Rapport du groupe français pour le Congrès de la Ligue

publicité
LIDC 2008
QUESTION B
Under which circumstances and to what extent should the positive obligation of
providing information be imposed by regulation on advertisers?
/
Dans quelles circonstances et dans quelle mesure l’obligation positive de fourniture
d’informations devrait-elle être imposée aux annonceurs par la réglementation ?
International Rapporteur: Antonina Bakardjieva Engelbrekt, Associate Professor,
Stockholm University, Faculty of Law
Rapport du groupe français pour le Congrès de la Ligue Internationale Du Droit de la
Concurrence (LIDC): 25 - 28 septembre 2008 à Hambourg.
Présenté1 par le Groupe de travail composé de :
Charlotte Dekeyser, Charlotte Grass, François Laforgue,
Joffrey Sigrist et Erwann Mingam,
Membres du Comité des Jeunes de l’A.F.E.C.
1
Le présent rapport est établi à titre personnel et n'engage que les auteurs.
1
1) Does the law in your country impose a general positive obligation on advertisers
to provide all relevant information (information that enables the consumer to
make an informed decision)?
La réponse est NON. Il n’existe pas en France d’obligation générale d’information, exprimée
de façon positive, et s’appliquant au stade de l’annonce publicitaire.
Deux notions se rapprochent de cette exigence :
D’une part, il existe une obligation précontractuelle d’information2, codifiée à l’article L. 1111 du Code de la Consommation qui dispose que tout professionnel vendeur de biens ou
prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure
de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service3.
Toutefois, s’agissant d’une obligation d’information précontractuelle, elle est directement liée
à la conclusion d’un contrat – et non pas à une annonce publicitaire. Par conséquent, le
débiteur de cette obligation est le cocontractant, vendeur ou prestataire, et non l’annonceur ou
l’agence. C’est pourquoi cette obligation précontractuelle d’information ne rentre pas dans le
cadre de la présente étude.
D’autre part, en matière de publicité ou de communication commerciale, l’article L. 121-1 du
Code de la Consommation, tel qu’il était rédigé avant la loi de transposition de la directive,
fixait le cadre de ce qui était autorisé ou interdit en la matière. Cependant, il s’agissait de
sanctionner les publicités trompeuses et il n’en résultait aucune obligation positive
d’information. Ce texte sera examiné ci-après (question n° 2).
d. If your country is a member of the European Union, what will be/is the
fate of the positive duty to disclose information after the implementation
of the Unfair Commercial Practices Directive (UCPD)?
La Directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales, a été transposée en
droit français par l’article 39 de la loi 2008-3 du 3 janvier 2008 dite ”Loi pour le
développement de la concurrence au service des consommateurs”.
Cette loi nouvelle abroge l’article L. 121-1 du Code de la Consommation relatif à la publicité
trompeuse et crée un nouvel article L. 121-1 sur les pratiques commerciales trompeuses.
La loi nouvelle reprend la distinction effectuée par la Directive entre action trompeuse et
omission trompeuse (articles 6 et 7 de la Directive) aux I et II de l’article L. 121-1, et y
sanctionne respectivement la délivrance inexacte de certaines informations définies par la loi
(action trompeuse), ainsi que le défaut de délivrance d’une information substantielle
(omission trompeuse)4.
2
Loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la consommation.
Ce texte ne prévoit aucune sanction pénale, le manquement à cette obligation étant sanctionné par la nullité du
contrat.
4
A titre d’exemple : L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service, les caractéristiques
essentielles, le prix, l'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel, etc.
3
2
Ce texte crée une obligation générale d’information de l’annonceur vis-à-vis du
consommateur, mais de façon négative : le nouveau texte sanctionne le défaut de délivrance
d’une information considérée comme substantielle (omission trompeuse), à l’occasion d’une
communication commerciale. L’annonceur ne doit pas omettre ni dissimuler d’information
substantielle.
Il n’y a donc toujours pas, en droit français, une fois transposée cette Directive, d’obligation
générale positive pour l’annonceur, à proprement parler. Toutefois, en pratique, l’obligation
faite aux annonceurs, même exprimée de façon négative, de ne pas omettre d’information
substantielle, équivaut à une telle obligation positive, et sera sans doute interprétée comme
telle, toute la question étant de savoir ce qu’il convient d’entendre par ”information
substantielle” (on y reviendra).
2) If the answer to question 1 is in the negative, is a failure of an advertiser to
provide relevant (sufficient) information generally considered as misleading
advertising (negative information duty; misleading by omission)?
La réponse est OUI. Le droit français considère que l’absence de fourniture de certaines
informations peut être assimilée à de la publicité trompeuse par omission.
Toutefois, la législation sur la publicité trompeuse, qui était en vigueur avant la loi de
transposition, ne sanctionnait pas, expressément et de façon générale, les omissions
trompeuses. Elle a pourtant servi de fondement légal pour condamner des omissions, même
involontaires, de nature à induire en erreur : c’est la jurisprudence qui a ainsi sanctionné
l’omission d’informations comme un comportement de publicité trompeuse.
a. In which area of law is this rule located (unfair competition law,
marketing practices law, consumer law; contract law, administrative law,
other)
Les dispositions sanctionnant de telles pratiques se trouvent dans le Code de la
Consommation. Toutefois, ces incriminations sont de nature pénale. A ce titre, ce sont les
juridictions pénales qui sont compétentes5 pour condamner l’auteur de ces pratiques.
A ce titre, le Code de la Consommation, dans sa rédaction antérieure à la transposition de la
Directive, sanctionnait :
-
La publicité trompeuse : L’ancien article L. 121-1 relatif à la publicité trompeuse
sanctionnait toutes les allégations ou présentations de nature à induire en erreur, c'est-àdire tous les moyens de suggestion susceptibles de tromper le consommateur 6. C’est sur
En l’espèce, s’agissant de délits, le Tribunal Correctionnel est compétent.
L’article L. 121-1 du Code de la consommation était ainsi rédigé, avant la transposition : « Est interdite toute
publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de
nature à induire en erreur, lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs des éléments ci-après : existence,
nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine, quantité, mode et date de
fabrication, propriétés, prix et conditions de vente de biens ou services qui font l'objet de la publicité, conditions
de leur utilisation, résultats qui peuvent être attendus de leur utilisation, motifs ou procédés de la vente ou de la
prestation de services, portée des engagements pris par l'annonceur, identité, qualités ou aptitudes du fabricant,
des revendeurs, des promoteurs ou des prestataires. ».
5
6
3
le fondement de ce texte que l’omission d’une information a été considérée, en
jurisprudence, comme une publicité trompeuse.
La tromperie : L’article L. 213-1 du Code de la Consommation sanctionne toute
personne qui a trompé ou tenté de tromper son co-contractant sur la nature, l’espèce,
l’origine, les qualités substantielles, la composition, la quantité, l’identité de la chose,
l’aptitude à l’emploi, les risques, les contrôles effectués, etc.
-
Toutefois, de telles pratiques peuvent également être sanctionnées au titre de la concurrence
déloyale, la jurisprudence considérant depuis longtemps que l’acte de publicité trompeuse
peut constituer un acte de concurrence déloyale, dès lors qu’il cause un préjudice au
concurrent honnête qui n’utilise pas les mêmes procédés7.
Sur le plan strictement civil, un cocontractant peut agir en nullité du contrat qui aurait été
conclu à la suite de pratiques dolosives liées à une publicité. Le dol entraîne la nullité du
contrat lorsqu’il est évident que, sans les manœuvres pratiquées, le cocontractant n’aurait pas
contracté8. Le dol peut résulter d’agissements malhonnêtes ou d’omissions trompeuses9, et
pourrait donc théoriquement être basé sur l’absence de délivrance d’une information
primordiale dans une publicité, absence qui aurait conduit le consommateur à contracter.
b. The omission of what kind of information is considered misleading? Please
give examples from case law or administrative practice.
Ni la loi, ni la jurisprudence ne prévoyait de liste limitative d’informations que l’annonceur
était tenu de communiquer.
La jurisprudence a notamment sanctionné, au titre de la publicité trompeuse, l’omission
relative :
-
Aux qualités substantielles du produit : le juge sanctionne le fait, pour un distributeur,
d’annoncer une vente de pneus à prix très attractif, sans préciser qu’il s’agit de pneus
d’occasion10.
-
Au mode de calcul du prix : le juge a condamné une agence matrimoniale qui
annonçait un prix d’inscription de 137 €, sans indiquer l’existence et le montant d’une
redevance complémentaire pourtant nécessaire à l’utilisation du service11.
