Titre III : La forme du contrat Section 1 - Le droit actuel : Le principe du consensualisme §1 : Le contenu du principe du consensualisme Les conditions de forme ne sont pas évoquées à l’article 1108 du Code civil. Cela signifie donc, qu’il n’y a pas de conditions de forme exigée pour la validité du contrat. Cela découle du principe du consensualisme. Ce principe signifie schématiquement que le contrat est formé par le seul échange des volontés sans que des conditions de formes soient exigées pour la validité du contrat. Ce constat ne constitue qu’une manifestation du principe de l’autonomie de la volonté. Certains auteurs ont mis en avant les avantages et les inconvénients de la prépondérance d’un tel principe. Tout d’abord, les avantages. D’un point de vue moral, le consensualisme exalte le pouvoir de la volonté, le respect de la parole donnée. Il en résulte qu’un contractant ne pourra pas chercher à échapper à des obligations sous le prétexte que telle ou telle forme n’est pas respectée. Le consensualisme privilégie donc la bonne foi contractuelle. D’un point de vue économique, le consensualisme est facteur de simplicité, de rapidité et même un facteur d’économie. En effet, l’exigence de formalités strictes est souvent synonyme de coûts supplémentaires pour les contractants. Il ne faut pas néanmoins, négliger certains inconvénients d’un tel principe. Ainsi, dans la pratique, une absence de formalités particulières risque de donner un consentement à la légère. C'est-à-dire sans que le contractant ait suffisamment étudié le contenu des obligations. Une porte est donc ouverte aux abus voir à des manœuvres frauduleuses de la part d’un contractant. En effet, il est plus facile de tromper un contractant lorsqu’il n’y a pas de condition de forme ! De plus, le formalisme se révèle protecteur de la volonté car il protège le contractant contre lui-même et contre son partenaire. Enfin, d’un point vu purement économique, le consensualisme ne laisse aucune trace donc il devient difficile en cas de désaccord ultérieur de faire la preuve de la réalité des engagements. §2 : Les limites du consensualisme La limite du consensualisme s’explique par le développement d’un certain formalisme dans notre droit. Ce formalisme peut être direct ou indirect. A ) Le formalisme direct Le formalisme direct correspond à l’hypothèse où le consensualisme est mis en échec par le législateur lui-même. Ce dernier va poser pour certains contrats, une condition de validité supplémentaire. On parle alors de contrat formaliste. Il en existe deux types : le contrat solennel et le contrat réel. Le contrat solennel est celui où la volonté des parties doit s’extérioriser à partir d’une formalité précisée sous peine de nullité. En pratique, la forme requise peut être un AA ou un ASSP. Les objectifs du législateur d’imposer un AA peuvent être diverses. Le législateur poursuit simultanément la défense de plusieurs intérêts. En effet, il peut chercher à protéger les intérêts d’une partie en favorisant leur information et leur réflexion. Il peut aussi vouloir protéger l’intérêt de la famille de l’une des parties voir même ceux des tiers ou de l’Etat lui-même. C’est pour ces raisons qu’un acte devra être constaté officiellement par l’autorité publique. Le contrat sera passé devant notaire. Initialement, le code civil ne visait que la donation (art. 931), la subrogation conventionnelle par le débiteur (art. 1250), le contrat de mariage (art. 1394) et la constitution d’hypothèque (art. 2416). Le législateur moderne a ajouté quelques autres contrats, comme la vente d’immeuble à construire à usage d’habitation ou professionnel et d’habitation (CCH, art L 261-11) ou encore le contrat de location-cession à la propriété (Loi du 12 juillet 1984). Dans le but d’éviter que le formalisme soit aisément tourné, la promesse de contrat solennel est elle aussi soumise à la même forme notariée, sauf quand l’authenticité n’est exigée que dans l’intérêt des tiers. Même si cela ne concerne pas notre matière, il est à noter que dans certains cas, la JP a écarté cette condition de forme. Les juges ont ainsi nié certaines conditions de formes pour certaines donations. Le Code civil exige que la donation soit faite par AN mais la JP a admis la validité d’un don manuel. Mais cette donation ne sera