12 1870

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12 1870
En 1870, la France compte pour l’un des pays les plus puissants en Europe. A côté
d’elle, la Prusse est un état de taille moyenne et ambitieux mais pas encore
suffisamment fort pour être réellement inquiétant. Et pourtant… En un mois de
combats, la France est défaite, son armée a capitulé, le Second Empire s’est
effondré. Comment un tel naufrage a-t-il été possible ?
Quelles sont les causes de ce désastre militaire, économique et humain ?
On peut distinguer trois phases dans le conflit franco prussien.
- Tout d’abord, on observe une crise diplomatique intense (juillet 1870).
- Ensuite, on note un mois de combats désastreux pour la France (août 1870). Celuici s’achève par la bataille de Sedan (2 septembre 1870) et la capitulation de l’armée
française.
- Finalement, suite à l’effondrement du Second Empire, un gouvernement de
Défense Nationale va se mettre en place et continuer le combat pendant de longs
mois. Mais ce sursaut national ne servira pas à grand-chose, si ce n’est à permettre
aux troupes allemandes d’occuper une grande partie de la France et à retarder la
signature du traité de paix.
Il y a une volonté de Bismarck de mener une guerre victorieuse contre la France pour
cimenter l’unité allemande avec l’empereur prussien protestant. L’armée française
malgré les cocorico n’est pas préparée (expédition du Mexique, artillerie obsolète,
tactique « africaine », et généraux vieillissants…). Napoléon III est malade. L’Italie
verrait d’un bon œil le départ des troupes françaises. Avec l’affaire de succession,
l’Espagne ne s’opposerait pas à cette guerre.
Nous nous intéresserons principalement à la deuxième phase, c’est-à-dire celle qui
concerne la mobilisation des troupes et les batailles.
Pour expliquer simplement le déroulement des opérations, il faut savoir que l’armée
française était principalement organisée en deux armées : la première, située en
Alsace et commandée par Mac Mahon, la seconde, située en Lorraine et
commandée par Bazaine. Après la défaite de Mac Mahon en Alsace, il entame avec
son armée une retraite à travers le Nord-Est de la France. L’armée de Bazaine, par
contre, perd plusieurs batailles en Lorraine et se retranche finalement derrière les
fortifications de Metz. Au début du mois de septembre, l’armée de Mac Mahon se
retrouve à Sedan, est encerclée par l’armée allemande, livre combat et s’incline sans
avoir pu bénéficier de l’aide de l’armée de Bazaine.
La défaite de Froeschwiller est restée célèbre avec la charge de Reichoffen.
Napoléon III est fait prisonnier. Le 28 octobre Bazaine signe la reddition de Metz
sans condition avec une armée intacte, il aurait voulu sauver des vies humaines !
Le siège de Paris commence début 1871. Le 28 janvier l’armistice est signé à
Versailles. La France perd l’Alsace et la Lorraine. La commune est écrasée dans le
sang par Thiers.
Chronologie
13 juillet 1870 : Dépêche d’Ems modifiée par Bismarck. La France entière se sent
offensée.
15 juillet 1870 : Les crédits de guerre sont votés en France.
19 juillet 1870 : La France déclare la guerre à la Prusse.
6 août 1870 : Bataille de Froeschwiller (Alsace). Défaite française. L’armée de Mac
Mahon bat en retraite à travers le Nord Est de la France.
14 août – 18 août 1870 : Batailles en Lorraine. Défaites françaises.
20 août 1870 : Bazaine est coincé dans Metz.
1er septembre 1870 : Bataille de Sedan. Défaite française.
2 septembre 1870 : Capitulation de l’armée française. Napoléon III est prisonnier.
4 septembre 1870 : Proclamation de la IIIème République.
18 janvier 1871 : Proclamation de l’Empire allemand dans la galerie des Glaces à
Versailles.
10 mai 1871 : Signature du traité de paix à Francfort.
Analyse cindynique
Le culte d’infaillibilité d’une armée est souvent présent lors des guerres. Les
«glorieuses» guerres napoléoniennes du début du 19ème siècle ont eu un tel
retentissement que le soldat français de 1870 jouit encore et toujours d’une certaine
invincibilité et d’un certain prestige.
