LIVRET PÉDAGOGIQUE Tous les spectacles, kabaret, lectures, stages, rencontres, tournées sont sur : www.cdoi-reunion.com www.facebook.com/theatre.cdoi Centre dramatique de l'océan Indien Théâtre du Grand Marché 2 rue du Maréchal Leclerc 97400 Saint-Denis / Ile de La Réunion Tel 0262 20 96 36 Projets éducatifs : Françoise Guillaume : 0262 20 96 37 [email protected] Ce livret a été réalisé en collaboration avec Stéphane Geslin, professeur relais (DAAC/Rectorat) [email protected] ONOMA, LA MONTAGNE : LES ÉTAPES DE CRÉATION D’UN SPECTACLE 2 3 Loan et Gasq : L’histoire, ça a débuté quand les tantines ont inventé leur féerie Loan et Gasq : et que quelqu’un de dehors a déraboulé dans leur conte… AVANT LA REPRÉSENTATION, IMAGINER LE SPECTACLE… ONOMA, LA MONTAGNE LE TITRE • Recherche l’origine du mot Onoma : POUR LA PETITE HISTOIRE Pour être citoyen à Athènes entre le V e et le IV e siècle, il fallait être : • Trouve un mot français dans lequel on retrouve la même étymologie. • de sexe masculin, • libre, • de père athénien, et, à partir de la loi de Périclès de 451, de père ET de mère athéniens unis par un mariage légitime, • majeur : l'accession à la majorité civique était fixée à vingt ans Un citoyen était désigné par un nom tripartite qui indiquait tout à la fois son identité, son ascendance familiale et son lieu d'enregistrement : • l'onoma (τὸ ὄνομα) : son nom personnel • le patronymikon (τὸ πατρωνυμικόν) : le nom de son père • le demotikon (τὸ δημοτικόν) : le nom de son dème Exemple : « ὁ Δημοσθένης τοῦ Δημοσθένους ὁ Παιανιεὺς, Démosthène, fils de Démosthène, du dème de Paiania ». Source : http://www.cndp.fr • A partir du seul titre du spectacle, imagine quels thèmes pourraient être abordés • dans ce spectacle. 4 5 ONOMA, LA MONTAGNE L’HISTOIRE ET CEUX QUI LUI DONNENT VIE Elle est d’ici, il est de là bas, ils habitent là Ils se rencontrent sur internet Au nom du père, tigre de la petite brume, au nom de la mère, grègue du petit matin Ils se retrouveront sur un sentier de montagne La montagne va photographier leur entrée dans son antre et le chemin va se mettre debout devant eux au hasard d’un lancer de caillou Ils égrènent les noms de lieux et leurs histoires intimes comme des mantras Ils trouvent un sens à inventer à chaque nom prononcé, mais pas de sens du « tout » Pas de sens à leur quête Dire, nommer les choses pour posséder enfin quelque chose Parce qu’il manque, c’est tout Il manque. LOLITA MONGA OLIVIER CORISTA • Ce texte est utilisé dans le programme du Théâtre du Grand Marché pour présenter le spectacle, • Onoma, la montagne. Que t’évoque-t-il ? Quelles images fait-il naître en toi ? • Ce spectacle est écrit et mis en scène par Lolita Monga. Elle y incarne également le rôle • de Appoline/Marie. Recherche des éléments sur sa biographie (formation, carrière de • comédienne, d’auteur, de metteur en scène, autres fonctions…) : • Donne-t-il envie d’en savoir plus sur le spectacle ? Pourquoi ? • Au côté de Lolita Monga, Olivier Corista interprète le rôle de Pedro/Oviero dans ce spectacle. • Recherche dans quels autres spectacles ce comédien a joué à La Réunion. 6 7 ONOMA, LA MONTAGNE • Quelles impressions se dégagent de l’affiche du spectacle Onoma, la montagne ? L’AFFICHE Onoma, la montagne DE LOLITA MONGA CENTRE DRAMATIQUE DE L'OCEAN INDIEN atelier crayon noir © sébastien marchal Majorettes atelier crayon noir © sébastien marchal DE LOLITA MONGA CENTRE DRAMATIQUE DE L'OCEAN INDIEN • Compare-la avec les affiches des précédents spectacles de Lolita Monga ? • D’après toi, quels peuvent être les thèmes communs à ces spectacles ? 