valable que s’il y a eu remise effective de la chose au donataire. En la même matière, la Cour de Cassation a également reconnu la validité de la donation déguisée. Dans certains cas, le législateur demande qu’un acte écrit soit passé mais sans que cet écrit revête la forme authentique. Les exemples sont assez nombreux en pratique. On a par exemple la vente du fonds de commerce. Il faut dresser un acte écrit. Le législateur est intervenu dans de nombreux domaines postérieurement au Code civil. La doctrine constate une tendance contemporaine certaine à la reconnaissance du formalisme qui a pour but de protéger la volonté de l’une des parties au contrat. L’apparition des nouvelles technologies a fait évoluer le support de l’AA ou de l’ASSP. En effet, la loi du 21 juin 2004, loi pour la confiance de l’autonomie numérique, a modifié l’article 1108-1 du Code civil alinéa 1. Celui-ci dispose : « Lorsqu’un écrit est exigé pour la validité d’un acte juridique peut être établi ou conservé sous forme électronique. » Ainsi, l’écrit n’est plus nécessairement écrit : il peut s’agir d’un écrit électronique – même quand l’écrit est exigé pour la validité de l’acte – et d’une signature par un code et « double-clic ». Il y est fait toutefois exception pour les actes sous seing privé relatifs, parmi d’autres, à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale, sauf s’ils sont passés par une personne pour les besoins de sa profession. Ce développement technique apportera des conséquences significatives en matière de preuve, tendant à alléger son poids. Il existe un autre type de contrat soumis à un formalisme particulier c’est le contrat réel. Un contrat est réel lorsqu’en plus de l’échange des consentements, la remise de la chose objet de l’obligation est exigée en tant que condition de formation du contrat. C’est le cas du contrat de prêt, de dépôt ou de gage (ce dernier avant que l’ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés ne supprime la condition de remise de la chose ; on y ajoute souvent le don manuel, dans la mesure où la jurisprudence considère la remise du bien condition de validité de cette donation contraire à l’article 931). Il faut ajouter que, selon la jurisprudence, la promesse de prêt ou de dépôt est valable bien que, par définition même, il n’y ait pas encore remise de la chose. Cette validité enlève beaucoup d’intérêt dans la mesure où le bénéficiaire d’une telle promesse peut en exiger l’exécution et, à défaut, obtenir des dommagesintérêts1. Pourtant, la solution n’est pas certaine, spécialement en ce qui concerne l’ouverture de crédit, qui peut être considérée comme une promesse de prêt2. Ce contrat fait l’objet de vifs critiques par la doctrine. En effet, certains auteurs estiment qu’il s’agit d’une complication inutile. Les auteurs proposent de ramener ces contrats dans le giron du droit commun. C'est-à-dire former par le seul échange des consentements. Seulement, cela supposerait de transformer ces contrats en contrat synallagmatique alors qu’aujourd’hui ce sont des contrats unilatéraux. Par exemple, le contrat de prêt devrait considérer que le prêt aurait pour obligation de remettre la chose à l’emprunteur et l’emprunteur s’engagerait à la lui restituer. La remise de la chose ne serait plus une condition de formation mais serait le 1er acte d’exécution du contrat. La position de la Cour de cassation tend au constat que la catégorie des contrats réels a tendance à rétrécir. B ) Le formalisme indirect Le formalisme indirect c’est l’hypothèse où certaines règles ont pour effet de contraindre les contractants d’avoir recours à l’écrit sans pour autant que cela constitue une condition de validité. Il ne faut pas confondre l’exigence d’un acte écrit imposé comme une condition de validité et l’exigence d’un acte écrit pour la preuve. Ainsi, lorsque l’écrit est exigé pour la preuve d’un contrat son absence ne remet pas en cause la validité du contrat. En pratique, un contrat qu’on ne parvient pas à prouver est un contrat que se révèle inefficace. A partir de là, la distinction entre condition de validité et de preuve tente à s’atténuer et juridiquement le principe de consensualisme conduit à nier l’exigence d’un écrit, les règles de preuves vont inciter les contractants à rédiger un écrit. En effet, l’article 1341 du