Cette idée d’invulnérabilité est aussi visible à travers la confiance aveugle accordée
aux défenses de certaines villes. Par exemple, suite à une nouvelle enceinte fortifiée,
Paris était jugée «imprenable». En ce qui concerne d’autres villes, elles possédaient
souvent des fortifications de Vauban, qui étaient efficaces dans le passé mais qui ne
résistent pas aux nouvelles artilleries.
En plus de ces idées communément admises, le culte d’infaillibilité s’observe
également à travers certaines déclarations. Un peu avant le conflit, alors que la
mobilisation se faisait dans une pagaille indescriptible, le ministre de la Guerre
annonce fièrement devant le Corps législatif : «il ne manque pas un seul bouton de
guêtre».
Les journaux appuient aussi allègrement les hommes politiques, en faisant croire que
la guerre ne serait qu’une promenade de santé.
Dans un journal catholique et légitimiste, on relève le paragraphe suivant :
« La France est en situation d’accepter la lutte sans crainte. Elle a des troupes
nombreuses, aguerries et parfaitement armées. Elle peut mettre à leur tête des
généraux expérimentés, qui ont déjà fait leurs preuves. Ses places fortes sont en état
de résister à toutes les attaques. Sa flotte n’aurait qu’à se montrer pour faire fuir celle
de la Prusse.»
Mais il y a encore bien pire que cela.
Pendant la guerre, alors que les premières défaites françaises sont annoncées, un
journaliste du quotidien Le Rappel écrit :
« Faut-il se décourager ? Non ! Nos défaites ont démontré la supériorité de l’armée
française.
Supériorité incontestable ! Il nous faut un général. Un général et les Prussiens seront
refoulés.»
Le gouvernement français a aussi fait preuve de simplisme à travers un manque
flagrant de clairvoyance diplomatique.
Ainsi, celui-ci suppose que tous les pays que la Prusse a récemment vaincus ou
annexés vont rejoindre le combat aux côtés de la France (il faut remarquer que l’on
pensait qu’ils le feraient à la vue des premiers succès français ; or il n’y en eut pas).
Mais le Danemark, le Hanovre, l’Autriche restent prudemment neutres ou ne se
soulèvent pas. Idem pour l’Italie, dont l’unité ne fut cependant possible que grâce à
l’intervention française face à l’Autriche. On comptait aussi sur la peur qu’inspirait la
Prusse protestante à tous les « petits » états d’Allemagne, surtout ceux du sud,
catholiques comme la France. Mais la réussite de la diplomatie de Bismarck fut telle
qu’ils se jetèrent tous dans le bras prussiens pour résister au péril français.
La guerre franco-prussienne devint franco-allemande.
De plus, le gouvernement français ne s’attendait pas non plus à voir toute
l’Allemagne envahir son territoire, puisqu’il pensait porter la guerre en Prusse.
Chaque pays se réfère à ses propres guerres. Ainsi, la France prend comme modèle
les guerres napoléoniennes du début du 19ème et ne tient quasiment pas compte de
la guerre entre la Prusse et le Danemark (1864) et celle entre la Prusse et l’Autriche
(1866).
Pourtant, ces deux derniers conflits sont révélateurs des intentions de la Prusse et de
sa puissance. Emile Ollivier, chef du gouvernement, déclare en juin 1870 : « à
aucune époque, la paix n’a été plus assurée qu’aujourd’hui ».
Lors de la bataille de Frœschwiller, une mauvaise coordination entre Mac Mahon et
son collègue Failly a des conséquences dramatiques. Une division de renforts n’est
pas arrivée alors qu’elle ne se trouvait pas très loin, ce qui a provoqué une infériorité
numérique non négligeable côté français (60 000 hommes contre 40 000 hommes).
Plus grave encore, alors que les forces mobiles françaises ont globalement été
divisées en deux armées, elles vont passer leur temps à temporiser car aucune ne
sait ce que fait l’autre, ni même où elles se trouvent. Ceci expliquera pourquoi
Bazaine, pourtant nommé commandant en chef, ira s’enfermer à Metz avec ses 120
000 hommes pendant que Mac-Mahon, qui en a autant, battra en retraite à travers le
Nord Est de la France, sans véritable but.
