Conscience collective du groupe ou inconscient collectif

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cours de L3
drina candilis-huisman
Initiation aux techniques de groupes.
Objectif :comment tenir compte de la dimension groupale dans les
pratiques cliniques
Introduction
1) Comment définir un groupe ?
Cohésion, Règles, Esprit, Buts, Pulsions (instincts)?
Plus subtil : son enveloppe, ses niveaux de fonctionnement,
ses fractures. (par exemple les phénomènes de panique ou chaque individu se
comporte alors comme s’il était seul).
2) Un groupe est-il « naturel » ?
Deuxième question qui renvoie aux diverses formes du groupe : la
meute, la
horde, la masse, la troupe (armée), la communauté (église) ou bien d’autres
encore. Freud pour sa part considère l’église et l’armée comme deux groupes
tout à fait prototypiques mais artificiels. Chaque religion est une religion
d’amour pour ceux qu’elle englobe et de cruauté et d’intolérance pour ceux qui
ne lui appartiennent pas. (plus la force du religieux diminue, plus le lien
libidinal qui en résulte est faible, plus grande est la cruauté et l’intolérance
envers autrui) De façon assez prémonitoire d’ailleurs Freud rapproche la
disparition du sentiment religieux de l’émergence du sentiment socialiste au
début du siècle et en prédit de très lourds mouvements d’intolérance et de
haine. (voir aussi l’avenir d’une illusion).
Comment passe-t-on de un à deux et surtout à trois ? Le modèle familial joue
sans
doute
un
rôle
dans
les
conceptualisations
de
la
dynamique
groupale (importance du père). Il est des familles « unies » et des familles
« éclatées », une famille, cela commence où et cela finit où ? pensez à ces
« superbes réunions de famille » qui font la joie des férus de généalogies et qui
réunissent dans de grandes assemblées que l’on n’ose pas appeler fête, 100, 200,
300 personnes voire plus sous l’égide d’un patriarche que personne n’a jamais
connu !
La famille en tant qu’entité en appelle très vite à l’idée d’inscription dans une
certaine temporalité et de transmission, (transmission transgénérationnelle,
intergénérationnelle, avec ses chausses trappes et ses secrets etc.. ). La famille est
elle-même constituée de sous groupe, les adultes et les enfants, les parents et les
frères et sœurs, l’étanchéité des cloisons entre les générations ayant une
certaine importance pour le devenir du groupe.
Claude Lévi-Strauss ne disait-il pas qu’un des progrès de l’humanité repose sur
le principe d’exogamie car si l’exogamie peut devenir un principe de paix et
d’alliance, c’est parce qu’elle garantit la prohibition de l’inceste. La question
de la prohibition de l’inceste est importante non seulement sur le plan social
(commercial au sens fort du terme) mais aussi sur le plan psychopathologique.
Un auteur sur lequel nous aurons souvent à revenir -Paul-Claude Racamier- a
mené toute une réflexion non seulement sur l’inceste et l’incestuel mais aussi
sur les dynamiques institutionnelles.
Le modèle familial a aussi une importance dans les prises en charge groupale,
les figures des thérapeutes pouvant devenir les supports de projections d’imago
parentales tantôt menaçantes, tantôt idéalisées, tantôt négociables ; on le
verra dans la question des thérapeutes.
3)Le groupe est-ce le début de la socialisation ?
Le groupe représente une forme d’émancipation de la famille : rejoindre le
groupe de ses pairs, y affronter les règles compétitives qui en émanent, s’en
sentir soutenu ou au contraire écrasé. Mais la socialité du groupe suppose aussi
des contraintes et des difficultés à se faire accepter (pensez à la célèbre phrase
de rousseau «, ‘ l’homme est né libre et partout il est dans les fers »). Si
Rousseau proposait un contrat social c’est bien parce qu’il se méfiait du groupe
et que le groupe représente aussi le déchaînement de la destructivité. Le contrat
est une liberté, contrairement à l’aliénation implicite dans le pacte.
4) Quelles sont les incidences du groupe sur l’individu ?
Ce que Freud appelait la bordure du social et que les théoriciens du groupe ont
cherché à définir. Finalement on verra que leurs réflexions vont aboutir à la
définition d’un sujet groupal qui présente des analogies mais aussi des
différences avec le sujet en lui-même. Ce sujet groupal, adopte en effet un
certain nombre de caractères qu’il n’aurait pas dans une relation considérée
comme duelle. Alors nous aurons à comprendre quels sont ces caractères. Est-ce
que ce sont des rôles que chacun assume à son insu et qui occupent une place
importante dans la dynamique du groupe (ou dans le psychisme du groupe),
l’individu dans le groupe est-il toujours le même ou est-il différent ? Question
posée par beaucoup sous des formes diverses (de Lewin à la psychiatrie
institutionnelle).
5) Comment utiliser le groupe dans la cure ?
Il s’agira de suivre le délicat passage entre des sciences humaines plus
concernées par le groupe que par le sujet comme l’anthropologie ou la
sociologie, voire la psychologie sociale et leur lecture par la psychanalyse. C’est
un passage qui est amorcé par Freud dans Totem et tabou en 1911 mais
clairement abordé par Psychologie des masses et analyse du moi (1921) où il
développe
à la fois une théorie de l’identification très importante pour
comprendre la naissance des processus de subjectivation et approfondit la
notion d’idéal du moi autour duquel les membres d’une communauté se
rassemblent.
À quel moment ces théories ont-elles servi de bases à de véritables prises en
charge thérapeutiques tant au niveau d’une institution qu’au niveau familial
ou individuel ? C’est ce que nous aurons à examiner en étudiant les diverses
formes de techniques que le groupe offre au thérapeute, le type de patients pour
lesquels c’est une indication ou pas, et si le groupe est un passage vers une
forme plus noble de prise en charge thérapeutique (l’or et le cuivre) ou s’il
garde une justification thérapeutique originale jusqu’au bout.
Première partie :
Foule et individu, un rapprochement possible.
<< L'opposition entre psychologie individuelle et psychologie sociale ou
psychologie des masses qui peut bien, à première vue, nous apparaître comme
très significative, perd beaucoup de son tranchant si on la considère de
façon
approfondie.
Certes,
la
psychologie
individuelle
est
fondée
sur
l'homme singulier et elle s'attache à savoir par quelles voies celui-ci,
pris
isolément,
cherche
à
accéder
à
la
satisfaction
de
ses
motions
pulsionnelles, mais ce faisant elle ne réussit que rarement et dans des
conditions exceptionnelles à faire abstraction des relations de ce sujet
singulier
avec
singulier,
les
l'autre
autres
entre
individus.
en
ligne
de
Dans
la
compte
vie
très
psychique
du
sujet
régulièrement
comme
modèle, comme objet, comme aide et comme adversaire, et, de ce fait,
la
psychologie individuelle est aussi d'emblée simultanément, une psychologie
sociale
en
ce
sens
élargi
mais
tout
à
fait
justifié.>>
Extrait
de
Psychologie collective et analyse du moi (1921) traduit par
Psychologie des masses et analyse du moi dans l'édition des
Oeuvres complètes (p.5)
La double bordure
S'il fallait commenter un peu cette phrase, je dirais
qu'elle nous introduit à une lecture de Freud qui met sans
cesse en tension la bipolarité psychique présente en chacun de
nous. Certains évoquent par exemple la nécessaire conjugaison
entre l'intrapsychique et l'interpsychique ou intersubjectif
ou encore entre narcissisme et relations objectales, mais on
peut encore aller plus loin. Freud nous montre en effet
constamment comment deux statuts communiquent: le narcissisme
primaire s'appuie sur le narcissisme de la chaîne parentale et
trans-générationnelle, mais peut-être aussi institutionnelle.
Dans Pour introduire le narcissisme, Freud écrit à propos du
"narcissisme
des
petites
différences":
"L'individu
effectivement mène une double existence, en tant qu'il est à
lui-même sa propre fin et qu'il est membre d'une chaîne à
laquelle il est assujetti sinon contre sa volonté du moins
sans la participation de celle-ci". La réalité psychique
s'appuie donc toujours sur une double bordure (que l’on pourrait
aussi comparer à une frontière), corporelle et sociale, intime d’un
côté, publique de l’autre, double bordure qui marque les
frontières de l’altérité. Le corps cet étranger-famillier à
nous-même, source des pulsions qui nous agissent sans que l’on
puisse consciemment les reconnaître, et l'autre, le social
familial, institutionnel ou culturel,
qui précède l'individu
en prédisposant les structures de la symbolisation (loi,
langage, repères identitaires).
