La température et la chaleur

publicité
La température et la chaleur
Lorsqu'on chauffe (ou si on refroidit) de l'eau, elle peut changer d'état. Les
forces de cohésion ne sont donc pas seules responsables de l'aspect d'un
corps.
En chauffant de l'eau, on lui apporte de l'énergie qui est "stockée" sous forme
d'énergie vibratoire. Si les vibrations sont trop importantes, l'édifice est
détruit.
La température est donc une mesure du degré d'agitation intime de la matière.
Quelques exemples de températures.
Surface du soleil: 5 500 °C
Centre du soleil: 15 000 000 °C
Ébullition de l'eau: 100 °C
Fusion de la glace: 0 °C
Fusion du mercure: - 30 °C
Notre échelle de température (degrés Celsius ou centigrades) a été définie par
rapport à l'eau.
Avant le XVIIème siècle, on se contentait d'analyses simples pour comparer
les chaleurs (notions qualitatives comme "plus ou moins chaud" ou "plus ou
moins froid"). Puis, le phénomène de la dilatation (et de la contraction) permit
enfin de relier la température et la chaleur. En effet, dans la plupart des cas,
un apport de chaleur est accompagné d'une augmentation de volume (et de
température) du corps chauffé.
En 1603, Galilée inventa le thermomètre qui mesure indirectement la
température, grâce à la dilatation. Les échanges de chaleur furent alors reliés
avec les variations d'énergie thermique. Plus tard, vers le milieu du XVIIème
siècle, on perfectionna les thermomètres en les rendant insensibles aux
variations de la pression atmosphérique (Boyle, Ferdinand II, Amontons).
Puis, en 1714, Fahrenheit combina des systèmes de thermomètres pour créer
son thermomètre à bulbe de mercure: il y ajouta une échelle graduée
permettant la lecture directe. En 1858, Wunderlich étudia systématiquement
la température du corps des malades. Par la suite Allbut adapta le
thermomètre médical pour étudier le domaine des températures du corps
humain (graduations de 35 à 42 0C).
En ce qui concerne les unités, la plupart des scientifiques européens ont
choisis les degrés Celsius (0C : l'échelle fut proposée en 1742 par le Suédois
Celsius). Dans ces unités, l'eau liquide peut se trouver entre 0 et 100 0C (sous
les conditions "normales" de la pression atmosphérique). Mais, en physique,
on préfère utiliser les degrés Kelvin. Ce choix est principalement motivé par
le fait qu'il y a une limite inférieure pour les températures minimales
observables dans la nature (dans l'échelle Kelvin, il n'existe pas de
température négative; la limite est à 0 K = -273 0C , environ).
Les deux théories de la chaleur
La première théorie considère que la chaleur "s'écoule" des hautes
températures vers les basses températures, et qu'en définitive il se crée un
équilibre thermique (un peu comme de l'eau contenue dans deux récipients
reliés par un tuyau: l'eau du niveau élevé a tendance à s'écouler vers le niveau
le plus bas; finalement, on observera un équilibre entre les deux niveaux).
Vers 1760, on établit un lien entre la chaleur, la température et la substance
d'un corps chauffé (par exemple: il faut fournir trois fois plus de chaleur à 1
gramme de fer qu'à 1 gramme de plomb pour obtenir une élévation de
température de 1 OC). De plus, il observa parfois que la substance changeait
d'état (par exemple: un glaçon d'eau solide à 0 OC est chauffé jusqu'à ce qu'il
devienne entièrement liquide; mais il reste à la température de 0 OC).
À la même époque, les scientifiques s'interrogeaient sur la véritable nature de
la chaleur, notamment lors des expériences avec les machines à vapeur. La
théorie calorique considérait que la chaleur était une substance matérielle qui
pouvait être soit ajoutée, soit enlevée, soit transférée d'un corps à l'autre (par
analogie avec l'écoulement de l'eau entre différents niveaux). Mais une
deuxième théorie était aussi discutée: la théorie cinétique de la chaleur, pour
laquelle la chaleur était une manifestation des vibrations microscopiques
internes de la substance chauffée. En 1798, Rumford étudia les frottements
mécaniques et il émit l'hypothèse que les vibrations engendrées par les
frottements étaient transformées en chaleur. L'année suivante, on fit une
expérience au cours de laquelle un système mécanique générait le frottement
de deux blocs de glace. On observa alors que la glace fondait, ce qui semblait
confirmer les suggestions de Rumford. Les deux théories de la chaleur vont
coexister jusqu'au milieu du XIXème siècle. Puis, la théorie calorique va
s'effacer devant la théorie cinétique des vibrations internes.
Découvertes scientifiques dues à la théorie calorique
Malgré ses défauts, la première théorie de la chaleur nous a apporté quelques
résultats intéressants.
En 1824, Fourrier et Carnot firent des expériences avec les machines à vapeur
et fondèrent alors la thermodynamique (science des "mouvements de la
chaleur").