-
A la composition du bien ou du service : la jurisprudence a condamné un fabricant de
soda qui n’indiquait pas l’exacte teneur en sucre de la boisson12.
-
Aux conditions d’utilisation du bien ou du service : le juge condamne à ce titre une
compagnie d’assurance qui ne précise pas suffisamment les exclusions de garantie,
dans une annonce portant sur un contrat d’assurance13.
L’action est alors fondée sur les articles L. 121-1 du Code de la consommation et 1382 du Code civil. A titre
d’exemple : Cass. Com. 28 novembre 2006 n° 05-15482.
8
Article 1116 du Code Civil.
9
Sur la réticence dolosive, voir Cass. Civ. 3e, 15 nov. 2000, Bull. civ. III, N° 171.
10
TGI La Roche-Sur-Yon 20 janvier 1986, BID 1988, n°6 p. 49.
11
Cass. Crim. 28 septembre 1994, RJDA 5/95, n°659.
12
TGI Nanterre, 16 décembre 2005, INC-hebdo 2006, n°1371.
7
4
-
A la portée des engagements pris par le vendeur : le juge condamne le producteur qui
mentionne sur le produit « satisfait ou échangé » sans préciser que l’échange est
subordonné au paiement d’une participation financière représentant près du tiers du
coût d'achat14. Tout récemment, une Cour d’Appel a condamné un fournisseur
d’appareils audiovisuels, pour avoir annoncé sur son catalogue ”toutes les chaînes
gratuites”, sans mentionner que cela concernait uniquement les chaînes gratuites par
nature, et non pas les chaînes cryptées payantes15.
En revanche, le fait pour une Banque de ne pas attirer spécialement l’attention des
consommateurs, dans des plaquettes publicitaires pour un placement financier, sur le
risque de baisse importante des valeurs boursières, n’est pas une omission
trompeuse16.
-
Aux résultats qui peuvent être attendus de l’utilisation : les juges ont par exemple
sanctionné un annonceur qui vantait les performances d’un appareil sans préciser que
ces performances ne sont pas celles de l’appareil de base, mais celle d’un matériel à
acquérir en option17.
c. If your country is a Member of the European Union, how has it
implemented (will implement) Art. 7 UCPD?
Depuis le vote de la Loi n° 2008-3, transposant la Directive 2005/29/CE, et l’entrée en
vigueur du nouvel article L. 121-1 du Code de la Consommation, il existe en droit français
une liste limitative d’informations que le professionnel doit communiquer au consommateur
(ou plutôt dont l’omission est considérée comme trompeuse), dès lors qu’il mentionne le prix
et les caractéristiques du produit ou service (et seulement dans ce cas là). Ces informations
sont les suivantes :
-
Les caractéristiques principales du bien ou du service ;
-
L'adresse et l'identité du professionnel ;
-
Le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur,
ou leur mode de calcul, s'ils ne peuvent être établis à l'avance ;
-
Les modalités de paiement, de livraison, d'exécution et de traitement des réclamations
des consommateurs, dès lors qu'elles sont différentes de celles habituellement
pratiquées dans le domaine d'activité professionnelle concerné ;
-
L'existence d'un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi.
Si les informations à communiquer sont sensiblement les mêmes que celles prévues par la
Directive, la Loi française diffère (cf. question 14 ci-dessous), en ce qui concerne les cas dans
lesquels ces informations doivent être communiquées.
13
Cass. Crim., 14 décembre 1982, n°82-90.264.
Cass. Com., 28 novembre 2006, n° 05-15482.
15
C.A. Rennes, 6 décembre 2007, JCP E. n° 21, 22 mai 2008, page 23.
16
Cass. Crim., 16 octobre 2007, n° 07-81.377.
17
Cass. Crim. 26 janvier 1988, n° 86-92459, Bull. crim., n°39.
14
5
La Directive limite en effet l’obligation de fournir au consommateur des informations
substantielles aux seules communications effectuées dans le cadre d’une « invitation à
l’achat », notion définie à l’article 2 i) comme suit :
« Une communication commerciale indiquant les caractéristiques du produit et son
prix de façon appropriée en fonction du moyen utilisé pour cette communication
commerciale et permettant ainsi au consommateur de faire un achat ».
En droit français, l’article L.121-1-II du Code de la Consommation ne reprend pas la
terminologie de la Directive, mais impose une obligation de porter à la connaissance du
consommateur des informations substantielles « dans toute communication commerciale
mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé ».
En outre, la loi française ne précise pas quelles sont les ”caractéristiques principales” du bien
ou du service dont l’omission rend la publicité trompeuse : alors que la Directive vise les
”caractéristiques principales” à l’article 6 (en donnant des exemples) et à l’article 7, la loi
française emploie deux termes différents : ”caractéristiques essentielles” à l’article L. 121-1 I
sur les actions trompeuses, et ”caractéristiques principales” à l’article L. 121-1 II sur les
omissions trompeuses.
3) What is the relationship of existing positive obligations to provide information in
fair trading (marketing practices; unfair competition) laws with contract law?
En cas de présentation trompeuse d’un produit par un annonceur, les règles du droit civil
relatives au droit général des contrats permettent, sous certaines conditions, au cocontractant
trompé d’obtenir la nullité du contrat. Le consentement ne peut engager celui qui l’a émis que
s’il est libre et exempt de vices.
Le Code civil18 prévoit trois type de vices du consentement, l’erreur, le dol et la violence. Si
ce dernier vice n’est pas concerné ici, un cocontractant trompé par une publicité
insuffisamment informative pourrait invoquer soit l’erreur, soit le dol.
S’agissant de l’erreur sur la substance, l’article 1110 du Code civil dispose que : « l'erreur
n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la
chose qui en est l'objet. ». La jurisprudence entend aujourd’hui la substance de manière
subjective, c'est-à-dire que l’erreur est considérée comme portant sur la substance de la chose
lorsque, sans elle, l’une des parties n’aurait pas contracté. Il s’agit d’une qualité substantielle,
c’est-à-dire déterminante pour la victime de l’erreur. Ainsi un cocontractant ayant commis
une erreur sur les qualités substantielles d’un produit, l’ayant conduit à contracter, peut-il
invoquer la nullité du contrat.
Il est donc théoriquement possible d’appréhender l’omission d’une information substantielle
dans un message publicitaire sous cet angle : à supposer qu’il soit démontré que c’est cette
omission (non « rectifiée » lors de la conclusion du contrat) qui a provoqué l’erreur du
consommateur sur les qualités substantielles du produit, celui-ci pourrait alors demander
l’annulation du contrat (généralement une vente). Toutefois, il n’a pas été relevé de
jurisprudence tranchant cette question.
18
Article 1109 du Code civil.
6
S’agissant du dol, l'article 1116 du Code civil dispose que : « le dol est une cause de nullité de
la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une ou l'autre des parties sont telles,
qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. » S’il peut
résulter d’agissements malhonnêtes, le dol peut aussi résulter de silences ou d’omissions
trompeuses, aussi appelés ”réticence dolosive”19, ce qui est une cause de nullité du contrat
qu’une partie conclut en étant trompée20.
La jurisprudence admet qu’un consommateur, victime d’une publicité trompeuse l’ayant
induit en erreur sur les qualités substantielles d’un produit/service, puisse invoquer le dol pour
demander la nullité du contrat et le remboursement des sommes versées21.
Par analogie, le même consommateur pourrait parfaitement soutenir que le manquement d’un
annonceur à son obligation positive d’information s’analyse en une réticence dolosive sur une
information substantielle, de nature à vicier le consentement du client qui acquiert le
produit/service dudit annonceur. Il lui faudra prouver que l’information omise par l’annonceur
était primordiale à ses yeux et a déterminé son consentement.
4) Does the law in your country stipulate any specific positive obligations for
advertisers to provide information?
La réponse est OUI.
Le droit français prévoit même de très nombreuses obligations spécifiques d’information pour
les annonceurs, dans de nombreux secteurs particuliers et/ou pour des nombreux biens ou
services déterminés.
Nous avons choisi d’en donner quelques exemples, sous forme de tableau.
a. In which area of law and which branch of law are such duties located
(unfair competition law, consumer law, marketing practices law; contract
law, administrative law, criminal law, other)?
Les obligations positives spécifiques pour les annonceurs de fournir des informations sont
situées dans le droit de la consommation. Mais elles ont surtout une nature pénale, et sont
punies par des sanctions pénales.
b. Can you name examples of specific obligations to provide information that
are limited to:
 certain categories of products (e.g. foodstuffs; medicines;
tobacco; alcohol; electrical appliances; motor vehicles; toys,
cosmetics, etc.);
La réticence est le fait de garder le silence sur une information que l’on connaît et devrait communiquer.
