Le diagnostic des dorsalgies : Garder l`esprit ouvert pour minimiser

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5/1/2015
ACPM - Le diagnostic des dorsalgies : Garder l’esprit ouvert pour minimiser les risques - Sécurité des soins
Sécurité des soins
Amélioration de la sécurité des patients et réduction des risques
Le diagnostic des dorsalgies : Garder l’esprit ouvert
pour minimiser les risques
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Publié initialement en décembre 2014
P1405­3­F
Les dorsalgies constituent souvent un dilemme insoluble en matière de diagnostic. Alors qu'il s'agit de l'un des motifs
les plus courants de consultation au Canada1,2, des études ont démontré que, dans la plupart des cas, l'origine
physiologique de la douleur reste indéterminée3. Ceci s'explique en raison du fait que de nombreuses affections à
l'origine de ces douleurs sont spontanément résolutives. Cependant, dans de rares cas, les douleurs dorsales sont le
premier symptôme de graves affections. Une évaluation inadéquate des patients atteints de dorsalgie ne permet pas
d'écarter définitivement ces diagnostics, ce qui peut avoir de graves conséquences.
Demander un examen d'imagerie pour les patients atteints de dorsalgie non compliquée est généralement inefficace et
peut entraîner un préjudice4. C'est pourquoi les campagnes visant à diminuer les examens et traitements inutiles, telles
que Choisir avec soin (www.choisiravecsoin.org) recommandent de ne pas réaliser d'imagerie pour les nouveaux cas
de dorsalgie chez la plupart des patients n'ayant pas de symptôme ni de signe d'alerte5. Les lignes directrices
cliniques, canadiennes et internationales décrivent des approches conservatrices fondées sur les données probantes
pour la prise en charge des dorsalgies.
L'ACPM a analysé des dossiers médico­légaux conclus entre 2008 et 2013 concernant des patients ayant comme
plainte principale une dorsalgie, chez lesquels l'évaluation diagnostique a été critiquée par des experts. Le diagnostic
le plus souvent manqué est le syndrome de la queue de cheval, une atteinte neurologique résultant d'une compression
radiculaire au niveau du canal rachidien situé sous le cône médullaire. Cette affection, qui peut avoir plusieurs
étiologies, peut être notamment secondaire à une hernie discale, une sténose rachidienne ou une lésion médullaire, et
nécessite une intervention en urgence afin de prévenir une atteinte permanente.
Les autres affections dorsales manquées au diagnostic ont notamment été une fracture vertébrale ou d'autres
pathologies du rachis. Les pathologies non rachidiennes qui se sont présentées sous la forme de douleurs dorsales ont
été : une pathologie rénale, les tumeurs malignes telles que les lymphomes ou les métastases osseuses; les atteintes
cardiovasculaires (la plupart du temps une rupture d'anévrisme de l'aorte abdominale [AAA]) et les infections telles
qu'un abcès épidural, une discite ou une ostéomyélite.
Souvent, les experts ont attribué le diagnostic manqué à l'incapacité du médecin à percevoir la gravité de l'état du
patient, et notamment les signes d'alertes tels que la fièvre, une perte de poids, des signes neurologiques ou certaines
caractéristiques de la douleur. Dans certains cas, des médecins n'ont pas effectué le suivi de résultats anormaux
d'analyse tels qu'une élévation de la numération leucocytaire ou de la vitesse de sédimentation. Dans d'autres cas, les
médecins ont été critiqués pour ne pas avoir évalué de nouveau des patients revenus en consultation car leur douleur
persistait, augmentait ou ne répondait pas au traitement.
Cas 1 : Un syndrome de la queue de cheval où les signes d'alerte n'ont pas été
reconnus
Un orthopédiste adresse sa patiente de 28 ans présentant une sciatique de longue date à un neurochirurgien
après qu'une IRM a mis en évidence l'aggravation d'une hernie discale droite en L5­S1 associée à une sténose
rachidienne. Un rendez­vous est prévu dans quelques mois, mais la patiente se rend à l'urgence la semaine
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suivante en raison d'une importante douleur et d'une faiblesse à la jambe droite accompagnées d'impériosité
mictionnelle.
