La dyspraxie… un trouble d`apprentissage peu connu dans le

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24.19/GV.VJ - 2008-2009
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La dyspraxie… un trouble d’apprentissage peu connu dans le monde scolaire Évelyne PANNETIER, neuropédiatre à Sherbrooke (Canada), a synthétisé, dans un livre, une série d’informations scientifiques récentes, mettant la dyspraxie à la portée de tous. Pour nous familiariser avec ce trouble neurologique, peu connu dans le monde enseignant, nous vous présentons une synthèse des principaux éléments de son ouvrage : « La dyspraxie : une approche clinique et pratique » aux Éditions du CHU Sainte‐Justine (2007, Montréal). Henri est inquiet : il va devoir dessiner un carré. Il sait ce qu’est un carré : une forme avec 4 côtés « les mêmes » et 4 angles droits. Mais il ne se souvient pas comment il faut faire pour le dessiner. Il regarde ses voisins qui prennent un crayon et une latte. Il les imite. Henri trace une ligne, une autre ligne : comment faire pour que ces 2 lignes se rejoignent, aient la même longueur, fassent un angle droit là où elles se touchent… Il ne sait plus… Pourtant, il l’a déjà fait, plusieurs fois ! Henri est dyspraxique : il ne se souvient pas des différentes étapes pour construire une forme, même s’il sait décrire précisément cette forme. Quelques mots pour comprendre « Dys » signifie « difficulté » ou « dysfonctionnement ». Les praxies sont des séquences de mouvements aboutissant à la réalisation d’un geste volontaire, intentionnel, qui permet d’interagir avec le monde extérieur. Cette action est réelle quand il s’agit de manipulations d’objets et symbolique quand il s’agit de gestes à forte influence culturelle (signe de croix, salut militaire). Le geste peut aussi figurer l’utilisation d’un objet fictif (mime) ou représenter un sentiment ou une émotion, comme l’étonnement ou le froid. Définition La dyspraxie est un trouble qui affecte les processus cognitifs permettant de planifier, d’exécuter et d’automatiser des mouvements volontaires appris et effectués dans un but précis d’interaction avec l’environnement. Cette incapacité gestuelle va fortement influencer les gestes de la vie quotidienne et les apprentissages scolaires. Fédération de l'Enseignement Fondamental Catholique
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Exemple : « ouvrir une porte » constitue une praxie spécifique c’est‐à‐dire une séquence de mouvements apprise pour interagir avec notre environnement, le schéma moteur de cette suite de mouvements étant inscrit (mémorisé) dans notre cerveau. La dyspraxie n’est pas une paralysie cérébrale, ni une déficience mentale, ni un trouble envahissant du développement. La théorie neuropsychologique de LUSSIER & FLESSAS (2002) met en évidence différents problèmes rencontrés chez l’enfant dyspraxique : ‐ l’intégration sensorielle des informations visuelles, auditives et tactiles ; ‐ la conceptualisation symbolique du geste ; ‐ la planification idéatoire ; ‐ la programmation et la planification motrice, ainsi que l’organisation et la séquence ; ‐ l’exécution motrice ; ‐ les boucles de rétroaction visuo‐spatiale, proprioceptive et kinesthésique. Quelques balises du développement des praxies chez l’enfant Le jeune enfant se développe au sein d’un milieu familial et culturel qui répond principalement à ses besoins physiques, cognitifs et affectifs. Bien que chaque enfant se développe à un rythme qui lui est propre, on a remarqué que les praxies se développent par étape, dans un certain ordre logique. L’enfant va progressivement intégrer et reproduire une série de gestes, et cela d’autant plus facilement, qu’il sera stimulé par son entourage immédiat. L’influence culturelle, intégrée dans une époque géographique et historique, va également avoir un impact sur le type de gestes que l’enfant va maîtriser : manger avec des couverts en Occident ou avec des baguettes en Chine . Différents auteurs (entre autres, LUSSIER, FLESSAS, MAZEAU) ont décrit l’évolution des praxies de 3 à 6 ans. En voici quelques repères1 en lien direct avec les activités scolaires. Découper : à 3 ans, Géraldine sait utiliser des ciseaux ; à 4 ans, elle découpe entre les lignes et vers 5 ans, elle arrive à découper des courbes. A 6 ans, elle peut découper des figures complexes. Dessiner et écrire : à 3 ans, Maxime trace des ronds, des lignes verticales et horizontales. Vers 4 ans, il se met à tracer des lignes obliques, à dessiner des croix et arrive à faire un carré ; à 5 ans, il sait dessiner un triangle et à 6 ans, il se met à écrire son prénom et à dessiner des losanges. Il est intéressant de noter que le développement de ces gestes se fait par différentes stratégies d’apprentissage : imitation, essais‐erreurs, répétition, entraînement ; ce qui permet à l’enfant de se constituer des répertoires de gestes disponibles dans sa mémoire. Ces différentes actions motrices dépendent également des fonctions de conceptualisation, de planification, d’attention et de mémorisation. Elles finissent par s’automatiser, libérant ainsi des espaces cognitifs pour d’autres tâches. Les difficultés concernant une praxie n’apparaissent donc qu’à un âge où l’enfant est censé la maîtriser ; on ne peut donc pas parler de dyspraxie avant 3 ans. 1
