Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 Insuffisance cardiaque (1/2) OBS…ICC Homme, 60 ans, faisant partie des « gens du voyage », peu soigneux de sa santé, hypertendu depuis plusieurs années (HTA non traitée - notion de chiffres de l’ordre de 16/9 18/10 sans plus de précision), se sait atteint d’une anomalie cardiaque imprécise, mais qui avait justifié une échocardiographie il y a 2-3 ans (le compte rendu succinct qu’il apporte lors de la consultation indique : « une hypertrophie ventriculaire gauche concentrique modérée avec dilation du VG également modérée, sans autre anomalie notable »). Le motif de la consultation est qu’il se trouve essoufflé depuis 6-8 mois pour des efforts de moins en moins importants. Il a constaté une prise de poids d’environ 4 Kg en 1 mois. Examen : Pouls 105 BPM, TA 10/7, extrémités froides Rythme à trois temps évoquant un bruit de galop, Souffle holosystolique apexo-axillaire 2/6ème, doux, en jet de vapeur, Râles crépitants aux deux bases pulmonaires, Œdème prenant le godet, blanc, mou, localisé aux deux chevilles Bord inférieur du foie mousse, mal perçu ; reflux hépato jugulaire franc. 1) Quel diagnostic évoque ce tableau ? Ce diagnostique évoque une insuffisance cardiaque globale (c'est-à-dire droite et gauche). Insuffisance cardiaque droite car : Œdème des membres inférieurs : due à la stase veineuse Gros foie, reflux hépato-jugulaire : due à l’augmentation de la pression cave car le cœur droit n’accepte pas le retour veineux. Insuffisance cardiaque gauche : Dyspnée (même si l’insuffisance cardiaque droite s’accompagne aussi souvent de dyspnée). 2) Quelle différence entre insuffisance cardiaque « systolique » et insuffisance cardiaque « diastolique » ? 1 Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 A droite, on a une insuffisance cardiaque diastolique : on a un défaut de remplissage du ventricule gauche. On a une altération de la fonction de remplissage qui donne une adiastolie. Ex classique d’adiastolie est la péricardite constrictive (rare). En cas d’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG), on a une rigidification du muscle. On a alors une difficulté de remplissage. C’est fréquent car c’est une conséquence de l’hypertension. A gauche, on a une insuffisance cardiaque systolique. On a une baisse du volume d’éjection systolique par altération de la fonction systolique. Le témoin en est la mesure de l’éjection. Comme on a une dilatation, on a un défaut d’éjection. 3) Comment expliquer la tachycardie, les extrémités froides ? Par une HYPERSTIMULATION du et du SRAA (Système Rénine Angiotensine Aldostérone). Initialement c’est un mécanisme compensateur pour maintenir le débit. Le sympathique stimule le système SRAA. On a aussi une vasoconstriction périphérique pour permettre de maintenir un débit correct. Le problème est que ces mécanismes vont s’emballer. Ils seront trop stimulés. La plupart des traitements réduisant la mortalité visent à bloquer ces deux système : : Béta bloquants SRAA : IEC, ARA2, Antialdostérone. C’est la base du traitement en cas de fonction systolique altérée (efficacité +++ pour la survie) En fait l’augmentation des résistances périphériques en excès va gêner la fonction myocardique. Le SRAA va augmenter la fibrose et provoquer des troubles du rythme. (Ce sont des signes dit de choc périphérique - à ne pas confondre avec le collapsus TA) 4) La TA égale 10/7 : S’agit-il d’un collapsus ? Il peut s’agir d’un collapsus dans la mesure où la TA habituelle du patient est bien plus élevée ; tout dépend de la rapidité avec laquelle la TA s’est abaissée. Les extrémités froides, la pâleur, les sueurs : ce sont des signes d’hyperstimulation sympathique. Ce sont des signes de choc périphérique. 2 Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 Le collapsus : c’est un effondrement de la tension artérielle (TA). En réaction, on a une décharge et donc des signes de chocs périphériques. Mais le collapsus, c’est grave alors que des signes de choc périphérique, ça peut ne pas l’être (comme quand on se tape sur un doigt avec un marteau). Il faut donc interpréter le collapsus en fonction de la TA. Ici la TA est a 10/7. Or dans un collapsus, on a un effondrement de cette tension. C’est possible ici car le patient dit qu’il était hypertendu. Il faut chercher en pratique s’il existe une cause de TA diminuée (ex : suite à une hémorragie). 5) Est ce qu’un traitement par IEC est envisageable ? Oui, car les résistances systémiques (RS) sont probablement élevées du fait que dans l’IC il existe une hyperstimulation du système sympathique. Les RS= TA / DC ; ainsi une TA normale peut être maintenue malgré une diminution du débit cardiaque, du fait d’une vasoconstriction périphérique (qui augmente les RS) C’est ainsi qu’on explique l’effet bénéfique des IEC (au moins une partie !) IC => hyperstimulation sympathique => augmentation des résistances périphériques Il faut bloquer ces systèmes. 