Lors de la bataille finale de Sedan, Mac Mahon ne profite pas complètement de
toutes les possibilités dont il dispose. D’éventuels renforts, présents à quelques km
des zones de combat, ne sont pas contactés.
On note deux anecdotes tristement amusantes dans le domaine de la sous-traitance,
preuve de grande naïveté.
Tout d’abord, un peu avant le début du conflit, le gouvernement français se rend
compte qu’un entrepreneur a embauché des ouvriers prussiens pour construire une
fortification dans le Nord-Est de la France. Fait marquant : l’enceinte n’avait pas été
complètement terminée ; il subsistait une brèche qui permettait officiellement le
passage de chariots.
D’autre part, on note une histoire surprenante à propos du ravitaillement. La France a
eu la mauvaise idée d'acheter les munitions à la manufacture belge d'Herstal. Elle
n’a pas pris garde du fait que le Kronprinz (fils de l’Empereur d’Allemagne) est
l'actionnaire principal de cette manufacture belge.
Les commandes de munitions ne sont pas arrivées à Sedan à temps. La
Manufacture d'Herstal a expliqué par courrier cette défaillance de livraison du fait de
la désorganisation qui régnait sur les routes à cette époque et les chariots
empêtrés… La Manufacture d'Herstal a tout de même présenté sa facture qui a été
réglée par la IIIe République.
Le pouvoir est laissé à des incompétents (Napoléon III et Bazaine) malgré leurs
expériences militaires douteuses.
Depuis les guerres d’Italie (10 ans avant la guerre franco-prussienne), Napoléon III
s’est rendu compte qu’il est relativement mauvais en terme de stratégie militaire.
Toutefois, en tant que neveu de Napoléon Ier, il est pris d’un esprit chevaleresque et
tient à diriger personnellement l’armée française au lieu de confier son
commandement à des personnes compétentes.
Après quelques jours de combats soldés pour la plupart par des défaites, Napoléon
III tombe malade et se résigne à abandonner le commandement de l’armée au
Maréchal Bazaine. Mais cette décision est également une erreur. En effet, on oublie
que Bazaine avait été le chef de l’expédition du Mexique (1861-1867), qui a été un
superbe fiasco.
On peut noter que ce qui était prévisible a priori a bien été confirmé a posteriori. En
effet, l’inertie de Bazaine pendant la guerre a été spectaculaire. Il n’utilise jamais la
supériorité numérique, ni la fraîcheur de ses troupes. Il confine son armée dans Metz
au lieu de tenter une sortie pour faire la jonction avec l’armée de Mac Mahon. Il
n’indique jamais ses intentions (peut être n’en avait-il pas ?).
Lors de la mobilisation, les axes de chemin de fer Paris-Strasbourg et MarseilleLyon-Strasbourg ont été très rapidement surchargés, entraînant des retards, des
blocages et une pagaille inimaginable.
Ainsi, quand Mac Mahon arrive en Alsace pour prendre le commandement de son
armée, il se rend compte que tout est à faire : organisation des troupes, affectation
des hommes à leurs unités respectives, fournitures d’armes, de tentes aux soldats,
etc..
Un peu après la bataille de Sedan, lorsque l’armée allemande s’approche de Paris,
la préparation du siège de la capitale s’effectue également dans l’improvisation la
plus totale.
Déficits Systémiques Cindynogènes
La défaite de 1870 s’explique par des carences incroyables à plusieurs niveaux de
décision et des déficits dans tous les axes de l’hyperespace du danger.
Le gouvernement préfère perdre la guerre et céder des territoires que courir le risque
de donner le pouvoir à des « révolutionnaires ».
La dépêche d’Ems : l’empereur ne reçoit pas l’ambassadeur Benedetti, Bismarck
manipule la situation et envenime volontairement la situation par un communiqué de
presse violent et mensonger.
La campagne d’Italie face à l’Autriche en 1859 avait faussement conduit le
commandement à penser que l’improvisation pouvait donner d’excellents résultats en
permettant l’organisation d’unités ad hoc en tout point du territoire en fonction des
menaces.
