L`idéalisme : plein feu sur les idées

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L’idéalisme : plein feu sur les idées
Pour ce courant de pensée, la matière n’est pas la seule réalité, les idées jouent aussi un rôle prépondérant
dans notre univers.
Qu’est-ce que l’idéalisme ? C’est un courant de pensée qui a une double signification. Au sens courant, c’est
l’attitude de celui qui croit à un idéal et qui vit conformément à celui-ci. Au sens philosophique, c’est une
doctrine qui affirme que la matière n’est pas la seule réalité. On peut présenter trois philosophes idéalistes :
Platon, Berkeley et Kant.
Platon (427 av. JC-347 av. JC)
Platon a développé la première grande philosophie idéaliste. Pour le philosophe grec, au-delà de ce
monde, il existe un autre monde bien réel : le monde des idées. Ces idées sont les modèles du monde
sensible. Platon s’est nourri de l’enseignement de Socrate. Comme lui, il pense que le VRAI est accessible à
la raison humaine. La mort de Socrate l’affecte profondément et le conduit à orienter sa pensée
philosophique vers une réflexion politique. Il souhaite que la Cité soit gouvernée par des sages. Platon nous
invite aussi à la connaissance de soi : "Se connaître, c’est savoir ce que l’on est et ne pas prendre
imprudemment pour soi ce qui n’est pas soi" (Alcibiade). Platon insiste toujours sur le fait que, pour être
heureux, il faut faire bon usage de ce que l’on possède. "Il faut, si l’on veut connaître le bonheur, ne pas se
borner à posséder des biens, mais il faut encore les utiliser, attendu qu’il n’y a, sans cela, aucun intérêt à les
posséder !" (Euthydème). Aristote, élève de Platon, fera remarquer, non sans humour, dans l’Éthique à
Nicomaque, qu’il vaut mieux être beau, jeune, riche, bien portant et intelligent pour être heureux, plutôt que
laid, vieux, pauvre, malade et sans amis…
George Berkeley (1685-1753)
Berkeley développe une théorie "immatérialiste". D’après cet évêque irlandais, si nous poussons
jusqu’au bout la logique de l’idéalisme, nous pourrions même douter de la matérialité du monde extérieur. Il
ne nie pas la réalité du monde que nous percevons, mais la nature matérielle des choses. Selon lui, les
éléments qui composent notre univers, qu’il s’agisse de l’étendue, du mouvement, de la couleur ou du son
n’ont aucune existence en dehors de la perception que nous en avons. "Il est impossible que les choses aient
une existence en dehors des esprits qui les perçoivent" (Traité des principes de la connaissance). En
définitive, on s’affirme idéaliste quand on prétend que les choses ne sont que des représentations. Cela
revient à privilégier le sujet par rapport à l’objet.
Emmanuel Kant (1724-1804)
Kant attribue une part subjective dans la connaissance. Contrairement au réalisme d’un Aristote, ce
philosophe originaire de Königsberg, en Prusse (qu’il n’a jamais quittée), attribue une part subjective dans la
connaissance. La philosophie de Kant reçoit le nom d’"idéalisme transcendantal". C’est une doctrine pour
laquelle tout objet de connaissance est influencé a priori par la nature même de notre faculté de connaître. Sa
grande innovation sera de concevoir que le contenu de notre connaissance dépend de la personne qui
connaît, plus encore que de l’objet connu. Ce changement, Kant le compare à celui opéré par l’astronome
polonais Copernic (1473-1543), quand celui-ci affirma que la Terre n’était pas le centre de l’univers.
L’existentialisme : retour au vécu
Il s’agit d’une philosophie qui place au centre de sa réflexion l’existence humaine dans sa dimension
concrète et individuelle.
L’existentialisme est la manifestation moderne d’une réaction qui se produit périodiquement dans l’histoire,
soit à la suite d’un excès de rationalisme, soit après des bouleversements mondiaux qui laissent l’humanité
en proie à l’angoisse et à l’incertitude. C’est une philosophie qui place au centre de sa réflexion l’existence
humaine dans sa dimension concrète et individuelle. Pour dire les choses plus simplement, l’existentialisme
est un retour à l’existence.
Il existe deux courants existentialistes : un athée et un chrétien. Tous deux apportent une grande importance
au vécu, à la subjectivité.
Le courant athée
Martin Heidegger (1889-1976) affirme que l’angoisse est indépassable. Face à elle, l’homme est sans
recours et doit penser son existence dans l’horizon de la mort. Il ne peut fuir cette angoisse que dans
l’inauthenticité d’une vie banale et ordonnée.
Jean-Paul Sartre (1905-1980) pense que l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il fait. Lecteur assidu du
philosophe allemand Martin Heidegger, Jean-Paul Sartre écrit : "Il est absurde que nous soyons nés et il est
absurde que nous mourrions", écrit-il. L’homme se définit par ses actions et son existence. Dans un monde
sans Dieu et qui n’a aucun sens, il est seul et condamné à être libre. "Je suis ma liberté", écrit-il. Mais il est
pleinement responsable et doit assumer ses actes par l’engagement politique. "L’homme n’est rien d’autre
que ce qu’il se fait. Tel est le principe premier de l’existentialisme." En insistant sur la nécessité d’être
engagé dans son époque, il a largement contribué à faire descendre les philosophes de leur tour d’ivoire.
