LES CAPRICES DE MARIANNE Dossier Pédagogique 2014/2015 Vendredi 5 décembre - 20h Dimanche 7 décembre - 16h Durée : 2h30 OPÉRA-COMIQUE EN 2 ACTES Musique de Henri Sauguet Livret de Jean-Pierre Grédy Création au Festival d’Aix-en-Provence le 20 juillet 1954 Présenté en français, surtitré en français Direction musicale Gwennolé Rufet Mise en scène Oriol Tomas Décors Patricia Ruel Costumes Laurence Mongeau Lumières Étienne Boucher Études musicales Mathieu Pordoy AVEC Marianne Aurélie Fargues Hermia Julie Robard-Gendre Octave Marc Scoffoni Coelio Cyrille Dubois Claudio Thomas Dear Tibia Carl Ghazarossian L’Aubergiste Xin Wang Le Chanteur de sérénade Tiago Matos La Duègne Jean-Vincent Blot ORCHESTRE DE L’OPÉRA DE MASSY COPRODUCTION CENTRE FRANÇAIS DE PROMOTION LYRIQUE / OPÉRA DE MARSEILLE OPÉRA GRAND AVIGNON / OPÉRA NATIONAL DE BORDEAUX / OPÉRA-THÉÂTRE DE LIMOGES OPÉRA DE MASSY / OPÉRA-THÉÂTRE METZ-MÉTROPOLE OPÉRA ORCHESTRE NATIONAL DE MONTPELLIER LANGUEDOC-ROUSSILLON OPÉRA DE NICE / OPÉRA DE REIMS / OPÉRA DE RENNES / OPÉRA DE ROUEN HAUTE-NORMANDIE OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE / THÉÂTRE DU CAPITOLE GRAND THÉÂTRE DE TOURS / OPÉRA DE VICHY / AVANT-SCÈNE OPÉRA (SUISSE) SOMMAIRE 4_ Le compositeur 6_ En savoir plus 20 _ L’argument 21- La production 22 _ En savoir plus sur la voix... 23 _ Les instruments d’orchestre 27 _ L’action culturelle 3 LE COMPOSITEUR HENRI SAUGUET (1901-1989) faire entendre la musique la plus récente et libre de toute influence. Leur premier concert a lieu le 12 décembre 1920 avec des partitions du « groupe des Six » (Arthur Honegger, Francis Poulenc, Darius Milhaud, Georges Auric, Louis Durey, Germaine Tailleferre), d'Erik Satie et du « groupe des Trois » avec comme œuvre de Sauguet sa Danse nègre et sa Pastorale pour piano. Dès octobre 1921, il se fixe à Paris pour compléter sa formation musicale avec Charles Koechlin et travaille comme secrétaire du Musée Guimet tout en représentant une maison d'huiles de graissage. En 1923, il fonde avec trois autres jeunes musiciens (Henri Cliquet-Pleyel, Roger Désormière et Maxime Jacob) l'École d'Arcueil par amitié pour Erik Satie qui demeurait dans cette commune et, le 25 octobre 1923, présentent au Théâtre des Champs-Élysées leur premier concert. La carrière parisienne individuelle de Sauguet démarre en 1924 par le ballet Les Roses écrit à la demande du comte Étienne de Beaumont et continue avec un opérabouffe en un acte intitulé Le Plumet du colonel. Il intègre les cercles de la musique nouvelle et collabore, notamment, avec des hommes de théâtre comme Charles Dullin (Irma en 1926) et Louis Jouvet (Ondine en 1939, La Folle de Chaillot en 1945). Il s'impose avec des opérasbouffes (La Contrebasse en 1930), des opéras et opéras-comiques (La Chartreuse de Parme en 1939, La Gageure imprévue en 1942, Les Caprices de Marianne d'après Musset en 1954), quatre symphonies dont la Symphonie expiatoire (1947) à la mémoire des victimes de la Seconde Guerre mondiale, deux concertos pour piano, deux concertos pour violon, une Mélodie concertante pour violoncelle et orchestre en 1964, de la musique de chambre (Quatuor à cordes pour deux violons, alto et violoncelle, 1948), la suite symphonique Tableaux de Paris (1950). Il travaille aussi activement entre 1933 et 1965 pour le cinéma et la télévision : L'Épervier (1933) et L'Honorable Catherine (1942) de Marcel L'Herbier , Premier de cordée (1944) de Louis Daquin, Les amoureux sont seuls au monde (1948) d'Henri Decoin, Clochemerle de Pierre Chenal (1948), Don Juan (1956) de John Berry, Lorsque l'enfant paraît (1956) de Michel Boisrond, etc. Enfin, il compose vingt-sept ballets entre 1924 et 1965, dont La Chatte (1927), La Nuit (1929), Mirages (1943), La Dame aux camélias (1957) et Pâris (1964). Les Forains, créé le 2 mars 1945 au Théâtre des Champs-Élysées sur un argument de Boris Kochno, connaît un succès immédiat et lance son jeune chorégraphe, Roland Petit. Henri Sauguet disait de son art : « Être simple en usant GAETANO DONIZETTI Ses dates : 1901-1989 Sa vie de compositeur : Dès l'âge de cinq ans, il reçoit de sa mère, Élisabeth Sauguet, dont il adoptera le nom de jeune fille comme pseudonyme, et de Marie Bordier ses premières leçons de piano. Puis, il suit les cours de Melle Loureau de la Pagesse, organiste de chœur de l'église Sainte-Eulalie de Bordeaux, sa paroisse. La musique d'église et plus spécialement l'orgue ont sans aucun doute marqué profondément sa jeunesse. En effet, il a été élève d'orgue de Paul Combes et a occupé le poste d'organiste de l'église Saint-Vincent de Floirac de 1916 à 1922. « L'orgue ! Le rêve de ma jeune existence » écritil dans son ouvrage autobiographique, La Musique, ma vie. Autre influence décisive, celle de Claude Debussy dont l'œuvre l'enthousiasme. L'anecdote souvent racontée veut que la seule lettre qu'il se décida à lui écrire parvînt au compositeur le jour de sa mort, le 23 mars 1918. La mobilisation de son père en 1915 l'oblige à s'occuper de la mercerie familiale ; il est l'aîné, son frère est trop jeune et sa mère trop inquiète délaisse la responsabilité de leur commerce. Une fois son père revenu après avoir été blessé, Henri devient employé à la Préfecture de Montauban en 1919-1920. Il se lie d'amitié avec Joseph Canteloube qui lui enseigne la composition (Canteloube est célèbre, par ailleurs, pour avoir recueilli - collecté - et harmonisé un certains nombre de chants traditionnels auvergnats, qu'il a réunis sous le titre de Chants d'Auvergne). Revenu à Bordeaux, Sauguet fonde le « groupe des Trois » avec Louis Émié et Jean-Marcel Lizotte dans le but de 4 d'un langage complexe n'est pas facile. Il faut écouter le conseil de Rameau qui prescrivait de cacher l'art par l'art même et croire avec Stendhal que seules les âmes vaniteuses et froides confondent le compliqué, le difficile avec le beau. » Il a été élu à l'Académie des beaux-arts en 1976, Officier de la Légion d'honneur, officier dans l'ordre national du Mérite et commandeur dans l'ordre des Arts et des Lettres, il a présidé durant de nombreuses années à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques et l'association Una Voce. Henri Sauguet a été le compagnon du peintre et scénographe Jacques Dupont jusqu'à la mort de celui-ci. Ils sont inhumés dans la même sépulture au cimetière de Montmartre. Ses dates : 1927 : La chatte, ballet 1939 : La chartreuse de Parme, opéra 1940-1945 : Symphonie n°1 1945 : Les forains, ballet 1946 : Farrebique, film de Georges Rouquier 1948 : Clochemerle, film de Pierre Chenal 1953-1954 : Les caprices de Marianne, opéra 1971 : Symphonie n°4 UN MUSICIEN DANS SON SIÈCLE PAR CLAUDE SCHNITZLER (DIRECTEUR MUSICAL DU PROJET) Lorsque Sauguet compose les Caprices de Marianne d’après l’œuvre de Musset, il est dans sa pleine maturité créatrice, ayant à peine dépassé la cinquantaine. Son immense talent est reconnu et il peut se prévaloir d’un catalogue très varié qui aborde à peu près tous les genres, de l’opéra à la symphonie, en passant par la musique de chambre. Il s’illustre également avec bonheur dans le domaine de la mélodie, du ballet et de la musique de film. Sur un livret de Jean-Pierre Grédy, Sauguet fait preuve d’une inventivité étonnante ; il excelle à créer des climats spécifiques, passant de l’ombre à la lumière, de la tragédie à la farce, parsemant sa partition de trouvailles inattendues qui sont autant d’agréables surprises pour le spectateur. C’est un ouvrage de très grande qualité, qui ne recherche pas l’innovation à tout prix, mais qui s’inscrit dans la continuité de l’histoire de l’opéra-comique français. Sauguet est, au départ, un autodidacte dont la vocation fut contrariée par son entourage (son père notamment) et par les circonstances (la première guerre mondiale). C’est en 1921 - Sauguet est alors âgé de 21 ans - que le petit provincial peut «monter à Paris» pour y recevoir l’enseignement de Charles Koechlin. Les modèles de Sauguet sont principalement Debussy, dont il fut un admirateur inconditionnel, et Satie, qui eut une influence indiscutable sur son esthétique. Sans jamais plagier ses illustres prédécesseurs, il en retient l’esprit et forge son propre langage, très personnel, dont l’apparente facilité cache un discours musical très élaboré. Créateur fécond, inventif, personnalitéà l’intelligence vive et exceptionnelle, son style se caractérise par un langage harmonique chatoyant, fondé sur une polyto- -nalité raffinée, une rythmique complexe, avec des carrures irrégulières souvent surprenantes, une connaissance parfaite des voix solistes qu’il pousse à leurs limites extrêmes sans jamais aller au-delà du possible; par une science de l’orchestration aussi, faite d’une alchimie des timbres absolument exemplaire. A la création au Festival d’Aix-en-Provence, en 1954, Les Caprices de Marianne connut un accueil quelque peu réservé. C’est sans doute que l’ouvrage arrivait à un moment peu opportun, alors que survenait un changement d’esthétique radical parmi la génération des compositeurs français d’après-guerre. Pour un public traditionnel, l’opéra de Sauguet a alors pu sembler trop «moderne», tout en étant jugé «académique» par l’avant-garde d’alors. Même si Les Caprices de Marianne ont été donnés assez régulièrement (Tours, Compiègne, Saint-Céré) l’ouvrage est toujours considéré comme une «rareté». A n’en pas douter, la présente production sera une découverte pour beaucoup, une redécouverte pour les autres. Puissent ces représentations inciter un vaste public à explorer davantage l’œuvre de Henri Sauguet, compositeur passionnant et incontournable du siècle précédent. 