Conscience collective du groupe ou inconscient collectif ?
Si
on
se
place
maintenant
du
point
de
vue
phénoménologique, on conçoit aisément que chacun d'entre nous
a une représentation du groupe. Cela peut être une mise en
commun des énergies, des enthousiasmes et des capacités, cela
peut être quelque chose de haïssable qui n’inspire que dédain
et volonté de s'en abstraire.
Avec les débuts de la sociologie à la fin du XIXe siècle
naît la notion d'une conscience collective du groupe.
Conscience collective dont le but est de forger des
représentations, des sentiments ou des volontés. Notion qui
naît de la philosophie politique au XIXe siècle et qui repose
sur l'idée que la conscience collective de la foule repose sur
des passions- passions généralement houleuses et engendrant le
chaos. Est-il alors possible de revenir à une harmonie où
chacun trouverait sa place et son rôle ? Telle semblait être
l’ambition
des
utopies
politiques
que
la
révolution
industrielle et plus encore la guerre de 14 ont fait naître et
que celle de 39 a balayées.
Suivons maintenant Freud dans sa lecture de Gustave Le
Bon. Pour Le Bon, la masse possède une âme collective "en
vertu de laquelle
agissent de façon
sentirait, penserait
psychologique ajoute
ses participants sentent, pensent et
toute différente de celle dont chacun
ou réagirait s'il était seul". La masse
Le Bon est un être provisoire, dont le
ciment repose sur des mobiles méconnus de ses membres à savoir
des mobiles inconscients. Tout d'abord dans la masse,
l'individu voit disparaître son sens des responsabilités
personnelles et il acquiert par la même un sentiment de toutepuissance. La personnalité consciente se caractérise par sa
disparité et non par son unicité, l'individu dans la masse est
plus perméable aux aspects inconscients de sa personnalité.
Deuxièmement, dans la masse, il y a un effet de contagion
qui repose sur des effets d'ordre hypnotique, qui fait que
l'individu sacrifiera plus volontiers son intérêt personnel
que s'il se trouvait seul. Enfin Le Bon souligne la place de
la suggestibilité, ce qui renvoie de nouveau à la question de
l'hypnose collective exercée par la masse. Il conclut que,
dans la masse, l'individu n'est plus lui-même, "il est devenu
un automate sans volonté".
Dans ces positions, on distingue aussi une hiérarchie toute
idéologique entre l'individu civilisé et le barbare, le
primitif que le sujet (re)devient dans une masse mais aussi
l'enthousiasme
et
l'héroïsme
qui
le
transportent,
les
individus peuvent se trouver transcendés par les effets de
masse, sous l'influence d'une suggestion bien menée en quelque
sorte. (Cf. texte de Le Bon, "les mots et les formules
provoquent dans l'âme des multitudes les plus formidables
tempêtes, mais ils savent aussi les calmer"-référence directe
à l’influence du prestige du meneur). C'est ce qui en principe
pourrait faire toute la différence entre la foule et le
groupe, mais pour Le Bon la masse est transitoire. Il ne range
pas dans cette notion des groupes stables comme l’appartenance
à l’église ou à l’armée où pourtant se font aussi jour des
phénomènes de groupe.
Le concept d’identification
Freud retient de cette lecture ainsi que de celle de Mc
Dougall, les deux thèses selon lesquelles dans la masse,
l'individu connaît un accroissement d'affect d'une part et une
inhibition de pensée d'autre part. La théorie psychanalytique
nous permet d’aller plus loin, pense-t-il.
Pourquoi? L'explication principale des premiers théoriciens de
la psychologie des foules reposait sur l'idée de la
suggestion(ou de l'imitation chez Tarde, ce qui revient au
même). Freud, revenant à la dimension libidinale et amoureuse
des phénomènes de masse (voir l’église ou l’armée)insiste sur
l’idée de l’ambivalence de ces mouvements passionnels au sein
de la foule.
L’ambivalence appartient de fait nous dit-il à toutes relations un peu intimes
entre deux personnes ou deux groupes, mais elle n’apparaît pas au premier
abord parce que les motions hostiles sont refoulées. On les aperçoit davantage
lorsqu‘un collègue se querelle avec un autre ou que les hommes entrent en plus
grandes
unités,
par
exemple
deux
familles
qui
marient
leurs
enfants
n’échappent pas à l’idée que chacune d’entre elles est bien plus distinguée et
meilleure que l’autre, ou bien encore, écrit-il le moindre petit canton jette sur
l’autre des regards condescendants. « Dans les aversions et les répulsions qui
sans voile, se font jour à l’égard des étrangers à proximité, nous pouvons
reconnaître l’expression d’un amour de soi, d’un narcissisme qui aspire à son
auto-affirmation et se comporte comme si la présence d’un écart par rapport
aux modalités de sa conformation individuelle entraînait une critique de ces
dernières et une invitation à les reconfigurer »(en note Freud s’interroge sur la
pérennité de tels phénomènes de haine et les rapproche de la dualité de la
pulsionalité vie-mort).
Puis dans un deuxième temps, il revient sur la nature de cette
relation d’amour-haine dans la masse et met en évidence la
coexistence de deux mouvements libidinaux constitutifs de la
masse : d’une part, l’existence d’un meneur (homme ou idée)
qui occupe la place de l’idéal du moi, et d’autre part,
l’identification qui fonde la cohésion des membres du groupe
entre eux et qui repose sur un lien amoureux d’un type
particuliers- d’un lien amoureux sans relation d’objet mais
pourtant alimenté par la pulsion.
Réfléchissant aux destins de cette phase très précoce de la
relation à l'objet (antérieure à l’oedipe même si le petit
enfant est déjà capable de deux types d’identification1), Freud
va s'appuyer sur le modèle de l'identification hystérique d'un
côté, sur celui de l'identification mélancolique d'un autre
côté mais aussi sur l'analyse de l'état amoureux.
 Dans le premier cas (ex Dora et la toux imitée de celle de
son père)l’identification est régressive, substitutive d'une
liaison d'objet libidinale.

Dans le modèle mélancolique, l'introjection de l'objet
permet tout à la fois de nier sa perte et de mettre en
évidence la dissociation du moi entre la part qui veut
conserver l'objet et l'autre qui "fait rage" contre la
première. (« L'ombre de l'objet est tombée sur le moi »).
Il reste à comprendre comment on peut passer d'un niveau
individuel à un niveau collectif. « Nous pressentons déjà que
la liaison réciproque des individus de la masse est de la
nature d’une telle identification due à une importante
communauté affective, et nous pouvons supposer que cette
communauté réside dans le mode de liaison au meneur ’ »(p.46)
Identification hystérique
En ce qui concerne l'identification hystérique, Freud met
dans ce cas de figure, sur un plan plus collectif cette fois,
les phénomènes de contagion de symptômes dans les pensionnats
de jeunes filles mais la différence entre Dora et un
pensionnat de jeunes filles tient au fait que l'identification
a lieu en dehors d'un rapport direct à l'objet.
Il développe l’exemple de la jeune fille qui, recevant une
lettre d'un amoureux qui excite sa jalousie, fait un accès
hystérique qui va intéresser ses amies au point que plusieurs
d'entre elles feront à leur tour le même accès hystérique,
bien qu'elles ne soient pas du tout concernées par la lettre
et son expéditeur.
Ce que dit Freud c'est que les jeunes filles ne s'identifient
pas seulement à leur camarade mais plutôt au fait de pouvoir
Il s’identifie à son père sur le mode de l’idéal du moi et à sa mère sur le mode de la relation
d’étayage. Dans ces deux modes pré-oedipiens il y a incorporation de l’objet – célèbre image
du cannible qui dévore ses ennemis pour en acquérir les qualités ;
1
ou de vouloir se mettre dans la même situation. C'est parce
que chacune peut nourrir le même fantasme que l'identification
se produit ainsi que la contagion des symptômes.
