SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS Concepteur: NIKIEMA N

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SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
Objectifs spécifiques ............................................................................................. 2
1. Elton MAYO (1880-1949) ................................................................................ 4
2. Les approches universalistes des styles de management .................................. 5
3. Les approches de contingence........................................................................... 8
4 Quelques remarques critiques .......................................................................... 14
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CHAPITRE IV: L’APPROCHE DES RELATIONS HUMAINES
Objectifs spécifiques
Deux objectifs spécifiques sont assignés à ce chapitre. A la fin du cours, les
apprenants doivent être à mesure de :
• Décrire les idées principales des auteurs dont les concepts ont eu un
impact sur le développement des organisations : Mayo, Lippitt & White ,
Douglas McGregor, Likert , Lorsch et Lawrence, Vroom & Yetton,
Fieldler, Mintzberg, etc
• Faire l’analyse du développement des entreprises et autres organisations
en tenant compte des concepts suivants : communication, participation,
leadership, motivation
L’approche des relations humaines présente des observations diamétralement
opposées à celles de l’organisation scientifique du travail qui lui est antérieur
(dans le temps).
En résumé, L’ORGANISATION SCIENTIFIQUE DU TRAVAIL( l’OST) :
- réorganisait les méthodes de travail, spécialisant à l’extrême le poste de
travail (une ou quelques opérations élémentaires) et réduisait le travailleur
à l’état de pur exécutant. Le poste de travail devait être adapté aux
capacités physiologiques de l’ouvrier ; la productivité paraissait liée aux
aptitudes physiques ;
- la base de la théorie motivationnelle postulée par l’OST réside dans
l’homme économique : les stimulants financiers strictement liés à la
production constituent le ressort principal, voire unique de la motivation
du travailleur, et par conséquent de sa haute productivité ;
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- le travailleur est considéré comme individu isolé louant sa force de travail
au patron et lié individuellement à lui.
L’école des relations humaines et en particulier Elton Mayo qui en fut
involontairement l’initiateur, va montrer que :
• La productivité réelle d’un travailleur n’est pas déterminée par ses seules
capacités physiologiques mais bien plus par sa ‘’capacité’’ sociale : son
adaptation, son intégration à un groupe humain et la manière dont luimême et ce groupe sont considérés par la hiérarchie ;
• Les incidences non économiques jouent un rôle capital dans la motivation
et la satisfaction des travailleurs ;
• La plus grande spécialisation (parcellarisation des tâches) ne constitue pas
automatiquement la forme la plus efficace de division du travail (cf.
enrichissement des tâches) ;
• les travailleurs ne réagissent pas à la direction, à ses normes et
récompenses et tant qu’individus isolés mais bien en tant que membres de
groupes.
En relation avec ces éléments, l’école des relations humaines va mettre l’accent
sur le rôle de la communication, de la participation et du leadership au sein des
entreprises et organisations.
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1. Elton MAYO (1880-1949)
Elton Mayo, psychologue industriel, a dirigé le département de recherche
industrielle de l’Université de Harvard. A ce titre, il a conduit des recherches
appliquées au domaine industriel.
Il est considéré comme le fondateur de la sociologie en milieu industriel et
notamment du mouvement des relations humaines qui visait à définir les
motivations réelles des travailleurs à accomplir les meilleures performances.
La plus impressionnante découverte de MAYO est d’avoir identifié les
motivations non économiques de la satisfaction au travail et de les avoir reliés
plus à l’intérêt que peut prendre les employés dans la réalisation de
performances qu’à une motivation due à la perspective de récompense
pécuniaire telle développer par Taylor. Les travaux de Mayo sont austères à la
philosophie Taylorienne de l’intérêt personnel. Mayo insiste beaucoup plus sur
les conditions humaines de travail comme facteur de productivité et de
performance de l’entreprise. A partir de nombreuses expériences menées par
Mayo, il décrit des facteurs psycho-sociaux, comme variables déterminants du
comportement de l’individu dans le travail en organisation: le mode de
commandement plus libéral, la valorisation sociale, la cohésion de groupe, les
objectifs du groupe clairement perçus par le groupe, le leadership informel, la
sécurité de l’emploi, etc.
