bourg d`oisans…

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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
SOMMAIRE
DOMINATION ROMAINE
LES MINES DE BRANDES
MEROVINGIENS, CAROLINGINS : ROIS DE BOURGOGNE
LA LEGENDE DES SARRASINS
CONTES D’ALBON, DAUPHINS DE VIENNOIS
LE LAC SAINT LAURENT
LE LAC SAINT LAURENT, SUITE ET FIN
LA FOIRE, LES MARCHES
LA ROUTE DU LAUTARET
LE DAUPHINE DES ROIS
LES GUERRES D’ITALIE
LES GUERRES DE RELIGION
LE DAUPHINE ET LESDIGUIERES
LE MARQUIS DE VIENNOIS
MANDRIN
LES MINES DE L'OISANS A LA FIN DU XVIII EME SIECLE
- LA MINE DE CHALANCHES
- LA MINE DE LA GARDETTE
LA NAISSANCE DE LA REVOLUTION
LA PLAINE D’OISANS : DES INONDATIONS
LA REVOLUTION FRANCAISE
LA GRAVE ? : ISERE OU HAUTES ALPES
L’EMPIRE
LA RESTAURATION
LA ROMANCHE : SES CAPRICES…
LA III° REPUBLIQUE
LES VOIES FERREES DU DAUPHINE
LA MINE DE L’HERPIE
1939… 1945
V.F.D. : SUITE ET FIN
BOURG D’OISANS : SON IMPLANTATION
BOURG D’OISANS : SA MORPHOLOGIEPREFACE
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Lutter contre la dévitalisation des centres et la destruction du tissu urbain est une
préoccupation de plus en plus actuelle. Les villes, les bourgs, les villages sont touchés ;
les contraintes économiques, l’éclatement des activités, les changements du mode de vie
transforment ces microcosmes actifs qu’étaient les centres, en des lieux destinés à
l’abandon et à la destruction : l’espace urbain est alors destiné à un délayage total. Un
anonymat quotidien envahit notre art de vivre, notre art d’habiter.
Un sursaut toutefois se fait jour devant cet appauvrissement de nos villes, bourgs et
villages, une volonté de mieux vivre notre espace, existant ou à créer, est apparue.
A la suite de la décentralisation, les programmes d’actions mis en place touchent, non
seulement les agglomérations importantes, mais également les petites communes. AINSI
Bourg d’Oisans, devant la dévitalisation de son centre et le mitage de son parcellaire
périphérique, s’est il engagé dans un ensemble d’opérations visant à enrayer une telle
situation.
Dans ce contexte, la municipalité nous a proposé l’étude d’un quartier en voie de
déstructuration.
Nous avons donc tenté de repenser l’espace en fonction de la réalité actuelle, tout en
évitant de projeter une reproduction systématique d’un espace ancien et passéiste
rassurant, mais non justifiable. La densité d’une ville ou d’un bourg doit donc être
analysée, réadaptée et non condamnée comme par le passé.
Afin de mieux appréhender la logique de formation de l’espace bâti et d’en saisir toute sa
richesse, une analyse complète a été effectuée, d’une part à l’échelle du bourg et d’autre
part à l’échelle du quartier traité.
La compréhension de la situation actuelle du bourg passe par l’histoire, préalable
nécessaire pour saisir les moments de développement de la morphologie du système
urbain, les périodes qui ont marqué et marquent encore le bourg et sa structuration…
L’économie reflet de la situation actuelle et des possibilités à venir.
L’analyse typologique particulière du quartier étudié sera abordée en seconde partie, ainsi
que nos propositions.L’Oisans, dès l’age du Bronze, (8 siècles avant J.C.), fut habité par
l’homme dans certaines zones élevées du massif, grâce à l’exploitation de ses mines de
cuivre. On retrouva la trace de cette occupation dans le nombreuses sépultures datant du
Bronze final qui jalonnaient, d’après A. Bocquet, l’antique voie commerciale reliant le bas
Dauphiné au Briançonnais.
