État des lieux de l`utilisation des logiciels de gestion des fichiers

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État des lieux de l'utilisation des logiciels de gestion des fichiers patients chez les médecins
généralistes picards installés en libéral en 2012
DEPREZ Lucie
Mots-clés : médecins généralistes, information médicale, patients, logiciels informatiques
Introduction : Certains médecins généralistes utilisent peu leurs outils informatiques. Les logiciels
informatiques médicaux sont parfois utilisés de façon irrégulière par les médecins, nous nous sommes
demandé pourquoi. Le but de cette étude était de faire un état des lieux de l’utilisation des logiciels de
gestion des fichiers patients par les médecins généralistes libéraux en 2012. La question posée était
de déterminer quelles sont les mesures à prendre pour améliorer l’utilisation de l’informatique au
cabinet ?
Méthode : Nous avons réalisé une étude descriptive, basée sur un auto-questionnaire envoyé par
voie postale à 500 médecins généralistes libéraux picards après randomisation par l‘URPS ML de
Picardie (Union Régionale des Professionnels de Santé Médecins Libéraux de Picardie). Le mode de
recueil des données était anonyme. Les données ont été insérées manuellement sur un tableau du
logiciel Excel et les analyses statistiques ont été faites d’une part sur le logiciel « le sphinx » de
l’URPS ML, d’autre part en ligne sur internet sur le site BiostaTGV. Les tests utilisés étaient le Chi-2 et
le test exact de Fischer. Le seuil de significativité était de 0,05.
Résultats : Le taux de réponse au questionnaire était de 34,4%. 91,9% des médecins étaient
informatisés, 87,9% d’entre eux utilisaient un PC (Personal Computer). Le fichier patient était
informatisé ou mixte (informatisé et papier) chez 86% des médecins. Le recours à une maintenance
en cas de problème se faisait par téléphone dans 33,1% des cas. 60,5% des médecins avaient déjà
changé de logiciel, et parmi les médecins ayant déjà changé de logiciel, 87,5% étaient satisfaits après
changement.
Les causes de changement de logiciel étaient dominées par l’abandon de commercialisation du
logiciel (pour 11 médecins), la non évolutivité ou le coût du logiciel (pour 8 médecins et 5 médecins
respectivement), le défaut de maintenance ou le rachat de la société du logiciel (pour 6 médecins
dans chaque groupe), mais aussi par la faillite de l’entreprise (5 médecins). Quelques médecins ont
changé de logiciel suite à une installation en association.
Les médecins échangeaient via Internet avec leurs confrères dans 43% des cas et 69,2% d’entre eux
utilisaient une messagerie sécurisée. Les données de la consultation étaient rentrées majoritairement
au cours de la consultation (77,3%). Le fichier informatique servait à renseigner pour chaque patient:
l’état civil (dans 88,3% des cas), les antécédents (85,5%), les allergies et intolérances
médicamenteuses (86%), les traitements (chez 86% des médecins) et les vaccinations (80,2%)
(p=0,24). Seules les données des visites étaient peu renseignées (37,2%) (p<0,001).
De même, les courriers n’étaient pas beaucoup rédigés via le logiciel (45,9%), contrairement aux
ordonnances (75%) et aux certificats (63,9%).
Le fichier informatique servait à établir les FSE (Feuilles de Soins Electroniques) chez 80,2% des
médecins. Les résultats de biologie étaient enregistrés principalement par messagerie sécurisée
(40%) (p<0,001), à l’inverse des résultats des autres examens complémentaires qui l’étaient par
scanner (25%) (p=0,02). Le logiciel était utilisé pour faire une synthèse annuelle du dossier des
patients atteints de maladie chronique dans 19,2% des cas, et dans seulement 7,8% des cas pour
faire une synthèse annuelle du dossier de tous les patients (p=0,04). Le logiciel était peu utilisé pour
faire des statistiques (12,8% des cas) ou de la recherche multicritère (16,9% des cas) (p=0,56). Le
taux d’utilisation du logiciel pour faire de la recherche multicritères augmentait avec le nombre
d’années d’installation du médecin (les médecins installés depuis plus de 10 ans faisaient plus de
recherche multicritères (25% ; p=0,01)).