Le résultat majeur de l’expérience est la démonstration que l’individu réagit
aux conditions pratiques du milieu non pas telles quelles sont, mais telles qu’il
les ressent et que la manière dont il les ressent dépend en grande partie des
normes et du climat du groupe dans lequel il travaille ou vit, et du degré de son
appartenance au groupe.
Les travaux de Mayo ont été prolongés par un certain nombre d’auteurs dont les
travaux continuent de marquer la vie des entreprises. On distingue deux
approches d’analyse : les approches universalistes et de contingence.
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2. Les approches universalistes des styles de
management
Elles regroupent l’ensemble des recherches sur les styles de management
jusqu’au début des années 1970.
Cette approche s’est développée au début des années 1960. Les recherches qui
s’insèrent dans le cadre d’analyse de l’approche des ‘styles’, étudient les
attitudes ou les comportements des managers dans les organisations. Dans cette
approche, le leader n’est plus perçu comme ce héros mystique à rechercher par
un processus de sélection précieuse à travers un certain nombre de traits ou de
qualités difficilement identifiables. Au contraire, le statut de leader ou de
manager s’acquiert par une connaissance apprise, la formation aux fonctions de
management ou de leadership :
Deux types de recherches caractérisent l’approche des ‘styles’. La première
catégorie s’est intéressée à l’identification des différents types de styles de
management à travers les attitudes ou les comportements des leaders/managers
vis à vis de leurs subordonnés. Ces comportements ont été identifiés à travers
trois dimensions essentielles : la structure et la nature de la communication, le
processus de prise de décision et les relations interpersonnelles. Les différentes
recherches qui se situent dans ce cadre d’analyse, opposent généralement, les
styles autoritaires à ceux participatifs en postulant que les derniers sont les plus
efficaces et préférables. La deuxième catégorie de recherches s’est évertuée à
établir une certaine corrélation entre cette typologie de styles de management et
la performance du groupe de managers ou de l’organisation. Elle consiste à une
initiation à la structure, à savoir, l’identification des procédés utilisés pour
orienter les employés vers les objectifs de l’organisation. Dans les deux cas de
figures, la performance de l’organisation dépend de la nature des styles de
management adoptés.
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Il semble que très tôt, une étude classique sur les styles a été réalisée par Lippitt
& White (1953)1. Elle a porté sur trois clubs d’enfants de 10 ans. Il était question
d’apprécier les relations interpersonnelles qui prévalaient dans les différents
groupes. Le style autoritaire a été privilégié chez un enfant issu d’un père
militaire. Les enfants qui ont une préférence pour la réalisation de soi ont adopté
le style démocratique. Enfin le « laissez faire » s’est révélé chez des enfants qui
n’aiment pas évoluer sous pression. Relevant plus de la psychologie, l’étude de
Lippitt & White (1953) permet de comprendre la divergence des comportements
humains et individuels ainsi que les différentes motivations qui soutiennent les
relations interpersonnelles que l’on peut constater à l’intérieur des groupes de
managers. Trois contributions nous semblent importantes dans l’approche des
‘styles’ et qui méritent d’être décrites.
- Le modèle de Douglas McGregor (1960) : les théories X et Y
Dans la définition de ses théories X et Y, Douglas (1960) distingue
respectivement deux styles distincts de management : autoritaire et participatif.
Ces deux styles de management découlent des différentes présomptions que les
managers ont de leurs subordonnés. Les managers issus de la théorie X à styles
de management autoritaire ont une appréhension négative de la nature humaine.
Pour ces derniers, l’homme est par définition paresseux et évite dès que possible
le travail. Par conséquent, il est important d’user d’une autorité ou d’un contrôle
ardu pour les orienter vers les objectifs de l’organisation. A l’opposé, les
managers de la théorie Y à style de management participatif considèrent que
l’homme ne s’auto- réalise qu’à travers son travail. Dans une telle situation, les
managers travaillent en collaboration avec leurs subordonnés tant au niveau de
la prise de décision que de la conception de la structure de leurs organisations.
