I. INTRODUCTION « La communication est le fondement de toute vie sociale. » HOGUE Pour tout être vivant, la communication occupe une partie importante de son temps. Au départ, la communication se limitait à des gestes. Petit à petit, les moyens de communication se sont développés. L’homme a cherché à développer son pouvoir de communication (partage de sentiments, d’opinions, d’activités…). Son idée était d’aller audelà des capacités de proximité, de communiquer à distance (ex : musique, nuages de fumée, dessins, écriture…). L’homme voulait aller plus loin géographiquement, dans le temps, être plus rapide. La socialisation de l’individu est étroitement liée aux communications qui s’établissent entre lui et son environnement. L’individu qui communique se socialise. Depuis sa naissance jusqu’à sa mort, l’être humain établit des échanges. Le phénomène de la communication est toujours présent quelle que soit la situation. La communication joue un rôle essentiel dans le développement de l’enfant. Le langage façonne l’image que l’enfant a de l’environnement et de lui-même. Le langage joue donc un rôle important dans l’apprentissage de l’enfant. Des études ont monté qu’en fonction de la langue parlée, il existe une relation entre le type de lange et la zone cérébrale activée (plasticité cérébrale). EX : le nombre magique de 7 : nous sommes capables de retenir plus ou moins 7 éléments dans notre mémoire à court terme. Mais, dans certaines cultures basées davantage sur la transmission orale, on ne retrouve pas ce nombre 7. La communication est la capacité de l’homme à trouver d’autres moyens de communication en cas de déficit (braille, langage des signes…). 1.1. De l’écriture au multimédia 500 000 ans séparent l’apparition du langage et celle de l’écriture. L’écriture est le moment où l’homme a pu échanger des informations à distance et dans le temps. 5 000 ans séparent l’apparition de l’écriture et l’invention de l’imprimerie (1450, GUTENBERG). L’imprimerie est le moyen le plus rapide de diffuser des connaissances. Elle a eu un impact important car elle a permis l’ouverture vers d’autres groupements sociaux (pas seulement l’église). 400 ans entre l’invention de l’imprimerie et celles du téléphone, de la radio, du cinéma (fin 19e s). Ces inventions ont rendu accessibles les moyens de Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 1 communication à des personnes qui ne maîtrisent pas nécessairement l’écriture et la lecture. 40 ans plus tard apparaît la télévision. 20 ans plus tard apparaissent l’ordinateur, le micro-ordinateur, les multimédia, les TIC. Les buts de tous ces moyens de communication : - formaliser les savoirs sous une forme plus aisément transmissible - codifier les connaissances (pour les rendre publics) - accès à une certaine abstraction, généralisation des savoirs - prendre connaissance de sociétés qui n’existent plus EX : - - La radio : elle a joué un rôle pendant la 2de guerre mondiale, elle a servi à transmettre les appels du Général de Gaulle. De plus, via celle-ci, certains modèles occidentaux ont pu être transmis aux populations de l’est de l’Europe. La télévision : elle a joué un rôle dans le renversement du régime roumain, dans la prise de conscience européenne et dans les guerres (pendant la guerre du Golfe, les modifications du plan militaire étaient diffusées à la TV) 1.2. La société de la communication Village planétaire : Grâce à tous les moyens de communication, la Terre est actuellement un village planétaire. Il est possible de connaître ce qu’il se passe à l’autre bout du monde. La transmission de l’information est de plus en plus rapide. (ex : WTC : les gens ont été très rapidement avertis) tendance techniciste de la communication Philippe BRETON : Utopie de la communication : Cette utopie repose sur l’idée qu’il n’existe plus de barrières (spatiales, temporelles et sociales) dans la société. RMQ : Ce n’est pas parce que la société dispose de moyens de communication que la communication est efficace, transparente, généralisée. Dominique WOLTON : Cet auteur oppose deux tendances : la première, technique et économique, et la seconde, humaniste et démocratique. Il critique la première tendance. EX : le GSM permet d’être joignable mais pas disponible. Nous disposons d’une multitude d’informations (presse, TV…) mais nous ne sommes pas nécessairement informés. EX : email, courrier électronique : ils transmettent rapidement un message à une autre personne mais ce n’est pour ça que la communication est rapide. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 2 Malgré le fait que nous disposons de toutes ces techniques, ces moyens, la communication n’est pas toujours efficace. Il ne faut pas confondre rapidité technique avec rapidité de communication. Une seconde confusion est de croire que lorsque nous connaissons une technique, nous savons communiquer. Or, il est vrai que les moyens de communication se sont largement développés mais les moyens de non-communication aussi. Deux systèmes se sont développés en parallèle : la communication et la non-communication. EX : sur l’écran de GSM, on peut voir qui nous appelle et donc ne pas répondre pour ne pas subir une trop intrusion. Si on s’interroge sur la démocratie face à l’information : Dominique Wolton s’oppose à l’idée selon laquelle, lorsqu’on s’adresse à quelqu’un, il comprend. 1ère réflexion : avant, on pensait que les guerres existaient par ignorance, parce que les pays ne se connaissaient pas. Or, ces guerres sont toujours là aujourd’hui. Si on s’interroge sur la culture : la culture française s’oppose à la culture américaine sur des multiples points de vue. Chaque culture développe des points de vue particuliers. Or, la communication doit apporter le respect des cultures. Idée de village planétaire : on peut étudier la mesure que l’autre peut accepter le message qu’on lui envoie. Savoir communiquer s’apprend. Les moyens dont on dispose amènent parfois à isoler les individus plutôt qu’à les rassembler. EX : Avant, on se rassemblait pour regarder la TV en famille. Maintenant, chacun possède sa propre TV et donc chacun regarde son propre programme. 1.3. La communication : 4 caractéristiques Elle est unique : quand on transmet un message, c’est une et une seule fois. A chaque fois, une communication est une création. Elle est originale : celui qui reçoit le message n’est pas toujours le même. Elle est irréversible : une fois qu’on a transmis le message, on ne peut le récupérer. Les informations ne font que s’additionner. Elle est subjective : elle repose sur l’individu : chacun a sa propre perception. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 3 1.4. La communication : origine de tous les maux ? Le malentendu : Une équipe d’entretien d’un réseau électrique local devait effectuer chaque jour un détour de plusieurs dizaines de kilomètres pour se procurer la clé d’un transformateur sur lequel elle intervenait. Elle demanda formellement à disposer en permanence d’un double de la clé, demande qui fut refusée. La direction a interprété le message : « ils veulent la clé pour pouvoir couper le courant en cas de grève ». Girin, 1992 La lettre perdue Comme chaque année, nous faisons appel à vous pour faire une conférence dans le cadre de notre cycle de formation. Le thème reste inchangé. Nous vous proposons d’intervenir le lundi 10 mars 2003 à 10H. Merci de nous prévenir si cette date ne devait pas vous convenir. Vous trouverez ci-joint le plan et les horaires de la formation… La lettre de motivation Objet : demande stage A l’intention de Madame ... Respectable Madame, Actuellement en année d’étude à l’étranger, j’étudie sérieusement et de manière appliquée à l’Ecole Supérieure de Commerce de …. Si tout se passe bien (que Dieu me garde !), je serai diplômé fin juin 2002 prochain. J’ai franchement envie de faire mon stage de fin d’études dans votre prestigieuse entreprise (ce serait pratique pour me loger : en effet mes grand parents paternels habitent …) où les stagiaires ont sûrement un VRAI boulot. Le salaire pratiqué dans les agences de communication me chagrine un peu mais je suis sûr que vous saurez faire un effort quand vous aurez découvert mon extraordinaire potentiel. Ce stage de cinq à six mois débuterait idéalement début juillet. Mon entrain, mon humour et mon self-control dans les situations les plus extrêmes comptent parmi mes innombrables atouts. Atouts dont j’aimerais vous apporter la preuve. Mes expériences chez Breizh Régie et chez Mac Donald m’ont affûté comme une liane. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 4 C’est pourquoi, vous l’aurez compris j’imagine, je sollicite gracieusement un stage en communication chez vous qui contribuerait grandement à lancer une carrière professionnelle que je sais d’avance pleine de promesses. Je fais preuve d’une créativité à faire pâlir Jacques Séguéla, créativité qui me vaut d’ailleurs l’admiration de toute ma famille. J’ai pu faire progresser cette année ce sens créatif en m’attelant à redécorer le bât. B de ma résidence universitaire. Ceci a réveillé le requin de communication qui sommeillait en moi. Conscient que cette modeste lettre de motivation (exercice qui n’a jamais été mon point fort aux dires de mes professeurs) ne saurait suffire à mettre en avant l’exhaustivité de mon entière personnalité, je vous propose qu’on se rencontre dans votre bureau lundi 17 juin (lendemain de mon retour de …) vers 10h00. Je vous prie d’agréer, estimable Madame …, mes respectueuses, chaleureuses et honnêtes salutations sincères autant que distinguées, cela va de soi. Message paradoxal Dans un hôpital, le médecin chef de service et l’infirmière en chef expliquent à un service infirmier le contexte de plus en plus difficile, le manque de moyens, chacun devant y mettre du sien pour produire un travail de qualité. On attend des infirmières qu’elles prennent plus d’initiatives qu’auparavant et qu’elles fassent preuve d’autonomie dans le travail, les médecins ne pouvant plus faire face à toute la charge de travail et ne pouvant plus répondre à toutes les questions courantes du service quotidien. Les choses ayant été bien posées et clairement expliquées, une infirmière, quelques jours plus tard, prend sur elle de réaliser un soin non prévu pour un patient qui se plaignait et demandait à toute force l’arrivée du médecin. Une fois l’initiative connue, la chef de service convoque l’infirmière dans son bureau, lui expliquant que ce n’était certainement pas ça qu’il fallait faire, qu’elle ne souhaitait quand même pas faire empirer l’état des patients, que cette initiative ne démontrait en tout cas pas une grande qualité professionnelle … Duterme, 2002 Obligation de communiquer En cas de restructuration et de licenciement collectif, la direction est tenue d’en communiquer la teneur au Conseil d’entreprise, d’informer les travailleurs avant toute décision de licenciement collectif. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 5 En Belgique, la "loi Renault" a été instaurée après l'annonce brutale en février 1997 par le constructeur automobile français de la fermeture de son usine de Vilvorde, dans la banlieue de Bruxelles. La communication de crise La communication doit être préparée avant la crise, gérée pendant et après la crise. Le cas Coca-Cola en Belgique Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 6 II. LES ENJEUX DE LA COMMUNICATION « Tout comportement communicatif s’inscrit nécessairement dans un jeu porteur d’enjeux. » BOURDIEU Nous ne communiquons pas seulement pour transmettre ou recevoir des informations, mais aussi parce que nous sommes poussés par certains motifs, désireux d’atteindre certains buts et, plus largement, pour maîtriser certains enjeux psychologiques. Il existe 5 types d’enjeux qui ont été repris par différents auteurs (MUCCHIELLI et LIPIANSKY) : Les enjeux informatifs : transmettre une information, un message. Les enjeux identitaires : ces enjeux mettent en évidence que dans toute communication, l’identité est un point central. C’est à la fois une condition, un enjeu et une résultante de la communication. - L’identité est une condition : pour parler, il faut avoir une identité. Toute communication définit l’identité de l’émetteur. Cette identité va définir, comme condition, la place corrélative de l’autre. L’identité, comme condition, va se manifester dans la phraséologie utilisée, dans l’usage d’un code particulier. Il va y avoir des marqueurs identitaires dans toute communication. - L’identité est aussi un enjeu. La personne qui communique va mettre en danger son identité pour produire chez l’autre une certaine image. Si l’interlocuteur ne confirme pas l’identité, il y aura malaise, sentiment négatif. Cet enjeu est très présent dans toutes les situations de négociation. Etre reconnu comme un interlocuteur valable pour obtenir des bénéfices. Cet enjeu pousse certaines personnes à ne pas prendre part à la communication. Une autre motivation fondamentale de la quête identitaire est l’unité, la cohérence du rôle qu’on peut avoir, garantir une pérennité du rôle (constance dans le temps). Les enjeux identitaires vont être aidés par toute une série de rituels d’interaction où il y a des règles (comment s’adresser à une personne) qui vont définir les règles normales d’identité. Cela permet de ne pas toujours se justifier, de définir son identité. - L’identité est aussi une résultante de la communication, elle en est la conséquence. C’est au travers des interactions quotidiennes et des images qu’elles nous renvoient que se construit peu à peu l’image que nous nous faisons de nous : la représentation et l’estime de soi découlent pour une large part du « miroir d’autrui », des retours aux messages que nous envoyons. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 7 Les enjeux territoriaux : L’enjeu est de préserver un espace intime pour ne pas se mettre en danger dans la communication, gagner du territoire. Ces enjeux vont se mettre en place à la fois dans l’espace physique et psychique. Par exemple, dans une conversation, il y a un jeu de distance, chacun mesure la distance optimale entre lui-même et l’autre. Dans certains conflits, il y a un enjeu d’empiéter sur l’espace de l’autre, gagner du terrain. Les enjeux de l’espace psychique font référence aux aspects d’intimité, aux éléments personnels, privés, aux limites où on accepte l’autre dans son espace. Il existe des marqueurs territoriaux, des rituels d’interaction. L’individu met en place une double barrière : la première, entre soi et autrui, et la seconde, entre le moi social et le moi intime. Le moi social est celui qui s’exprime et s’affiche dans les interactions, qui tombe sous le regard d’autrui ; le moi intime est celui qui reste le plus souvent caché. Cette double barrière se traduit dans la communication par des « mécanismes de défense communicationnels ». Les enjeux relationnels : il y a enjeu d’entrer en relation, d’avoir des contacts, d’œuvrer à avoir des contacts satisfaisants par rapport à son objectif, en fonction de la situation de l’individu, du moment (besoin de gratification, de protection…). Ces enjeux reposent sur des questions d’identité et de frontières. Dans ces enjeux, il existe aussi des rituels d’interaction. Dans la communication, le plus difficile sont le début et la fin. Comment rentrer en communication avec l’autre ? L’ouverture comporte le risque d’intrusion, de non-réponse, de non-maitrise du déroulement de l’interaction qui, une fois engagée, échappe pour une part à l’emprise de chaque protagoniste. Les rituels d’interaction permettent de rentrer en contact avec l’autre. Ils facilitent le premier contact. Comment conclure une communication ? Par des rituels d’interaction également. La fermeture peut faire résonance avec l’abandon et il faut rassurer l’interlocuteur sur le fait qu’il n’en est rien. Un autre aspect de ces enjeux est l’évolution harmonieuse de la relation (relation symétrique ou complémentaire, ajustement mutuel). Ces enjeux opèrent dans un processus dynamique, il y a un passage du VOUS au TU au fur et à mesure de la communication. Les enjeux conatifs : Ces enjeux représentant la possibilité d’influencer l’autre. Dans toutes communication, l’émetteur cherche à influencer l’autre, le convaincre sur une opinion, sur un comportement, à le faire changer d’avis. Ces enjeux peuvent prendre deux voies : - la séduction : qui recherche un rapport de complicité, d’attirance, de sympathie en mettant en avant les aspects relationnels Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 8 - le pouvoir : qui instaure un rapport de force entre les interlocuteurs (autorité, sanctions, menaces…) Il existe des circonstances où la persuasion sera admise et des circonstances où elle ne le sera pas. Ces enjeux sont aussi un processus dynamique, ils interagissent les uns par rapport aux autres. La communication comporte non seulement des enjeux mais aussi des processus psychologiques. Ils sont au nombre de 3 : L’anticipation : les enjeux vont intervenir au niveau de l’émetteur. L’émetteur va anticiper pour atteindre ses objectifs, il effectue un calcul anticipatif qui s’appuie sur l’image qu’a l’émetteur du récepteur. Cette représentation de l’autre repose à la fois sur des éléments perceptifs mais aussi sur des éléments projectifs. Cette représentation va influencer directement l’émetteur. Elle s’appuie aussi sur les attentes que peut avoir le récepteur. L’anticipation va : - reposer sur l’identité propre de l’émetteur - mettre en jeu les bénéfices et les pertes de la communication - tenir compte de l’identité du récepteur (identité faible ou forte). Le compromis : le compromis se déroule au niveau du message. Le calcul anticipatif va orienter le contenu et la forme du message. Ce processus est involontaire et inconscient. Le compromis est une dualité entre la volonté de s’exprimer et la crainte de s’exprimer. Elle va se traduire dans le langage par des répétitions, des périphrases, des précautions… Cette dualité ne s’observe que dans le message. Dans le compromis, on essaie de diminuer l’agressivité du message, de désaffectiver le message. On utilise dans la formulation du message des termes beaucoup moins forts. On retrouve dans le compromis des arrêts de la communication, des lapsus, des trois petits points… Lorsque l’on analyse ce qui motive les réactions défensives, on constate qu’elles sont en relation avec les grands enjeux de la communication : la défense de la face et du territoire, les risques relationnels, les problèmes d’influence. On voit que le compromis expressif résulte aussi des réactions que provoque la réception du message d’autrui. L’interprétation : ces enjeux vont être présents chez le récepteur. Le message ne va pas être traduit mais interprété sur le plan du compromis et de l’identité de l’émetteur. L’interprétation est une opération d’évaluation égocentrée, c’est-à-dire d’attribution de significations et d’intentions en fonction des motivations profondes du récepteur. Ces motivations peuvent être ramenées à deux catégories : ce que le sujet désire et ce qu’il Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 9 redoute. A partir de là opèrent des mécanismes de sélection, d’accentuation, de déformation et d’inférence. Ces mécanismes ne sont pas seulement des biais cognitifs, ce sont des mécanismes actifs d’appropriation motivée et d’interprétation, liés aux fonctionnements cognitifs, affectifs et pulsionnels du sujet. Ce processus interprétatif explique que le message reçu diffère le plus souvent du message émis. On s’étonne que la communication passe entre les individus quand on regarde tous les enjeux, tous les obstacles. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 10 III. LA COMMUNICATION : LES MODELES Selon WINKIN (1981), les mots « communiquer » et « communication » sont apparus dans la seconde moitié du 14e siècle et signifiaient à cette époque « participer à », « mettre en commun », « être en relation », expression proche du latin « communicare ». Plus tard, au 16e siècle, dérivant du sens « partager », est apparue la signification « faire partage » d’une nouvelle. C’est à cette époque que la notion « communiquer » a commencé à signifier « transmettre ». Cette nouvelle orientation s’est accentuée avec l’apparition des termes « moyens de communication » (trains, téléphones, routes, cinéma, presse…) et c’est ce sens de transmission qui domine aujourd’hui lorsqu’on parle de communication. Au niveau du français, on peut distinguer entre le verbe transitif « communiquer quelque chose à quelqu’un » et le verbe intransitif « communiquer ». Les différents modèles de la communication vont considérer l’information et la communication dans 4 rapports : - Confusion : l’information et la communication c’est la même chose. - Liaison : la communication et l’information sont liées. La communication est perçue comme le processus, l’information comme le contenu. - Englobement : la communication c’est la relation et le contenu, l’information, est englobé dans cette relation. - Conflit larvé : il y a un conflit entre ce qui touche à l’information et ce qui touche à la communication. Les différents modèles de la communication se regroupent en 2 conceptions : Conception analytique : elle est antérieure à la seconde conception. Son objectif est de délimiter au maximum les données d’un problème, de procéder à une décomposition jusqu’à avoir des éléments analysables, maîtrisables dans le cadre scientifique. C’est l’idée de l’existence d’une réalité subjective. Dans cette conception il y a 3 théories principales : Théorie de la donnée : modèle de SHANNON ET WEAVER : théorie mathématique de l’information Théorie du signe : approche linguistique et sémiologique Théories de la diffusion : mass-média : communication de masse. Conception globaliste : cette conception regroupe plusieurs courants : Courant de la systémique, de la cybernétique (WIENER 1948) Les pragmatiques psychologiques et psychocliniques (Ecole de Palo Alto, WATZLAWICK) Anthroposociologie de la communication : étude sociale de l’interaction Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 11 3.1. Conception analytique : Théorie de la donnée En 1948, SHANNON (ancien élève de Wiener) publie un article dans le Journal technique « Bell system technical journal » intitulé « The mathematical theory of communication ». Cette même année, WEAVER a publié « Cybernetics or Control and Communication in the Animal and the Machine » En 1949, Weaver et Shannon publient un article ensemble toujours sur le même thème. Ces publications suivent la seconde guerre mondiale. Durant cette guerre, pas mal de travaux qui étaient gardés personnels sont publiés. De plus, il y a une exigence importante sur le plan de la télécommunication. Le perfectionnement industriel et militaire font apparaître des besoins plus importants de communication à distance, de machine à machine, d’homme à machine… La théorie mathématique de Shannon pose deux questions : - Comment peut-on transmettre une information le plus rapidement possible au meilleur coût ? - Que faire pour que l’information reçue soit identique à l’information transmise ? RMQ : Shannon est un ingénieur et son souci est de faire face au problème de capacité des lignes téléphoniques. Il cherchera à étudier la quantité d’information qu’on peut transmettre. Pour lui, il n’y a pas de différence entre information et communication. De plus, l’information n’a pas de signification particulière, il s’agit simplement de données qui doivent être transmises d’un point à un autre indépendamment de leur signification. Shannon a élaboré son propre système de communication : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 12 Le schéma de la communication produit par les ingénieurs découpe la communication en un processus matériel. Le message, ensemble de signaux codés et « insensés », est donc transmis de l’émetteur au récepteur. Il est acheminé via des canaux qui permettent de franchir la distance spatiale et temporelle qui sépare l’émetteur du récepteur. Les opérations de codage et de décodage s’effectuent sur base d’un code donc la convention est partagée par l’émetteur et par le récepteur. Le code est extérieur à la source de l’information. De plus, le code est préétabli, il précède ses utilisations dans les opérations de codage. Principes de l’acte de transmission selon Shannon : - Le modèle est linéaire : le processus se fait à sens unique, de 1 à 5. Il peut y avoir des interférences, des perturbations. - Le modèle est séquentiel : on retrouve là la décomposition ; chaque étape est antérieure à la suivante et n’a pas de rapport avec elle. - Le modèle est atomistique : il n’y a pas de relations, d’interaction entre le message et les différents éléments constituant la chaîne de communication. - Le modèle est référentiel : les objets, les idées doivent être représentés pour être transmis. On utilise des signes conventionnels. On peut étudier ces signes indépendamment de l’émetteur et du récepteur. S’ils ne sont pas porteurs de sens, les signes n’en ont pas moins une « valeur » qui les différencie les uns par rapport aux autres ; cette valeur, c’est leur rareté relative ou la différence de probabilité de leur apparition. Quelle est la relation entre information et incertitude ? Comment réduire l’incertitude dans lequel se trouve le récepteur ? L’idée de base est qu’un signal apporte autant plus d’information que sa probabilité d’apparition est faible. Entre différents signaux, un message qui apparaît souvent apporte moins d’information qu’un message qui est rare (pour le récepteur). RMQ : on se trouve dans la quantité d’information qu’on reçoit et non dans sa signification. L’information est une mesure quantitative de l’incertitude d’un message en fonction du degré de probabilité de chaque signal composant ce message. L’unité de mesure de l’information est le code binaire (bit). L’information est une fonction inversement proportionnelle de la probabilité d’apparition d’un signal. Information (H)= f (1/p) (Hartley) 1 bit = information donnée par un signal de probabilité ½ Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 13 L’information, telle que la définit Shannon, se dégrade irréversiblement. Au fur et à mesure que j’apporte des données, celles-ci deviennent de moins en moins informantes, de plus en plus prévisibles. Dans la transmission de l’information, on peut dire qu’il y a un inévitable passage de l’information à la redondance. On a songé alors à établir un rapprochement analogique avec la thermodynamique qui, à propos de l’énergie, a montré que tout ce qui est organisé et structuré, en ordre, est soumis à la dégradation, à la déstructuration, au désordre. C’est ce qu’elle nomme le phénomène d’entropie. Entropie = mesure du degré d’incertitude 2 incertitudes 1/2 1 bit (0/1) 4 incertitudes 1/4 2 bits 8 incertitudes 1/8 3 bits 16 incertitudes 1/16 4 bits 32 incertitudes 1/32 5 bits H = log2 1/pi = - log2 pi et H = - Σ log2 pi log2 pi Pi représente la probabilité d’apparition d’un signal parmi le n signaux d’un répertoire et 1/pi est l’incertitude. Ex : 2 bits : 4 incertitudes : 00 est de ¼ 01 10 11 : la probabilité d’apparition de chaque signal L’information moyenne par signe d’un répertoire est égale à la somme négative des probabilités de chaque signe de ce répertoire multipliées chacun par leur propre logarithme en base 2. Shannon cherche à trouver le codage optimal, le plus économique possible pour transmettre une information d’un émetteur à un récepteur. Le contenu du signal n’intervient pas. On peut avoir des signaux qui ont une probabilité d’apparition égale. Il existe aussi des systèmes où les probabilités d’apparition ne sont pas équiprobables. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 14 EX : dans un jeu de carte, on a une chacun sur 42 de tirer un carte et cette probabilité est la même pour chaque carte. Par contre, dans la langue française, chaque lettre n’a pas la même probabilité d’apparition. Mais l’information lorsqu’elle circule sur le canal est menacée par le bruit, perturbations aléatoires qui peuvent venir la déformer ou la brouiller. Le bruit est donc une altération du signal dans la transmission. EX : 01 11 01 00 : 4 signaux ayant une probabilité d’apparition de ¼. Le message est transmis via le canal mais on peut très bien avoir un bruit, une altération du signal qui va entraîner l’apparition d’un nouveau signal (01 x1 01 00) et donc d’une mauvaise lecture chez le récepteur. Comment lutter contre le bruit ? On peut répéter certains signes ou groupes de signes du message ou encore utiliser plus de signes qu’il ne serait strictement nécessaire. C’est ce qu’on appelle des redondances. La redondance est donc la mesure de la certitude, de la précision du message. Cette redondance pose un problème au niveau du calcul (manque de fiabilité dans la transmission du message). EX : Jeune fille bien sous tout rapport désirerait rencontrer en vue d’un éventuel mariage un jeune homme de préférence catholique ayant une situation stable = JF.b.s.t.rapp.dés.conn.JH.préf.cath.sit.stab. S’il manque une lettre dans la transmission, le message sera mal reçu. Weaver et Shannon ont développé leur théorie mathématique de la communication en 1949. Selon Shannon, l’information est une mesure quantitative de l’incertitude d’un message en fonction du degré de probabilité de chaque signal composant ce message. Selon Weaver, l’information est une mesure de la liberté de choix dont on dispose lorsqu’on sélectionne un message. La définition de Weaver est plus large que celle de Shannon. Weaver pense que les concepts de base de la théorie de l’information présentant une telle généralité qu’on peut les appliquer à d’autres disciplines. Il a donc élargi les concepts développés par Shannon. Mais en élargissant, Weaver oublie un peu le contexte dans lequel ces concepts ont été développés. “ Le mot communication sera utilisé ici dans un sens très large incluant tous les procédés par lesquels un esprit peut en influencer un autre. Cela, bien sûr, comprend non seulement le langage écrit ou parlé, mais aussi la musique, les arts plastiques, le théâtre, la danse et, en fait, tout comportement humain.“ Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 15 Shannon, c. Et weaver, W., 1975, p.31 In Lohisse, J Weaver propose 3 niveaux d’analyse de la communication : - avec quelle exactitude le message est-il transmis ?: ce niveau relève de problèmes techniques - avec quelle précision ? Est-ce que les message transmis est bien le reflet de la signification ?: ce niveau relève de problèmes sémantique (rapport entre le code utilisé et la signification). - Avec quelle efficacité ? Dans quelle mesure la signification va-t-elle avoir l’effet attendu ?: ce niveau relève de l’effet du message sur l’individu. Cependant, le modèle de Shannon et Weaver comporte plusieurs limites : - Modèle technique de transmission de l’information (c’est ce que Shannon a élaboré) - Utilisation « détournée » du schéma - Modèle de la cible, du projectile de SCHRAMM (caricature) : L’émetteur est un archer qui va viser dans la cible. Si c’est un bon archer, il atteindra sa cible. L’émetteur maîtrise tout, contrôle le résultat de la communication. Le récepteur est passif, ne joue aucun rôle dans ce modèle caricaturé. Or ce n’est pas comme ça dans le modèle de Shannon. La 2e erreur de ce modèle de la cible est de se focaliser sur la compétence de l’émetteur. Une 3e critique serait portée à la vision centrée sur l’émetteur. Cependant, si le message ne passe pas bien, on ne va pas attribuer la faute à l’émetteur mais au récepteur. - Distinction entre quantité d’information et signification de l’information : le modèle de Shannon ne porte pas sur la signification de ce qui est transmis. MUCCHIELLI a également développé un schéma de la communication : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 16 3.2. Conception globaliste : La théorie cybernétique de Wiener (1949), l’école de Palo Alto et Watzlawick 4 grands principes fondent la conception globaliste : Premier principe : le modèle est circulaire et complexe. Il n’y a plus de déroulement linéaire, pas de commencement ni de fin. On peut dire qu’on est DANS la communication. L’idée de transmission disparaît au profit de celle de contact. Complexe n’est pas à confondre avec compliqué. La notion de complexe repose sur l’idée d’imprévisibilité : un sens imprévu peut surgir au sein du système, ce qui écarte le postulat du déterminisme. Deuxième principe : le modèle est interactif. L’interactivité, c’est l’action réciproque modifiant le comportement ou la nature des composants. Par opposition à la vision analytique, la liaison n’est donc plus uniquement et obligatoirement de cause à effet ; il y a opposition au principe de séquentialité. Troisième principe : le modèle prend en compte la totalité, y compris le contexte. L’approche de Shannon isolait les parties que l’expérience nous donne en totalité ; aux fins d’analyse, son modèle était atomistique. Mais un système est un tout non réductible à la somme de ses composants. « Les liens qui unissent les éléments d’un système sont si étroits qu’une modification de l’un des éléments entraînera une modification de tous les autres, du système entier. » (Watzlawick) La totalité implique l’idée d’organisation, d’agencement des relations, de manière à produire les qualités que n’ont pas les composants. Toute communication nécessite la prise en compte du contexte ; dans contexte, il n’y a pas de sens et les contextes n’ont eux-mêmes de sens que parce qu’ils s’insèrent eux-mêmes dans une classification de contextes, formant de nouveaux contextes. Mais une analyse systémique repose sur la notion de système immergé dans son environnement et sujet de la Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 17 part de celui-ci à des influences. La communication est insertion d’un sujet complexe dans un environnement lui-même complexe. Dans la communication, le sujet fait partie de l’environnement et l’environnement fait partie du sujet. Le système comprend donc les objets mais aussi les relations entre ces objets. De plus, il se caractérise par une force particulière : un même ensemble d’objets pourrait appartenir à des systèmes différents et avoir des caractéristiques différentes. Quand on introduit un nouvel objet dans le système, il y a incorporation et structuration de cet objet qui peuvent aboutir soit à un retour à l’équilibre ancien, soit à un nouvel équilibre. Quatrième principe : le modèle est relationnel. Les signes ne représentant pas, ils expriment la relation. Ils sont à l’intérieur, dans les personnes, les choses, les objets exprimants et exprimés. La théorie cybernétique de Wiener (1949) La cybernétique est une discipline qui étudie les systèmes et qui postule que tout système tend vers l’équilibre. Wiener a enseigné à Shannon. Cependant, ils n’ont pas la même conception. Wiener est du type systémique. La communication est un système dynamique instaurant des relations interactives entre les éléments difficilement autonomisables (>< conception analytique). Wiener travaillait dans la conception de radars, dans le domaine militaire. Il se préoccupait de la conception de canons anti-aériens. Le problème de ces canons est qu’il fallait réussir à programmer la trajectoire alors que la cible était en mouvement. Wiener a résolu ce problème en intégrant dans le calcul de départ la valeur d’arrivée (la cible). Il a introduit la notion de feed-back, c’est-à-dire une information à la sortie rajoutée au départ. Le feedback est un processus qui permet le contrôle d’un système en l’informant des résultats de son action. Wiener a donc élaboré une théorie cybernétique (science du contrôle et de la communication). Il a introduit la notion de système. Chaque système a sa structure propre et n’est pas égal à la somme de ses composantes, de ses objets. Il a également introduit la notion de causalité circulaire c’est-à-dire que les objets rentrent en interaction et s’influencent mutuellement. Ce principe de causalité circulaire remet en cause le principe homéostatique. Le feed-back est un processus de contrôle dans la communication. Il comprend 3 sousprocessus : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 18 - - - L’information : c’est la mécanisme qui consiste à voir ce qui se passe. C’est pour l’émetteur (le locuteur) de prélever de l’information chez l’autre pour pouvoir contrôler et ajuster le message qui va être transmis. Cette information prélevée repose sur le langage non-verbal, sur la représentation qu’on a de l’autre… pour s’ajuster. L’évaluation : c’est se demander si j’atteins bien mon objectif. L’évaluation peut se baser sur le premier sous-processus, l’information. L’objectif va-t-il être atteint ? Faut-il augmenter ou diminuer l’intensité de l’action ? EX : dans une communication persuasive : c’est se demander s’il faut continuer à argumenter ou non. La réaction : c’est l’action mise en place par le locuteur suite à l’évaluation. Il y a RE-action, RE-ajustement. La réaction s’inscrit dans le système, c’est-à-dire dans cette causalité circulaire, c’est-à-dire qu’à tout moment il va y avoir réajustement du comportement. S’il n’y a pas de réaction, alors il n’y aura pas de feed-back. Cette vision de feed-back diffère du sens commun. Il y a un élément de compétence du locuteur : celui qui est capable de détecter de l’information, de l’évaluer et de réajuster son comportement, sera vu comme un meilleur communicateur. Il y a deux autres concepts dans le feed-back : - la rétro-information : ce sont les informations renvoyées par le récepteur qu’on va intégrer dans la boucle de rétroaction - la rétro-action : c’est l’action d’adaptation suite à cette rétro-information. Feed-back : information et évaluation composante interne Feed-back : rétro-information et action composante interactive Les défauts de la communication peuvent donc être de deux types : - venant du locuteur lui-même - venant de l’interaction émetteur-récepteur. Schéma de la communication : modèle du ping-pong : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 19 Cette représentation suppose un découpage séquentiel où le récepteur ne réagit que lorsque l’émetteur a fini de parler. Une autre notion étudiée dans cette conception systémique est l’ordre et le désordre. Originairement, l’attention a porté sur la stabilité du système. Si des modifications internes interviennent, s’il y a interaction avec l’environnement, le système garde ses propriétés. Il les garde ou les retrouve : l’idée est que tout système tend vers l’équilibre. Lorsqu’il y a des variations, lorsque apparaît une différence ou un déséquilibre entre la performance d’un système et son objectif, le système utilise l’information nécessaire à son homéostasie, au retour vers l’équilibre, à la remise dans la ligne de l’ordre. Il est donc stable et le feedback informationnel à un effet régulateur. On parle alors de rétroaction négative. L’Ecole de Palo Alto Cette école désigne un groupe de chercheurs (Bateson, Birdwhistell, Hall, Goffman, Watzlawick) d’origines scientifiques diverses qui, à un moment donné de leur existence, ont travaillé à Palo Alto, petite ville de la grande banlieue sud de San Francisco. Ces chercheurs ont essayé d’appliquer la théorie cybernétique de Wiener à la communication humaine. Ils ont émis 3 hypothèses de base : - L’essence de la communication repose sur les interactions et les relations. Ce sont moins les éléments qui comptent que les relations entre eux. - Tout comportement a une valeur communicative. - Les troubles psychiques renvoient à des perturbations de communication entre l’individu porteur du symptôme et son entourage. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 20 A Palo Alto, Jackson, un des collaborateurs de Bateson, se donne pour objectif d’appliquer les découvertes sur la communication au domaine de la psychothérapie. Il fondera le principe de la thérapie familiale systémique. Watzlawick, engagé par Jackson, va jouer un rôle important dans la diffusion des recherches de Palo Alto : il est le formulateur des logiques parfois nébuleuses de Bateson et des intuitions cliniques de Jackson. Il publiera en 1967 un ouvrage « Une logique de la communication » dans lequel il systématise, sous forme d’axiomes, une somme d’idées nouvelles fondées sur la cybernétique et la théorie des systèmes. Il y a 5 axiomes : On ne peut pas ne pas communiquer. Tout comportement a une valeur communicative. Le comportement n’a pas de contraire. Il n’existe pas de noncomportement. Même le silence est une forme de communication. Un tel comportement influence les autres, et les autres, en retour, ne peuvent pas ne pas réagir à ce genre de communication, et de ce fait eux-mêmes communiquer. On sort du postulat que la communication est intentionnelle. Cet axiome a été illustré dans l’analyse de troubles relevant de la schizophrénie. Le schizophrène est quelqu’un qui cherche à ne pas communiquer (refus de l’interaction). RMQ : comme le fait de refuser l’interaction est une forme de communication, il y a un dilemme fondamental de la maladie. Il n’est pas possible de ne pas interpréter un comportement sous une valeur interprétative. Dans la communication, il y a deux niveaux : le contenu et la relation. La communication et le message ne se résument pas seulement à la transmission de l’information. Il y a aussi l’aspect relation qui intervient. Pour Watzlawick, la relation englobe le contenu. Bateson distingue l’indice de l’ordre. L’indice est le contenu, l’information. L’ordre est la manière dont on doit comprendre cette information, çà intervient dans ce qu’on pense, dans ce qu’on pense que l’autre pense. La relation c’est donner une connotation, un contexte à l’information qu’on veut faire passer. C’est l’ensemble contenu/relation qui donne la signification du message. Dans une interaction saine, le contenu est plus important. Par contre, dans une relation plus pathologique, il n’y a parfois aucun contenu, tout porte sur la relation. Idée de métacommunication : la relation englobe le contenu et par la suite devient une métacommunication (c’est-à-dire une communication sur la communication). La métacommunication est très utile pour orienter la compréhension mais peut aussi être très perturbante quand il y a non-adéquation. EX : « Ne pas tenir compte de ce signal. » dilemme de compréhension Dans un resto : « Que les clients qui voient nous serveurs plutôt malpolis, voient le directeur. » deux significations sont possibles. La nature d’une relation dépend de la ponctuation de la séquence des faits. En fonction de la position de chacun, on peut ponctuer différemment la séquence. Cet élément de ponctuation va jouer sur la relation. Pour un observateur extérieur, une Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 21 série de communications peut être considérée comme une séquence ininterrompue d’échanges. La ponctuation structure les faits de comportement, elle est essentielle à la poursuite d’une interaction. Le désaccord sur la manière de ponctuer la séquence des faits est à l’origine d’innombrables conflits qui portent sur la relation. Communication digitale >< Communication analogique : Dans la communication humaine, on peut désigner les objets de deux manières entièrement différentes. On peut les représenter par quelque chose qui leur ressemble (dessin), on peut parler alors de communication analogique, ou les désigner par un nom convenu, écrit ou prononcé, on peut parler alors de communication digitale. La communication analogique (langage non-verbal) ne repose pas sur un code socialement partagé, beaucoup d’interprétations sont dès lors possibles. La communication digitale (langage verbal) repose sur un code socialement partagé, il y a donc peu d’ambiguïté. RMQ : rapport entre le 2e axiome et le 4e : la communication digitale va surtout servir au contenu alors que la communication analogique va servir à la relation. Le langage analogique possède la sémantique mais n’a pas de syntaxe appropriée pour qualifier la nature des relations. Le langage digital c’est l’inverse. Interaction symétrique >< Interaction complémentaire : L’interaction symétrique fait référence à une interaction où les partenaires sont sur un pied d’égalité : ils partagent le même espace de liberté, les mêmes contraintes. Les partenaires peuvent adopter une position en miroir. Le danger de ce type d’interaction est l’escalade : tous les partenaires veulent avoir leur mot à dire, avoir le même temps de parole. EX : les embouteillages : tout le monde veut passer en même temps. Ce type d’interaction peut être utilise quand il faut émettre beaucoup d’idées. L’autre type d’interaction est l’interaction complémentaire. C’est une interaction basée sur la différence. Les différences de position de l’un par rapport à l’autre sont mises en avant. Il y a complémentarité entre les partenaires. Les rôles sont différenciés. Ce genre d’interaction est utilise là où il faut prendre des décisions. Le risque de ce type d’interaction est la rigidification, le pouvoir absolu de l’un par rapport à l’autre. RMQ : il n’y a pas de bonne ou mauvaise position. Il peut y avoir dans cette interaction un inversement de rôles. Le plus important dans une interaction saine est que les interactions varient de symétrique à complémentaire en fonction des sujets, des objets. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 22 Selon Watzlawick, trois principes sont importants : le contexte, la totalité et le recadrage. Il faut voir les interactions dans le système global, total. Une même communication ne va pas avoir le même sens en fonction des personnes présentes, en fonction de l’histoire. Dans une situation difficile, il ne faut pas analyser le problème en tant que tel mais recadrer dans un autre contexte pour sortir de l’interaction pathologique. Une interaction est qualifiée de pathologique lorsqu’au lieu de remplir sa fonction de lien positif entre les individus, elle contribue au contraire à les éloigner ou à dresser entre eux un écran d’incompréhension et de ressentiment. Cela ne sert à rien de se demander qui a raison ou qui a tort dans une mauvaise interaction. Il faut essayer de resituer le problème dans sa globalité et tenter de changer la situation. 3 exemples de communications pathologiques : la communication paradoxale « double bind » : elle délivre un message dont la structure enferme une telle contradiction qu’il communique, en même temps, deux contenus incompatibles. Par exemple : « Sois spontané ! » Ce type de communication peut s’avérer pathogène dès lors que le destinataire du message n’a pas la possibilité de sortir du cadre imposé par le paradoxe, en d’autres termes, si le lien avec l’émetteur ne permet pas au destinataire de refuser ou de montrer l’incongruité du message. La solution est de recadrer, sortir du cadre (passer à un méta-système). Les positions rigides : elles découlent du type d’interaction qu’on peut avoir : c’est la position d’être en opposition systématique. Problème de traduction entre les composantes analogiques et digitales : EX : un mari invite un de ses anciens à la maison sans consulter sa femme. Lorsque sa femme l’apprend, elle fait une scène. Plus tard, au thérapeute, elle dit qu’elle était d’accord d’inviter cet ami mais qu’elle aurait voulu l’inviter elle-même. Dans ce type de situation, il y a une confusion entre le fond et la forme, le contenu et la relation, entre niveau digital et niveau analogique dans la communication. Plus de la même chose : c’est la tendance à recommencer une interaction quand elle échoue. Il y a une répétition de la demande dans l’interaction qui peut produire un phénomène d’escalade. L’analyse transactionnelle Elle a été développée par Eric BERNE en 1970. C’est une approche psychothérapeutique utilisée dans un contexte psychosocial des organisations. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 23 Le thérapeute analyse les jeux de langage et les jeux psychologiques qui prennent place dans les interactions. Il ne s’intéresse pas au contenu du message mais à sa forme générale pour identifier des jeux, des scénarios. On distingue 3 niveaux dans la communication : - Enfant : niveau émotionnel - Adulte : niveau rationnel - Parent : niveau normatif Des relations peuvent s’établir entre ces différents niveau : enfant-enfant / enfant-parent / enfant-adulte….. Le principe de cette thérapie est d’essayer de faire correspondre des jeux socialement acceptables et de sortir de situations insolubles. Le modèle de l’orchestre – WINKIN Ce modèle a un aspect systémique. Winkin élargit le concept de la communication. Pour lui, la communication n’est pas uniquement le transport d’un message, c’est la mise en commun, une production collective où chacun intervient individuellement. L’interaction se déroule donc avec un ensemble de personnes (analogie avec l’orchestre). Selon lui, la communication repose sur une multitude de partenaires, de canaux. Il intègre dans ce modèle le rôle du public, du contexte. Il considère qu’il n’y a pas de chef d’orchestre, pas de leader pour mener les autres. Pour Winkin, il n’y a pas de partition, elle est invisible. Ce modèle est une extension du modèle systémique de Palo Alto. 3.3. Perception et attribution La perception est le processus par lequel nous sélectionnons, organisons, interprétons et récupérons l’information que nous transmet notre environnement. Cette information, nous la recueillons à l’aide de nos 5 sens. Perception est réalité ne correspondent pas nécessairement. Deux personnes qui vivent un même événement peuvent en avoir une perception très différente et y réagir tout à fait autrement. Au cours du processus de perception, nous traitons l’information reçue et nous réagissons par des impressions et des actions. Ce phénomène nous permet de nous faire une opinion sur nous-mêmes, sur autrui et sur les événements de la vie quotidienne ; il sert également de filtre, tamisant l’information avant qu’elle ne nous parvienne et influe sur nous. La qualité et la justesse des perceptions d’un individu a donc des conséquences majeures sur les décisions qu’il prend dans telle ou telle situation. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 24 Les facteurs influant sur le processus de perception Les caractéristiques de l’agent perceptif (celui qui perçoit), celles du cadre de perception (le contexte, l’environnement) et celles de son objet (la personne, la chose, l’événement) sont autant de facteurs qui influent sur le processus de perception et qui contribuent aux différences de perception. L’agent perceptif : Les expériences passées d’une personne, ses attentes, ses besoins, ses motivations, sa personnalité, ses valeurs et ses attitudes influent sur le processus de perception. De plus, nos capacités sensorielles sont limitées d’un point de vue physiologique, en valeur absolue. Nos sens peuvent parfois nous jouer des tours. Tous les individus ne perçoivent pas la même chose car la perception dépend de nos expériences passées, de nos compétences… Le cadre de perception : Le contexte physique, social ou organisationnel peut également influer sur le processus de perception. L’objet perçu : L’objet – la personne, la chose ou la situation – sera différemment perçu selon plusieurs paramètres, qui jouent tous un rôle déterminant sur la perception : - Le contraste : on remarque plus vite un homme au milieu d’un groupe de femmes qu’au milieu d’autres hommes. - L’intensité : on remarque plus vite une voiture rouge parmi des voitures sombres que parmi des voitures de couleur orange, jaune… - La discrimination figure-fond : l’objet de la perception ressort toujours d’un environnement donné ; ce à quoi on porte attention, la figure, se détache de ce qui l’entoure, le fond. - La taille : plus un objet est grand, plus il a de chances d’être perçu. - Le mouvement : de manière générale, l’objet en mouvement attire davantage l’attention que l’objet immobile. - La répétition : plus le stimulus est répété, plus il a de chances d’être perçu. - La nouveauté : le caractère inédit, l’originalité d’un situation influe sur notre perception. On remarque plus vite une personne aux cheveux mauves que blonds ou bruns. Si l’objet de la perception est un être humain, des facteurs particuliers influeront sur le processus de perception : les caractéristiques sociodémographiques (âge, sexe, nationalité, profession…) et l’apparence générale et le comportement (tenue vestimentaire, gestes, posture, expressions faciales, timbre de la voix…) Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 25 Les étapes du processus de perception Le processus de perception comporte 4 étapes (dont la dernière ne sera pas étudiée en détail). Attention et sélection : L’être humain est entouré de stimuli, il va donc devoir filtrer les stimuli qui l’intéressent, qui lui apportent de l’information. Il doit rechercher les informations pertinentes. Ce filtrage sélectif peut être volontaire ou involontaire. - Volontaire : l’individu peut décider de se concentrer et de se fermer à un certain nombre de stimuli environnants. - Involontaire : l’opération de filtrage peut survenir sans que nous nous en rendions compte. Cette opération concerne différents types de facteurs : Facteurs environnementaux : comme la grandeur, le contraste, l’utilisation des couleurs, la répétition, la nouveauté… d’un objet. Par exemple, nous percevons plus rapidement des objets grands que moyens ou petits. ; nous percevons plus vite des objets nouveaux, non familiers… Ces variables sont manipulées dans les publicités par exemple. On utilise beaucoup de couleurs, de contrastes,… pour attirer le regard. Dans le monde du jouet, les emballages sont toujours énormes pour susciter l’envie chez l’enfant. Facteurs internes physiologiques : Nos capacités sont limitées. Certains parviennent à développer des compétences particulières, à assurer une bonne coordination entre les différents organes des sens. Par exemple, un aveugle peut avoir un meilleur odorat, un spécialiste du nez peut aussi avoir un meilleur odorat… Facteurs internes psychologiques : Un exemple est la motivation : en fonction de nos attentes, notre attention peut être portée vers certains stimuli. Par exemple, quand on a faim, on reconnaît plus rapidement les aliments. Mais, par contre, quand le jeun dure trop longtemps, il y a un effet inverse (refoulement), la reconnaissance des aliments est plus lente. La motivation peut jouer un rôle de facilitateur ou d’inhibiteur. Par exemple quand on se sent menacé, notre attention se porte vers des stimuli angoissants. Les expériences passées et l’apprentissage sont aussi très importants. Avec l’expérience, on va sélectionner un certain type de signaux plutôt que d’autres. RMQ : Quand on perçoit les choses, on se dévoile. Le fait d’être attentif dévoile nos filtres, nos motivations, nos expériences passées. Organisation : Après l’étape de l’attention, où l’information est filtrée, il faut trouver des façons d’organiser efficacement les données sélectionnées. C’est là qu’interviennent les schèmes, ces cadres cognitifs qui correspondent à la connaissance, structurée par le temps et l’expérience, qu’a l’individu d’un concept Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 26 ou d’un stimulus donné. Les schèmes vont servir de guides à l’organisation. Il existe 4 grands types de schèmes : - le schème de soi : image de soi, caractéristiques propres, son apparence, sa personnalité, son comportement… - le schème de l’autre : manière dont on perçoit les autres : stéréotypes… - le schème du contexte : cadre cognitif dans lequel on imagine que le contexte doit évoluer ou fonctionner. - le schème sur les personnes en situation : combinaison des 3 schèmes précédents. Ces schèmes et scénarios ont un effet important non seulement à l’étape de l’organisation, mais à toutes les autres étapes du processus de perception. Ils reposent sur un traitement automatique de l’information, de manière à permettre aux gens de se concentrer sur son traitement contrôlé lorsqu’il le faut. Interprétation : Une fois que certains stimuli ont retenu notre attention, et que notre cerveau a organisé et classé les données reçues, l’étape suivante consiste à découvrir les raisons qui sous-tendent un comportement ou une