5 EN SAVOIR PLUS . . . LES PISTES D’ETUDES - L’origine du livret : la pièce d’Alfred de Musset - Alfred de Musset - Henri Sauguet et la musique lyrique - Un air de musique française - Que s’est-il passé en 1954? L’ORIGINE DU LIVRET : LA PIÈCE D’ALFRED DE MUSSET Alfred de Musset appartient au courant romantique. En littérature, il concerne aussi bien la poésie, que le roman ou le théâtre. Ce mouvement culturel est apparu à la fin XVIIIe siècle et s’est diffusé jusqu’aux années 1850. Il se caractérise par une volonté d'explorer toutes les possibilités de l'art afin d'exprimer ses états d'âme : il est ainsi une réaction du sentiment contre la raison, exaltant le mystère et le fantastique et cherchant l'évasion et le ravissement dans le rêve, le morbide et le sublime, l'exotisme et le passé. Le thème de la mort est présent. Les actions sont nombreuses. On y trouve de la dérision, des plaintes, des larmes. Les registres opposés du tragique, du pathétique et du comique, ainsi que le lyrique, sont ainsi étroitement associés. C'est une pièce qui montre jusqu'où peut aller l'amour, surtout quand il est contrarié, Elle tend à montrer la passion à l'œuvre. L’œuvre théâtrale de Musset ne se base pas sur ce qui faisait la base du théâtre classique, c'est-à-dire qu'il rejette, entre autres, la règle des trois unités (lieu, moment, action) et la distinction absolue entre tragédie et comédie. Son œuvre Les Caprices de Marianne est un drame romantique. Elle n’est pas une pièce en vers, comme la tragédie. Les personnages sont confrontés à l'amour malheureux, à des réalités difficiles qui les poussent, pour certains d'entre eux, à l'ivresse ou au désespoir. Le « moi » s’exprime à la première personne. Cela donne une dimension plus personnelle au récit, car on privilégie ainsi l’individu. Ainsi, le poète fait part de ce qu’il ressent (espoirs déceptions…) et de certaines de ses expériences passées, souvent malheureuses. Nous observons ainsi un lyrisme personnel qui est visible dans : les interrogations sur une identité perturbée, l’évocation du temps et l’expression d’une perpétuelle insatisfaction qui traduit en fait le mal de vivre ou mal du siècle 6 ALFRED DE MUSSET LE DRAME DE MUSSET [source : Lagarde et Michard, XIXe siècle] De 1832 à 1835, avant de se placer lui-même, avec sa vie et ses souffrance, au cœur de son œuvre lyrique, Musset s’est surtout exprimé indirectement, par les héros de ses poèmes et de son théâtre. Nous le retrouvons, fantaisie et tendresse, dans le personnage d’Hassan (Namouna, 1832); puis, dédoublé sous les traits de Coelio, mélancolique et pur, et d’Octave, spirituel et libertin, dans Les caprices de Marianne (1833); puis tour à tour fantaissite et rêveur sous le masque de Fantasio (1834). La confidence de Musset devient plus poignante encore quand la dualité de sa nature aboutit au conflit aigu entre la débauche et la pureté. Dès la Coupe et Les lèvres (1832), Franck, le héros du drame, garde la nostalgie d’une purteé irrémédiablement perdue. Dans Namouna, l’auteur trahit son propre désarroi lorsqu’il interprète l’inconstance de Don Juan comme la marque d’un insatiable appétit d’idéal et de perfection. En réalité le poète est torturé par le sentiment que la débauche nest une maladie qui altère la fraîcheur de l’âme et laisse l’homme désemparé. ALFRED DE MUSSET BIOGRAPHIE [source : www. eternels-eclairs.fr] Alfred de Musset est né le 11 décembre 1810 à Paris dans une famille très cultivée et aimante. Il entre au collège Henri IV à 9 ans. Jusqu'en 1829, il étudie la médecine, le droit et la peinture, puis abandonne par amour pour la littérature. Il fréquente alors le Cénacle et se lie d'amitié avec Sainte-Beuve et Vigny, tout en gardant ses distances avec Victor Hugo. Sulfureux, doué pour la littérature et au tempérament de dandy, sa réputation se fait à travers Paris. Mais dévasté par le décès de son père en 1832, il se réfugie dans le théâtre, et après un échec retentissant, partira en Italie en novembre 1833. Ce voyage lui inspire Lorenzaccio en 1834 et cette même année, il écrit et publie également d'autres ouvrages. Les Nuits, chef d'œuvre lyrique du romantisme français qui fait suite à sa rupture définitive avec George Sand, sera achevé en 1837. Le reste de sa vie, de nombreuses femmes se succèderont. Le 24 avril 1845 Musset est nommé chevalier de la Légion d'honneur aux côtés de Balzac et sept ans plus tard il intègre l'Académie française. Devenu alcoolique, sa santé est de plus en plus fragile, et à bout de forces, il décède le 2 mai 1857. 7 LES CAPRICES DE MARIANNE DE SAUGUET, UNE ŒUVRE ROMANTIQUE ET MODERNE jeu de ses agresseurs et ne se regarda plus lui-même que comme un homme du passé. Étrange syndrome de Stockholm chez un artiste à qui est ravi son statut de découvreur alors qu’il a été et reste un esprit vraiment moderne. Pourquoi fallait-il qu’il acceptât le point de vue de ceux qui le jetaient vivant aux oubliettes de l’histoire musicale ? N’aurait-il pu, comme un Chostakovitch dans l’intolérante Russie communiste ou un Britten dans l’Angleterre post-victorienne, revendiquer tranquillement « sa » modernité, éloignée de tout dogme, de tout prosélytisme ? Il est vrai que la France, pays où l’on sait si bien, comme le disait joliment Henri Dutilleux, profiter du « levain de l’étranger », est aussi un pays où l’on a tenté souvent d’imposer un modèle étranger – bouffon puis picciniste au XVIIIe siècle, wagnérien au siècle suivant et sériel après le second conflit mondial. Face à la victoire de la seconde École de Vienne, il ne restait plus à Henri Sauguet que la voie d’un nationalisme un peu étroit, celui qu’il défend et illustre en 1985, au soir de sa vie, dans une conférence prononcée devant ses collègues de l’Institut de France et intitulée « Difficulté d’être de la musique française ». Pourtant le compositeur des Caprices de Marianne ne saurait se réduire à sa généalogie jalonnée, depuis Josquin des Prés jusqu’à Debussy, de maîtres dans lesquels il se reconnaissait. Tout comme son ami et attentif aîné Darius Milhaud, auquel il avait succédé dix ans plus tôt à l’Académie des Beaux-Arts, Henri Sauguet ne fut ni l’illustrateur d’une tradition ni vraiment un champion de la prétendue clarté française. HENRI SAUGUET PAR ALAIN SURRENS, DIRECTEUR DE L’OPÉRA DE RENNES La création, en juillet 1954, des Caprices de Marianne au festival d’Aix-en-Provence, festival encore jeune puisqu’il avait été créé six ans plus tôt, fut la dernière des créations pour la scène lyrique d’Henri Sauguet, alors âgé de cinquante-trois ans. Achevé vingt ans plus tard, son ultime opéra, Le pain d’autrui, d’après une nouvelle de Tourgueniev, n’allait pas trouver preneur et ne fut jamais créé. Jusqu’à sa mort en 1989, Henri Sauguet devait rester une personnalité éminente de la vie musicale française. Il allait encore composer plusieurs musiques de ballet, son genre de prédilection, quelques musiques de films aussi car il appartenait à la génération de ces compositeurs qui considéraient que ce domaine de la musique de fonction ne devait pas être abandonné à des spécialistes. Mais, pour le grand orchestre, il ne devait plus signer que deux pages concertantes et en 1971 une quatrième et dernière symphonie, ironiquement sous-titrée « Du troisième âge ». Le temps d’Henri Sauguet était passé. Avec le recul, Les Caprices de Marianne appartiennent, à côté des trois premières symphonies et des étonnantes Visions infernales, cycle de mélodies sur des poèmes de Max Jacob, à ce qu’on peut considérer comme l’apogée de sa carrière et de son œuvre, la grande floraison de la décennie 1945-1955. . Ce qu’il avait appris de ses maîtres, Erik Satie et Charles Koechlin, l’entraînait d’ailleurs dans le sens opposé. Le premier lui donnait l’exemple d’un ascétisme extrême, d’une simplicité qui pouvait faire naître des partitions à la fois provocantes et irrésistibles. Le second, à côté de ses excellents conseils d’orchestration, lui apportait une éthique de l’originalité, une traduction en musique du « connais-toi toi-même », qui allait permettre à Henri Sauguet de n’être jamais un autre, en effet, et de ne jamais fuir la