Introduction

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LA KABYLIE, ENTRE PERMANENCE ET
RECOMPOSITION SPATIALE
Toubal Ramdane1, Dahli Mohamed1
[email protected], [email protected]
Université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, Algérie
Résumé
Région montagneuse et côtière, la Kabylie se caractérise par son
appartenance à la méditerranée, elle est composée de sous ensembles et
présente peu de basses terres cultivables mais surtout de hautes plaines et
plateaux encadrés par des massifs montagneux discontinus. Sa
morphologie générale est définie en aires géographiques bien distinctes,
son réseau hydrographique très dense composé de cours d’eau, torrents et
d’oueds l’a véritablement façonné en couloirs et profonds ravins, limites
naturelles des confédérations et tribus. Les caractéristiques physiques,
climatiques, morphologiques et géologiques, souvent contraignantes, ont
déterminé une forme d’organisation spatiale et sociale caractérisée par
son originalité et son adaptation au contexte naturel.
Région paysanne à vocation agricole, la Kabylie bénéficie de
conditions agronomiques privilégiées en matière de pluviométrie. Elle se
caractérisait par une économie agraire presque exclusivement arboricole
en montagne et céréalière dans les vallées et les hautes plaines. L’olivier,
arbre le plus emblématique de cet espace, recouvre une importante partie
des terres et des escarpements rocheux. Sa culture fut avec celle du
figuier et du blé le socle de l’économie de plusieurs générations et
demeure l’une des rares ressources agricoles en pleine exploitation.
Les vallées étaient les espaces nourriciers où se développaient des
activités agricoles très diverses telle que la céréaliculture, une riche
arboriculture, des cultures maraîchères variées et de légumes secs.
Chacune de ces deux entités bien distinctes étaient complémentaires,
montagnes-vallées combinaient les potentialités aux nombreuses
contraintes du milieu physique.
De nos jours la montagne est un espace déprécié, les raisons sont
multiples et remontent pour certaines à la période coloniale. Cette région
montagneuse paradoxalement fortement peuplée se caractérise par de
fortes disparités spatiales, l’indépendance n’a pas changé grand-chose au
contraire la dynamique de développement, à travers l’affectation de
différents programmes nationaux et régionaux, portée par les options
politiques de l’après guerre va induire des bouleversements profonds sur
1
les plans politique, économique, paysager et social. C’est dans cette
optique de bouleversement que nous voulons inscrire ce présent article.
Mots clés : Kabylie, espace, confédération, tribus, aménagement.
Introduction
Région montagneuse et méditerranéenne, la Kabylie se caractérise par
un relief accidenté et une exiguïté de ses terres cultivables. Sa
morphologie générale est définie en aires géographiques bien distinctes,
façonnée en couloirs et profonds ravins par un réseau hydrographique
très dense. Cette structure topographique a fondamentalement présidé à
l’organisation de l’ensemble du territoire de Kabylie. Cette région
reposait, par le passé, sur une économie agraire presque exclusivement
arboricole en montagne et céréalière en basses et hautes plaines.
L’olivier, arbre emblématique méditerranéen, recouvre une importante
partie des terres et des escarpements rocheux du territoire de Kabylie, sa
culture avec celle du figuier et du blé furent le socle de l’économie de
plusieurs générations, elle demeure à nos jours l’une des rares ressources
agricoles en pleine exploitation. Cette diversité du relief a exercé, à des
degrés divers, une autorité déterminante aussi bien sur les structures
villageoises et leur organisation sociale que sur les activités productrices.
I. Géographie des massifs montagneux de Kabylie
Le relief accidenté et varié a profondément marqué l’histoire, la
culture et l’économie des populations de la Kabylie, leur isolement sur
les crêtes a rendu plus difficile les conquêtes des hautes terres et
l’influence extérieure sur les traditions locales1. La morphologie
discontinu des massifs montagneux et leur disposition parallèle au littoral
ont exercé une influence décisive sur la destiné de ce territoire et ont
permis une importante perméabilité des relations d’Est en Ouest mais ont
rendu les communications plus difficiles entre la côte et l’arrière pays.
