Génération de surfaces enveloppes pour l'usinage de pièces en Bois avec des outils de forme Stéphanie Chevalier*, Jean-Noël Felices**, Walter Rubio*** * Alma Sapex 65350 Lizos ** Université de Toulouse – INSA, UPS ; LGMT (Laboratoire de Génie Mécanique de Toulouse) 1 rue Lautréamont, F-65 016 Tarbes *** Université de Toulouse – INSA, UPS ; LGMT 118 route de Narbonne, F-31 077 Toulouse [email protected] ; [email protected] ; [email protected] Sections de rattachement : 60 Secteur : Secondaire RÉSUMÉ. Dans le cadre de l'usinage 5-axes en roulant de pièces en bois avec des outils de forme, nous nous intéressons à la génération et la modification de surfaces enveloppes gauches obtenues à partir d'une trajectoire. A partir d'une bibliographie sur l'usinage avec des outils cylindriques et coniques, nous présentons un algorithme générant une surface enveloppe en fonction d'un outil de forme et d'une trajectoire. Le développement de cet algorithme dans un logiciel de FAO, permet de connaître la pièce usinée exacte et de créer la contre-forme. Par une méthode de propagation de points dans une matrice 3D, nous détectons les zones de la surface enveloppe en interférence. Cette méthode conserve un lien entre la surface générée et le couple trajectoire/outil. Nous finirons en présentant les possibilités et les perspectives qu'apporte cette méthode comme la modification des trajectoires et le raccordement des surfaces enveloppes. MOTS-CLÉS : bois, usinage en roulant, machine 5 axes, surface enveloppe 1. Introduction Dans cet article, nous nous intéressons à l’usinage en roulant par outil de forme de pièces en bois sur machines outils à commande numérique cinq axes. La méthodologie d’obtention de ces pièces est la suivante : à partir d'un prototype, on numérise une trajectoire à l'aide d'un bras numérique avec à son extrémité la forme géométrique de 1 l’outil (Cf. fig. 1). Cette trajectoire nous permet de calculer la surface réellement obtenue et de détecter des écarts. Le prototype est défini à partir de formes gauches que l’on peut obtenir soit par de l’usinage en bout soit par un usinage en roulant. Etant donné les faibles pressions spécifiques de coupe dans l’usinage de pièces en bois, les usineurs programment en roulant afin d’enlever un maximum de matière en une seule opération qui a un rôle d’ébauche et de semi-finition. L’opération de finition est ensuite toujours réalisée par polissage. Le choix de l’usinage en bout dans certaines pièces est nécessaire à cause de la visibilité ou des risques d’interférences globales. Nous nous intéressons ici uniquement à l’usinage en roulant. Nous supposons que cinématiquement toutes les surfaces sont accessibles et sans risque d’interférences globales (le porte-outil ne peut pas être en collision avec un élément). L’usinage en roulant de surfaces gauches a été traité par de nombreux chercheurs mais spécifiquement sur les surfaces réglées. (Liu 1995) cherche 2 points de l'axe de l'outil à ¼ et ¾ de la règle. Dans (Redonnet et al., 1998), le positionnement de l'outil est calculé à partir de 2 points de tangence sur les directrices tout en conservant un point de contact sur la règle concernée. Dans (Monies et al., 2002), cette méthode est étendue aux outils coniques. Dans (Bedi et al., 2003), le positionnement de l'outil est calculé dans les 2 plans osculateurs aux extrémités de la règle. (Menzel et al., 2004) reprennent cette méthode et minimisent sur quelques points, l'écart entre l'outil et la surface. Ces différentes approches cherchent à améliorer les trajectoires afin de se rapprocher de la surface nominale définie par la CAO. Elles portent toujours sur des géométries d’outils élémentaires (cylindriques et coniques) contrairement à notre étude qui privilégie la complexité des géométries et l'allure générale de ces pièces en bois sur la précision. 