Sur la réticence dolosive, voir Cass. Civ. 3e, 15 nov. 2000, Bull. civ. III, N° 171
21
Exemple, pour un contrat de fourniture et d’abonnement à la télévision par satellite : C.A. Riom, 6 mars 2008.
19
20
7
Produit
Alcool
Texte
article L3323-4 du Code de la
santé publique
article L3511-1 al 2 du Code de
la santé publique + arrêté 31
déc 92 (JO 6 janv 1993 p352)
Mentions obligatoires
Message de caractère sanitaire précisant que
”l'abus d'alcool est dangereux pour la santé”
Publicité interdite sauf dans les débits de
tabac : les affichettes disposées à l'intérieur
de ces établissements, non visibles de
l'extérieur, doivent comporter le message
sanitaire « Fumer provoque des maladies
graves ».
Articles R.5122-3 et R.5122-6 La publicité pour un médicament auprès du
du Code de la santé publique
public doit être conçue de façon à ce que le
caractère publicitaire du message soit évident
et que le produit soit clairement identifié
comme médicament.
Tabac
Médicaments
Elle doit comporter au moins, outre le
numéro du visa de publicité délivré par
l’AFSSAPS, la dénomination du médicament
(ou la dénomination commune s’il n’y a
qu'un seul principe actif), les informations
indispensables à son bon usage , une
invitation expresse à lire attentivement les
instructions figurant sur la notice ou le
conditionnement extérieur, ainsi qu’un
message de prudence, un renvoi au conseil
d'un pharmacien et, en cas de persistance des
symptômes, une invitation à la consultation
d'un médecin.
Armes à feu et de leurs Loi n°85-706 du 12 juillet 1985, Indication de la catégorie à laquelle
munitions
article 2
appartiennent ces armes et munitions et du
régime auquel leur acquisition est soumise
 certain categories of services (e.g. tourist services; financial
services, real estate services);
Services
Crédit à la consommation
Texte
Mentions obligatoires
Article L311-4 du code de la Toute publicité doit :
consommation
1° Préciser l'identité du prêteur, la nature,
l'objet et la durée de l'opération proposée
ainsi que le coût total et, s'il y a lieu, le taux
effectif global annuel du crédit, à l'exclusion
de tout autre taux, ainsi que les perceptions
forfaitaires ;
2° Préciser le montant, en euros, des
remboursements par échéance ou, en cas
d'impossibilité, le moyen de le déterminer.
Ce montant inclut le coût de l'assurance
lorsque celle-ci est obligatoire pour obtenir le
financement et, le cas échéant, le coût des
perceptions forfaitaires ;
3° Indiquer, pour les opérations à durée
8
déterminée, le nombre d'échéances.
Dans toute publicité écrite, quel que soit le
support utilisé, les informations relatives à la
nature de l'opération, à sa durée, au taux
effectif global, s'il y a lieu, et, s'il s'agit d'un
taux promotionnel, à la période durant
laquelle ce taux s'applique, au caractère "fixe
ou révisable" du taux effectif global et au
montant des remboursements par échéance.
Article L312-4 du code de la 1° Préciser l'identité du prêteur, la nature et
consommation
l'objet du prêt ;
Crédit immobilier
2° Préciser, si elle comporte un ou plusieurs
éléments chiffrés, la durée de l'opération
proposée ainsi que le coût total et le taux
effectif global annuel du crédit, à l'exclusion
de tout autre taux.
Article L211-5 du code du Faire mention de la licence ou habilitation
tourisme
détenue
Agences de voyages
 certain product characteristics (e.g. dangerous product
characteristics; health related qualities; ecological (environmental)
qualities);
Caractéristiques des produits
Produits alimentaires : boissons
avec ajouts de sucres, de sel ou
d'édulcorants de synthèse et de
produits alimentaires
manufacturés
Texte
Loi relative à la politique de
santé publique du 9 août 2004
(article 29)
Mentions obligatoires
Introduire des messages sanitaires dans leurs
publicités et outils d’information tels : «
Pour votre santé, mangez au moins cinq
fruits et légumes par jour » ou encore « Pour
votre santé, évitez de manger trop gras, trop
sucré, trop salé », sauf à verser une taxe de
1,5% du coût de la publicité à l’Institut
national de prévention et d’éducation pour la
santé (INPES).
 specific methods of sale (e.g. conditions and duration of special
offers, withdrawal rights with distance selling);
Méthodes spécifiques de vente
Démarchage par téléphone

Texte
Mentions obligatoires
article L121-18 al3 du code de Indiquer explicitement au début de la
la consommation
conversation son identité et le caractère
commercial de l'appel
Certain contractual rights and obligations?
L’obligation spécifique d’information des annonceurs sur les droits contractuels des
consommateurs existe indirectement, dans l’incrimination générale des omissions
trompeuses : l’article L. 121-1 du code de la consommation, après transposition de la
Directive, mentionne ”l'existence d'un droit de rétractation” (”si ce dernier est prévu par la
Loi”) comme l’une des informations devant être communiquées au consommateur.
9
c. Does the law in your country impose on advertisers a duty to provide
information about their own identity and contact details? Is this obligation
limited in certain respects?
Les annonceurs ont l’obligation de mentionner :
-
leur numéro d’identification SIREN, leur numéro d’immatriculation au Registre du
Commerce et des Sociétés dans tout document publicitaire (article 72 du Décret
n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au Registre du Commerce et des Sociétés) ;
-
leur nom, adresse ou dénomination ou raison sociale (article L. 581-5 du Code de
l’environnement) ;
-
pour les documents publicitaires imprimés, le nom et l’adresse de l’imprimeur (loi
du 29 juillet 1881).
d. Does the law in your country impose on advertisers an obligation to
provide information about price? Is this obligation limited in certain
respects?
Sous le régime de la loi ancienne, il n’existait aucune obligation générale d’information sur le
prix dans les publicités. Toutefois, lorsque la publicité portait sur un rabais de prix,
l’annonceur devait préciser le montant de la réduction, les produits ou services concernés et
les conditions dans lesquelles l’avantage est consenti, telles que sa durée (Arrêté n° 77-105/P
du 2 septembre 1977).
De plus, l’Arrêté du 3 décembre 1987, relatif à l’information du consommateur en matière de
prix prévoyait l’obligation d’exprimer le prix « toutes taxes comprises », y inclus frais de
livraison (ou en les mentionnant en sus), dans l’affichage des prix, mais aussi pour les offres
faites à distance, notamment par voie d’imprimés (article 14 de l’Arrêté).
Il existait aussi des obligations spécifiques définies au moyen d’Arrêtés :
-
Arrêté n° 78-110/P du 3 novembre 1978 concernant la publicité du prix du pain
(taille de l’affiche et des caractères, informations relatives à la dénomination du
pain, au prix du pain vendu à la pièce ou au kilo…).
-
Arrêté du 18 mars 1993 concernant la publicité des prix des viandes de boucherie
et de charcuterie (idem).
-
Arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage,
de réparation et d'entretien dans le secteur du bâtiment et de l'électroménager
(nom, raison sociale et adresse de l'entreprise, numéro d'inscription au registre du
commerce ou au répertoire des métiers, taux horaires de main-d’œuvre toutes taxes
comprises, les frais de déplacement, le caractère payant ou non du devis et, le cas
échéant, toute autre condition de rémunération).
10
-
Arrêté n° 84-64/A du 20 sept 1984 relatif à la publicité des prix en cas de crédit
gratuit (indication du prix pour paiement à crédit, prix pour paiement comptant
sauf en cas de crédit gratuit).
Enfin, la Loi de transposition de la Directive a inséré, à l’article L. 121-1 II-3° du Code de la
consommation, une obligation d’information sur le prix TTC (et les frais annexes de
livraison) dans les annonces publicitaires.
e. Is an infringement of specific obligations to provide information
considered a violation of general rules against unfair competition (unfair
marketing or unfair commercial practices)?
Cela peut être le cas : il est admis en jurisprudence que la violation par un opérateur des règles
sur la publicité trompeuse peut être un acte de concurrence déloyale (cf. ci-dessus,
question 2 a)).
Cela pourrait donc tout à fait être le cas si un concurrent omettait de respecter une obligation
spécifique d’information que ses concurrents respectent.
5) Does the law in your country set out any requirements as to the way in which
information should be provided by advertisers (e.g. clear and comprehensible
manner; language, etc.)?