Cette route, la seule praticable de Grenoble au Lautaret, empruntait la cluse de l’Isère, la
basse vallée du Drac, le plateau Matheysin, la vallée de la Bonne et la plaine de Bourg
d’Oisans ; de là, les gorges de l’Infernet étaient contournées par le sud, passant au Freney
d’Oisans, d’où, elle montait jusqu’au col du Lautaret.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Cette voie permit aux indigènes des hautes vallées de
s’enrichir, grâce au portage de l’étain, métal précieux à cette
époque.LA DOMINATION ROMAINE
De la soumission des Alpes, le trophée de la Turbie, à la fin du 7eme. Siècle avant J.C.,
nous donne la liste des peuples vaincus dans les Alpes dont les Ucennis de l’Oisans, les
Caturiges et les Brigianü du Briançonnais.
L’absence d’unité qui caractérisait la période préromaine se perpétua sous l’empire
romain. Ces territoires conquis relevèrent de la province transalpine Narbonnaise ; le
vaste territoire des Allobroges dépendait tout entier de la ville de Vienne, il était subdivisé
en « pagi » ou cantons, qui avaient chacun pour centre en « vicus », petite ville comme
Cularo, (Grenoble), mentionné pour la première fois en ‘ » avant J.C. ou un gros village
comme Augustum, (Aoste).
Dans la période allant de 375 à 383, la cité de Vienne perd une parie de son territoire au
profit de Cularo à qui l’empereur Gratien accorda le rang de Civitas et donna son nom :
Grationopolis, le Gratianopolitanus Pagus sera le futur Grésivaudan.
Désormais le « Dauphiné » était partagé entre quatre provinces étirées du nord au sud :
la Viennoise, (l’axe rhodanien)
la Narbonnaise II, (les Préalpes)
les Alpes Maritimes
les Alpes Cottiennes, (qui avec la cité de Briançon dépendaient du diocèse d’Italie)
La domination romaine allait permettre le développement d’axe de communications où l’on
retrouve celui déjà cité, allant de Vienne à Briançon, traversant le territoire des UCENNIS
selon un trajet similaire à celui de l’actuelle Route Nationale 91 .
Sur les montagnes environnantes, déjà fertiles et cultivées vivaient une population
nombreuse ; ce territoire comptait plusieurs agglomérations qui aujourd’hui se nomment
Villard d’Arène, Mizoën, Mont de Lans, la Garde et Gavet …
Le village qui devint plus tard celui du Bourg d’Oisans ne figurait pas encore parmi des
bourgades florissantes. Son origine remonterait avant l’ère chrétienne et il aurait été fondé
par une colonie de pécheurs qui exploitaient les nombreux petits lacs ou marais que
laissaient les torrents lors de leurs divagations.
La vitalité du commerce est particulièrement remarquable, ce qui accroît les activités de
portage et aussi la richesse des peuples des hautes vallées des Alpes … Les cantons de
montagne exportaient du bois pour la construction navale ; les ressources du sous-sol
sont exploitées jusqu’à de très hautes altitudes. Ainsi a-t-on repéré des mines d’or en
Oisans, à Villard Notre-Dame, au Freney d’Oisans, à Auris, dont le nom conserve de
souvenir de cette exploitation.
Sur le plateau d’Huez, les mines de BRANDES fournissaient, outre de
l’or, de l’argent et du fer…LES MINES DE BRANDES
Situées sur un immense plateau à une altitude de 1784 mètres, où seule l’aridité semblait
devoir exister, on découvre de vastes et magnifiques prairies, parsemées des ruines d’une
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
ville antique ; voilà ce que de nos jours, un promeneur pourrait admirer sur la montagne de
Brandes.
C’est sur ces montagnes appartenant à la chaîne des Rousses, que les romains
exécutèrent les grandes exploitations d’extractions. Les mines étaient riches et
nombreuses ; pour les utiliser, il fallut bientôt une usine où le minerai brut eut à subir
l’élaboration première ; celle-ci fut établie sur la montagne de Brandes.