Dans la théorie Y, les Leaders/managers apparaissent comme des prédicateurs
des comportements de leurs subordonnés. Ainsi, ils essayent d’anticiper les
comportements de ces derniers. Douglas (1960) reste convaincu que la théorie Y
est le meilleur style de management. Elle est caractérisée par de bonnes relations
interpersonnelles conduisant à un niveau de productivité élevé dans le groupe et
dans l’organisation.
1
Cités par Luthans, F. (1977), Organizational Behavior, McGraw-Hill, New York, USA.
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- Le modèle de Likert (1961) : styles indépendants et flexibles
Likert (1961) distingue à son tour, quatre styles ou systèmes de management à
travers l’analyse des processus de prise de décision, de contrôle et de
communication, les relations interpersonnelles, la définition des objectifs, la
motivation et la performance de l’organisation. Ce sont : le système 1 :
autoritaire ; le système 2 : autoritaire bénévole ; le système 3 : consultatif et le
système 4 : participatif. Pour Likert (1961), la performance de l’organisation
dépend à la fois des aspects économiques et humains. Au fur et à mesure que
l’on avance respectivement du système 1 vers le système 4, on assiste à une plus
grande motivation et satisfaction des employés, une décentralisation accrue de
l’information et des décisions, une collaboration collégiale entre les individus et
en somme, une productivité élevée. Likert (1967) conclut dans son étude que
tous les managers interviewés sont unanimes sur le fait que le style de
management participatif est préférable et plus adapté, du moment où il permet
de conjuguer productivité et satisfaction des employés dans l’organisation.
- Le modèle de Blake & Mouton (1964) : styles bi- dimensionnels
A travers une grille managériale à deux dimensions, orientation vers le résultat
et orientation vers les motivations et la satisfaction des hommes, Blake et
Mouton (1964) ont eu à étudier les comportements des Leaders/managers vis à
vis de leurs subordonnés. A cet effet, ils distinguent essentiellement cinq styles
de management selon qu’une importance soit accordée à plus de productivité ou
à plus de satisfaction des besoins des individus dans l’organisation. Le 1,9 ou
style «Country Club management » s’oppose extrêmement au 9,1 ou style de
management autoritaire. Le 1,9 part de l’idée que seule une grande coopération
entre les membres d’une organisation, permet d’atteindre un niveau de
productivité élevé. Tandis que le 1,1 ou style « Laissez –Faire » se base sur
l’improvisation, le 5,5 ou style de management consultatif se fonde sur le
compromis dans la prise de décision. Le dernier style de management plus
participatif, le 9,9 ou « Team Management » tient compte à la fois des aspects
humains et économiques dans l’organisation. Selon Blake & Mouton (1964,
142), l’implication des hommes dans l’accomplissement des tâches conduit à la
créativité, la motivation et la productivité dans l’organisation.
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En définitive, tous les auteurs qui adoptent l’approche des ‘styles’, considèrent
les relations humaines comme un facteur essentiel à la réussite de l’organisation.
Pour ces derniers, les managers qui adoptent le style participatif sont plus
efficaces. Les différents modèles proposés dans l’approche des ‘styles’ ont
reconduit la problématique de l’approche des traits, l’idée du « one best way of
leading » (Ogbonna & Harris 2000). Pour l’approche de traits, les bons
managers ont des traits personnels similaires alors que pour l’approche des
‘styles’, le management participatif conduit toujours à la performance de
l’organisation.
