i2π e N (e N − e N k ) i2π k −i2π e i4π N (e N k − e N k ) i6π i2π e N k (e −i2π k k N N −e ) = it0 . . . −i2π i2π (e N k − e N k ) 2πk = 2t0 sin ~zk . N Donc, les vecteurs propres de h0 sont précisément {~zk : k = 1, . . . , N } et son spectre est donné par σ(h0 ) = {2t0 sin(2πk/N ) : k = 1, 2, . . . , N }. Les valeurs propres sont négatives si et seulement si N/2 < k < P N . De plus, le terme de liaison de l’énergie est nul pour cette configuration (ϕ = 0) : K/2 n (un+1 − un )2 = 0. Donc, d’après (2.7) et (2.9), l’énergie minimale est donnée par deux fois la somme des valeurs propres négatives N −1 X 2πk min E0 (γ) = 2 2t0 sin γ∈Γ N k=m+1 = 2Tr h0 χ(−∞,0) (h0 ) , car le minimum est atteint en le projecteur orthogonal χ(−∞,0) (h0 ). Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 2.2.2 83 Chaîne parfaitement dimérisée Le but de cette sous-section est de prouver le Théorème 6 énoncé en 2.1.2. Nous traiterons ici les configurations moléculaires où les groupes de CH se sont déplacés, alternativement à droite et à gauche, d’une distance fixe u, (c.à.d. les configurations du type un = (−1)n u) que l’on appellera chaînes parfaitement dimérisées. Autrement dit, nous considérons la restriction de l’énergie Eϕ (γ) à l’ensemble de configurations ΦpN := (u1 , . . . , uN ) ∈ RN | ∃u ∈ R, un = (−1)n u ⊂ ΦN et nous cherchons à résoudre le problème de minimisation min min Eϕ (γ). ϕ∈ΦpN γ∈Γ Soit donc ϕ = (u1 , . . . , uN ) ∈ ΦpN , avec uj = (−1)j u pour tout j = 1, . . . , N . Pour cette configuration nous avons tn+1,n = t0 − α(un+1 − un ) = t0 − αu[(−1)n+1 − (−1)n ] = t0 + (−1)n 2αu. On pose t1 := t0 −2αu et t2 = t0 +2αu, donc la matrice hϕ associée à la chaîne parfaitement dimérisée ϕ a la forme hϕ = − 0 it1 0 ··· −it1 0 it2 0 0 −it2 0 it1 .. . it2 0 ··· 0 ··· ··· ... 0 −it1 −it2 0 0 it1 0 . On rappelle que la dimension de notre espace des états est paire, N = 2m. Remarque 2.3. Nous notons de cette dernière formule que, pour les configurations parfaitement dimérisées, le Hamiltonien électronique hϕ est 2-périodique dans le sens où il commute avec la translation τ2 : RN → RN (x1 , x2 , . . . , xN −2 , xN −1 , xN ) 7→ (x3 , x4 , . . . , xN , x1 , x2 ). Cette propriété est une conséquence du fait que les configurations parfaitement dimérisées sont invariantes par ces translations : τ2 ϕ = ϕ pour tout ϕ ∈ ΦpN . 84 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Maintenant, pour chaque k ∈ {1, 2, . . . , m} on définit les vecteurs m πk 1 X exp i (2j − 2) w2j−1 ~v1 (k) := √ m m j=1 (2.11) m 1 X πk ~v2 (k) := √ exp i (2j − 1) w2j . m m j=1 L’ensemble de vecteurs V := {~v1 (k), ~v2 (k) : k = 1, 2, . . . , m} forme une base orthonormée de CN . Définissons maintenant les sous-espaces de H de dimension 2, H (k) := span{~v1 (k), ~v2 (k)}, pour k = 1, 2, . . . , m. Il est évident que l’on a la décomposition en somme directe CN = H (1) ⊕ H (2) ⊕ · · · ⊕ H (m) . La matrice hϕ laisse les sous-espaces H (k) invariants. En effet, un calcul simple montre que pour tout k i πk −i πk m m − t2 e ~v2 (k) hϕ~v1 (k) = i t1 e et −i πk m hϕ~v2 (k) = i t2 e i πk m − t1 e ~v1 (k). Si l’on pose T (k) = i(t1 e−ik − t2 eik ), on a l’écriture hϕ~v1 (k) = T (πk/m)~v2 (k) et hϕ~v2 (k) = T (πk/m)~v1 (k). Avec cette notation, la restriction de hϕ à H (k) , notée hϕ (k), est tout simplement π 0 T m k hϕ (k) = , π T m k 0 T π k et λ2 = dans la base {~ v (k), ~ v (k)}. Les valeurs propres de h (k) sont λ = 1 2 ϕ 1 m π − T m k , avec vecteurs propres respectifs π π T(m k) T(m k) 1 1 ~y1 = √ |T ( mπ k)| et ~y2 = √ |T ( mπ k)| . 2 2 1 −1 Nous avons montré que, dans la base V , la matrice hϕ s’écrit π 0 T m 1 π 1 0 T m π 0 T 2 m π T m 2 0 ĥϕ = .. . π m 0 T m π T m m 0 . (2.12) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 85 Appelons γϕ le minimiseur global de l’énergie pour cette configuration, donné par le projecteur orthogonal sur le sous-espace des vecteurs propres à valeur propre négative, c.à.d. le sous-espace span{~y2 (k) : k = 1, 2, . . . , m}. Dans la base V , ce projecteur est representé par la matrice 1 T ( π 1) − m π 1)| |T ( m 1 γ bϕ = 2 π T(m 1) − |T π 1)| (m 1 π T(m 2) − |T 1 T( − |T ( π 2 m π 2 m ) )| π 2)| (m 1 .. . 1 π T(m m) − |T π m)| (m . (2.13) π T(m m) − |T π m | (m ) 1 P π |T k |, en concordance avec ce qui Un calcul simple montre que Tr(hϕ γϕ ) = − m k=1 m a été dit dans la section 2.1.1 sur le fait que l’énergie électronique minimale est donnée par la somme des valeurs propres négatives (voir la formule (2.7)). Calculons maintenant le deuxième terme de l’énergie pour une chaîne parfaitement dimérisée. Etant donné que un+1 − un = (−1)n+1 2u, nous avons KX (un+1 − un )2 = 2N Ku2 . 2 n Donc, de ces faits et d’après la Remarque 2.1, l’énergie fondamentale pour cette configuration est donnée comme fonction de u par Ep (u) = −2 m X π T k + 2N Ku2 . m k=1 (2.14) On remplace dans T (·) les valeurs de t1 et t2 , puis on développe pour trouver ainsi π πk πk T k = 2t0 sin − i4αu cos m m m et donc s π πk πk 2 2 2 2 2 k = 2 t0 sin + 4α u cos . T m m m Alors, la formule (2.14) de l’énergie devient (on remplace N = 2m) s m X πk πk 2 2 Ep (u) = −4 t0 sin + 4α2 u2 cos2 + 4mKu2 . m m k=1 (2.15) 86 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Maintenant, dans le but de trouver le déplacement u qui donne la plus petite énergie fondamentale parmi les chaînes parfaitement dimérisées, nous allons déterminer l’équation de Euler-Lagrange satisfaite par u m X α2 u cos2 πk d m q Ep (u) = −16 + 8mKu = 0 du 2 πk 2 2 t sin + 4α u2 cos2 πk k=1 0 m m ⇐⇒ m Ku u X q = 2α2 m k=1 t2 sin2 0 cos2 πk m πk + 4α2 u2 cos2 m πk m . (2.16) Un premier point critique est donné par la solution triviale de cette équation u = 0, ce qui correspond au cas d’une chaîne en position initiale que l’on a déjà traité en 2.2.1. Si u 6= 0, alors de (2.16) découle que m cos2 πk 1 X K m q = 2α2 m k=1 t2 sin2 πk + 4α2 u2 cos2 πk 0 m m m πk 2 2 X cos m = (2.17) m k=1 T πk m qui est l’équation implicite que doivent satisfaire les points critiques non nuls de Ep . On remarque que l’équation (2.17) a une unique solution positive, um > 0, pour tout m ∈ 2N. En effet, il est aisé de montrer que la fonction m cos2 πk 1 X m q Im (u) := m k=1 t2 sin2 πk + 4α2 u2 cos2 πk 0 m m satisfait +∞ Im (u) −−−→ + et u→0 Im (u) −−−−→ 0+ , u→+∞ pour tout m, en étant strictement décroissante sur (0, +∞). Ceci implique qu’il existe un unique um > 0, tel que Im (um ) = K/2α2 . La fonction Im étant paire, alors la valeur u = −um est la seule solution négative de l’équation (2.17). Nous avons donc trois points critiques pour l’énergie Ep (u) : u = 0 et u = ±um . En outre, il vient de (2.15) que Ep est coercive : Ep (u) −−−−−→ +∞. |u|→+∞ (2.18) Maintenant, étudions la convexité de Ep près de u = 0. Nous calculons la dérivée seconde 2 πk m−1 2 πk X cos sin m m Ep00 (u) = −16α2 t20 3/2 + 8Km. 2 πk 2 2 u2 cos2 πk + 4α k=1 t0 sin m m Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 87 Alors, en u = 0 on a Ep00 (0) m−1 16α2 X cos2 =− t0 k=1 sin πk m πk m + 8Km −−−−→ −∞. m→+∞ Autrement dit, il existe un M0 ∈ N tel que si m > M0 , Ep est localement concave en 0 et donc le point critique u = 0 donne un maximum local. De plus, si m > M0 , de la limite (2.18) on déduit que les deux points critiques restants u = ±um donnent des minima globaux pour Ep , puisque cette fonction est paire. Nous avons donc montré le Théorème 6. Le modèle parfaitement dimérisé dual Travaillons dans la base V définie en (2.11). Pour une configuration parfaitement dimérisée ϕ+ ∈ ΦpN associée au déplacement des unités de CH u ∈ R, on définit sa configuration duale ϕ− ∈ ΦpN comme celle associée au déplacement −u. On va établir des relations entre les modèles duaux. En prenant comme avant T (k) = i(t1 e−ik − t2 eik ) on a, d’après nos calculs précédents π k ~v2 (k) m π hϕ− ~v1 (k) = T k ~v2 (k) m hϕ+ ~v1 (k) = T π k ~v1 (k) m π hϕ− ~v2 (k) = T k ~v1 (k), m hϕ+ ~v2 (k) = T d’où hϕ+ (k) = π k 0 T m π T mk 0 et hϕ− (k) = 0 T π k m T π k m 0 . + = hϕ− dans cette base. Ces deux matrices ont les mêmes valeurs Autrement dit, hϕ π propres (± T m k , k = 1, . . . , m). Pour chaque valeur propre, le vecteur propre associé de l’une est le conjugué complexe du vecteur propre associé de l’autre : hϕ+ y = λy =⇒ hϕ− y = λy. Quant aux matrices des projecteurs spectraux négatifs des Hamiltoniens, on a dans la base V π π T(m k) T(m k) 1 − T πk 1 − T πk 1 1 | ( m )| | ( m )| γϕ+ (k) = T π k et γϕ− (k) = T π k . (2.19) (m ) 2 − (m ) 2 1 − T πk 1 |T ( mπ k)| | ( m )| Donc, la même relation de conjugaison complexe reste valable entre ces projecteurs, c.à.d. γϕ+ = γϕ− . L’énergie fondamentale de la molécule pour ces deux configurations est la même. Ceci découle clairement de la formule (2.15), car la fonctionnelle de l’énergie dans la configuration parfaitement dimérisée est paire : Ep (u) = Ep (−u). 