C’est ainsi qu’au moment de la déclaration de guerre à la Prusse, le commandement
français est obligé de constituer dans la précipitation les grandes unités (brigades divisions - corps d’armée) devant entrer en campagne. Cette imprévoyance causa de
très nombreux problèmes d’organisation et d’effectifs présents sous les armes au
début de la campagne. Sur un effectif théorique de 600000 hommes disponibles,
environ 280 000 seulement purent être rassemblés dans l’Est à temps pour les
premières batailles.
De plus, les précédentes guerres menées par la France (guerres coloniales,
expédition de Crimée) nécessitaient plutôt de la tactique que de la stratégie. Le
commandement français faisait donc encore la part belle à l’improvisation de ses
officiers, comptant plus sur leur esprit chevaleresque que sur leurs qualités de
technicien.
Les soldats français n’ont pas d’informations sur l’armement et le degré de
préparation de l’armée prussienne.
Un exemple fut symptomatique de l’impréparation française à une guerre subie sur
son territoire : plusieurs anecdotes rapportent que des officiers réquisitionnaient les
cartes scolaires dans les villages où ils s’installaient, faute de cartes d’état-major.
Les officiers prussiens, par contre, étaient souvent mieux équipés que leurs
homologues français et, par conséquent, mieux informés à propos du terrain et de
l’infrastructure disponible.
Faidherbe croit les ennemis plus nombreux et déterminés lorsqu’il se présente
devant Péronne.
Comptant encore une fois sur l’improvisation, l’état major français n’avait pas établi
de procédure d’évacuation et de retraite : rien ne semble avoir été établi en ce qui
concerne la destruction des points stratégiques. Ainsi, tout au long de la campagne
(c'est-à-dire de la retraite), les armées françaises laissent derrière elles, à disposition
de l’envahisseur, ponts, chemins de fer, dépôt de munitions.
On peut donner à ce sujet un exemple évocateur : l’Allemagne a récupéré toutes les
munitions stockées en Lorraine (qui auraient du servir à l’invasion de la Prusse). De
même, on peut rappeler l’histoire du chef de gare qui, sans prévenir le
commandement, évacue de Sedan vers Mézières 800 000 rations et prive du même
coup 120 000 hommes de ravitaillement pour quelques temps. Cependant, ces
mêmes soldats se rendent quelques jours après et on envoie les rations à leurs
gardiens prussiens pour tous les nourrir.
Chez les deux protagonistes, les officiers subalternes ont, semble-t-il, l’habitude de
décider eux même de la marche à suivre, sans en référer à leur commandement.
Ainsi la plupart des batailles ont été lancées à l’initiative d’officiers pressés d’en
découdre avec l’adversaire, mais sans connaître la totalité de la situation. Le résultat
est que les commandants en chef n’arrivent parfois que pour constater les résultats.
Ce comportement, qui inquiète tant les Allemands que les Français, réussit
cependant mieux aux Allemands car les appels aux renforts sont plus spontanément
suivis, tandis que les chefs d’armée français pensent sans cesse à ne pas se
dégarnir pour pouvoir battre en retraite sans ouvrir de boulevard à l’adversaire.
L’armée prussienne a su s’adapter à la guerre moderne offensive. Le
commandement français plus âgé, plus conventionnel ne prévoit pas des attaques
aussi rapides et efficaces. Cela se reproduira, hélas, en 1940.
Faidherbe bat les allemands à Bapaume mais hésite et s’arrête devant Péronne et se
rend alors qu’il pouvait gagner. A Gravelotte, Bazaine pouvait gagner mais il ordonne
le repli sur Metz.
Les services de renseignement français ont été revus eux aussi. En effet, en dépit de
la proximité de l’ennemi, les informations à son sujet sont en permanence confuses
et contradictoires. La France n’a pas analysé l’effort militaire considérable depuis
1864 en équipements modernes de l’armée prussienne.
Les canons prussiens sont en acier, chargés par la culasse, ceux des français sont
encore en bronze, chargé par la bouche.