1. Délimitations géographiques de la Kabylie
La Kabylie, vaste entité géographique, est située au centre-est de
l’Algérie, son relief massif et compartimenté va présider à son histoire et
à sa destinée. Composé de sous ensembles, ce territoire présente peu de
terres étendues mais de hautes plaines et plateaux encadrés de massifs
montagneux discontinus2. Deux aires géographiques distinctes
1
2
Charles André Julien. Histoire de l’Afrique du nord, SNED, Alger 1975.
Daumas Eugène. Mœurs et coutumes de l'Algérie-Tell, Kabylie, Sahara, éditions
Hachette, 1855.
2
composent le relief de ce territoire à savoir la Kabylie du Djurdjura et la
Kabylie des Babors et des Bibans.
La Kabylie du Djurdjura s’étend sur 150 km depuis la plaine des
Issers à l’Ouest jusqu'à la vallée de la Soummam à l’Est et sur 100 km du
Nord au Sud entre la Méditerranée et l’oued Sahel/Soummam. La
Kabylie des Babors, quant à elle, s’étend sur deux wilayas, Bejaia et Jijel.
La mer Méditerranée borde sa partie septentrionale sur une longueur de
150 km, à l’Est elle est limitée par l’oued El-Kebir et à l’Ouest par la
vallée de la Soummam. C’est une région littorale très découpée
également appelée corniche kabyle ou jijelienne.
2. Les caractéristiques du relief de la Kabylie
La Kabylie est caractérisée par la fréquence de ces altitudes, la
montagne constitue la majeure partie de ce territoire. Un survol de cette
région de la Méditerranée au nord jusqu’aux monts des Bibans au sud et
des plaines des Isser à l’ouest vers les limites de Bejaia à l’est permet de
définir les éléments marquants qui composent le relief des Kabylies.
Les plaines du littoral : relativement sobre et longiligne, elles
possèdent peu de terres profondes, quelques plaines creusent la chaîne
côtière à l’ouest.
La chaîne côtière : s’étire sur un peu plus de 150 km entre Cap Djinet
à l’ouest et les limites nord du mont Gouraya à l’est. Cette chaîne se
dresse au dessus de la mer réduisant les relations entre le littoral et
l’intérieur du pays. Un fort contraste est à observer entre les deux
versants qui composent cette chaîne3.
La vallée du Sebaou : située à 200 mètres d’altitude, très fertile à
dominance céréalière, elle est comprise entre la chaîne côtière au nord
et le massif central au sud. L’oued Sebaou draine les trois quarts du
massif central, son bassin versant totalise 2.450 km24.
Le massif central : aux formes lourdes densément peuplé, il est situé
entre la vallée du Sebaou au nord et les plaines intérieures de la
dépression de Draâ El Mizan au sud, l’oued Isser borde sa frontière
occidentale et il s’insère à l’est dans l’arc du Djurdjura. Les villages
nombreux dans cette zone, s’organisent en habitat groupé et se
repartissent sur des altitudes allant de 800 à 1.200 mètres.
3
Rullan Antoine. La chaîne côtière de Grande Kabylie, thèse de doctorat 3 ème cycle,
1972.
4
Alain Mahé. Histoire de la Grande Kabylie. XIXème XXème siècle. Editions Bouchene
2006. Pages 40-78
3
Les plaines de Draâ El Mizan/les Ouadhias : Région à forte
hydrographie, elle se développe sur une trentaine de Km à une altitude
n’excédant pas les 300 mètres. Elle est constituée de plaines
longilignes fertiles faiblement vallonnées sur une superficie de 24000
ha. Elle se présente comme une étroite dépression enclavée entre les
versants sud des monts du massif central et nord du Djurdjura.
Mer Mediterranee
Carte 1 : Relief de la région centre de l’Algérie.
Le Djurdjura : dans la partie sud de la Kabylie se dresse la chaîne la
plus imposante, le Djurdjura qui décrit un arc de cercle très marqué
autour d’Igawawen (massif central). Limitée naturellement par Draâ
El Mizan à l’ouest et Tazmalt à l’est, cette chaîne longiligne s’étire sur
prés de 70 km et culmine à 2.308 mètres au mont Lalla Khedidja. Son
orientation d’ouest en est la dresse comme une muraille et sépare
l’intérieur de la Grande Kabylie des hautes plaines [4].