1.1. Définition de l'outil Dans les pièces à usiner, nous devons limiter le nombre d’opérations et donc choisir des outils qui permettront d’obtenir rapidement la pièce. Le choix de la géométrie d’outil se fera à l’aide d’une section caractéristique de la pièce (Cf. fig. 2) et celui des opérations, en fonction des différents posages de pièce dans l’espace de la machine. Figure1. Palpage d'un dossier de chaise Figure 2. Récupération du profil de l'outil 2 1.2. Définition de la trajectoire Le bras numérique équipé d'un outil factice nous fournit une trajectoire (ensemble de points/orientations). Pour rectifier les erreurs dues à la manipulation, le traitement (filtrage, lissage) de ces données est effectué. L’intérêt de ce palpage est de nous fournir rapidement une trajectoire « par excès de matière » à partir de l’outil choisi. 1.3. Détermination de la surface enveloppe Il est important de connaître à l’issue de cette opération de balayage du prototype quelle est réellement la géométrie de la pièce obtenue. Celle ci pourra être différente si le palpeur n’accède pas à toutes les zones du prototype. De plus, rien ne nous assure qu'il est possible de reproduire la surface du prototype à l'identique avec le profil d'outil récupéré précédemment. D'où l'importance de calculer la surface enveloppe qui correspond à la trace laissée par l’outil en prenant en compte le déplacement de l’outil (Sheltami et al., 1998). En effet, définir la surface enveloppe est primordial car la surface usinée est le conjugué géométrique défini par la surface enveloppe (Chiou et al., 1999). Enfin connaître la surface pièce usinée, permet de créer la contre-forme de la pièce utilisée pour le montage d'usinage des phases suivantes. 2. Création de la surface enveloppe (Senatore et al,. 2005) définissent une surface enveloppe à partir d'une trajectoire et d'un outil cylindrique. Notre étude consiste à extrapoler cette méthode à des outils de forme. La trajectoire est un ensemble de couples point/vecteur. Le point définit la position du centre outil et le vecteur, l'orientation de l'axe. Soient ptD le centre outil et ptE le point de l'axe à l'autre extrémité de l'outil. Soient VD et VE les vitesses respectives des points ptD et ptE. Pour chaque position de l'outil, nous définissons le repère local suivant : ℜ1 : ptD , x 1 = V Dproj V Eproj , y =z ∧x 1 , z 1= PtEPtD ∥V Dproj V Eproj∥ 1 1 où V Dproj =z 1 ∧V D ∧z 1 V Eproj =z 1∧V E∧z 1 Les vitesses VDproj et VEproj sont les vitesses projetées des vitesses VD et VE sur le plan normal à z1. Cette définition permet d'avoir dans le repère ℜ1 : { } v Dx 0, v Ex 0 v Dy⋅v Ey 0 V Dx et V E ℜ 1 = V Ey V Dz V Ez L'outil de forme est défini dans le repère ℜ1 par : V Ex avec V D ℜ 1 = V Dy { R scos T , s= R ssin s } s∈[−lgOut , 0] , ∈[ 0, 2] avec R s: profil de l ' outil lgOut : longueur de l ' outil 3 D'après (Lartigue et al., 2003) pour définir la surface enveloppe à partir d'un outil et de sa trajectoire, nous devons au préalable définir la courbe enveloppe pour chaque position de l'outil. Un point M de la surface de l'outil appartient à la courbe enveloppe s'il vérifie la condition : nM est la normale au point M à la surface de l'outil n M⋅V M =0 où VM est la vitesse (ou