Des auteurs ont récemment rejeté ces postulats découlant des théories
universelles des styles de management (approches des traits et des ‘styles’) et ce,
pour deux raisons essentielles :
- La plupart des traits énumérés pour caractériser le leader/manager ont été
remis en cause. Il n’existe pas de traits spécifiques ou uniques pour
caractériser un bon leader/manager à l’exception de l’intelligence (Hollander
1978, Bass 1981) ;
- Selon Chemers (1997), la causalité établie entre les styles de management et
la productivité dans l’organisation n’apparaît pas clairement dans l’approche
des ‘styles’. Ensuite, les comportements des leaders/managers ainsi que leurs
styles dépendent de la situation et du contexte dans lesquels ils se trouvent :
Les limites constatées dans la conceptualisation universaliste des styles de
management ont conduit à développer une autre approche qualifiée de
contingence.
3. Les approches de contingence
Cette approche s’est développée à la fin des années 1960 et au début des années
1970. Elle relève de la théorie de contingence qui a révolutionné à cette époque
la pensée du management. L’approche de contingence représente un champ de
rupture avec les approches de traits et de ‘styles’, toutes deux de tendances
universelles. Comme nous l’avons montré précédemment, ces deux approches
universelles n’ont pas tenu compte des éléments du contexte. Les auteurs ont
simplement fondé leur analyse sur les facteurs internes de l’organisation en
ignorant les facteurs externes et contextuels. La théorie de contingence vient
s’opposer à l’idée d’universalité des principes et des techniques de management
dans toutes les situations.
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Pour Lorsch & lawrence (1967), la littérature récente montre que les styles de
management dépendent d’un certain nombre de facteurs de contingence tels, la
structure de l’organisation, le climat social qui y prévaut et le type de formation
reçue.
« […] The current literature suggests to the manager the utility of divergent
managerial styles, organization structures and climates, and type of management
training » (Lorsch & Lawrence 1967, 1).
Toutefois, les auteurs qui s’insèrent dans cette dernière approche ont intégré
différemment les éléments du contexte, conduisant souvent leurs recherches à
des conclusions contradictoires et ambiguës.
- Le modèle de Lorsch & Lawrence (1967) : introduction à la contingence
des styles
Lorsch et Lawrence (1967) ont développé une approche systémique de
l’organisation. Pour ces auteurs, les structures organisationnelles, les
comportements des individus doivent s’adapter aussi bien à l’environnement
interne qu’externe. Les comportements des managers ne sont pas une simple
reproduction de leurs personnalités individuelles. Leurs styles de management
dépendent également de l’environnement externe (économique, culturel et
technologique) dans lequel évoluent leurs entreprises. Lorsch et Lawrence
(1970) ont eu à démontrer leur approche dans leur étude comparative entre les
industries américaines et allemandes du plastique. Ils ne comprenaient pas
pourquoi les industries américaines étaient plus performantes que leurs
homologues allemandes alors qu’elles évoluaient toutes sur un même marché et
avaient des moyens technologiques similaires. A la fin de leur étude, ils
conclurent que les entreprises allemandes et américaines avaient différents
systèmes d’intégration. Cette différence a été attribuée à la spécificité de la
culture qui prévaut dans chacun de ces pays.
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- Le modèle de Fiedler ( 1967) : styles basés sur l’efficacité du leadership
Fieldler (1967) à son tour a distingué deux styles de management, autoritaire et
participatif, selon qu’une primauté soit accordée à la tâche ou aux relations
humaines dans l’organisation. Toutefois, contrairement aux conclusions de
Likert (1961) et de Blake & Mouton (1964) qui font les éloges du management
participatif, Fiedler (1967) soutient que les deux styles peuvent être tous
efficaces dépendamment de la maîtrise de la situation : le degré de structuration
de la tâche, la position hiérarchique des managers et la qualité des relations
interpersonnelles dans l’organisation.
L’efficacité de chaque style de
management dépendra alors du degré de contrôle de la situation par les
managers. Le style directif ou autoritaire s’avère performant avec des tâches
structurées, une forte position hiérarchique et une faible considération des
relations humaines. Le style de management relationnel ou participatif est
efficace dans deux cas de figures : des tâches mal structurées et un faible
pouvoir hiérarchique ou, des tâches structurées et un fort pouvoir hiérarchique
avec dans les deux cas, un sens profond des relations interpersonnelles. Fiedler
(1967) accentue son analyse sur l’efficience du groupe plutôt que sur le
processus d’influence dans l’organisation. Dans son appréciation du leadership,
il s’intéresse à l’efficience des activités du groupe. Pour ce dernier, l’orientation
par la tâche est le nerf de la performance de l’organisation même si la
motivation et la satisfaction de ses membres y contribuent.