8 9 ONOMA, LA MONTAGNE • A quoi sert cette scène ? LE TEXTE Extrait, Scène 1 : Les deux : […]Le chemin que j'ai choisi, qu’a choisit mon lancer de cailloux se met debout devant moi. Je suis ici pour un truc c’est sûr, un truc à trouver voilà, je sais pas bien la raison On connaît jamais en vrai la raison, la raison doit être en dedans tapie c'est tout Et nous voilà avec les mots à énumérer Noms de chemins de ravines de plaines de montagnes Mots qui viennent et partent en fumée Mots qui tracent les lettres de nos voyages Mots qui marchent sous le gros soleil qui crapahutent jusqu’à la boutique du coin pour acheter des clopes, mots qui arpentent les sentiers en passant devant les cases Lo mo ki vol somin anparmi lo moun fé pa tension mi pas solman a moin lo mo mi déboul fout pa koman domand pa moin waya ! Si zot i vé pa akout mon sanson tak zot zorey ni vi ni koni ma pas somin mé si zot lé pou anval mové zerb é si in pé la tisan i pé soulaz a ou Dégrènn lo mo dékrout démargot rouv : bous, lang, boyo, tout sat lé grand fermé double clé kom baro la kaz gro zozo Déroul dérosh parey la ravin an cyclone i rend son vomi do lo sal La réponse à la question est elle dans les lettres des noms ou dans notre façon de les épeler et les faire tourner dans notre bouche ? Tourner 7 fois la langue dans la bouche Les mots écoutent nos mots jusqu’à ce qu’enfin on les entende nous même Et voilà que ta table basse en verre se fend Mi di a ou Que tu te décides d’abandonner ton chien I so pé Que tu couches avec quelqu’un pendant que ton mari ou ta femme dort dans la chambre d’à coté I di pa mé lé posib Que tu pètes au nez de ton patron Sa ou pé fé mé an misouk Que tu joues de la trompette sans savoir jouer de la trompette sous les fenêtres du voisin Zoué tambour lé plis meilleur ankor Que tes enfants deviennent le cadet de tes soucis Sa non moin lé pa d’acc Que tu acceptes de rencontrer un inconnu sur Skype Ou fé a moin la domand ou la ti garson ! […] • Que remarques-tu sur l’écriture de Lolita Monga ? • Cette scène, t’aide-t-elle à mieux cerner les thèmes qui vont être abordés ? 10 11 ONOMA, LA MONTAGNE ONOMA, LA MONTAGNE LA MISE EN SCÈNE LE DÉCOR Extrait Skype 31 mars 13h40 (enregistrement) Dans la pièce, il est question de montagne immense et de vide qui entoure, mais aussi de sentiers multiples où jeter un caillou qui seul décidera de la marche à suivre. Se pose du coup la question du décor. Observe les échantillons des matières que la scénographe envisage d’utiliser. • Ecoute l’enregistrement. Imagine la mise en scène pour cet échange skype. • D’après toi, pourquoi les a-t-on choisies ? Et toi, si tu devais créer le décor, comment • les utiliserais-tu ? • Les deux personnages de cette pièce nous emmènent sur un sentier de montagne. • C’est en marchant, qu’ils revisitent leurs souvenirs et livrent à l’autre des bouts de leur histoire • personnelle. Si tu étais le metteur en scène, comment t’y prendrais-tu pour donner sur scène, • cette idée de mouvement, de déplacement ? • Tu peux également faire un croquis du décor : 12 13 ONOMA, LA MONTAGNE LE POUVOIR DES MOTS Extraits de la note d’intention de Lolita Monga […] Une vie peut se raconter comme un conte. Raconter pour faire face à sa propre histoire. Face à la course du temps. On peut encore s’arrêter pour respirer et retrouver de l’air. Se mettre à nu et reprendre son chemin plus léger […] Sur le sentier pour se connaître, se reconnaître, ils énumèrent les noms des lieux Nommer c’est recouvrir le chemin parcouru, c’est se retrouver en ces lieux désigner pour se dépouiller Les noms font exister les choses et leur donnent une identité, un sens. Nommer c’est partir à la recherche du temps perdu. C’est faire un voyage. […] « Enumérer réveille les souvenirs, un peu comme un monde déshydraté qui se mettrait à regonfler… la mise en contact des mots avec une mémoire éveille des images, un monde en sort comme un manège qui se mettrait à vivre » David Jouas Extrait du texte Marie : Je rumine. Moi je fais des listes dans mon coco d’ tête Tout le temps Des listes de commissions, des prénoms qui me plaisent, des endroits que je veux