Le pourcentage de satisfaction globale du logiciel était de 77,3%. Les modifications à apporter aux
logiciels les plus fréquemment citées étaient : aucune modification (pour 15 médecins), logiciel plus
simple (11 médecins), plus rapide (6 médecins), insertion du DMP (Dossier Médical Partagé) (5
médecins), moins de clicks, meilleure lisibilité, possibilité de faire des statistiques et de la recherche
multicritères (pour 4 médecins respectivement dans chaque groupe). Les obstacles à l’utilisation des
fonctions du logiciel étaient dominés par le manque de temps (cité par 58,7% des médecins), le
manque de formation (45,9%), d’attirance pour l’informatique (23,3%) ou le manque d’ergonomie du
logiciel (11,6%).
Nous avons trouvé que la nouvelle convention médicale de 2011 n’a pas encore eu d’influence sur
l’informatisation des médecins dans 82% des cas [1]. Cependant, 62,2% des médecins comptent
désormais utiliser les télé services de l’Assurance Maladie, 58% comptent faire un suivi informatisé de
leurs patients et 87,8% comptent télétransmettre les feuilles de soins (p<0,001).
Discussion : A l’aide de ces résultats, nous avons tenté de répondre à la question principale posée
dans cette étude, à savoir pour quelles raisons les médecins généralistes ne se sont pas appropriés
toutes les fonctions de leur logiciel ?
Tout d’abord, nous avons étudié les réponses aux questions générales. Les caractéristiques de la
population de médecins ayant répondus (70,9% d’hommes et 28,5% de femmes), ainsi que la
répartition par département d’origine (26,7% dans l’Aisne, 32.6% dans la Somme et 40,7% dans
l’Oise), sont proches de celles des généralistes libéraux picards, puisque le CNOM (Conseil National
de l’Ordre des Médecins) retrouvait des résultats proches en 2009 [2]. Par contre, le mode d’exercice
s’est inversé par rapport à 2005 (données de l’URML de Picardie (Union Régionale des Médecins
Libéraux de Picardie)). En effet, en 2012 44,7% des généralistes libéraux exercent seuls et 54,6%
exercent en groupe, alors que l’URML de Picardie recensait 51,1% de généralistes exerçant seuls
contre 48,9% exerçant en groupe au moment de son étude [3]. Ce fait est probablement lié à l’essor
récent des Maisons de Santé Pluridisciplinaires et des Pôles de Santé [4].
Ensuite, nous avons trouvé que la nouvelle convention médicale n’a pas encore exercé d’influence
sur l’informatisation des médecins, ni sur l’utilisation d’une messagerie sécurisée en cabinet [1].
Effectivement, les proportions retrouvées étaient proches de celle retrouvées par l’URML dans l’étude
menée il y a 7 ans (89,3% des médecins étaient informatisés en 2005 contre 91,9% ici, et 70,4% des
médecins souhaitaient utiliser une messagerie sécurisée en 2005 alors que 69,2% utilisent ce mode
de communication en 2012) [3].
La répartition entre PC et Macintoshs reflète celle des plateformes informatiques utilisées à l’échelle
nationale puisque les proportions retrouvées représentent les parts de marché des systèmes
d’exploitation en avril 2011 [5]. Aussi, les logiciels retrouvés dans l’étude sont ceux pour lesquels les
parts de télétransmission sont les plus importantes actuellement en France [6]. Nous pouvons penser
que les généralistes libéraux picards utilisent les mêmes logiciels que ceux utilisés par l’ensemble de
nos confrères français, et qu’ils se servent bien de leur logiciel pour télétransmettre les actes puisque
les proportions de logiciels sont quasiment les mêmes que celles des parts de marché de
télétransmission.