88 2.2.3 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Recherche de la configuration optimale Nous allons maintenant démontrer le Théorème 7 énoncé dans 2.1.2. C’est-à-dire, nous allons prouver que la configuration des groupes de CH qui donne la plus petite énergie fondamentale est celle de la chaîne parfaitement dimérisée, avec déplacement optimal um (la solution positive de l’équation (2.17)). Reprenons le cas général : soit une configuration quelconque ϕ = (u1 , . . . , uN ) ∈ ΦN de la molécule de polyacétylène. Soit hϕ = h0 + αh1ϕ la décomposition de la matrice associée à cette configuration, définie en (2.3). Pour un élément γ ∈ Γ, on note ses éléments de matrice par (γi,j ). Rappelons que, en vue de la Remarque 2.1 et de la formule (2.9), nous voulons minimiser la fonctionnelle d’énergie KX 2 δ Eϕ (γ) = 2Tr(hϕ γ) + 2 j j sur Γ, avec δj = uj − uj−1 . Maintenant, écrivons la fonctionnelle d’énergie en fonction des éléments de la matrice auto-adjointe γ et des écarts δj entre les positions des groupes de CH : KX 2 δ Eϕ (γ) = 2Tr(hϕ γ) + 2 j j KX 2 = 2Tr(h0 γ) + 2αTr(h1ϕ γ) + δ 2 j j = 2it0 N X j=1 = 4t0 N X j=1 [γj−1,j N KX 2 − γj,j−1 ] + 2iα δj [γj,j−1 − γj−1,j ] + δ 2 j=1 j j=1 =(γj,j−1 ) − 4α N X N X j=1 δj =(γj,j−1 ) + N KX 2 δ , 2 j=1 j (2.20) avec la convention de périodicité des indices. Notons que, de la définition de l’ensemble de P configurations ΦN , les variables δj = un − un−1 P doivent satisfaire la contrainte δj = 0. Autrement dit, si nous posons g(δ1 , . . . , δN ) = δj , nous voulons optimiser la fonction f : RN → R définie par f (δ1 , . . . , δN ) := Eϕ (γ), sous la contrainte g = 0. Tout d’abord, on remarque que la contrainte est qualifiée car pour tout δ ∈ RN ∇g(δ) = (1, . . . , 1) 6= 0. Cherchons maintenant les points critiques de première espèce. Nous introduisons le Lagrangien L(δ, λ) := f (δ) − λg(δ). Donc, avec la notation Sj := =(γj,j−1 ), nous avons ∇L(δ) = 0 si et seulement si ( ( −4αSj + Kδj = λ, ∀j δj = Kλ + 4α S , ∀j (E1) K j ⇔ P P δj = 0 (E2) δj = 0 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 89 En combinant (E1) et (E2) on en déduit que N N N X X 4α λ 4α X λ + Sj = N + Sj 0= δj = K K K K j=1 j=1 j=1 N =⇒ λ = − 4α X Sj . N j=1 Ainsi, le seul point critique de notre problème de minimisation sous contrainte est ! N 1 X 4α Sj − δj = Sk , j = 1, . . . , N. (2.21) K N k=1 De plus, la matrice hessienne du Lagrangien est donnée par HL(δ) = K1N ×N , ∀ δ, où 1N ×N est la matrice identité de RN . La constante K étant positive, alors cette matrice hessienne est définie positive et le Lagrangien est strictement convexe P en δ à λ fixé. Ainsi, la fonction f est strictement convexe sur l’espace vectoriel défini par 1≤j≤N δj = 0. On en déduit que le point P δ de coordonnées (2.21) est l’unique point de minimum global de f sous la contrainte δj = 0. Autrement dit, pour un γ ∈ Γ fixé, la configuration moléculaire qui donne la plus petite énergie en l’état γ est celle dont les écarts δj sont donnés par (2.21). Maintenant, nous pouvons définir la fonctionnelle réduite G(γ) := min Eϕ (γ). ϕ∈ΦN En remplaçant (2.21) dans (2.20), nous obtenons ! !2 N N N N N X X K X 16α2 1 X 4α 1 X Sj − Sj − Sk Sj + Sk G(γ) = 4t0 Sj − 4α K N k=1 2 j=1 K 2 N k=1 j=1 j=1 !2 N N N X 16α2 X 2 16α2 X = 4t0 Sj − S + Sj K j=1 j N K j=1 j=1 !2 !2 N N N 8α2 X 2 16α2 X 8α2 X + S − Sj + Sj K j=1 j N K j=1 N K j=1 !2 N N N X 8α2 X 2 8α2 X = 4t0 Sj − S + Sj K j=1 j N K j=1 j=1 La valeur de G(γ) représente l’énergie minimale que peut avoir la molécule en l’état γ, parmi toutes les configurations possibles ϕ ∈ ΦN de ses groupes de CH. 90 2.2.4 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène L’énergie de référence Nous suivons la même démarche que dans le chapitre précédent, inspirée des idées provenant des articles [18, 19, 21]. Pour démontrer que les minimiseurs globaux de l’éner(±) gie sont les projecteurs γp du Théorème 6, nous allons prendre leur énergie (commune) comme référence. Autrement dit, nous allons étudier une fonctionnelle définie comme la (+) différence de l’énergie d’un élément γ ∈ Γ moins l’énergie de γp = γp . Nous commencerons par démontrer que cette différence des énergies s’écrit en fonction de la matrice γ −γp . Prenons un élément quelconque γ ∈ Γ et notons la matrice γ − γp par Q = (qi,j ). En vue de la formule trouvée pour G, on posera également Qj := =(qj,j−1 ) et p p Sj := =(γj,j−1 ). Avec cette notation, on calcule la différence 2 N N N N N 2 X 2 2 X X X X 8α 8α 8α 8α Sjp Sj2 + Sj2 − 4t0 Sjp − (Sjp )2 + G(γ) − G(γp ) = 4t0 Sj − K N K K N K j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 N X 2 N N N N N N 2 X 2 X X X X X 16α 16α Sjp Sjp − Sj − Sj − = 4t0 Sjp (Sj − Sjp ) + Sjp K N K j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 2 N N N 2 X X 8α2 X 8α − (Sj − Sjp )2 + Sj − Sjp K j=1 N K j=1 j=1 2 N N N N N 2 2 X 2 X X X X 8α 16α 16α 8α Sjp Qj + Sjp Qj − Q2j + Qj = 4t0 Qj − K N K K N K j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 j=1 | {z } N X 2 2Tr(hp Q) 2 N N 8α2 X 2 8α2 X = 2Tr(hp Q) − Q + . Qj K j=1 j N K j=1 On remarque qu’effectivement, cette différence des énergies est une formule qui ne dépend que de la différence Q = γ − γp . De la Proposition 1 prouvée dans la section III.2 de l’introduction, nous avons la caractérisation suivante pour les matrices de la forme γ − γp . Si A est une matrice autoadjointe on a l’équivalence A + γp ∈ Γ ⇐⇒ A++ − A−− ≥ A2 , où A++ := (1 − γp )A(1 − γp ) et A−− := γp Aγp . Nous définissons donc la fonctionnelle N 8α X 2 8α2 F (Q) := 2Tr(hp Q) − Q + K j=1 j N K 2 N X j=1 !2 Qj , (2.22) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 91 pour Q dans l’ensemble Q := Q ∈ MN ×N (C) | Q = Q∗ , Q++ − Q−− ≥ Q2 = Γ − γp . Cette fonctionnelle auxiliaire nous servira pour montrer dans la section suivante que les (+) (−) minimiseurs globaux de G sont les projecteurs spectraux γp et γp . 2.2.5 Minimisation globale Transformée de Fourier Pour réaliser un changement de la base B vers la base V (voir (2.4) et (2.11) pour les définitions), nous définissons la matrice unitaire U dont les colonnes sont les vecteurs de la base V : h i U := ~v1 (1)|~v2 (1)|~v1 (2)|~v2 (2)| · · · |~v1 (m)|~v2 (m) . Pour une matrice Ω = (ωi,j ) écrite en base B, on note Ω̂ = (ω̂i,j ) son écriture en base V qui s’obtient en faisant Ω̂ := U −1 ΩU. On applique cette transformation à une matrice Q ∈ Q et on obtient la matrice Q̂ = U −1 QU dont les coordonnées sont notées par q̂i,j . En réalisant la transformation inverse (Q = U Q̂U −1 ), on peut exprimer les coordonnées de Q en fonction de celles de Q̂ à travers la relation m q2a−k,2b−l m 1 X X i π [r(2a−k−1)−s(2b−l−1)] = q̂2r−k,2s−l , em m r=1 s=1 (2.23) avec a, b ∈ {1, . . . , m} et les indices de parité k, l ∈ {0, 1}. Étant donnée l’expression simple que l’on a pour ĥp en (2.12) il est convenable de calculer la fonction F (Q) en fonction des coordonnées de Q̂. Nous rappelons que Qj = =(qj,j−1 ) = −i (qj,j−1 − qj−1,j ), puisque la matrice Q est auto-adjointe. Alors, pour a ∈ 2 {1, . . . , m} et selon la parité de l’indice j, nous employons (2.23) pour écrire m Q2a−1 = m π −i X X i 2π (r−s)a i π s e m e m q̂2r−1,2s − e−i m r q̂2r,2s−1 2m r=1 s=1 (2.24) et m Q2a m π −i X X i 2π (r−s)a −i π s e m −e m q̂2r−1,2s + ei m r q̂2r,2s−1 . = 2m r=1 s=1 (2.25) Avant d’attaquer notre problème de minimisation globale, nous profitons de ces formules explicites de la transformation de Fourier inverse pour souligner, dans la remarque ci-dessous, un fait concernant les configurations parfaitement dimérisées. 92 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Remarque 2.4. Nous déduisons de la formule (2.23) et de l’expression (2.13) que l’opérateur γϕ = χ(−∞,0) (hϕ ), pour une configuration parfaitement dimérisée ϕ ∈ ΦpN , est 2-périodique (dans le sens de la Remarque 2.3). En effet, on prouve aisément à partir de ϕ ces formules que l’opérateur γϕ = (γi,j ) satisfait pour tout i, j ∈ {1, . . . , N } ϕ ϕ γi+2,j+2 = γi,j . En outre, la configuration optimale (δj )j associée à γϕ , définie par la formule (2.21), hérite également de la 2-périodicité. Autrement dit, il existe une constante ω ∈ R telle que δj = (−1)j 2ω, ce qui veut dire que cette configuration optimale est parfaitement dimérisée. Étude de la somme P j Q2j Reprenons notre problème de minimisation. Dans cette section nous cherchons à minorer le deuxième terme de la fonctionnelle F (Q) écrite en (2.22). Pour ce faire, nous allons l’écrire en coordonnées de Fourier grâce aux formules (2.24) et (2.25). Puis, dans la section suivante nous trouverons un minorant pour le premier terme de F (Q) en coordonnées de Fourier également. Considérons donc le second terme de l’expression de F donnée en (2.22). Selon la parité de l’indice j nous pouvons écrire N X j=1 |Qj |2 = m−1 1 XX a=0 k=0 |Q2a−k |2 = m−1 X |Q2a−1 |2 + |Q2a |2 . (2.26) a=0 On calcule séparément les termes à indice impair et pair, en introduisant le changement et v = r − s : de variable u = r+s 2 2 m −i X 2π π π |Q2a−1 |2 = ei m (r−s)a ei m s q̂2r−1,2s − e−i m r q̂2r,2s−1 2m r,s=1 2 h i X X π v π v 1 i u− −i u+ i 2π va m( 2 ) q̂ m( 2 ) q̂ m e − e = e 2u+v−1,2u−v 2u+v,2u−v−1 4m2 v=r−s u= r+s 2 2 1 X i 2π va m e = S v,1 2 4m v=r−s 2 m−1 1 X i 2π va m = e S (2.27) v,1 , 4m2 v=−m+1 π P v π v où nous avons introduit la notation Sv,1 = u= r+s ei m (u− 2 ) q̂2u+v−1,2u−v −e−i m (u+ 2 ) q̂2u+v,2u−v−1 . 2 Afin d’appliquer la formule de Plancherel, on cherche à réécrire cette dernière expression Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 93 sous la forme d’une somme sur v allant de 0 à m − 1 : 2 m−1 −1 X 2π 1 X i 2π va i m va m (2.27) = e Sv,1 + e Sv,1 2 4m v=0 v=−m+1 2 m−1 m−1 X 2π 1 X i 2π va −i m va m e = S + e S v,1 −v,1 4m2 v=0 v=1 m−1 2 m−1 X 2π 1 X i 2π va i m (m−v)a m = e Sv,1 + e S−v,1 2 4m v=0 v=1 2 m−1 m−1 X 2π 1 X i 2π va i m va m e = S + e S v,1 v−m,1 4m2 v=0 v=1 m−1 2 1 X i 2π va m e = (Sv,1 + Sv−m,1 ) , 2 4m v=0 avec la convention S−m,1 = 0. En appliquant le même raisonnement pour les indices pairs on obtient 2 m −i X 2π π π i m (r−s)a −i m s imr 2 e −e q̂2r−1,2s + e q̂2r,2s−1 |Q2a | = 2m r,s=1 2 π v 1 X i 2π va X −i π (u− v ) i (u+ ) e m −e m 2 q̂2u+v−1,2u−v + e m 2 q̂2u+v,2u−v−1 = 4m2 v=r−s u= r+s 2 2 1 X i 2π va m = e S v,0 4m2 v=r−s 2 m−1 1 X i 2π va m = e (S + S ) v,0 v−m,0 , 2 4m v=0 −i π (u− v ) P π v où Sv,0 = −e m 2 q̂2u+v−1,2u−v + ei m (u+ 2 ) q̂2u+v,2u−v−1 (avec la convention u= r+s 2 S−m,0 = 0). Maintenant, on applique l’identité de Plancherel à la somme des carrés (2.26) = m X a=1 2 |Q2a−1 | + m X |Q2a |2 a=1 2 2 m m−1 m m−1 X X 2π 1 X X i 2π va 1 i m va m = e (S + S ) + e (S + S ) v,1 v−m,1 v,0 v−m,0 2 2 4m a=1 v=0 4m a=1 v=0 m−1 m−1 1 X 1 X 2 = |Sv,1 + Sv−m,1 | + |Sv,0 + Sv−m,0 |2 . 