Comme dit le dicton : « à vouloir courir plusieurs lièvres à la fois, on risque d’en
attraper aucun. »
Napoléon III, malade, se met en marche pour délivrer Bazaine mais souhaite aussi
pouvoir protéger Paris (divergence entre objectifs).
Lors de la bataille de Froeschwiller, l’armée française connaît la déroute. Afin de
couvrir la retraite de ses troupes, Mac Mahon ordonne deux charges de cavalerie,
qui s’avèrent être totalement inutiles. C’est une véritable hécatombe : les cuirassés,
bloqués dans le houblon lors de la charge, sont décimés par les soldats allemands.
On assiste ici à une véritable divergence entre objectifs et valeurs. Pour Mac Mahon,
l’esprit chevaleresque de l’armée française était une vraie valeur : l’honneur des
cuirassés passait forcément par une charge héroïque. D’autre part, l’objectif de Mac
Mahon était de sauver le maximum de troupes, et donc d’éviter ce massacre inutile.
Malgré leur patriotisme, Jules Ferry et des républicains se réjouissent de l’échec de
l’empereur et de ses armées qui permet le rétablissement de la République.
Napoléon III fait prisonnier avec 100000 hommes aurait pu traiter avec Bismarck
mais s’y refusa ne voulant pas que sa capture entraîne la capitulation de la France.
L’improvisation règne en maître. Résultat, la plupart des régiments sont incomplets,
l’artillerie insuffisante et mal approvisionnée, et l’équipement des soldats défectueux
(ils ne perçoivent par exemple pas tous la demi-tente réglementaire qui leur
permettrait de dormir au sec). Ainsi, lorsque les généraux pensent engager la lutte
avec un certain nombre d’hommes reposés et au complet, ils ont de mauvaises
surprises.
Paris s’était préparé au siège mais le rationnement fut organisé trop tard.
Napoléon III n’a jamais su se faire des alliés pour le soutenir.
Gambetta a préféré un vieux général qui a conduit les armées au désastre à un plus
jeune, Rossel, plus intrépide.
En province la résistance organisée par Gambetta ne fait pas l’unanimité, beaucoup
sont pour l’armistice. L’opposition républicaine est presque satisfaite de la défaite de
Sedan contre l’empire qui chancelle par la suite les modérés au pouvoir préfèreront
la victoire allemande à celle des révolutionnaires français.
La désorganisation mentale et matérielle sema la confusion et entraîna la France
vers la défaite.
Bazaine capitula avec une armée intacte sans raison militaire valable. Il ne comprend
pas que la capitulation de Metz, en libérant l’armée prussienne provoquera l’échec
du plan stratégique de résistance du nouveau gouvernement.
Thiers pense lui que la défaite va renforcer son prestige et assurer sa prise de
pouvoir.
Bismarck veut s’opposer à la commune de Paris qui commence pendant les
négociations d’armistice. Il s’entend avec Thiers qui commandera une répression
féroce.
L’improvisation et la confusion qui ont cours entraînent une complète désorganisation
des données. Ainsi l’on observe des officiers qui ne trouvent pas leurs troupes.
Par exemple, le Maréchal Le Boeuf, ex-ministre de la guerre, ne trouve pas sa
division ! Cela se généralise pour les officiers rappelés d’urgence des colonies,
essentiellement d’Afrique, où se trouvent les plus compétents. C’est en effet dans les
colonies que l’on se couvre de gloire et que sa carrière progresse. Il en est de même
pour les vivres, les munitions etc..
Comme dans toute situation où l’on improvise, la guerre des chefs fait rage. Un
exemple révélateur nous est fourni lors de la bataille finale qui se déroule à Sedan.
Au départ, c’est le Maréchal Mac Mahon qui commande. Mais vers 6h du matin, il est
blessé et transfère alors tous ses pouvoirs au général Ducroc.
Côté français, on se met à la recherche du nouveau commandant en chef. On le
trouve vers 7h30 (pendant ce temps là, personne ne commande…). Quand Ducroc
arrive enfin au quartier général, il ordonne la retraite générale.