complexité si elle devait être la meilleure interprète de son inspiration. Les Caprices de Marianne sont le fruit mature d’un langage musical bien plus divers et profus que le compositeur ne l’avouait lui-même. Ce qu’Henri Sauguet aime dans le romantisme, ce sont les innombrables lignes de fuite qu’ouvrent les personnages et leur confrontation, et bien sûr la relation qu’ils entretiennent avec leur environnement naturel et social. Toute la partition oppose mais aussi juxtapose des sentiments, des dialogues, des situations, des impressions, des caractères dont chacun est dépeint musicalement avec une grande acuité. Les Bientôt ce provincial devenu parisien en diable, ce gourmand de bons mots, ce personnage insincère et caustique par nécessité, deviendrait un artiste blessé, meurtri par l’incompréhension de ses cadets et d’un public tout acquis à de nouvelles modernités. A l’instar d’autres créateurs de sa génération, il joua malheureusement le 8 quatre protagonistes principaux sont eux-mêmes contradictoires, changeants ; ils évoluent tout au long de l’œuvre avec cette subtilité qu’Alfred de Musset avait apprise de Marivaux et qui donne à son théâtre une splendide unité. Soixante ans après sa création, la partition des Caprices de Marianne reste le « poème d’un jaillissement lyrique ininterrompu » que saluait Marcel Schneider après la reprise à Paris de mai 1956. C’est très sincèrement qu’Henri Sauguet refusait de se comparer à Richard Strauss dont il admirait le génie. La comparaison n’est pourtant pas hors de propos tant, chez Sauguet, le mélange de naturel et de sophistication tient ses promesses d’un début à l’autre de la partition. Mais il faut plutôt tendre l’oreille du côté de la langue française pour mieux constater combien est originale la solution trouvée par Henri Sauguet au beau milieu de cette lignée qui part de Claude Debussy et se poursuit aujourd’hui du côté des « trois Philippe » (Hersant, Fénelon, Manoury, auquel on peut désormais ajouter Hurel), après être passée par Maurice Ravel, Francis Poulenc, Darius Milhaud, Arthur Honegger et Olivier Messiaen. Une solution qui est surtout à louer dans sa relation avec l’étrange et belle comédie d’Alfred de Musset dont elle est une transposition musicale aussi imaginative que fidèle, aussi moderne que romantique d’esprit. Car cette fois, Henri Sauguet n’a pas adapté un roman comme il l’avait fait avec La Chartreuse de Parme de Stendhal. C’est une pièce de théâtre qu’il a choisie S’il est un homme de musique, Henri Sauguet est aussi, presque à égalité, un homme de la scène. Il aime la danse et c’est à Serge Diaghilev avec La Chatte, Serge Lifar dans Mirages, Roland Petit avec Les Forains, qu’il devra ses plus grands succès. Mais cet homme qui n’a nulle formation de comédien est surtout fou de théâtre. Il compose des musiques pour Charles Dullin, Louis Jouvet, Jean-Louis Barrault, Jacques Charon, et se fait mettre en scène par Marcel Herrand en Madame Pernelle du Tartuffe. Car le travestissement l’amuse : à Aix-en-Provence, le compositeur de l’œuvre en création au soir du 27 juillet 1954 ne sera pas dans la salle mais sur le plateau, jouant le rôle muet d’un mendiant qui accueille Marianne à la porte de l’église ! La réussite des Caprices de Marianne doit beaucoup au librettiste que s’est choisi le compositeur pour adapter le texte de Musset. Ce librettiste, c’est Jean-Pierre Grédy, qui associé à Pierre Barillet durant près de quarante ans, allait offrir à Jacqueline Maillan et Sophie Desmarets leurs plus grands succès (Folle Amanda, Potiche, Fleur de cactus, Peau de vache) sur les boulevards et dans les théâtres de la France entière. Il était alors un jeune auteur – il a aujourd’hui quatre-vingt-seize ans –, enthousiasmé par la tâche délicate que représentait une adaptation passant par le remplacement de certains personnages secondaires au profit d’autres, entièrement nouveaux et plus en rapport avec les nécessités de l’expression musicale. Il s’agissait en outre de réduire le texte de certains monologues ou dialogues mais aussi d’en ajouter, par endroits, pour que puissent se déployer des sous-entendus musicaux ou des superpositions de lignes vocales. Ainsi était constitué un livret « sur mesure » grâce auquel lequel le compositeur allait pouvoir rendre perceptibles toutes les facettes de ses personnages, toute la complexité de leurs relations, et des atmosphères qui n’étaient que fugitives dans la pièce de Musset. Mais cette subtilité, cette profusion de détails, sont admirablement équilibrées par l’unité du propos, unité surtout dans la déclamation, qui réalise une synthèse hardie de l’air et du récitatif, fusionnant le plus souvent dans un arioso souple et expressif qui rend le texte parfaitement compréhensible. L’orchestre, de taille très raisonnable, est voulu lui aussi expressif et limpide. Il est traversé de motifs mélodiques et rythmiques qui répondent à ceux des lignes de chant, les accords sont le plus souvent aérés afin de rendre le discours intelligible, et les timbres conservent toujours une remarquable transparence. Tout est fait pour fluidifier cette conversation musicale nuancée qu’avait recherchée Henri Sauguet et qu’il a parfaitement réussie. 9 ARTICLE TIRÉ DE HENRI SAUGUET, L’HOMME ET L’ŒUVRE, 1983 10 11 12 13 14 15 16 17 CLASSICA RÉPERTOIRE, JUILLET/AOÛT 2005 18 19 QUE S’EST-IL PASSÉ EN 1954? 15 FÉVRIER : BORIS VIAN ÉCRIT LA CHANSON LE DÉSERTEUR, chantée en mai par Mouloudji, elle est aussitôt interdite à la radio. 15 MARS : PUBLICATION DE BONJOUR TRISTESSE DE FRANÇOISE SAGAN, . L’ABBÉ PIERRE 21 JANVIER : LANCEMENT DU PREMIER SOUS-MARIN NUCLÉAIRE L'USS "Nautilus" sort des chantiers navals de Croton dans le Connecticut. Long de 91 mètres et pesant plus de 3 000 tonnes, le "Nautilus" est le premier bâtiment à propulsion nucléaire au monde. Il est baptisé ainsi en hommage à Jules Vernes et au sous-marin du Capitaine Nemo dans "Vingt mille lieues sous les mers". Il entrera officiellement en fonction à partir du mois de septembre. Le "Nautilus" est capable de rester plusieurs semaines immergé et de parcourir ainsi 140 000 kilomètres. En août 1958, il sera le premier bâtiment à naviguer sous la calotte glacière du pôle Nord. ELVIS PRESLEY 6 JUIN : CRÉATION DE L'EUROVISION L'Union européenne de radiodiffusion et de télévision (UER), organisme groupant les pays de l'Europe occidentale, est fondée. Elle est chargée de coordonner les échanges de programmes de radio et de télévision entre les pays membres. Son centre administratif est situé à Genève et son centre technique à Bruxelles. L'expression "Eurovision" lancée par un journaliste anglais ne tardera pas à s'imposer. 1ER FÉVRIER : HIVER 54, L’APPEL DE L’ABBÉ PIERRE Henri Grouès, plus connu sous le nom de l'abbé Pierre, lance un cri d'alarme contre la misère, sur Radio Luxembourg (RTL). Cet appel à "l’insurrection de bonté" intervient juste après le décès d’une femme, morte de froid dans la rue. Cette année-là, l’hiver est particulièrement rigoureux et s’apprête à faire d’autres victimes. Le fondateur d’Emmaüs incite tous les Français à recueillir les sans-logis chez eux, à donner des couvertures, de la nourriture et du temps afin de sauver la vie de dizaine de milliers de personnes. L’appel est entendu et la France assiste à l’un des plus grands élans de générosité de son histoire. Le mouvement aboutira au vote d’une loi interdisant l’expulsion des locataires en hiver. Quant à Emmaüs, l’association prendra de plus en plus d’ampleur et s’étendra sur le monde entier. 5 JUILLET : ELVIS ENREGISTRE SON PREMIER TUBE A 19 ans, Elvis Aaron Presley enregistre pour l'anniversaire de sa mère la chanson "That's all right, Mama" dans le petit studio Sun de Memphis. Le titre est une reprise du chanteur de Rhythm and Blues Arthur Crudup. Elvis qui exerce le métier de camionneur et chante dans la chorale de l'église que fréquente ses parents, est remarqué lors de l'enregistrement par le producteur et propriétaire du studio, Sam Phillips. Il lui fera chanter pendant un an le répertoire rock'n roll, de "Blue moon of Kentucky" à "Good rocking tonight". La carrière d'Elvis est lancée. 20 1ER DÉCEMBRE : PRIX NOBEL DE LITTÉRATURE POUR HEMINGWAY Le prix Nobel est attribué à Ernest Hemingway et vient ainsi récompenser l’œuvre la plus représentative de la « Lost Generation » de l’entre-deux-guerres. Personnage à la vie aventureuse, il est notamment l’auteur de « Pour qui sonne le glas » qui évoque son expérience lors de la guerre civile en Espagne. 2 DÉCEMBRE : EDGAR VARÈSE PRÉSENTE DÉSERTS Edgar Varèse présente à Paris son œuvre intitulée "Déserts". En plus des quinze instruments auxquels elle se destine, sa composition s’appuie sur les percussions et sur l’utilisation de bande magnétique. Les critiques et les spectateurs sont littéralement scandalisés. 