Les travaux de Fiedler (1967) ont été sévèrement critiqués. On lui reproche
d’avoir analysé directement les processus par lesquels les comportements ou les
motivations des managers affectent l’efficience du groupe et la performance de
l’organisation. Chemers (1997, 29) insiste sur le caractère déterministe des
résultats de recherche de Fiedler (1967) qu’il reproche pour avoir essayé tout
simplement d’identifier les traits de leadership comme l’a également fait
l’approche universaliste des ‘styles’. Selon Chemers (1997), Fiedler (1967) a
ignoré l’importance de la motivation et de la satisfaction des subordonnés dans
son analyse comme facteur de performance de l’organisation.
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- Le modèle normatif de Vroom & Yetton (1973) : Implication des
subordonnés
A la suite des travaux de House (1971), Vroom & Yetton (1973) se sont
originalement concentré sur les processus par lesquels les managers impliquent
différemment leurs subordonnés dans la prise de décision. Pour ces auteurs, le
degré d’implication des subordonnées à la prise de décision dépend de la nature
du problème organisationnel et du contexte. Face à la teneur d’un problème
organisationnel donné, les managers tenteront d’impliquer différemment leurs
subordonnés à la prise de décision. A cet effet, Vroom & Yetton (1973)
distinguent trois styles de management : autoritaire, consultatif et participatif.
L’efficacité de chaque style de management dépendra de trois principaux
facteurs de contingence : la qualité et le temps nécessaire à la prise de décision,
l’adhésion des subordonnés à cette dernière et la capacité de la décision à
résoudre les problèmes organisationnels en vigueur. La remarquable chose chez
ces deux auteurs, est d’avoir accordé implicitement une place de choix aux
subordonnés dans la prise de décision. Le style de management retenu résulte
d’un compromis entre les deux partis, managers et subordonnées, capable de
résoudre les problèmes organisationnels posés. Dans cette optique, le choix du
style de management adéquat dépendra d’une certaine habilité du leader. Ainsi,
Vroom & Yetton (1973, 187) font une distinction entre les ‘méthodes de
leadership’ et les ‘talents de leadership’. Pour ces auteurs, deux leaders
employant le même style autocratique pour un problème organisationnel
similaire, peuvent aboutir à des niveaux de résultats différents. Le résultat
dépendra de la capacité du leader à persuader ses subordonnés, les talents du
leadership. Vroom & Yetton (1973, 206) reconnaissent que leurs conclusions
ont des similitudes avec celles de Fiedler (1967) bien qu’ils aient adopté des
approches différentes : la performance de l’organisation est relative au trait ou à
la qualité du leadership. Cependant, alors que Fiedler (1967, 254) conclut que
les managers doivent jouer sur les situations pour les adapter à leurs styles,
Vroom & Yetton (1973, 208) avancent que les styles de management doivent se
conformer aux situations.
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- Le modèle de Mintzberg (1973) : styles basés sur la nature du travail des
managers
Toujours dans une approche contingente, Mintzberg (1973) a fait un travail
original à double contribution. La première est d’ordre paradigmatique. Avec cet
auteur, on passe de la période de pensée du « managerial behavior » et du
« managerial job » à celle du « managerial work » comme le stipule Stewart
(1998). Dans son ouvrage Le Manager au Quotidien, Mintzberg (1984)2 fait une
rupture dans la pensé en management en remettant en cause les fonctions
classiques de l’organisation. Dans une étude originale et ethnographique portant
sur cinq directeurs généraux, il conclut que dans la réalité, les activités des
managers consistent à dix rôles dynamiques à travers trois dimensions : les
relations interpersonnelles, le processus de prise de décisions et le système
informationnel. Il déplore les conclusions peu généralisables auxquelles sont
arrivées les recherches précédentes sur les styles de management en ces propos :
«… Il serait possible d’apprendre beaucoup de choses intéressantes en étudiant
l’effet de la personnalité et du style de la personne sur le travail effectué.