vecteur direction) du point M 2.1. Calcul de la normale à un point M de l'outil dans le repère R1 On pose T = ∂ T , s et T s = ∂ T , s et R ' s= dR s ∂ ∂s ds Pour calculer R'(s), il est nécessaire que le profil R(s) soit une fonction continue dérivable. Hors le profil de l'outil est un ensemble d'éléments : droites ou arcs de cercles. Pour chaque élément, la fonction R(s) est continue dérivable. Mais à la jonction entre 2 éléments, la fonction n'est pas toujours continue C1 donc pas dérivable. Pour avoir une continuité C1 entre les éléments de l'outil, nous avons rayonné les jonctions avec des rayons négligeables. Ainsi le profil de l'outil n'est pas modifié et la fonction R(s) est toujours dérivable. −R ssin R' scos T ∧T s où T = R scos et T s = R ' ssin ∣T ∧T s∣ 0 1 cos 1 On obtient : n M = 1R ' ² s sin vecteur normal à l'outil au point (θ,s) −R ' s n M= 2.2. Calcul de la vitesse d'un point M de l'outil dans le repère R1 Dans le repère ℜ1 , les points ptD et ptE et leurs vitesses respectives VD et VE sont définis de la manière suivante : V Dx 0 0 ptDℜ 1 = 0 , ptEℜ 1 = 0 ,V D ℜ 1 = V Dy 0 zE V Dz V Ex et V E ℜ 1 = V Ey V Ez La vitesse d'un point M de l'outil VM peut être calculée à partir de la vitesse VD du point ptD par la relation du torseur cinématique : V M =V D MPtD∧ avec = La vitesse de rotation instantanée de l'outil Ω peut être déterminée de la manière V Dy −V Ey V Ex −V Dx suivante : V E =V D PtEPtD∧ .On en déduit alors : = 4 zE , = zE 2.3. Détermination de la courbe enveloppe On travaille dans le repère ℜ1 . n M⋅V M =0 ⇔ n M⋅V D MPtD∧=0 ⇔ n M⋅V D n M ∧MPtD⋅=0 { } a =[ V Dx R s R ' ss] ⇔a cos b sin = c où b=[V Dy − R s R ' ss] c= R' s∗V Dz Rechercher la courbe empreinte revient à trouver le θ solution de l'équation cidessus pour un s donné. Pour (a,b)≠(0,0), on pose : cos−= { cos = a a 2 b 2 , sin = b a b 2 2 } c a b 2 2 avec ψ tel que ⇒ solution s=±arccos c 2 a b 2 Pour (a,b)=(0,0) : Comme a=V Dx R s R ' ss , a=0 ∀ s ⇔ =0 et V Dx =0 ⇔V Dx =0 et V Ex =0 Comme b=V Dy − Rs R ' ss , b=0 ∀ s ⇔=0 et V Dy =0 ⇔ V Dy =0 et V Ey =0 Quand (a,b)=(0,0), l'outil est soit immobile, soit en position de perçage, ce qui n'a pas de sens pour l'usinage en roulant. En reportant le résultat dans T(θ,s), on trouve l'équation de la courbe enveloppe : R scos solution s C E s= R ssin solution s s L'ensemble de ces courbes enveloppes obtenues à différentes positions le long de la trajectoire, nous donne la surface enveloppe. 3. Traitement de la surface enveloppe Nous souhaitons déterminer la trace laissée sur la pièce usinée. Il est indispensable de détecter les auto-intersections, car la trace laissée par certaines courbes enveloppes peut être effacée par la trace d'autres courbes enveloppes. Nous récupérons la surface englobante de la surface enveloppe qui donne la pièce réellement obtenue. Les points à l'intérieur de la surface englobante n'apparaissent pas sur la pièce usinée. (Redon et al., 2004) traitent les collisions entre un objet et son environnement. Nous souhaitons détecter les zones de la surface enveloppe en interférence. (Seong et al,. 