Il y a eu cet été dans le Monde un article fort intéressant à ce sujet
qui
s’intitulait L’étrange syndrome du bâtiment malsain (le Monde du 14 août),
qui faisait état de l’émergence de symptômes inexpliqués sur des lieux de
travail comme des irritations des muqueuses et de la peau, des signes de
fatigue et des maux de tête, touchant de façon à la fois sporadique et
récurrente le tiers des employés d’une municipalité de la région parisienne
(Villejuif en l’occurrence) entre 2004 et 2005. L’hypothèse du syndrome du
bâtiment malsain a été évoquée pour décrire un ensemble de facteurs rendant
les conditions de travail difficiles (manque d’aération, proximité avec une
population paupérisée très pressante et revendicative).
De vrais efforts
d’amélioration ont été entrepris- rénovation des bâtiments, déplacements des
agents les plus touchés etc.., mais en 2007 encore les mêmes symptômes
réapparaissent chez des agents pourtant « délocalisés » ailleurs et aux charges
de travail réduites.
Comme le dit l’article, chacun a bien compris que ce
syndrome est une formule polie pour désigner des phénomènes d’hystérie
collective. Pour certains chercheurs de l’institut de veille sanitaire (peu suspects
de positions psychanalytiques dures)
il est vain de s’échiner à la recherche de
facteurs environnementaux, mais il faut certainement s’orienter vers une
causalité d’origine psychogène ; le problème réside surtout dans les modalités
de prise en charge car les gens tolèrent très mal de genre d’hypothèse (on n ‘est
pas fou). Il se présente pourtant régulièrement des manifestations semblables
« très extraordinaires » : épidémies de malaises dans le bloc opératoire de
l’hôpital nord de Marseille ou hospitalisation de collégiens d’un collège des
Ardennes après l’évanouissement d’une élève et des déclenchements accidentels
de l’alarme incendie.
L’article cite encore un propos d’un chercheur de cet
institut qui écrit (bulletin épidémiologique hebdomadaire) : « Plus d’un siècle
après que Charcot a démontré que les hystériques n’étaient pas des simulateurs
et que Freud ait découvert l’inconscient, il nous est difficile d’accepter que nos
souffrances puissent à la fois être réelles et sans cause matérielles ». L’article
montre que ces phénomènes sont signalés depuis le moyen-êge et se multiplient
plus particulièrement dans les situations de crise en s’accrochant à des
croyances collectives telles qu’aujourd’hui la défiance envers l‘environnement.
Ainsi
l’employé
de
Villejuif
interviewé,
s’il
reconnaît
les
efforts
de
la
municipalité, ne cache pas sa défiance à l’égard des autorités sanitaires
défaillantes à l’époque de Tchernobyl, du sang contaminé, de Mururoa
etc..trouvant beaucoup trop commode ces explications 100% psychologiques.(ma
certitude c’est qu’il y a un facteur physique que l’on n’a pas encore trouvé). On
peut cependant penser comme le propose l’ethnologue Jeanne favret-Saada, que
la maladie constitue un facteur de mobilisation très puissant des autorités
responsables d’où le choix d’un tel symptôme pour attirer l’attention sur un
malaise que l’on n’arrive pas à symboliser autrement.
Identification mélancolique
Pour ce qui se rapproche de l'identification mélancolique,
Freud fait un détour par le fonctionnement amoureux. Dans un
cas comme dans l'autre, ce qui l’intéresse c'est le type de
relation réciproque entre l'objet et le moi.
Dans les deux cas, le sujet ne peut se résoudre à perdre
l'objet, il est alors conduit à vivre une dissociation du moi.
Mais dans un cas, une partie du moi se détache et s'identifie
avec un idéal du moi dont la fonction est l’auto-observation,
la conscience morale, la censure du rêve, etc.. (p. 48)
"L'être humain là où il ne peut être satisfait de son moi,
peut tout de même trouver sa satisfaction dans l'idéal du moi
différencié à partir du moi".
Ce qui se passe dans l'état amoureux présente une analogie
avec ce mécanisme mais à l'inverse pourrait-on dire. Comment
comprendre la surestimation quasi aveugle de l'objet aimé dans
l'état amoureux ? La tendance qui fausse le jugement est
l'idéalisation, mais c'est à l'objet cette fois qu'est dévolue
la fonction de remplacer l'idéal du moi. "L'objet a pour ainsi
dire consumé le moi"(p. 51).
Dans le premier cas, le moi s'est enrichi des propriétés de
l'objet, il l'a "introjecté" (notion de Ferenczi) et, dans le
second, il s'en est appauvri, il s'est abandonné à l'objet, il
a mis celui-ci à la place de sa partie constitutive la plus
importante (p.51-52).
Mais, se demande Freud, l'objet vient-il vraiment à la place
du moi ou de l'idéal du moi?
Cette fascination, cette résorption de l'initiative propre,
c'est celle que l'on retrouve dans l'hypnose : l'hypnotiseur
venant
bien
à
la
place
de
l'idéal
du
moi.
La
relation
hypnotique se comporte donc pour le sujet comme un renoncement
amoureux sans restriction d'où serait de plus exclue toute
satisfaction
sexuelle
alors
que
dans
l'état
amoureux
cette
satisfaction peut être repoussée.
L'hypnose est identique à la formation de masse en ceci
qu'elle nous permet de mieux saisir le comportement de la
masse envers le meneur. On a donc une espèce de graduation qui
se
profile
qui
part
de
l'état
amoureux
en
passant
par
l'hypnose pour finir par la masse.(voir la note E de la page
82 reprise un peu plus bas). A l’inverse, l’analyse des masses
a permis de mieux comprendre comment détacher le phénomène du
transfert du transfert hypnotique. Ce qui intéresse donc Freud
dans
l’analyse
psychologie
des
collective
masses
mais
n’est
de
pas
de
passer
par
produire
l’analyse
une
du
collectif pour revenir au sujet et à sa spécificité.
Bibliographie
Freud
Pour introduire le narcissisme (1914)
Psychologie des masses et analyse du moi (1921). Dans les
éditions complètes
Alain de Mijolla
Article identification dans le dictionnaire de psychanalyse
publié chez Calmann-Lévy
Gustave Le Bon 1895
Psychologie des masses.Librairie Alcan
Mélanie Klein
Les premiers stades du conflit oedipien et la formation du
surmoi dans la Psychanalyse des enfants (1932)
Documents
A.
Résumé
de
l’éditorial
du
Bulletin
épidémiologique
hebdomadaire de l’institut de veille sanitaire(24 avril 2007,
n°15-16)
Introduction – Les épidémies de malaises non expliqués sont des situations où des
personnes présentent les mêmes symptômes somatiques, sans cause organique et
qui s’étendent aux autres par suggestion émotionnelle. Ces phénomènes, sousestimés en France, comportent pourtant de lourdes conséquences en termes de
gestion. Dans le but de contribuer à améliorer leur prise en charge, les principales
caractéristiques de ces syndromes psychogènes sont décrites ici, en soulignant les
problèmes rencontrés lors des investigations.
Description – Ces phénomènes se manifestent par des symptômes aspécifiques,
peu évocateurs d’une étiologie particulière, peu graves et disparaissant rapidement
en quelques heures. On les observe préférentiellement chez les femmes et les
adolescents, en milieu scolaire ou sur le lieu de travail. Dans la majorité des cas, la
présence d’un facteur anxiogène déclenchant est citée, mais le facteur mis en cause
est souvent environnemental. Le mode de diffusion de ces épisodes se fait par le son
et la vue.
Discussion – Face à un événement présentant les caractéristiques décrites cidessus, il est primordial de formuler dès le début un diagnostic qui évoque la nature
psychogène de l’événement. Une prise en charge précoce et une description précise
du contexte de l’épidémie et des facteurs déclenchants peuvent concourir à
dédramatiser les faits. Une meilleure information du personnel des services
intervenants devrait permettre d’éviter une prise en charge disproportionnée et une
gestion inadaptée qui alimentent et renforcent l’anxiété collective.
B. notes E de Psychologie des masses et analyse du moi(p.82)
Comparaison état amoureux, hypnose et formation en masse avec
la névrose.(reprise ici via internet)
E.- Avant de terminer, dressons, en nous plaçant au point de vue de la libido, un tableau
comparatif des différents états dont nous venons de nous occuper : état amoureux, hypnose,
formation collective et névrose.
L'état amoureux repose sur la coexistence de tendances sexuelles déviées du but, l'objet
attirant sur lui une partie de la libido narcissique du moi. Cet état est limité au moi et à l'objet.