Malheureusement, nous n’avons pas dans ce domaine que peu d’informations.
Beaucoup d’études ont été faites sur le style de management, mais dans une
vaste majorité des cas elles n’ont fait que simplement comparer les styles
autocratiques et participatifs. Dans la plupart des cas aucune attention n’a été
accordée à l’influence du style sur le travail ; beaucoup de chercheurs ont essayé
de relier directement le style et l’efficacité de gestion » (Mintzberg 1984, 132).
Pour Mintzberg, l’étude sur les styles de management est importante car ils
déterminent la façon dont les managers effectuent leur travail. Cependant, ces
styles varient profondément selon des variables liées à l’environnement (milieu,
type organisation, secteur d’activité), au poste (niveau hiérarchique, fonction
occupée), à la personne (personnalité, style), à la situation (variation du travail
dans le temps). Mintzberg (1984) conclut en faisant quelques remarques fort
intéressantes pour la présente étude car elles abordent des questions
insuffisamment traitées par la littérature passée :
- La petite entreprise par rapport à la grande entreprise, est caractérisée par un
degré de formalisme faible et une préoccupation plus prononcée pour les
questions liées aux opérations internes. Les styles de management seront
caractérisés par la brièveté des activités, correspondances accrues par
téléphones et peu du formel, réunions non programmées ;
- Les styles de management varient selon le secteur d’activité (public ou privé)
de l’entreprise ;
2
De la traduction anglaise: Mintzberg (1973), The Nature of Managerial Work, Prentice Hall, USA.
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- Les traits personnels des managers ainsi que leurs comportements qui en
résultent sont indéniables à l’appréciation des styles de management ;
- L’aptitude des managers à conduire efficacement leurs tâches ou une
organisation dépendra non seulement de la connaissance intellectuelle mais
aussi, de leurs propres expériences ;
- L’influence de la situation et des effets de changement sociétaux sur les styles
de management, est encore insuffisamment abordée.
La dernière insuffisance relevée par Mintzberg, à savoir, les effets des facteurs
sociétaux sur les styles de management, est entrain d’être comblée par
l’approche par la culture nationale que nous développerons dans la section
suivante. Dans sa conclusion, Mintzberg (1984) attire une attention particulière
sur la nécessité d’une nouvelle conceptualisation des styles de management qui
tiennent compte à la fois de l’importance des traits personnels, des attitudes, des
pratiques, des compétences et expériences du manager et ce, en relation avec le
contexte social.
Si l’approche de contingence a marqué une avancée significative dans la pensée
en management, il reste que son caractère épars a reconduit les problématiques
classiques, notamment celles des approches de traits et de ‘styles’. A cet effet,
Chemers (1997, 46-47) retient deux limites dans l’approche de contingence. La
première est d’ordre méthodologique car les variables retenues dans les
différents modèles de styles de management sont relatives uniquement à un seul
individu, le leader héroïque. Cette situation a conduit à des biais dans les
résultats. La seconde limite de l’approche de contingence est corollaire à la
première. Les analyses ont négligé les interactions entre les comportements des
managers et ceux des subordonnées dans l’appréciation des styles de
management :
«Follower personality and ability factors were relatively ignored, and attention
was focused on the nature of follower’s task, in particular, the extent to which
the job was intrinsically interesting and fulfilling versus boring and aversive,
and the extent to which the job duties were ambiguous and broad in scope versus
highly structured and predictable » (Chemers 1997, 46).
Les subordonnés n’ont pas des attitudes passives. L’étude des styles de
management suppose que soient impliqués les comportements actifs des
subordonnés.