6 DÉCEMBRE : SIMONE DE BEAUVOIR REMPORTE LE PRIX GONCOURT POUR SON ROMAN LES MANDARINS. Elle y met en scène un groupe d'intellectuels parisiens qui confrontent leurs réflexions sur une société affectée par la Seconde guerre mondiale et la guerre froide. DES CENTAINES DE MILLIERS DE RÉFUGIÉS FUIENT LE NORD VIÊT NAM, APRÈS LA VICTOIRE DU VIÊT MINH, COMME ICI À HAÏPHONG EN AOÛT 1954 21 JUILLET : FIN DE LA GUERRE D'INDOCHINE Ouverte le 26 avril, la Conférence de Genève rassemble les représentants de 19 puissances, dont la France, les Etats-Unis, l’Angleterre, l’URSS, la Chine, la Corée et le Viêt-Nam. Elle se clôt avec la signature d’accords mettant un terme à la guerre d’Indochine. Outre le cessezle-feu au Viêt-Nam adopté sous l’impulsion de Mendès France, ces accords divisent le pays en deux États, avec une frontière fixée au 17e parallèle. Par ailleurs, ils reconnaissent l’indépendance totale du Laos et du Cambodge. Les Français doivent se retirer d’Indochine. 30 OCTOBRE : SORTIE AU CINÉMA DE CARMEN JONES, film d’Otto Preminger, interprété uniquement par des noirs. 3 NOVEMBRE : SORTIE AU JAPON DU PREMIER FILM DE GODZILLA. 21 L’ARGUMENT PAR ALAIN SURRANS, DIRECTEUR DE L’OPÉRA DE RENNES LES CAPRICES DE MARIANNE, SCÈNE APRÈS SCÈNE ACTE 1 SCÈNE 1 - Pas d’ouverture orchestrale à cet opéra dont la première scène est néanmoins une manière de prélude. Jean-Pierre Grédy et Henri Sauguet inventent un personnage qui n’existait pas dans la comédie d’Alfred de Musset. Ce chanteur de sérénades joue un rôle analogue à celui du chœur antique et nous conduit droit à la question des « caprices » : Marianne s’ouvrira-t-elle à l’amour ? « Vous aurez vécu si vous avez aimé. La vie est un sommeil, l’amour en est le rêve. » Mais il y a du sarcasme dans son adresse à la jeune femme. Les pizzicati des cordes, la clarinette, la flûte, quelques touches de cuivres soulignent cette ironie qui est un ressort essentiel de l’ouvrage. Autre dimension importante déjà présente dans cette scène introductive : l’atmosphère, suggérée par la musique plus encore que par le texte, celle d’une ville du Sud sous le soleil d’été. Nous sommes à Naples et le décor ne sera pas de simple fantaisie comme il peut l’être dans la pièce de Musset. PROJET DE MAQUETTE LES PERSONNAGES SCÈNE 2 – Un appel de cuivres annonce l’entrée de Claudio, l’époux de Marianne. La touche ironique de la scène précédente bascule dans le comique. Un comique de répétition dans le dialogue entre le maître et son valet Tibia, la basse et le ténor bouffe, conjuguant le mot « personne » sur toutes les nuances possibles de l’exclamatif et de l’interrogatif. Mais l’orchestre nous fait déjà entendre tout ce que peut avoir d’inquiétant la jalousie de Claudio, dans le registre de basse qui est le sien. Malgré l’amusante évocation des grelots du muletier et de cocasses pizzicatos, cuivres et cordes tissent sur sa grande tirade de sombres machinations que ne feront pas oublier les nouvelles apostrophes entre les deux protagonistes, cette fois sur le mot « spadassin ». Car Claudio ne peut se défaire de cette « odeur d’amants » que Tibia, quant à lui, n’arrive pas à renifler. __ Marianne, très jeune femme / soprano __ Hermia, mère de Coelio / mezzo-soprano __ Octave / baryton __ Coelio, fils d’Hermia / ténor __ Claudio, mari de Marianne, juge / basse __ Tibia, valet de Claudio / ténor __ L’aubergiste / ténor __ Le chanteur de sérénade / baryton L’HISTOIRE Marianne, une jeune Napolitaine de dixneuf ans que sa mère a mariée à un vieux juge, n’a d’autre distraction que de se rendre à l’église plusieurs fois par jour. En chemin, elle rencontre son cousin Octave qui, auprès d’elle, plaide la cause de son ami Coelio, trop timide pour déclarer son amour. Elle commence par le rabrouer puis, par un revirement qui est un caprice, accepte d’entrouvrir sa porte à un amant. Mais lequel ? SCÈNE 3 – Nous sortons d’un coup du registre de la conver- sation en musique. Le premier air de Cœlio, précédé d’une mélancolique introduction dominée par le hautbois, se compose de cinq grandes phrases mélancoliques dont l’élégiaque désespoir s’anime, peu à peu, à l’évocation des souffrances de l’amour. Comment ne pas songer à l’émouvante confession de Pelléas juste avant son ultime scène avec Mélisande ? Cœlio n’est pas un baryton comme Pelléas mais c’est un ténor qui doit avoir la même souplesse et le même lyrisme sans affectation ni emphase. L’amour qu’éprouve Cœlio pour Marianne ne l’empêche pas d’être conscient de ce que la puissance d’une femme, lorsqu’elle est aimée, peut cacher de fragilité. Cette 22 en venir aux aveux, et son exaltation répond à l’exubérance de son ami. L’orchestre contrepointe les élans de ferveur, mais aussi les inspirations plus élégiaques du jeune homme, lorsqu’il dépeint son cabinet d’études désert ou le chasseur à l’affût d’une biche, la gorge serrée. Octave promet son aide à Cœlio au moment où réapparaît le motif des cloches, annonciateur du retour de Marianne. conscience de la complexité de l’âme féminine n’est pas dans le texte de Musset, homme du XIXe siècle persuadé de l’impossibilité de compréhension – et de communication – entre les deux sexes. Elle est une idée du compositeur et de son librettiste, hommes du XXe siècle, soucieux d’enrichir ainsi le portrait psychologique d’un personnage dont l’orchestre contrepointe les propos avec chaleur. L’interlude orchestral qui suit introduit le motif de tierces successives évoquant les cloches de l’église qui appellent Marianne à la prière. La première apparition de la jeune femme est ainsi placée sous le double signe de la piété et d’une joie toute juvénile. L’écriture vocale de ce soprano lyrique exige une grande agilité et des aigus rayonnants. Marianne est suivie d’une duègne qui n’a rien à voir avec Ciuta, la vieille dame qui chez Musset faisait plutôt office d’entremetteuse. Ici, officiellement, la duègne est là pour aider sa maîtresse à échapper aux tentations; elle sera aussi sa complice. Sous la plume d’Henri Sauguet, elle a surtout une fonction franchement comique, ce dont témoigne la parodie de litanie des saints que Marianne récite avec elle. Selon les indications du compositeur, ce rôle doit être un rôle travesti pour mieux renforcer l’effet burlesque de sa présence. Il s’agit aussi pour lui d’éviter une césure trop franche entre personnages comiques et dramatiques. De même que Claudio est tout à la fois inquiétant et ridicule, son épouse Marianne, dans ses pratiques dévotes, suscite autant l’ironie que le respect. En dépit de sa vocalité insolente et fière, la jeune femme ne peut s’empêcher, au milieu de la litanie, d’avouer cette fragilité qu’évoquait Cœlio dans la scène précédente. Elle se sait vulnérable face à la tentation. Le ressort de l’intrigue est ouvertement noué. À la fin de la scène apparaît pour la première fois l’aubergiste, personnage lui aussi inventé par Jean-Pierre Grédy et Henri Sauguet, apportant une nouvelle touche de cocasserie par son évocation de Naples, « ville des lazzaroni où sont nés le macaroni et la musique ! », mais aussi une atmosphère de sensualité contemplative dont les instruments de l’orchestre se font les complices. SCÈNE 5 – La litanie est cette fois plus orthodoxe. Marianne invoque la Vierge qu’elle vient de prier à l’église. Pour la première rencontre de l’héroïne avec Octave, le librettiste d’Henri Sauguet a repris l’essentiel du texte de la même scène dans la comédie de Musset, avec cette double réticence d’Octave, quelque peu précieuse et déjà galante, à nommer d’abord le mal qu’inflige Marianne à son meilleur ami, puis le nom de la victime de ce mal. Mais la mise en musique permet de faire converger les deux voix vers cette phrase qui a de toute évidence ébranlé la jeune femme : [il vous reste] « cinq années bien pleines pour que l’on vous aime, huit à dix à peine pour aimer vous-même, et le reste pour prier Dieu ». Ici, la conversation s’arrête : les deux jeunes gens regardent dans la même direction, comme deux amoureux. Mais il ne s’agit que d’un instant fugitif. Le reste de la scène n’est qu’affrontement, sauf dans la grande tirade d’Octave sur le « mal » de Cœlio, portée par de grands épanchements des cordes, et la chaleureuse évocation des vingt ans de Marianne. La scène se clôt sur un pied de nez musical de la jeune femme, en forme de chanson populaire, et sur une remontrance à la duègne. SCÈNE 6 – Scène de transition : Octave salue rapidement son cousin Claudio, l’époux de Marianne et se prend au jeu des répétitions (sur « bonjour » ici) qui caractérise ce mari jaloux et ridicule. SCÈNE 7 – Après la scène des questions sans réponse entre Marianne et Octave, en voici une autre confrontant cette fois les époux, et c’est Marianne qui fait la mystérieuse. Elle dénonce Octave qui lui a fait la cour pour le compte d’un autre mais elle ne prétend pas révéler ce qu’elle lui a répondu. Deux thèmes s’affrontent, l’un aux cordes, menaçant, l’autre