L'hypnose ressemble à l'état amoureux par le fait qu'elle est également limitée au moi et à
l'objet, mais elle repose principalement sur des tendances sexuelles entravées et met l'objet à
la place de l'idéal du moi.
Dans la foule ce processus subit une amplification; la foule ressemble à l'état hypnotique
par la nature des instincts qui en assurent la cohésion et par la substitution de l'objet à l'idéal
du moi ; mais, dans la foule, s'ajoute à tous ces traits l'identification de chaque individu avec
tous les autres, identification qui, primitivement, a peut-être été rendue possible, grâce à la
même attitude à l'égard de l'objet.
Ces derniers états, l'hypnose et la formation collective, sont des survivances héréditaires
de la philogénie de la libido humaine, l'hypnose ayant subsisté comme prédisposition, la foule
comme survivance directe. La substitution des tendances sexuelles entravées ou directes
favorise dans ces deux états la séparation entre le moi et l'idéal du moi, séparation qui a déjà
commencé dans l'état amoureux.
La névrose se détache de cette série. Elle repose, elle aussi, sur une particularité de
l'évolution de la libido humaine, sur ce qu'on peut appeler la double articulation de la fonction
sexuelle directe, caractère que la période de latence vient interrompre 2. Elle partage, pour
autant, avec l'hypnose et la formation collective, le caractère régressif qui est absent dans
l'état amoureux. Elle se produit toutes les fois que le passage de buts sexuels directs à des buts
2
Voir Sexualtheorie, 4e édition 1920, p. 96.
sexuels entravés n'a pas pu s'effectuer complètement, et elle correspond à un conflit entre les
tendances qui, absorbées, assimilées par le moi, ont effectué cette évolution, et des fractions
ou fragments de ces mêmes tendances qui, faisant partie de l'inconscient refoulé, exigent, tout
comme des sentiments et "des désirs complètement refoulés, leur satisfaction directe. La
névrose possède un contenu extrêmement riche, puisqu'elle embrasse, d'une part, tous les
rapports possibles entre le moi et l'objet, aussi bien ceux dans lesquels l'objet est maintenu
que ceux dans lesquels il est abandonné ou érigé dans le moi lui-même et, d'autre part, les
rapports naissant des conflits entre le moi et l'idéal du moi.
II ème cours
La dynamique des groupes et l’inconscient groupal
1.de Lewin à Anzieu
Une « discipline » de la psychologie, la psychologie sociale,
s'est instituée comme "science des groupes" distincte et de la
psychologie individuelle et de la sociologie. Le nom de Kurt
Lewin(1890-1947) est ici incontournable. Pour lui, le groupe
c'est non seulement l'interdépendance entre les individus mais
aussi
entre
les
variables
qui
interviennent
dans
le
fonctionnement
du
groupe,
le
champ
des
forces
qui
interagissent les unes sur les autres (par exemple : la
disposition des tables, la présence ou non d'observateurs
extérieurs etc..). L'individu réagit à son environnement comme
une forme sur un fond. Lewin applique à l’analyse des groupes
des éléments issus de la théorie de la Gelstalt, c’est-à-dire
de la théorie de la forme qui appartient à l’analyse des
perceptions et des représentations.
Pensez, par exemple, à une chorale. Le chanteur n'entend pas
le son produit par l'ensemble et il n'entend pas davantage sa
propre voix sauf s'il ne chante pas juste, en chœur ou à
l'unisson avec la voix de ses voisins, ou s'il y prête très
précisément attention en faisant l'effort de distinguer les
diverses voix.
Il y a pour Lewin quelque chose de naturel à ces formes que
l'on ne distingue les unes des autres qu’en y prétant
attention.
Son travail sur l'interdépendance entre l'organisation
groupale et ses conséquences sur le fonctionnement groupal est
resté célèbre lorsqu’il compare de façon expérimentale le
fonctionnement groupal entre groupe démocratique, groupe
laisser-faire et
groupe au fonctionnement rigide (qui peut
engendrer des phénomènes de bouc émissaire). D'où l'idée pour
Lewin, que le destin des interactions entre les membres d’un
groupe peut déboucher sur une mise en commun des ressources
psychologiques de chacun, et par conséquent une résolution des
tensions ou le contraire.
Dynamique des groupes idée importante qui débouche sur une
pratique : celle d’aider à la décision en recourrant à des
groupes de paroles. Le groupe c'est une série de communication
entre ses membres et il peut progresser par la mise en
évidence des perceptions que les membres du groupe ont en
commun.
Dans sa lecture des travaux de Lewin, D.Anzieu lui
reproche de n'avoir retenu de Freud qu'une explication
économique des phénomènes de groupe, le groupe comme système
de forces, mais d'avoir tout à fait ignoré le groupe comme
organisation
des
significations
inconscientes.
Lewin
ne
s'adresse qu'aux représentations issues du Moi, il ignore la
totalité de l'appareil psychique et sa force chez les
participants (ça et surmoi). Les phénomènes conscients qui
représentent la manifestation extérieure de la dynamique
groupale ne sont que la conséquence de processus inconscients
fondamentaux, à savoir qu'un nombre suffisant de fantasmes
individuels des membres sont entrés en résonance les uns avec
les autres ou que le groupe s'est cristallisé autour d'une
imago commune.
Anzieu en tire l'idée que le groupe est un lieu de création
collective d'images. Cette création collective d'images a pour
terreau commun un partage émotionnel d'autant plus puissant
qu'il n'est pas perçu par le groupe, qu'il relève d'un
inconscient groupal.
(texte issu de l’article de claude pigott sur internet sur la psychanlyse
groupale)
A partir du psychodrame ("Le psychodrame analytique chez l'enfant" date de
1956), et stimulé par les articles de S. Lebovici, R. Diatkine et E. Kestemberg
("Application de la psychanalyse à la psychothérapie de groupe et à la
psychothérapie dramatique en France" en 1952 et "Bilan de dix ans de pratique
psychodramatique chez l'enfant et chez l'adolescent" en 1958), Anzieu s'est
lancé dans une recherche psychanalytique sur les groupes de diagnostic avec la
fondation du CEFFRAP en 1962, recherche qui visait à étudier l'articulation
entre les psychés individuelles et les groupes humains. Elle a mis en évidence des
formations groupales agissantes dans l'inconscient de l'individu. L'article de
J.-B. Pontalis "Le petit groupe comme objet" (1968) en fut une émanation. En
1972, Anzieu fondait avec René Kaës, Angélo Béjarano, André Missenard et
Jean-Bertrand Pontalis la collection "Inconscient et culture" où, en plus des
auteurs déjà cités, il rendait justice à d'autres précurseurs français en ce
domaine, Simone Decobert et Michel Soulé. En 1975, avec la publication de son
ouvrage "Le groupe et l'inconscient", la psychanalyse groupale obtenait ses
lettres de noblesse. Il y abordait, entre autres, "l'analogie du groupe et du rêve,"
"L'illusion groupale", "Le groupe est une bouche...", "Le fantasme de casse...", les
organisateurs
du
groupe
et
ses
désorganisateurs,
enfin,
la
dimension
paradoxale était abordée comme "figure de la pulsion de mort". Peu après,
Anzieu a posé que "l'inconscient est structuré comme un groupe". René Kaës, a
poursuivi sa propre recherche sur la groupalité psychique et les divers niveaux
de sa représentation, ainsi que leurs niveaux de communication avec
"L'appareil psychique groupal". Son oeuvre est résumée dans son livre "Le groupe
et le sujet du groupe" (1993).
Entre les membres du groupe circulent des processus collectifs
inconscients, une interfantasmatisation selon Lebovici, qui
produit une sorte de tension commune, proche de celle qui
existe par exemple entre le jeune enfant et sa mère. Le groupe
constitue aussi pour chacun une matrice psychique, cadre de
référence de toutes les interactions qui s'y déroulent,
terreau qui permet le développement de l'individualité et non
pas sa négation.
L'individu se voit lui-même ou plutôt il voit la partie
refoulée de lui-même reflétée dans les interactions avec
d'autres membres du groupe (on pourrait dire aussi projetée
sur tous les autres membres du groupe). Il apprend à se
reconnaître lui-même par les actions qu'il exerce sur les
autres et par l'image qu'ils se font de lui (identification en
miroir).
Donc le groupe est une totalité productive de formations
psychiques spécifiques, où d'une certaine manière le sujet
disparaît dans ce qui le singularise.