C’est le modèle de "l’intellectuel engagé." Il écrit : "L’existentialisme pense que l’homme, sans aucun appui
et sans aucun secours, est condamné, à chaque instant, à inventer l’homme", dit-il dans L’existentialisme est
un humanisme.
Albert Camus (1913-1960) tente de fonder une nouvelle morale humaniste. Écrivain engagé, philosophe
de l’absurde, il a voulu donner à l’homme de bonnes raisons de vivre dans une époque désespérée, souffrant
de l’absence de Dieu et de l’oppression totalitaire. À l’instar de Sartre, il n’a jamais cessé de lutter pour la
dignité, l’indépendance et la liberté humaines. Il tente de fonder une nouvelle morale humaniste, hors de tout
système, au centre de laquelle se trouverait l’homme concret. "Dans l’expérience absurde, la souffrance est
individuelle. À partir d’un mouvement de révolte, elle a conscience d’être collective, elle est l’aventure de
tous" (l’Homme révolté).
Le courant chrétien
Kierkegaard (1813-1855) écrit que l’angoisse est une ouverture sur Dieu. Ce philosophe danois est issu
d’une famille protestante particulièrement austère. Pour lui, l’angoisse et le désespoir sont des éléments
moteurs de la vie. L’angoisse, c’est l’impossibilité de trouver ici-bas des réponses humaines aux questions
fondamentales. Cette expérience douloureuse de la finitude est un appel de l’absolu, une ouverture sur le
divin.
Gabriel Marcel (1889-1973) affirme que, grâce à sa foi, sa vie prend un sens. Ce philosophe français
s’inspire de Kierkegaard. Refusant le pessimisme de l’existentialisme athée, il accorde une grande
importance à la rencontre de l’homme et de Dieu dans la foi.
Le réalisme : l’esprit n’est pas tout-puissant
En général, se montrer réaliste, c’est penser qu’on doit prendre en compte la réalité parce qu’on ne peut pas
faire autrement. Les philosophes raisonnent différemment…
Qu’est-ce que le réalisme ? C’est un courant de pensée pour lequel le monde est directement connaissable,
indépendamment de ce que notre esprit peut en penser. En effet, le réel, c’est-à-dire le monde qui existe en
dehors de nous et qui s’impose à nos sens, obéit à des lois, que je peux, grâce à l’usage de ma raison,
découvrir au moins en partie.
Aristote (384-322 av. JC)
Aristote montre que ce qui est intelligible dans les choses ne réside pas dans un monde "à part", mais
dans les choses elles-mêmes. Pour celui qui fut l’élève de Platon et le précepteur du futur Alexandre le
Grand, l’État est un fait de nature, les hommes ont besoin, par nature, de s’assembler. "La cité est au nombre
des réalités qui existent naturellement, et l’homme est par nature un animal politique" (Politiques). En effet,
la finalité de l’individu n’est pas seulement de vivre, mais de vivre en harmonie avec les autres dans une
société organisée. C’est parfois la nécessité ou le besoin qui pousse les individus à s’associer. Mais c’est
toujours la recherche du "bien vivre" qui les fait demeurer ensemble. Le groupement politique est dans la
nature humaine, la nature nous a donné les sentiments du bien et du mal, du juste et de l’injuste, ainsi qu’une
faculté spéciale pour les communiquer, parce que nous sommes créés en vue de la vie en société et, plus
précisément, de l’appartenance à une cité.
Pour Aristote, l’instinct d’imitation est naturel à l’homme. Entre la vie réelle et la représentation
théâtrale, il existe une distance. Ce ne sont pas directement les hommes qui se trouvent représentés, mais
leurs actions. En ce sens, la tragédie est une imitation des actions humaines qui nous éclaire sur l’action
humaine en général. L’instinct d’imitation est naturel à l’homme, c’est ce qui le différencie des autres
animaux. "L’art imite la nature", dit Aristote. C’est cette propension à l’imitation qui est à l’origine de toutes
les productions esthétiques quelles qu’elles soient. L’épisode est célèbre : le peintre grec Zeuxis rendait si
bien la réalité que les oiseaux se cassaient le bec en voulant picorer les raisins qu’il avait peints sur un mur !
Aristote nous montre que si l’art est imitation, il n’est pas que cela, il est aussi capable de purifier les âmes.
"On se plaît à regarder les images, car leur contemplation apporte un enseignement et permet de se rendre
compte de ce qu’est chaque chose" (Poétique).