4m v=0 4m v=0 (2.28) 94 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Notons que l’on a Sv,1 i X h π π −i m i m (u− v2 ) u+ v2 ) ( q̂2u+v−1,2u−v − e q̂2u+v,2u−v−1 = e u= r+s 2 π X π π ei m u q̂2u+v−1,2u−v − e−i m u q̂2u+v,2u−v−1 = e−i 2m v u= r+s 2 et Sv−m,1 = X h π im (u− v−m 2 ) e q̂2u+v−m−1,2u−v+m − e π −i m (u+ v−m 2 ) q̂2u+v−m,2u−v+m−1 i u= r+s 2 π = ie−i 2m v X π π ei m u q̂2u+v−m−1,2u−v+m − e−i m u q̂2u+v−m,2u−v+m−1 . u= r+s 2 Ceci permet de simplifier le terme i Xh iπ u π |Sv,1 + Sv−m,1 | = e m q̂2u+v−1,2u−v − e−i m u q̂2u+v,2u−v−1 2 u +i Xh π u im e q̂2u+v−m−1,2u−v+m − e π −i m u u i 2 (2.29) q̂2u+v−m,2u−v+m−1 . De façon similaire on obtient i X h −i π u π −e m q̂2u+v−1,2u−v + ei m u q̂2u+v,2u−v−1 |Sv,0 + Sv−m,0 | = 2 u +i Xh π u −i m e π im u q̂2u+v−m−1,2u−v+m − e u i 2 (2.30) q̂2u+v−m,2u−v+m−1 . Pour simplifier l’écriture, appelons Av (respectivement Bv ) le terme à l’intérieur du module au carré à droite de (2.29) (respectivement (2.30)). Avec cette notation, nous pouvons réécrire (2.28) = m−1 1 X |Av |2 + |Bv |2 4m v=0 m−1 1 X = |Av + Bv |2 + |Av − Bv |2 , 8m v=0 après l’application de l’égalité de la médiane. Nous développons séparément les termes de cette dernière somme. D’un côté, nous avons π X 2 u [q̂2u+v−1,2u−v + q̂2u+v,2u−v−1 ] |Av + Bv | = 4 sin m u 2 π X + cos u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m − q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] . m u Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 95 Puis, d’un autre côté nous obtenons π X cos |Av − Bv | = 4 u [q̂2u+v−1,2u−v − q̂2u+v,2u−v−1 ] m 2 u − X u 2 π sin u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m + q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] . m On regroupe tous les calculs pour conclure que N X m−1 π X X 1 2 u [q̂2u+v−1,2u−v + q̂2u+v,2u−v−1 ] |Qj | = sin 2m v=0 u m j=1 + X u + 1 2m 2 π cos u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m − q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] m m−1 X X v=0 (2.31) π cos u [q̂2u+v−1,2u−v − q̂2u+v,2u−v−1 ] m u 2 π X sin − u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m + q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] m u Développons maintenant les sommes dans les modules au carré ci-dessus, en explicitant les intervalles de sommation. Nous définissons la fonction ( q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 D1 (s, v) := q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 1≤s≤m−v . m−v+1≤s≤m Donc, pour le premier membre de (2.31) on a X u=(r+s)/2 sin π u [q̂2u+v−1,2u−v + q̂2u+v,2u−v−1 ] m = = m−v X s=1 m−v X s=1 sin sin π m π m [s + v/2] (q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 ) [s + v/2] D1 (s, v), (2.32) 96 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène et X u=(r+s)/2 cos π u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m − q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] m m X = = = = π cos s=m−v+1 m X s=m−v+1 m X s=m−v+1 m X m π cos sin sin m π m π s=m−v+1 m [s + (v − m)/2] (q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 ) [s + v/2] − π/2 (q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 ) [s + v/2] (q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 ) [s + v/2] D1 (s, v). Donc, en ajoutant ces deux expressions, le premier membre de (2.31) devient 2 m−1 m π 1 X X [s + v/2] D1 (s, v) . sin 2m v=0 s=1 m On définit également la fonction ( q̂2(s+v)−1,2s − q̂2(s+v),2s−1 D2 (s, v) := q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 1≤s≤m−v . m−v+1≤s≤m Alors, pour le second membre de (2.31) nous avons X u=(r+s)/2 cos π u [q̂2u+v−1,2u−v − q̂2u+v,2u−v−1 ] m = = m−v X s=1 m−v X s=1 cos cos π m π m [s + v/2] (q̂2(s+v)−1,2s − q̂2(s+v),2s−1 ) [s + v/2] D2 (s, v), (2.33) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 97 et X sin u=(r+s)/2 π u [q̂2u+v−m−1,2u−v+m + q̂2u+v−m,2u−v+m−1 ] m = = m X s=m−v+1 m X sin sin π m π [s + (v − m)/2] (q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 ) [s + v/2] − π/2 (q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 ) m π [s + v/2] (q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 ) = − cos m s=m−v+1 m π X = cos [s + v/2] D2 (s, v). m s=m−v+1 s=m−v+1 m X Ainsi, le deuxième membre de (2.31) s’écrit 2 m−1 m π 1 X X cos [s + v/2] D2 (s, v) . 2m v=0 s=1 m En résumant, avec les définitions données ci-dessus pour les fonctions Dk (s, v) (k = 1, 2), nous avons montré jusqu’ici que N X m−1 1 X 2 |Qj | = 2m v=0 j=1 2 m X π sin [s + v/2] D1 (s, v) m s=1 m 2 ! X π cos + [s + v/2] D2 (s, v) m s=1 Maintenant, on applique une inégalité de Cauchy - Schwartz au terme 2 2 m m X X π π 1/2 sin [s + v/2] π m sin [s + v/2] D (s, v) = T s D (s, v) πs 1/2 1 1 s=1 m m T s=1 m ! ! m m π X X sin2 m [s + v/2] π 2 πs ≤ s |D1 (s, v)| T T m m s=1 s=1 ! ! m m π X X cos2 m s π 2 πs ≤ s |D1 (s, v)| . T T m m s=1 s=1 (2.34) 98 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène La dernière inégalité ci-dessus est vraie sous la condition que Kt0 ≥ α2 . Elle est due non seulement au fait que, sous cette condition, la fonction m π X sin2 m s+x πs Sm (x) := T m s=1 atteint son maximum en x = π/2, mais aussi à l’identité sin(θ + π/2) = cos θ. Nous réunissons ces affirmations dans le lemme suivant qui sera démontré dans l’Annexe A.1. Lemme 2. La fonction π-périodique m m π π X s+x sin2 m s+x sin2 m 1X πs q Sm (x) := = T 2 s=1 t2 sin2 πs + 4α2 u2 cos2 m s=1 0 m m πs m atteint son maximum global en x = π/2 et son minimum global en x = 0 sur [0, π[ si et seulement si Kt0 ≥ α2 . Pour le second membre on obtient par application de l’inégalité de Cauchy - Schwartz 2 2 m m X X π 1/2 π [s + v/2] cos π m = [s + v/2] D (s, v) s D (s, v) cos T πs 1/2 2 2 s=1 s=1 m m T m ! ! m m π X X cos2 m [s + v/2] π πs ≤ s |D2 (s, v)|2 T T m m s=1 s=1 ! ! m m π X X cos2 m s π πs ≤ s |D2 (s, v)|2 . T T m m s=1 s=1 (2.35) Ici, la dernière inégalité est due au fait que la fonction m π X cos2 m s+x πs Cm (x) := = Sm (x + π/2) T m s=1 atteint son maximum en x = 0 sous la condition Kt0 ≥ α2 , d’après le Lemme 2. En prenant en facteur les termes communs, on arrive à l’inégalité suivante pour la somme des modules au carré des Qj ! m N m−1 X X X π 1 |Qj |2 ≤ Cm (0) s |D1 (s, v)|2 + |D2 (s, v)|2 . T 2m m s=1 v=0 j=1 Nous appliquons l’identité de la médiane au terme m X π s |D1 (s, v)|2 + |D2 (s, v)|2 (2.36) T m s=1 m 1 X π = s |D1 (s, v) + D2 (s, v)|2 + |D1 (s, v) − D2 (s, v)|2 , T 2 m s=1 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 99 et nous développons chaque terme séparément en fonction de l’indice s. D’après les définitions (2.32) et (2.33), on a 1. Pour s ∈ {1, . . . , m − v} |D1 (s, v) + D2 (s, v)|2 = |q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 + q̂2(s+v)−1,2s − q̂2(s+v),2s−1 |2 = 4|q̂2(s+v)−1,2s |2 et |D1 (s, v) − D2 (s, v)|2 = |q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 − q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 |2 = 4|q̂2(s+v),2s−1 |2 . 2. Pour s ∈ {m − v + 1, . . . , m} |D1 (s, v) + D2 (s, v)|2 = |q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 − q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 |2 = 4|q̂2(s+v−m),2s−1 |2 et |D1 (s, v) − D2 (s, v)|2 = |q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 + q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 |2 = 4|q̂2(s+v−m)−1,2s |2 . Tout ceci implique que (2.36) = 2 m−v X π s |q̂2(s+v)−1,2s |2 + |q̂2(s+v),2s−1 |2 m s=1 m π X s |q̂2(s+v−m),2s−1 |2 + |q̂2(s+v−m)−1,2s |2 . +2 T m s=m−v+1 T En somme, nous avons démontré que ! m−1 m X X π 1 2 2 Cm (0) s |D1 (s, v)| + |D2 (s, v)| |Qj | ≤ T 2m m v=0 s=1 j=1 (m−v m−1 X X π 1 s |q̂2(s+v)−1,2s |2 + |q̂2(s+v),2s−1 |2 = Cm (0) T m m N X 2 v=0 s=1 m X ) π + s |q̂2(s+v−m),2s−1 |2 + |q̂2(s+v−m)−1,2s |2 T m s=m−v+1 ! m m X 1 π X = Cm (0) k |q̂2l−1,2k |2 + |q̂2l,2k−1 |2 (2.37) T m m k=1 l=1 Maintenant, nous rappelons que les valeurs propres du Hamiltonien hp sont ±|T (πk/m)| pour chaque k ∈ {1, 2, . . . , m} et que d’après les calculs faits en 2.2.2 on a r π π π k = 2 t20 sin2 k + 4α2 u2 cos2 k . T m m m 100 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Nous rappelons aussi l’équation implicite (2.17) obtenue dans le cas d’une chaîne parfaitement dimérisée optimale K 2 = Cm (0). 