voir avant de mourir, des listes des repas de la semaine ou bien des différents goûters de la semaine Des listes des choses super importantes à faire et que j'aime faire ou des listes de choses que j’aime pas faire mais qui sont aussi importantes à faire que les choses que j’aime faire Des listes parfois sans finissement ou parfois gigign comme trois mots Des listes d'émotions, des souvenirs à mettre en mots J’énumère les noms des chemins, des ravines, ti doucement ou gros voix ça dépend Je compte les bornes, et les kilomètres, et les réverbères et les tirets des lignes discontinues sur la route En gros je suis une liste à moi toute seule Une liste de ce que j'ai aimé faire, une liste de qui j'aime, une liste de choses que j’ai vécues que j'oublie plus facilement quand elles sont pas jolies C’est comme qui dirait une maladie. • A la manière de Lolita Monga, rédige ta propre liste. Choisis une des listes qu’elle propose • dans son texte, ou invente ta propre liste : 14 15 Loan et Gasq : L’histoire, ça a débuté quand les tantines ont inventé leur féerie Loan et Gasq : et que quelqu’un de dehors a déraboulé dans leur conte… ONOMA, LA MONTAGNE • Tu vas assister à une répétition et rencontrer l’équipe du spectacle Onoma, la montagne. • Quelles sont les questions que tu aimerais leur poser ? APRÈS LA REPRÉSENTATION, EN REPARLER… 16 17 ONOMA, LA MONTAGNE • Prend une carte de la région/du pays d’où tu te sens. Lis les noms et relie-les à ta propre histoire, • quel que soit le lien. LE POIDS DU LIEU D’ORIGINE ET DE L’HISTOIRE « Elle est d’ici, il est de là bas » (Note d’intention de Lolita). D’où sommes-nous ? Qu’est ce qu’être de quelque part ? Qu’est ce qui contribue à nous donner l’impression d’être d’un endroit ? A-t-on besoin de se sentir rattaché à un lieu ou est-ce une contrainte ? Dans le texte ONOMA, la relation entre l’identité des personnages et le lieu d’où ils viennent et/ou où ils vont, est posée d’emblée comme allant de soi : elle se nomme Apolline, mais en vérité Marie, et lui Pédro, mais en vérité Oviero. Leur prénom et même les pseudos qu’ils s’inventent nous disent déjà qui ils sont ou fantasment d’être. L’histoire de l’île est par ailleurs sous jacente : La Réunion a en effet un temps été baptisée Santa Apollonia et c’est Pedro de Mascarenas qui est connu pour être le découvreur européen de l’île et de son archipel d’où le nom de ce dernier, les Mascareignes. • Recherche quels sont les différents noms que l’île a portés au cours de l’histoire et ce qu’ils nous • enseignent. La carte de (ou du) Tendre est la carte d’un pays éponyme imaginaire inventé au XVIIe siècle. Représentation topographique et allégorique, on y retrouve tracées, sous forme de villages et de chemins, les différentes étapes de la vie amoureuse selon les Précieuses de l’époque. On attribue à François Chauveau la gravure de cette carte figurant en illustration dans la première partie de Clélie, Histoire romaine, de Madeleine de Scudéry. • A la manière de la carte de Tendre, invente une carte qui soit celle de ton parcours personnel. 18 19 ONOMA, LA MONTAGNE ONOMA, LA MONTAGNE LA QUESTION DE L’IDENTITÉ LA MONTAGNE, UN LIEU OÙ SE RECONSTRUIRE… La création du CDOI, Onoma, la montagne, est avant tout un texte mystique et d’une rare intensité poétique. C’est une divagation qui nous renvoie à nos propres interrogations identitaires, une randonnée dans les mots, une berceuse, qui nous conte la quête de deux personnages qui se cherchent et s’aide inévitablement à se trouver finalement. C’est un parcours initiatique onirique et optimiste qui nous rappelle que nous sommes ce que nous sommes et qu’il faut partir de cela, l’accepter, pour avancer, car… La « quête » (recherche, parcours initiatique…) de soi, savoir qui l’on est, d’où l’on vient, quelles sont nos racines, dans quel terreau elles s’enchevêtrent. Comment la mémoire