Code civil impose de préconiser une preuve écrite pour tout acte juridique qui portera sur une somme supérieure à 1 500 euros. Par conséquent, la preuve contraire ne peut elle-même être faite que par écrit. Il faut souligner que la règle de la preuve écrite n’est pas d’ordre publique : ainsi, les parties peuvent y renoncer ou encore déterminer leurs propres règles dans une convention relative à la preuve, tout du moins pour les droits dont elles ont la libre disposition (Cass. 1e civ., 8 nov. 1989). La règle, qui ne joue qu’en matière civile, ne s’applique qu’aux parties et reçoit exception quand il existe un commencement de preuve par écrit (art. 1347 du Code civil) ou en cas d’impossibilité (art. 1348 du Code civil). 1 2 RTD civ. 1985, 1. Cass. com., 21 janv. 2004 : Bull. civ. IV, nº 13, p. 14; D. 2004, 498. De plus, même si le recours à un notaire n’est jamais exigé sur le plan de la preuve, il présente de nombreux avantages : l’acte notarié a une force probante plus grande, une fois que l’intervention d’un notaire apporte à l’acte l’authenticité ; il prémunit contre les risques de perte de l’acte ; il suppose l’accomplissement d’assez nombreuses formalités, etc. Comme l’ASSP, l’AA peut aussi être dressé sur support électronique (art. 1317 du Code civil). L’acte notarié fait foi jusqu’à inscription de faux. L’hypothèse que nous venons de voir concerne la preuve du contrat. Reste donc à voir l’hypothèse du formalisme et de la publicité du contrat. En s’agissant des formalités de publicité, on trouve, en matière immobilière, une formalité particulière qui est requise pour pouvoir contracter. En effet, pour qu’une vente d’immeuble soit opposable aux tiers, elle droit faire l’objet d’une publicité foncière. Cet acte de vente doit être publié au bureau de la conservation des hypothèques. Or seul les actes AA peuvent faire l’objet d’une telle publication. La vente en tant que tel est valable même si elle n’est pas publiée. Mais ce titre ne serait être opposable aux tiers. On peut donc imaginer qu’une personne indélicate vende à deux acquéreurs successif le même bien. Dans ce cas de figure, ce n’est pas le premier acquéreur qui l’emporterait nécessairement mais celui qui aurait publié en premier ce titre. Les règles de la publicité foncière conduisent indirectement à une extension du formalisme. Enfin, il existe encore la formalité de l’enregistrement, qui non seulement remplit un rôle civil, mais poursuit aussi un but fiscal. Lorsque la loi prescrit l’enregistrement d’un acte, le défaut d’enregistrement n’entraîne en principe que des sanctions fiscales. Pourtant, les promesses unilatérales de vente par ASSP portant sur des immeubles doivent être enregistrées à peine de nullité (art. 1589-2 du Code civil). L’enregistrement a aussi un intérêt dans la mesure où c’est le moyen le plus sûr de donner date certaine à un ASSP. Conclusion : Il y a une certaine difficulté quand on remarque que quelques dispositions prévoient que tel acte ou tel contrat doit être établi par écrit, sans préciser si c’est à titre de solennité ou pour des raisons de preuve. Il en va de même quand la disposition ne dit pas expressément que l’acte doit être établi par écrit, mais prévoit qu’il devra comporter certaines mentions obligatoires, ce qui suppose un support écrit, et n’indique pas la sanction de leur omission. La jurisprudence donne des solutions qui varient selon les circonstances. Pour atténuer le formalisme, elle a déjà décidé qu’il s’agissait d’une règle de preuve (contrat d’assurance, contrat de gage, contrat d’édition)3 ; mais en sens inverse elle a décidé que la fixation de taux d’intérêt conventionnel par écrit dans le contrat de prêt était une règle de forme, par exemple4. La sanction aussi varie conforme le cas. Le plus souvent, ce sera la nullité du contrat car il s’agit bien de règles de forme ; mais d’autres fois la nullité sera circonscrite pour coller exactement à la nécessité de protection envisagée par la loi. 3 Cass. 1er civ., 4 juill. 1978 : Bull. civ. I, nº 251; Cass. 1er civ., 25 mai 1976: Bull. civ. I, nº 201; Cass. 1er civ., 20 nov. 1979: Bull. civ. I, nº 289. 