2 2α m Finalement, nous remplaçons tout ceci dans l’inégalité (2.37) et nous avons ! N m m π X X X 1 |Qj |2 ≤ Cm (0) k |q̂2l−1,2k |2 + |q̂2l,2k−1 |2 T m m j=1 k=1 l=1 m m K X π X k = 2 |q̂2l−1,2k |2 + |q̂2l,2k−1 |2 . T 4α k=1 m l=1 (2.38) Calcul de la trace Maintenant, nous allons étudier la trace qui apparaît dans le premier membre de la formule (2.22). Pour cela, nous allons exploiter la forme explicite de ĥp que nous avons calculée en (2.12), en nous appuyant sur le fait que la valeur de la trace d’une matrice est indépendante de la base utilisée pour la représenter (ici Tr(hp Q) = Tr(ĥp Q̂)). Nous rappelons que la matrice Q appartient à l’ensemble Q défini dans la section 2.2.4, donc en particulier elle satisfait la propriété Q++ − Q−− ≥ Q2 . (2.39) Soit M = (mi,j ) une matrice N × N , alors pour tout k ∈ {1, . . . , m}, nous notons par M (k) la k-ième sous-matrice 2 × 2 sur la diagonale de M , c’est-à-dire m2k−1,2k−1 m2k−1,2k (k) M := . m2k,2k−1 m2k,2k En utilisant cette notation et grâce à la forme particulière du Hamiltonien ĥp donnée en (2.12), nous obtenons que m X π (k) (k) k Tr Q̂++ − Q̂−− Tr(ĥp Q̂) = T m k=1 m X π 2 (k) [(2.39) ⇒] ≥ k Tr (Q̂ ) T m k=1 m X π 2 (k) (k) = k (Q̂ )1,1 + (Q̂2 )2,2 . T m k=1 Or, nous pouvons calculer explicitement les termes (k) (Q̂2 )1,1 = N X l=1 2 |q̂l,2k−1 | et (k) (Q̂2 )2,2 = N X l=1 |q̂l,2k |2 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 101 et donc nous obtenons la majoration m N X π X Tr(hp Q) ≥ |q̂l,2k−1 |2 + |q̂l,2k |2 k T m k=1 l=1 m m X π X = |q̂2l,2k−1 |2 + |q̂2l−1,2k |2 k T m k=1 l=1 m m X π X |q̂2l−1,2k−1 |2 + |q̂2l,2k |2 . + k T m k=1 (2.40) l=1 Conclusion Finalement, on remplace (2.38) et (2.40) dans la formule de la différence des énergies (2.22) et l’on obtient F (Q) = 2Tr(hp Q) − N 8α2 X K Q2j + j=1 8α2 NK 2 N X Qj j=1 m X m m m π X X π X k k ≥2 |q̂2l,2k−1 |2 + |q̂2l−1,2k |2 + 2 |q̂2l−1,2k−1 |2 + |q̂2l,2k |2 T T m m k=1 k=1 l=1 l=1 2 ! m m N 2 X 8α2 K X π X 8α − k |q̂2l,2k−1 |2 + |q̂2l−1,2k |2 + Qj T K 4α2 m NK j=1 k=1 l=1 2 N m m X 8α2 X π X k Qj |q̂2l−1,2k−1 |2 + |q̂2l,2k |2 + =2 T m NK k=1 l=1 j=1 ≥ 0, puisque les Qj sont des nombres réels. Nous avons donc démontré que la fonction F est positive en Q = γ − γp pour toute matrice γ ∈ Γ. Or, la fonction F est définie comme la différence entre l’énergie de la molécule de polyacétylène en l’état γ et celle en l’état γp , ce qui implique que le projecteur orthogonal γp est un minimiseur global de l’énergie. Unicité des minimiseurs Dans cette section nous allons démontrer que les seuls minimiseurs globaux de l’énergie (−) (+) de la molécule de polyacétylène sont les deux projecteurs γp et γp correspondant à la configuration parfaitement dimérisée, à déplacement optimal ±um (voir le Théorème 6 pour plus de précisions). Nous rappelons que le projecteur pris comme référence dans nos calculs ci-dessus (+) était γp = γp . Dans cette section, nous allons garder l’exposant (±) pour expliciter la différence entre les deux projecteurs dimérisés optimaux. 102 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène (+) Supposons que nous avons une matrice Q = γ − γp ∈ Q, telle que F (Q) = 0. Alors, nous allons montrer que l’on a deux uniques possibilités : γ = γp(+) γ = γp(−) . ou Dans nos calculs précedents, quand nous avons montré que F (Q) ≥ 0 pour tout Q ∈ Q, nous avons rencontré plusieurs inégalités intermédiaires que l’on réécrit ci-dessous par commodité : 2 m X π sin [s + v/2] D1 (s, v) ≤ m s=1 m X sin2 ! π [s + v/2] m π T ms s=1 m X π s |D1 (s, v)|2 T m ! s=1 (2.41) ≤ 2 m X π [s + v/2] D2 (s, v) ≤ cos m s=1 m X cos2 s=1 T m X cos2 s=1 ! π s m π ms m X s=1 π s |D1 (s, v)|2 T m ! π [s + v/2] m π T ms ! (2.42) m X π s |D2 (s, v)|2 T m ! s=1 (2.43) ≤ m X cos2 s=1 T ! π s m π ms m X s=1 π T s |D2 (s, v)|2 m Q ∈ Q = Γ − γp ⇐⇒ Q++ − Q−− ≥ Q2 , ! (2.44) (2.45) et cette dernière inégalité implique en particulier que m X π (k) (k) k Tr Q̂++ − Q̂−− T m k=1 m X π 2 (k) k Tr (Q̂ ) ≥ T m k=1 Tr(ĥp Q̂) = [(2.45) ⇒] m 2m X π X = k |q̂l,2k−1 |2 + |q̂l,2k |2 T m k=1 l=1 m m X X π ≥ k |q̂2l,2k−1 |2 + |q̂2l−1,2k |2 . T m k=1 l=1 (2.46) Finalement, on a aussi l’inégalité 2m X j=1 !2 Qj ≥ 0. (2.47) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 103 Pour avoir tous les outils nécessaires en main, nous rappelons la définition des fonctions ( q̂2(s+v)−1,2s + q̂2(s+v),2s−1 1≤s≤m−v D1 (s, v) = q̂2(s+v−m)−1,2s − q̂2(s+v−m),2s−1 m − v + 1 ≤ s ≤ m ( q̂2(s+v)−1,2s − q̂2(s+v),2s−1 D2 (s, v) = q̂2(s+v−m)−1,2s + q̂2(s+v−m),2s−1 1≤s≤m−v m − v + 1 ≤ s ≤ m, la variable v allant de 0 à m − 1. Alors, nous aurons l’égalité F (Q) = 0 si et seulement si nous avons égalité dans chacune des inégalités larges écrites ci-dessus. Analysons-les une à une en supposant que l’on a égalité pour en tirer les conséquences sur la forme que doit avoir la matrice Q. 1. Vu que l’on a l’inégalité stricte m X sin2 s=1 π [s + v/2] m π T s m m π X cos2 m s < T π s m s=1 pour tout v = 0, 1, . . . , m − 1, alors pour avoir égalité en (2.42) il est nécessaire que D1 (s, v) = 0 pour tout v = 0, . . . , m − 1 et tout s = 1, . . . , m, (2.48) ce qui implique par ailleurs l’égalité en (2.41). 2. D’un autre côté, vu que l’on a m X cos2 s=1 π [s + v/2] m π T s m m π X cos2 m s ≤ T π s m s=1 avec égalité uniquement pour v = 0, donc pour avoir égalité en (2.44) il faut que D2 (s, v) = 0 pour tout v = 1, . . . , m − 1. (2.49) Et pour v = 0, l’égalité en (2.43) (Cauchy - Schwartz) donne une condition de proportionnalité π cos m s pour tout s = 1, . . . , m, D2 (s, 0) = η (2.50) π T m s pour une constante η ∈ C. En tenant compte de (2.48), de (2.50) et du fait que Q = Q∗ , le cas v = 0 implique que cos(πs/m) = −q̂2s−1,2s , q̂2s,2s−1 = iλ T πs m avec λ ∈ R à déterminer. 104 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 3. Pour avoir égalité en (2.46) il est nécessaire d’avoir q̂2l−1,2k−1 = q̂2l,2k = 0 pour tout l, k = 1, . . . , m. (2.51) En somme, les conditions (2.48) - (2.51) impliquent que la matrice Q̂ a la forme π cos( m 1) − |T π 1 | 0 ··· 0 0 (m ) cos( π 1) m 0 0 · · · 0 |T ( π 1)| m π cos( m 2) 0 0 · · · 0 0 0 − π |T ( m 2)| π 2) cos( m . Q̂ = iλ 0 0 0 ··· 0 0 π |T 2 | ( ) m .. ... . π cos( m m) 0 ··· 0 − |T π m | (m ) π cos( m m) 0 ··· 0 π |T ( m m)| (2.52) Notons que si Q̂ a la forme décrite ci-dessus, alors grâce aux relations (2.24) et (2.25) nous pouvons exprimer les Qj = =(qj,j−1 ) en fonction des coordonnées de Fourier (q̂i,j ) comme m Q2a−1 λ X cos2 (πs/m) , =− π m s=1 T m s m Q2a λ X cos2 (πs/m) . = π m s=1 T m s Ceci implique 2m X j=1 Qj = m X [Q2a−1 + Q2a ] = 0, a=1 et donc on a automatiquement égalité en (2.47). 4. Maintenant, on impose l’égalité en (2.45) : Q++ − Q−− = Q2 . On rappelle que par (+) (+) (+) (+) définition Q++ := (1 − γp )Q(1 − γp ) et Q−− := γp Qγp . π πs D’un côté, en tenant compte de l’expression T m s = 2t0 sin πs − i4αu cos m m (±) ainsi que des formules pour γp données en (2.19), nous pouvons calculer la matrice par blocs 2 × 2 diagonaux : pour s ∈ {1, . . . , m} 4αu cos2 (πs/m) 1 0 Q++ (s) − Q−− (s) = −λ . 0 1 T π s 2 m Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 105 D’un autre côté, d’après la formule (2.52) nous obtenons 2 1 0 2 2 cos (πs/m) (Q̂ )(s) = λ . T π s 2 0 1 m Donc Q++ − Q−− = Q2 si et seulement si λ = 0 ou λ = −4αu. Rappelons-nous que Q = γ − γp(+) , et que l’on connaît (voir (2.19)) γ̂p(+) (s) = 1 1 2 − T ( mπ s) |T ( mπ s)| − π T(m s) |T ( mπ s)| . 1 Ainsi, (+) – Le cas λ = 0 donne trivialement γ = γp . – Si λ = −4αu, et en rappelant que T (s) = 2t0 sin πs m − i4αu cos πs m , nous avons γ(s) = Q̂(s) + γp(+) (s) 0 i4αu cos(πs/m) |T ( mπ s)| = cos(πs/m) −i4αu T π s 0 | ( m )| +i4αu cos( πk 2t0 sin( πk m) m) 1 − 1 |T ( mπ s)| + 2t sin πk −i4αu cos πk (m) 2 − 0 (m) 1 |T ( mπ s)| −i4αu cos( πk 2t0 sin( πk m) m) 1 − 1 |T ( mπ s)| = 2t sin πk +i4αu cos πk ( ) ( ) 0 m m 2 − 1 |T ( mπ s)| = γp(−) (−) (+) Nous avons donc prouvé que F (Q) = 0 si et seulement si Q = 0 ou Q = γp − γp . (+) (−) D’où les deux seuls minimiseurs globaux de l’énergie sont les projecteurs γp et γp correspondant aux modèles parfaitement dimérisés optimaux dans le sens du Théorème 6. Ceci termine la démonstration du Théorème 7. 2.3 Etats Kink Nous allons considérer une chaîne infinie de polyacétylène. Nous montrerons l’existence des états de type kink, qui sont des états dont les configurations (δj )j∈Z sont telles que lim δj = ±2u∞ j→±∞ 106 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène où u∞ := limm→∞ um . Nous rappelons que um est défini comme l’unique solution positive de l’équation (2.17) pour chaque m. La preuve du fait que la suite (um )m est convergente sera faite plus bas. Le reste de cette section est rédigé en anglais car il s’agit d’une partie d’un article soumis pour publication à une revue scientifique. Il s’agit d’un travail commun avec Eric Séré, dont le titre original est “Variational study of the polyacetylene molecule : continuous and discrete approaches”. Les notations utilisées dans cette partie sont différentes de celles du reste de la thèse car elle est basée sur les notations de Kennedy et Lieb dans [23]. Alors, dans un souci de clarté, nous rappelons ici la relation entre les deux notations que nous avons expliquée brièvement dans la Remarque 1 de la Section III.1 de l’introduction. Equivalence entre les notations Le Hamiltonien électronique, que nous notons Heϕ , a pour seules coordonnées non nulles = (Heϕ )i+1,i = −ti+1,i , où ti+1,i = t0 − α(un+1 − un ). Dans [23], les auteurs notent ce Hamiltonien T et ses coordonnées non nulles Ti,i+1 = Ti+1,i = ti , avec ti = b − c(wi − d). Nous avons ainsi l’équivalence entre les constantes t0 = b et α = c. Ensuite, nous avons noté la distance à l’équilibre par la lettre a > 0 et le déplacement du i-ème noyau à partir de la position d’équilibre par ui . Ainsi, la distance entre deux noyaux contigus est, dans notre notation, égale à a + ui+1 − ui . Kennedy et Lieb notent la distance à l’équilibre d > 0 (d’où a = d) et la distance entre deux atomes consécutifs wi . Il est donc clair que un+1 − un = wi − d, d’où nous concluons que Heϕ = −T . Pour les configurations dimérisées, nous avons utilisé la notation t0 + (−1)i 2αu, alors que Kennedy et Lieb emploient l’écriture b + (−1)i δ. Ainsi, dans le cadre de la molécule dimérisée, nous avons l’égalité 2αu = δ. Les auteurs de [23] introduisent aussi la variable g = K/c2 , où K représente la constante de rigidité de la chaîne dans les deux notations. Par conséquent, la condition Kt0 ≥ α2 que nous avons imposée dans l’énoncé du Théorème 7, s’écrit comme gb ≥ 1 dans la notation de Kennedy et Lieb. (Heϕ )i,i+1 2.3.1 A model for dimerized chains In the whole paper, χA denotes the characteristic function of the set A and θA denotes the operator of multiplication by the characteristic function χA , i.e. for any sequence x = (xi ) , (θA x)i = χA (i)xi . We also denote by σp (X ) the Schatten classes in a Hilbert space X , and by k · kσp the associated norms. We consider a closed chain of 2N atoms. Our model is the same as in Kennedy and Lieb (KL) in [23]. The underlying electronic space is CZ/2N Z . To any 2N -tuple of real numbers t = (ti )i∈Z/2N Z we associate a Hamiltonian operator T whose coefficients are Ti,i+1 = Ti+1,i = ti and Ti,j = 0 otherwise (here i, j are defined modulo 2N ). We look for minimizers of the energy, which is a function of T and of a one-body electronic density matrix Γ = (Γi,j )i,j∈Z/2N Z . The matrix Γ has complex coefficients, is self-adjoint and satisfies 0 ≤ Γ ≤ 1. The formula for the energy is: Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 107 2N 1 X E (N ) (Γ, t) = g (ti − b)2 + 2Tr(T Γ). 