Transformé en colonie pénitentiaire, l’établissement de Brandes recevait les individus
judiciairement condamnés aux mines et fut confié à la garde d’une troupe militaire. Le
nombre des travailleurs condamnés devait être considérable et leur travaux ne pouvait
être que longs et difficiles exécutés au moyen du feu et du pic.
Les gisements exploités, assez loin les uns des autres, furent reliés entre eux par un
chemin qui les rattachaient tous à l’usine de Brandes. Un autre grand chemin, partant du
même point, descendait la voie romaine ; celui-ci servait au transport du minerai pour les
fours de fusion de la vallée.
Ces mines témoignent de l’importance qu’eurent des exploitations et des avantages
qu’elles durent répandre sur la vallée de l’Oisans et la contrée elle-même.
Lors de l’arrivée des Dauphins, excités à leur tour par tant de trésors devenus leur
propriété, de nouveaux travaux furent commencés sur leurs ordres ; l’usine de Brandes,
tirée de ses ruines après plusieurs siècles d’abandon, fut agrandie et reçut tous les
développements dont elle était susceptible. Des travailleurs furent appelés à Brandes, des
habitations particulières vinrent se ranger autour de l’établissement principal et
l’agglomération, devenue assez considérable, prit le nom de « Ville de Brandes ».
Les exploitations principalement suivies étaient celles de la montagne de Brandes, du Lac
Blanc, de l’Herpie, de la Cochette et de la mine d’or de la Demoiselle. La quantité d’argent
obtenue entrait pour une si forte proportion dans les bénéfices de l’exploitation que
l’établissement ne tarda pas à prendre le nom d’Argenterie.
Après les Dauphins, les mines de Brandes, tombées dans le
domaine de la féodalité, languirent pendant plus d’un siècle et
s’arrêtèrent enfin. Dès lors, les immenses excavations de
Brandes devinrent les retraites où se cachèrent des familles
entières de faux monnayeurs, pour s’y livrer à leurs
« industries ».MEROVINGIENS, CAROLINGIENS :
ROIS DE BOURGOGNE
Les invasions barbares en Dauphiné mirent fin à la pais romaine ; les Vandales, les
Wisigoths et les Alains ravagèrent le bas Dauphiné, ils furent suivis des Burgondes,
(d’origine scandinave), qui au V eme. Siècle quittèrent Genève, leur première capitale,
pour Lyon.
Leurs voisins, les Francs, avides de pouvoir tentèrent en l’an 500 d’envahir Vienne ; après
un second échec en 524 près de Morestel, ils vainquirent les Burgondes à Autun en 532.
Le royaume burgonde passait sous la domination Franque en 534.
A la mort de Clovis, le royaume fut partagé entre ses quatre fils.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Pendant la fin du VI eme. Siècle la région fut déchirée par les luttes de la monarchie
mérovingienne ; l’unité ne fut retrouvée qu’au début du VII eme. Siècle sous les règnes de
Clotaire II et de Dagobert.
Au début du VII eme. Siècle, la région connut des incursions de la part des Sarrazins.
La dynastie Mérovingienne prit fin avec son dernier représentant Pépin II, qui mourut en
714.
Sous le règne de Carolingiens, l’ancien royaume burgonde demeura une province
lointaine, peu soumise au pouvoir central. Au partage de l’empire de Charlemagne en 839,
Louis le Pieux, seuls fils survivant le l’empereur donna la Burgondie à son fils Charles le
Chauve.
En 843, le « Regnum Burgundia » fut attribué à Lothaire ; à sa mort en 855, le partage se
fit entre ses trois fils, le plus jeune, Charles de Provence recevant les territoires situés
entre le Rhône et les Alpes ; son frère Lothaire II lui succéda.
En 879, réunis en concile, six archevêques et vingt et un évêques confièrent la couronne
au comte Boson.
En 888, la partie nord du royaume échut à Rodolphe et devint le royaume de Bourgogne
Transjurane.