Cependant comme le dit Didier Anzieu "la psychologie des
groupes change avec l'âge des personnes qui les composent,
avec leur pathologie mentale, avec la culture à laquelle elles
appartiennent".
Anzieu et Kaes se sont efforcés dans la continuité de tous ces
travaux de restituer au groupe sa valeur d'objet psychique
pour les sujets. En se référant au modèle freudien du rêve
Anzieu développe l'idée que "le groupe à l'instar du rêve est
une
modalité
majeure
d'accomplissement
des
désirs
inconscients".
Si le groupe permet en effet l'accomplissement de désirs
inaccomplis, ce ne sont pas n'importe quels désirs mais ceux
non-satisfaits dans les relations interindividuelles, dans la
vie privée ou sociale, qui sont reportés sur le groupe.
Dans le groupe, le sujet peut croire qu'il obtiendra enfin une
appartenance
définitive
et
une
reconnaissance
de
cette
appartenance pratiquement immuable (illusion groupale). Pour
Anzieu
l'illusion
groupale
est
une
quatrième
instance
de
l'illusion telle que Freud l'avait défini sous ses diverses
formes -
illusion religieuse, illusion artistique, illusion
philosophique
2. De l'expérience des petits groupes à la thérapie
groupale : l’école anglaise
Lorsque les psychologues sont confrontés dans leur pratique à
des
patients
au
sein
d’une
institution
qu’elle
soit
spécifiquement
psychothérapeutique
ou
plus
largement
un
service de santé ou d’éducation, la question se pose de savoir
que faire des effets de l’institution sur la prise en charge
individuelle.
Est-ce
que
le
le
travail
d'analyse
interprétative sera toujours orienté sur le fonctionnement
individuel
ou
sur
le
fonctionnement
groupal ? C'est
une
question dont la réponse ne dépend pas seulement de points de
vue
purement théoriques mais de la position de chacun par
rapport au groupe en général et de son niveau de dépendance à
ses propres groupes de référence. (Lire l'article sur le
groupe de Vienne autour de Freud dans le numéro spécial
d’Enfance et psy sur l’enfant et les groupes)
Lorsqu'on
aborde
la
démarche
thérapeutique
de
groupe
finalement trois solutions se présentent :
-Celle qui traite les individus dans le groupe sans tenir
compte des phénomènes groupaux.
-Celle qui tient compte de la dynamique groupale en
considérant que les effets de groupe peuvent renforcer les
effets
thérapeutiques
habituels
ou
aussi
bien
les
contrecarrer. D'où la nécessité d'un travail d'analyse du
groupe et d'évaluer les mouvements affectifs de l'individu à
l'égard du groupe
-Celle enfin, qui reconnaît le groupe comme une entité
psychologique spécifique et défend l'idée d'un processus
groupal distinct du processus individuel qui va activer
l'évolution de chacun des individus qui le composent.
En Angleterre, W.Bion considère le groupe comme une entité à
part
entière
indépendantes
ayant
des
une
individus
vie
qui
et
le
une
énergie
composent
et
propre,
doué
d'un
dynamisme évoluant pour son compte. En France J-B.Pontalis,
D.Anzieu ou R.Kaes font l'hypothèse que, de ce fait, le groupe
acquiert
un
décrivent
le
statut
véritable
fonctionnement
d'objet
groupal
à
psychique
l'aide
de
et
ils
concepts
psychanalytiques semblables à ceux qui permettent de rendre
compte
des
processus
psychiques
individuels.
C’est
à
l’articulation sans cesse à redéfinir de ces deux positions
que démarrent pendant la guerre les premières psychothérapies
groupales.
(extrait de C.Pigott)
En Angleterre, S.H. Foulkes entreprit des psychothérapies dites "psychanalytiques
de groupe" dès 1938 et fut le fondateur, après la guerre, d'un mouvement
"groupanalytique" qui connut un grand développement. Foulkes partait des
prémices que l'homme est un être éminemment social et que tout trouble
névrotique a son origine dans des relations sociales perturbées. Il fit école en
Grande-Bretagne, ainsi que dans plusieurs pays d'Europe et d'Amérique. Mais,
la figure dominante en ce domaine est, sans conteste, Wilfred Bion qui élabora
une théorisation psychanalytique groupale originale avec sa topique, ses
processus, sa métapsychologie et la jonction avec la psychanalyse individuelle.
A Bion se rattache Henry Ezriel avec la tension commune de groupe et le
dénominateur commun (fantasmatique) des groupes. Partant du groupe de
base dont la structure est protomentale et dont le "moteur" semble être une
scène
primitive
orale
très
archaïque,
Bion
découvre
des
organisations
spécifiques: les présupposés de base; la mentalité de groupe et la culture de
groupe; de plus, il considérait le groupe comme le dispositif de choix pour
l'élaboration de l'identification projective; enfin, le psychanalyste sert de pôle
transférentiel pour l'interprétation et préserve ainsi le groupe de travail. Ses
travaux eurent une influence majeure à la Tavistock Clinic dans la poursuite
de la reflexion sur la psychanalyse et les groupes.
Les travaux de W.Bion
Bion, psychiatre aux armées en Angleterre pendant la IIème
guerre mondiale est chargé d’un département qui a pour mission
d’accueillir les soldats qui ne sont plus bons pour le
service. Dans Recherches sur les petits groupes, il décrit
avec une certaine saveur cette expérience et la façon dont il
s’y prend pour rendre leur dignité à ces hommes.
Ses réflexions débouchent sur une théorie très novatrice des
groupes et dès 1948, il définit deux niveaux de fonctionnement
groupal :
-Un niveau rationnel et conscient régi par
secondaires : notion de "culture de groupe".
- Un niveau caractérisé par la prédominance
primaires, notion de "mentalité de groupe".
les
processus
des
processus
"Autrement dit la coopération consciente des membres du groupe
nécessaire à la réussite de leur entreprise requiert entre eux
une circulation émotionnelle et fantasmatique inconsciente."
D'autre part, on peut penser que l'appartenance au groupe
entraîne
nécessairement
un
état
de
régression
et
une
prévalence des affects archaïques et prégénitaux comparable au
fonctionnement psychotique, d'ou pour Bion trois présupposés
de base auxquels le groupe se soumet alternativement sans les
reconnaître.
-Dépendance : il se forme dans le groupe la conviction qu'il
est réuni pour recevoir de quelqu'un (un guide, un maître, un
thérapeute) ou de quelque chose (un idéal, une idée, une
organisation) dont il dépend de manière absolue, la sécurité
et la satisfaction de tous les besoins de ses membres. C'est
le rêve d'avoir un chef intelligent, bon et fort qui assume à
la place du groupe les responsabilités. Importance aussi du
fait que cet éventuel leader accepte ou non de jouer le jeu
"Échange d'une part de bonheur contre une part de sécurité"
(Freud dans Malaise dans la culture). La culture de groupe
correspondante à ce présupposé s'organise autour de la
recherche d'un leader plus ou moins divinisé: elle se
manifeste par de la passivité et la perte de jugement
critique.
-Attaque-fuite:
fantasme
collectif
d'attaquer
ou
d'être
attaqué: le groupe est convaincu qu'il existe un mauvais objet
interne-externe incarné dans un ennemi qui peut être soit un
membre du groupe, soit une idée mauvaise soit une idée adverse
ou erronée (ex. les kilos en trop, ou l'alcool ou la drogue).
Le groupe qui fonctionne selon de telles hypothèses trouvent
son meneur parmi des personnalités paranoïdes aptes à
alimenter ces idées et organise sa culture sur ces bases.
-Couplage : fantasme collectif qu'un être ou un événement à
venir
résoudra
tous
les
problèmes.
Espoir
messianique
d'un
enfant non encore conçu qui sauvera le groupe de ses
sentiments de haine, de destruction ou de désespoir. Espoir
qui ne doit jamais être réalisé car seul l'avenir est porteur
de telles promesses.
L'idée de Bion était que ces trois présupposés de base
n'agissent pas en même temps, c'est un phénomène proto-mental
selon lui. Le meneur de jeu dans une telle dynamique groupal a
pour objectif d'élucider (c'est à dire d'interpréter) ce qui
se passe dans le groupe, d'aider le groupe à mieux comprendre
sa situation imaginaire (cf. le succès des groupes E.Bick). On
peut aussi voir une influence kleinienne dans l'importance
qu'il accorde aux idées de persécution et de dépression dans
le groupe. Pour Anzieu, cela pointe avec justesse deux
représentations imaginaires auxquelles se heurte communément
la psychosociologie des groupes : celle de cobaye et celle
d'espion.