2 i=1 If we fix t, this energy is minimal when Γ = χ(−∞,0) (T ) and the minimal energy is given by the following “reduced" functional 2N H (N ) 1 X (t) = g (ti − b)2 − Tr(|T |). 2 i=1 If, on the contrary, we fix Γ, then the minimum of the energy is attained by a unique vector t(Γ) of coordinates ti = b − g4 Re(Γi,i+1 ) and the minimal energy is given by the following “reduced" functional 2N F (N ) 8X (Γ) = 2bTr(T Γ) − (Re(Γi,i+1 ))2 , g i=1 1 1 = where T 1 is the Hamiltonian associated to the constant sequence ti = 1, i.e. Ti,i+1 P 2N 1 1 1 (T )i+1,i = 1 and Ti,j = 0 otherwise, hence 2bTr(T Γ) = 4b i=1 Re(Γi,i+1 ) . In the rest of the paper, we make the assumption gb > 1 . This assumption corresponds to realistic data from physics, as explained by Kennedy-Lieb. It implies that b > δ0 , where δ0 is the unique positive solution of the dimerization equation in the limit N → ∞ (see (2.17)) Z cos2 s 1 π 1 √ ds = g. 2 π 0 2 b2 sin s + δ 2 cos2 s The authors KL also define the following variables associated to the vector {ti } 2N 1 X x := ti 2N i=1 2N 1 X 2 y := t 2N i=1 i 2 2N 1 X z := ti ti+1 , 2N i=1 and they denote by hT 2 i the mean of T 2 under translations. This mean matrix can be written as hT 2 i = 2y 2 + zΩ, where Ω is the matrix whose only nonzero elements are Ωi,i+2 = Ωi+2,i = 1. They show rigorously that the minimum of H (N ) , in the class of 2N -periodic vectors t, is attained by exactly two configurations, tdim0 (N ) = b + (−1)i δN and tdim1 (N ) = i i i+1 b + (−1) δN , with δN → δ0 as N goes to infinity. Note that the dimerized ground state operators Tdim0 (N ) and Tdim1 (N ) have the same 2 square, which we shall denote by Tdim (N ). Similarly we shall denote by |Tdim (N )| their 2 common absolute value, which is the square root of Tdim (N ), and we shall denote by e(N ) (N ) their common energy, which is the minimum of H . 108 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 2.3.2 The kink problem The goal of this section is to prove the following Theorem 1. Suppose that gb > 1 and let t(N ) = (ti (N ))1≤i≤2N be a minimizer of H (N ) under the symmetry constraint ti = t1−i (∀i). Let T (N ) be the associated hamiltonian. Then, let N go to infinity. After extraction of a subsequence, for every i, ti (N ) = t1−i (N ) ∞ ∞ converges to a limit t∞ := (t∞ i = t1−i . The infinite sequence t i )i∈Z obtained in this way is a kink connecting the two dimerized states. More precisely, there is τ ∈ {0, 1} such that X i≥1 i+τ |t∞ δ0 |2 = i − b − (−1) X i+τ δ0 |2 < ∞ . |t∞ i − b + (−1) (2.53) i≤0 Moreover, denoting by T ∞ the operator in l2 (Z) associated with the sequence t∞ , the coefficients of |T (N )| converge pointwise to those of |T ∞ | as N → ∞: |T (N )|i,j = |T (N )|1−i,1−j → |T ∞ |i,j = |T ∞ |1−i,1−j (∀i, j) and t∞ is a relative energy minimizer in its symmetry class, which means the following: Given any sequence u = (ui )i∈Z in l1 (Z) such that ui = u1−i (∀i), 1 X ∞ ∞ ∆H(u) := g (ui + 2t∞ + U |) ≥ 0 . i − 2b)ui + Tr(|T | − |T 2 i∈Z As a consequence, denoting Γ∞ := χ(−∞,0) (T ∞ ), the following self-consistent equations hold: 4 ∞ t∞ i = b − Re(Γi,i+1 ) . g To prove Theorem 1, we start with some a priori estimates which use results from [23]. Lemma 1. There is a constant C > 0 such that, for all N , H (N ) (t(N )) − H (N ) (tdim1 (N )) ≤ C. Proof. Consider the characteristic functions χ0 = χ[1,N ]+2N Z and χ1 = χ[N +1,2N ]+2N Z and denote by θ0 , θ1 the associated multiplication operators. Define the test vector ttest (N ) by i i+1 ttest δN )χ1 (i) i (N ) = (b + (−1) δN )χ0 (i) + (b + (−1) and denote by Ttest (N ) the associated operator. Consider the projectors Γdim0 (N ) = χ(−∞,0) (Tdim0 (N )) , Γdim1 (N ) = χ(−∞,0) (Tdim1 (N )) and define the operator Γtest (N ) := θ0 Γdim0 (N )θ0 + θ1 Γdim1 (N )θ1 . Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 109 There is a constant C independent of N such that 2N 1 X test g (t (N ) − b)2 + 2Tr(Ttest (N )Γtest (N )) ≤ H (N ) (tdim1 (N )) + C . 2 i=1 i On the other hand, one easily checks that 0 ≤ Γtest (N ) ≤ 1 and that ttest i (N ) = hence ttest 1−i (N ), 2N 1 X test g (ti (N ) − b)2 + 2Tr(Ttest (N )Γtest (N )) ≥ H (N ) (ttest (N )) ≥ H (N ) (t(N )) , 2 i=1 and the Lemma is proved. Notice that Lemma 1, together with KL’s Lemma proved in [23], imply the following inequalities, where we put T (N ) = T and |Tdim (N )| = |Tdim | for the sake of simplicity: C ≥ H (N ) (t(N )) − H (N ) tdim1 (N ) h 1 2 i 1 X 2 (ti − b)2 − Tr hT 2 i1/2 + kT k−3 Tr T 2 − hT 2 i ≥ g − gN δN + Tr|Tdim | 2 i 8 2 = gN (y 2 − 2bx + b2 ) − Tr (2y 2 + zΩ)1/2 − gN δN + Tr|Tdim | (2.54) h i 1 2 + kT k−3 Tr T 2 − hT 2 i . (2.55) 8 The quantity (2.54) is positive as a consequence of equality (9) from [23], p. 1310, and the discussion preceding it. The quantity (2.55) being also positive, we conclude that 2 C ≥ 2gN (y 2 − 2bx + b2 ) − Tr (2y 2 + zΩ)1/2 − 2gN δN + Tr|Tdim | (2.56) and that 1 C ≥ kT k−3 Tr T 4 − hT 2 i2 , 8 (2.57) after applying the general equality Tr((A − hAi)2 ) = Tr(A2 − hAi2 ) to A = T 2 in line (2.55). We use the latter estimates to prove the following two lemmas. P P 2 1 1 2 t (N ), y (N ) = ti (N ), and z(N ) = Lemma 2. The sequences x(N ) = i 2N 2N P 1 2 t (N )t (N ) converge to x , y , and z respectively, with i i+1 dim dim dim 2N xdim := b 2 ydim := 12 [(b + δ0 )2 + (b − δ0 )2 ] = b2 + δ02 zdim := (b + δ0 )(b − δ0 ) = b2 − δ02 . The convergence takes place at speed O N1 for z(N ), and at speed O √1N for x(N ) and y 2 (N ). As a consequence, 2 k < T (N )2 > −Tdim (N )kσ2 = O(1)N →∞ . 110 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Proof. We rewrite estimate (2.56) in the following way 1 1 ψN (x, y, z) := g(y 2 − 2bx + b2 ) − Tr (2y 2 + zΩ)1/2 2 2N 1 2 1 1 ≤ gδN − Tr|Tdim (N )| + C 2 2N 2N 1 = min ψN + C. 2N In reference [23] the authors define the variable si = x − ti so that y 2 = x2 + and by the Cauchy-Schwartz inequality they obtain 1 X 1 X 2 z = x2 + si si+1 ≥ x2 − si = 2x2 − y 2 . 2N 2N (2.58) 1 2N P s2i (2.59) Note that the inequality x2 ≤ y 2 also holds. Let us distinguish two cases depending on the sign of 2x2 − y 2 . Case 1: 2x2 − y 2 > 0 (with x2 ≤ y 2 as mentioned before). Using the fact that ψN is an increasing function of |z| (see [23]), we have in this case ψN (x, y, z) ≥ ψN (x, y, 2x2 −y 2 ). 1 Tr(2y 2 + zΩ) is differentiable, We let z̄ := 2x2 − y 2 > 0. Since the function z 7→ − 2N convex, even, and increasing in |z|, this is also true for the function z 7→ ψN (x, y, z) with x, y fixed, so we infer that ∀z > 0, ∂ ψN (x, y, z) − ψN (x, y, 0) ψN (x, y, z) ≥ > 0. ∂z z Thus, if z > z̄ > 0, we have ψN (x, y, z) − ψN (x, y, z̄) ≥ ∂ ψN (x, y, z̄)(z − z̄) = β(z − z̄), ∂z with β > 0. In particular, this implies that 0 ≤ zN − z̄N = O(1/N ). Case 2: 2x2 − y 2 ≤ 0. The function ψN being increasing in |z| , we get the lower bound ψN (x, y, z) ≥ ψN (x, y, 0). Also, we remark that inf 2x2 −y 2 ≤0 ψN (x, y, 0) = inf ψN (x, y, 0) ≥ inf ψN (x, y, z) + e, 2 2 2x =y with e > 0, so this case is not optimal and we should restrict ourselves to case 1. From now on we therefore assume that 2x2 > y 2 ≥ x2 . From (2.58) we get h 1/2 i 1 1 ψN (x, y, 2x2 − y 2 ) = g(y 2 − 2bx + b2 ) − Tr 2y 2 + (2x2 − y 2 )Ω 2 2N 1 ≤ min ψN + C. 2N Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 111 As a function of the variables X := x2 and Y := y 2 , ψN (x, y, 2x2 − y 2 ) is written as h √ 1/2 i 1 1 φN (X, Y ) := g(Y − 2b X + b2 ) − Tr 2Y + (2X − Y )Ω . 2 2N The function φN is strictly jointly convex in X, Y in the sense that Hess(φN ) > 0 at any point (X,Y) in the convex domain {2X > Y ≥ X > 0}. Moreover, we have that inf φN (X, Y ) ≥ inf φN (X, Y ) + e0 , 2X=Y 2X>Y with e0 > 0. 2 2 Thus there is a unique minimizer (Xmin , Ymin ) = (x2min , ymin (N )) = (b2 , b2 + δN ) of φN 2 in the region {2X > Y }, and min{2X>Y } φN = min ψN . Here, ymin (N ) is associated to the dimerized configuration that minimizes the energy for 2N atoms. 