Un peu plus tard, Joule essaya de transformer diverses formes d'énergie
mécaniques et électriques en chaleur. Il constata que le travail fourni était
proportionnel à la quantité de chaleur dégagée: c'est l'équivalent mécanique
de la chaleur. Joule a ainsi montré que le travail et la chaleur sont des formes
d'énergie.
Suite à ces travaux, les physiciens ont postulé le principe général de
conservation de l'énergie totale mise en jeu lors des transformations d'énergie.
En effet, une énergie fournie peut être transformée et utilisée sous d'autres
formes. Le bilan total n'est ni positif, ni négatif. Bien souvent, la chaleur est
une énergie "perdue" et inutilisable (par exemple: les frottements d'un moteur
libèrent de la chaleur, ce qui diminue son rendement). Malgré les expériences
convaincantes de Mayer (en 1842, dans le domaine des transformations et
conservation d'énergie) ce ne sera qu'en 1847 que Helmholtz réussira à faire
admettre au monde scientifique cette loi de la conservation de l'énergie
(premier principe de la thermodynamique).
Ensuite, Clausius énonça le deuxième principe de la thermodynamique: lors
d'un processus accompagné d'un flux d'énergie, il y a toujours inévitablement
des pertes (par exemple dans le moteur d'une machine à vapeur, lors de la
transformation de chaleur en énergie mécanique). Clausius distingua la
capacité d'un système à fournir du travail et la fraction d'énergie qui est
inévitablement dissipée sous forme de chaleur non utilisable. L'énergie libre
caractérisa la fraction d'énergie utilisable et l'entropie la fraction calorique
dissipée. Le deuxième principe de la thermodynamique exprime le fait que,
dans la nature, la tendance d'un système isolé est d'augmenter l'entropie totale
de l'univers.
Ces principes sont toujours valables de nos jours. Mais il est étonnant de
constater qu'ils sont issus d'une théorie qui montra ses limites déjà vers la fin
du XIXème siècle! Néanmoins, nous verrons que la deuxième théorie de la
chaleur permet aussi une formulation de ces principes thermodynamiques.
La théorie cinétique: chaleur et mouvements des molécules
En 1738 Bernouilli avait déjà réussi à expliquer les propriétés des gaz en
termes de mouvements, collisions, etc. Mais ce ne sera qu'avec l'essor de la
théorie atomique (Dalton, 1808) que notre compréhension des phénomènes
deviendra meilleure. En effet, on réalisa alors que l'énergie des mouvements
désordonnés des atomes d'un corps chauffé se manifestait globalement sous
forme de chaleur.
Au milieu du XIXème siècle, Maxwell et Boltzmann créèrent la théorie
cinétique des gaz dans laquelle une description statistique des mouvements
moléculaires permit d'expliquer toutes les grandeurs caractéristiques des gaz
(pression, température, énergie, etc). Il devint clair, ensuite, que la chaleur
était assimilable à une forme de vibration interne (agitations désordonnées des
molécules dans les gaz et les liquides; mouvements plus ordonnés dans les
solides). De plus, on put expliquer pourquoi il fallait fournir de la chaleur à la
glace que l'on désirait faire fondre. En effet, à l'état solide les liaisons entre les
atomes sont plus rigides et plus fortes qu'à l'état liquide. La chaleur fournie
représente ainsi l'énergie nécessaire pour "briser les liaisons solides" lors de la
fusion de la glace (chaleur latente de fusion).
Lors de la vaporisation, un même type de phénomène se produit. Pour qu'un
liquide se transforme entièrement en gaz, il faut lui fournir de l'énergie car les
liaisons moléculaires d'un liquide sont plus fortes que celles d'un gaz (chaleur
latente de vaporisation). Finalement, une interprétation statistique de la
température est livrée par la théorie cinétique de la chaleur. La température
d'une substance représente l'énergie moyenne d'une molécule, alors que la
chaleur est l'énergie totale résultant du mouvement d'ensemble de toutes les
molécules. Par exemple, 2 litres d'eau à 70 OC peuvent libérer globalement 2
fois plus de chaleur que 1 litre à 70 OC. Mais, pour chacun des deux
récipients, la valeur moyenne de l'énergie cinétique (vitesse) d'une molécule
est la même.
En 1876, Gibbs développa la thermodynamique chimique. Cette théorie
permit de calculer l'énergie chimique d'une substance et de prévoir les
énergies de liaison des composés chimiques. Par exemple lors de la
combustion du bois, on brise les liaisons des atomes de carbone du bois. Mais
l'oxygène de l'air va se combiner avec le carbone (en formant un gaz, le CO2).
Le bilan énergétique est positif, ce qui explique que le surplus d'énergie
apparaît sous forme de chaleur et de lumière. L'industrie chimique utilise la
théorie de Gibbs, notamment les règles de phases qui fournissent des lois
d'équilibre entre les différentes substances (comme par exemple une solution
d'un solide dans un liquide; ou une solution de deux liquides non miscibles,
etc).
Auteur: Michel Testaz
Source: www.unil.ch/sc
Téléchargement