Différents tableaux sont proposés dans des livres de psychologie du développement ainsi que sur des sites Internet traitant du développement de l’enfant. Fédération de l'Enseignement Fondamental Catholique
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Des dyspraxies On distingue généralement trois types de dyspraxie développementale2 (c’est‐à‐dire survenant au cours du développement de l’enfant) : ‐ La dyspraxie practo‐perceptuelle : o des troubles de planification motrice empêchent l’enfant de planifier, d’organiser et d’automatiser des séquences motrices pour exécuter un geste volontaire. Ces difficultés peuvent aussi se manifester lorsqu’il doit modifier son geste en réponse à des informations visuelles et/ou sensitives. (C’est le cas d’Henri). o Des troubles perceptuels dus à des perturbations de la perception et de l’intégration d’informations visuelles, ce qui empêche l’enfant d’avoir les interactions adéquates avec son environnement. Des troubles de perception tactile et auditive peuvent également coexister. ‐ La dyspraxie avec troubles visuo‐spatiaux se manifeste surtout au moment de l’apprentissage de la lecture/écriture. ‐ La dyspraxie motrice pure concerne des difficultés de planification motrice et d’ajustement du geste ; elle est souvent associée à une atteinte neurologique telle que l’infirmité motrice cérébrale. Les origines de la dyspraxie Actuellement, les deux principales causes identifiées sont : ‐ une pathologie périnatale (prématurité, anoxie de courte durée) ; ‐ des indices de problèmes développementaux ou cognitifs liés à l’histoire familiale. Diagnostiquer la dyspraxie Si le diagnostic précis doit être posé par un neuropédiatre, certains éléments peuvent servir de signaux d’alerte et pousser à la consultation. ‐ Les difficultés à la maison : l’existence d’une maladresse motrice globale alerte souvent les parents. L’enfant tombe régulièrement, a des difficultés pour monter/descendre les escaliers ou n’arrive pas à pédaler sur le tricycle. L’enfant a aussi des difficultés de manipulation (les couverts, par exemple), il n’arrive pas à s’habiller seul, à boutonner son manteau… ‐ Les difficultés à l’école : en plus des difficultés déjà constatées à la maison, l’enfant dyspraxique va se tenir à l’écart des autres, en observateur ; il va plutôt s’investir dans des activités répétitives qu’il maîtrise déjà. La maladresse motrice se remarque également dans toutes les activités où intervient la motricité, dont les activités de bricolage. Plus tard, l’apprentissage de l’écriture va lui poser problème : entre autres, les lettres et chiffres ayant des diagonales. Les notions mathématiques vont s’acquérir avec beaucoup de difficultés, notamment la reconnaissance des quantités. Prendre en charge un enfant dyspraxique Différents thérapeutes professionnels doivent intervenir en fonction des symptômes identifiés : l’ergothérapeute, le kinésithérapeute, le psychomotricien, le logopède (en cas de troubles du langage associés), le rééducateur spécialisé (orthopédagogue)… Le soutien d’un psychologue est indispensable pour optimaliser la prise en charge du dyspraxique. 2
Chaque auteur spécialisé dans le domaine de la dyspraxie propose une typologie des dyspraxies qui généralement se rejoignent, mais portent des appellations différentes. Fédération de l'Enseignement Fondamental Catholique
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Quelques stratégies proposées par les professionnels de la rééducation : ‐ Le travail de l’image mentale pour aider l’enfant à développer une représentation mentale de l’action : se représenter le monde extérieur et imaginer les actions possibles sur celui‐ci. ‐ Le travail de la planification, l’exécution et l’automatisation de gestes pour interagir avec l’environnement, avec constitution d’un référentiel comportant les étapes des actions qui posent problème. ‐ L’utilisation d’outils, comme l’outil informatique, pour compenser les difficultés de l’apprentissage de l’écriture. Il s’agit d’abandonner la rééducation du graphisme manuel pour recommander plutôt l’usage de l’ordinateur comme « prothèse graphique », apprentissage durant deux années scolaires pour une maîtrise adéquate de l’outil (MAZEAU, 2004). L’école doit pouvoir soutenir l’enfant dyspraxique : ‐ Soutien à l’apprentissage avec méthodologies adaptées en collaboration avec les professionnels de la rééducation. ‐ Aide au développement des interactions sociales : l’enfant doit se sentir intégré dans son groupe classe, malgré ses difficultés. ‐ Conseil et soutien pour l’orientation vers une filière d’apprentissage qui va tenir compte de ses difficultés en vue d’une qualification professionnelle future. ‐ Dialogue avec le milieu familial pour éviter l’installation de difficultés psychoaffectives au sein de la famille. Des informations utiles à la portée de tous ‐
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Les dyspraxies, fiche N°10 de la série « Les troubles en un coup d’œil » sur le site FédEFoC. Le PI : une porte d’entrée pour l’enseignement spécialisé (FédEFoC, 2005). L’enseignement de type 8 : les dyspraxies, p.129. PANNETIER, E. (2007). La dyspraxie : une approche clinique et pratique. Montréal : Éditions du CHU Sainte‐Justine. BRETON, S. & LÉGER, F. (2007). Mon cerveau ne fonctionne plus : Comprendre et aider l’enfant dyspraxique. Montréal : Éditions du CHU Sainte‐Justine. * Fédération de l'Enseignement Fondamental Catholique
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