L'urgentologue effectue un examen neurologique qui ne révèle que l'absence de réflexe rotulien à droite et une
certaine diminution de la force musculaire du muscle long extenseur de l'hallux. Elle diagnostique une
polyradiculopathie associée à un déficit moteur et hospitalise la patiente sous les soins de l'omnipraticien, qui
est informé par téléphone de l'état de santé de la patiente.
L'omnipraticien adresse la patiente à un anesthésiologiste pour le traitement de ses douleurs par injections
épidurales de corticostéroïdes. Lorsque l'anesthésiologiste examine la patiente avant l'injection, il note une perte
de sensibilité sur le côté de la jambe droite associée à une faiblesse et une diminution du réflexe rotulien. Il
administre l'injection et la patiente reçoit son congé le lendemain. Lors du rendez­vous de suivi avec son
omnipraticien quelques jours plus tard, la patiente lui fait part d'un épisode d'incontinence urinaire. Le médecin
lui recommande de se rendre immédiatement à l'urgence de l'hôpital de soins tertiaires le plus proche pour y
être évaluée par un neurochirurgien. La patiente subit en urgence une laminectomie et une décompression
chirurgicale d'un syndrome de la queue de cheval. Elle conserve toutefois une atteinte neurologique
permanente y compris des troubles vésicaux et intestinaux.
La patiente intente une poursuite contre tous les médecins qui lui ont prodigué des soins. Les experts critiquent
l'omnipraticien qui n'a pas immédiatement adressé la patiente à un neurochirurgien lorsqu'elle a été hospitalisée
pour la première fois par l'urgence. Ils critiquent également l'anesthésiologiste pour ne pas avoir perçu la gravité
des symptômes de la patiente lors de son évaluation.
Dans de nombreux dossiers, les médecins n'ont pas totalement pris en considération les éléments de l'anamnèse ou
les comorbidités pouvant exposer les patients à de graves conséquences. Dans quelques dossiers, le diagnostic
différentiel d'une dorsalgie ne comportait pas la possibilité d'une étiologie vasculaire telle qu'une rupture d'AAA chez
des patients ayant des facteurs de risque manifestes. Inversement, certains médecins ont faussement attribué les
symptômes d'un patient à une affection antérieure ou pré­existante, ce qui les a conduits à manquer d'autres
diagnostics différentiels.
Cas 2 : Un diagnostic de cancer retardé par l'ancrage à d'autres symptômes
Un adolescent de 14 ans est conduit à l'urgence en raison de spasmes au dos et de douleurs dorsales
continues depuis sa participation à une course de vélo de montagne une semaine plus tôt. Il a déjà consulté un
chiropraticien et un physiothérapeute et prend un AINS et un myorelaxant prescrits par son omnipraticien et qui
ne l'ont pas soulagé.
À l'examen, l'urgentologue note des spasmes dorsolombaires et l'absence de sensibilité et de masse à la
palpation. Le patient affirme n'avoir aucun trouble vésical ou intestinal. Le médecin diagnostique d'importants
spasmes musculaires et prescrit un analgésique et un myorelaxant. Lorsqu'il évalue le patient 30 minutes après
l'administration des médicaments, la douleur a disparu et le patient reçoit son congé avec pour directive de
consulter son omnipraticien le lendemain matin.
Le lendemain, le patient a des difficultés à marcher et consulte un autre médecin qui l'adresse rapidement à
l'hôpital pour enfants où un examen neurologique met en évidence une importante faiblesse dans les jambes.
Un diagnostic de lymphome anaplasique à grandes cellules au niveau T8­T10 est finalement posé et le patient
reçoit un traitement.
Une action en justice est intentée contre l'urgentologue. Les experts critiquent le fait qu'il n'a pas effectué
d'évaluation neurologique complète ni interrogé le patient sur des symptômes de faiblesse ou de perte de
sensibilité.