Les plaines et les basses collines occidentales : fertiles à l’ouest de la
Kabylie, elles sont le prolongement naturel à l’est de la Mitidja. Les
basses terres de la vallée des Isser forment des plaines et de moyennes
collines propices à l’agriculture. S’adossant à la chaîne du Djurdjura,
les chaînons du Boubrak, séparent les vallées des Isser et du Sebaou.
La vallée de la Soummam: du nom de la rivière qui la traverse, cette
vallée offre des conditions propices aux cultures maraîchères.
Enserrée entre les ensembles Akfadou-Gouraya au nord, les versants
sud de la chaîne du Djurdjura au sud-ouest et le massif des Bibans au
4
sud-est, la vallée de la Soummam représente un axe de
communication national très important5.
Les monts des Babords-Bibans : les Babords prolongés au sud-ouest
par la chaîne des Bibans dominent le golfe de Bejaia et culmine à
2.004 mètres au Grand Babor. Ses versants tournés vers le nord-ouest
sont séparés du Djurdjura par la vallée de la Soummam. Les Bâbords
occupent les trois-quarts environ de la superficie de la Petite Kabylie.
Les précipitations abondantes associées à un couvert végétal peu
dense provoquent une forte érosion des sols.
II. Economie traditionnelle de la société rurale de Kabylie
L’organisation économique paysanne sous sa forme traditionnelle se
basait sur quatre éléments de production [6], l’élevage et le pacage du
bétail, les labours des terres arables essentiellement dans les vallées et sur
certains plateaux et versants non abrupts, l’arboriculture et l’horticulture
en moyenne montagne et enfin l’exploitation des broussailles et forêts
pour ériger des clôtures pour les champs, produire du bois pour se
chauffer ainsi que pour bâtir sa maison. Cette économie montagnarde
était centrée sur l’exploitation de la terre et l’élevage d’où son caractère
mixte et diversifié. Son mode de production se basait sur deux formes
d’organisation essentielles, le travail de la terre en collectivité et à
moindre degré l’échange ou la commercialisation, où la structure
familiale demeure l’unité fondamentale de production, de consommation,
de reproduction et de socialisation6.
III. Organisation sociale et structure spatiale
L’architecture traditionnelle en Kabylie est le reflet des
comportements des communautés qui y habite, leur économie et la
cohésion des liens sociaux des habitants ont déterminé une organisation
sociale et spatiale dans un environnement naturel particulier7.
1 Thaddarth « le village »
Le village possède sa propre structure, il est doté d’une organisation
socio-économique et politique qui lui permet d’assurer sa propre
5
Abdelouhab Abdelkader, Benmeziane Mustapha. SIG pour la gestion en granulats de
la riche vallée de la Soummam, 2003.
6
Amin Samir, Le Maghreb moderne, Edition de Minuit, 1970.
7
Basagana R, Sayad A. Habitat traditionnel et structures familiales en Kabylie, Alger,
CRAPE, 1974
5
reproduction physique et sociale8. Thaddarth est une entité sociale
autonome de relations internes conçues en hiérarchie qui se traduisent par
un réseau de relations décomposables en parties entretenant des rapports
entre elles. Fondée sur l’autosubsistance, qui tirait ses ressources du
travail de la terre, de l’élevage et de l’artisanat, l’économie de cette
communauté villageoise est basée sur la densité numérique, condition
nécessaire pour une autonomie de subsistance grâce à un strict contrôle
de son espace utile. Sur le plan spatial, l’habitat traditionnel occupe soit
les crêtes, les versants de montagnes ou les plateaux élevés. L’appellation
des villages est relative soit au lieu, à son orientation, au paysage, à la
caractéristique du lieu, parfois même à un ancêtre9.
2. Typologies des formes d’habitats traditionnels
L’influence topographique sur la structure spatiale du village est
reconnaissable, selon que le village soit établi sur une ligne de crête, sur
le versant d’une montagne ou sur son sommet. Les lignes constituées par
les rues et les ruelles du village auront un tracé adapté à la configuration
du relief.