2 Notice that the couple (b2 , b2 + δN ) indeed belongs to the domain {2X > Y ≥ X > 0} when N is large enough, for the following two reasons. On the one hand we have assumed that gb > 1, which implies that b > δ0 ; and on the second hand, we have that δN = δ0 + O(1/N ). To prove the latter equality we notice that, for any δ > 0, the function fδ : [0, π] → R s 7→ √ cos2 s b2 sin2 s + δ 2 cos2 s is of class C 1 and its derivative is bounded independently of δ, when δ stays bounded away from zero. Hence Z π 2N 1 X 1 πk fδ (s)ds = O(1/N ). fδ − 2N 2N π 0 k=1 But we know, from equation (2.17) used to define δN , that Z 2N 1 X πk 1 π fδ = fδ0 (s)ds, 2N k=1 N 2N π 0 thus Z π Z π 1 1 = O(1/N ). f (s)ds − f (s)ds (2.60) δ δ 0 N π π 0 0 Rπ Now, the fonction 0 < δ 7→ π1 0 fδ (s)ds is of class C 1 and its derivative is strictly negative. So (2.60) implies that δN = δ0 + O(1/N ). Finally, from the previous analysis we conclude that there exist two positive constants α and r independent of N , such that 2 ψN (x, y, 2x2 − y 2 ) − ψN (xdim ,ydim (N ), 2x2dim − ydim (N )) 2 2 2 (N ))2 , r2 . (2.61) ≥ α min (x − xdim )2 + (y 2 − ydim 112 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène To prove this estimate, we just need to bound the least eigenvalue of Hess(X,Y ) (φN ) from 2 below by α, for all X, Y such that (X − x2dim )2 + (Y − ydim (N ))2 ≤ r2 . To obtain this bound we proceed as follows. The eigenvalues of Ω are λk = 2 cos(2πk/N )(with eigenvectors vk = ((wk )i )i∈Z/2N Z , πk where wi = ei N ) for 0 ≤ k ≤ N − 1, and each λk has multiplicity 2. So, for 0 < X < Y , we have 1 KN (X, Y ) := − Tr (2Y + (2X − Y )Ω)1/2 2N √ N −1 2X =− (2 cos(2πk/N )X + (1 − cos(2πk/N ))Y )1/2 N k=0 From the expression √ 1 ΦN (X, Y ) = g(Y − 2b X + b2 ) + KN (X, Y ), 2 we deduce that Hess(X,Y ) (ΦN ) = b 2X 3/2 0 0 AN BN + , BN CN 0 where ∂2 KN (X, Y ) ∂X 2 √ N −1 −3/2 2 X = 2 cos(2πk/N )X + (1 − cos(2πk/N ))Y cos2 (2πk/N ), N k=0 AN = ∂2 BN = KN (X, Y ) ∂X∂Y √ N −1 −3/2 2 X 2 cos(2πk/N )X + (1 − cos(2πk/N ))Y = cos(2πk/N )(1 − cos(2πk/N )), 2N k=0 and ∂2 KN (X, Y ) ∂Y 2 √ N −1 −3/2 2 X = 2 cos(2πk/N )X + (1 − cos(2πk/N ))Y (1 − cos(2πk/N ))2 . 4N k=0 CN = Note that these three quantities are convergent Riemann sums, hence AN → A∞ , BN → B∞ , and CN → C∞ , as N goes to infinity, with A∞ , C∞ > 0. Therefore, for large enough N , CN ≥ C∞ /2. Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 113 Now, for each N and for any vector v = (h, k)T ∈ R2 we have that Hess(X,Y ) (KN )v, v = AN h2 + 2BN hk + CN k 2 ≥ 0. We choose r = x2dim /2 = b2 /2. If |X − x2dim | ≤ r then Hess(X,Y ) (ΦN )v, v = ≥ [(2.62) ⇒] 1 2 h b2 b 2X 3/2 √ ≥ (2.62) √ 2 . Let 0 := b2 2−1 . b2 b − 0 h2 + (AN + 0 )h2 + 2BN hk + CN k 2 2X 3/2 √ 2 √ AN + 0 AN + 0 √ √ + AN h + 2BN h AN AN AN + CN 1 − k2 AN + 0 1 2 0 ≥ 2 h + CN k2 . b AN + 0 √ AN √ k AN + 0 √ ! + CN AN √ k AN + 0 But we have seen that for large enough N , CN ≥ C∞ /2. So there is α > 0 independent of N , such that (2.61) holds. √ √ 2 Consequently, we have proved that x − xmin = O(1/ N ) and y 2 − ymin = O(1/ N ) and the lemma follows. Let us apply all the above results to prove Lemma 3. The estimate 2 Tr T 4 (N ) − T 2 (N ) ≤M holds for some constant M independent of N. Hence 2 kT 2 (N ) − Tdim (N )kσ2 = O(1)N →∞ . Proof. From inequality (2.57) we obtain kT (N )k−3 Tr T 4 (N ) − hT 2 (N )i2 ≤ 8C, but 3/4 kT (N )k3 = T 4 (N ) 2 2 3/4 ≤ T 4 (N ) − T 2 (N ) + T 2 (N ) 2 2 3/4 3/4 ≤ T 4 (N ) − T 2 (N ) + T 2 (N ) From the equalities (see [23]) T 2 (N ) = 2y 2 (N ) + z(N )Ω(N ) !2 114 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène and σ T 2 (N ) = 2y 2 (N ) + 2z(N ) cos 2θ, θ ∈ Θ , for a certain set of angles Θ of no importance here, we infer that 2 T (N ) = sup σ T 2 (N ) ≤ 2y 2 (N ) + 2|z(N )| 2 + 2zdim → 2ydim 2 = 2b + 2δ02 + 2b2 − 2δ02 = 4b2 . Hence, the sequence (khT 2 (N )ik)N ≥0 is bounded. Let B be its upper bound and set xN := Tr [T 4 (N ) − hT 2 (N )i2 ]. We have 8C ≥ kT (N )k−3 Tr T 4 (N ) − hT 2 (N )i2 ≥ xN 3/4 xN + B 3/2 . It follows that there is M < +∞ such that xN ≤ M for all N . We notice that Lemma 3 tells us that i Xh 2 2 2 2 2 ti (N ) + ti+1 (N ) − 2ydim + 2 (ti (N )ti+1 (N ) − zdim ) ≤ M, (2.63) i by the definition of T 2 and hT 2 i in terms of the variables x, y, z. Now, we have 1 X 1 X 2 si si+1 + si 2N 2N 1 X = (si + si+1 )2 4N 1 X = (ti (N ) + ti+1 (N ) − 2x(N ))2 . 4N zN − z̄N = This, together with the estimate zN − z̄N = O(1/N ) from Lemma 2, implies that X (ti (N ) + ti+1 (N ) − 2x(N ))2 = O(1)N →∞ . Finally, we have proved X X (ti (N ) + ti+1 (N ) − 2b)2 = (ti (N ) + ti+1 (N ) − 2x(N ))2 + 2N (2x(N ) − 2b)2 = O(1) Furthermore, denoting ρi (N ) := (ti (N ) + ti+1 (N ) − 2b)2 + (ti (N )ti+1 (N ) − zdim )2 (2.64) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 115 we get from (2.63) and (2.64): 2N X ρi (N ) < M 0 . (2.65) i=1 The next lemma tells us that the smallness of ρ(N ) on an interval implies that t(N ) is close to one of the two dimerized states on this interval. Lemma 4. There exist γ > 0 and C > 0 such that: given N ≥ 1 and any pair of integers I < J ∈ Z, if ∀i ∈ [I, J − 1] , ρi (N ) ≤ γ then there is τN ∈ {0, 1} such that for all i ∈ [I, J]: ti (N ) − b − (−1)i+τN δ0 2 ≤ Cρi (N ). We shall say that [I, J] is of type 1 when τN = 0, of type 2 when τN = 1. Proof. In the interval [I, J] each couple (ti (N ), ti+1 (N )) solves the second-degree equation X 2 − Si (N )X + Pi (N ) = 0, where Si (N ) = ti (N ) + ti+1 (N ) = 2b + λi (N ) Pi (N ) = ti (N )ti+1 (N ) = zdim + µi (N ) ρi (N ) = λ2i (N ) + µ2i (N ) ≤ γ Si (N )±√∆i (N ) , with ∆i (N ) = Si2 (N ) − 4Pi (N ). Note that Hence, {ti (N ), ti+1 (N )} = 2 √ Si (N )± ∆i (N ) are differentiable functions of (λi (N ), µi (N )) near (0, 0), taking the roots 2 distinct values b ± δ0 at (0, 0). So, for γ small enough, there is a constant C such that exactly one of the following two estimates holds: p |ti (N ) − b − (−1)i δ0 | + |ti+1 (N ) − b − (−1)i+1 δ0 | ≤ Cρi (N ) or p |ti (N ) − b − (−1)i+1 δ0 | + |ti+1 (N ) − b − (−1)i+2 δ0 | ≤ Cρi (N ). Assume, for instance, that the first estimate holds for i = I. Then the same estimate holds for any i ∈ [I, J], by induction on i. In this case we define τN = 0. Similarly, if the second estimate holds for i = I then it holds everywhere in the interval, and we define τN = 1. In both cases, Lemma 4 is true. Now, the estimate (2.65) gives us a bound M 0 independent of N on the l1 norms of the 2N -tuples ρ(N ) := (ρi (N ))i∈Z/2N Z . It also provides a uniform l∞ bound on the 2N -tuples t(N ). So, after extraction of a subsequence, we may impose the pointwise 116 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 2 2 ∞ ∞ ∞ ∞ ∞ − z , Fat − 2b + t + t := t denoting ρ convergence ti (N ) → t∞ dim i+1 i i+1 i i i , and, P 0 ∞ tou’s lemma guarantees that i∈Z ρi ≤ M . So, using Lemma 4 and remembering that ∞ t∞ 1−i = ti , we get the kink property (2.53) of Theorem 1. Now, the pointwise convergence 2 [T (N )]i,j → [(T ∞ )2 ]i,j obviously holds, but the pointwise convergence |T (N )|i,j → |T ∞ |i,j is less obvious. In order to study the absolute values of T (N ) and T ∞ , we shall use the classical formula for the absolute value of a self-adjoint operator A , Z 1 |A| = A2 (ω 2 + A2 )−1 dω . (2.66) π R To exploit this formula, we shall need a decay estimate on the coefficients of the matrices (ω 2 + T 2 )−1 away from the diagonal. 2 Note that Tdim (N ) commutes with the translation i → i+1, and in the Fourier domain it is a multiplication operator by a nonzero 2π-periodic scalar function mN (p), which is a complex-analytic function of the frequency p in a strip of the form {p : |Im(p)| < ρ} for some ρ > 0 independent of N and ω. Moreover, there is an estimate in this strip of the form Re(mN (p)) ≥ r for some positive constant r independent of N and ω. As a 1 consequence, there holds the estimate |(ω 2 + mN (p))−1 | ≤ r+ω 2 in the complex strip. So the Fourier coefficients cl of the analytic and periodic function (ω 2 + mN (p))−1 satisfy a decay estimate of the form C |cl | ≤ e−ρ l , l ∈ Z . 2 1+ω As a consequence, 2 2 (ω + Tdim (N ))−1 i,j ≤ C e−ρ dist(i−j,2N Z) . 1 + ω2 Similarly, for N infinite we have 2 2 (ω + Tdim )−1 i,j ≤ C e−ρ |i−j| . 2 1+ω For arbitrary 2N -tuples s, we are able to prove the following (weaker) estimate: Lemma 5. Let M , ω0 > 0 . Then there are two constants C, ρ > 0 depending only on M , ω0 , such that, for any ω ≥ ω0 : 1. For all N ≥ 1, if s ∈ RZ/2N Z satisfies (∀ 1 ≤ i ≤ 2N ) : |si | ≤ M , then C (∀ i, j ∈ Z) : (ω 2 + S 2 )−1 i,j ≤ 2 e−ρ dist (i−j,2N Z) . ω 2. For an infinite chain, if s ∈ RZ satisfies (∀i ∈ Z) : |si | ≤ M , then C (∀ i, j ∈ Z) : (ω 2 + S 2 )−1 i,j ≤ 2 e−ρ |i−j| . ω (2.67) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 117 Proof. The proofs for finite and infinite chains are similar, so we only treat the case of an infinite chain: s ∈ RZ and S acts in l2 (Z, C). We first introduce a smooth function η : R → [0, 1] satisfying η(0) = 0, η(1) = 21 , η(2) = 1 and 0 ≤ η 0 (t) ≤ 1 for all t. . This function of t is even and Given m ∈ N and R ≥ 4, let ηm,R (t) := η |t|−mR R 1 satisfies ηm,R ≡ 0 on [−mR, mR], 2 ≤ ηm,R ≤ 1 on [(m + 1)R, (m + 2)R], ηm,R ≡ 1 on 0 [(m + 2)R, ∞]. Moreover, |ηm,R | ≤ R1 , hence |ηm,R (t + 2) − ηm,R (t)| ≤ R2 . Take an arbitrary j ∈ Z . Let ej = (δi,j )i∈Z and consider the vector V := (ω 2 + S 2 )−1 ej . The coordinates of V are Vi = (ω 2 + S 2 )−1 i,j . Now, for each integer m ≥ 1 we define the vector V m of coordinates Vim = ηm,R (i − j)Vi . We have ηm,R (i − j) (ω 2 + S 2 )V i = 0, hence 2 (ω + S 2 )V m i = ξim with ξim := si si+1 (ηm,R (i + 2 − j) − ηm,R (i − j) Vi+2 + si si−1 (ηm,R (i − 2 − j) − ηm,R (i − j) Vi−2 hence, remembering that |si−1 |, |si |, |si+1 | ≤ M , we get |ξim | ≤ 2M 2 (|Vi+2 | + |Vi−2 |) . R When m ≥ 2, we see that ξim = 0 when |i − j| ≤ mR − 2, while for all (i, j) such that |i − j| ≥ mR − 2 we have ηm−1,R (i ± 2 − j) ≥ 21 , since R ≥ 4. As a consequence, |ξim | 4M 2 m−1 m−1 ≤ (|Vi+2 | + |Vi−2 |) . R Finally, we get the estimate k(ω 2 + S 2 )V 1 k2 ≤ 4 M2 kV k2 R and for all m ≥ 2 8 M 2 m−1 kV k2 . R Clearly, k(ω 2 + S 2 )−1 k ≤ ω12 , hence kV k2 ≤ ω12 and, by induction on m ≥ 1: k(ω 2 + S 2 )V m k2 ≤ 1 kV k2 ≤ 2ω 2 m 8M 2 ω2R m . Assuming ω ≥ ω0 and choosing R > 8 M 2 /ω02 we easily derive the decay estimate (2.67). 