plus grotesque et sautillant. Colère et galanterie ne cessent ainsi de s’opposer, illustrant tour à tour les propos des deux personnages dont le rapport apparaît bien différent de celui qu’on pouvait attendre. C’est Marianne qui a le dernier mot sur son mari dont la jalousie traduit, nous en sommes désormais certains, la faiblesse face à son épouse. Mais il faut toujours se méfier des faibles. SCÈNE 4 – Le cortège qui accompagne l’entrée d’Octave est aussi un cortège de musiques triviales évoquant la foire. On pense au thème du Petrouchka de Stravinsky. Le rythme est bien entendu celui de la tarentelle, danse du Sud de l’Italie que l’on dit descendre des rites dionysiaques et dont la pratique répétée des journées entières permettait, selon la légende, de guérir des morsures de la tarentule. C’est donc à dessein que le compositeur utilise à cet endroit le caractéristique tambourin à cymbales. La danse se désintègre par effacement progressif des instruments pour faire place à la conversation entre Cœlio et Octave. Ce dernier, baryton dans la pure tradition française, se livre à un autoportrait des plus éloquents. La musique ici est presque atonale, comme pour souligner l’équilibre instable d’un personnage qui se définit lui-même comme un danseur de corde. La conversation reprend et les fleurets mouchetés font place à plus de sincérité et d’affection réciproque. Cœlio peut en SCÈNE 8 – Claudio et Tibia restent seuls. Le climat est net- tement plus sombre que lors de leur première scène. Et la musique sonne clairement atonale, inquiétante, avec des emportements de cordes et des écrasements de cuivres déferlant par vagues jusqu’à la mention de la prison et de la peine de mort. Le ton bouffe revient lorsque Tibia évoque le greffier, sa femme et l’amant de ce dernier, le spadassin dont le nom, une nouvelle fois, est ré23 SCÈNE 3 - L’orchestre prolonge ses points d’interrogation avant le retour d’Octave, accompagné de son cortège de rythmes sautillants. Cette humeur légère s’interrompt lorsque Cœlio avoue le sujet du livre qu’il tient à la main. À l’évocation de la mort, les phrases musicales s’allongent et se cantonnent dans le registre grave. « L’amour et la mort se tiennent la main et vont ensemble le même chemin ». Octave répète avec Cœlio cette phrase mélodieuse – un procédé qu’on avait déjà vu à la scène 5 de l’acte I, entre Octave et Marianne. À l’orchestre, la belle ligne des cordes souligne la profondeur de cette phrase en même temps qu’elle exprime l’amitié qui lie les deux jeunes gens. Les rythmes insouciants associés à Octave reprennent ensuite, mais ils sont à nouveau brisés, cette fois par de courtes phrases exprimant le trouble du jeune homme face aux réticences de Cœlio qui s’éloigne rapidement. pété à l’envi par les deux personnages. Claudio, dans son monologue, recourra au même effet grotesque avec sa « machine assassine ». Mais, portée par de nouveaux emballements de l’orchestre, cette tirade est plus inquiétante encore que les précédentes. 9 – Seule à son tour, Marianne s’épanche. Le désordre de son cœur est souligné par ceux de la tonalité dans ce cette grande page qu’ouvre le violon solo, symbolisant le « jeune rossignol qui chante au fond de [s]on cœur ». Entre les reprises successives de son invocation, « Amour, mystérieux amour », les sentiments de Marianne sont à nu. La jeune femme ne peut dire encore qui elle aime mais déjà elle s’avoue qu’elle aime. C’est un aveu que ne lui autorisait pas Musset dans sa pièce. JeanPierre Grédy et Henri Sauguet n’ont pas voulu se contenter du portrait d’une femme fière et ils ont eu bien raison d’offrir à leur héroïne un air digne de ce nom. C’est en s’exposant ainsi que sa vulnérabilité devient l’égale de celle de Cœlio. Le plaidoyer féministe avant la lettre du deuxième acte n’en sera que plus émouvant. SCÈNE SCÈNE 4 - L’affection d’Octave pour son ami est comme exaspérée : les rythmes associés au personnage deviennent rageurs. « Voici Marianne qui se rend à vêpres », accompagnée de la duègne mais non pas cette fois du motif de tierces imitant les cloches. Le violon solo risque une roulade pour rappeler le rossignol qui, tout à l’heure, chantait dans le cœur de la jeune femme. Octave prend sur lui de mentir à Marianne – il sait parfaitement que Cœlio n’a nullement renoncé à son amour mais il veut la tester. Ce mensonge, comme la mission d’ambassadeur qu’il a acceptée, fait verser le jeune homme dans la galanterie. Marianne commence par railler l’amour de Cœlio, cet amour « qui était quelque chose comme du chinois ou de l’arabe puisqu’il lui fallait un interprète ». Sur un ton grave, Octave lui fait reproche de son indifférence. « Vous êtes une rose du Bengale, sans épine et sans parfum ». Puis il risque une pique qu’on qualifierait aujourd’hui de machiste : « Une fleur sans parfum n’en est pas moins belle ». Marianne réagit avec dignité en soulignant l’égoïsme du désir masculin : « Qu’est-ce après tout qu’une femme ? C’est une distraction ». Elle délivre sa leçon avec simplicité mais les grands intervalles de la belle mélodie tissée pour elle par le compositeur trahissent son indignation et son émotion. Elle s’attendrit pour finir sur le rêve du « bonheur d’une vie ». Mais la duègne, la trompette et la flûte terminent cette scène intense sur un joli pied de nez. ACTE 2 1 - L’Aubergiste reparaît pour une scène de pure atmosphère évoquant la fin de la sieste. À l’orchestre, le hautbois mène le jeu, la voix du chanteur lui répondant sur le même ton de nonchalance un peu affectée. Les petits gruppetti qu’ils partagent avec la flûte et les cordes évoquent l’Espagne plus que l’Italie, mais Naples n’est-elle pas la plus hispanique des villes du sud de la péninsule ? SCÈNE SCÈNE 2 - Comme chez Musset, Hermia, la mère de Cœlio, n’apparaît que dans une scène – et sans Malvolio, l’intendant que lui assigne Musset. Jean-Pierre Grédy a eu l’excellente idée de déplacer cette scène du premier au second acte. Ainsi la confidence d’Hermia à Cœlio fait-elle naître plus directement le soupçon dans l’esprit du jeune homme (au lieu de lui être inspirée par une confidence de l’entremetteuse CIuta). Tout comme son père avait gagné le cœur d’Hermia après s’être présenté à elle en ambassadeur d’un autre, Octave n’est-il pas en train de faire naître l’amour en Marianne ? Hermia est chantée par une mezzo-soprano. Elle est veuve mais jeune encore. Elle répond calmement à son fils en de longues phrases qui expriment son amour maternel. Celui-ci, sur un ton plus beaucoup plus animé, rythmé par l’écho des sérénades et des fêtes, l’interroge sur ses amours passées. La gravité d’Hermia fait place à l’émotion contenue quand elle narre le destin du jeune homme qui l’aima. Saisi, Cœlio va répéter par trois fois : « Il s’était cru trompé par son ami. » Hermia devine le tourment de son fils et son ton change une nouvelle fois. Son inquiétude semble se transmettre à un orchestre interrogatif lorsqu’elle l’exhorte : « Tâchons de vivre et de regarder ensemble, moi le passé, vous l’avenir ». Cœlio n’est pas sorti de sa sidération; il répète : « Le passé, l’avenir… » 5 – Sans doute pour se cacher à lui-même l’émotion qu’il a ressentie en écoutant Marianne, Octave fredonne sa désinvolture et demande à l’aubergiste de porter un billet à une belle rousse nommée Rosalinde. Le nonchalant aubergiste entonne la lascive mélodie espagnole qui ouvrait ce second acte. Et Octave, reprenant le dernier vers de ce poète amateur, « Toute femme en soupirant voudra qu’on l’aime », s’avoue gagné par la tristesse. SCÈNE 24 SCÈNE 6 - Malgré les traits d’ironie que se décochent Octave et Claudio, malgré les nouveaux effets de répétition comique (sur « si vite » puis « absolument tout ! »), la conversation des deux cousins est dominée par la menace que l’époux de Marianne veut faire planer sur son interlocuteur. Les assauts d’ironie (« cousin plein de science, cousin plein de facétie, cousin plein de causticité ») se transforment presque en insultes. Coups de semonce de la trompette avec sourdine, gammes descendantes rompues, accélérations, silences brutaux : la partition de l’orchestre contrepointe avec éloquence cette joute agressive. -jours montant vers les aigus. Les grandes phrases calmes et dignes vont faire place désormais à des séquences plus courtes. Les vocalises sur une syllabe sont aussi plus fréquentes. Une autre Marianne fend la cuirasse, plus féminine, plus conquérante, déterminée à vivre pleinement et à exprimer avec sa voix tous les états de son âme. SCÈNE 11 - Cette nouvelle Marianne se confronte et aus- sitôt à Octave. Elle se livre sur un rythme de valse à un jeu de séduction qui surprend le jeune homme. Voici donc l’épouse sage et dévote prête à s’abandonner à ses caprices. Octave en profite pour se faire à nouveau l’interprète des sentiments de Cœlio. Les belles phrases mélodiques de son arioso sont amoureusement accompagnées par les cordes, et l’on comprend la remarque de Marianne : « En vérité, ne croirait-on pas que c’est pour vous que vous parlez ? » La jeune femme s’est laissé gagner par la gravité d’Octave. Ses répliques retrouvent un ton plus mesuré, des lignes mélodiques moins excentriques. Cependant, sa détermination est claire. Elle ne veut pas entendre parler de Cœlio. Octave répète avec elle « n’importe qui » puis « qui vous voudrez/qui je voudrai », sidéré par la détermination de la jeune femme à s’offrir au premier venu plutôt que d’ouvrir son cœur à un homme qui l’aime. L’orchestre accompagne par vagues de crescendos le dialogue passionné des jeunes gens. La scène s’achève sur une note presque sensuelle des cordes et du cor anglais, lorsque Marianne donne à Octave son écharpe en guise d’oriflamme. SCÈNE 7- Le hautbois et l’aubergiste dépité n’arrachent à Octave qu’un sarcasme en imitation. Les cuivres graves et le tambourin à cymbales réapparaissent pour accompagner la chanson à boire dans laquelle se lance le jeune homme. Mais le cœur n’y est pas : « Le peste soit de l’univers. Essayons d’ensevelir ma tristesse dans ce vin. Ou ce vin dans ma tristesse ». Le « La la la la » manque d’entrain. 