Au X eme. Siècle, toutes les terres des Bosonides passèrent sous la souveraineté des
Rodolphiens et constituèrent le second royaume de Bourgogne, où allaient naître trois
états féodaux distincts :
-la Provence
-la Savoie
-le Dauphiné
Sous les rois bourguignons, le mouvement de la grande voie, arrêtée au-delà des monts fit
place à une fâcheuse inertie pour la contrée ucénienne. Cette contrée, presque réduite à
elle-même, sembla alors être tombée dans l’oubli ; cet isolement fit se tourner les
habitants, avec plus d’intérêt vers le village, (Bourg d’Oisans), qui était venu se fixer en
son centre.
A cette époque, l’idiome de la province changea avec les maîtres ; de l’antique
dénomination d’UCENNIS donnée à la peuplade, il fut remplacé tour à tour par :
UÏSSAN
UISSON
VISAN …
UÏSAN
VISAN fut celui que porta la contrée jusqu’au XV eme. Siècle, où fut
définitivement adopté celui d’OISANS.LA LEGENDE DES SARRASINS ET
DU CALIFE ABOUL-JEID
« A l’abri de ses remparts naturels, le pays d’Uïssan eût pu sûrement se croire protégé
contre les hordes sarrasines qui avaient menacé la France. Mais cette situation, qui
semblait devoir le sauver, fut précisément ce qui lui attira l’ennemi. Fuyant devant l’épée
victorieuse de Charles Martel et n’ayant plus de patrie, les Sarrasins dispersés
cherchèrent en grand nombre un refuge dans les montagnes du Dauphiné, qui eurent le
triste privilège d’attirer la plupart d’entre eux. On croit même qu’ils s’y établirent par droit
de conquête et traitant en vaincus les paisibles possesseurs du sol, ils purent vivre et se
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
propager assez longtemps au milieu d’eux. On croit même qu’ils donnèrent leur
dénomination à certains villages de la contrée. Mais ce qui est moins douteux, c’est que
ces étrangers s’y adonnèrent à l’exploitation des mines, dont certains vestiges portent
encore aujourd’hui leu nom.
Un de leurs califes, Abdul-Jéid, de la race du Prophète, commandait en maître sur toutes
les vallées envahies de cette partie des Alpes. Il y possédait de nombreux châteaux ou
forteresses, où il avait entassé les dépouilles de ses ennemis, parmi lesquelles figuraient
les trésors pillés par les infidèles dans les cathédrales d’Espagne et chaque année il
augmentait ses richesses au moyen de tributs qu’il levait à main armée sur les populations
voisines. Toutes avaient à subir ses déprédations de la manière la plus barbare. Les
marchands de Lyon, Vienne, qui faisaient le commerce avec l’Italie n’osaient plus se
hasarder dans les défilés des Alpes, certains qu’ils étaient de laisser leurs marchandises
et peut être leur vie aux mains des Sarrasins. Les laboureurs eux-mêmes ne se soucièrent
plus de travailler ou d’ensemencer leurs terres ; ne savaient-ils pas qu’au jour de la
moisson, Abdul-Jéid et ses soldats fondraient sur leurs champs comme des oiseaux de
proie et pilleraient la récolte ?
Emu d’indignation au récit de tant de souffrance, Charlemagne, qui régnait alors, chargea
son neveu Roland de chasser les Sarrasins de leurs repaires. Celui-ci vint donc attaquer
Abdul-Jéid et comme le calife, qui se croyait invincible dans ses positions, ne voulait point
de batailles en rase campagne, le guerrier franc résolut de prendre d’assaut, l’une après
l’autre, toutes ces forteresses. En moins d’un mois, il ne restait plus à Abdul-Jéid qu’un
seul château, le plus imprenable de tous ; c’était un donjon sans porte ni fenêtre, situé
dans une petite île, au milieu d’une vallée profonde, que la chronique assure être la même
que la vallée d’Oisans.
Au fait d’arme qui amena la prise de cette forteresse, se rattache un récit étrange que l’on
dirait emprunté aux contes orientaux des « Mille et une nuits ».