118 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène Thanks to Lemma 5, we are now able to prove the desired pointwise convergence result: Lemma 6. Take a finite constant M . Assume that we are given a sequence of 2N -tuples s(N ) ∈ RZ/2N Z such that for all i, N : |si (N )| ≤ M . Assume, moreover, that for each i ∈ Z, the sequence si (N ) has a limit s∞ i as N → ∞. Then: ∀i, j ∈ Z , |S(N )|i,j → |S ∞ |i,j . Proof. First note that for any bounded, self-adjoint operator A, the integrand in R 2of all, 1 2 |A| = π R A (ω + A2 )−1 dω has operator norm kA2 (ω 2 + A2 )−1 k ≤ min{1, kAk2 /ω 2 }. So, by Lebesgue’s dominated convergence theorem, we just have to prove that for each ω > 0 and any i, j ∈ Z, 2 (ω + S 2 (N ))−1 i,j → (ω 2 + (S ∞ )2 )−1 i,j as N → ∞ . So, from now on, we fix ω > 0 . We denote L(N ) := (ω 2 + S 2 (N ))−1 (acting in CZ/2N Z ) and L∞ := (ω 2 + (S ∞ )2 )−1 (acting in l2 (Z, C)). For each positive integer N , we consider the infinite sequence (s∞,N ) such that s∞,N i i+2N = ∞,N ∞,N ∞,N ∞ si (∀i ∈ Z) and si = si when −N < i ≤ N . Let (Si,j )i,j∈Z be the associated operator. By construction, S ∞,N , considered as an operator in l2 (Z, C), commutes with the shift σ2N : (zi ) → (zi−2N ). So the operator L∞,N := (ω 2 + (S ∞,N )2 )−1 also commutes with σ2N . Again by construction, the coefficients of S ∞,N converge pointwise to those of S ∞ as N → ∞. So, writing L∞,N − L∞ i,j = L∞,N ((S ∞ )2 − (S ∞,N )2 )L∞ i,j one easily proves, thanks to Lemma 5, that the coefficients of L∞,N converge pointwise to those of L∞ as N → ∞. Now, for each N ≥ 1 we define a new matrix (S̃i,j (N ))i,j∈Z/2N Z by the formula P ∞,N S̃i,j (N ) := m∈Z Si+2N m, j . Note that only a finite number of terms in this series are nonzero, so that there is no problem of convergence. Similarly, we define L̃i,j (N ) := P ∞,N m∈Z Li+2N m, j . This time we have an infinite series, but thanks to Lemma 5 its terms decay exponentially, and the coefficients of L̃(N ) − L∞,N converge pointwise to zero as N → ∞. By construction, L̃(N ), considered as an operator in CZ/2N Z , coincides with (ω 2 + (S̃(N ))2 )−1 . Our last step is to write L(N ) − L̃(N ) i,j = L(N ) (S̃ 2 (N ) − S 2 (N ))L̃(N ) i,j . From this we see, thanks once again to Lemma 5, that the coefficients of L(N ) − L̃(N ) converge pointwise to zero as N → ∞. Combining the successive pointwise convergence results obtained above, we finally get the desired convergence Li,j (N ) → L∞ i,j . Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 119 We recall that the assumptions of Lemma 6 are satisfied by our minimizers t(N ), up to extraction of a subsequence. So we can conclude that ∀i, j ∈ Z , |T (N )|i,j → |T ∞ |i,j . Now, our goal is to prove that t∞ is a relative energy minimizer in its symmetry class. For this purpose, we need a better understanding of the possible lack of invertibility of 2 2 2 T 2 (N ) and (T ∞ )2 . We recall that Tdim (N ) = 2(b2 + δN )1 + (b2 − δN )ΩN , with δN → δ0 2 as N goes to infinity. Similarly, for the infinite chain Tdim = 2(b2 + δ02 )1 + (b2 − δ02 )Ω. Lemma 7. There is a positive constant κ such that, when N is large enough or in the case of the infinite chain, if s satisfies (s2i +s2i−1 −2b2 −2δ02 )2 +2(si si+1 −b2 +δ02 )2 ≤ κ (∀i), then S is invertible and its inverse has operator norm less than 2/δ02 . Proof. We only give the proof in the case s ∈ CZ , the case “N large" being similar. In the 2 Fourier domain, Tdim is a multiplication operator by a function of the form b2 cos2 (k) + 2 δ02 sin2 (k). Since δ0 < b, the smallest value of this multiplier is δ02 , so the inverse of Tdim 2 has operator norm 1/δ0 . Now, if κ is chosen small enough, then the hypothesis on s 2 implies that kS 2 − Tdim k ≤ δ02 /2, hence the lemma. The next lemma tells us that T 2 (N ) has a bounded inverse with bound at most 4/δ02 on the orthogonal complement of a subspace of CZ/2N Z the dimension of which is bounded independently of N . Lemma 8. There is a finite constant D such that, if N is large enough, then the rank of 2 ) is at most D. χ[0,δ02 /4] (T 2 (N )) is at most D. Similarly, the rank of χ[0,δ02 /4] (T∞ Proof. We first treat the case of an infinite chain, which is easier. We consider a normalized 2 with eigenvalue λ ≤ δ02 /4. We follow the same kind of strategy as in eigenvector V of T∞ the proof of Lemma 5, in order to get a decay estimate on the components of V . We shall only prove the decay for positive values of i, the case of negative values being similar. We take the same function η as in the proof of Lemma 5, but our definition of ηm,R is slightly different: we take ηm,R (t) := η( t−mR ), so that ηm,R vanishes on the whole interval R (−∞, mR]. We define a sequence of vectors V m by Vim = ηm,R (i)Vi for m ≥ 1. We know i+τ that there is τ ∈ {0, 1} such that t∞ δ0 → 0 as i → ∞. Now, we take a large i − b − (−1) i+τ integer R0 and we define si := b + (−1) δ0 (∀i < R0 ) and si := t∞ i (∀i ≥ R0 ). Then, if R0 is chosen large enough, (s2i + s2i−1 − 2b2 − 2δ02 )2 + 2(si si+1 − b2 + δ02 )2 ≤ κ (∀i) . So Lemma 7 tells us that S 2 is invertible and that the operator norm of its inverse is less than 2/δ02 . We now take R > R0 . Proceeding as in the proof of Lemma 5 we find estimates of the form k(S 2 − λ)Vi1 k2 ≤ O(1/R), k(S 2 − λ)Vim k2 ≤ O(1/R)kVim−1 k2 (∀m ≥ 2). But the norm operator of (S 2 − λ)−1 is less than 4/δ02 . So, choosing R large enough, we get a decay estimate of the form |Vi | ≤ C e−α i . The positive constants C, α do not depend on λ, and arguing in the same way for negative values of i, we get the estimate |Vi | ≤ C e−α|i| 120 Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 2 ). This implies that the unit ball of for all normalized vectors in the range of χ[0,δ02 /4] (T∞ 2 this range is compact, so χ[0,δ02 /4] (T∞ ) has finite rank. Now, we shortly explain how these ideas can be adapted to the case of a large finite chain. Combining Lemmas 3 and 4 we find that for any > 0, there are a positive constant A , an integer p ≥ 1 independent of N (for N large enough) and p + 1 sequences of integers 0 = i0N < i1N < · · · < ipN = N such that: k 1. limN →∞ (ik+1 N − iN ) = ∞ for 0 ≤ k ≤ p − 1. 2. For each 0 ≤ k ≤ p − 1 there is τk ∈ {0, 1}, such that, when i varies in the interval k+1 k i+τk (ikN , ik+1 δ0 | < . N ), if dist(i, {iN , iN }) ≥ A then |ti (N ) − b − (−1) Now, we fix a small enough value of , and we denote P = p . By arguments similar to those used for the infinite chain, we can get a decay estimate of the form |Vi | ≤ C exp [−α dist(|i|, {i0N , i1N , · · · , iPN } + 2N Z)] for all normalized vectors V in the range of χ[0,δ02 /4] (T 2 (N )). This implies that for any r > 0, the unit ball of this range can be covered by a finite number q(r) of balls of radius r where q(r) is independent of N . So there is a constant D such that for any N , the rank of χ[0,δ02 /4] (T 2 (N )) is at most D. Now we consider a sequence u ∈ l1 (Z, R) such that u1−i = ui (∀i ∈ Z). Given N ≥ 1, we call u(N ) the 2N -periodic sequence such that ui (N ) = ui (∀ 1 − N ≤ i ≤ N ). We have the following result: Lemma 9. The difference (|T ∞ + U | − |T ∞ |) is a trace-class operator in l2 (Z, C), and for any > 0 there is ∆ such that, for any N large enough, denoting J := {i ∈ Z : dist(i, 2N Z) ≥ ∆ } , and recalling our notation θA for the operator of multiplication by χA , we have k(|T (N ) + U (N )| − |T (N )|)θJ kσ1 (CZ/2N Z ) ≤ . (2.68) Proof. We take ω0 > 0 (to be chosen later), we denote S(N ) := T (N ) + U (N ) and using (2.66) we write |S(N )| − |T (N )| = π1 (A(N ) + B(N ) + C(N )) where: Z A(N ) := ω 2 (ω 2 + S 2 (N ))−1 (S 2 (N ) − T 2 (N ))(ω 2 + T 2 (N ))−1 dω (2.69) |ω|≥ω0 Z B(N ) := S 2 (N )(ω 2 + S 2 (N ))−1 − T 2 (N )(ω 2 + T 2 (N ))−1 χ[0,δ02 /4] (T 2 (N ))dω |ω|≤ω0 (2.70) Z C(N ) := |ω|≤ω0 ω 2 (ω 2 + S 2 (N ))−1 (S 2 (N ) − T 2 (N ))(ω 2 + T 2 (N ))−1 χ(δ02 /4,∞) (T 2 (N ))dω (2.71) Chapitre 2. Modèle discret de la molécule de polyacétylène 121 The operator norms of ω 2 (ω 2 +S 2 (N ))−1 , S 2 (N )(ω 2 +S 2 (N ))−1 , T 2 (N )(ω 2 +T 2 (N ))−1 are at most 1, and the operator norm of (ω 2 + T 2 (N ))−1 χ(δ02 /4,∞) (T 2 (N )) is at most 4/δ02 . Moreover the trace norm of S 2 (N ) − T 2 (N ) is bounded independently of N , and kχ[0,δ02 /4] (T 2 (N ))kσ1 ≤ D thanks to Lemma 8. So, choosing ω0 small enough (independently of N ), we can impose kB(N )kσ1 + kC(N )kσ1 ≤ /2 . It remains to study A(N ). Since ω0 is now fixed, we can apply Lemma 5 to (ω 2 + S 2 (N ))−1 and (ω 2 + T 2 (N ))−1 , and we easily find ∆ such that kA(N )θJ kσ1 (CZ/2N Z ) ≤ /2 . This proves (2.68). Using a similar decomposition |T ∞ +U ∞ |−|T ∞ | = π1 (A∞ +B ∞ +C ∞ ), one shows in the same way that this operator is trace-class, and the lemma is proved. Now, by Lemma 6 applied to T (N ) and T (N ) + U (N ), we see that for each i ∈ Z, (|T (N ) + U (N )| − |T (N )|)i,i → (|T ∞ + U ∞ | − |T ∞ |)i,i . Combining this with the uniform estimate (2.68), we conclude that Tr(|T (N )| − |T (N ) + U (N )|) → Tr(|T ∞ | − |T ∞ + U |) as N → ∞ and finally H (N ) (t(N ) + u(N )) − H (N ) (t(N )) → ∆H(u) . But t(N ) is an energy minimizer in its symmetry class, so H (N ) (t(N ) + u(N )) − H (N ) (t(N )) ≥ 0 (∀N ) , hence ∆H(u) ≥ 0. We have proved that t∞ is a relative minimizer in its symmetry class. Our last task is to prove that t∞ satisfies the self-consistent equations. We recall that Γ := χ(−∞,0) (T ∞ ). Taking as before u ∈ l1 (Z, R) with u1−i = ui (∀i ∈ Z), we denote Q := Γ∞ − χ(−∞,0) (T ∞ + U ). We know that U and (|T ∞ | − |T ∞ + U |) are trace-class. But |T ∞ | = T ∞ (1 − 2Γ∞ ) and |T ∞ + U | = (T ∞ + U )(1 − 2Γ∞ + 2Q), hence ∞ |T ∞ | − |T ∞ + U | = −U + 2U Γ∞ − 2(T ∞ + U )Q . Remembering that Γ∞ is a projector, we see that tr((T ∞ + U )Q) ≥ 0. Moreover the diagonal coefficients of U are zero, so tr(U ) = 0 . As a consequence, 2tr(U Γ∞ ) ≥ tr(|T ∞ | − |T ∞ + U |) and finally 1 X ∞ g (ui + 2t∞ i − 2b)ui + 2tr(U Γ ) ≥ ∆H(u) ≥ 0 . 