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4 Quelques remarques critiques
Bien que l’organisation scientifique du travail et l’école des relations humaines
(Mayo) présentent des conceptions diamétralement opposées, de l’être humain et
du groupe social, ces deux théories du management se fondent sur un même
postulat de base : il n’y a pas de contradiction fondamentale entre la recherche
de ‘’l’organisation’’ pour atteindre la rationalité et la recherche de l’homme
pour atteindre le bonheur.
L’OST prétend que l’organisation la plus efficace est aussi la plus
satisfaisante, étant donné qu’elle maximiserait à la fois la productivité et le
salaire des travailleurs.
L’école des relations humaines quant à elle, affirme que l’organisation la plus
satisfaisante est aussi la plus efficace. Aussi la direction devrait favoriser le
développement des groupes sociaux sur les lieux mêmes du travail et fournir un
leadership démocratique, participatif et communicatif.
Dans la perspective des relations humaines, il est nécessaire de tenir compte de
la ‘’logique des sentiments’’, des besoins psycho-sociaux des travailleurs, car en
les rendant ‘’heureux’’, l’organisation obtient leur coopération et leurs efforts et
donc accroît son efficacité.
En conséquence, la manière de rendre une organisation rationnelle serait
d’augmenter par des efforts délibérés, le bonheur des travailleurs.
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Une telle approche peut masquer un certain nombre de phénomènes :
- la négation de conflit comme phénomène de base, irréductible et
nécessaire au sein de toute organisation ;
- la négation de l’aliénation des travailleurs ;
- la manipulation d’un groupe social par un autre.
Conflit : l’organisation constitue un ensemble vaste et complexe dans lequel
plusieurs groupes sociaux interagissent. Ces groupes partagent certains intérêts
(par exemple la viabilité économique de l’entreprise) ; par contre d’autres
intérêts sont incompatibles (par exemple la manière de distribuer les bénéfices,
la durée et la signification du travail…). Les différents groupes peuvent coopérer
dans certains domaines et entrer en lutte dans d’autres domaines.
L’expression des conflits permet aux véritables divergences d’intérêts et de
croyances d’émerger : divergences dont la confrontation peut conduire à ajuster
le système organisationnel à l’environnement ou à influer sur celui-ci.
L’école des relations humaines avait tendance à ne considérer que le substrat
psychologique de conflit (mauvaise attitude des cadres, résistance ouvrière au
changement, pathologie de la communication, etc.) sans l’articuler aux variables
structurelles, techniques et économiques.
Aliénation : la recherche d’un bon climat, d’une bonne entente, d’un leadership
participatif… peuvent occulter un phénomène de base qui demeure irréductible :
l’assujettissement du travailleur par rapport à l’employeur. Les travailleurs
(ouvriers, soldats, chercheurs, etc.) ne possèdent ni moyens de production, ni le
produit de leur travail. Dans notre société, le droit au contrôle se conjugue avec
la propriété ; ceux qui fournissent les moyens, définissent aussi leur usage.
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SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
L’approche des relations humaines permet de réduire des frustrations mais à
l’intérieur de limites fort étroites. La pénibilité, la monotonie, l’absence de
signification de toute une série de tâches et fonctions n’en n’est pas modifiée
pour autant.
Etzioni présente un exemple éclairant de la négation de cette aliénation.
‘’Un film de formation aux relations humaines décrit une entreprise dans
laquelle les rouages tournent régulièrement et les travailleurs servent les
machines en rythme et avec le sourire. Un wagon arrive et décharge de grandes
caisses à claire-voie contenant de nouvelles machines. Un type pessimiste, en
train de balayer le plancher, répand la rumeur qu’un renvoi massif est imminent,
car les nouvelles machines feront le travail de plusieurs ouvriers. Les rouages
tournent plus lentement, les travailleurs sont tristes. Dans la soirée, ils
transportent leur mélancolie dans leurs maisons de banlieue. Le lendemain
matin, la voix rassurante du patron leur parvient du haut-parleur. Il leur annonce
que la rumeur est absolument sans fondement ; les machines doivent être placées
dans une nouvelle aile et de nouveaux travailleurs devront être engagés, car
l’usine compte étendre sa production. Chacun pousse un soupir de soulagement,
les sourires réapparaissent, les machines tournent à nouveau rapidement et
régulièrement. Seul le balayeur pessimiste est triste. Personne n’écoutera plus
jamais ses racontars. La morale est claire : si la direction avait eu le souci de
communiquer ses plans de développement aux travailleurs, la crise aurait été
évitée.
