Vampire et Société En tant que mythe, le vampire s'intègre très tôt dans la société à travers l'art. Puis avec les nouvelles technologies et moyens de communication il devient un "familier". Le vampire traditionnel subit une métamorphose d'abord littéraire au XIXe siècle, suivie au XXe siècle d'une diffusion cinématographique du modèle littéraire. Le vampire dans l'art Comme je vais le montrer dans le chapitre suivant, le vampire est un thème qu'affectionne la littérature fantastique. Le vampire se prête à tous les styles littéraires, il apparaît donc dans des poèmes (Charles Baudelaire : Le Vampire (Spleen et Idéal, 1861) et Les Métamorphoses du Vampire (Les épaves, 1866) in Les Fleurs du Mal), des romans feuilletons (Varney le vampire), des nouvelles, des romans et plus récemment dans des livres pour enfants (Le château de Dracula de J. H. Brennan, éditions Gallimard, 1987) 108 et même des comics (Goodwin et Crandall : The Coffin of Dracula, Creepy, 1966), ou des bandes dessinées (Julio Ribera et Christian Godard: Dracurella, Dargaud Editeur, 1976). De nombreuses recherches (de Dom Augustin Calmet : Dissertation sur les revenants en corps, les Excommuniés, les Oupires ou Vampire, Brucolaques, etc... à Jean Markale : L'énigme des vampires) ont été réalisées et le sujet passionne toujours autant, de fréquentes sorties d'ouvrages plus ou moins sérieux sur Dracula et les vampires en témoignent. Le thème vampirique n'est pas étranger à la peinture, d'ailleurs on le trouve, entre autres, chez Francisco Goya (Le vampire et la femme), chez Gustave Doré (Vampires volants) et chez Edvard Münch (La vampire). Le vampire est également présent sur la scène. Charles Nodier en 1820 puis Alexandre Dumas en 1852 adaptent pour le théâtre Le vampire (1819) de John William Polidori. Bram Stoker, le premier, a adapté son roman au théâtre en une longue pièce de plus de quatre heures intitulée Dracula or the Un-Dead. Elle n'a été jouée qu'une seule fois par les comédiens du Lyceum Theater le 18 mai 1897. 109 Hamilton Deane fait une adaptation de Dracula en 1924. D'autres bien entendu suivront ainsi celles de Hamilton Deane et John L. Balderston en 1927, de Leon Katz en 1970 et de Peter Wyngarde en 1975. Dans son guide Alain Pozzuoli ne recense pas moins de quarante-six adaptations théâtrales les plus diverses. Toujours sur scène mais dans un autre style, celui de la comédie musicale, Dracula côtoie Frankenstein et sa créature dans I'm sorry the bridge is out, you'll have to spend the night de Sheldon Allman et Bob Pickett en 1970. Une adaptation de Dracula a été diffusée le 11 juillet 1938 sur la chaîne CBS. Cette pièce radiophonique est l'oeuvre d'Orson Welles. Par la suite, le roman fit l'objet d'autres adaptations, tels, en France, les Dracula de D. Mauclair sur France Inter en 1965 et de J. Bransolle sur France Culture en 1982 et le Bram Stoker de A. Pozzuoli sur France Culture en 1988. Très tôt, en 1922 avec Nosferatu, ein Symphonie des Grauens de W. F. Murnau, le vampire a investi le septième art, depuis les films ne cessent de se succéder. Ainsi, la seule année 1996 n'a pas vu moins de cinq sorties : The Addiction d'Abel Ferrara, Nadja de Michael Almeyreda, Dracula, mort et heureux de l'être de Mel Brooks, Un vampire à Brooklyn de Wes 110 Craven et Une nuit en enfer de Robert Rodriguez. Le film Vampires de John Carpenter, un spécialiste du cinéma fantastique, est sorti, en France, en 1998. En 1999, le thème du vampire est encore exploité par Stephen Norrington dans Blade. Le vampire hante non seulement les salles obscures mais aussi le petit écran par l'intermédiaire de téléfilms (Le crépuscule des vampires de Jim McBride, Le calice de Jade de Farah Mann), d'épisodes (Un vampire récalcitrant pour Les Contes de la Crypte, Le vampire dans Aux Frontières du réel), de la série Buffy contre les vampires diffusée depuis juillet 1998 sur M6 ou de dessins animés (Draculito mon saigneur / Little Drac, coproduit par IddH Groupe Bruno-René Huchez, SFP Production et M6 et Ernst, le vampire diffusé sur FR3). La musique s'est aussi appropriée le thème du vampire (Bauhaus : Bela Lugosi's dead, The screaming Tribesmen : Date with a vampyre). La vulgarisation du vampire L'image du vampire est omniprésente dans notre vie de tous les jours. 