4 Cass. 1er civ., 24 juin 1981. Section 2 - Le projet de réforme du droit des contrats et le cadre commun de référence §1 : Le projet de réforme La réglementation relative à la forme des contrats est actuellement disséminée dans tout le Code. Le projet de loi regroupe l’ensemble des dispositions dans un chapitre V. A part cela, il n’y a pas de modification majeure. Le principe du consensualisme est affirmé de manière tout à fait positive dans l’article 45 du projet de reforme : « Les contrats sont parfaits par le seul échange de consentements quelle qu’en soit la forme ». Ensuite, il envisage l’exception que constitue le contrat solennel. Il précise que, par exception, la validité du contrat peut être assujettie à l’observation de formalités déterminées par la loi. Le projet confirme aussi la distinction entre le formalisme exigé à titre de validité du contrat et celui exigé à titre de preuve ou d’opposabilité du contrat, en précisant que le non-respect du second est sans effet sur la validité des contrats (art. 46). La nullité demeure la sanction de l’inobservation de la formalité exigée par la loi. Selon l’article 90 du projet, le contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nulle. La nature de la nullité est d’ailleurs dépendante de celle de l’intérêt que la forme visait à protéger (arts. 47 et 91). Enfin, le projet dispose que les conventions qui ont pour but de modifier une convention antérieure ou d’y mettre fin sont soumises au mêmes règles de forme que celle-ci, sauf disposition ou convention contraire. En revanche, le projet ne contient aucune disposition relative à la forme des contrats réels. En ce qui concerne le contrat électronique, le projet reprends l’essentiel des articles 1108 et 1369 du Code civil. §2 : Le cadre commun de référence et les principes du droit européen des contrats Quant au cadre commun de référence, les dispositions relatives à la forme se situent à l’article II-1 :107. Ce dernier reconnaît le principe du consensualisme. Aucune condition de forme n’est requise pour la validité ou pour la preuve. Néanmoins, le texte laisse une porte ouverte aux exceptions. En effet, celui dispose qu’il peut exister des règles spécifiques pouvant exiger un écrit ou d’autres formes. Dans un sens un peu plus général, les principes du droit européen des contrats disposent, dans l’article 2:101, 2e alinéa, référent aux conditions pour la conclusion d'un contrat, que « Le contrat n'a pas à être conclu ni constaté par écrit et n'est soumis à aucune autre exigence de forme. Il peut être prouvé par tous moyens, y compris par témoins ». Section 3 - L’application aux contrats d’affaires Le consensualisme est très peu présent dans les contrats d’affaires. §1 : Les opérations commerciales Exemple d’opérations commerciales soumises à une forme rigoureuse : - Les sociétés : elles doivent avoir des statuts écrits et être immatriculées au RCS sinon, elles sont privées de personnalité juridique. A ) La vente Le consensualisme s’affirme tant pour la vente interne (art. 1583 du Code civil) que pour la vente internationale (Convention de Vienne). Pourtant, le formalisme se présente comme une nécessité pratique dans certains cas. S’agissant d’un objet incorporel, les formalités solennelles auront le but de protéger le consentement et d’assurer la réalité de sa formation. La vente du fonds de commerce (et aussi la promesse de vente) doit être conclue par écrit et comportera nombre de mentions obligatoires énumérées par l’article 12 de la loi du 29 juin 1935 (art. L141-1 du Code de commerce). Le cédant doit également remettre au cessionnaire les inventaires et livres de commerce des 3 dernières années. La sanction du non respect de ces mentions est la nullité à la seule demande de l’acquéreur et encore à condition que l’acquéreur prouve que le défaut d’écrit ou que l’absence ou l’erreur de mentions ait conduit à un vice du consentement. La cession de brevet d’invention (CPI, art. L.613-8) ou de marque (CPI, art. L.714-1) impose également à peine de nullité relative la rédaction d’un écrit. Tout acte translatif de droit doit être inscrit sur l’INPI sous peine d’inopposabilité aux tiers (CPI, art. L.112-4 ; L.613-9 ; L.714-7). L’exigence d’écrit associé à la cession de droit d’auteur est souvent interprétée comme une formalité simplement probatoire, mais la nécessité de préciser dans celui-ci chacune des prérogatives cédées à peine de nullité relative revient indirectement à poser la même exigence