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SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
Une fois qu’elle survient, une augmentation de communication l’élimine comme
par enchantement. Les structuralistes ne remettent pas en question la valeur de
ce film de formation. Les problèmes initialement créés par une fausse
communication authentique peuvent être éliminés ou au moins réduits dans une
large mesure par une augmentation de la communication authentique. La
question que les structuralistes sont forcés de soulever est celle-ci : qu’aurait fait
la direction si la rumeur avait été exacte, si l’usine avait été obligée de réduire sa
force de travail? Même ici, la communication aurait quelque peu facilité la
situation en clarifiant l’étendue des renvois attendus et la procédure qui allait
être suivie, mais cela n’aurait sûrement pas éliminé ou même réduit de manière
significative l’aliénation de ceux qui allaient être renvoyés et de ceux de leurs
amis dont le tour viendrait ensuite. Des différences dans les intérêts
économiques et dans les positions de pouvoir ne peuvent pas être indéfiniment
reportées.’’
La façon dont l’expérience menée par Bavelas a été interrompue est également
révélatrice à cet effet.
La manipulation d’un groupe social par un autre groupe social est la
conséquence de ce qui précède. Les techniques des relations humaines sont
utilisées
explicitement
ou
implicitement
pour
aider
ceux
qui
sont
hiérarchiquement supérieurs à manipuler leurs subordonnés (quelles que soient
les intentions des premiers). Par exemple effectuer des transmissions d’ordre par
le biais des réunions de discussion à caractère démocratique ; le but réel de ces
réunions étant d’obtenir l’assentiment des subordonnés à des décisions qui ont
déjà été prises ailleurs.
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SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
Permettre à des travailleurs occupant des postes subalternes de décider de
manières peu importantes dont l’issue est indifférente à la direction. On créé
délibérément un faux sentiment de participation afin d’obtenir la coopération des
travailleurs et leur engagement vis-à-vis de l’entreprise.
Ce qui est reproché en fait à Mayo, Lewin et leurs successeurs, ce n’est pas tant
de ne pas modifier les structures fondamentales de l’entreprise (par exemple
division capital-travail, parcellarisation des tâches), mais c’est de donner
l’illusion que des profonds changements sont intervenus.
Au plan théorique, l’Ecole des relations humaines a découvert un champ
nouveau : l’organisation informelle.
Cependant en traitant celle-ci indépendamment de l’organisation formelle, elle
se décentrait de son objet d’étude original (l’organisation) vers la recherche que
quelques lois générales concernant le fonctionnement des groupes – et la façon
de les diriger – indépendamment de la nature des organisations dans lesquelles
ces groupes se trouvent insérés. En ce sens, l’Ecole des relations humaines n’a
jamais réellement remis en question le Taylorisme comme mode de structuration
de l’entreprise, au contraire, elle en constitue le complément nécessaire (prise
en compte de l’humain). L’organisation ‘’rationnelle’’ dans sa formalité est
considérée comme un déjà-là nécessaire – étranger à la logique du soutient –
qu’il faut accommoder quelque peu (raboter un style autocratique trop accentué,
prendre en considération l’aspect social de l’être humain, etc.), mais surtout
auquel il faut s’accommoder les uns les autres. L’organisation formelle n’est pas
considérée comme un produit, une élaboration sociale qui peut par conséquent
être questionnée et analysée dans son fondement même.
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SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS
NB : Ces remarques ne signifient pas, bien sûr, qu’il faille rejeter en bloc
l’approche des relations humaines, bien au contraire… mais il importe d’en
connaître les limites.
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