8 - Marianne revient des vêpres sur une sonnerie des vents de l’orchestre qui ne ressemble désormais que de loin, comme en écho, à une volée de cloches. L’acidité de sa conversation avec Octave est révélatrice de l’éternelle incommunicabilité entre homme et femme qui est au centre de la pièce et de toute l’inspiration d’Alfred de Musset. Marianne souligne la contradiction d’Octave, amateur de vins raffinés mais aussi d’amours vulgaires : « Vos lèvres sont délicates mais votre cœur s’enivre à bon marché. » Le jeune homme emprunte à son tour le ton de la raillerie. L’opéra écourte la scène de Musset dont la suite ne faisait que remâcher ce dialogue de sourds empreint de colère rentrée. Car Sauguet préfère s’en tenir à l’illustration plus chaleureuse d’une conversation sincère par un orchestre attentif à épouser les inflexions de chaque phrase. Dans sa conception, les personnages des Caprices de Marianne sont d’abord les victimes et non les instruments de leur impossibilité à communiquer. SCÈNE 12 - En fait, Octave a bien compris que les propos de la jeune femme s’adressaient à lui et non au « premier venu ». Ici, Jean-Pierre Grédy a voulu être plus explicite encore que Musset. Il fait dire à Octave : « Souffler une maîtresse à une ami est un jeu qui ne m’amuse plus. » Quoi qu’ait pu faire croire le ton passionné du jeune homme dans la scène précédente, le doute ne doit pas être permis. C’est Marianne, et elle seule, qui n’est pas sincère. Pourtant le violon solo est toujours là pour figurer le rossignol qui chante en son cœur, mais la flûte et le cor le font presque aussitôt taire. SCÈNE 9 - Si Claudio devient plus précis dans la menace, c’est à la surprise de Marianne qui découvre soudain la détermination de son mari. Les cuivres haletants qui accompagnent les propos obsessionnels du jaloux s’opposent aux cordes soulignant ceux de Marianne. Le discours est haché mais sous-tendu par une progression harmonique qui se résout une première fois sur le mot « couvent » puis se transforme en péroraison à laquelle participent aussi la duègne et Tibia. On peut noter que, chez Musset, la menace, dans la scène correspondante, était plus voilée; il n’y était pas question de couvent. SCÈNE SCÈNE 13 - C’est sur un ton solennel, soutenu par une son- nerie des instruments à vent, qu’Octave remet à Cœlio l’écharpe de Marianne. Puis l’orchestre et le jeune homme se font plus mystérieux pour décrire l’attente de la jeune femme. Enfin reviennent les déhanchements carnavalesques: tambourin, clarinette et trompette avec sourdine s’animent à nouveau lorsque Octave conseille à son ami de se masquer et de revêtir un manteau long. L’exaltation de Cœlio, soutenue par les cordes,débouche sur un duo des deux jeunes gens sur les paroles décrivant une Marianne prête à se donner. Octave peut retourner à ses plaisirs. Son apostrophe à l’aubergiste est joyeusement soutenue par l’orchestre, sur un rythme de danse sautillant. SCÈNE 10 - Mais c’est ainsi cette menace même qui provoque l’explosion de Marianne. La vocalité du personnage, caractérisée par des grands intervalles qui l’entraînent souvent vers le registre le plus élevé, est ici exaltée par la surprise, la colère, puis l’esprit de vengeance et la détermination. La jeune femme envoie la duègne chercher Octave et reprend son discours tou- 25 14 - Le court prélude, sombre, légèrement dissonant, annonciateur d’orage, se dissipe lorsque paraît Marianne. Faisant écho à celui de l’aubergiste tout à l’heure, son chant sensuel, ponctué par le tambourin, associe les langueurs de la nuit napolitaine à « l’attente du plaisir » qui fait « frissonner [s]on sein nu ». SCÈNE 18 - L’effroi de Marianne épouse une courbe ascendante qui culmine sur le mot « cri », basculant dans la douleur. Un nouvel accès de désespoir monte jusqu’à l’apostrophe à Octave, un troisième bute sur le mot « caprice ». SCÈNE SCÈNE 19 - L’explosion de douleur de Marianne et le début de la dernière constituent l’ultime ajout de Jean-Pierre Grédy au texte de Musset. Le librettiste d’Henri Sauguet a eu l’excellente intuition dramaturgique qu’il serait plus frappant d’achever l’opéra aussitôt après le meurtre plutôt que de convoquer Marianne et Octave, quelques semaines ou mois plus tard, sur la tombe de Cœlio. La jeune femme exprime ainsi un amour qui n’a plus rien du caprice et se rachète ainsi à ses propres yeux, sinon aux yeux d’Octave. C’est encore frémissante qu’elle s’abandonne et demande à celui qu’elle aime de l’emmener loin de son époux. Mais, pour la dernière fois, les deux jeunes gens vont se parler sans pouvoir s’écouter. Ils chantent un moment ensemble, mais sans regarder dans la même direction comme lors de leur première rencontre. Marianne est tout entièreà son amour, Octave est tout entier à l’amitié et à l’ami perdus. Les cordes palpitantes sont le seul lien entre eux. Le jeune homme chante une élégie qui est aussi une déploration, un adieu. Marianne aura beau imiter sa ligne de chant, mêler sa voix à la sienne sur le mot « existe », Octave achève sa déploration par la phrase que Musset avait choisie p o u r conclure sa pièce : « Je ne vous aime pas Marianne. C’est Cœlio qui vous aimait ». L’orchestre conclut à son tour en reprenant plusieurs fois, morendo, une succession d’accords funèbres. SCÈNE 15 - Cette scène, comme la précédente, a été ajou- tée par le compositeur et son librettiste à la pièce originale d’Alfred de Musset. Elle nous fait assister à la découverte par Marianne du projet meurtrier de son mari. L’orchestre accompagne avec véhémence le sinistre dialogue avec Tibia, culminant sur « Je veux du sang ! » La lâcheté de Claudio l’empêche d’accomplir luimême sa vengeance mais elle ne le rend pas moins effrayant. C’est le spadassin dépêché par Tibia, personnage muet comme le sont les exécuteurs dans la pièce de Musset, qui frappera Cœlio. Marianne cherche comment avertir Octave ; mais il n’y aura pas, comme chez Musset, de message écrit envoyé par la jeune femme. Les propos de Claudio sont contrepointés par ses « ah ! » d’épouvante. La fureur de l’époux atteint son stade ultime, symbolisé par une explosion de l’orchestre. Mais il poursuit encore sa péroraison, évoquant le hibou, l’esturgeon, la sorcière, la déesse Hécate aux trois visages, le tout sur un tapis sombre et frémissant de cordes et de cuivres. Le mari jaloux, lâche et méchant de Musset se transforme, sous la plume de Grédy et Sauguet, en créature maléfique. SCÈNE 16 - Le contraste est frappant avec les mesures qui ont précédé. L’apparition de Cœlio est accompagnée par la musique primesautière du prélude qu’entonnait au tout début du premier acte le chanteur de sérénades. Rien que de très naturel puisque le jeune homme se met lui-même, cette fois, dans la posture du donneur de sérénades. Le tambourin d’Octave se joint aux instruments dans sa ritournelle circulaire. Et précisément, c’est le nom d’Octave que Cœlio entend dans la bouche de Marianne. La jeune femme est affolée, les roulements de timbales viennent signifier le basculement de la scène. Marianne se retire après avoir exhorté son soupirant à s’éloigner. Cœlio reprend la mélodie douce-amère de son tout premier air, à la scène 3 du premier acte, avec la complicité cette fois de la clarinette. Il chante gravement le double mensonge de l’amour et de l’amitié, l’orchestre figurant par ses accords funèbres un glas annonciateur de la mort à laquelle désormais le jeune homme aspire. Scène 17 - Cette scène ne doit à Musset que l’exclamation d’Octave : « O Marianne, si je t’avais aimée, tu m’aurais détesté. » Auparavant, nous l’avons retrouvé insouciant, en compagnie de l’aubergiste, de nouveau accompagné des rythmes de foire des cuivres et des cordes. C’est le cri de Cœlio qui fait pressentir à Octave le drame qui vient de se nouer. Il croise Claudio qui, son forfait accompli, a retrouvé toute on calme. L’évolution de ce personnage est décidément très impressionnante. Sur ses paroles impavides, les cordes dessinent de sinistres volutes, alternant avec les coups de boutoir du destin. 