Mais au moment où les troupes exécutent l’ordre, un autre général (Wimpffen) se
présente avec un mandat du président du Conseil, indiquant qu’en cas de défaillance
de Mac Mahon, le commandement doit lui être confié. Wimpffen revendique sa place
avec hauteur et Ducroc s’incline. Le nouveau commandant inverse tous les ordres du
précédent. Chaos garanti.
Pendant le mois qui précède la guerre, l’armée française souffre d’une confusion
entre mobilisation et concentration : les soldats sont envoyés le plus vite possible sur
le front, sans être affectés à un régiment, et l’on tente d’organiser les troupes sur
place. Et pendant ce temps là, les réservistes prennent leur temps pour se mettre à
disposition de l’armée.
On a déjà vu que les chefs changeaient souvent. Mais en l’absence d’objectifs bien
définis par le commandement, les officiers changent de plan sans cesse, hésitent
jusqu’à la dernière minute. La confusion augmente d’autant. Quand aux soldats, ils
sont donc confrontés à des ordres contradictoires, absurdes, inapplicables. Cela ne
peut que rejaillir à son tour sur le haut commandement. Ainsi Mac Mahon, qui tentait
de se replier sur les Vosges, doit finalement livrer en catastrophe la bataille engagée
par l’un de ses subordonnés.
L’armistice est précipité par Thiers pour éviter une prise de pouvoir des
révolutionnaires.
L’Italie et la Russie profitent des malheurs de la France pour renforcer leur unité.
L’Impératrice gère les affaires en l’absence de son époux. Le président du Conseil et
le gouvernement, marqués comme libéraux, sont rapidement remplacés par des
partisans d’un régime plus autoritaire, sans tenir compte de leurs compétences. Ils
ne vont cesser d’interférer dans les affaires militaires, et s’opposent même en
coulisse aux décisions de Napoléon. Toute décision importante doit d’abord être
validée à Paris, ce qui ralentit considérablement leur mise en application et pousse à
un certain attentisme.
Blocage du retour d’expérience : on a bien compris que les dirigeants français, tant
civils que militaires, avaient bien des choses à apprendre. Tout retour d’expérience
leur aurait été profitable, eux qui en avaient peu ou prou, et tout cas pas la bonne.
Mais leur orgueil les en a empêché. A cela, il faut ajouter les fréquents changements
de chef qui ne pouvaient que perturber tout éventuel retour d’expérience.
Conclusions
L’impréparation et l’esprit de suffisance français, ne serait-ce que parmi les
dirigeants, furent fatals à la France. Après la capitulation de l’Empereur avec la
moitié de l’armée (2 septembre), il ne reste plus que l’armée de Bazaine, qui s’est
stupidement retranché autour de Metz. Mais il se rend le 27 octobre, libérant ainsi les
armées allemandes qui partent à la conquête du pays, désormais sans armée
structurée.
La toute jeune IIIème République tente d’organiser la résistance. Mais les défaites se
succèdent. Paris, assiégé depuis le 20 septembre, affamé, épuisé, bombardé,
capitule le 28 janvier 1871. Elle se révolte de nouveau dès le 28 mars : c’est
l’épisode de la Commune de Paris dont Lénine dira plus tard s’en être inspiré pour la
révolution de 1917. La semaine sanglante (22 - 29 mai 1871) voit la reprise de Paris
par les armées républicaines, réarmées avec la permission de Bismarck.
Le 31 août 1871, après les événements de la Commune, Adolphe Thiers, est élu
Président de la République et peu à peu le régime républicain s’installe en France.
Le traité de paix est signé à Francfort le 10 mai 1871. La France abandonne l'Alsace,
la partie nord-est de la Lorraine et est condamnée à verser une contribution de
guerre de 5 milliards de francs or.
Les vainqueurs occupent certains départements frontaliers qui seront libérés dès
1873 après paiement anticipé de l'indemnité grâce aux deux emprunts réalisés sous
le gouvernement deThiers.
Ainsi, la guerre de 1870 entre la France et la toute nouvelle Allemagne s’est soldée
par une sévère humiliation de la France. Un sentiment de revanche va naître et sera
l’une des raisons du déclenchement de la première guerre mondiale, conflit encore
plus meurtrier.
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