Pour monter dans ce donjon, privé de porte et de fenêtre extérieure, on se servait de
nacelles suspendues à des chaînes de fer et placées sous la surveillance d’une troupe qui
ne sortait jamais du château. Le chef des infidèles avait enfermé dans ce dernier asile tout
ce qu’il avait pu sauver de ses trésors et d’abondantes munitions de bouche, dans l’attente
d’un long siège. Du haut de ses créneaux inaccessibles, il insultait l’armée chrétienne et
défiait l’intrépide Roland. Le neveu de Charlemagne accepta le défi. A la suite de l’armée
chrétienne se trouvait un nécromancien expert dans son art. Roland le fit venir et lui promit
de lui abandonner la moitié des trésors d’Abdul-Jéid, s’il réussissait, au moyen de ses
conjurations magiques, à introduire l’armée chrétienne dans la place. Enivré par un si
riche espoir, le nécromancien mit en œuvre, pendant la nuit suivante, toute sa science
diabolique et le matin, Roland vit avec surprise un pont couleur de feu qui, par l’une de ses
extrémités, tenait à la terre ferme, et par l’autre extrémité, s’appuyait sur le sommet du
donjon assiégé. A ce spectacle, les Sarrasins furent aussi épouvantés que surpris ; ils
connaissaient la vaillance de Roland et savaient bien qu’avec un moyen d’arriver au
sommet du fort, rien ne pouvait l’empêcher de s’en rendre maître.
Abdul-Jéid écumait de rage et désespérant comme ses compagnons de repousser les
chrétiens, il ne voulut pas du moins les enrichir des ses dépouilles. Il fit apporter tout ce
qu’il avait de précieux sur la plateforme de la tour et tandis que les chrétiens, guidés par
Roland, s’élançaient à l’assaut de la forteresse, il fit jeter dans la lac qui baignait le pied du
donjon, les lingots d’or, les pierres précieuses et les richesses accumulées par ses sols et
ses briganderies.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Ce sacrifice achevé, les Sarrasins saisirent leurs armes et firent face aux chrétiens ; mais
malgré l’acharnement de leur résistance, tous périrent jusqu’au dernier et leurs corps
furent précipités dans les eaux, à l’endroit même où s’étaient englouties les richesses su
calife.
Ce succès, tout glorieux qu’il fut, ne faisait pas le compte du nécromancier ; aussi, quand
Roland, après avoir démantelé le château se fut retiré avec ses soldats, il eut de nouveau
recours à son art infernal pour s’emparer des trésors submergés - Il y réussit.
Toutefois, le misérable ne jouit pas longtemps du fruit de sa coupable industrie, car peu
après, il fut trouvé sans vie dans une des gorges de la montagne ; il avait le coup tordu et
une brûlure au cœur, indices irrécusables qu’il était mort de la main de Satan lui-même,
jaloux sans doute de la trop grande habileté de son suppôt.
A la suite de cette expédition, l’Oisans, affranchi de l’oppression sarrasine, vit renaître la
sécurité au sein de ses montagnes. »
Légende tirée du livre « Guide du voyageur dans l’Oisans » J.H. ROUSSILLONCONTES D’ALBON
DAUPHINS DE VIENNOIS
A la mort de Rodolphe III, (dit le Fainéant), dernier roi de Bourgogne en 1032, de vastes
territoires étaient devenus la propriété des évêques et archevêques de la région ;
l’archevêque de Vienne, Brochard, se sentant proche de la mort, voulut régler ses affaires.
Il fit de ses terres, deux parts, l’une allant à Humbert aux mains blanches qui devint alors
comte de Savoie, l’autre au sud qu’il céda à Guigues le Vieux, dès lors comte d’Albon.
Ce lambeau de terre au sud de Vienne allait constituer la base du futur « Dauphiné ». Dès
cette accession à leur territoire, l’enchevêtrement de leurs possessions allait amener des
conflits entre comtes de Savoie et d’Albon. Mais outre les maisons d’Albon et de Savoie,
d’autres familles seigneuriales puissantes, qui toutes détenaient des pouvoirs étendus de
juridiction et une situation très indépendante, créaient une forte instabilité.