2 i∈Z P ∞ ∞ But tr(U Γ∞ ) = 2 i∈Z Re(Γ∞ i,i+1 )ui , with ui = u1−i and Γi,i+1 = Γ1−i,−i (∀i) , hence X1 ∞ gu2i + (4Re(Γ∞ i,i+1 ) + g(ti − b))ui ≥ 0 . 2 i≥1 ∞ Varying u, we conclude that 4Re(Γ∞ i,i+1 ) + g(ti − b) = 0 (∀i). This ends the proof of Theorem 1. Annexe A Quelques résultats auxiliaires Dans cet annexe nous avons inclus les démonstrations de deux lemmes. Nous les plaçons à part car ils sont de nature purement technique et n’ont pas de lien direct avec les modèles traités dans nos travaux. Dans un souci de clarté, nous recopions ici les énoncés des deux lemmes et nous donnons ensuite leur preuve. Contenu A.1 Preuve du Lemme 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 A.2 Preuve du Lemme 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 A.1 Preuve du Lemme 2 Lemme. La fonction π-périodique m m π π X sin2 m sin2 m s+x s+x 1X πs q Sm (x) := = T 2 s=1 t2 sin2 πs + 4α2 u2 cos2 m s=1 0 m m πs m atteint son maximum global en x = π/2 et son minimum global en x = 0 sur [0, π[ si et seulement si Kt0 ≥ α2 . Démonstration. Tout d’abord, nous aurons besoin de l’inégalité de réarrangement suivante : soit a, b, c, d ∈ R tels que a > b et c > d, alors ac + bd > ad + bc. En effet, nous avons sous ces hypothèses que (a − b)(c − d) > 0, et en développant ce produit nous obtenons l’inégalité recherchée. Nous notons également que la fonction Sm (x) est de classe C ∞ (R). Calculons sa dérivée 123 124 Annexe A. Quelques résultats auxiliaires première en x ∈ [0, π[ m X π s m π + x cos s + x 0 m q (x) = Sm 2 πs 2 2 t0 sin m + 4α u2m cos2 πs s=1 m m π π X cos2 m s − sin2 m s q = sin x cos x t20 sin2 πs + 4α2 u2m cos2 s=1 m sin πs m . (A.1) Appelons σ m la somme apparaissant dans cette dérivée et étudions-la séparément. Nous rappelons que l’entier m est pair et donc nous pouvons écrire σm = m X cos2 q t20 sin2 π ms πs m − sin2 π ms + 4α2 u2m cos2 m/2 π π X cos2 m s − sin2 m s q = 2 2 2 t20 sin2 πs s=1 m + 4α um cos s=1 πs m m/2 πs m + cos2 X s=1 q t20 sin2 π ms πs m + π 2 π 2 + 4α2 u2m cos2 + − sin2 π ms + π 2 πs m + π 2 (A.2) Nous déduisons des égalités cos2 (θ + π/2) = sin2 (θ) et sin2 (θ + π/2) = cos2 (θ) que (A.2) = m/2 h X cos2 s=1 π i π s − sin2 s m m × q t20 sin2 = 1 πs m + 4α2 u2m cos2 πs m −q2 t0 cos2 1 πs m + 4α2 u2m sin2 πs m m/2 h π i π s − sin2 s m m s=1 q q 2 2 πs 2 u2 sin2 πs − 2 u2 cos2 πs t20 cos2 πs + 4α t sin + 4α m m 0 m m m m q × q πs πs 2 πs 2 πs 2 2 2 2 2 2 2 2 t0 sin m + 4α um cos m t0 cos m + 4α um sin m | {z } X cos2 (Is ) On remarque que, si t0 = 2αum , le terme (Is ) dans cette somme s’annule pour toute 0 valeur 1 ≤ s ≤ m/2. Par conséquent, sous cette condition, la dérivée Sm (x) est nulle pour tout x et la fonction Sm est constante. Supposons maintenant que t0 > 2αum . Pour les valeurs de s telles que cos(πs/m) > sin(πs/m) (c’est-à-dire pour 1 ≤ s < m/4) nous avons π π cos2 s − sin2 s >0 m m et, d’après l’inégalité de réarrangement prouvée ci-dessus, le terme (Is ) dans la somme est aussi strictement positif. D’autre part, lorsque m/4 < s ≤ m/2 nous avons π π 2 2 cos s − sin s <0 m m Annexe A. Quelques résultats auxiliaires 125 et le facteur (Is ) est également strictement négatif par l’inégalité de réarrangement. Ainsi nous avons montré que, sous la condition t0 > 2αum , la somme σ m est strictement positive. Un argument tout à fait analogue prouve que, si t0 < 2αum , alors σ m < 0. Donc, d’après l’expression de la dérivée (A.1) et si t0 6= 2αum , la fonction Sm (x) possède exactement deux points critiques sur [0, π[ en x = 0 et en x = π/2. La dérivée seconde de Sm s’écrit 00 (x) = (cos2 x − sin2 x)σ m . Sm Donc 00 (0) = σ m Sm et 00 (π/2) = −σ m . Sm Ainsi, d’après l’étude du signe de σ m faite ci-dessus , Sm (x) admet un maximum global en x = π/2 et un minimum global en x = 0 si et seulement si t0 ≥ 2αum . Finalement, nous avons que t0 ≥ 2αum r πs 2 πs 2 2 2 2 ⇐⇒ ∀ s ∈ {1, . . . , m}, t0 ≥ t0 cos + 4α um sin m m m m 2 π 2 π X X cos m s cos m s 1 1 q ⇐⇒ ≥ m s=1 t2 sin2 πs + 4α2 u2 cos2 πs m s=1 t0 0 m m m A gauche dans cette dernière inégalité on reconnaît l’équation (2.17) satisfaite par um , et donc cette somme est égale à K/2α2 . D’autre part, nous pouvons calculer m m π s 1 1 X 2π 1 X cos2 m = 1 + cos s m s=1 t0 2t0 m s=1 m " !# m X 1 1 2π = 1+ < exp i s 2t0 m m s=1 = 1 , 2t0 car la somme des m racines m-ièmes de l’unité est nulle. Par conséquent, nous avons montré que t0 ≥ 2αum ⇐⇒ K 1 ≥ 2 2α 2t0 ⇐⇒ Kt0 ≥ α2 . Nous concluons que la fonction Sm (x) atteint son maximum global en x = π/2 et son minimum global en x = 0 si et seulement si Kt0 ≥ α2 , ce qui termine la démonstration du lemme. 126 Annexe A. Quelques résultats auxiliaires A.2 Preuve du Lemme 4 Lemme. Supposons que Kt0 ≥ α2 . Alors il existe une constante λ > 0 telle que, pour tout m ≥ 1, on ait π 2 1 π λ −x ≤ Sm − Sm (x) . 2 m 2 Démonstration. Tout d’abord, montrons que la suite {um }, où um est l’unique solution positive de (2.17), est convergente. Définissons la suite de fonctions ϕm :]0, +∞[→ R+ par m 1 X q ϕm (u) := m s=1 t2 sin2 0 π cos2 m s πs + 4α2 u2 cos2 m πs m . D’une part, pour u > 0 fixé, ϕm (u) est une somme de Riemann sur l’intervalle [0, π] dont la limite est une fonction continue notée ϕ, avec Z cos2 s 1 π p ds. ϕ(u) := lim ϕm (u) = m→∞ π 0 t20 sin2 s + 4α2 u2 cos2 s D’autre part, les fonctions ϕm sont strictement décroissantes car m 4 π X cos s m ϕ0m (u) = −4α2 u < 0, 2 πs 2 2 u2 cos2 πs )3/2 (t sin + 4α 0 m m s=1 pour tout u > 0. Ainsi, nous avons une suite de fonctions décroissantes {ϕm }m , convergeant ponctuellement vers une fonction continue ϕ, alors par le théorème de Dini cette suite converge uniformément vers ϕ sur tout intervalle compact [a, b] avec 0 < a < b. La fonction ϕ est strictement décroissante et satisfait ϕ(u) −−−→ +∞ et ϕ(u) −−−→ 0. + u→0 En particulier, ceci implique qu’il existe un unique point u∞ > 0 tel que ϕ(u∞ ) = K . 2α2 Maintenant, nous remarquons que par définition de um , nous avons ϕm (um ) = Posons 0 < a := K . 2α2 u∞ 3u∞ < b := . 2 2 Alors, puisque a < u∞ < b nous avons lim ϕm (a) = ϕ(a) > ϕ(u∞ ) = m→∞ K > lim ϕm (b) = ϕ(b). 2α2 m→∞ u→∞ Annexe A. Quelques résultats auxiliaires 127 Donc, il existe une constante M > 0 telle que que pour tout m ≥ M on ait ϕm (a) > K > ϕm (b). 2α2 Les fonctions ϕm étant décroissantes, ceci implique que um ∈ [a, b] pour tout m ≥ M . Donc, la suite {um }m possède une sous-suite convergente {umk }k ⊂ [a, b] disons vers u0 ∈ [a, b]. Par convergence uniforme nous avons lim ϕmk (umk ) = ϕ(u0 ). k→∞ Or pour tout k K K , d’où ϕ(u ) = 0 2α2 2α2 et donc u0 = u∞ , soit umk → u∞ . Par un raisonnement tout à fait analogue, nous pouvons montrer que toute sous-suite de {um } possède une sous-suite convergeant vers u∞ . Il vient que la suite {um } converge vers u∞ . ϕmk (umk ) = Reprenons maintenant la preuve de notre lemme. D’après l’expression (A.1) de la dérivée de la fonction Sm calculée dans la démonstration du Lemme 2 ci-dessus, nous avons sin(2x) 1 0 em = e m, Sm (x) = sin x cos x σ σ m 2 où m cos2 1 X q e m := σ m s=1 t2 sin2 0 π s m πs m − sin2 + 4α2 u2m π s m cos2 πs m . Nous reconnaissons dans cette expression une sorte de somme de Riemann sur l’intervalle [0, π], avec la particularité que le terme général de la somme dépend de m puisque um en dépend. Par un raisonnement similaire à celui utilisé ci-dessus pour traiter la suite e m converge lorsque m tend vers l’infini. de fonctions ϕm , nous pouvons montrer que σ e cette limite : Appelons σ Z cos2 s − sin2 s 1 π p e := lim σ em = ds. σ m→∞ π 0 t20 sin2 s + 4α2 u2∞ cos2 s Nous avons montré dans la preuve du Lemme 2 ci-dessus que, sous l’hypothèse Kt0 > α2 , e m est strictement positive pour tout m. Un argument similaire à celui utilisé la somme σ e > 0. Alors, pour montrer ceci prouve que la valeur limite est aussi strictement positive : σ il existe une constante κ > 0 telle que, pour tout m ≥ 1 e m > κ. σ 128 Annexe A. Quelques résultats auxiliaires Ainsi, pour tout x ∈ [0, π/2] nous avons 1 0 sin(2x) sin(2x) em ≥ Sm (x) = κ. σ m 2 2 Donc, en intégrant des deux côtés de cette inégalité, on trouve κ Z π2 1 π sin(2x) Sm − Sm (x) ≥ m 2 2 x κ = (1 + cos(2x)) 4 κ 2 = sin (π/2 − x) 2 2 2κ π −x , ≥ 2 π 2 car sin t ≥ 2t/π pour tout t ∈ [0, π]. Nous posons donc λ := 2κ/π 2 > 0 et le lemme et démontré. Bibliographie [1] V. Bach, J.M. Barbaroux, B. Helffer, and H. Siedentop. On the stability of the relativistic electron-positron field. Communications in Mathematical Physics, 201 :445 – 460, 1999. [2] C. Le Bris and P.L. Lions. From atoms to crystals : a mathematical journey. Bull. Amer. Math. Soc., 42 :291–363, 2005. [3] D.K. Campbell and A.R. Bishop. Soliton excitations in polyacetylene and relativistic field theory models. Nuc. Phys. B, 200 :297–328, 1982. [4] E. Cances, C. Le Bris, and Y. Maday. Méthodes mathématiques en chimie quantique. Springer, 2007. [5] P. Chaix and D. Iracane. From quantum electrodynamics to mean field theory : I. the Bogoliubov–Dirac–Fock formalism. J. Phys. B, 22(23) :3791–3814, 1989. [6] P. Chaix, D. Iracane, and P.L. Lions. From quantum electrodynamics to mean field theory : II. variational stability of the vacuum of quantum electrodynamics in the mean-field approximation. J. Phys. 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