Ce que l'on peut conclure de ce très bref survol des idées
bioniennes relatives au groupe c'est que l'illusion groupale
présente dans tous les niveaux du fonctionnement groupal
menace l'expression proprement individuelle. On comprend aussi
à le lire que cette illusion est à la fois nécessaire et
toujours provisoire.
Bibliographie
W.R.Bion Recherches sur les petits groupes, Paris Puf 1965
Jean-bernard Chapelier Les psychothérapies de groupes, Dunod,
Paris 2000
3ème cours.
Le sujet et le groupe dans l’institution.
Les institutions psychiatriques, de façon plus ou moins
empirique,
ont
développé
l'espoir
qu'en
utilisant
les
techniques de groupe, elles pourraient dégager une énergie
bénéfique réprimée par les contraintes de la vie sociale pour
les patients hospitalisés (même idée en pédagogie, penser à
A.S.Neil ou au mouvement de la pédagogie institutionnelle dans
les années 1960). "La recherche de l'expression libre restait
le dénominateur commun de toutes ces méthodes".
S’il est vrai que la vie institutionnelle engendre des
routines institutionnelles que les gens qui travaillent auprès
des patients ne finissent même plus par penser, l’application
de techniques de groupe a pu paraître comme une solution
adaptée
pour
que
les
patients
trouvent
au
sein
de
l’institution des espaces d’expression diversifiés, mais aussi
un lieu de vie possible et encore une communauté proche des
communautés thérapeutiques moyenageuses.
1. Difficultés du travail en institution
Mais il faut aussi en mesurer les limites en particulier à
cause
de
la
spécificité
des
résistances
des
patients
chroniques en psychiatrie.
René Diatkine propose une analyse des obstacles qui se
présentent au soignant désireux de traiter de la question des
groupes en institutions. Il voit dans l'hôpital psychiatrique
le terrain privilégié de ses réflexions, et propose de garder
à l'esprit trois choses.

La psychose engage de façon très particulière le patient sa
famille et la société dans le statut qu'elle accorde au
"fou".
Il n’y a qu’à voir comment la folie des criminels suscite des
débats passionnés dans les médias, débats qui ne sont
d’ailleurs pas très clairvoyants sur les dérives dangereuses
qu’ils entraînent.(confusion entre la notion de culpabilité et
de responsabilité, exacerbation du besoin de sécurité,
insistance sur l’idée que les psychiatres chercheraient à
toujours disculper les criminels) .

De plus à l'hôpital, la relation singulière du médecin
avec son malade est largement déplacée dans le champ
institutionnel, d'où la nécessité pour celui qui
travaille avec la théorie psychanalytique de se forger
d'autres outils.
Comment penser l'implication de la psychanalyse dans le champ
institutionnel et résoudre la contradiction qui consiste à
adapter l'or pur de la parole et du silence au vil cuivre de
l'action ? Ce qui était de l’ordre d’une relation intime
devient
publique
d’une
certaine
manière
(secret
des
dossiers), ce qui est de l’ordre d’une relation duelle
devient une relation à plusieurs (notion de transfert
latéral), ce qui restait de l’ordre de la parole et de la
verbalisation peut passer par l’acte. En d’autres termes,
comment utiliser les éléments issus d’un cadre divan-fauteuil
à ce que Racamier appelle la Psychanalyse sans divan ?

Enfin à l'hôpital, il est nécessaire d’agir. Action
devant les passages à l'acte des malades, action devant
les urgences de tous ordres qui se présentent à
l'hôpital.
On se heurte alors à deux difficultés :
-le retrait des malades, retrait défensif du fait de
l'angoisse
insupportable
que
représente
tout
nouvel
investissement, ce qui rend douloureuse toute maladresse dans
les tentatives d'approche.
-la frustration qui découle de ce retrait est à certain moment
une source de déplaisir telle que ce mécanisme de défense se
substitue à l'objet dans son action persécutrice. D'où la
difficulté de trouver une attitude juste.
D'autre part, il y avait aussi un danger auquel ces tentatives
n'ont pas toujours échappé: celui de faire de la relation (ne
dirait-on pas aujourd'hui l'accompagnement?) un maître-mot qui
affadit la vigueur conceptuelle de la notion de transfert.
L'écoute n'est pas le privilège du seul thérapeute, une
telle ouverture peut se produire avec tout membre du personnel
soignant.
Le
rôle
psychothérapeutique
des
infirmiers,
infirmières et de tout le personnel soignant est donc lui
aussi à considérer. Mais la difficulté de cette relation
engendre bien souvent le sentiment que le médecin ou le
soignant qui développe une relation privilégiée avec le
patient saurait faire quelque chose de plus. Réaction partagée
mais différemment par les médecins en développant chez eux
soit la croyance en la toute-puissance de leur science, soit
la négation de toute connaissance particulière. Ainsi à des
titres divers, les différents acteurs d'une institution
peuvent se faire complices des mécanismes de répétition de la
psychose.
Ce que veut souligner ici R.Diatkine c'est qu'il ne faut
pas céder à l'illusion qu'une relation avec un soignant, avec
un autre malade ou avec un autre membre du groupe ait en-soi
une
action
curative.
Si
certains
échanges,
certaines
techniques
comportent
sans
aucun
doute
des
éléments
réparateurs, cette réparation symbolique n'a pas à elle seule
une valeur curative. La relation thérapeutique permet au
patient de trouver une autre source possible de plaisir qui
pourra être mobilisée utilement par l'interprétation d'un
thérapeute et les mutations profondes qui en découlent.
Certains changements très graduels s'obtiennent grâce à des
modifications adaptées du cadre institutionnel, mais comme
l'indique R.D. ces avancées sont toujours fragiles et
réclament beaucoup de vigilance de la part des soignants très
souvent attaqués narcissiquement dans leur position de
soignants. On retrouve alors les effets bénéfiques du groupe à
deux niveaux, le groupe des soignants dont le travail en
équipe
le
conforte
devant
les
menaces
répétées
de
désinvestissement, le groupe des malades pour enrayer la
lassitude, manifestation agressive la plus légitime du
personnel soignant
Quelles peuvent être alors les qualités d'une institution ?
Primum
non
nocere,
ne
pas
nuire
insiste
R.D.
(serment
d’hippocrate)
Cela comporte plusieurs étapes.
a)La première serait d'offrir une continuité de soins réelle.
Ce qui signifie qu'il faut s'efforcer de lutter contre la
valse des soignants présents pour peu de temps ou contre le
statut de vieil étudiant sans responsabilité réelle sur les
patients.
b) pas de terrorisme du discours théorique et plus encore du
discours analytique, nécessité de supervision des soignants
dans un autre lieu que l'institution.
c) développement d'alternatives à l'hospitalisation, autres
politiques d'implantation des unités de soins, adaptation à
l'évolution de la demande sociale.
2."Guérir l'asile pour
l’institution asilaire
guérir le malade", les alternatives à
Plusieurs écoles se sont dégagées dont les principales étaient
représentées par la "Psychothérapie institutionnelle" d'une
part et par "l'action concertée positive" d'autre part.
Il nous faut faire un peu d'histoire de la psychiatrie d'après
guerre(1945-1950) pour mieux le comprendre .
1945: 40 000 malades sont morts de faim et de froid dans les
hopitaux psychiatriques pendant la guerre.
L’asile a pu fonctionner à cette époque comme un lieu de
solidarité entre les médecins, le personnel et les malades, et
pour certains d’entre eux comme foyer de résistance contre
l'occupant. Tosquelles est un réfugié de la guerre d’Espagne,
Bonnafé, Le Guillant et bien d’autres ont adhéré au parti
communiste. D'où une sensibilité plus grande à l'égard des
patients et des interrogations nouvelles sur l'asile comme
lieu de soins.