26 LA PRODUCTION MISE EN SCÈNE -sande de Debussy. Il est également diplômé en interprétation théâtrale à l’UQÀM (2003), en plus d’avoir étudié la mise en scène et la recherche théâtrale à l’Université Laval à Québec (1996). En plus de siéger sur plusieurs jurys, depuis six ans, il enseigne les techniques de jeu aux chanteurs de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, de l’Académie de musique et de danse du Domaine Forget, du Pacific Opera Victoria’s Young Artist Program et du Folyestivale. A l’automne 2013, il fait ses débuts en France avec une nouvelle production de Don Giovanni à l’Opéra de Tours et à l’Opéra Reims; par la suite il retourne au Pacific Opera Victoria pour Ariadne auf Naxos puis met en scène DonPasquale avec Les Jeunesses Musicales avant un retour en France pour des Caprices de Marianne d’Henri Sauguet, tournée dans 16 compagnies d’opéra françaises en 2014-2016 suite à sa victoire au Concours lancé par la Centre Français de Promotion Lyrique. ORIOL TOMAS Ce jeune metteur en scène canadien vient de remporter un grand succès pour son retour au Pacific Opera de Victoria dans Ariadne auf Naxos après des débuts réussis en France pour la production de Don Giovanni à l’Opéra de Tours et à l’Opéra de Reims et sa victoire au Concours organisé par le Centre Français de Production Lyrique pour une production des Caprices de Marianne de Sauguet. Ces six dernières années, il a mis en scène plusieurs productions de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal : The Consul de Menotti avec l’Ecole nationale de Théâtre du Canada, Noël à l’Opéra avec l’Orchestre Métropolitain, apéro à l’Opéra - série télévisée de l’ARTV -, The Telephone de Menotti et une de ses créations intitulée Aleacanto, programmée dans la série Pda junior de la Place des Arts de Montréal et nominée aux Prix Opus 201011 dans la catégorie «meilleur spectacle jeune public». Il a également dirigé Rodelinda de Handel au Pacific Opera Victoria (British Columbia), la cantate Apollo et Daphné de Handel, présentée au Festival International de Musique Baroque de Lamèque (Nouveau Brunswick), La Périchole d’Offenbach et Solitudes, un collage d’extraits d’opéra réalisé avec les élèves en chant lyrique du Conservatoire de musique de Montréal. A l’Opéra de Montréal, il a mis en scène Il Trovatore de Verdi et La Chauve-souris ; il s’est également fait remarquer pour l’une de dss créations, Le Quatrième EnfantLune composée par Gabriel Thibaudeau, avec Opéra Vmana. Dans le cadre de son Master en mise en scène d’opéra à l’École supérieure de théâtre de l’Université du Québec à Montréal (2008), il présente Pelléas et Méli- NOTE D’INTENTION : Les Caprices de Marianne de Sauguet, opéra parsemé de touches de comédie et de satire malgré son dénouement tragique, se caractérise par sa poésie et par les qualités évocatrices de sa musique. Au centre du drame, on trouve l’amour impossible, causant tristesse, mort, nostalgie, vide, destruction et deuil – sujets universels et particulièrement romantiques. Marianne est au cœur du triangle amoureux composé de Cœlio, Claudio et Octave. Cœlio, qui évoque l'amour fou et la passion, la laisse indifférente. Claudio, le mari, qui représente l’autorité, le pouvoir, la force de l'ordre et du droit, l’opprime. Finalement, Octave qui incarne l’amour, la liberté, la vie, la jeunesse et la fidélité en amitié, envoûte Marianne. Fatalité et vertige surplombent la scène, car l’amour et la mort « font chavirer l’âme » initiatique dont les conséquences s’avèreront tragiques. Musset, en précurseur, conduit Marianne sur la voie des revendications féminines, alors qu’il ancre ses personnages masculins dans un carcan traditionnel.Les personnages, figurines de papier extrêmement fragiles, évoluent dans le décor esquissé, à la perspective trompeuse de la Galleria Umberto 1er l’isolement et la vulnérabilité des personnages. Son dôme, tel une cage de verre, les enferme dans ce lieu, métaphore de leur inéluctable destinée : Marianne, captive de Claudio, lui-même prisonnier de sa propre jalousie ; Cœlio, esclave de son amour fou et Octave, doublement enchaîné et par l’amour pour Marianne et par la fidélité envers Cœlio. Ainsi, cette Galleria à la fois esquisse, maquette, place publique, lieu de passage, allégorie de la vie, attire-t’elle les personnages, les convie-t’elle à partager, à aimer, en un mot, à être. Répondront-ils à cet appel ? 27 EN SAVOIR PLUS . . . SUR LA VOIX LES CHANTEURS LYRIQUES [ CANTOR / CANTATRICE ] Une voix plus rare, la contralto ou alto est la voix la plus grave qui possède une sonorité chaude et enveloppante, par exemple : Jezibaba, la sorcière de Rusalka. Enfin, les enfants sont assimilés à des sopranes, ils interviennent fréquemment en chorale, comme dans le Chœur des Gamins de Carmen. Et quand tout ce beau monde se met à chanter ensemble : duos d’amour, trio, quatuor, quintette (Rossini est le spécialiste des disputes et autres règlements de compte familiaux), c’est l’occasion d’entendre les complémentarités entre tessitures masculines et féminines. Il n’est pas exagéré de comparer la vie professionnelle d’un chanteur d’opéra à celle d’un sportif de haut niveau. Acquérir une voix lyrique, c’est-à-dire une voix cultivée, prend plusieurs années. Il faut commencer jeune, après la mue pour les garçons et vers 17 ou 18 ans pour les filles. La voix lyrique se distingue par la tessiture et la puissance. Le corps est l’instrument de la voix car il fait office de résonateur. Le secret de la voix lyrique réside dans le souffle. Il faut apprendre à stocker méthodiquement l’air, puis chanter sans que l’on sente l’air sur la voix. Cela nécessite d’ouvrir la cage thoracique comme si l’on gonflait un ballon, c’est une respiration basse, par le ventre, maintenue grâce au diaphragme. Cette base permet ensuite de monter dans les aigus et de descendre dans les graves, sans que la voix ne soit ni nasale ni gutturale. Les vocalises, basées sur la prononciation de voyelles, consonnes, onomatopées servent à chauffer la voix en douceuret à la placer justement. Vous pouvez être surpris de voir l’expression du visage des chanteurs lorsqu’ils sont plongés dans l’interprétation d’une œuvre. Les mimiques, la gestuelle des chanteurs que l’on peut trouver caricaturales, sont souvent des aides techniques. Il faut dégager le voile du palais comme un bâillement, écarquiller les yeux d’étonnement. ILLUSTRATION : SOPHIE CHAUSSADE Selon que l’on soit un homme, une femme ou un enfant, le chant lyrique connaît une classification spécifique par tessiture. À savoir la partie de l’étendue vocale ou de son échelle sonore qui convient le mieux au chanteur, et avec laquelle il évolue avec le plus d’aisance. Les tessitures sont associées à des caractères : en général, les méchants ou les représentants du destin (mains vengeresses) comme Méphistophélès dans Faust, Le Commandeur dans Don Giovanni ou Zarastro dans La Flûte Enchantée sont basses. Le héros est ténor ou baryton. Le baryton est plus un double vocal du héros, l’ami, un protagoniste, un intrigant. Les héroïnes, âmes pures bafouées, victimes du destin, sont sopranos comme Gilda dans Rigoletto ou concernent les rôles travestis : Chérubin dans Les Noces de Figaro, Roméo dans Les Capulets et les Montaigus ou Octavian dans Le Chevalier à la Rose. Il existe des sopranos lyriques, légers, coloratures selon la maturité vocale du personnage. On associe également à des compositeurs des caractères vocaux (soprano wagnérienne, verdienne). Ils ont composé spécifiquement pour valoriser ces tessitures. Les matrones, servantes, nourrices, confidentes, pendant négatif ou positif de l’héroïne sont souvent des mezzosopranos mais elles peuvent endosser le rôle principal, comme Carmen de Bizet ou Marguerite du Faust de Gounod. 