En France, le Législateur impose, d’une manière générale, l’emploi obligatoire de la langue
française pour toutes les publicités, en imposant, le cas échéant pour les publicités en langue
étrangère, une traduction en français de manière aussi lisible, audible ou intelligible que la
présentation originale22.
Au-delà de l’emploi de la langue française, les conditions dans lesquelles la publicité doit être
délivrée au consommateur résultent de dispositions sectorielles et de l’action des Tribunaux.
On relèvera notamment:
-
La publicité doit être aisément identifiable comme telle23.
-
La communication commerciale doit donner au consommateur une information
complète et immédiatement accessible, au moment de sa communication, sans qu’il
soit nécessaire d’attendre une nouvelle diffusion du message24 ni l’adjonction d’un
document complémentaire à agrafer avec le catalogue25.
22
Cf. Article 4 de la Loi n° 94-665 du 4 août 1994 / Circulaire du 19 mars 1996.
En matière de publicité télévisée, celle-ci doit être identifiée par des écrans reconnaissables à leurs
caractéristiques optiques et acoustiques – art. 14 Décret n°92-280 du 27 mars 1992 relative à la publicité et au
parrainage; Publicité sur internet et toute communication électronique - art. 20 de la Loi du 21 juin 2004 ; repris
dans le Code de la consommation, art. L. 121-15-1 et L. 121-15-2 : cf. ci-dessous, question 6-b).
24
Cass. Crim 4 octobre 1990, Dr. Pénal 1991, comm 2 ; régulièrement réaffirmée : TGI Nanterre, 22 mai 2002,
Gaz. Pal. 2003, somm. 1975.
25
C.A. Rennes, 6 décembre 2007, précité (page 5 du présent rapport).
23
11
-
La communication commerciale doit être claire, lisible et compréhensible pour le
consommateur moyen, tant du point de vue de la forme de la publicité (typographie,
graphisme, couleur) que du fond.
Ainsi, à titre d’illustration, la jurisprudence a eu à se prononcer sur la vitesse de
défilement du bandeau d’une publicité télévisée laquelle doit mettre le consommateur
en mesure de connaître le contenu de la publicité au moment de sa diffusion26.
Enfin, la communication commerciale doit veiller au respect de l’objectif d’intérêt général
poursuivi par les pouvoirs publics 27.
Les conditions relatives à la délivrance du message publicitaire, visées par la Directive, ont
été intégrées dans le Code de la consommation par la loi de transposition : l’article L. 121-1 II
précise désormais que les informations substantielles ne sauraient être fournies de façon
« inintelligible, ambiguë ou à contretemps »28.
6) Does the character of the medium through which the advertising is
communicated to consumers affect the scope of existing obligations of advertisers
to provide information?
La réponse est OUI. Le médium de communication utilisé comme support de publicité est
généralement pris en compte, soit expressément par le législateur, dans des dispositions
sectorielles, soit par le juge.
a. Is an explicit provision in this sense laid down in statutory law or is the
importance of the advertising medium reflected in case law? Examples.
A propos des supports de communication classique (presse, affichage, radio...), les
juridictions ont eu, dans la jurisprudence antérieure à la transposition de la Directive
2005/29/CE, une appréciation différente des mentions informatives en fonction du type de
support concerné par la communication commerciale.
Ainsi, pour des panneaux d’affichage de 4m x 3m, il a été jugé que des mentions restrictives
12 à 25 fois plus petites que la mention d’accroche, n’étaient pas suffisamment lisibles, la
finalité de ces panneaux étant d'être vus globalement, quel que soit l'endroit où le lecteur est
placé29.
L’appréciation de la compréhension du message peut également être analysée par référence à
des éléments extérieurs au support lui-même. Ainsi, la faible vitesse de circulation des bus
26
Trib. Com. Paris 6 septembre 2006 Juris-Data 2006-325066.
Par exemple, le BVP, dans une recommandation « automobiles » d’octobre 1998, a estimé que la publicité ne
saurait argumenter sur la vitesse ou l’attrait que celle-ci pourrait représenter, tant dans l’expression visuelle,
sonore, qu’écrite des messages.
28
Art. L121-1 II du Code de la consommation.
29
CA Paris, 13e ch., sect. A, 21 mai 2002, BRDA 2002, n° 26, p. 12 ; Cass. crim., 13 mai 2003, n° 02-84.100.
27
12
parisiens a été prise en considération pour l’appréciation de la compréhension de la publicité
par le consommateur30.
b. Is the scope of the obligation to provide information limited or extended in
respect to TV advertising, advertising via Internet, advertising via mobile
phones, other media?
Le législateur a précisé que la communication commerciale présentée à partir de nouveaux
médias (notamment via courrier électronique) devait être clairement identifiée comme telle31.
Concernant le support de communication électronique tel qu’un site Internet, la jurisprudence
a également eu l’occasion d’apprécier la compréhension des mentions d’informations par
rapport au support utilisé, notamment en retenant une analyse identique à celle retenue pour le
support télévisé, compte tenu des contraintes d’espace et de temps de ces moyens de
communication de nature similaire (associant les éléments visuel, auditif et textuel)32, et en
enjoignant, le cas échéant, qu’il soit fait mention des informations concernant l’identité du site
Internet33.
c. If your country is a member of the European Union, in what way has the
proviso of Art. 7. 3 Directive on Unfair B2C Commercial Practices been
transposed in your national law?
L’article L. 121-1 II alinéa 1, transposant la Directive dispose que l’obligation positive
d’information doit s’apprécier « compte tenu des limites propres au moyen de communication
utilisé ».
Il s’agit de la codification d’une jurisprudence déjà établie (notamment affaire UFC/ MAAF
précitée) et d’une référence à l’article 7.1. de la Directive.
En revanche, la transposition de la Directive parait incomplète puisqu’on ne relève, dans le
droit français, aucune disposition expresse relative à l’article 7.3 relatif aux conditions de
délivrance de l’obligation positive d’information via des outils de communication contraints
par des limites d’espace et de temps (qui intéresse spécifiquement les nouveaux modes de
communication tels que SMS, MMS, WAP Internet mobile...).
Cela est de nature à poser un problème d’application de la loi (cf. Question 14 ci-dessous).
30
CA Paris, 27 novembre 2002, NRJ Skyrock.
Article 20 Loi LCEN juin 2004 ; Article L. 121-15-1 du Code de la consommation : « Les publicités, et
notamment les offres promotionnelles, telles que les rabais, les primes ou les cadeaux, ainsi que les concours ou
les jeux promotionnels, adressés par courrier électronique, doivent pouvoir être identifiés de manière claire et
non équivoque dès leur réception par leur destinataire, ou en cas d'impossibilité technique, dans le corps du
message », et Article L. 121-15-2 : ” Sans préjudice des dispositions réprimant les pratiques trompeuses prévues
à l'article L. 121-1, les conditions auxquelles sont soumises la possibilité de bénéficier d'offres promotionnelles
ainsi que celle de participer à des concours ou à des jeux promotionnels, lorsque ces offres, concours ou jeux
sont proposés par voie électronique, doivent être clairement précisées et aisément accessibles”.
32
TGI Paris 13 juin 2006 / CA Paris 25ème Ch. 16 novembre 2007, UFC / MAAF.
33
TGI Paris 1° ch. 6 décembre 2005, faisant notamment injonction à la société Class action.fr de mentionner sur
le site litigieux les informations la concernant (conformément à la loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans
l’économie numérique)
31
13
7) How are the existing positive obligations to provide information enforced (e.g. by
way of administrative sanctions; by way of positive injunction; by way of
negative injunction (cease and desist); by way of criminal sanctions)?
Le non-respect par un annonceur des dispositions légales en matière d’obligation
d’information est pénalement sanctionné.
La constatation de l’infraction peut être effectuée par l’une des autorités administratives
suivantes (art. L.121-2 du Code de la consommation) : D.G.C.C.R.F.34, D.G.A.35, Ministère
de l’agriculture ou service de métrologie. L’article L.121-3 du Code de la Consommation
prévoit que la cessation de la pratique commerciale trompeuse peut être ordonnée par le juge
d’instruction ou par le tribunal saisi des poursuites36.
Cette cessation anticipée de la pratique ne fait pas obstacle au prononcé d’une condamnation
de la personne pour le compte de laquelle la pratique commerciale trompeuse a été mise en
œuvre37.