Photo 1 : Vue aérienne d’un village de montagnes de Kabylie [10].
L’organisation d’un village de sommet décrit un cercle autour de ce
dernier où les habitations apparaissent disposées perpendiculairement
aux courbes de niveaux. Les rues décrivent ainsi un réseau concentrique
Kaci M’Barek. « Contribution à la protection de l’architecture rurale traditionnelle :
Cas du village antique de Taksebt en Kabylie maritime ». Mémoire Magister, EPAU
Janvier 2001
9
Vicente Claude. L’habitation de Grande Kabylie (Algérie), in fichier des Arts et
Techniques d’Afrique du Nord, n°5, 1959
8
6
aux limites du village, croisées par des voies perpendiculaires voir
photo aérienne 110. Contrairement au village de sommet, le village sur
une ligne de crête les rues principales structurent l’espace intérieur du
village, celles ci se développent parallèlement aux courbes de niveaux,
les maisons sont disposées linéairement aux voies secondaires plus
nombreuses et plus denses, dans la même configuration décrite
précédemment. Quant au village de versant les groupements forment un
réseau compact où plusieurs ruelles s’entrecroisent formant ainsi un
réseau de plusieurs boucles. Les parcelles suivent l’organisation
morphologique traditionnelle et les habitations sont perpendiculaires
dans ce cas de figure également aux courbes de niveau.
3. Village : Habitat-Habitants
Agrégat de constructions compact et irrégulier, le village s’organise
autour d’une structure sociale très hiérarchisée en unités familiales,
fractions et clans, elle se matérialise aux échelles du territoire, du village
et de la maison. Le village est structuré en un ensemble de quartiers
(Iderman ou quartiers) composés à leur tour de fractions Ixxarban qui
représentent plusieurs unités d’habitations de la même famille appelées
lhouari, pluriel de l’hara 11. Cette structuration de l’espace à l’intérieur du
village se retrouve projetée à l’extérieur, répartition par fraction dans les
espaces agricoles, les cimetières... Dans les grandes communautés
villageoises, les habitants des Iderman n’ont pas nécessairement le même
patronyme et ne s’identifient pas à une appartenance généalogique
commune 12. Les habitants et le quartier seront désignés par leur situation
particulière dans le village.
IV. Aménagement de l’espace en montagne (exemple de Tizi-Ouzou)
Plus de 80% de la superficie de la wilaya de Tizi-Ouzou est constituée
de dénivelées importantes dont les pentes excédent les 12,5%.
Indéniablement le relief demeure une forte contrainte combiné à des
phénomènes d’érosions importants, constituent à eux deux des facteurs
limitant l’activité et la diversité agricoles.
Photographie d’archives de l’Institut Géographique National français (IGN), 1960.
Gahlouz Mustapha. Droit coutumier, contrôle et maîtrise de l’espace bâti et de son
environnement dans la société Kabyle de la fin du 19ème siècle. Thèse de doctorat en
anthropologie sociale et ethnologie. Ecole des hautes études en sciences sociales
(EHESS) 2002, Paris.
12
Dessomes François, Notes sur l’histoire des Kabylies, Editions Tira, 1992.
10
11
7
1. Reformulation du rapport montagne/vallée
Par le passé les montagnes et les vallées, entités largement
complémentaires, entretenaient des rapports bien distincts. Si les
montagnes servaient d’abri, d’habitat et de lieu de subsistance pour
l’homme, les vallées du Sebaou et de la Soummam restaient parmi les
espaces les plus nourriciers de la Kabylie. D’autres couloirs agraires
moins étendus mais non moins fertiles s’insèrent entre le massif central et
la chaîne du Djurdjura (Draa El Mizan, Ouadhias…).
De nos jours la montagne est un espace déprécié, les raisons sont
multiples et remontent pour certaines à la période coloniale, la perte des
grandes terres des plaines et piémonts, au profit des colons a induit un
déséquilibre des deux entités historiquement complémentaires. Amputée
de son espace vital et des activités liées à la terre, les populations de
montagnes ont du émigrer pour d’autres sources de revenus. L’Algérie
indépendante n’a fait qu’amplifier ce phénomène à travers les différents
programmes nationaux et régionaux de développement depuis plus de
quatre décennies, cela a induit un changement important dans le paysage
économique de la région. L’exemple de la wilaya de Tizi-Ouzou est
significatif, la création d’une trame urbaine portant de grands
équipements et d’un tissu industriel à l’échelle régionale concentrés en
grande majorité dans le couloir du Sebaou.