d’un lieu peut-elle entrer en relation avec celle de notre histoire ? La question de l’identité territoriale… « E impossivel de ser tudo e ainda mais de não ser nada, porque nós podemos fugir a tudo excepto a nós mesmos. » (Il est impossible d'être tout et encore plus de n'être rien. Car en définitive nous pouvons échapper à tout, sauf à nous-mêmes.) José Saramago Comme le rappelle M. Leforestier dans sa chanson Né quelque part en 1987, nous sommes involontairement mais indubitablement d’une lignée qui traverse le temps et d’un endroit géographiquement inscrit ; c’est constitutif de notre personne sans qu’on n’y puisse rien et influe sur notre être au point qu’en être privé s’avère handicapant. La chanson est un hymne antiraciste écrite suite à la promulgation de la loi Pasqua (1986) visant à réduire l’immigration en France dans un contexte de montée parallèle du Front National. On entend dans cette chanson des paroles en zoulou « Nom'inqwando Yes Qxag Iqwahasa » qui signifient « Quand on a l'esprit violent, on l'a aussi confus ». Le titre de cette chanson est une référence à une autre chanson fameuse, de Georges Brassens, La Ballade des gens qui sont nés quelque part, écrite en 1972, et dans laquelle l’auteur se moque des chauvins de tous horizons qui tirent orgueil du lieu de leur naissance, des « porteurs de cocardes », « des enfants de leur mère patrie ». Cette dernière chanson a été évoquée par Pierre Desproges dans son sketch du Tribunal des flagrants délires contre Jean-Marie Le Pen en 1982 et a été reprise par le groupe Tarmac sur l'album en 2001. On voit par là qu’être rattaché à un espace est important mais qu’il faut savoir en faire bon usage car cela peut se révéler exclusif. • Ecoute les extraits de ces chansons. • Et toi, qu’elle est ton opinion sur ce sujet. Est-ce important de savoir d’où on est ? • D’après toi, cela influence-t-il notre vie, notre façon d’être, de voir le monde… ? Dans le texte Onoma, la montagne est un lieu de prédilection où les personnages vont se rejoindre pour se réfugier, se perdre et se reconstruire, devenir auteur (acteur ?) de leur vie. • Quels autres lieux pourraient ainsi jouer ce rôle selon toi ? 20 21 ONOMA, LA MONTAGNE LE POIDS DES ANCÊTRES En quoi nos ancêtres contribuent-ils à nous façonner une identité ? Ne sommes-nous qu’un peu d’eux « mélangé » ? « La pièce parle de notre héritage familial. Comment le porter ? Qu’est ce qu’on en fait quand le sac est trop lourd ? Sommes-nous prêts à être auteurs de notre vie en sachant que nous ne cesseront jamais d’être les fils ou filles de nos parents ? » (Extrait de la note d’intention de Lolita Monga). Extrait du texte Au nom du père tigre de la petite brume Pou mon papa Au nom de la mère grègue du petit matin Pou ton momon osi parlfèt Marche ! Se pose alors la question de la généalogie, et du nom porté. D’où vient-il ? Que signifie-t-il ? Que sais-je de mes ancêtres ? Pour nommer son père et sa mère, Marie utilise des pseudonymes familiaux poétiques. • Recherche le sens du nom que tu portes (que l’on nomme patronyme), son origine, depuis quand • il est présent à l’île de la Réunion... Si tu as la possibilité pourquoi ne pas faire un peu de généalogie. • Invente toi aussi des pseudonymes à tes parents, grands parents… en partant de ce que tu connais • de leur caractère, de leur manière d’être, de leur histoire, de ce qu’on a dit d’eux… 22 23 Valérie Foury – Lumière ONOMA, LA MONTAGNE Sa carrière : LEKIP DE CRÉATION… La création d’un spectacle est le fruit d’un travail d’équipe. Nous avons parlé d’Olivier Corista et de Lolita Monga, mais d’autres artistes, ont également œuvré à la fabrication du spectacle. Pour chacun d’entre eux, recherche des éléments sur sa carrière (formation, parcours artistique…). Réfléchis à son rôle sur ce spectacle et ce qu’ils apportent à la pièce ? Son rôle/son apport