LA NEWSLETTER / LIGUE REIN ET SANTÉ / FÉVRIER 2015 #18 NOUVEAUTÉ 2015 / DES PAGES À PHOTOCOPIER DESTINÉES À VOS PATIENTS LE JOURNAL DES PATIENTS ”L’OBSERVANCE“ GRANDE CAUSE NATIONALE 10 MILLIARDS DE DÉFICIT pour la sécurité sociale (qui fêtera bientôt ses 70 ans) en 2014. Dans le but de mieux connaître le phénomène de l’observance en France, le CRIP et IMS Health France se sont donc associés pour réaliser une étude de grande ampleur, à partir d’une cohorte d’environ 170 000 patients suivis dans 6 400 pharmacies. Six pathologies, un quart des dépenses annuelles de santé La dépense annuelle de médicaments remboursés en ville sur prescription représente 20,5 milliards d’euros en valeur. Les six pathologies sélectionnées par l’étude totalisent 24,2 % de la valeur des médicaments remboursés en ville. La taille significative de l’échantillon permet donc de tirer des enseignements pour l’ensemble du système de santé et de définir, pour la première fois, un taux d’observance global, ainsi que l’impact financier de la mauvaise observance. Selon les standards internationaux, un patient est considéré comme observant si son MPR est supérieur ou égal à 80 %. La mesure d’observance retenue est le Medication Possession Ratio ou MPR. REIN INFOS # 18 FÉVRIER 2015 LE JOURNAL DES PATIENTS # 1 # Le MPR a été calculé pour chacun des produits composant le traitement à partir des délivrances pharmaceutiques et de la posologie du produit. Par exemple, un patient chronique qui respecte son traitement plus de 24 jours par mois, sur en moyenne trente jours, est dit « observant ». À partir de cette échelle, la mesure de l’observance en France est conforme aux estimations avancées au plan international. Selon l’étude IMS Health /CRIP, le taux moyen de patients observants est de l’ordre de 40 %. En additionnant l’ensemble des coûts liés aux complications évitables grâce à une bonne observance, elle estime que le système de santé dépense chaque année 9,3 milliards d’euros. Avec à la clef 10 à 20 Millions d’euros d’économie par point d’observance obtenu. Selon les pathologies étudiées, le taux d’observance varie fortement. A ce propos nous noterons pour le diabète de type 2 (37 % des patients) de même que l’HTA (40 %) et l’hypercholestérolémie (44 %). Pr Jean-Michel Halimi président de la Société Française de l’Hypertension Artérielle, chef de service, Service de Néphrologie-Immunologie clinique, CHU Tours : « Cette étude médico-économique me semble bien étayée, mais il faudra compléter l’approche novatrice qu’elle propose en menant des investigations plus poussées pour chacune des pathologies étudiées. Dans le cas de l’hypertension artérielle, on voit bien que la question de l’observance est centrale. C’est une pathologie qui touche environ 12 millions de personnes en France… Sur les leviers à employer pour améliorer l’observance, je citerai d’abord les effets délétères liés à la décision des pouvoirs publics, il y a deux ans, de supprimer le bénéfice de l’ALD « hypertension sévère » pour les nouveaux patients… » source : http://lecrip.org/a/wp-content/ uploads/2014/11/BrochureObservanceimprim.pdf Essayons de mieux comprendre à partir des 5 éléments déterminants qui influent l’observance : 1) le patient (ses connaissances, expériences, croyances, ressenti, culture, mode de vie, évènements perturbateurs… motivations, âges, pathologies et complexité du traitement). 2) la maladie (son image, ce qu’elle véhicule, insidieuse, permanente ou sans message, la comprendre et comprendre les étapes et enjeux). 3) le médicament (à quoi il sert, mode de présentation et d’administration, récurrence des prises, importance, effets secondaires, couleurs et génériques). 4) professionnels de santé (temps d’explication, pédagogie, ne pas stigmatiser le patient). 5) l’information à disposition du malade (sensibilisation avant, à tout instant, incitation, aides et objets connectés). Alors quelles responsabilités pour les patients chroniques ? Il y a actuellement 18% de la population des chroniques qui représentent 70% des dépenses de santé. Au cœur du système de soins le patient depuis 2002 est donc une cible de choix, mais pas que... On peut se poser des questions : • Le patient est-il mûr pour être responsable de sa santé ? • Est-il capable d’être responsable par rapport à sa maladie ? • La sécurité sociale* ne devraitelle pas (elle qui a les donnéespatients) relancer les patients non observant.. ? • De même pour le pharmacien, l’hôpital, le