Les sanctions en cas d’infraction à la législation sur les pratiques commerciales trompeuses,
non modifiées par la transposition de la Directive, sont les suivantes :
-
celles prévues en matière de tromperie38 à l’article L. 213-1 du Code de la
Consommation : une amende de 37.500 € et 2 ans de prison, pour les personnes
physiques, et une amende de 187 500 € pour les personnes morales, outre des peines
complémentaires prévues à l'article 131-39-2° à 9° du Code pénal.
-
l’amende peut être portée à 50 % des dépenses de la publicité ou de la pratique
constituant le délit (C. Cons. Art. L.121-6) pour les personnes physiques, et à 250 %
de ces dépenses pour les personnes morales.
-
le tribunal peut ordonner, aux frais du condamné, la diffusion d’une ou plusieurs
annonces rectificatives (C. Cons. Art. L.121-4).
Il est également intéressant de noter que la D.G.C.C.R.F. (l’autorité administrative chargée de
la concurrence et de la consommation) a droit, tant que l’action publique n’a pas été mise en
mouvement, de transiger, après accord du procureur de la République. L’acceptation et
l’exécution de la transaction ont pour conséquence d’éteindre l’action publique39.
Il est enfin intéressant de souligner, eu égard à la nature de cette étude, que la loi française 40
prévoit que les agents habilités à constater les infractions mentionnées à l'article L. 141-1 et à
l'article L. 121-1 du code de la consommation peuvent également coopérer avec les autorités
compétentes des pays membres de l'Organisation de coopération et de développement
34
Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
Direction générale de l’alimentation.
36
Les articles L. 121-2 à L. 121-6 du Code de la consommation n’ont pas été modifiés par la transposition de la
Directive.
37
Art. L.121-5 du Code de la Consommation.
38
Cf. délit de tromperie traité à la question 2. a.
39
Art. L.141-2 du Code de la Consommation.
40
Article L. 141-3 du Code de la Consommation.
35
14
économiques (OCDE), non-membres de l'Union européenne, en vue de prévenir ou de faire
cesser des pratiques commerciales transfrontières illicites.
Il existe en outre certains régimes spéciaux de sanction :
-
Alcool : Aux termes de l’article L. 3351-7 du Code la santé publique, les infractions
aux dispositions des articles L. 3323-2-2, L. 3323-4, L. 3323-5 et L. 3323-6 relatifs à
la limitation de la publicité sur les boissons alcooliques, sont punies d’une amende de
75.000 € (pouvant être portée à 50 % des dépenses liées à l’opération illégale). En cas
de récidive, le juge peut interdire, pour une durée de 1 à 5 ans, la vente de la boisson
en cause.
-
Armes à feu : La loi n°85-706 du 12 juillet 1985 interdit toute pratique induisant une
appréciation valorisante des armes à feu. Le non-respect de ces dispositions est
sanctionné d’une peine d’amende de 45.000 € ; en cas de récidive, l’amende peut être
portée au double.
-
Tabac : les infractions aux dispositions relatives à la lutte contre le tabagisme sont
punies d’une peine d’amende de 100.000 €41 pour les personnes physiques et de
500.000 € pour les personnes morales. En cas de propagande ou de publicité interdite,
le maximum de l'amende peut être porté à 50 % du montant des dépenses consacrées à
l'opération illégale. Par ailleurs, en cas de récidive, le tribunal peut interdire pendant
une durée de un à cinq ans la vente des produits qui ont fait l'objet de l'opération
illégale.
8) What (if any) is the liability of advertising agencies and the media through which
the advertising is communicated (e.g. TV and radio broadcasters) for advertising
that fails to comply with information obligations imposed on advertisers?
Une telle responsabilité des agences de publicité et des médias est prévue : « La jurisprudence
admet qu'en matière de publicité, les annonceurs, agences, supports (éditeurs, directeurs de
publication) sont responsables pénalement. Seules les agences publicitaires qui peuvent
prouver qu'elles ne font qu'exécuter un ordre et n'ont pas de rôle de conseil, voient leur
responsabilité pénale dégagée »42.
La diffusion de la publicité engage donc la responsabilité des médias (ou « supports ») et des
agences de publicité lorsqu’une faute peut être retenue à leur encontre. Le responsable de la
publication des supports43 pourra voir sa responsabilité engagée tant sur le plan pénal que
civil du fait de la diffusion de publicités mensongères, illicites ou simplement déloyales.
Ce type de responsabilité trouve à s’appliquer principalement pour des publicités trompeuses
(actions trompeuses). Mais l’on ne saurait exclure qu’elle puisse aussi s’appliquer dans des
cas de manquement à l’obligation positive d’information de l’annonceur (c’est-à-dire à des
omissions trompeuses), dont l’agence ou le médium serait tenu pour responsable.
41
Loi n°2004-806 du 9 août 2004.
Question écrite Léron, n° 21573 : JOAN 11 déc. 1989, p. 5382.
43
L'article 93-2 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 impose notamment à toute entreprise de communication
audiovisuelle d'avoir un directeur de la publication qui réponde personnellement des infractions commises en
matière de presse (Cass. crim., 29 oct. 1991 : Gaz. Pal. 1994, 1, p. 321, note Mme Fiechter Boulevard).
42
15
1.
Responsabilité pénale
L’article L.121-5 du Code de la consommation issu de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008
prévoit que la personne pour le compte de laquelle la pratique commerciale trompeuse est
mise en œuvre (c’est-à-dire l’annonceur, comme le précisait l’ancienne rédaction de cet
article) est responsable à titre principal de l’infraction commise.
Cet article permet également de sanctionner les actes de complicité : ainsi , les agences de
publicité, les conseils en publicité et les supports publicitaires (journaux, revues…) peuvent
être poursuivis comme complices ou comme co-auteurs, notamment lorsqu’ils ont pris une
part importante dans la réalisation de l’infraction44. La jurisprudence exige alors que la
tromperie porte sur des éléments que l’agence est censée maîtriser45.
La responsabilité des supports n'est toutefois pas d'application automatique et peut exiger un
acte positif de complicité46.
2.
Responsabilité civile
Les supports et les agences de presse peuvent voir leur responsabilité civile engagée du fait
de la diffusion de la publicité, lorsque celle-ci cause un préjudice à des tiers. Cela peut
notamment être le cas lorsqu’un tiers (association de consommateurs par exemple) se porte
partie civile à l’occasion de poursuites pénales pour une publicité trompeuse, engageant la
responsabilité pénale de l’agence ou du support (cf. ci-dessus).
En outre, la responsabilité civile délictuelle du médium ou de l’agence pourrait
théoriquement être engagée sur le fondement de la concurrence déloyale47. La
jurisprudence a par exemple retenu la responsabilité du support (une radio) car les termes
utilisés dans une publicité, considérés par des concurrents comme constitutifs de
dénigrement et de publicité mensongère, constituaient « manifestement une attaque abusive
des concurrents »48.
Cette responsabilité civile pour concurrence déloyale pourrait également s’appliquer dans
une hypothèse où le manquement d’un annonceur à son obligation positive d’information
constituerait un acte de concurrence déloyale, dont le concurrent « victime » rendrait
responsable l’agence ou le support. Dans ce cas, la faute de ces derniers pourrait consister
en l’absence de surveillance du contenu du message.
44
TGI Paris, 25 février 1977 JCP G 1979 II 19141 ; Cass. Crim. 8 mai 1979 Bull. Crim. n° 167. TGI Paris,
23 avril 1997, Gaz. Pal. 1998, p. 364, pour des journaux/revues : les Directeurs de la Publication avaient accepté
de diffuser une publicité aux allégations « manifestement mensongères ».
45
CA Paris, 30 septembre 1980 : la responsabilité de l’agence de publicité n’a pas été retenue car l’annonceur
était mieux à même de connaître les dispositions spécifiques de la réglementation fiscale alléguées dans
l’argumentaire de vente.
46
Cass. Crim, 30 novembre 1994, l’Equipe Magazine. La responsabilité du Directeur de la Publication du
journal ne pouvait être engagée pour violation des dispositions relatives à la publicité en faveur des cigarettes par
le seul fait de la violation incriminée : il fallait rechercher s’il avait eu un comportement fautif comme co-auteur
ou complice, soit en prenant lui-même la décision de publier l'encart publicitaire illicite, soit en n'empêchant pas
cette publication dont il aurait eu connaissance avant l'impression du journal.
47
Article 1382 et 1383 du Code civil. L’action en concurrence déloyale suppose que soient démontrés une faute,
un préjudice et un lien de causalité entre les deux.
48
T.G.I. Paris, 27 mai 1977, cité dans « La publicité et la Loi », P. et F. GREFFE, 9ème Edition, § 790.
16
3.