2006) proposent des algorithmes d'auto-intersections par résolution d'équations à plusieurs variables. Ces méthodes sont très complexes et n'aboutissent pas forcément. Nous proposons une adaptation d'une solution (Peternell et al., 2005) par propagation de points dans une matrice 3D. 5 Pour traiter la surface enveloppe, elle doit être représentée par un ensemble de points. Cette méthode est implémentée en C++ ; le calcul de la surface enveloppe se fait de manière discrète par un ensemble de points. Le traitement de la surface enveloppe avec une méthode de propagation impose que l'écart entre 2 points de la surface enveloppe, soit inférieur à Tol. Tol représente l'écart entre 2 points de la grille 3D qui englobe la surface enveloppe. Pour respecter cette condition, nous utilisons une méthode basée sur un développement de Taylor. Nous caractérisons la surface enveloppe SEnv par un ensemble de points PtEnv(wi,sij) calculés à une position donnée wi sur la trajectoire et pour un paramètre sij sur l'outil : S Env ={PtEnv wi , sij , pour w i =0..1 , s ij=−lgOut..0 } 3.1. Présentation de l'algorithme de caractérisation de la surface enveloppe par un ensemble de points w=0 tant que w<1.0 Calcul de la courbe enveloppe pour w : s=-lgOut tant que s<0 Calcul du point enveloppe : PtEnv(w,s) Calcul du nouveau s : on souhaite ║PtEnv(s+∆s,w)-PtEnv(s,w) = Tol║ Avec le développement de Taylor, on en déduit : s= s=s+∆s fin tant que Calcul du nouveau w : on souhaite : ∥ Tol ∂ PtEnv s j , wi ∂s ∥ Max ∥PtEnv w k w , s k − PtEnv w , s k ∥=Tol , pour sk =−lgOut..0 k Avec le développement de Taylor : w=Min k w=w+∆w fin tant que ∥ Tol , pour s k =−lgout..0 ∂ PtEnvw , s k ∂w ∥ 3.2. Présentation de l'algorithme de propagation Nous créons une grille 3D englobant l'ensemble des points de la surface enveloppe. Cette grille est considérée comme un ensemble de tranches (Cf. fig. 3). yMin zMin xMin Figure 3. Grille 3D 6 Chaque tranche, est traitée comme un plan 2D. On recherche les contours fermés afin d'avoir l'ensemble des points de la surface englobante de l'enveloppe (Cf. fig. 4). On peut avoir plusieurs contours fermés dans une tranche. D'où l'importance d'avoir un lien entre l'écart des points de la surface enveloppe et l'écart des points de la grille. yMax yMax yMin yMin xMin xMin xMax xMax Figure 4. Récupération des contours fermés Cette étude permet d'obtenir la surface englobante et donc de connaître la pièce usinée résultante (Cf. fig. 5). Ainsi, la contre-forme de la pièce pour usiner la face opposée peut-être créée. Figure 5.1. Outil de forme et trajectoire Figure 5.2. Surface englobante 4. Conclusion et perspectives Cette étude obtient la surface réelle de la pièce usinée à partir d'un prototype. Elle permet de quantifier les écarts par rapport à la surface théorique (qui pourra être numérisée de façon classique). La particularité de cette méthode, est le lien entre la surface enveloppe et le couple trajectoire/outil. En effet, nous connaissons la provenance de chaque point enveloppe ; nous savons quand et avec quelle partie de l'outil, un point enveloppe a été créé. Cette information est primordiale. Elle permettra dans un premier temps, de modifier la trajectoire et le profil afin de raccorder des surfaces enveloppes entre elles, ou d'approcher au mieux la surface théorique, tout en conservant une surface esthétique. 7 Dans un second temps, cette méthode nous servira à déduire automatiquement une trajectoire et/ou une forme d’outil optimale à partir d'une surface CAO. Cette dernière perspective est le but de cette recherche. 5. Références bibliographiques Liu XW, « Five-axis NC cylindrical milling of sculptured surfaces », Computer-Aided Design 27(12):887-894, 1995. Redonnet JM, Rubio W, Dessein G, « Side milling of ruled surfaces - Optimum positioning of the milling cutter and calculation of interference », The International Journal of Advanced Manufacturing Technology 14(7):459-465, 1998. 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