2. Déséquilibre des investissements Vallée/Montagne
La concentration des pôles industriels et urbains dans les zones des
vallées a engendré une inégalité dans la répartition des investissements,
localisés à plus de 70% dans la vallée du Sebaou pour la wilaya de TiziOuzou. Ce couloir reste le poumon de la région13, son importance
économique est considérable, elle porte les principaux foyers urbains
(Draa Ben Khedda, Tizi-Ouzou, Freha, Tamda, Azazga…). Zone à fortes
potentialités agricoles et hydrauliques, c’est également le principal axe
industriel de la région, contrairement aux zones de montagne. Celles-ci,
malgré qu’elles couvrent plus de 70% de la superficie de la Kabylie
restent marquées par un mouvement migratoire vers les villes et les pays
ouvert à l’émigration. L’incidence topographique confère un caractère
villageois à la région fortement peuplée (environ 600 habitants/km2), et
n’a pas permis l’émergence de grandes agglomérations et
d’investissements importants.
13
S.R.A.T : Schéma Régional d’Aménagement du Territoire de la wilaya de Tizi
Ouzou.
8
Concernant le couloir côtier, qui s’étale de Dellys à Azzefoun, il est
resté en marge de toute dynamique de développement malgré la
proximité de la mer qui fait de cette zone, une région à fortes capacités
halieutiques et touristiques certaines. A l’inverse, le couloir intérieur de
Draâ-El-Mizan aux Ouadhias se particularise par une activité agricole
importante à la faveur des réserves hydriques suffisante et d’un relief peu
accidenté et par un développement de la petite et la moyenne entreprise
privée spécialisée dans l’industrie alimentaire. De part ses capacités c’est
une zone qui peur être un support à même d’équilibrer la répartition des
investissements au niveau régional.
V. Les transformations de l’espace villageois en Kabylie
Actuellement en pleine mutation, l’espace villageois en Kabylie se
caractérisait par son adaptation au contexte naturel, social et économique.
Les nombreuses transformations spatiales altéraient et continu d’altérer
l’aspect morphologique des villages, les extensions hors de leurs limites
génèrent des quartiers tentaculaires et épars qui portent d’importants
préjudices à l’aménagement spatial du village ainsi qu’à son
environnement immédiat. Liées à des considérations diverses, ces
mutations spatiales intra- et extra-muros au village ont été marquées par
deux époques bien distinctes. Notre intervention portera exclusivement
sur les extensions extra-muros de la période de l’après indépendance,
marquée par une dynamique de transformation très accélérée et intense.
Ces mutations sont des conséquences liées à l’amélioration des
conditions de vie des habitants, à l’accroissement démographique, à
l’apport de l’émigration et aux nouvelles techniques constructives.
1. Extensions extra-muros
Autrefois désertés, les espaces éloignés des agglomérations
villageoises et les axes reliant les villages aux centres urbains sont de
plus en plus occupés par une architecture dispersée et linéaire marquant
une rupture avec la structure traditionnelle villageoise de Kabylie. Un
nouvel aménagement de cet espace prend forme, les voies de
communication constituent le nouveau support de croissance des
villages14.
2. Dispersion dans le paysage et extensions le long des routes
Les mutations sociales et économiques locales révèlent une tendance
des villageois à édifier leur habitat en bordure de route et cela pour des
14
Belhocine Messaci Nadia. « Une lecture spatiale du phénomène migratoire. Cas des
Ath Waghlis. Algérie ». 10ème assemblée générale du CODESRIA. Décembre 2002,
Kampala.
9
raisons qui ont trait à la recherche d’une meilleur accessibilité ainsi qu'au
rapprochement des zones d’échange et de communication 15. Cette forme
d’aménagement ne marque plus l’identité des paysages de la Kabylie.