réaction, c’est-àdire à attribuer une signification à ce qu’on perçoit. Cette étape est naturelle et involontaire et peut être influencée par la culture ou le contexte. XP de Allport et Postman sur les rumeurs : Les expérimentateurs ont présenté ce dessin à un groupe de sujets et leur ont demandé par la suite ce qu’ils ont vu. A et P est constaté que dans cette expérience, la plupart des sujets ont déformé l’histoire (ex : le noir attaque le métro alors qu’en réalité c’est le blanc qui a une lame en main….) Le but de A et P était de démonter les mécanismes de la rumeur. Une rumeur est une déformation de l’information qui repose sur 3 mécanismes : la réduction, Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 27 l’accentuation (généraliser, exagérer) et l’assimilation (modifier les informations pour que cela forme un ensemble cohérent et compatible avec les schèmes, éliminer ce qui est discordant dans l’histoire). RMQ : aujourd’hui, il est difficile d’étudier les rumeurs car on ne les connaît que lorsqu’elles sont finies. Le principe d’une rumeur est la transmission informelle de bouche à oreille. Toutes les rumeurs ne sont pas fausses, cependant, elles sont souvent difficilement vérifiables. Certaines rumeurs sont récurrentes. Une caractéristique importante de la rumeur est son caractère répétitif. La propagation des rumeurs semble être motivée par un défaut de l’interprétation. Un manque de compréhension entraîne la construction d’un message erroné, ce qui entraine les rumeurs. XP de Bruner et Goodman : on demande à des enfants d’ajuster le diamètre d’un cercle en fonction de ronds en carton ou de pièces de monnaie qu’on leur présente. Les résultats montrent qu’il y a une surévaluation du diamètre quand il s’agit d’ajuster en fonction des pièces de monnaies et qu’il y a une influence de la valeur sociale du stimulus présenté. La surévaluation est plus importante chez les enfants pauvres. La récupération : Chacune des trois étapes que nous venons de décrire alimente notre mémoire en y stockant des stimuli et des données. Mais pour pouvoir utiliser l’information en mémoire, il nous faut d’abord la récupérer ; c’est la dernière étape du processus de perception. Les biais de la perception Certains processus psychologiques peuvent biaiser notre perception : L’effet de halo ou la théorie implicite de la personnalité : c’est une erreur de perception qui consiste à se faire une impression générale d’une personne ou d’une situation à partir d’une seule de ses caractéristiques. Cette erreur survient la plupart du temps à l’étape de l’organisation. Les conséquences de l’effet de halo : en généralisant, on omet de prendre en considération les caractéristiques individuelles d’une personne. La prédiction qui se vérifie d’elle-même : C’est la propension à susciter ou à découvrir ce à quoi on s’attend chez quelqu’un ou dans une situation donnée. Une croyance de départ interagit dans la situation et va permettre dans les résultats de vérifier la croyance de départ. Effet Pygmalion (Rosenthal et Jacobson, 1968) : dans une expérience, on déclare aux professeurs d’une classe que leurs élèves ont des performances au-delà de la moyenne alors qu’en réalité ce n’est pas le cas. On Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 28 constate à la fin de l’année que ces élèves ont de meilleures performances que les autres élèves. L’effet Pygmalion peut donc avoir des retombées positives. La primauté-récence : Primauté : on est plus influencé dans une description par les premiers éléments que par les derniers. C’est aussi l’effet de première impression. C’est pour cela que dans un discours, il faut toujours commencer par des arguments forts. Récence : on va retenir plus facilement la dernière relation que les relations précédentes. La stéréotypie : les stéréotypes peuvent nous aider à synthétiser et à gérer la surabondance d’informations. Par contre, ils risquent aussi d’altérer le processus de récupération de l’information, d’obscurcir le jugement et d’empêcher les gestionnaires d’évaluer avec justesse les caractéristiques propres à chaque individu d’un groupe donné. Par exemple, il existe des stéréotypes sociaux selon lesquels les anglais sont mauvais cuisiniers, les femmes sont moins douées que les hommes… La perception sélective : c’est la tendance à privilégier une lecture de la réalité qui correspond à ses propres besoins, attentes, valeurs et attitudes, et qui amène à ne voir que certains aspects d’une situation, d’une personne ou d’un point de vue. La théorie de l’attribution : c’est une théorie qui s’intéresse à la façon dont un individu tente de comprendre les causes d’un événement, de départager les responsabilités et d’évaluer les qualités personnelles des gens qui y ont joué un rôle. Un comportement peut être attribué à des facteurs soit externes soit internes. Par exemple, dans une situation d’examen, l’échec sera attribué à des causes externes, tandis que la réussite, à des causes internes. 3 éléments vont être pris en compte dans le mécanisme d’attribution : Spécificité : le fait que le comportement qu’on observe est spécifique à un contexte donné ou non spécifique au contexte. RMQ : quand un comportement est spécifique, on l’attribue généralement à des facteurs internes. A l’inverse, quand un comportement est non spécifique, on l’attribue à des facteurs externes. Consensus : voir dans quelle mesure n’importe quelle autre personne confrontée à un même événement va réagir de la même façon. S’il y a consensus, on attribuera la situation à des facteurs externes. Par contre, s’il n’y a pas consensus, on attribuera la situation à des facteurs internes. Uniformité : a trait à la constance d’un comportement donné chez un individu. Ce comportement se reproduira-t-il quand cette personne se retrouvera dans la même situation ? Ce facteur permettra de dire si un comportement est isolé ou généralisé. En plus des 3 facteurs que nous venons de voir, deux erreurs risquent d’influer sur la détermination de l’origine externe ou interne d’un comportement : l’erreur fondamentale d’attribution et l’effet de complaisance ou préjugé en faveur de soi : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 29 Erreur fondamentale d’attribution : c’est la tendance à sous-estimer l’influence des facteurs externes et à surestimer celle des facteurs internes lorsqu’on évalue le comportement d’autrui. Effet de complaisance : c’est la tendance à nier sa responsabilité personnelle en cas d’échec, et à s’attribuer le mérite d’un succès. Cette théorie de l’attribution est intéressante quand on veut faire passer des messages de prévention. Par exemple, le témoin d’un accident a tendance à sousestimer le rôle de la victime, ce qui protège le témoin d’un tel accident. Dans des campagnes de prévention, il faut essayer d’utiliser des arguments qui vont toucher des personnes. Un message préventif n’a d’effet que si l’on se sent impliqué. Beaucoup de ces messages portent sur des facteurs internes. Mais il y a un effet de complaisance qui fait que certaines personnes ne se sentent pas impliquées. Par exemple, dans les campagnes de prévention des accidents de la route, on expose le danger de rouler vit, mais beaucoup de personnes n’en tiennent pas compte car ils ne se sentent pas impliqués. Vérification de nos perceptions Nous avons la possibilité de vérifier nos perceptions. Notre premier sentiment est de croire que ce que nous percevons est la réalité, la vérité. L’individu ne se rend pas toujours compte de la spécificité, des filtres… qui modifient les perceptions. Vérification consensuelle : on confronte nos perceptions d’autres. Si tout le monde a la même perception, cela nous donne un sentiment de vérité de confiance. Répétition des événements : le fait d’observer la même chose de manière répétitive amène à penser que ce que nous percevons est la réalité objective. Vérification multisensorielle : on combine nos 5 sens pour valider nos observations. C’est l’avantage de maîtriser ses 5 sens. Vérification comparative : on regarde si les situations sont pareils ou en contraste (test/retest pour vérifier les données) Vérification outillée : mesure de l’environnement pour valider nos perceptions (mesure de la température, mesure à un test de personnalité…) Il existe un débat entre les tenants des sciences exactes et les tenants des sciences humaines : il ne s’agit pas de rendre objectives des données subjectives. L’idée de vérification sert à éliminer les biais de la perception, à ne pas faire d’erreurs d’attribution. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 30 L’écoute active C’est le processus conscient que l’on va mettre en œuvre lorsqu’on intervient dans une situation, pour ne influencer la situation. Le principe est de ne pas interpréter ou retarder le plus possible le moment de l’interprétation des messages. Ce processus comporte 5 étapes : La réception : Le message est reçu. Cette étape vise à s’intéresser à la fois à la communication verbale et non verbale et à être attentif au dit et au non-dit. Il ne faut pas se laisser distraire par l’environnement, il faut se concentrer sur ce que la personne dit et non sur ce qu’elle va dire (rôle d’auditeur). La compréhension : c’est essayer de comprendre ce que la personne veut dire en évitant un jugement. C’est chercher à éclaircir la position du locuteur en posant des questions pour préciser. On utilise des techniques de reformulation (poser des questions sous une autre forme). La mémorisation : c’est identifier les idées principales, se défendre de reconstruire seulement ce qui a été dit et éviter de déformer ce qui a été dit. L’évaluation : c’est évaluer ce que la personne a dit au vu des critères de la personne qu’on a écoutée. C’est faire la distinction entre les faits et les inférences, en évitant des interprétations personnelles. C’est essayer d’évaluer les biais intervenant chez le locuteur et identifier son intérêt ou ses préjugés qui amènent à telle ou telle impression. La réponse : elle a une fonction phatique : hochements de tête, encouragement à parler… de manière à garder le contact sans influencer ce que la personne va dire. Un deuxième type de réponse est un type de réponse différent en fonction de ce que la réponse soit directe ou indirecte. On répond après que l’autre ait parlé. Le contenu de la réponse va dépendre de l’objectif de l’entretien. 3.4. Concept de soi et estime de soi Dans toute forme de communication, le soi est l’élément le plus important. Ce que l’on est et la manière dont on se perçoit influencent la manière de communiquer et la manière de répondre aux autres. Le concept de soi est un contenu représentant ce que nous sommes et comment nous nous percevons. Le soi est également un processus. Il reprend un ensemble de structures qui se trouvent au cœur de la plupart de nos pensées. Les schémas de soi sont un ensemble de structures. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 31 Le concept de soi est un concept multidimensionnel. Chaque individu possède plusieurs soi : le soi social, le soi idéal, le soi réel… Nous possédons beaucoup d’informations sur la manière dont on est. Le soi comporte un aspect transactionnel : le soi n’est pas quelque chose de stable, fixé, il s’élabore dans l’interaction avec les autres. Le soi est dynamique. Myers et Myers ont développé en 1990 ce schéma transactionnel. A tout moment il peut y avoir une modification qui va entraîner un changement dans les phases. Le soi a également un aspect interactif : le concept de soi ne se développe pas en intrapersonnel. C’est la confrontation aux autres qui permet l’élaboration du concept de soi. Le concept de soi s’acquiert à travers la communication interpersonnelle. De plus, le concept de soi se maintient ou se modifie à travers la communication : - réponses affirmatives au soi - réponses négatives au soi La conscience de soi peut s’expliquer par l’étude des divers aspects du soi, tels qu’ils peuvent se manifester à autrui ou à soi-même. L’outil servant habituellement à cette analyse est une division métaphorique su sois en 4 portions et portant le nom de fenêtre de Johari. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 32 Connu de soi Inconnu de soi Connu d’autrui Soi dévoilé Soi aveugle Inconnu d’autrui Soi caché Soi inconnu Le soi dévoilé représente toutes les informations, tous les comportements, toutes les attitudes et tous les sentiments personnels connus de soi et d’autrui. Le soi aveugle représente ce que les autres savent de vous et que vous-même ignorez. Le soi aveugle inclut en outre des expériences du passé dont vous n’avez jamais entendu parler ou que vous avez oubliées. Le soi inconnu représente ces aspects de vous-même, inconnus d’autrui et de vous. Il s’agit d’informations enfouies dans le subconscient ou ayant d’une manière ou d’une autre échappé à la conscience. Le soi caché représente tout ce que vous savez de vous et que vous ne révélez pas. Ce carreau de la fenêtre inclut tous les secrets que l’on a réussi à garder. Il peu s’agir de rêves ou de fantasmes, d’expériences passées gênantes ou d’attitudes, croyances et valeurs dont on éprouve une certaine honte. L’estime de soi est l’évaluation globale de la valeur de soi en tant que personne. C’est un sentiment éprouvé lorsque ce qu’on fait correspond à l’image que l’on a de soi et lorsque cette image particulière se rapproche de la version idéalisée que l’on entretient de soi-même. L’ouverture de soi est un genre de communication où vous dévoilez des informations sur vous-même. Plusieurs facteurs influent sur l’ouverture de soi : - Les circonstances : le dévoilement de soi est plus facile dans des petits groupes que dans des grands. - L’encouragement reçu : on a tendance à s’ouvrir plus face à des gens qui nous plaisent, face à des gens en qui on a confiance. - La personnalité : les gens très sociables et extravertis se dévoilent plus que les gens moins sociables et plus introvertis. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 33 - Les thèmes : on se dévoile plus volontiers sur son travail et ses passe-temps que sur sa vie sexuelle ou sa situation financière. Le rôle sexuel : les personnes « féminines » se dévoilent plus que les personnes « masculines ». La culture … L’ouverture de soi comporte quelques avantages : - L’ouverture de soi contribue à la connaissance de soi ; elle aide à développer un nouveau point de vue sur soi-même et à approfondir la compréhension de son propre comportement - L’ouverture de soi améliore la capacité à faire face : elle aide à surmonter les problèmes. - L’ouverture de soi permet d’améliorer la communication - L’ouverture de soi aide à établir des relations significatives. Cependant, l’ouverture de soi comporte aussi des inconvénients : - En se dévoilant, on risque le rejet social et personnel et la non-reconnaissance. - Certaines révélations entraînent parfois des pertes matérielles. - Le dévoilement est comme toute communication irréversible. Il est impossible de revenir sur ses pas. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 34 IV. ETUDE DE LA COMMUNICATION 4.1. Le langage verbal et non-verbal Modèle de Jakobson Jakobson a étudié les facteurs de la communication et les a mis en rapport avec les fonctions du langage. Jakobson a définit les relations que les message entretien avec les facteurs. Il considère que les 6 fonctions sont présentes mais l’une d’entre elles peut dominer en fonction de la situation : - La fonction émotive : destinateur/message : en tant qu’émetteur, on peut d’une part émettre des idées relatives à la nature du référent, mais aussi exprimer un jugement de valeur subjectif sur cet objet. - La fonction référentielle : objet/message : le problème fondamental étant ici de formuler une information vraie sur le référent, c’est-à-dire une information objective, observable et vérifiable Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 35 - - - La fonction poétique : message/message : le message cesse d’être le véhicule d’un objet extérieure à transmettre ; il devient lui-même son propre référent. (aspects artistiques) La fonction phatique : contact/message elle a pour but d’amorcer, de maintenir ou de clore une séquence de communication. Elle permet à l’émetteur de s’assurer que la communication avec le récepteur est bien enclenchée avant de livrer son message ; c’est aussi elle qui confirme que la relation entre l’émetteur et le récepteur existe et se maintient ; c’est elle, enfin, qui signale aux protagonistes l’interruption volontaire de leur relation. La fonction conative : destinataire/message : toute communication a pour but d’obtenir une réaction du récepteur. La fonction métalinguistique : cette dernière fonction est aussi fondamentale pour la bonne transmission d’un message : son rôle est notamment de contrôler le bruit qui pourrait nuire à un échange. Ce modèle de Jakobson vient compléter le modèle de Shannon et Weaver tout en intégrant la signification du langage dans la communication. Les limites de ce modèle : vue limitée, Jakobson n’envisage que des relations duales. Modèle d’Ogden et Richards et de de Saussure Le langage est un système signifiant. On peut s’interroger sur le lien entre le message communiqué et le langage utilisé. Le langage va permettre de communiquer un contenu. Le signe est ce qui nous permet de communiquer des choses qui ne sont pas perceptibles pour l’autre. C’est une réalité physique perceptible (A) qui représente pour un récepteur autre chose (B) qu’elle-même et qui peut s’y substituer. Le signe va permettre de parler de quelque chose et va pouvoir remplacer cette autre chose lorsqu’elle n’est pas présente. Le modèle d’Ogden et Richards propose de situer cette relation entre l’objet et le signe. Selon les auteurs, la formulation et même la compréhension d’un message comportent l’établissement de relations entre la pensée, l’objet et la symbole qui le représente. - Ils considèrent que les symboles (ou mots) ont une influence sur la pensée, car ils orientent et structurent celle-ci. Ce sont aussi les symboles qui servent à mémoriser et à transmettre la pensée. Toutefois, les symboles n’ont aucune signification en eux-mêmes. Ils n’acquièrent une signification que par l’intermédiaire des usages que les personnes en font. - Dès lors, il faut toujours distinguer entre la pensée et les objets ou les faits de notre environnement, considérer que les symboles servent à mémoriser et à communiquer, et qu’il y a une relation directe entre la pensée et les symboles. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 36 La pensée est la manière dont la personne perçoit, envisage le référent. Le symbole est le signe utilisé pour symboliser la pensée que l’on a. Il existe 2 relations causales : - entre pensée et symbole : c’est le lien entre la représentation qu’on a de l’objet et le langage qu’on va utiliser pour symboliser cette pensée. C’est une relation exacte. Cette relation va dépendre d’un certain nombre de facteurs psychosociaux. - entre pensée et référent : c’est le lien entre la représentation de l’objet et l’objet luimême. C’est une relation adéquate. Pour Ogden et Richards, il n’y a pas de relation causale entre l’objet et le signe, il s’agit plutôt d’une relation attribuée qui pourra être ou non véridique. Ogden et Richards postulent qu’un symbole est vrai lorsqu’il décrit correctement une pensée qui se rapporte à un référent. Le symbole est faux lorsqu’il produit une pensée inadéquate. De Saussure adopte un modèle assez similaire mis à part le fait qu’il appelle la pensée, le signifié, et le symbole, le signifiant. Pour lui, le signe est une relation entre signifiant et signifié. De plus, pour de Saussure, il n’y a pas de relation directe entre signifiant et référent. La relation passe nécessairement par le signifié. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 37 Signifié Signifiant Référent Le langage verbal La transmission de la signification d’une personne à une autre constitue assurément la plus importante de toutes les fonctions du langage. Quelques particularités de la signification : Les signes peuvent être naturels ou conventionnels : les signes conventionnels correspondent aux aspects digitaux de la communication, c’est un code partagé. Ces signes nécessitent une interprétation. Ils s’acquièrent par l’apprentissage. A l’inverse, dans les signes naturels, il y a correspondance entre l’objet et le signe utilisé. Ces signes s’apprennent par l’expérience. Ils ne nécessitent aucune interprétation. La signification peut être dénotative ou connotative : Il importe de reconnaître deux grands types de sens, soit la dénotation et la connotation. La dénotation constitue la signification que l’on trouve dans un dictionnaire, celle que les personnes issues d’une même culture donnent à un mot. La connotation se définit pour sa part comme la signification émotionnelle que des locuteurs et des auditeurs particuliers attribuent à un terme. La dénotation d’un mot en constitue la définition objective, alors que sa connotation en représente la signification subjective ou émotionnelle. La signification provient des gens. La signification repose sur l’existence d’un référent : Bien qu’une communication ne renvoie pas nécessairement à la réalité, elle ne peut avoir de sens que si elle se rapporte d’une manière quelconque au monde extérieur. La signification doit se rattacher à des personnes et à des événements réels. La communication peut engendrer des problèmes lorsque l’on utilise des abstractions de niveau supérieur (termes très généraux) sans les rattacher à un référent concret observable. Il existe un nombre infini de significations : A tout moment, une langue ne comporte qu’un nombre limité de mots, mais elle permet d’exprimer une infinité de significations. De ce fait, la plupart des mots ont plus d’une acception. Des problèmes de communication surgissent lorsque deux personnes attribuent au même terme un sens différent. Un désaccord peut se dissiper lorsque l’on parvient à établir la signification envisagée par chaque personne. On ne communique que partiellement la signification : Chaque fois que l’on communique, on ne décrit qu’une petite fraction de ce que l’on veut dire. Une bonne part de ce que l’on a en tête demeure inexprimée. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 38 Compétences verbales et rapport social : L’analyse des significations doit se faire dans le rapport social. En fonction des compétences verbales, il y a un rapport plus ou moins complexe entre signifiant et signifié. Il existe un lien étroit entre la pensée et la communication. Par conséquent, les obstacles suscitent des problèmes aussi bien de pensée que de communication. On peut facilement expliquer le lien entre les deux : toute déformation de la pensée fausse l’expression verbale et toute altération de l’expression verbale corrompt encore davantage la pensée. Ces obstacles peuvent apparaître lors d’un échange interpersonnel : La polarisation : elle représente la tendance à envisager le monde en fonction de contraires et à le décrire avec des extrêmes (bon/mauvais, honnête/malhonnête…). Elle résulte de ce que l’on appelle souvent l’erreur de l’exclusion mutuelle ou du noir et blanc. Pour abandonner sa tendance à la polarisation, il faut prendre garde de ne pas donner à entendre (ni croire) que deux catégories extrêmes englobent toutes les possibilités et qu’un individu doit nécessairement appartenir à l’une ou à l’autre. L’attitude intensionnelle : elle représente la tendance à envisager les gens, les objets et les événements en fonction de termes utilisés pour les décrire ou les nommer. Elle devient un obstacle si les descriptions sont utilisées sans réévaluation. Pour éviter ce type d’attitude, on doit recourir à l’extension. Autrement dit, il faut se préoccuper avant tout des gens, des objets et des événements tels qu’on les appréhende et non pas tels qu’ils sont présentés à l’aide de mots. La confusion entre les faits et les inférences : on ne fait souvent aucune distinction entre les énoncés factuels et les inférences lorsque l’on parle ou que l’on écoute. Pourtant, il existe des différences importantes entre eux. Les énoncés factuels Les inférences On ne peut les faire qu’après Elles peuvent être émises en tout temps. observation. Ils se font sur base d’observations. Elles ne se rapportent pas qu’aux seules choses observables. Ils doivent être formulés par Elles peuvent être formulés par tous. l’observateur. Ils se rapportent seulement au passé ou Elles peuvent se rattacher aussi bien au au présent. passé et au présent qu’au futur. Ils tendent vers la certitude. Elles ont un degré de probabilité variable. Ils peuvent être soumis à une vérification Elles ne peuvent pas donner lieu à une factuelle. vérification factuelle. Ils reposent sur une certaine Elles ne reposent sur aucune compétence de l’observateur. compétence de l’observateur. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 39 On fait souvent des inférences parce qu’on n’a pas le temps de tout observer. Le problème est de confondre les faits et les inférences. Les courts-circuits : ils représentent des cas de mauvaise évaluation où les gens ne parviennent pas à communiquer la signification qu’ils désirent. C’est un problème dans le rapport entre signifiant et signifié. Les courts-circuits peuvent être de 2 types : Le premier se manifeste lorsque deux personnes utilisent des termes différents mais leur donnent la même signification. Le second type se traduit lorsque deux personnes emploient les mêmes termes mais leur donnent une signification différente. Les évaluations statiques : elles dénotent la tendance à ne pas modifier les jugements que l’on porte alors que la réalité à laquelle ils se rattachent se transforme sans cesse. C’est par exemple considérer qu’un étudiant qui a eu de mauvaises notes en aura toujours. L’attitude globalisante : c’est la tendance à construire une image de quelqu’un à partir de quelques éléments seulement, c’est se baser sur une partie pour construire un tout. Par exemple : « Tu es toujours en retard ! » « Tu ne m’écoutes jamais ! » Le manque de discernement : on présente un manque de discernement lorsque l’on ne parvient pas à distinguer des personnes, des objets ou des événements semblables mais différents. C’est ne pas assez différencier son jugement. Cette incapacité résulte du fait que l’on accorde son attention aux classes sans prendre conscience que chacun de leurs éléments est unique et doit être examiné de façon individuelle. Ce manque renvoie à l’utilisation de stéréotypes pour qualifier un individu spécifiquement. La communication et la pensée ne sont pas les seuls à avoir leurs obstacles. La conversation avec autrui en comporte également toute une série : Les propos d’initié : c’est le fait de parler de choses que seule une partie du public peut comprendre (private jokes). L’information est donc non comprise par tous. Cela a pour effet de rejeter une partie du public. Les propos ayant trait à soi-même ou aux autres : Beaucoup de gens ne s’intéressent presque exclusivement qu’à eux-mêmes. Ils parlent sans cesse d’euxmêmes (travail, réalisations, succès…) Ils s’enquièrent rarement du bien-être d’un interlocuteur, de ce qu’il pense ou de ce qu’il compte faire. D’autres gens adoptent une attitude tout à fait contraire et ne parlent jamais d’eux-mêmes. Ces individus ne se dévoilent pas suffisamment ; ils se montrent désireux d’en apprendre le plus possible au sujet des autres mais sans accepter de s’ouvrir eux-mêmes. Or, la communication repose sur le principe de réciprocité, il doit y avoir un équilibre entre les informations personnelles ou celles sur les autres. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 40 Les bavardages : ce sont des discussions anodines. Un bavard rapporte des informations d’ordre privé dans d’autres sphères. Il y a donc non-respect d’un certain niveau de confidentialité. Les bavardages reposent sur le fait que la communication est irréversible. La dénégation : c’est le fait de ne pas reconnaître son interlocuteur, de ne pas prêter attention à ce qu’il dit. C’est parfois aussi ne pas répondre, garder le silence. Son modèle de communication opposé est la confirmation. Lorsqu’on l’adopte, on reconnaît non seulement la présence de l’autre mais aussi le fait que l’on accepte cette personne, sa définition d’elle-même et la manière dont elle envisage la relation que l’on entretient avec elle. Le racisme : c’est l’utilisation de caractères de nationalité, de race, de culture là où ça n’apporte pas d’informations pertinentes dans la conversation. L’utilisation de ce type de termes ne sert qu’à montrer la différence entre quelqu’un d’habituel et quelqu’un de non habituel. Certains termes, concepts sont plus rattachés à des termes positifs ou négatifs. Le sexisme : c’est le même principe que le racisme sauf que les termes concernent le sexe de l’individu. Par exemple, en Communauté français, il existe un décret précisant les règles grammaticales de traduction de certains noms. Ex au Québec : un professeur, une professeure. Le langage non-verbal Le langage non-verbal est difficile à étudier car il est difficilement isolable. Quand on cherche à isoler un comportement, le plus souvent, on vide une grande partie de la communication. On rend les situations artificielles. De plus, il y a problème d’organisation et d’interprétation dans le langage non-verbal (mécanismes perceptifs). Watzlawick distingue deux formes de communication : analogique et digital. La communication analogique n’a pas de code socialement partagé. L’interprétation est donc individuelle et subjective. Dans le langage verbal, les aspects culturels s’intègrent dans le langage, ce n’est pas le cas dans le langage non-verbal. La langage non-verbal peut avoir toute une série d’usages : renforcer le langage verbal, accompagner le langage verbal, mettre en évidence certains points, réguler, gérer les différents flux de parole, se substituer au langage verbal… Différents aspects sont étudiés dans le langage non-verbal : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 41 - - - les mouvements corporels : dans la communication interpersonnelle, les mains, les membres sont très importants. Les mouvements faciaux : les émotions Les mouvements oculaires : le fait de regarder, fixer, durée de fixation, détourner le regard… On associe ces mouvements oculaires à la nature des relations. La territorialité et l’espace : la manière dont l’individu occupe une position Les couleurs, les vêtements, les parures : les couleurs sont influencées par la culture, elle a en plus une influence physiologique sur nous. On peut utiliser des couleurs particulières pour induire une ambiance particulière. Les vêtements ont une fonction de protection de soi, c’est une manifestation culturelle, un message aux autres de qui on est ou de qui on voudrait être. Par exemple, l’uniforme peut avoir deux fonctions : une fonction d’identification au groupe et une fonction de diminution de la différenciation individuelle. L’uniforme est un élément de communication à l’égard des autres. La parure aussi. Par exemple, le fait de porter une alliance témoigne du type de relation qu’on peut avoir avec l’autre. Le toucher : c’est le fait de rentrer en contact avec l’autre, ce contact peut apparaître dans des situation d’émotion intense négative ou positive. Cette composante du toucher est très influencée par la dimension culturelle. Il existe des rituels d’interaction qui codifient les gestes acceptés et ceux qui ne le sont pas. Le paralangage : dimension vocale du langage, intonation, accent, débit ou volume de parole… Le temps : temps réel, temps perçu… L’espace et la territorialité. L’environnement physique et les objets qui le composent sont des construits sociaux ; les configurations et caractéristiques de ce qu’on appelle le cadre bâti sont considérées comme autant de données produites socialement : elles sont le résultat d’un ensemble de processus par lesquels s’opèrent l’occupation et la transformation d’un territoire. L’espace peut être appréhendé comme un vecteur des interactions sociales, et cela à double titre : d’abord, toute organisation spatiale structure plus ou moins directement ou fortement les communications ; ensuite, elle constitue un message social sur le groupe ou la société qui l’occupe, sa manière de vivre et ses valeurs. De plus, l’espace est l’objet de l’emprise physique et psychologique des personnes qui le dirigent. C’est le phénomène d’appropriation. Il crée une dominance territoriale. L’appropriation englobe ainsi des formes d’interactions qui expriment, à partir d’une occupation ou d’une utilisation particulière de l’espace, une affirmation de soi sur les lieux. Le concept de territoire désigne un lieu ou une aire géographique occupée par une personne ou un groupe : le territoire est dans ces conditions la propriété d’une personne Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 42 ou d’un groupe qui en devient d’une certaine façon « propriétaire ». Les recherches d’Altman ont mis en évidence trois types de territoire : - le territoire primaire est un lieu occupé, utilisé de manière stable et clairement reconnu comme sien (par exemple : son logement, son bureau…). Ce type de territoire assure une fonction d’intimité, il peut être personnalisé et défendu contre toute intrusion. - Le territoire secondaire est un lieu semi-public ou semi-privé, régi par des règles plus ou moins clairement définies concernant son accès et l’usage du territoire. Il s’agit donc d’un lieu relativement occupé par une personne ou un groupe (café, club…) - Le territoire public est un lieu occupé temporairement, et n’importe qui peut, en principe, y pénétrer ; les comportements dans ce lieu sont régis en grande partie par les institutions, les normes, les coutumes, ainsi que par l’aménagement de l’espace (cabines téléphoniques, bancs publics…). L’individu qui occupe un lieu a tendance à adopter des comportements de dominance territoriale, c’est-à-dire à exercer plus d’influence dans ce lieu qu’ailleurs ; comme l’a montré Altman, la dominance territoriale implique une orientation et une régulation des interactions sociales et peut varier en fonction des besoins d’intimité. Sur ces bases, le territoire délimité une zone d’emprise et de contrôle particulier. La notion de dominance territoriale comporte à la fois une fonction d’appropriation et d’identité. Les territoires sont délimités de manières diverses. Par exemple, des marqueurs peuvent servir de frontières. Ces marqueurs ont tout d’abord une fonction préventive ; ils indiquent à autrui qui possède et occupe l’espace ainsi délimité ; il s’agit donc de symboles permettant de définir un rapport entre soi et autrui, à travers des frontières caractérisées. Il existe trois types de marqueurs : - Marqueurs centraux : emplacement – occupation - Marqueurs frontières : délimitation - Marqueurs signets : appartenance L’expérience quotidienne nous apprend que dans nos relations avec autrui nous cherchons à conserver autour de nous une zone qui nous permet de nous protéger. La notion d’espace personnel repose sur l’idée que la place du corps dans un environnement donné ne se limite pas à la surface de la peau ; il est entouré d’une zone qui dessine autour de lui des frontières invisibles. L’espace personnel est donc considéré comme une zone émotionnelle, socio-affective qui se réfère au concept d’intimité et de privatisation. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 43 L’espace personnel se manifeste dans les interactions sociales par l’usage de diverses formes de distances que les individus établissent entre eux. La distance interpersonnelle est donc un mode d’expression de l’espace personnel. Hall a défini 4 grandes catégories de distances : - la distance intime : c’est celle où la présence de l’autre est la plus prégnante - la distance personnelle : elle désigne le minimum de séparation existant entre les individus - la distance sociale : c’est celle des rapports formels de la vie sociale - la distance publique : c’est celle réservée aux contacts très formels et officiels. L’utilisation de l’espace personnel remplit plusieurs fonctions psychosociales. - Tout d’abord, il constitue un système de défense. - Une deuxième fonction de l’espace personnel est la régulation de l’intimité. La fonction de l’espace personnel a donc une valeur sociale, car les autres l’admettent et la reconnaissent comme telle. Cette dernière fonction s’inscrit de manière plus large dans celle de la régulation de toute interaction sociale, car l’intrusion de l’espace personnel est perçue comme une menace et suscite des comportements de défense. L’utilisation de l’espace personnel dépend fortement de la culture d’une société ou d’un groupe. Chaque culture privilégie des mécanismes propres pour exprimer et signifier la valeur qu’elle accorde à l’espace personnel. MANQUE DERNIER SLIDE COURS 8 j’ai pas de notes dessus Perspectives théoriques dans l’étude des signaux corporels Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 44 On considère volontiers que l’apparence physique et les mouvements du corps jouent un rôle dans les échanges sociaux : ils expriment une part de nous-mêmes et, perçus chez autrui, permettent de saisir certaines propriétés de notre façon d’agir. Trois orientations principales caractérisent l’étude des communications corporelles et, en particulier, gestuelles. Suivant la première, on peut considérer les gestes comme possédant, au même titre que les mots, la propriété d’exprimer les représentations mentales qui constituent la pensée ; il existerait donc un « langage des gestes ». Dans une deuxième direction, on mettra l’accent sur le fait que certains modes de communication sont communs aux hommes et aux animaux et on formulera des hypothèses quant à leur phylogenèse. Selon une troisième perspective, les gestes semblent présenter une spécificité par rapport au langage oral, celle de servir avant tout à l’expression des émotions, des états affectifs ou des attitudes interpersonnelles ; on parle à ce propos de « communication non verbale ». Le langage du corps : Depuis longtemps, l’étude des gestes a été poursuivie dans l’idée que l’être humain ne parle pas seulement avec des mots, mais aussi avec son corps. L’analogie entre les gestes et le langage repose tout d’abord sur l’observation que les usages corporels varient selon les peuples et les cultures. Tout comme les langues parlées dans le monde, les pratiques gestuelles diffèrent selon le lieu et l’époque. Ensuite, les régularités à l’œuvre dans les usages corporels paraissent obéir à un système de règles qui peut être comparé à une syntaxe. Enfin, si les gestes semblent constituer un langage, on peut penser que les méthodes linguistiques développées pour l’analyse de celui-ci doivent pouvoir s’appliquer à l’étude des mouvements corporels. Au-delà de l’analogie entre geste et langage, la notion de langage du corps invite à décrire les gestes, les classer, en analyser le fonctionnement à la lumière de ce que l’on sait du langage oral. D’ailleurs, dès le début du siècle, la linguistique a nourri le projet d’une science générale des signes, d’une sémiologie qui, au-delà de l’analyse du langage, engloberait tous les systèmes signifiants (Eco, 1988). Pour Birdwhistell, la kinésique est la discipline qui, dans l’étude de la gestualité, est homologue à la linguistique. Analyse interculturelle des gestes : A l’instar de la langue parlée dans la société à laquelle ils appartiennent, les individus apprennent les gestes, les mimiques, les expressions corporelles propres à leur milieu d’origine. Même si certains mouvements peuvent avoir une signification universelle, la culture peut influencer ces comportements en réglant les conditions de leur utilisation. Il est donc possible de mettre en évidence des similarités et des différences entre les cultures. Par exemple, en Grèce, le mouvement de tête Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 45 pour dire OUI correspond au mouvement de la tête pour dire NON en Belgique. Les usages corporels et les rituels d’interaction : Les différences interculturelles dans l’expression corporelle suggèrent l’existence d’un modèle social qui agit sur l’individu à l’insu de celui-ci. A ce propos, on a parlé d’un « inconscient collectif » au sens d’un ensemble de règles, quasi grammaticales, que tout sujet applique en parlant sans être pour autant capable de les expliciter. Goffman voit dans toute interaction sociale un jeu où l’individu cherche par son comportement à contrôler les représentations que l’autre se fait de lui. Il existe toute une série de comportements à adopter avant, pendant et après une interaction. On insiste sur la synchronisation de ces mouvements corporels. Les gestes dans la perspective de la sociologie de la conversation : La conversation constitue sans doute l’interaction sociale le plus clairement structurée par des règles. Les règles de la conversation concernent d’une part l’alternance des tours de parole, et d’autre part la cohérence de l’échange. Duncan et ses collaborateurs ont examiné les signaux de transition. La prise de parole par l’auditeur s’effectue de façon harmonieuse quand le locuteur a émis un ou plusieurs signaux de « transition » : ces signaux peuvent être soit paralinguistiques, soit verbaux, soit encore non verbaux. Ainsi, la production d’un geste chez le locuteur inhibe fortement la disposition de l’auditeur à prendre à son tour la parole ; la proportion des chevauchements s’accroît si l’auditeur est intervenu malgré la présence de ce signal. XP : On a placé deux personnes face à face mais séparées par un écran. Ils engagent une conversation. On remarque qu’il y a très peu de perturbations dans les échanges entre les deux interlocuteurs. (Ce résultat n’est pas surprenant parce que cette situation expérimentale ressemble à une communication téléphonique). D’autres expériences ont pu montré qu’il existe des gestes, des signaux de transition. Ces gestes sont utilisés même lorsque les interlocuteurs ne sont pas face à face. Les signaux gestuels ne servent pas uniquement à gérer les échanges et à assurer leur cohérence. Bien souvent, il n’y a pas qu’un seul signal utilisé mais plusieurs simultanément. XP : Deux personnes sont placées sur des chaises avec tous leurs membres attachés et doivent entamer une conversation. On remarque qu’ils développement d’autres gestes pour communiquer. Approche éthologique de la gestualité : Plusieurs gestes ou mouvements d’expression se rencontrent aussi bien chez de nombreux animaux que chez Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 46 l’homme. A partir de similitudes entre l’homme et l’animal, on a voulu comprendre ce qui déclenche les mouvements corporels, quelles sont leurs fonctions… Le système motivationnel : ces recherches se placent bien souvent sur angle de motivation : étudier ce qui déclenche des gestes, quels sentiments particuliers (peur…) sont à l’origine de mouvements corporels dans la communication. Une des difficultés de ces recherches est que des mêmes gestes peuvent apparaître liées à des sentiments différents. Les situations de conflit : Pas mal de recherches se sont centrées sur des situations de conflit et particulièrement sur les gestes d’auto-contact (dont la fonction est de réassurer) : essayer de voir s’il y a une augmentation du nombre de gestes d’auto-contact dans les situations de conflit. Les résultats de ces recherches sont contradictoires. On a pu montrer qu’il y a une relation négative entre la manifestation des gestes d’auto-contact et les gestes accompagnant la parole. On aurait davantage de gestes d’auto-contact au repos, dans des phases de transition et moins dans les situations de parole. Analyse éthologique des interactions sociales : Montagner à étudié les mouvements corporels dans l’interaction. Il s’est demandé si le mouvement corporel pouvait provoquer chez l’autre une réaction c’est-à-dire exprimer quelque chose. Montagner a pu montré que le fait d’incliner la tête sur le côté augmentait les chances d’obtenir ce qu’on demandait. D’autres études sur l’imitation du comportement ont montré que l’imitation amenait quelque chose de positif dans l’interaction. L’asymétrie des comportements corporels en fait de même ‘aspect de complémentarité entre les mouvements des interlocuteurs). On n’étudie pas le mouvement corporel en tant que tel, on étudie ce qu’il produit et sa fonction. Les communications non verbales : La communication non verbale a une certaine autonomie par rapport au langage verbal. 3 postulats de base : le langage et la communication non verbale servent différentes fonctions ; l’expression des émotions et des attitudes dépend principalement de la communication non verbale (≈ forme analogique de Watzlawick) ; la communication non verbale permet l’établissement, le développement et le maintien des relations sociales (≈ le contenu et la relation dans la communication de Watzlawick). Les recherches, ici, se basent sur une perspective probabilité. On a d’un côté des gestes et des variables initiales et de l’autre on va montrer ces gestes et demander à quelqu’un de les interpréter. On étudie la corrélation entre l’interprétation qu’une personne fait et la situation initiale. 3 types de situations sont étudiés : La communication des états émotionnels : Dans un premier temps, on étudie les gestes d’auto-contact. Ces gestes sont étudiés comme indicateurs d’un niveau de tension, comme indice d’une activation émotionnelle. On Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 47 s’intéresse aux variations. Dans un second temps, on étudie les postures (Riskind). L’hypothèse de départ est que les postures exercent un effet régulateur dans les interactions. La posture adoptée influence la réceptivité du sujet face à un message verbal. La communication de dispositions comportementales : On étudie plus particulièrement le rapport entre gestes et attitudes. - Expression des attitudes : La théorie de l’équilibre de ArgylePatterson rend compte du rapport entre le contact visuel et la distance physique. Dans la dimension de l’intimité, il doit y avoir un équilibre entre le regard et la distance interpersonnelle. On retrouve cette volonté d’équilibre dans d’autres situations (surpopulation dans le métro par exemple) - Posture en miroir : 2 interlocuteurs qui adoptent la même posture, la même gestuelle. - Facteur d’intelligence sociale dans l’appréciation d’autrui : certaines personnes seraient capables d’interpréter les indices corporels et faciaux. La communication de traits permanents : Il existe des différences entre les hommes et les femmes dans leur façon de s’exprimer corporellement. Cette différence contribue à la perception des rôles sexuels dans la société. Des études sur les traits de personnalité ont pu mettre en évidence une relation entre extraversion et utilisation de gestes dans la communication. Mais l’hypothèse selon laquelle la personnalité d’un sujet se reflète dans son expression corporelle n’a pas été confirmée. Geste et parole : séparation ou interaction ? Gestes et parole ont une valeur communicative mais il manque encore beaucoup de réponses pour savoir si les gestes sont un système de communication autonome, s’ils sont spécialisés pour véhiculer des informations. Il est difficile d’isoler des gestes dans la communication sans que la communication ne perde son sens. 4.2. Persuasion et changement d’attitudes La communication persuasive, c’est chercher à convaincre l’autre, de modifier un comportement, une opinion, une attitude. Dans beaucoup de travaux, on parle du postulat qu’il faut modifier l’attitude pour changer un comportement. Le concept d’attitude a été étudié par beaucoup d’auteurs. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 48 Selon la conception unidimensionnelle, l’attitude est tendance psychologique qui s’exprime par le biais de l’évaluation d’une entité particulière avec un certain degré de favorabilité (Eagly & Chaiken, 1993). Rosenberg et Hovland ne limitent pas leur définition à cette seule évaluation ; ils proposent une définition à trois versants. Ils vont conserver le versant relatif à l’évaluation de l’objet, mais vont y ajouter un versant cognitif (l’ensemble des connaissances dont dispose la personne à propos de l’objet d’attitude) et un versant comportemental (lintention de comportement évoquée par la personne à l’égard de l’objet dont elle parle). Ce modèle peut être représenté de la façon suivante : L’attitude est donc en relation avec le comportement. L’étude de l’attitude consiste à voir l’attitude des personnes et d’essayer de prédire leur comportement. Par exemple, en France, on effectue des sondages d’opinion sur les partis politiques, cela permet de contrôler le décalage entre l’attitude et le comportement. Deux théories tentent d’expliquer la relation entre attitude et comportement : La théorie de l’action raisonnée : L’idée de cette théorie est que l’intention d’effectuer ou non un comportement est considérée comme le « déterminant immédiat » de ce comportement ; l’intention étant elle-même déterminée par deux éléments importants : l’attitude vis-à-vis du comportement et la norme subjective. Ainsi l’attitude ne représente un élément annonciateur d’un comportement que dans la mesure où elle influe sur l’intention de façon directe. La nomre subjective, second déterminant de l’intention, reflète la perception, par l’individu, des pressions sociales les plus saillantes. A leur tour, l’attitude et les normes sont constituées de deux ensembles de croyances. Ce modèle peut être représenté de la façon suivante : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 49 La théorie du comportement planifié : ce modèle rajoute une troisième variable : le contrôle perçu. Cette variable reprend les croyances que l’individu a par rapport aux obstacles et aux éléments facilitateurs. (ex : s’il y a trop d’obstacles il n’y aura pas d’action). Le comportement qu’on adopte sur le plan environnemental, généralement, on n’en voit pas l’effet. On ne voit pas le résultat de son action. De plus, l’idée que son action individuelle ne va pas avoir d’effet général amène à ce que les personnes pensent qu’ils n’aient que peu de contrôle (pas d’action). Ces deux théories sont difficiles à utiliser en pratique. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 50 Comment peut-on provoquer un changement ? La communication persuasive est le moyen le mieux reconnu comme acceptable pour faire changer les choses. A chaque fois qu’on cherche à convaincre quelqu’un, on a recours à cette communication. 3 domaines particuliers utilisent ce type de communication : - Le domaine de la publicité : la publicité set à vanter les mérites d’un produit au travers d’un message. Il est difficile de montrer au travers des ventes l’effet d’une publicité. Une publicité est une variable difficile à isoler. Ce qu’on évalue le plus souvent c’est le degré avec lequel les gens ont retenu une publicité. On évalue le succès d’une publicité au travers du facteur de mémorisation. - Le domaine de la prévention : arrêter de fumer, utiliser un préservatif… - Le domaine de l’environnement RMQ : Dans le domaine de l’environnement, il s’agit d’un changement de comportement et non d’attitude. Stoezel (1963) associe invariablement 4 caractères au concept d’attitude : - on ne peut pas observer une attitude directement, on l’infère ou on la déduit d’une mesure ; - elle implique nécessairement une relation du sujet avec un objet ou une situation ; - « une attitude est toujours une attitude pour ou une attitude contre » ; elle possède donc une polarité ; - l’attitude est acquise et peut donc subir des influences venant de l’extérieur. La recherche sur la communication persuasive adopte toujours le même schéma : - groupe expérimental : on leur demande avant leur avis sur la communication au moyen de questionnaires - on confronte le groupe au message persuasif - comparaison avant-après : on interroge les personnes sur la problématique - comparaison de la position de la source et de celle du récepteur RMQ : on ne confronte pas directement le groupe à une personne mais à un texte rédigé par la source. La source est donc coprésente. De plus, il arrive de ne pas interroger le groupe avant la confrontation du message persuasif. Dans ce cas-là, on compare le groupe expérimental qui reçoit le message avec un groupe contrôle qui ne reçoit aucun message. « Qui dit quoi à qui comment ? » (Hovland, Janis et Kelley) Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 51 Dans cette interrogation se trouvent pointés les facteurs essentiels d’un processus de communication : - Qui dit ? Quelle est la personne qui parle ? On l’appellera la source. - Quoi ? Que dit la source ? On l’appellera le message. - A qui ? A quelle personne est destiné le message délivré par la source ? On l’appellera le récepteur. - Comment ? De quelle façon ce message destiné au récepteur a-t-il été délivré par la source ? On appellera cette façon le canal de communication. On le voit, une communication persuasive respecte un ensemble d’éléments que l’on peut schématiser de la façon suivante : Canal Source Canal Message Récepteur Le processus de changement des attitudes est composé d’une séquence d’étapes, qui se conditionnent les unes les autres. Selon McGuire (1969), ce processus peut se résumer de la façon suivante : Attention Compréhension Réception du message Acception Rétention Action La plupart des expérimentations s’arrêtent à cette étape en négligeant de vérifier les effets de la persuasion Changement comportemental à long terme. Consolidation de la nouvelle attitude Le récepteur doit donc être attentif pour que le message puisse avoir un effet. Il doit pouvoir comprendre le message et l’accepter. Sans cela, il n’y a pas de consolidation de la nouvelle attitude ni de changement comportemental. De Montmollin a rajouté une étape : la phase d’évaluation entre la compréhension et l’acception. Les caractéristiques de la source Crédibilité de la source : Une source crédible est plus persuasive qu’une source qui ne l’est pas. Certes, mais seulement dans le cas où les effets du discours persuasif sont envisagés sur le court terme et non sur le long terme. Dans cet ordre d’idée, Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 52 Hovland et Weiss (1951) ont présenté à leurs sujets un texte destiné à les influencer sur plusieurs thèmes. Chaque thème est développée avec une position pour et une position contre. Chaque thèse est attribuée à chaque source (crédible ou non). Chaque sujet recevait un cahier reprenant 4 textes, un pour chacun des thèmes (2 thèmes avec une conclusion favorable, 2 avec une conclusion défavorable ; 2 thèmes avec source crédible et 2 avec source non-crédible). Les résultats apparaissent indiscutables. Le changement d’attitude est plus important quand la source est crédible que quand elle ne l’est pas. Cela s’est vérifié pour les adultes mais aussi pour les enfants. En revanche, dès lors que l’on vérifie cette influence sur le long terme, les résultats apparaissent beaucoup moins triviaux. En effet, Hovland et Weiss n’ont pas maque d’interroger leurs sujets 4 semaines plus tard, et ils mirent en évidence un effet : l’effet d’assoupissement. Interrogé 4 semaines plus tard, l’ensemble des sujets fait apparaître l’objet d’une influence identique. En fait, tout se passe comme si les sujets avaient oublié la source d’influence pour ne retenir que le message porteur d’influence. Pour les uns (ceux qui ont été mis en présence d’une source crédible), il est observé une diminution du changement d’attitudes ; pour les autres (ceux qui ont lu un texte attribué à une source non crédible), on constate une augmentation de l’influence. On constate une moyennisation de l’effet des deux sources : la source crédible semble perdre de son effet, alors que la source non crédible semble en gagner et ce jusqu’à tendre vers un même point. Il s’agit de l’effet d’assoupissement : avec l’écoulement du temps, l’influence de la source perd de son impact tandis que demeure la seule influence du message. Cependant, il suffit, 4 semaines après, qu’un indice rappelle au sujet l’identité de la source pour que la différence entre l’un et l’autre groupe redevienne