6) Le malade a pris 4 Kg en un mois. Comment expliquer ce phénomène ? Par inflation hydro sodée (rétention de sel par la rein grâce au SRAA) 7) Quelle mesure thérapeutique à discuter ? Indication de diurétique Et d’un régime sans sel En revanche pas d’indication de restriction hydrique (seule indication dans l’IC très évoluée avec hyponatrémie < 120 mmol/l) A propos des natriurétiques : logiquement, pour contrer le SRAA, on devrait utiliser des antialdostérone. Or dans la pratique, il apparait que les diurétiques de l’anse sont beaucoup plus efficaces. Pourtant, d’un point de vue physiologique, ils hyper stimulent le SRAA puisqu’ils diminuent le volume d’eau. On sait que les antialdostérone améliorent la survie. Pour les diurétiques de l’anse, on n’a pas d’étude mais on sait qu’ils sont efficaces en clinique. Il y a une différence entre traiter les symptômes et améliorer la survie. On n’a pas de réponse sur les diurétiques aujourd’hui mais on commence à s’en méfier. 8) Le dosage du BNP a-t-il un intérêt ici ? Si oui, lequel Le BNP est une hormone libérée par le muscle cardiaque quand il y a une distension. Si c’est les oreillettes qui se dilatent, elles produisent du FAN (Facteur Atrial Natriurétique). Si c’est le ventricule qui est distendu, on a sécrétion de BNP. Ces deux hormones sont des vasodilatateurs et des natriurétiques. Ils contrebalancent le SRAA excessif. Logiquement, il n’y a donc pas de problème puisque c’est hormones contrebalancent le SRAA et l’empêchent de s’emballer. Malheureusement ce système est moins efficace que le SRAA. 3 Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 Peptides natriurétiques Le peptide natriurétique de type A : est secrété par les oreillettes Le peptide natriurétique de type B : est secrété par les ventricules Le peptide natriurétique de type C: est secrété par l’endothélium vasculaire, en réponse à une augmentation de la pression de remplissage et des forces d’étirement pariétal (shear stress). Ces hormones, de demi vie courte, provoquent une natriurèse et une vasodilatation, et s’opposent au SRAA et à l’endothéline. From: Baughman: N Engl J Med, Volume 347(3).July 18, 2002.158-159 L’angiotensine provoque une rigidité au remplissage par fibrose réactionnelle. Au final, la BNP est intéressante car elle a un but pronostic ici. Elle est d’autant plus secrété que l’atteinte cardiaque est importante. 4 Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 9) Etiologies à discuter et comment les mettre en évidence ? HTA : elle est connue et était déjà responsable d’une HVG concentrique à l’écho il y a 2-3 ans. Il peut s’agir de la seule cause mais on ne peut l’affirmer rechercher systématiquement les autres causes : Valvulopathies - Insuffisance Mitrale (IM) ? Le Souffle Systolique (Souffle holosystolique de pointe qui irradie dans l’aisselle) est typique d’une IM, mais il peut s’agir d’une IM fonctionnelle. L’insuffisance mitrale fonctionnelle est due à la dilatation du ventricule gauche. Dans ce cas le Souffle Systolique devrait régresser après traitement. De toute façon une échocardiographie doit être réalisée pour évaluer la réalité, l’importance et le mécanisme de cette IM. Coronaropathie – prévalence élevée d’athérosclérose car sexe masculin, âge et FDR risque présent (HTA). ECG de repos : on recherche des stigmates d’infarctus. Voire épreuve d’effort thallium - coronarographie (ceci sera à discuter étape par étape en cardiologie). L’échographie sera l’examen de base (après l’ECG et la RxP) Ici, la cause de la cardiopathie est multifactorielle car on sait qu’il y a déjà un retentissement de l’HTA (HVG), qu’il y a une IM ; Une fois le bilan terminé on saura s’il y a aussi une participation coronaire et quelle est l’importance de l’atteinte valvulaire. 10) L’écho montre une épaisseur de paroi égale à 13 mm (épaisseur normale =10mm) de façon concentrique et le diamètre du VG = 60 mm (nle ne dépasse pas 45 mm) : comment expliquer cela ? 11) Y a t il des mesures thérapeutiques envisageables pour éviter la poursuite de ce phénomène ou le faire régresser ? 12) Sur quels éléments établir un pronostic ? 13) Quel traitement ? 5 Pôle C – Cardiologie 19/03/2008 14) Quelle surveillance de ce traitement ? Que peut-on attendre comme réponse clinique (évolution de la symptomatologie) dans les premiers jours du traitement? 15) Après que le traitement se soit montré efficace, le malade n’est plus dyspnéique, mais se trouve fatigué. Comment peut-on expliquer cette asthénie ? 16) Après que le traitement se soit montré efficace, le souffle holosystolique de pointe a disparu. 17) Qu’est ce que cela peut signifier ? 18) Le malade est bien stabilisé après deux mois ; il n’a plus de dyspnée ni de signes d’insuffisance cardiaque 19) Quels médicaments faut-il poursuivre et lesquels peut-on ou doit-on arrêter ? Remarques Nom du preneur Gregoire et Julien C’est le premier cours sur l’insuffisance cardiaque. La suite du cas sera corrigée lors du cours d’avril. 6