centre de soins, le médecin ; qui ne voient plus revenir vers eux un patient chronique déjà suivi depuis longtemps. REIN INFOS # 18 FÉVRIER 2015 LE JOURNAL DES PATIENTS # 2 # À chaque maladie chronique ses contraintes, en effet ces maladies silencieuses se déclarent sournoisement, puisque l’on a mal nulle part initialement : HTA, IRC, Diabète. Et dans chacun de ces cas le patient verra que la chronicité arrive très vite vers lui et qu’un traitement irréversible s’impose à lui, mais est-il conscient pour autant des enjeux… ? Tout dépend : qui il est, quand cela se passe, et comment il va ; dans le cadre d’une égalité de traitement. De fait : Ces maladies se compliquent et parfois se conjuguent dans le temps. La prévention, l’information, le dépistage sont nécessairement à développer pour éviter cela. Elles nécessitent des traitements de plus en plus importants et adaptés. On peut tomber extrêmement vite dans un stade de gravité sévère. On passera alors de quelques médicaments à beaucoup de médicaments. Entre 3 (comprimés ou gélules) et plus de 10 à 20 l’observance est différente –obligatoirement-. On peut ne traiter que l’HTA. On peut ne traiter que l’IRC, mais en principe l’HTA est liée. On peut ne traiter que le diabète de type 1 et de type 2, parfois l’IRC y est lié et l’HTA suit. Plus la maladie s’aggrave plus le traitement est contraignant et la récurrence ennuyante. Plus cela se complexifie : en IRCT et plus les soins ou opérations sont complexes et contraignants. Tout cela est de plus en plus difficile à gérer pour le patient chronique, nous semble-t-il. Comment devient-on non observant..? Par conditions de vie, par culture et par moyens financiers. Par erreur de compréhension du traitement (dont problème de compréhension linguistique). Par complexité du traitement (prises et horaires). Par modification réitérée du traitement. Par ennui de la répétition des gestes. Par oubli involontaire. Par un évènement bouleversant la vie du patient (divorce, décès, retour au pays). Parce que l’on se sent bien ou parce que l’on va mal, atteinte à l’image corporelle pour une femme dialysée, etc. Par négligence. On ne veut pas faire voir à l’entourage son problème de santé. En Ephad avec l’âge et l’aide médicale disponible. Parce que l’on perd un peu de ses facultés avec l’âge et les polypathologies associées…. Pourquoi est-on observant ou non observant… ? en santé publique et au temps des praticiens de santé à consacrer à l’éducation thérapeutique des patients dans une France cosmopolite où le langage médical ne s’acquiert vite que pour les patients experts. Plaidoyer LRS Pas d’amalgame ni de généralités à propos des patients de leurs pathologies et la gravité de celles-ci. Le patient chronique n’a pas envie d’être non observant, s’il sait et comprend le pourquoi de son traitement, si on lui facilite la prise des médicaments (prise et heure, matin ou midi ou soir) et si on lui fournit des rappels opportuns (pilulier sonore de rappel ou autre) et si, bien sûr, on lui limite le nombre de médicaments à prendre chaque jour**. De fait, lui taper sur la tête le rendrait également plus malade… On est non observant par lassitude d’une maladie qui n’en finit pas, pour des ennuis et des pathologies qui s’aggravent, des médicaments de plus en plus contraignants avec leurs effets secondaires. On est non observant parce que l’on refuse la prise d’un médicament désagréable à avaler ou parce que remplir un pilulier complexe pendant des années avec des médicaments trop diversifiés devient insupportable. Il serait bien (à notre avis) d’expliquer en amont au patient profane quelle est la source du médicament et son fonctionnement sur l’organisme en donnant une image concrète au médicament, et non pas seulement une pilule ou une gélule inscrite sur une ordonnance. Parfois le patient voit dans le médicament l’argent qu’il rapporte à des laboratoires pharmaceutiques qui les fabriquent à la chaîne ou les copient, plus que l’effet recherché par la prescription médicale pour atténuer la maladie. D’autant plus vrai que le traitement est lourd et onéreux et qu’on vient à reprocher au patient son irresponsabilité dans sa propre gestion de la maladie, celle qu’il subit pesamment 24h/24. On devient non observant parce que la dialyse est déjà une grosse contrainte imposée récurrente, parce que la transplantation nous remet en état avec un traitement contraignant et récurrent à ne jamais oublier. En fait les trois