La prescription inappropriée de narcotiques pour la gestion de la douleur a été fréquemment associée à des problèmes
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de diagnostic. Dans certains cas, l'utilisation de narcotiques a constitué un élément central lorsque ces derniers ont
contribué à une accoutumance ou ont été associés à de graves résultats pour les patients. Dans d'autres cas, leur
utilisation a masqué l'aggravation de symptômes neurologiques, ce qui rendu l'établissement d'un diagnostic plus
difficile.
Une erreur d'attribution est une forme de préjugé conduisant à expliquer l'état d'un patient en fonction de son attitude
ou de sa personnalité plutôt qu'à chercher une explication médicale valable. Ce type de biais cognitif peut conduire à
l'évaluation inadéquate d'une dorsalgie; tout particulièrement lorsque les médecins se sont trop rapidement arrêtés à
un diagnostic ou ont conclu que le patient simulait. Dans quelques cas, un abcès épidural n'a pas été décelé chez les
patients ayant des antécédents d'accoutumance, en dépit du fait qu'ils représentent un groupe à risque élevé de ce
type de complication.
Gérer les risques médico­légaux
Lors de l'évaluation de patients atteints de dorsalgie, envisagez d'entreprendre les démarches de gestion suivantes qui
sont fondées sur les opinions des experts dans les exemples de cas analysés :
Soyez informé des traitements conservateurs actuels fondés sur des données probantes pour la gestion des
soins des patients atteints de dorsalgie, y compris l'utilisation de médicaments pour le traitement de la douleur.
Effectuez un examen physique complet et approprié et évaluez les signes d'alerte associés aux dorsalgies
pouvant indiquer la nécessité de réaliser une imagerie diagnostique en urgence ou la consultation d'un
spécialiste.
Gardez l'esprit ouvert lorsqu'un patient explique l'origine de ses symptômes.
Réfléchissez au diagnostic différentiel et soyez attentif aux possibilités pouvant menacer le pronostic vital ou la
capacité fonctionnelle d'un patient.
Réfléchissez à la possibilité qu'un biais cognitif puisse influencer votre diagnostic.
Informez vos patients des signes et symptômes qui devraient les inciter à consulter un médecin.
Lorsqu'un patient consulte de nouveau pour les mêmes symptômes ou une aggravation de ses symptômes,
réévaluez vos hypothèses diagnostiques et effectuez un nouvel examen physique ainsi qu'un examen
neurologique.
Assurez­vous que votre documentation reflète que vous avez rigoureusement réalisé l'évaluation, l'anamnèse et
le diagnostic différentiel et que les consignes données au moment du congé sont complètes.
Suggestions de lecture
« Le syndrome de la queue de cheval : Un cas à reconnaître et à traiter promptement »
« L'abcès épidural : une infection rare, insidieuse et potentiellement catastrophique »
Guide des bonnes pratiques de l'ACPM – rubrique sur les « biais cognitifs »
Références
1. Cassidy, J.D., Carroll, L.J., Côté, P., « The Saskatchewan health and back pain survey. The prevalence of low
back pain and related disability in Saskatchewan adults », Spine (1998), vol. 23, no 17, p. 1860.
2. Deyo, R.A., Mirza, S.K., Martin, B.I., « Back pain prevalence and visit rates: estimates from U.S. national
surveys, 2002. » Spine (2006), vol. 31, no 23, p. 2724.
3. Deyo, R.A., Rainville, J., Kent, D.L., « What can the history and physical examination tell us about low back
pain? » Journal of the American Medical Association (1992), vol. 268, no 6, p. 760.
4. Srinivas, S.V., Deyo, R.A., Berger, Z.D., « Application of "less is more" to low back pain », Archives of Internal
Medicine (2012), vol. 172, no 13, p. 1016.
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5. Choisir avec soin. Les examens d'imagerie pour les douleurs au bas du dos : À quel moment devez­vous passer
ces examens? Consulté le 1er octobre 2014 à l'adresse suivante : http://www.choisiravecsoin.org/materials/les­
examens­dimagerie­pour­les­douleurs­au­bas­du­dos­a­quel­moment­devez­vous­passer­ces­examens/
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