Les proportions concernant l’informatisation des fichiers patients (86%), le moment principal de
rentrée des données de la consultation (au cours de la consultation dans 86,5% des cas) et le mode
d’enregistrement des résultats de biologie (62% par messagerie sécurisée) sont retrouvées par une
étude internationale menée par Accenture en janvier 2012 [7]. En effet, les taux mentionnés dans
cette étude sont très proches, voir égaux aux nôtres. Cette analyse comparative nous a permis de
constater que le pourcentage de médecins généralistes français échangeant des informations sous
forme électronique avec d’autres confrères est supérieur à celui des médecins généralistes allemands
(12%), australiens (15%), canadiens (12%) ou américains (16%) [7].
Certaines données sont peu renseignées dans les fichiers patients (comme les données des visites,
par exemple). La raison est que les médecins ne disposent pas forcément d’un outil de travail adéquat
(comme un ordinateur portable ou une tablette) et ne peuvent donc pas retranscrire les données en
temps voulu.
Le peu de courriers rédigés via le logiciel (45%) peut être expliqué par le fait que le mode de
rédaction manuscrit représente un gain de temps pour le médecin. Cependant, un logiciel
personnalisable faciliterait sûrement la tâche de rédaction des généralistes.
Les médecins étaient globalement satisfaits de leur logiciel (à 77,3%), ceux qui ne l’étaient pas le
devenaient après changement. Les causes de changement de logiciels sont d’abord des causes
« évidentes », comme en cas d’arrêt de la commercialisation du logiciel. Elles sont ensuite
représentées par les dérives au cahier des charges (problèmes de coût ou de maintenance) [8] La
déviance au cahier des charges du logiciel peut aussi être un obstacle à l’utilisation des fonctions du
logiciel. En effet, le manque de temps, de formation, ou d’ergonomie du logiciel sont des causes
largement citées comme obstacle à l’utilisation de l’informatique par les médecins. Il serait surement
intéressant que le médecin puisse avoir accès au cahier des charges du logiciel avant de l’acheter afin
que son utilisation soit optimale au cabinet.
Les causes de changement de logiciel et les obstacles à l’utilisation des fonctions du logiciel sont
également représentés par des motifs personnels (comme le fait de vouloir un logiciel « plus
simple »). Nous nous sommes alors posé une question : pourquoi ne pas décider ensemble, médecin
et fournisseur, d’une liste de critères de choix devant figurer dans le cahier des charges d’un logiciel
personnalisable ? D’après les résultats de l’étude, il semble aussi que l’intégration du DMP dans les
logiciels devienne un critère de choix pour les médecins devant s’équiper. En outre, cet état des lieux
ne nous permet pas de conclure à une possible influence de la dernière convention médicale. Il
faudrait refaire une étude d’ici quelques mois afin de pouvoir étudier les questions abordant le sujet de
la nouvelle convention de 2011.
Conclusion : Les médecins généralistes libéraux picards utilisent majoritairement leur logiciel
informatique pour faire le suivi de leurs patients. Les fichiers patients sont bien remplis, hormis
quelques items qui nécessitent d’être développés. Une plus grande utilisation d’une messagerie
sécurisée de santé optimiserait le travail fourni par les médecins. Concernant l’hypothèse d’une
influence de la convention médicale de 2011, il faut laisser le temps aux médecins de mettre en
application les objectifs de cette nouvelle convention avant d’étudier le sujet. Pour finir, nous espérons
que l’informatisation chez les médecins va continuer à se développer, en l’occurrence avec le
développement de Maisons de Santé Pluridisciplinaires et de Pôles de Santé. Et nous gardons
l’espoir d’une possible informatisation personnalisée !
Bibliographie
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[6] GIE SESAM-Vitale® - Groupement d’Intérêt Economique Système Électronique de Saisie de
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Tous les chiffres > Parts de télétransmission des progiciels agréés et solutions intégrées [consulté le
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http://www.ALaurence\PROF\BTSComptabilité1\Informatique\P10\CoursP10\2èmeannée\S24Cahierd
escharges.doc
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