L’étalement urbain développe une multitude de voies et de réseaux divers
ainsi que de services qui ont un impact direct sur leur coût financier. Sur
le plan social, l’éloignement des habitants provoque un affaiblissement
de la vie locale, les villageois éparpillés, ne contribuent plus à
l’animation sociale et économique des villages. L’urbanisation des sols et
la fragmentation des milieux naturels, porte préjudice à l’environnement
par la surconsommation des espaces naturels et l’érosion de la
biodiversité.
Photo 2: Vue aérienne de l’extension de quartiers tentaculaires
Conclusion
A des degrés divers, de l’échelle du territoire à celle de l’habitation, la
diversité du relief de la Kabylie a exercé une autorité déterminante et
permanente sur les structures villageoises traditionnelles. Parfaitement
adaptée à ce milieu naturel, jusqu’à un passé récent la société kabyle a su
préserver et sauvegarder son espace et son environnement par ses modes
de production et une forte cohésion des liens sociaux, les activités liées à
la terre constituaient le noyau de la vie économique de cette société.
15
Belhocine Messaci Nadia. « Une lecture spatiale du phénomène migratoire. Cas des
Ath Waghlis. Algérie ». 10ème assemblée générale du CODESRIA. Décembre 2002,
Kampala.
10
De nos jours, la recomposition spatiale à la faveur des nombreux
programmes de planification marque l’aménagement du territoire par
d’importantes disparités dans l’organisation du territoire en Kabylie, ce
qui a favorisé l’émergence d’entités physique et économique
hétérogènes. Sur le plan architectural, les nombreuses transformations
génèrent des quartiers tentaculaires en rupture avec le tissu traditionnel, il
révèle une structure éparse causant d’importants préjudices à
l’aménagement du territoire ainsi qu’a l’environnement.
Bibliographie
1. Charles André Julien. Histoire de l’Afrique du nord, SNED, Alger 1975.
2. Daumas Eugène. Mœurs et coutumes de l'Algérie-Tell, Kabylie, Sahara, éditions
Hachette, 1855.
3. Rullan Antoine. La chaîne côtière de Grande Kabylie, thèse de doctorat 3ème cycle,
1972.
4. Alain Mahé. Histoire de la Grande Kabylie. XIXème XXème siècle. Editions Bouchene
2006. Pages 40-78.
5. Abdelouhab Abdelkader, Benmeziane Mustapha. SIG pour la gestion en granulats de
la riche vallée de la Soummam, 2003.
6. Amin Samir, Le Maghreb moderne, Edition de Minuit, 1970.
7. Basagana R, Sayad A. Habitat traditionnel et structures familiales en Kabylie, Alger,
CRAPE, 1974
8. Kaci M’Barek. « Contribution à la protection de l’architecture rurale traditionnelle :
Cas du village antique de Taksebt en Kabylie maritime ». Mémoire Magister, EPAU
Janvier 2001.
9. Vicente Claude. L’habitation de Grande Kabylie (Algérie), in fichier des Arts et
Techniques d’Afrique du Nord, n°5, 1959.
10. Photographie d’archives de l’Institut Géographique National français (IGN), 1960.
11. Gahlouz Mustapha. Droit coutumier, contrôle et maîtrise de l’espace bâti et de son
environnement dans la société Kabyle de la fin du 19 ème siècle. Thèse de doctorat en
anthropologie sociale et ethnologie. Ecole des hautes études en sciences sociales
(EHESS) 2002, Paris.
12. Dessomes François, Notes sur l’histoire des Kabylies, Editions Tira, 1992.
13. S.R.A.T : Schéma Régional d’Aménagement du Territoire de la wilaya de Tizi
Ouzou.
14. Belhocine Messaci Nadia. « Une lecture spatiale du phénomène migratoire. Cas des
Ath Waghlis. Algérie ». 10ème assemblée générale du CODESRIA. Décembre 2002,
Kampala.
15. Belhocine Messaci Nadia. « Une lecture spatiale du phénomène migratoire. Cas des
Ath Waghlis. Algérie ». 10ème assemblée générale du CODESRIA. Décembre 2002,
Kampala.
11
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