solennelle (CPI, art. L.131-3). Enfin, on peut mentionner les formalités administratives exigées dans certains types de ventes, comme l’autorisation municipale pour les ventes dites promotionnelles, en solde et liquidation. B ) Le bail commercial et le crédit-bail immobilier Le bail commercial : La loi n’exige aucune condition de formes et les parties peuvent ainsi valablement conclure un bail verbal. Toutefois, ce choix est dangereux. Il est préférable de rédiger un écrit pour les conditions de preuve d’existence du contrat. Par ailleurs, les parties peuvent aménager ou compléter plusieurs dispositions du statut au moment de la signature du contrat (durée, répartition des charges…). Enfin, si les parties optent pour un écrit, le bail est constaté soit dans un AA soit sans un ASSP. Néanmoins, il est à préciser que le recours à l’AA est obligatoire si la durée du bail excède 12 ans. En effet, dans ce cas, le bail doit faire l’objet d’une publication à la conservation des hypothèques du lieu de situation de l’immeuble ou du local. Il est également nécessaire de passer devant notaire pour les baux de débit de boissons. Dans les autres cas, les parties signent un ASSP et peuvent ainsi : - soit décider de recourir aux services d’un professionnel du droit. - soit rédiger l’acte elles-mêmes. L’acte doit être établi en autant d’exemplaires qu’il y a de signataires. Si les parties souhaitent faire enregistrer le bail, il est nécessaire de prévoir des exemplaires supplémentaires pour accomplir la formalité. Ce formalisme est exigé pour des raisons de sécurité juridique. Il faut que le commerçant puisse être rassuré sur la validité d’un acte par une simple observation de la régularité de ses formes. En effet, il ne faut pas oublier qu’un document qui respecte les formalités légales produit ses effets sans que l’on puisse soulever un vice de fond. En ce qui concerne le crédit-bail immobilier, le contrat doit prévoir à peine de nullité « les conditions dans lesquelles leur résiliation pourra, les cas échéants, intervenir à la demande du preneur » (art. L.313-9, II du Code monét. fin.). L’importance des investissements en cause et la longue durée du contrat justifient la nécessité de cette clause, dont la jurisprudence veille à ce qu’elle ne soit pas factice (v. Cass. 3e civ., 27/04/88). C ) Le contrat cadre Le contrat cadre est un contrat consensuel, conclu entre commerçants. Sa preuve est libre (art. L.110-3 du Code de commerce) sous la réserve du formalisme probatoire introduit par la loi Doubin, du 31 décembre 1989. Ainsi, selon l’article L.330-3 du Code de commerce « toute personne qui met à la disposition d’une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d’elle un engagement d’exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l’exercice de son activité, est tenue préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l’intérêt commun des deux parties de fournir à l’autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s’engager en connaissance de cause ». Ce texte est remarquable à plusieurs égards : i) son inspiration consumériste, alors qu’il s’agit d’un contrat entre professionnels ; ii) la reconnaissance de ces contrats comme « d’intérêt commun », ce qui saurait entraîner une évolution des solutions à l’occasion de la cessation des relations contractuelles ; iii) il présente une technique moderne d’identification des contrats concernés : la référence à la prestation caractéristique du contrat. En plus, la police des pratiques discriminatoires prohibées par l’ordonnance du 1er décembre 1986 a justifié une formalisation des conditions par lesquelles les fournisseurs et les distributeurs conviennent de leur coopération commerciale. Dans ce sens : « une convention écrite conclue entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire des services indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale (...) » (art. L.441-7, I, du Code de commerce ; Loi nº 2008-776 du 4 août 2008). Cet écrit, destiné au contractant, doit également pouvoir être communiqué à l’Administration (Direction Générale Concurrence, Consommation, Répression des Fraudes – art. L.450-3 du Code de commerce). La sanction de cette exigence pourrait être la nullité du contrat mais tient en peines d’amende (art. L.441-7, II, du Code de commerce). D ) La location-gérance La loi n’impose pas la forme écrite, mais compte tenus des exigences de publicité, il paraît difficile de se contenter d’un accord verbal. Le contrat de location-gérance doit être publié dans un journal d’annonces légales dans les 15 jours de sa conclusion (art. 2. D. 14 mars 1986). Le locataire-gérant doit se faire immatriculer au RCS. Le contrat de location-gérance entre aussi dans le champ d’application de la loi Doubin. Ainsi, avant sa signature, une obligation précontractuelle s’impose au proprietaire du fonds qui met à la disposition du locataire les signes de ralliement de la clintèle en exigeant de lui un engagement d’exclusivité. E ) La preuve en droit commercial Le droit commercial se caractérise par l’absence de formalités ad probitionem. En effet, la preuve entre commerçant est libre. (Article L110-3 du Code de commerce). Deux raisons peuvent expliquer l’absence d’exigence de preuve en droit commercial. Cela s’explique par le fait que les transactions commerciales sont souvent rapides et par le fait que les commerçants sont soumis à une comptabilité rigoureuse qui exclut toute incertitude quant aux dettes et créances de l’entreprise. Par conséquent, il est inutile de se préconstituer une preuve écrite, même pour les actes dépassant la somme de 1500 euros. Le commerçant peut apporter la preuve par tous moyens. Cette liberté est telle que le commerçant peut même se prévaloir de sa propre comptabilité. (Chambre commerciale 17 mars 1981) Il y a cependant une limite à cette liberté. C’est en matière de cautionnement. En effet, pendant longtemps, la JP considérait que les cautionnements commerciaux pouvaient se prouver par tous moyens. Puis cette règle a été réduite à l’hypothèse du cautionnement commercial émanant d’un commerçant agissant dans l’exercice ou pour l’intérêt de son commerce. Aujourd’hui, le législateur est intervenu par une loi du 1er Aout 2003. Même commercial, le cautionnement est soumis aux exigences formalistes des articles L141-1 et S du Code de la consommation. Il suffit que la caution soit une personne physique et que le créancier soit un professionnel. Enfin, l’écrit n’a pas une valeur plus importante que d’autres modes de preuves. On peut donner comme exemple, un arrêt rendu par la Chambre commerciale le 3 mai 1984. La Cour de cassation a décidé qu’en présence d’un bon de commande écrit portant mention du prix, il sera admis à prouver que le vendeur lui avait accordé verbalement une remise sur ce prix. § 2 : En droit de la consommation Pour la protection du consommateur, les textes du Code de la consommation multiplient les formalités : l’exigence de mentions obligatoires, dont la satisfaction suppose la rédaction d’un écrit ; la reproduction de dispositions légales dans le contrat peut être aussi requise ; la remise de documents préalables au contrat-type ; la vente de biens meubles de consommation exige encore le respect des règles de marquage, d’étiquetage et affichage sur les produits. Dans l’hypothèse du démarchage à domicile, il faut un écrit et des mentions particulières qui figurent dans l’écrit. En cas de non respect, la sanction est la nullité. Cela est fait dans le but d’attirer l’attention du consommateur sur les modalités du contrat. C’est pour avoir un « consentement éclairé ». Ainsi, lorsque la vente est précédée d’un démarchage à domicile, le démarcheur doit remettre un écrit au consommateur avec certaines mentions. De plus, il faut informer la partie faible au contrat de la faculté qu’il a de se rétracter dans un délai de 7 jours. Le texte oblige le démarcheur à remettre un contrat écrit avec un formulaire détachable qui permettra cette faculté de rétractation. S’agissant du crédit à la consommation, sa publicité doit contenir plusieurs mentions obligatoires, sous peine de sanctions pénales. En outre, le prêteur est tenu de formuler au candidat emprunteur, sous peine d’amendes, une offre préalable, établie selon l’un des modèles types fixés par le Comité de la réglementation bancaire. Cette offre demeure valable pour 15 jours et le consommateur a une faculté de rétractation. Elle doit aussi être remise à la caution. Pour les crédits affectés, le Code lie la conclusion du contrat de prêt à celle du contrat principal (arts. L.311 et L.313 du Code de la consommation).