sur ce spectacle : Nicolas Derieux – Assistant à la mise en scène Juliette Adam – Costumière Sa carrière : Sa carrière : Son rôle/son apport sur ce spectacle : Son rôle/son apport sur ce spectacle : Jako Maron – musique et environnement sonore Anne Fontaine – Création vidéo Sa carrière : Sa carrière : Son rôle/son apport sur ce spectacle : Son rôle/son apport sur ce spectacle : 24 25 Loan et Gasq : L’histoire, ça a débuté quand les tantines ont inventé leur féerie Loan et Gasq : et que quelqu’un de dehors a déraboulé dans leur conte… ONOMA, LA MONTAGNE ONOMA, LA MONTAGNE LE POIDS DU LIEU D’ORIGINE ET DE L’HISTOIRE • Notes ici tes impressions sur le spectacle : ce que tu as aimé ou pas, ce qui t’a étonné, • choqué questionné, ce qui t’a ému, fait rire, ce que tu n’as pas compris, ce que tu as compris… • Souviens-toi de la scénographie. Peux-tu en faire ici un croquis ? 26 27 Loan et Gasq : L’histoire, ça a débuté quand les tantines ont inventé leur féerie Loan et Gasq : et que quelqu’un de dehors a déraboulé dans leur conte… POUR ALLER PLUS LOIN... ONOMA, LA MONTAGNE SUR LE SPECTACLE Note d’intention de Lolita Monga (texte intégral) Deux personnages nous emmènent sur un sentier. Ils évoluent dans l’immensité de la montagne parsemée de lieux-dits dont la mémoire résonne avec leur histoire personnelle. Comme leurs pas tracés dans le relief tourmenté de l’île fait revivre leur mémoire, ils revisitent leurs souvenirs et sont face à l’absence. Ils sont comme au bord du vide qui les entoure. Le temps file et efface les traces. Ils ressuscitent ces petits bouts de vie. Une vie peut se raconter comme un conte. Raconter pour faire face à sa propre histoire. Face à la course du temps. On peut encore s’arrêter pour respirer et retrouver de l’air. Se mettre à nu et reprendre son chemin plus léger. Ils étaient deux étrangers l’un pour l’autre mais leur but était le même. Leurs pas ensemble sur le sentier seront le début d’un passage et de renouveau. On a parfois besoin d’une personne inconnue pour avancer. Sur le sentier pour se connaître, se reconnaître, ils énumèrent les noms des lieux. Nommer c’est recouvrir le chemin parcouru, c’est se retrouver en ces lieux. Désigner pour se dépouiller. Les noms font exister les choses et leur donnent une identité, un sens. Nommer c’est partir à la recherche du temps perdu. C’est faire un voyage. La pièce parle de notre héritage familial. Comment le porter ? Qu’est-ce qu’on en fait quand le sac est trop lourd ? Sommes-nous prêts à être auteurs de notre vie en sachant que nous ne cesserons jamais d’être les fils ou filles de nos parents ? « Enumérer réveille les souvenirs, un peu comme un monde déshydraté qui se mettrait à regonfler… la mise en contact des mots avec une mémoire éveille des images, un monde en sort comme un manège qui se mettrait à vivre » David Jouas 28 29 ONOMA, LA MONTAGNE ONOMA, LA MONTAGNE SUR LE SPECTACLE SUR LE THÉÂTRE A propos du travail de mise en scène, extrait des notes de Nicolas Derieux (assistant à la mise en scène) L’histoire du Théâtre du Grand Marché en quelques mots Méthode / écriture scénique à partir de la partition (texte) Avant les répétitions, Lolita accumule les différentes idées de mise en scène. Avec l’aide de la scénographe/éclairagiste, du compositeur, de la costumière, et d’autres personnes complices, elle liste, trie et accumule les différentes idées et inspirations. Dans son sac : images, sensations, intuitions, souvenirs de lectures, souvenirs de films ou de pièces de théâtre, etc... En répétition, Lolita explore (sens, rythme, dramaturgie) son texte comme s’il s’agissait du texte de quelqu’un d’autre. Dès les premiers jours de répétition, ce texte est définitif (à peu de choses près). Avec les acteurs et toute l’équipe du théâtre, elle passe alors à la phase de l’écriture scénique. Dans un bouillon d’essais, d’échanges