28 LES INSTRUMENTS DE L’ORCHESTRE LES INSTRUMENTS À VENT : LES BOIS LA FLÛTE TRAVERSIÈRE Dans la première moitié du XIXe siècle, Théobald Boehm développe et améliore considérablement la flûte qui est un instrument très ancien. Elle n’a pas évolué depuis. Il positionna tous les trous nécessaires à leur emplacement idéal pour jouer dans toutes les tonalités. Il ne tient pas compte de la "jouabilité" : il y a bien plus de trous que le joueur ne possède de doigts. Ils sont, de plus, placés parfois hors de portée. Ensuite, il mit au point le mécanisme qui permet de boucher et déboucher les trous. LE HAUTBOIS Le hautbois d’orchestre actuel est d’origine française. Il tient sa facture moderne d’un perfectionnement du début du XXe siècle. Employé davantage dans l’orchestre à l’époque romantique, il revient actuellement comme instrument soliste. Le hautboïste donne le « LA » à l’orchestre lorsqu’il s’accorde. LA CLARINETTE Son nom vient du latin « clarus » qui signifie clair. Elle a été inventée en Allemagne à la fin du XVIIesiècle à partir d’un instrument préexistant : le chalumeau dont-on a augmenté l’étendue. Elle est modifiée au XIXe siècle. pour atteindre le perfectionnement que nous lui connaissons aujourd’hui. Il en existe une multitude de types, plus ou moins graves. Il s’agit de l’instrument à vent possédant la plus grande étendue : 45 notes. LE BASSON Le basson est de la famille du hautbois. La sonorité du basson est mordante dans le grave et étouffée dans l’aigu. Le dulcian est l’ancêtre du basson qui permet un jeu plus aisé. Au XIXe siècle. le basson allemand se différencie du basson français, si bien qu’il faut un grand travail pour passer de l’un à l’autre. Le basson allemand est le plus joué. LE SAXOPHONE Le saxophone est de la famille des bois mais n’a jamais été fabriqué en bois. Le saxophone a été inventé par le belge Adolphe Sax en 1846. Il souhaitait créer un nouvel instrument pour l’orchestre et en fit la publicité auprès des compositeurs de son époque comme Berlioz. Mais c’est plus la musique militaire et le jazz qui le rendirent célèbre. 29 LES INSTRUMENTS À VENT : LES CUIVRES LE COR Aux XVIe et XVIIe siècle, le cor, ou trompe de chasse, est limité comme le clairon qui peuple nos fanfares. Il a été plusieurs fois amélioré, en y ajoutant des pistons, pour pouvoir figurer dans l’orchestre. Il devient « cor d’harmonie » avant de devenir « cor chromatique » et enfin « double cor » en acquérant de nouvelles sonorités au milieu du XIXe siècle. LA TROMPETTE La trompette est un très ancien instrument de musique. Fabriquée en os, en bois, en cornes ou utilisant des coquillages, elle servait à communiquer, donner l'alarme ou effrayer des ennemis, des animaux dangereux. Dans son évolution, elle garde un côté guerrier et militaire. Les cérémonies romaines sont ponctuées de sonneries à la trompette. Les casernes aujourd'hui sont encore rythmées par le clairon. Les chasseurs sonnent le cor lors des battues. La trompette reste longtemps un instrument limité avant l’invention du piston qui lui donne son allure actuelle. LE TROMBONE L’origine du trombone est très ancienne. Il descend de la saqueboute utilisée au Moyen-Age. Son succès connaît des hauts et des bas. Il disparaît et revient plusieurs fois au goût du jour. C’est au XVIIIe siècle qu’il revient définitivement. Sa coulisse est apparue au IXe siècle, cette originalité donne des possibilités uniques qui attireront de nombreux compositeurs. LE TUBA Le tuba a une histoire complexe. « Tuba » signifie « trompette » en latin et n’a pas toujours désigné l’instrument que nous connaissons aujourd’hui. C’est au XIXe siècle qu’Adolphe Sax et l’invention des pistons lui donnent la forme que nous pouvons voir dans les orchestres symphoniques: 30 LES INSTRUMENTS À CORDES : LES CORDES FROTTÉES LE VIOLON Il se situe au terme de l’évolution des cordes à archet. Ses ancêtres datent du IXe siècle au moins auxquels furent ajoutées petit à petit des caisses de résonance. Au XVIIIe siècle il remplace les violes de gambe dans la musique de chambre comme dans les orchestres symphoniques. Pour tous les luthiers, le modèle de référence est celui du célèbre Antonio Stradivari (1644-1737). L’ALTO Il est plus grand que le violon sans que sa taille soit clairement définie : elle peut varier de 10 centimètres. En fait, la forme de l'alto n'est pas la forme idéale qu'il devrait avoir. Pour sa tonalité, il devrait être plus gros, plus grand. Mais il doit garder une taille jouable ; peu épais pour pouvoir se loger sur l'épaule de l'altiste, ne pas avoir un manche trop grand... Bref, l'alto est un compromis. Seul son timbre est clairement reconnaissable, très chaud dans les graves. Il a longtemps été le parent pauvre des orchestres. Quelques œuvres pour alto ont été écrites par des compositeurs romantiques tel Carl Ditters von Dittersdorf. LE VIOLONCELLE Les premiers violoncelles apparaissent au milieu du XVIe siècle. Ils viennent concurrencer fortement l’instrument roi de l’époque : la viole. Le rejet a été très fort en France et il devient populaire par l’Allemagne où J.S. Bach lui consacre ses très célèbres Suites pour violoncelle seul. Longtemps contenu à des rôles d’accompagnement, c’est avec les orchestres symphoniques modernes qu’il s’installe définitivement. LA CONTREBASSE La contrebasse est le plus grand (entre 1,60m et 2m) et le plus grave des instruments à cordes frottées. Elle est apparue plus tardivement que les violons, altos et violoncelles. Les partitions d’orchestre pour contrebasse se contentent souvent de doubler les violoncelles à l’octave inférieure. Mais la richesse de son jeu a incité les compositeurs à lui consacrer plus de place. Les jazzmen l’affectionnent particulièrement et ont inventé de nombreux modes de jeux avec ou sans archet, voire même avec l’archet à l’envers, côté bois. 31 LES INSTRUMENTS À CORDES : LES CORDES PINCÉES LA HARPE La harpe fait partie des instruments les plus vieux qui existent : sa première forme remonte à l’époque égyptienne (vers 2000-3000 av. J.C.). Elle a été très prisée au Moyen-Age. C’est en 1697 qu’un allemand invente un mécanisme à pédales qui lui redonne du succès. LE CLAVECIN Le clavecin peut être muni de un, deux ou trois claviers. Il apparaît au début du XVIe siècle, dérivé du psaltérion. Tout d’abord simple remplaçant du luth comme instrument d’accompagnement du chant, il prend une importance croissante jusqu’au XVIIIe siècle. Puis il est abandonné pour le pianoforte avant de réapparaître au XXe siècle avec la grande claveciniste Wanda Landowska. LE PIANO (CORDES FRAPPÉES) Le piano que nous connaissons aujourd’hui est le fruit d’une très longue évolution. L’antique tympanon fût le premier des instruments à cordes frappées. Mais c’est le clavicorde qui est le précurseur de notre piano. Toutefois, entre le clavicorde et le piano, tous deux à cordes frappées, deux siècles s’écoulent où le clavecin, à cordes pincées, fait son apparition. Il faut attendre la seconde moitié du XVIIIe siècle pour que la technique des cordes frappées satisfasse enfin les compositeurs. LES PERCUSSIONS La famille des percussions se répartie en deux catégories : les membranophones et les idiophones. Les membranophones sont construits autour d'une membrane ou de cordes qui vibrent au-dessus d'une caisse de résonance lorsqu'on les frappe. Le son est amplifié par cette caisse. On peut citer les tambours (membrane), les cymbalums (cordes). Les idiophones sont les instruments dont le corps est lui-même l'élément sonore. Citons les castagnettes, les carillons ou le triangle. 32 L’ACTION CULTURELLE CONFÉRENCE "1954 : Caprices et Serment (ou la victoire des maris jaloux)" - Les Caprices de Marianne par François-Gildas Tual Mardi 25 octobre 2014 - 19h à l’auditorium de l’Opéra de Massy. En partenariat avec UTL Palaiseau. SCÈNE ORCHESTRE DE MADAME BUTTERFLY (2012/2013). DÉCOUVRIR L’ENVERS DU DÉCOR VISITES GUIDÉES tout public Samedi 29 novembre 2014 - 10h / 11h30 Deux visites organisées en petit comité permettent au public de découvrir le spectacle au plus près du plateau. ATELIER AVEC LES JEUNES DE L’ULIS DU COLLÈGE CHARLES PÉGUY DE PALAISEAU. VISITES GUIDÉES scolaires Il est possible d’organiser toute l’année des visites de l’Opéra pour les scolaires (en fonction du planning de production). De l’entrée des artistes à la grande salle le public est invité à se plonger dans l’univers fascinant du spectacle. La fosse d’orchestre, les dessous de scène, la machinerie dévoilent quelques-uns de leurs secrets. L’OPERA ACCESSIBLE L’Opéra de Massy est équipé d’un matériel d’amplification (casques et boucles magnétiques) à destination des publics sourds et malentendants. Disponible sur tous les spectacles de la saison sur simple demande. Renseignements au 01 60 13 13 13. Pour toutes ces activités, renseignements au 01 69 53 62 26 (inscriptions par l’intermédiaire de la fiche projet, dans la limite des places disponibles). 33 COORDONNÉES ACTION CULTURELLE SERVICE D’ACTION CULTURELLE OPÉRA DE MASSY 1, place de France 91300 Massy www.opera-massy.com MARJORIE PIQUETTE [responsable] 01 69 53 62 16 _ [email protected] EUGÉNIE BOIVIN [assistante] 01 69 53 62 26 - [email protected] RETROUVEZ TOUTE L’ACTUALITE DE L’ACTION CULTURELLE SUR NOTRE BLOG : blog.opera-massy.com L’Opéra de Massy est subventionné par : Le service d’Action Culturelle de l’Opéra de Massy est membre du Réseau Européen pour la Sensibilisation à l’Opéra. et remercie ses partenaires : Société Générale, France Télécom, CCI, Institut Cardiovasculaire Paris-sud, SAM Renault Massy et Télessonne