Responsabilités spécifiques (obligations d'information spécifiques)
Tabac :
Il résulte de l’article L. 3512-2 du Code de la santé publique que "Le tribunal peut, compte
tenu des circonstances de fait, décider que les personnes morales sont en totalité ou en partie
solidairement responsables du paiement des amendes et des frais de justice mis à la charge de
leurs dirigeants ou de leurs préposés".
La seule constatation d’une infraction commise en connaissance de cause des prescriptions
légales ou réglementaire suffit à caractériser l’intention coupable.
En pratique, il convient de distinguer la responsabilité de l’auteur principal et des co-auteurs
ou complices. La jurisprudence a confirmé la responsabilité, en tant qu'auteurs, des dirigeants
de l'entreprise ayant réalisé la publicité, lorsque ces derniers ont approuvé la publicité et qu'ils
y ont contribué49.
S’agissant de la responsabilité des supports, par cinq jugements rendus le même jour,
plusieurs responsables de publications ont été sanctionnés pour avoir diffusé des publicités
illicites en faveur du tabac50. La Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a approuvé la
solution des juges du fond.
En cas de participation active du support à l'infraction, la Cour de cassation retient la
responsabilité du directeur de la publication, en tant qu'auteur principal du délit (et non pas
seulement complice), au motif :
“que le prévenu, sans l'intervention duquel la publicité litigieuse, qu'il ne pouvait
ignorer en raison de son importance, n'aurait pas été publiée, a concouru
personnellement à la réalisation de l'infraction”51, pour des journaux.
La responsabilité des agences de publicité peut, comme celle de toute personne ayant
participé à l'infraction, être engagée au titre de la complicité, quand bien même l'auteur
principal ne serait pas poursuivi52.
Alcool :
L’article L. 3351-7 du Code de la santé publique dispose que "Le tribunal peut, compte tenu
des circonstances de fait, décider que les personnes morales sont en totalité ou en partie
solidairement responsables du paiement des amendes mises à la charge de leurs dirigeants ou
de leurs préposés".
En l’absence de précision, en cas d’infraction à cette législation spécifique, peuvent être tenus
pour responsables non seulement l’annonceur ou le publicitaire, mais également le directeur
de la publication ayant servi de support.
49
Cass. crim., 18 juin 2002, pourvoi n° 01-84.437, inédit.
TGI Paris, 31e ch., 20 janv. 1993 : RTD com. 1993, p. 596.
51
Cass. crim., 14 juin 1995, Keijzer Pieter et a. : D. 1997, somm. p. 74 ; Bull. crim., n° 221. – Cass. crim.,
29 nov. 1995, Grimaldi c/ Le Figaro : Légipresse 1996, n° 132, p. 70.
52
Cass. crim., 29 avril 1986 : JCP E 1986, II, 15564 ; Bull. crim., n° 146 ; Gaz. Pal. 1987, 1, somm. p. 101. –
CA Paris, 13e ch. A, 20 juin 1984, Carrière : Gaz. Pal. 1984, 2, p. 558.
50
17
9) What private and public bodies are granted standing to sue or competence to
enforce the information obligations viz. advertisers?
a. Public agencies (competition authorities, consumer protection authorities)
La D.G.C.C.R.F., Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes, détecte et sanctionne les pratiques préjudiciables aux consommateurs
(publicités mensongères notamment) et vérifie la bonne application des règles de publicité des
prix. Elle a compétence pour constater les infractions et saisir le Procureur afin que
l’annonceur fautif soit poursuivi53.
L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (A.F.S.S.A.P.S.), établissement
public de l'Etat, assure le contrôle de la publicité relative aux médicaments. En complément,
l’A.F.S.S.A.P.S. élabore des recommandations à destination des industriels pour leur
permettre d’élaborer des messages publicitaires qui soient conformes aux exigences en
matière de bon usage du médicament.
Enfin, le Conseil national de la consommation (C.N.C.), composé de représentants des
associations de consommateurs et des professionnels, exerce une mission de consultation pour
les orientations des pouvoirs publics en matière de politique de la consommation. Le C.N.C.
est obligatoirement consulté préalablement à la publication de tout arrêté en matière de prix
ou de publicité de prix. Toutefois, ses décisions n’ont aucun caractère contraignant.
b. Competitors and their associations?
Le Bureau de Vérification de la Publicité (B.V.P.), association d’autorégulation de la
publicité, se compose des trois professions impliquées dans la production et la diffusion des
campagnes publicitaires: les annonceurs, les agences de communication et les supports (cf.
Question 10 ci-dessous).
L’Union des Annonceurs (U.D.A.) représente les entreprises, collectivités ou organismes qui
recourent aux différentes techniques de communication pour promouvoir leur notoriété, leur
image, leurs produits ou leurs services. Elle a notamment pour mission d’élaborer et
promouvoir des pratiques loyales et éthiques pour une communication responsable. Elle
assure la diffusion auprès de ses membres de la législation applicable en matière de publicité.
c. Consumer organisations?
Les associations de consommateurs agréées participent aux débats portant sur les intérêts des
consommateurs et ont qualité pour agir au nom des consommateurs dans la défense de leurs
intérêts devant les tribunaux.
53
Cf question 7.
18
En France, l’association UFC-Que Choisir, créée en 1951, est particulièrement active dans ce
secteur. Elle s’est notamment attachée à défendre les consommateurs face à la publicité des
produits alimentaires portant des allégations trompeuses. Ainsi, elle a obtenu, en 2005, la
condamnation pour publicité trompeuse d’une eau de Vittel évoquant une eau minérale riche
en calcium alors qu’il s’agissait d’une boisson sucrée aromatisée54.
L’association participe également aux débats ouverts à l’occasion de réformes de la
législation existante, afin d’assurer, dans les communications publicitaires, une information
claire et loyale aux consommateurs (renvoi par astérisque, mentions des caractéristiques
essentielles du produit ou service, allégations...).
Le Comité National contre le Tabagisme est également très actif pour lutter contre la publicité
sur le tabac.
d. Individual consumers?
Le consommateur ayant un intérêt à agir peut saisir le juge, par le biais de la constitution de
partie civile, afin d’obtenir réparation du préjudice causé par une publicité trompeuse.
e. Others?
Non.
10) What is the role of self-regulation and of voluntary advertising codes and their
relation to statutory information duties imposed on advertisers?
L’autorégulation publicitaire émane du Bureau de Vérification de la Publicité (B.V.P.) créé il
y a plus de 70 ans55.
Il s’agit d’une association d’autorégulation de la publicité, indépendante des pouvoirs publics.
Elle est composée des trois professions impliquées dans la production et la diffusion des
campagnes publicitaires : les annonceurs, les agences de communication et les supports.
Le B.V.P. a pour but de "mener une action en faveur d'une publicité loyale, véridique et saine
dans l'intérêt des professionnels de la publicité, des consommateurs et du public." Sa mission
est de parvenir à concilier liberté d'expression publicitaire et respect des consommateurs. Le
maintien de cet équilibre entre créativité et responsabilité est au cœur de l'autodiscipline
publicitaire.
Le B.V.P. adopte des Recommandations qui prennent appui sur les principes retenus dans le
Code de la Chambre de Commerce Internationale (C.C.I.) et ses "pratiques loyales en matière
de publicité". Ces recommandations, qui vont au-delà des obligations fixées par la loi,
constituent un document de référence pour tous les acteurs de la publicité, qui s’engagent à les
respecter. Le B.V.P. en vérifie l’application avant comme après la diffusion des publicités.
54
55
TGI Nanterre, 16 décembre 2005.
Le BVP a succédé à l’Office de Contrôle des Annonces (OCA) créée le 29 août 1935.
19
Par ailleurs, depuis 1992, dans le cadre d’une procédure d’avis56 le BVP est chargé
d'examiner systématiquement l’intégralité des films publicitaires télévisés avant leur passage
sur les antennes, les régies des chaînes s’étant, de leur côté, engagées à ne diffuser que des
spots assortis de l’avis du BVP.
L’autorégulation consiste donc pour les professionnels de la publicité à se donner des règles
qui vont au-delà des obligations fixées par la Loi (par exemple: recommandations sur les
allégations de santé ou le développement durable). Elle peut également être concertée avec les
pouvoirs publics (avec le CSA pour la publicité télévisée et avec le Ministère délégué à la
cohésion sociale et à la parité pour le respect de l’image de la personne humaine en
publicité57), devenant alors co-régulation.
Ainsi, les règles d’autodiscipline élaborées par des professionnels du secteur prennent
spéciquement en compte les contraintes et possibilités concrètes de ce secteur (évolution des
mentalités et des sensibilités des consommateurs, des technologies et de la jurisprudence).