Le mouvement français de psychothérapie institutionnelle
s'amorce dès 1945 avec la recherche d'une plate-forme commune
à toutes les institutions psychiatriques. Bonnafé y énonce
l'un des principes fondamentaux de la psychiatrie de secteur
qui sera mise en place 15 ou 20 ans plus tard: "l'unité et
l'indivisibilité de la prévention, de la prophylaxie, de la
cure et de la post-cure". Idée neuve qui consiste à penser la
folie en amont- distinction
prévention secondaire
netre
prévention
primairte
et
Les premiers pas de ce courant inauguré par Daumézon,
médecin-chef
de
la
clinique
de
Fleury-les-Aubrais,
près
d’Orléans, ont consisté à critiquer la hiérarchie hospitalière
enfermant
chaque
soignant
dans
des
castes
rigidement
subordonnées les unes aux autres(déficience, démence, folie).
C’est ainsi qu’il inaugure des réunions entre soignants puis
des réunions soignants-soignés. Puis il défend la nécessité
d'une organisation thérapeutique de la vie à l'hôpital,
"clinique d'activités" qui n'est pas encore de la "thérapie
occupationnelle". Son ambition est de tirer tout le parti
possible
de
la
vie
collective
imposée
aux
malades
et
des
multiples processus inconscients d'identification qui tissent
le groupe social.
Avec l'introduction croissante de la psychanalyse dans la
formation des psychiatres, un infléchissement se produit. Le
souci de désaliénation se fait jour mais avec des voies
idéologiques et théoriques un peu différentes à l’époque.
En 1965, Daumezon et Tosquelles fondent le mouvement de
psychothérapie institutionnelle à Saint-Alban (les Rencontres
de Saint-Alban). A Saint-Alban, asile rural situé sur les
hauts plateaux de la Lozère, Tosquelles qui y est arrivé en
1940, cherche par de multiples activités proposées aux
patients à s’ouvrir sur le monde extérieur et à tisser des
liens avec la population environnante. La vie institutionnelle
présente pour lui une différence par rapport à un lieu
uniquement défini par les soins, en privilégiant les relations
sociales du malade. Il pense pouvoir aider les « fous » à
accéder
au
registre
symbolique
dont
les
prive
leur
impossibilité à se constituer comme sujet dans le tissu interrelationnel normal.
C’est Tosquelles qui est à l’origine des sociétés des
Croix-Marine (reprises par Jolivet) d’aide à la santé mentale,
réseau d’association d’hygiène mentale où se retrouvent
aujourd’hui encore les différents intervenants du champ
psychiatrique hospitalier.
Dans ce parcours historique et héroïque (Tosquelles
pensait que les deux pieds de la pratique institutionnelle
était le psychanalytique et l’idéologique) il faut aussi faire
une place à Sivadon. Il veut réfléchir davantage à la coupure
qui existe entre l’hospitalier et l’extra-hospitalier, avec en
particulier un accent mis sur leur coordinations : psychiatrie
de secteur et psychiatrie de liaison (différence entre
l’intersocial et l’intermédical).
Avec la création de l’Elan retrouvé en 1948, puis ses
responsabilités à la clinique de la Verrière il développe un
certain
nombre
de
structures
extra-hospitalières :
consultations ambulatoires, centres de post-cure, hopitaux de
jour(le premier créé en France pour les adultes) etc.. et
diversifie les modalités de prise en charge (pour ce qui
concerne
les
enfants
les
hôpitaux
de
jour
seront
à
différencier de l’idée de lieu où renaître). Il insiste sur la
différence
entre
psychothérapie
occupationnelle
et
ergothérapie. Dans la première, il s’agit de trouver aux
malades des activités créatrices leur permettant de reprendre
pied avec le monde concret, dans la seconde, il y a
sociothérapie sous forme de groupe sous la direction d’un
responsable. Autre originalité, un service d’hydrothérapie axé
sur les soins corporels.
Souci de désaliénation qui est encore celui de Jean Oury,
celle du malade étant inséparable de celle de la structure
institutionnelle, c’est ce sur quoi il réfléchit et travaille
depuis plus de 50 ans (1953) à la Clinique de La Borde.
Quelques principes résument brièvement ici son approche :
 Le cadre asilaire se caractérise par son hétérogénéité. Il

veut souligner par là l’importance pour un soignant de ne
pas être en charge que des seules pathologies très lourdes,
mais
de
pouvoir
être
confronté
à
des
pathologies
diverses.Difficultés extrèmes pour les familles qui voient
toujours dans leur proches le moins « fou » du service.
Question de regard posé sur l’aliénation et l’alterité.
Libre circulation des patients à travers tous les espaces de
l’institution y compris ceux réservés aux soigants, ce qui
multiplie les occasions d’échanges mais aussi de conflits.

Les clubs thérapeutiques considérés comme des outils majeurs
du décloisonnement vont être un pillier de l’action
institutionnelle dans la mesure où les malades sont
associés à leur gestion.
Les bénéfices de la prise en compte de la réalité d’une
activité ont été largement théorisés par Guattari qui vivait
lui aussi à La Borde. Poursuivant et prolongeant la réflexion
de ses aînés sur la collaboration soignant-soigné, Oury
propose la notion de « collectif soignant » où les positions
des uns et des autres ne sont pas fixes, la fonction soignante
étant partagée entre les médecins, les infirmiers et les
autres.
 Dernière notion : celle de transfert institutionnel.
Je cite ici un extrait de l’article de l’EMC sur les
thérapeutiques institutionnelles malades (37930 G 10).
« Il s’agit d’élaborer une stratégie institutionnelle prenant
pour but de décrypter les manifestations transférentielles
propres aux psychotiques en institution. Si dans la cure des
névrosés, l’efficacité de l’analyse se mesure à la possibilité
de lier et de délier une « névrose de transfert » (obstacle à
la guérison selon Freud mais qui peut devenir le levier de
notre action), en ce qui concerne les patients psychotiques,
il faut tenir compte chez ces malades très régressés de leur
manière imparfaite d’accèder à la relation à l’autre. G.Pankow
pose le problème de la délimitation du corps chez le
psychotique, ce qui amène qu’à partir d’une image de
morcellement, le transfert du psychotique ne peut se produire
que
d’une
manière
éclatée,
dissociée
(oury),
ou
multiréférentielle (tosquelles ). L’institution hospitalière,
qui va offrir différents supports aux transferts des malades
va provoquer un éclatement, un éparpillement des trasnferts
que l’analyse institutionnelle se doit de détecter afin de
rétablir la libre circulation de l’information entre les
personnes supports de transfert. En quelque sorte, cela a
valeur d’interprétation qu’il faut ou non délivrer aux
patients.
En
lui
renvoyant
ses
différentes
facettes
réarticulées, l’institution l’invite à nouer entre eux les
différents transferts qu’il y effectue ».
Donc
importance
pour
Oury
du
concept
d’analyse
institutionnelle, qui est pour lui une manière d’instaurer un
rapport critique avec les pratiques institutionnelles de
groupe.
Des
divergences
théoriques
ont
néanmoins
traversé
la
communauté psychiatrique quant aux références à privilégier et
à la place du psychanalyste dans l’institution. Lacaniens d’un
côté, non-lacaniens de l’autre se sont divisés sur des
pratiques et une compréhension des mouvements transférentiels
ce qui a permis à Racamier, autre pionnier (non-lacanien) de
la psychothérapie institutionnelle de caractériser ainsi les
diverses attitudes du psychanalyste dans l'institution :
Noble étranger, consultant familier, élément intégré ou leader
sont les quatre niveaux d'intégration du psychanalyste à
l'institution (Cf. p.118). Ce qui est implicite ici c’est de
recuser l’ambiguité de cumuler les rôles de psychiatre, de
directeur d’hôpital et de psychanalyste. Une des réponses
possibles serait pour un tel soignant de ne pas participer aux
réunions institutionelles.
Dernière démarche sur
Lebovici, qui insiste
laquelle je m’arréterai : celle de
sur la nécessaire non-confusion des
rôles entre les soignants, la responsabilité du psychanalyste
consistant à assurer une psycho-didactique de groupe au niveau
des soignants. Lebovici (avec Diatkine, Kestemberg, Paumelle,
Cahn etc...) développe aussi de façon considérable toute une
organisation de soins non asilaires avec une politique de
santé mentale de secteur dont l'expérience pilote est celle du
XIIIème arrondissement de Paris, qui à l’époque était un
quartier très défavorisé de Paris. Le souci de cette équipe
consistait à tenter de mettre la psychanalyse au service de la
population et en particulier des enfants et des adolescents,
tout
en
renouvellant
l’approche
diagnostique
et
psychopathologique des troubles de l’enfance (classification
de Mises) : hôpitaux de jour pour enfants, unités du soir,
association de la psychanalyse et de la recherche étaient des
principes très novateurs à l’époque .