et d’idées avec l’équipe de création, Lolita avance dans une construction intuitive et déductive (dramaturgie debout) du spectacle. Le public témoin et convié Comme dans Paradise et comme dans Majorette, les personnages s’adressent parfois directement au public pour raconter leur(s) histoire(s). Pourtant il y a bien une frontière entre l’espace de représentation et le public. Lolita joue de cette frontière pour la rendre élastique pour mieux permettre l’échange entre les acteurs et les spectateurs, pour faire du drame une sorte de fête de famille (chacun a une place déterminée mais au fur et à mesure de la soirée, chacun peut changer de place et de point de vue). Avec Onoma, nous pouvons changer de point de vue en restant assis à la même place et en regardant tous le même spectacle. Nous pouvons penser avec les yeux de Marie ou respirer avec les oreilles d’Oviero. Nous pouvons les regarder de loin, comme on regarde un tableau. Et puis, un signe, une image, un son, peuvent nous amener à quelque chose de précis, parfois à quelque chose de nous-mêmes. L’écriture scénique en scène comme une écriture poétique. Les « codes » : du réel au fantastiques Comment représenter la montagne? Comment représenter une conversation (chat) skype ? Sur le plateau, dans l’épreuve du texte, Lolita établit des codes pour tisser un fil (voyage) et les transgresse pour créer une faille, une émotion ou une rivière. […] Bien avant d’être le Centre dramatique de l’océan Indien, il faut remonter plus de deux siècles en arrière pour trouver la présence de théâtre sur ce lieu commerçant. Au XVIIIe siècle, cet endroit abrite le Théâtre des Etuves (du nom de la place puis du marché qui se tiennent à cet endroit-là). A cette époque le théâtre est à La Réunion un passe-temps pour des notables de la société dionysienne qui se réunissent dans cette salle pour pratiquer le théâtre en amateur. Bien plus tard, en 1981 le Théâtre Vollard installe sur ce lieu un théâtre en bois qui sera détruit en 1987, pour laisser place à l’actuel théâtre. Le théâtre devient municipal et est rebaptisé Théâtre Fourcade. En 1998, le Théâtre Fourcade obtient le label de Centre dramatique et prend alors le nom de Théâtre du Grand Marché. Ce changement de statut marque un profond tournant dans la vie de la salle. En effet, de salle de diffusion multidisciplinaire, le CDOI devient un lieu exclusivement dédié au théâtre. Il est aujourd’hui dirigé par Lolita Monga. 30 31 ONOMA, LA MONTAGNE ONOMA, LA MONTAGNE SUR LE THÉÂTRE MES NOTES Qu’est ce qu’un centre dramatique ? Les Centres dramatiques sont nés après la Libération : l’Etat souhaitait alors que chaque région de France puisse bénéficier d’un lieu de création et diffusion théâtrales de qualité, ce fut le début de la « décentralisation dramatique ». A cette époque, il y avait très peu de créations théâtrales en dehors de Paris. On compte aujourd’hui trente huit Centres dramatiques en France. Le Centre dramatique de l'océan Indien (CDOI) – Théâtre du Grand Marché est le dernier né, le seul hors du territoire métropolitain. Ce sont des lieux obligatoirement dirigés par des artistes reconnus au niveau national et nommés par le Ministre de la Culture en concertation avec les collectivités territoriales locales pour des mandats de trois ans, renouvelables deux fois. Les missions et le fonctionnement des Centres dramatiques sont très strictement encadrés par un « cahier des charges ». Ce sont avant tout des lieux de création théâtrale. Ainsi, chaque année, le CDOI crée au minimum une pièce de théâtre, Onoma, la montage étant la création 2014. Ces lieux doivent diffuser des œuvres théâtrales de haut niveau, en veillant à un équilibre entre textes du répertoire (textes classiques) et œuvres d'auteurs vivants. C’est pour ces raisons que vous verrez presque exclusivement du théâtre dans la programmation du CDOI.