L'autodiscipline permet en outre de compléter ou changer une règle déontologique en
quelques mois, parfois moins (contrairement à la modification de textes législatifs), ce qui
permet d’ajuster très vite l’encadrement aux enjeux d’une société en mouvement.
Enfin, l’encadrement d’un secteur par l’autorégulation repose sur l’autofinancement du
dispositif par les acteurs de ce secteur, sans aucune ponction sur les deniers publics.
11) Is there any discussion in your country on the relationship between a positive
obligation to provide information in advertising and freedom of commercial
communication or other constitutionally protected rights and freedoms?
La publicité commerciale a été rattachée par le Conseil constitutionnel aux principes
fondamentaux de la liberté d’entreprendre et de la liberté d’expression58 dont l’exercice peut
être soumis à des restrictions justifiées, objectives et proportionnées au but légitime poursuivi.
A cet égard, la jurisprudence a eu à se prononcer sur les restrictions imposées aux annonceurs
concernant la publicité en faveur du tabac et de l’alcool, et les a jugées comme une mesure
nécessaire à la protection de la santé59.
En revanche, l’obligation positive d’information faite aux annonceurs n’a pas donné lieu à
discussions lors des débats législatifs. En outre, l’introduction récente dans le droit positif
français n’a pas encore permis de dégager de solution jurisprudentielle sur ce point.
Mais, à l’instar de ce qui s’est passé pour les publicités fortement réglementées (alcool) ou
interdites (tabac), les contraintes d’informations exigées de l’annonceur pourraient, si elles
étaient étendues à l’excès, remettre en cause l’exercice de la communication commerciale, par
nature exagérée et hyperbolique.
Système d’avis créé en 1992.
Déclaration commue entre le ministère délégué à la cohésion sociale et à la parité et le BVP formalisée le
27 novembre 2003.
58
Déc. C.C. n°90-283 du 8 janvier 1991 ; Cass. crim., 19 nov. 1997 : D. 1998, p. 613, note J.-C. Galloux.
59
A titre d’illustration, entre les supports de presse écrite et télévisée pour la retransmission des compétitions de
sport mécaniques se déroulant à l’étranger : CA Paris 13° ch.Corr. 5 juin 2007 JD 2007-33869 ; CA Bordeaux
3°ch. Corr. 30 juin 2006 JD 2006-328555 ; C. Cass 19 juin 2007 n°06-88.014
56
57
20
12) What are the arguments advanced in the legal policy debate in your country for
and against imposing positive information duties on advertisers (protection of the
economic interest of consumers; increasing market transparency, remedying
informational market failures due to product complexity/impossibility of
consumers to ascertain quality; protection of health; protection of the
environment; or alternatively, information overkill)?
Peu d’informations sont disponibles sur cette question car les textes applicables sont de nature
essentiellement réglementaire, donc adoptés sans débats publics.
Toutefois, certains arguments ont été mis en avant, tant par les associations de professionnels
que les associations de consommateurs en faveur d’une obligation positive d’information :
favoriser la transparence des informations, favoriser la mise en concurrence, clarifier le
message délivré aux consommateurs, assurer l'encadrement et le contrôle des pratiques
commerciales, assurer des garanties suffisantes en termes de dispositif de contrôle.
Ces arguments sont notamment issus de questions parlementaires posées lors de séances aux
chambres du Parlement (Assemblée Nationale et Sénat).
13) Does the topic raise any special or additional issue in your jurisdiction, apart
from the matters already covered in your answers to the questionnaire?
Néant.
14) Any concluding remark?
Les principales “critiques” du groupe de travail sur le dispositif français portent sur les
conditions dans lesquelles a été transposée en droit interne la Directive 2005/29/CE.
Toutefois, à cette occasion, les membres du Groupe de travail français entendent porter un
regard plus général sur l’ensemble du dispositif régissant l’obligation positive de fourniture
d’informations pesant sur l’annonceur. Cela amène à soulever plusieurs éléments importants
de discussion, qui peuvent s’articuler autour de 3 points :
1. Qui est le destinataire de la publicité ?
L’appréciation du caractère trompeur – par action ou par omission – d’une publicité diffère
selon son destinataire, celui qui la reçoit (la voit, la lit, l’entend…). Dès lors, l’obligation
positive d’information pèse-t-elle sur l’annonceur quelque soit son destinataire, ou au
contraire doit-elle être « modulée » en fonction de celui à qui la publicité est destinée ?
Il convient donc, dans la définition de l’obligation positive d’information et l’incrimination de
son omission, de déterminer avec précision à qui s’adresse la publicité incriminée. Sur ce
point, deux remarques s’imposent.
21
1.1. Quelle définition du « consommateur » ?
La nouvelle rédaction de l’article L.120-1 du code de la Consommation fait référence à un
« consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé ». Cette notion est
malheureusement très floue et la jurisprudence, abondante sur ce point, est loin d’être plus
claire. En réalité, le juge ne dispose d’aucun moyen d’appréciation pour déterminer l’impact
de l’annonce publicitaire sur son « modèle abstrait » ainsi que les réactions de ce dernier.
La Directive se réfère (article 5) au « consommateur moyen qu’elle touche ou auquel elle
s’adresse » : or cette notion n’est guère plus claire, et là encore très abstraite. La Directive
introduit également une notion spécifique de « consommateurs particulièrement vulnérables »
en raison de leur âge ou de leur crédulité notamment – sans que l’on sache si l’obligation
d’information de l’annonceur doit être renforcée dans cette situation.
Au final, il serait utile :
-
soit d’adopter une définition précise du « consommateur » destinataire de la
publicité, qui doit être pris en référence pour apprécier le degré d’information à
lui fournir et le caractère trompeur d’une omission ;
-
soit de prévoir qu’il n’existe pas une seule notion de consommateur, mais que
celle-ci doit être adaptée au type de message publicitaire, au support utilisé
(l’utilisateur d’Internet est-il plus ou moins « averti » que le lecteur d’une
affiche ou d’un catalogue ?), ou encore au produit/service pour lequel
l’annonce est faite.
La L.I.D.C. pourrait se positionner sur ce point, et, soit proposer une définition du
« consommateur », soit opter pour la modulation de la notion de consommateur à prendre en
compte selon chaque cas d’espèce (voire en proposant des catégories de consommateur, qui
modifieraient l’appréciation de l’étendue de l’obligation d’information).
1.2. Le consommateur peut-il être un professionnel ?
L’article L.121-1 III du Code de la consommation, après transposition, précise que le I de cet
article (sur les actions trompeuses) « est applicable aux pratiques qui visent les
professionnels ». Ce n’est pas le cas, en revanche, du II du même article, sur les omissions
trompeuses.
A l’inverse, la Directive réserve expressément la protection aux consommateurs (définis à
l’article 2 a)), ce qui semble exclure la notion de professionnels.
La notion de « consommateur » doit-elle, alors, être étendue aux professionnels, et dans quelle
mesure ? Ne peut-on pas considérer que les dispositifs prévoyant l’obligation positive
d’information des annonceurs visent à protéger des personnes présumées peu (ou
moyennement) avisées – ce qui n’est pas le cas des professionnels ?
En outre, si le dispositif doit être étendu aux professionnels, la protection doit-elle être limitée
aux actions trompeuses (comme la loi française le prévoit), et non pas étendue aux omissions
trompeuses ?
Il semblerait utile à notre Groupe de travail que la L.I.D.C. se prononce sur cette double
interrogation (en particulier dans l’intérêt des Groupes Nationaux ne faisant pas partie de
22
l’Union Européenne), et notamment qu’elle prenne position sur l’extension éventuelle de
l’obligation d’information de l’annonceur aux destinataires professionnels.
Le Groupe de travail français est d’avis, à cet égard, que le dispositif ne doit pas être étendu
aux professionnels, dont le degré de vigilance face à une publicité est a priori supérieur à
celui d’un consommateur profane, ce qui justifie une moindre protection quant à l’obligation
d’information des annonceurs.
2. Quelles communications entrent dans le champ d’application de la pratique
trompeuse par omission ?
La Directive limite l’obligation de porter au consommateur certaines informations
substantielles aux communications effectuées dans le cadre d’une « invitation à l’achat »,
notion définie à l’article 2 i) comme suit :
« Une communication commerciale indiquant les caractéristiques du produit et son
prix de façon appropriée en fonction du moyen utilisé pour cette communication
commerciale et permettant ainsi au consommateur de faire un achat ».