Son travail a été poursuivi par de nombreux analystes
d’enfants et d’adolescents qui ont théorisé l’institution
thérapeutique comme la possibilité d’offrir à l’enfant un
véritable espace transitionnel qui lui aurait manqué dans ses
realtions avec son entourage (R. Cahn ou P.Jeammet ou encore
Bernard Penot)avec comme objectif fondamental de favoriser les
liaisons entre les soins et la psychothérapie, objectif qui il
faut quand même le dire n’est pas toujours facile à remplir
(Bion nous l’avait déjà montré).
Plusieurs articles de ces différents auteurs insistent sur la
spécificité collective nécessaire à la prise en charge des graves
troubles de l’adolescence. Voici par exemple ce qu’écrit Bernard
Penot dans la RFP portant sur le thème Psychanalyse et
institutions
« On ne saurait trop insister sur l’importance pour une
institution thérapeutique se proposant d’aider les jeunes à
surmonter un défaut grave de subjectivation, de ne pas seulement
se concevoir comme un lieu de parole avec des séances ou des
actes techniques, aussi fréquents soient-ils ; mais avant tout
comme un espace pour vivre qui permette la naissance d’un
discours échangeable à partir de l’expérience vécue. On pourrait
dire la fabrication ensemble d’un discours mythique existentiel..
Mais pour favoriser un tel avènement de parole, une équipe
soignante ne doit pas seulement s’employer à partager des
activités quotidiennes de vie ; elle doit en même temps se concevoir
comme support possible d’une reprise (au deux sens du terme) des
défectuosités de chaque cas- à partir précisément du transfert de
celles-ci dans le milieu institutionnel. »
Il signifie par là que les effets du transfert d’un jeune patient
psychotique sur une institution nécessite que cette institution les
analyse et que chaque soignant puisse en prendre sa part. Les
réunions de synthèse sont le lieu classique d’élaboration de ces
contre-attitudes de l’institution vis-à-vis d’un patient mais elles
sont loin de pouvoir éviter les conflits et les clivages dans les
équipes. Il évoque les rapports de rejet-exclusion et de
disqualification qui traversent les membres d’une équipe même si
les personnes ont l’habitude de travailler ensemble depuis
longtemps. Il préconise que ce temps de réunion et de travail de
l’équipe soit un temps où puissent être suspendus les savoirs
supposés de chacun .
Le terme de contre-attitude n’est en réalité pas très approprié
pour qualifier de manière claire la nature des réactions qui se
jouent entre les soignants et les patients. Penot parle d’une
véritable aliénation mutuelle qui doit se répéter dans l’intérêt le
patient afin que puissent émerger d’autres modalités de lien, et le
désenclaver petit à petit des aliénations premières qu’il a connues
dans sa famille. Ce n’est pas d’ailleurs en lui interprétant cette
répétition que le patient s’en dégage , mais c’est entre soignants
que le travail d’élaboration peut se faire (un peu comme lors de
la reprise d’une séance de psychodrame)
« L’effort commun de mise en représentations et en mots tend
à produire la restitution en termes significatifs des repères qui ont
manqué au jeune pour pouvoir se représenter et s’approprier
subjectivement son expérience singulière. Tout se passe comme si
cette mise en chantier des espaces psychiques des soignants
donnait au patient la possibilité de se saisir de représentations
mentales pour son usage propre ».
Proche des analyses d’Oury, Penot s’en écarte en mettant
l’accent sur le processus de subjectivation et ses nombreux avatars
dans l’institution. Ce qui se joue entre le jeune psychotique et les
soignants ne relève pas d’un scénario fantasmatique bien reglé
mais de processus bien plus primaires que Penot désigne sous le
nom de transfert subjectal. « La position subjective du thérapeute
tend plutôt à réactualiser cet agent pulsionnel premier, extérieur
à la personne propre et dont va dépendre le besoin qu’a celle-ci
d’être regardée, prise en mains etc. ». un peu comme les bébés
battus placés très jeunes dans des familles d’accueil et qui revivent
dans la famille d’accueil les mauvais traitements qui ont justifié
leur placement. De tels phénomènes « psychotiques» d’induction
répétitive se retrouvent également dans des comportements
collectifs de certaines communautés ethniques.
« Tout se passe comme si , écrit encore Penot, la transmission
transgénérationnelle de certaines données traumatiques de
l’histoire avait subi une sorte de gel, de fossilisation, donnant un
narcissisme figé
qui induit une répétition comportementale
aveugle et souvent violente, et surtout, refractaire à tout travail
de réappropriation subjective et de transformation symbolique
(p.1086) ».
Relisant le séminaire de Lacan sur la lettre volée, il insiste
sur le fait que c’est le récit de Poe qui nous permet de saisir comme
de l’extérieur le mécanisme de l’attitude subjective de chaque
personnage. La synthèse instutionnelle aurait cette fonction de
permettre de mieux saisir la distribution transférentielle
habituelle autour d’un psychotique et d’en lever les aspects de
méconnaissance pour chacun.(on s’écarte à nouveau ici des
réunions soignants-soignés préconisées par Oury).
Autre exemple : l’hôipital de jour pour enfant de l’entraide
universitaire fondé dans le 12ème arr. par Francine Klein et
actuellement dirigé par Denys Ribas. C’est donc un hôpital de jour
et non pas un lieu, qui veut privilégier le travail avec les familles
plutôt que la socialisation ou la scolarisation des enfants tout en
se méfiant d’une psychiatrisation trop précoce de l’enfant. Il joue
la carte de l’action conjointe de la psychothérapie et de l’action
scolaire mais cela demande un psychanalyste d’enfant compétent
et disponible (3 à 4 fois par semaine) et des enseignants
concernés. On ne donne plus aux mères le conseil de faire une
psychanalyse, depuis Meltzer on sait que le temps passé dans
l’autisme est perdu pour la maturation et que par conséquent il
faut solliciter l’enfant lorsqu’il se replie dans les stéréotypies. Pour
Ribas la stimulationpar le groupe d’enfant est sans doute le
moyen le plus efficace et la violence la moins illégitime pour
casser la carapace autistique .
Certains , comme Jacques Hochmann à Lyon , ont organisé
un triatement ambulatoire intensif avec des moements de groupe
thérapeutique et une scolarisation en milieu ordinaire .
avantages : a) un coût moindreb) éviter les pesanteurs
institutionnelles. Mais les CATTP (cetre d’accueil thérapeutique à
temps partiel) présente quand même les mêmes con,traintes que la
solution thérapêutique privée. Depuis Kanner on a décrit les
parents comme des intello rigides et froids recherchant des
solutions dans tous les EU (la moitiés étant constitué de psy !!). en
réalité les parents d’autistes présentent toutes les organisations
mentales possibles, sains et lucides, mais aussi malades ou pauvres
oàu
encore
isolés.
Dans
ces
dernières
situations,
l’institutionnalisation est un vrai recours. Mais Ribas soulève
aussi toute la difficulté de l’alliance thérapeutique avec la
famille. Au passage, Ribas préconise de stimuler précocément et
sérieusement ces enfants sans attendre que cela s’arrange tout
seul. La scolarisation peut exister dans l’institution mais cela ne
dispense pas de tenter une scolarisation en mileu habituel à temps
partiel proche du domicile des parents si cela est possible.
Finalement l’effet mobilisateur des groupes est très important
comme un emboîtement de cdiverses enveloppes psychiques qui
exercent de façon combinée leur fonction.
Au terme de cette partie je voudrais insister sur une idée qui
finalement apparaît de façon assez originale me semble-t-il, dans
cette
approche sur les processus de subjectivation chez les
adolescents psychotiques. Il me semble en effet qu’en rapprochant
ainsi l’adolescent du bébé on peut poser l’hypothèse que la
naissance des processus de subjectivation est d’emblée collective et
non individuelle comme on aurait trop tendance à le penser si on
ne privilégiait que la piste pulsionnelle.
Depuis le début du cours , nous avons croisé à plusieurs
reprises l’importance que les techniques de psychodrame ont eu
pour la formation et la réflexion des soignants confrontés à la vie
institutionnelle. Il est maintenant d’examiner ce que l’on peut en
tirer.
FIN DE LA PREMIERE PARTIE DU COURS
MISE SUR LE SITE FIN OCTOBRE 2010
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