points clés de l’observance seraient pour nous : la prévention, le dépistage précoce et l’information adaptée sur la maladie tout au long des étapes du parcours de santé. Les responsabilités sont avant tout liées aux investissements On est observant par obligation et compréhension de la maladie et des besoins de traitements qu’elle requiert (éducation thérapeutique), on est compliant quand on accepte le traitement comme nécessaire. REIN INFOS # 18 FÉVRIER 2015 LE JOURNAL DES PATIENTS # 3 # Surtout ne jamais oublier qu’un malade bien dans sa peau et bien éclairé est plus observant qu’un malade dans la misère et sans possibilité d’information (lapalissade). Fliquer ou stigmatiser les patients ne feront pas avancer les choses (il a des droits dont celui de refuser un traitement). Lui délivrer ses médicaments à l’unité, c’est le déresponsabiliser sans garantir pour autant l’observance. Par contre encourager solidairement la prévention, la recherche médicale et l’innovation thérapeutique devrait être une cause commune écrite dans la Loi de santé publique, que nous encouragerions fortement de nos souhaits. Alléger le fardeau futur des chroniques ne peut pas se révéler une mauvaise idée et une mauvaise affaire pour l’assurance maladie. Aussi, nous disons: « l’observance comme grande cause nationale », pourquoi pas… ? Mais en privilégiant le confort du patient et l’efficience du traitement rationalisé et personnalisé. Nous suggérerons également quelques pistes d’économies : Afficher le prix des médicaments avec un ticket de caisse délivré aux patients chez le pharmacien, cela lui parlerait plus que ce qui s’imprime au dos de l’ordonnance à la délivrance du médicament, et ainsi mieux mesurer les enjeux. Comme c’est le cas chez tous les commerçants, avec un ticket de caisse on sait ce que l’on achète et ce que l’on paye. Pourrait peut-être (source d’économies) un packaging plus adapté de nos médicaments, moins gourmand en emballage et tous délivrés pour le mois en cours, à la fois toujours mieux tracés (traçabilité jusqu’au médicament luimême, conciliation médicamenteuse et la lecture code-barres) et moins cher quand il tombe dans le domaine public (plutôt qu’un générique qui nous perd). Et puis il y a aussi les triples pilules un peu délaissées et non remboursées. Enfin pourquoi ne pas imaginer un bonus pour retour des médicaments non utilisés et même un bonus pour les patients observant, plutôt qu’un prélèvement obligatoire forfaitaire de l’assurance maladie par boîte remboursée et non remboursée… Enfin, des prix identiques chez tous les pharmaciens pour les mêmes produits de dermatologie nécessaires aux chroniques (et non remboursés) ; on peut bien rêver non ! Les patients eux-aussi ont des idées… *L’article 47 de la Loi de santé publiques est à réécrire il bloque l’accès aux datas de santé. ** « Deux rapports publiés ce mercredi alertent à nouveau sur les dangers (effets indésirables, iatrogénie) de la polymédication chez les personnes âgées, définie par l’OMS comme « l’administration de nombreux médicaments de façon simultanée ou par l’administration d’un nombre excessif de médicaments »… Le rapport énumère, études internationales à l’appui, les principales difficultés identifiées. « Chaque nouvelle spécialité administrée augmente de 12 à 18 % le risque d’effet indésirable. Ces accidents iatrogéniques sont responsables de 5 à 25 % des admissions hospitalières et de 10 % des Qu’en pensez-vous, avez-vous vous aussi des suggestions, puisqu’il n’y a pas de petites économies et que ces objectifs seront soutenables rapidement, pour le bien de tous ? MR LRS (MR est intervenu pour les patients à propos de l’Observance au café Nile du 21 janvier 2015). Le site de la Ligue Rein et Santé www.rein-echos.fr REIN INFOS # 18 FÉVRIER 2015 LE JOURNAL DES PATIENTS # 4 # admissions aux urgences. La polymédication est un facteur prédictif de la durée des séjours hospitaliers, de la mortalité et de la réadmission hospitalières. Elle pose des problèmes d’observance quand le schéma d’administration est trop complexe. Enfin, la polymédication augmente fortement le risque de prescriptions potentiellement inappropriées, dont les indications sont discutables, avec un risque d’effets secondaires ou de non-efficience », précise l’étude… » http://www.lequotidiendumedecin.fr/actualite/ medicament/polymedication-chez-les-personnes-agees-l-irdes-et-que-choisir-sonnentl-alerte?ku=y5Bw5EEv-7ax9-AyAx-y88A7yAE69v78E57#utm