ce qu’elle était 4 semaines plus tôt. La confiance qu’inspire la source : Eagly, Wood et Charkin ont confronté leurs sujets à un discours d’une campagne électoral (problème de pollution industrielle). La question du texte : « Faut-il fermer les usines polluantes ou envisager des aménagements ? » Le texte prend la position « fermer les usines ». Il y a deux variables expérimentales : les caractéristiques de l’auteur du discours (auteur proécolo ou pro-industriel) et les conditions dans lesquelles le discours a été tenu (public pro-écolo ou pro-industriel). Les résultats montrent que les sujets ont plus été convaincus quand les auteurs avaient un passé pro-industriel ou quand le public était pro-industriel. Mais ce résultat est contre-intuitif. Cela est du à deux biais : le biais de savoir et le biais de rapport. Selon le biais de savoir, la source va être mieux informée en fonction de son passé. Si l’auteur est pro-écolo, on s’attend à ce qu’il veuille fermer les usines (attente confirmée). Par contre, on ne s’attend pas du tout à ce qu’une personne pro-industrielle veuille fermer des usines (attente infirmée). Selon le biais de rapport, si le public est pro-écolo, l’attente sera confirmée et le changement d’attitude sera peu important. Par contre si le public est Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 53 pro-industriel, l’attente est infirmée, par conséquent, les changement d’attitude sera plus fort. Attractivité : L’attirance exercée par la source sur le récepteur est une variable affective qui est relative à une réaction émotionnelle dont le résultat sera une jugement de valeur en termes d’attirance ou de répulsion. Les recherches valident ce que le sens commun donne à croire ; on se laisse plus facilement influencer par les personnes attrayantes que par celles qui ne le sont pas. Dans cet ordre d’idée, Mills et Aronson (1965) ont confronté un premier groupe d’étudiants (tous masculins) à un discours persuasif relatif à des réformes éducatives, délivré par une source séduisante. Un second groupe recevait un message identique délivré par la même source qui avait pour la circonstance changé de vêtements et de coiffure afin d’apparaître la moins séduisante possible. De fait, les résultats montrent que les étudiants du premier groupe changeaient significativement plus d’attitude que les étudiants du second. Les caractéristiques de la source vont agir sur l’attention et principalement dans le cas de l’attractivité. Par contre, la crédibilité va plutôt agir au niveau de la compréhension. Au niveau de l’évaluation, la personne va chercher les arguments pour et va procéder à une contre-argumentation. Si la source est crédible ou attractive, cette contrargumentation sera moins importante. RMQ : Les expériences portent sur la perception de caractéristiques de la source et non sur les caractéristiques elles-mêmes. NB : Pour Birnbaum et Stegner (1979), la crédibilité doit se décomposer en trois éléments : l’expertise (qui fait référence à la corrélation perçue entre le récit de la source et la résultat de vérifications empiriques), le biais ‘qui fait référence aux facteurs perçus comme influençant la différence algébrique attendue entre le récit de la source et l’état véritable de la nature) et le point de vue du juge (personne qui combine l’information provenant d’une ou plusieurs sources pour faire une évaluation générale ou un jugement). Kelman a élaboré une théorie de 3 processus : - Pouvoir de l’expert : processus d’intériorisation : confronté à une source experte, la public aurait tendance à intérioriser les arguments, à se laisser convaincre, y compris q’il oublie quelle est la source. - Pouvoir de référence : processus d’identification : pas de processus d’intériorisation des arguments. On aurait un changement d’attitude tant qu’on s’identifierait à la source. Dans ce processus, le changement d’attitude et de comportement est moins permanent et moins stable que dans le processus d’intériorisation. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 54 - Pouvoir de sanction : persuasion par la force : processus de soumission. La pouvoir de sanction va avoir un effet mais uniquement lié à la soumission (c’est-à-dire uniquement en présence de la source et dans la sphère publique). Si la sanction perd de son pouvoir, il n’y aura pas de changement d’attitude. Les caractéristiques du message La forme du message : Argumentation unilatérale (pour ou contre) et bilatérale (les deux) : Hovland, Lumsdaine et Sheffield ont élaboré une expérience qui s’est déroulé durant la seconde guerre mondiale en réponse à une question du gouvernement américain de l’époque qui se demandait de quelle façon on pouvait convaincre les soldats que la guerre contre le Japon risquait de durer plus longtemps qu’ils ne le pensaient. C’est ainsi que Hovland et coll. Ont comparé deux stratégies distinctes de persuasion. Auprès du premier groupe d’individus, le discours persuasif ne livrait que des arguments en faveur d’une guerre longue, en négligeant le point de vue opposé. Les sujets d’un autre groupe entendaient quelques arguments en faveur d’une guerre courte, puis après les avoir réfutés, le discours persuasif développait des arguments en faveur d’une guerre longue. Il était demandé aux soldats leur estimation de la durée de la guerre avant et après avoir entendu le message persuasif. Les résultats ont montré que le message unilatéral comme le message bilatéral sont d’une efficacité redoutable. En effet, tous les soldats sont convaincus après avoir entendu l’un ou l’autre message persuasif que la guerre sera plus longue qu’ils ne l’imaginaient avant. Il apparaissait, par ailleurs, que le type d’argumentation avait une influence modulée par les caractéristiques des individus : le message unilatéral semblait plus influent auprès des individus convaincus que la guerre serait courte et des individus ayant un faible niveau d’instruction, alors que le message bilatéral s’avérait plus persuasif auprès des soldats à niveau d’instruction élevé et moins convaincus du fait que la guerre serait courte. Ces résultats ont été maintes et maintes fois reproduits. Lumsdaine et Janis ont par ailleurs observé que l’argumentation bilatérale, plus que l’argumentation unilatéral, favorisait par la suite la résistance des sujets à de nouveaux changements d’attitude. Ces individus se montraient, en effet, plus résistants que les autres à une nouvelle communication persuasive destinée à les faire à nouveau changer d’attitude. Conclusion explicite ou implicite : Il semble qu’il soit préférable de livrer explicitement dans la communication persuasive la conclusion du message. Il apparaît, pourtant, que la conclusion implicite peut dans certaines Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 55 conditions s’avérer efficace, mais encore faut-il que le sujet ait une réelle motivation et des capacités cognitives suffisantes pour déduire par lui-même les conclusions d’un message qui resterait implicite. Les effets de récence et de primauté : On aurait plutôt des effets de primauté quand on a affaire à des problèmes complexes, controversés, qui intéressent le sujets, qui lui sont familiers, et plutôt des effets de récence quand les problèmes sont simples, évidents, n’intéressent que modérément le sujet et ne lui sont ni très, ni pas du tout familiers. Le contenu du message : les appels à la peur : Les résultats de laboratoire apparaissent plutôt contre-intuitifs. Janis et Feschbach (1953) ont réalisé une des premières études de laboratoire concernant l’évaluation des effets obtenus suite à l’exposition à un message ayant recours à un appel à la peur. Cette étude concernait l’hygiène dentaire. L’ensemble des participants devait, dans un premier temps, livrer à l’expérimentateur leur attitude à l’égard des pratiques d’hygiène bucco-dentaires, puis les sujets étaient répartis en 4 groupes. Un premier groupe d’individus était exposé à un message particulièrement effrayant. Un second groupe de sujets était confronté à un message moyennement effrayant. Un troisième groupe de sujets était exposé à un message peu effrayant. Les sujets du quatrième groupe n’étaient exposés à aucun message persuasif. A l’issue de ces présentations, tous entendaient des recommandations sur la meilleur façon de se brosser les dents. Une semaine après, l’ensemble des sujets devait à nouveau répondre à la question concernant leur attitude à l’égard des pratiques d’hygiène bucco-dentaire. Les résultats montrent que ce sont les sujets qui ont été exposés au message ayant le moins recours aux appels à la peur qui changent le plus d’attitude. En revanche, ceux qui ont vu et entendu un message particulièrement effrayant ne semblent pas réellement modifier leur attitude à l’égard de l’hygiène buccodentaire. Les appels à la peur ne possèdent pas l’efficacité que l’on pouvait de prime abord leur accorder. Selon Leventhal, un appel à la peur modéré conduirait le sujet à chercher à contrôler danger et à porter son attention sur le message et la source du message. En revanche, un fort appel à la peur conduirait plutôt l’individu à chercher à contrôler la peur (et non plus le danger), ce qui le pousserait à négliger, voire à nier le danger en rejetant les informations (source et message) qui lui ont été délivrées. La forme du message intervient au niveau de l’attention. L’appel à la peur aussi. Le type d’arguments utilisés intervient au niveau de la compréhension. Au niveau de l’évaluation et de l’acception ce sont les caractéristiques du récepteur qui interviennent. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 56 Les caractéristiques du récepteur Importance de la divergence entre la source et le récepteur : Quelque soit l’efficacité de la source et du message, la communication persuasive va sûrement agir sur certains récepteurs mais pas d’autres. Les récepteurs trop éloignés ne changeront pas de position. Les récepteurs très proches non plus. Les personnes qu’on arrive à convaincre sont des personnes qui ont des positions modérées. Les caractéristiques du récepteur : L’âge : les enfants sont-ils plus influençables que les adultes ? Pour l’instant, il n’y a pas de données concrètes pour répondre à cette question. Le sexe : Les femmes seraient des cibles d’influence moins sujettes à résister à un discours persuasif. Cependant, Hovalnd et Janis ont argumenté l’idée selon laquelle ces résultats sont le fait d’un processus éducatif qui, pour les femmes, serait davantage basé sur la notion de conformisme et d’obéissance. L’estime de soi : Il s’agit de la composante affective du soi qui est relative à la valeur plus ou moins élevée que l’on s’accorde à soi-même. Les résultats peuvent à première vue apparaître contradictoires. En effet, les premières études en ce domaine concluent en l’existence d’une relation négative entre l’estime de soi et la résistance à un message persuasif : les sujets à forte estime de soi résistant mieux au message persuasif que les sujets à faible estime de soi. D’autres auteurs ont montré l’existence d’une relation non linéaire entre estime de soi et changement d’attitude. Les résultats prennent la forme d’une courbe en U inversé. Apprendre au récepteur la résistance au changement : On peut apprendre une certaine résistance au changement. Par exemple, en prévenant les sujets qu’ils vont être confrontés à une communication persuasive. Deux interprétations sont possibles : soit les personnes qu’on prévient au préalable auraient tendance à contre-argumenter plus tôt, soit il s’agirait d’un changement anticipatif de la personne. Dans le second cas, face à une communication persuasive annoncée, il y a un changement anticipatif pour éviter une trop grande dissonance. La distraction : Parfois ce sont les récepteurs distraits qui sont plus influençables que les personnes attentives. Effet de la distraction par rapport au processus de changement : la distraction intervient dans la phase d’acception et d’évaluation. En effet, si la distraction intervenait plus tôt, au niveau de l’attention, il n’y aurait pas de persuasion car le récepteur n’entendrait pas le message. Distraire c’est inhiber une personne dans sa contre-argumentation. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 57 Des modèles cognitifs plus récents Concernant la persuasion, des modèles cognitifs plus récents ne considèrent plus le récepteur comme un simple auditeur qui capterait l’information qu’on lui délivre sans procéder à d’autres traitements que celui qui concerne l’information fournie par la source de la communication persuasive. Dans ces modèles, tous les paramètres d’un discours persuasif ont été intégrés, non seulement le contenu du discours lui-même, mais aussi un certain nombre de paramètres extérieurs au discours tels que la nature de la source, la clarté de l’exposé, le nombre d’arguments… Modèle de probabilité d’élaboration de Petty et Cacioppo Modèle du traitement systématique VS heuristique de Chaiken et Eagly Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 58 Théorie de la dissonance cognitive C’est une théorie qui met en évidence le besoin pour l’être humain d’avoir une certaine cohérence entre les comportements et les cognitions qu’il peut avoir. 3 points essentiels : - Il peut exister entre des éléments de connaissances des relations de dissonance ou qui ne s’accordent pas. - L’existence de la dissonance engendre des pressions qui tendent à réduire la dissonance ; il s’agit d’un état motivationnel. - L’exercice de ces pressions se traduit notamment par des changements de comportements, des changements dans la connaissance. FESTINGER (1957) a étudié l’implication psychologiques de cette théorie. Cette dernière permet de caractériser 3 types de relations entre deux cognitions : - les relations de neutralité - les relations de consonance - les relations de dissonance Partant de cette notion d’implication psychologique, Festinger propose deux postualts pour étayer la théorie de la dissonance : - le déséquilibre entre comportement et cognition provoque un état motivationnel qui amène à agir pour retrouver un équilibre, une cohérence - au plus le déséquilibre est important, au plus il y aura des actions pour diminuer la dissonance. Pour réduire une dissonance, il y a deux possibilités : - maximiser les avantages du choix que l’on fait maximiser la consonance - minimiser les informations qui vont à l’encontre du choix que l’on fait. minimiser la dissonance BEAUVOIS et JOULE vont faire le lien entre dissonance et changement d’attitude. Selon eux, la théorie de la dissonance porte sur les effets de la réalisation d’une conduite sur l’organisation des aptitudes et des croyances. 3 rapports sont possibles entre le monde des idées et celui des comportements : - le premier de ces trois rapports est conforme aux intuitions de chacun et présente un homme rationnel dont les conduites sont déterminées par ses croyances, ses idées, bref, son idéologie : - les deux autres rapports envisagés renversent cette façon de présenter l’individu pour laisser la place à un sujet dont les croyances ou les idées seraient déterminées par les conduites émises. On peut voir, dans ce cas, un individu Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 59 rationnel, qui de par son expérience, prend en compte de nouvelles informations qui le conduiront à de nouvelles croyances. - Mais, on peut voir aussi un individu rationalisant les circonstances auxquelles le hasard a pu le confronter. Il se peut, en effet, que si des circonstances amènent un individu à réaliser une conduite non conforme à ses idées, il éprouve alors de l’inconsistance qui, selon la théorie de la dissonance, est insupportable, ce qui le conduire en conséquence à reconsidérer ses idées pour les mettre en harmonie avec le comportement émis. Il s’agit bien d’un individu rationalisant et non plus d’un sujet rationnel tel qu’il nous est présenté dans les deux illustrations précédentes. Dans une expérience, on invite des sujets à réaliser une tâche inutile et rébarbative. Après avoir réalisé la tâche, les sujets doivent expliquer à d’autres sujets l’intérêt de cette tâche. Il y a deux groupes : le premier est rémunéré de manière symbolique et le second reçoit une rémunération importante. Les résultats montrent que ce sont les sujets du premier groupe qui changent le plus d’attitude. Au plus la rémunération est faible, au plus la dissonance cognitive est importante. Cela conduit à essayer de minimiser les éléments de dissonance en changeant d’attitude. Beauvois et Joule précise 4 conditions de la dissonance : - acte public : acte fait en présence d’autres personnes - acte irrévocable : la personne ne peut revenir en arrière sur sa position - acte non gratuit : impliquant des conséquences négatives sur la personne - acte décidé librement : pas de contrainte. Ces résultats sont inverses par rapport à la théorie de l’apprentissage : Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 60 Dans la théorie de l’apprentissage, le changement d’attitude est important quand la récompense est importante. Dans la théorie de la dissonance, c’est le contraire. Ce qui différencie ces deux théories, c’est l’acte décidé librement. Il existe une contrainte dans la situation d’apprentissage. Ce qui n’est pas le cas dans la théorie de la dissonance. 4.3. Communication dans les groupes Tout groupe, pour durer, pour satisfaire ses membres, pour être plus efficace adopte plus ou moins rapidement une organisation des communications. Dans ces groupes, les communications des membres entre eux obéissent à certaines règles qui sont naturellement déterminées par de nombreux facteurs : la taille du groupe, les réseaux et la structure du groupe, les contraintes de la tâche… La taille du groupe Tout d’abord, l’augmentation du nombre d’individus enrichit naturellement la somme d’informations disponibles au sein du groupe et permet d’obtenir une gamme d’opinions plus hétérogènes. Mais, au-delà d’un certain seuil, l’addition d’un individu n’ajoute plus rien, car statistiquement un groupe ne peut produire qu’un nombre déterminé de solutions et d’idées originales. Pour Hare, au niveau des communications, un groupe exige au moins 3 personnes et au plus 12 à 15 personnes, avec un optimum de 5. Le groupe de 3 serait le plus efficace pour toutes les situations où l’information traite d’un problème logique, le groupe de 6 serait préférable pour toute situation où la résolution du problème demande plusieurs solutions différentes, le groupe de 12 offrirait, lui, les possibilités d’échange les plus variées chaque fois qu’il est nécessaire de confronter des opinions et des points de vue différents. Il est évident que plus la taille du groupe augmente, plus le temps de parole alloué à chacun devient faible. De plus, du fait de la dimension du groupe, la totalité de l’information n’est plus enregistrée par tous les membres du groupe. Le temps et l’espace imposent des contraintes qui, si elles ne sont pas respectées, conduisent au clivage en sous-groupes. Du fait de l’implication d’une personne vient de sa possibilité d’exposer ses propres idées, si sont temps de parole est réduit, sa participation est plus faible, sa satisfaction sera moins grande : c’est dans les grands groupes que les sujets manifestent le plus rapidement leur désintérêt et leur mécontentement. D’autre part, à mesure que la taille du groupe augmente, la cohésion et l’accord entre les participants deviennent plus difficiles. Par ailleurs, quand la taille du groupe s’accroît, la participation des membres les plus actifs se différencie progressivement pour imposer une organisation du temps de parole, et le plus souvent seuls les individus les plus assurés prennent alors la parole. Enfin, dans un groupe tout individu fonctionne comme s’il possédait un potentiel de relation, et il atteint très vite une saturation de ces « valences communicationnelles ». Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 61 C’est donc toujours dans les groupes restreints que les individus trouvent le plus de satisfaction. Les réseaux de communication (Leavitt) Leavitt et Bavelas ont étudié différentes structures qui régissent les échanges communicationnels : Dans une de leurs expériences, les sujets sont placés par groupe de 5 autour d’une table, ils sont séparés les uns des autres par une cloison, ce qui les oblige à communiquer par écrit. Un élément important étudié est la distance de communication : dans le cas de la structure en « chaîne », il faut 4 étapes pour que A puisse communiquer avec E. AB=1, AC=2, AD=3, AE=4. La distance dA vaut donc 10 ( 1+2+3+4). dB =7 ; dC = 6 ; dD = 7 ; dE = 10. La distance totale vaut donc 40. Pour la structure en Y, la distance totale est de 36. Pour l’étoile, 32 et pour le cercle, 30. Le réseau en étoile est donc le plus efficace : le temps pour trouver la solution est plus faible, le nombre de messages est plus réduit, il y a moins d’erreurs, et l’organisation est plus stable, avec différenciation d’un rôle central. Par contre, le désintérêt est le plus rapide et le niveau de satisfaction y est le plus faible. Le réseau en cercle exige davantage de messages et entraîne donc plus d’erreurs. Cependant, l’organisation du groupe est réduite, et aucun rôle particulier ne s’y dégage. Il y a donc un meilleur maintien de l’adhésion des membres. La centralisation accroît l’efficacité du groupe et définit un rôle d’organisateur. Ces remarques nous conduisent à étudier les propriétés formelles des réseaux en fonction d’un certain nombre d’indices, qui vont nous aider à comprendre les problèmes des structures de réseaux de communication : - Indice de centralité d’un poste : il est défini par le rapport entre la somme de toutes les distances du réseau et la somme des distances du poste considéré. Plus cet indice est élevé, plus une personne a une facilité pour communiquer (rôle d’organisateur important). Dans le cas de la chaîne, l’indice de centralité pour A est de 40/10 c’est-à-dire 4. L’indice de C est de 40/6 c’est-à-dire 6.6. C est donc plus au centre que A et occupera donc un rôle d’organisateur plus important. - Indice de centralité d’un réseau : il est défini par la somme des indices de centralité de tous les postes qui composent ce réseau. Il est de 26.1 pour la chaîne, de 26.4 pour l’étoile, de 26.2 pour le Y et de 25 pour le cercle. Au plus cet indice est élevé, au plus le réseau est efficace. Toutefois, un fort indice de centralité de réseau entraîne deux aspects négatifs : une saturation du poste central qui se trouve Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 62 - - submergé par l’information et le désintérêt et le mécontentement des postes plus périphériques qui n’ont pas accès à toutes les informations. Indice de connexité d’un réseau : il est défini comme égal au plus petit nombre de canaux dont le retrait entraîne la déconnexion du réseau et conduit les postes à l’isolement. Cet indice exprime la stabilité du réseau. Au plus l’indice est faible, au plus le réseau est fragile, instable. Indice de périphéralité relative d’un poste : il est donné par la différence entre l’indice de centralité d’un poste et l’indice de centralité du poste le plus central dans le réseau. Plus cette différence est grande, plus le poste sera subordonnée au poste central. Cet indice mesure ainsi le degré d’inégalité des participants entre eux dans l’accès à l’information. Le degré de satisfaction est en relation directe avec cet indice. Il est égal à 0 dans le cercle, puisque tous les participants y sont égaux dans l’accès à l’information. Structure du groupe, réseaux et performance Flamant fait remarquer que, dans toutes les études sur les réseaux de communication, le coût minimum de résolution de chaque problème doit être étudié en termes de communications nécessaires et suffisantes. En effet, l’efficience réelle d’un groupe ne peut être évaluée qu’en tenant compte du rapport entre le coût effectif de la réalisation et le coût minimum (le nombre d’informations strictement nécessaires à la résolution du problème). Dans les expériences sur les réseaux, si celles-ci se prolongent suffisamment, le rapport coût effectif/coût minimum tend vers l’unité : dans tous les réseaux après entraînement, l’efficience devient maximum. Les différences de performances brutes résultent bien du fait que les réseaux offrent des possibilités différentes. La question reste alors posée de savoir comment un groupe choisit un modèle de résolution de la tâche et adopte une stratégie optimale de résolution en fonction des contraintes du réseau dans lequel il est placé. Flamant fait travailler les sujets en groupe dans des réseaux centralisés (en étoile) et non centralisés (tous canaux). De plus, il impose aux groupes un modèle de résolution de la tâche soit homogène, soit centralisé. L’analyse des résultats porte sur l’efficience mesurée par le rapport coût effectif/coût minimum, sur le contenu des communications au niveau de la tâche et au niveau fonctionne l(organisation, demande d’information). En structure centralisée (réseau centralisé ou homogène) : - lorsque le réseau est centralisé, le centralisateur se trouve en fait désigné par sa position dans le réseau ; Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 63 lorsque le réseau n’est pas centralisé, n’importe quel membre du groupe peut être centralisateur ; les communications sont alors relativement importantes et redondantes tant qu’un sujet ne centralise pas les informations. En structure homogène (réseau centralisé), les demandes d’informations sont relativement importantes, car les relais ont des difficultés à fonctionner correctement. En structure homogène (réseau non centralisé), il n’existe aucune difficulté d’organisation : les sujets savent qu’ils doivent envoyer leurs informations à chacun des membres, et ils n’ont aucune difficulté à résoudre le problème. - D’une manière générale, on constate une efficience plus grande dans les cas d’isomorphisme entre le modèle d’organisation et le réseau de communication (ex : organisation centralisée et réseau centralisé). Par contre, à la fin de l’expérience, l’efficience devient semblable dans toutes les situations. Tâche et organisation Faucheux et Moscovici ont cherché à montrer l’influence de la tâche dans la façon dont le groupe va communiquer et adopter une forme d’organisation optimum pour la résolution d’un problème. Deux tâches sont proposées aux groupes, différentes quant à leur nature : la première consiste à construire un maximum de figures variées à partir de 7 bâtonnets, la seconde vise à compléter des grilles de chiffres et de lettres. Alors que dans les expériences de Leavitt les groupes devaient communiquer suivant des réseaux définis dans le principe de l’expérience, les groupes ici sont confrontés aux problèmes dans aucune indication sur le type d’organisation à adopter. Les résultats observés tendent à montrer que, dans la recherche d’une solution, la nature du problème conduit le groupe à adopter une structure centralisée. Pour ce problème, les groupes qui adoptent cette organisation obtiennent les meilleures performances. Par contre, dans la construction des différentes figures, les groupes non centralisés se révèlent plus productifs, et les individus adoptent plus spontanément une structure homogène. Autres observations : - les individus sont plus redondants que les groupes : ils trouvent beaucoup de formes qu’ils ont crues différentes ; l’autocontrôle et l’autocorrection sont meilleurs en groupe. - En groupe, les individus terminent leur tâche plus vite et se rendent moins compte des difficultés - Les groupes découvrent plus de structures rares que les individus. La structure affective des groupes Tout groupe s’organise d’une façon spontanée autour des relations de sympathie ou d’antipathie qui animent les individus entre eux. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 64 Moreno a proposé de recourir à des techniques d’enquête qui permettent d’établir une image socio-affective, une radiographie de ces relations interpersonnelles à l’intérieur d’un groupe. Ces techniques sociométriques des groupes réels reposent sur une enquête individuelle des choix préférentiels des individus entre eux. Il est demandé à tous les membres du groupe, qui se connaissent déjà, avec quelles personnes ils souhaiteraient s’associer pour une activité donnée. Plusieurs conditions sont cependant nécessaires : - le groupe doit avoir une relative confiance dans l’expérimentateur ; - le but de l’enquête doit être explicitement formulé ; - l’enquête doit présenter un intérêt réel pour les participants ; - la question doit être définie par rapport à un but précis. Les triangles représentent des garçons et les ronds des filles. Les traits pointillés sont les 1ers choix, les doubles flèches, des choix réciproque. Cette représentation, appelée sociogramme, révèle pour le groupe étudié une structure sociométrique originale : il existe nettement un clivage entre deux sous-groupes constituées autour d’un leader garçon A et d’un leader fille B. Il existe aussi un 3 e sousgroupe C qui se trouve un peu à l’écart, mais qui présente une grande homogénéité puisque 2 des membres s’y choisissent réciproquement. Un sous-groupe est d’ailleurs d’autant plus stable et cohérent qu’il existe des choix réciproques dans les interrelations entre les membres qui le composent. Dans ce groupe, un individu D occupe un rôle charnière entre les sous-groupes A et B : cette fille est en effet choisie par les deux personnes centrales, elle entretien des relations avec des membres des 2 sous-groupes et son influence dans le fonctionnement du groupe est probablement importante puisqu’elle participe à la vie de ces 2 sous-groupes. Ainsi cette représentation propose une visualisation des affinités à l’intérieur d’un groupe. Chaque individu est considéré comme un « atome social », il émet un certain nombre de choix et il est choisi par d’autres. Le test éclaire le sens de ces choix et révèle l’expansivité et la popularité d’un sujet. Les personnes les plus choisies occupent une position centrale dans le groupe et sont probablement une source d’influence notable. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 65 Les personnes les moins choisies sont des isolés, des marginaux et sont susceptibles de moins participer à l’activité du groupe. Le sociogramme permet aussi de visualiser les différentes sous-organisations du groupe. Toutes les constellations expliquent l’homogénéité du groupe ou au contraire son éclatement en sous-groupes. Maisonneuve propose donc de regrouper les observations concernant les choix et les attentes de choix sous un sociogramme individuel. Une mauvaise perception des choix et des attentes de choix entraîne certainement des difficultés d’adaptation dans un groupe. Enfin, il est encore possible d’effectuer un sociogramme de rejet, dans lequel l’individu précise avec qui il ne voudrait pas se retrouver (probl. : peut accentuer des conflits). Remarques : Il est nécessaire de répéter ce genre d’études plusieurs fois avec un même groupe afin de voir son évolution dans le tps). De+, le sociogramme ne fournit pas d’information sur les raisons des relations qui unissent les personnes entre elles (mais bonne restitution de l’organisation socio-affective). Les interrelations déterminent une structure informelle, structure sous- jacente qui représente les forces dynamiques du groupe, puisqu’elle est définie par ce qui motive les personnes. Les structures informelles sont beaucoup plus efficaces que les structures officielles ; l’information y circule mieux et plus rapidement. La structure affective est importante en psychologie du travail ; on remarque que les personnes isolées sont plus souvent sujettes aux incidents, étant donné que les informations ne leur parviennent pas toujours. Les contraintes organisationnelles et institutionnelles Un groupe ne vit pas replié sur lui-même, il s’insère dans des ensembles plus vastes : une association, une organisation, une institution. Les relations entre les individus se définissent par rapport au statut et au pouvoir respectifs qu’ils ont dans l’organisation. L’individu et les groupes sociaux cherchent à optimiser leurs relations suivant des stratégies qui sont à examiner en fonction des gains et des pertes et en fonction de l’image du probable et du possible que les différents acteurs se font de leur propre situation. Cet ensemble de stratégies s’intègre au fond dans la dynamique d’un groupe et contribue à créer un état d’équilibre qui évolue selon certaines données fondamentales. 4.4. Communication dans les organisations Les fonctions de la communication dans l’organisation La communication a 4 fonctions dans les organisations : - Une fonction d’information : au travers de la communication, les travailleurs vont être informés des consignes de travail, des changements organisationnels, des diverses informations mises à disposition dans l’entreprise. Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 66 Une fonction de motivation : toutes les formes d’encouragement (positive ou négative) pour que les personnes effectuent un travail correctement, respectent les consignes. - Une fonction de contrôle : vérifier que les objectifs sont bien atteints, que l’autorité est respectée, que chacun connaît bien son rôle. - Une fonction d’expression des appréciations : communiquer les informations positives ou négatives sur le bon accomplissement du travail, sur les sources de satisfaction ou d’insatisfaction Ces 4 fonctions ne sont pas indépendantes les unes des autres. - La communication organisationnelle La communication organisationnelle est le processus par lequel l’information circule et s’échange de façon descendante, ascendante et horizontale à travers les structures formelles et informelles d’une organisation. L’information emprunte aussi bien des canaux formels qu’informels. - Les canaux de communication formels : sont des canaux de communication qui suivent la ligne d’autorité établie par la structure hiérarchique. - Les canaux de communication informels : sont des canaux de communication qui empruntent d’autres voies que la ligne d’autorité établie par la structure hiérarchique. C’est un ensemble moins structuré mais plus rapide. Le rapport entre ces deux types de canaux va dépendre des organisations. Dans les organisation où les canaux formels sont rigides et prennent beaucoup de temps, on va voir apparaître des circuits informels. Le réseau informel va soit pallier le manque des réseaux formels soit les compléter. Au plus les personnes ont des contacts entre eux, au plus le réseau informel va être riche. Deuxièmement, l’information peut circulé de 3 manières : - descendante : c’est la circulation la plus classique qui part du haut de la hiérarchie et descend vers le bas (les employés). Cette circulation est organisée formellement. Des circuits informels peuvent exister mais ils sont peu nombreux. - Ascendante : c’est la communication qui part du bas de la hiérarchie pour aller vers le haut. Cette communication est moins souvent organisée. L’organisation de cette communication est ponctuelle. Généralement, il s’agit d’enquêtes de satisfaction, de boites à idées… - Horizontale : la communication s’effectue transversalement, indépendamment de la structure hiérarchique. Elle concerne la coordination, l’échange d’informations entre équipes. Elle peut être formelle ou informelle. Les réseaux de communication peuvent être : - centralisé : le coordonnateur est au centre des flux de l’information - décentralisé : la circulation et le partage de l’information se fait par communication directe entre tous les membres du groupe. Finalement, la communication peut être interne (vers les membres de l’organisation) ou externe (vers les clients). Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 67 Les obstacles à la communication - - Le bruit ou la transformation du message : Le message initial est déformé par la perte d’information, l’appropriation du message par chaque personne dans son propre cadre conceptuel, Les choix sémantiques (cadre de référence) : Mauvais choix de mots, usage de termes hermétiques, cadre de référence différents,… Les positions hiérarchiques : La rétention de l’information (filtrage) Les sources de distraction environnementales, Les différences culturelles La quantité d’information Les messages contradictoires : Décalage entre les mots que prononce un individu et ce que révèlent ses gestes et son langage corporel. 4.5. Les technologies de l’information et de la communication (TIC) Ces dernières années, l’un des changements majeurs dans les organisations a été l’explosion des TIC. - Courrier électronique Messagerie vocale Visioconférence Intranet Internet Dans la nouvelle économie du savoir, la maîtrise de tous les aspects de la télématique devient une habileté essentielle à la réussite professionnelle. Avantages des TIC : - Travail en réseau (collectif, à distance) - Diffusion plus rapide de l’information - Mise en circulation d’un plus grand volume - Accès plus étendu et plus immédiat (archivage) - Incitation au partage des informations - Intégration des groupes et sous-groupes Inconvénients des TIC : - Médiation par la technique : dépersonnalisation - Perte des indices non verbaux - Désinhibition - Surabondance d’informations (infobésité) - Mise en question des rapports hiérarchiques - Respect vie privée et confidentialité - Vie au travail –vie hors travail Psychologie sociale de la communication Prof. C. Van de Leemput Année 2003-2004 Page 68