Thomas d’Aquin (1225-1274)
Thomas d’Aquin affirme que la philosophie ne s’oppose pas à la foi. Au XIIIe siècle, Thomas d’Aquin,
grand commentateur d’Aristote, reprendra à son compte les thèses réalistes. Ce philosophe issu d’une
famille aristocrate napolitaine a montré que l’on pouvait être à la fois philosophe et théologien. Il conçoit la
sagesse comme une "prudence", c’est-à-dire une intelligence pratique éclairée par la foi. À cette occasion, il
définit les rapports qui doivent exister entre philosophie et théologie, à une époque où l’on croyait les deux
disciplines incompatibles. Puisque l’homme est un être imparfait, la raison humaine ne lui permet pas de
tout connaître, certaines vérités relatives à Dieu ne peuvent être démontrées avec certitude par la seule
raison. "La raison humaine est bien débile devant les réalités divines !" écrit-il dans Somme théologique.
Le stoïcisme : de l’abnégation en tout
Il faut beaucoup de force morale pour devenir stoïcien. Il faut accepter ce qui découle de la nature et ne pas
se rebeller contre ce qui paraît, à première vue, mauvais.
"Supporte et abstiens-toi !" telle est la devise des stoïciens. Le stoïcisme est une école philosophique née en
Grèce au IIIe siècle avant JC. Le nom vient du lieu "le portique" (en grec, Stoa), où les premiers stoïciens se
réunissaient. Le sage stoïcien est celui qui a réalisé le règne absolu de la raison en lui. Ce qui implique la
suppression de toute imagination, de toute passion et un dépouillement affectif total. Le fondateur du
stoïcisme est Zénon de Citium (vers 335 av. JC). Mais Épictète, qui vivait très modestement dans une
masure, est le plus célèbre. C’est son disciple Arrien qui recueillit ses paroles.
Épictète (50-130 ap. JC)
Épictète pense qu’il faut extirper ses passions. Pour cet ancien esclave romain, l’homme n’a aucun
pouvoir sur ce qui ne dépend pas de lui. "Nos jugements, nos tendances, nos désirs, nos aversions dépendent
de nous, alors que notre corps, notre richesse, la célébrité, le pouvoir, ainsi que le fait de changer l’ordre
naturel des choses n’en dépendent pas" (le Manuel). Pour être heureux, il faut être indifférent à ces réalités.
En désirant ce qui ne dépend pas de moi, je fais mon malheur. L’homme qui veut le pouvoir désire quelque
chose qui ne dépend pas de lui. En effet, c’est toujours autrui qui me confère un certain pouvoir. Et si je
souhaite devenir riche, je ne peux que dépendre d’autrui, soit parce que je fais du commerce avec lui, soit
parce que je le fais travailler, soit encore parce que je le trompe ou je le flatte. La passion est le pire des
maux. Si Aristote conseillait de modérer l’élan de nos passions, Épictète, beaucoup plus radical, dit qu’il
faut les extirper. Les passions troublent le jugement de ma raison, emportent ma volonté. Je perds dès lors
toute liberté et deviens leur esclave. C’est la pire des servitudes puisqu’elle vient de moi-même.
Sénèque (4 av. JC-65 ap. JC)
Sénèque estime que la valeur de la vie n’est jamais matérielle. Ce stoïcien romain célèbre montre la
laideur de la condition humaine lorsqu’elle s’adonne aux vices et aux passions. Il a une aversion pour la
violence et un amour du bien. "Être invulnérable, ce n’est pas n’être pas frappé, c’est n’être pas blessé" (De
la constance du sage). Il dit aussi : "Nos joies, nos pleurs sont fixés de longue date ; et quelque diversité que
semblent offrir les vies humaines, elles reviennent, dans l’ensemble, toutes au même" (De la providence).
"La richesse est chez le sage en servitude, chez le sot, au pouvoir" (la Vie heureuse).
Marc Aurèle (121-180 ap. JC)
Marc Aurèle prône une vie digne et utile au bien commun. Cet empereur romain, successeur d’Antonin,
reprendra à son compte la thèse d’Épictète. Il trouvera dans le stoïcisme le secret de la lutte contre le
découragement (il passa vingt ans sur les champs de bataille). Selon lui, les plaisirs de la chair ne peuvent
pas conduire à la sérénité, car ils sont éphémères. Ils ne me contentent jamais puisque je dois toujours les
renouveler. Devenus habitude, ils me lassent. La vie me paraît alors sans goût. Je dois sans cesse trouver de
nouveaux artifices pour échapper à la monotonie. C’est ainsi que je suis enchaîné à mes désirs et que je
perds ma liberté. "Vivre de la vie la plus belle, notre âme en elle-même en trouve le pouvoir, pourvu qu’elle
reste indifférente aux choses indifférentes" (Pensées pour moi-même).
Bouddha (566-486 av. JC)
Bouddha a cherché longtemps la délivrance par l’ascétisme. On retrouve dans le bouddhisme les mêmes
aspirations, avec cette réflexion sur l’existence humaine doublée d’une morale prônant l’ascèse et le
détachement. "Notre souffrance permanente est due aux passions, qui nous attachent aux biens matériels et
nous font dépendre de nos désirs et de nos besoins" (Discours).
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