Autrement dit, une invitation à l’achat est constituée par une communication qui donne au
consommateur les informations lui permettant de procéder à un achat60 : c’est ce lien entre
l’annonce et l’acte d’achat qui rend l’omission répréhensible.
Dans la Loi française, l’article L.121-1 II ne reprend pas la terminologie de la Directive, mais
se contente d’imposer une obligation de porter à la connaissance du consommateur des
informations substantielles listées « dans toute communication commerciale mentionnant le
prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé ». Les critères de la Directive
(communication au consommateur, mention du prix et des caractéristique du bien) sont
remplis, mais la Loi française peut paraître plus large en ce qu’elle se réfère à toute
communication commerciale, et non pas seulement à celle qui mène le consommateur à
l’achat.
La L.I.D.C. pourrait prendre position pour clarifier ce point : l’obligation positive
d’information des annonceurs (et l’incrimination pour omission trompeuse s’il manque une
information substantielle) doit-elle être limitée au cas où l’annonce publicitaire a pour but de
conduire à une décision commerciale, à un achat ?
Plus largement, la L.I.D.C. pourrait prendre position sur le point de savoir si cette obligation
de ne pas omettre toute une liste d’informations (prix, modalités de paiement, caractéristiques
du produit, …) doit effectivement ne s’appliquer que dans les cas où l’annonce mentionne le
prix et les caractéristiques du produit.
Notre Groupe de travail est d’avis que cette limitation du champ de l’obligation doit être
maintenue, et qu’à l’inverse, une publicité ne mentionnant ni le prix, ni les caractéristiques du
produit/service (mais par exemple seulement une photographie d’un produit), ne doit pas être
soumise à l’obligation positive de fournir des informations précisément listées – puisqu’elle
ne met pas en mesure le consommateur de procéder à un achat.
60
Cela est confirmé par le fait que la Directive se réfère à deux reprises à la « décision commerciale » prise par
le consommateur à la suite de l’annonce publicitaire.
23
3. Quelles informations l’annonceur doit-il donner au consommateur (notamment
sur les « caractéristiques » des produits) ?
C’est un point fondamental de cette Question B : comment définir les informations relevant
de l’obligation positive d’information de l’annonceur ?
Faut-il imposer de ”tout dire” ? Faut-il énumérer limitativement les informations à fournir au
consommateur ? Dans ce cas, comment déterminer les ”informations substantielles” à lui
fournir – et celles qui, a contrario, peuvent être tues ?
Faut-il au contraire laisser une marge d’appréciation à l’annonceur ? Faut-il moduler le degré
de son obligation d’information en fonction :
-
du produit / service concerné, notamment en fonction de son prix (degré d’engagement
financier du consommateur), de sa notoriété, ou surtout de son éventuel caractère
dangereux pour la santé ou la sécurité des consommateurs ? En d’autres termes, le
degré d’obligation d’information positive d’un annonceur peut-elle vraiment être
appréciée de la même manière selon que l’annonce porte sur un jouet d’enfant, un
crédit immobilier ou une cravate ?
-
du support de communication utilisé : la portée de l’obligation peut-elle être la même
selon qu'il s'agit d'un écran télévisé, d’une immense affiche ou d'un écran de téléphone
mobile ?
La Directive et la Loi française apportent des réponses sensiblement différentes.
La Directive, à plusieurs reprises, tempère l’obligation positive d’information (et
l’incrimination de l’omission trompeuse) en prévoyant que son étendue et sa portée dépendent
du ”contexte factuel” de l’annonce, de ”toutes ses caractéristiques”, des ”circonstances”, des
”limites propres au moyen de communication utilisé” (article 7.1), notamment des limites
”d’espace et de temps”, ainsi que de ”toute mesure prise par le professionnel pour mettre les
informations à la disposition du consommateur par d’autres moyens” (article 7.3, visant
notamment les ”nouveaux médias). Cela induit manifestement une certaine souplesse dans
l’application des règles.
De même, la définition de l’information substantielle, bien qu’assez floue, est également
souple dans la Directive : c’est celle ”dont le consommateur a besoin, compte tenu du
contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause”. La notion de
”contexte” permet de déterminer, au cas par cas, si une information omise était ou non
substantielle au vu de la situation.
A l’inverse, l’énumération, dans la Directive, des informations ”considérées comme
substantielles” dans une invitation à l’achat – et dont l’omission est considérée comme
trompeuse (article 7.4) – peut sembler rigoureuse. Toutefois, au sein même de cette
énumération, la Directive est souple puisqu’elle n’oblige par exemple à indiquer les
caractéristiques ”principales” du produit61 que ”dans la mesure appropriée eu égard au
moyen de communication utilisé et au produit concerné”: de nouveau, cela induit une marge
61
Article 7.4 a) de la Directive. Les « caractéristiques principales » sont énumérées de façon non limitative à
l’article 6.1 b) : disponibilité, risques, composition, service après-vente, quantité, origine, …
24
d’appréciation pour l’annonceur – et pour les juges. Cela permet notamment de déterminer
au cas par cas, selon le medium et le produit, si telle caractéristique était ou non
principale et substantielle, et donc si son omission est ou non trompeuse.
La Loi française retient moins de marge d’appréciation pour l’obligation d’information
positive de l’annonceur : elle indique simplement que, pour déterminer si l’omission d’une
information substantielle est une pratique commerciale trompeuse, il faut tenir compte ”des
limites propres au moyen de communication utilisé” (L. 121-1 II alinéa 1).
Il n’y a pas, en revanche, de ”modulation” ou de marge d’appréciation de cette obligation en
fonction du ”contexte” ou des ”circonstances” de l’annonce, ou encore du produit concerné. À
titre d’exemple, les caractéristiques ”principales” du produit, mentionnées à l’article L. 121-1
II sur les omissions trompeuses62, semblent devoir être indiquées dans toute communication
commerciale mentionnant le prix et les caractéristiques du bien, sans marge d’appréciation sur
leur caractère substantiel ou non en fonction du produit ou du contexte de l’annonce.
En particulier, l’article 7.3 de la Directive, qui vise spécifiquement les nouveaux supports de
communication (SMS et Internet mobile) et prévoit la possibilité pour l’annonceur usant d’un
tel moyen de communication de s’exonérer d’une omission trompeuse en justifiant avoir pris
des mesures pour mettre les informations à disposition du consommateur par d’autres moyens,
ne semble pas avoir été pris en compte par le législateur français.
Comment l’annonceur français utilisateur de ”nouveaux médias” pourra-t-il voir réduire
l’étendue de son obligation positive d’information : en justifiant simplement de contraintes
techniques propres au médium utilisé ? Ou devra-t-il, au surplus, justifier avoir pris d’autres
mesures pour mettre les informations à la disposition du consommateur (via un autre support
média, le renvoi un site web, le renvoi à un numéro vert gratuit....) ? Le droit français ne
tranche pas ce point, ce qui est une source d’insécurité pour les annonceurs.
Il semble nécessaire que la L.I.D.C. prenne une position claire sur ces questions,
notamment sur l’opportunité :
-
soit de ”figer” l’obligation d’information positive de l’annonceur (énumération stricte
des informations à fournir, généralisation de l’obligation nonobstant le support, le
produit ou le contexte de l’annnonce), afin de l’appliquer de façon uniforme à toute
annonce publicitaire ;
-
soit au contraire d’apprécier in concreto, si, en fonction des situations, l’omission
d’une information particulière par un annonceur a pu ou non être trompeuse pour le
consommateur. Dans ce cas, la L.I.D.C. pourra proposer des critères
d’appréciation et de modulation de l’obligation d’information positive : produit
concerné (dangerosité, notoriété, valeur), support de communication retenu
(notamment les ”nouveaux médias” et leurs limites), contexte de la publicité, voire
catégorie de consommateurs destinataire de l’annonce (cf. ci-dessus, question 14.1),
etc...
Notre Groupe de travail français est d’avis qu’il convient de conserver une certaine
souplesse, et d’apprécier de manière concrète, au cas par cas, l’étendue de l’obligation
positive d’information de l’annonceur.
62
Qui sont vraisemblablement les mêmes que les « caractéristiques essentielles » définies et limitativement
listées à l’article précédent sur les actions trompeuses – même si la différence de terminologie est surprenante.
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Il estime en particulier qu’une approche trop générale, qui ne tiendrait pas compte des
supports de communication utilisés notamment, serait susceptible d’entraver le
développement de nouveaux moyens de communication.
Il estime toutefois, enfin, que la règle de droit, bien qu’accompagnée d’une marge
d’appréciation in concreto, doit demeurer claire et précise, afin de ne pas fragiliser la situation
de l’annonceur.
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