111 Au détour, d'un magazine (dans un article de Femme Actuelle n° 410 intitulé "Mieux connaître l'ail" illustré par un dessin de vampire effrayé par une guirlande d'ails), d'un quotidien (Le Pays de Franche-Comté du 14/02/93 propose un article "Pour la bonne cause" concernant les dons de sang en Autriche et en Allemagne, accompagné d'une photo du film Dracula de F. F. Coppola) le vampire surgit. Des agences organisent des voyages en Transylvanie sur les traces de Dracula. Le "Dracula Tour" permet aux touristes de suivre le trajet emprunté par Jonathan dans le roman de Bram Stoker jusqu'au château du vampire. Dans le Nouvel Observateur n° 1758 du 16 au 22 juillet 1998, on apprend que Dracula va devenir une attraction en Roumanie. Le ministère du tourisme veut, en effet, créer dans le nord du pays un "Dracula Land". Alain Pozzuoli dans son Guide du centenaire cite une multitude d'exemples comme un livre de cuisine de Marina Polvay (Chelsea House Publishers, 1978) qui propose outre Les festins de Dracula des Recettes rapides pour évoquer le diable ou encore le Musée de cire de Whitby qui en dix tableaux reconstitue les moments forts du roman de B. Stoker. 112 Notre société de consommation facilite la diffusion de l'image du vampire, notamment avec les spots publicitaires. Le vampire apparaît dans la publicité Danone. Le slogan "On se lève tous pour Danette" est illustré par un extrait du Nosferatu, le vampire de W. F. Murnau dans lequel on voit Max Schreck se lever de son cercueil. On retrouve aussi l'image du vampire dans les publicités Xyladécor, Kellogg's. La campagne publicitaire de Coca-Cola s'est accompagnée de trois affiches au slogan unique "Un Coca-Cola pour un nouvel ami", l'une d'elle a pour image le vampire, les deux autres empruntent les images du petit chaperon rouge et de Lucky Luke. En 1998, deux publicités ont exploité l'image du vampire. La première est Boursin, un individu est embauché comme gardien de nuit chez Boursin, il est le seul à résister à la tentation de manger le fromage, ce n'est qu'à la fin du spot qu'il déclare avoir horreur de l'ail en montrant ses grandes canines. La publicité Ray Ban utilise le même procédé, elle ne dévoile qu'à la fin l'identité des personnages par l'intermédiaire des canines. Dans le spot publicitaire les lunettes de soleil permettent aux vampires de s'exposer au soleil. Le thème de l'exposition au soleil est 113 repris par la marque Nike, le tee-shirt anti U.V. permet au vampire de disputer un match de tennis en plein jour. Il est aussi présent dans les jeux vidéos, par exemple chez Super Nintendo où Dracula, la créature de Bram Stoker remise au goût du jour par F. F. Coppola défie Jonathan Harker en enlevant sa fiancée, Mina. Le joueur dans la peau de Harker doit empaler le vampire pour délivrer Mina. Récemment des jeux de rôle se sont développés autour du vampire. Un fanzine consacré aux vampires comme Vampire Dark News propose dans ses rubriques des jeux de rôles détaillés dont le plus célèbre est très certainement Masquarade. Les sorties cinématographiques sont accompagnées de produits dérivés comme affiches, cartes postales, bandes originales, vêtements, gadgets, etc.. Des extraits de films sont utilisés par les vidéo clips (Celui de Annie Lennox pour sa chanson Love song for a vampire qui figure au générique du film de F.F. Coppola fait défiler les images du film Dracula). 114