La première dynastie des comtes d’Albon qui commença avec Guigues 1 er. dit « le
vieux » en 1029, (Guigues IV prit en 1133 pour la première fois le surnom de Dauphin),
s’éteint avec Guigues V en 1162.
Le premier représentant de la dynastie de Bourgogne est André-Dauphin, (fils de Béatrice
d’Albon et de Hugues III, Duc de Bourgogne). Cette deuxième dynastie prend fin à son
tour à la mort de Jean 1 er. en 1282.
Une troisième dynastie naît alors, elle est dite « De la tour » ; son dernier représentant est
Humbert II, qui abdiquera en 1349 en faveur de Charles, petit fils du roi de France.
Malgré la cession de ses états à la couronne de France, Humbert II n’avait pas aliéné son
patrimoine de l’Oisans ; deux ans après le « transfert », il le léga à Amédée de Viennois,
son fils naturel.
Ce fils, créé Chevalier, prit alors le nom d’Amédée d’Oisans, de lui est issue l’illustre
famille de Viennois, l’un des plus beaux blason du Dauphiné et dans laquelle d’héritage
delphinal de l’Oisans fut conservé et transmis jusqu’en 1830, dans la descendance de
madame la comtesse d’Albon, fille de monsieur le marquis de Viennois, dernier seigneur
de ce nom dans l’Oisans.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Les richesses du sous-sol de l’Oisans n’avaient pas tardé d’exciter l’attention des
Dauphins et bientôt, ils songèrent à les mettre à profit d’une manière particulière.
Dans ce but, ils se constituèrent dans la plaine de l’Oisans, un domaine patrimonial,
indépendant de leur droit de fief et consistant en terres, forets, maisons et métairies …
Mais, ce qui dans l’Oisans, provoqua surtout leur intérêt, fut la richesse du sous-sol ; pour
cela, ils entreprirent sur les traces d’anciennes exploitations romaines des travaux
considérables, qu’ils étendirent ensuite à toute la contrée.
Peu après sa première apparition dans les écrits, en 1036, « Saint Laurent au bord du
Lac » est choisi par Humbert, évêque de Grenoble qui déjà en 1012, ayant créé le prieuré
de Grenoble, (prieuré St. Laurent), continua dans son action et créa une filiale de celui-ci à
Bourg d’Oisans.
C’est dans ce bourg, que le Dauphin placera le « Château », siège de la
châtellenie d’Oisans. Cette bourgade, siège du gouvernement local a
politiquement les statuts d’une petite ville ; c’est le seul village de
l’Oisans où les habitants soient qualifiés de bourgeois…LE LAC SAINT
LAURENT
C’est en 1036 qu’apparaît pour la première fois dans un écrit la mention d’un village se
trouvant dans la plaine d’Oisans :
Sancti Laurentü Secus Lacum
Saint Laurent au bord du Lac (Le Bourg d’Oisans)
En 1158, le seigneur de la Garde et d’Huez, donna aux religieux d’Oulx, le droit de
passage du lac sur ses domaines ; cela semble bien attester de la présence du Lac Saint
Laurent en amont du rocher de la Garde dès cette époque…
En 1191, l’Infernet fut le théâtre d’un drame terrible ; un éboulement vint jeter sur la vallée,
une avalanche de rochers, de terres et de pierres, fermant ainsi le cours de la Romanche
par une infranchissable barrière. Un lac de plus de 18 kilomètres de long se créa noyant,
sous plus de 10 mètres d’eau, la plaine de l’Oisans. Saint Laurent au bord du Lac se
retrouva sous les eaux, tous les habitants fuyant leur demeure. Le nom du village se
modifia et devint :
Sancti Laurentü de Lacum
Saint Laurent du Lac
Datant du XIV° siècle, on découvrit la présence de constructions situées au-dessus du
bourg actuel et qui ont très vraisemblablement recueillis les habitants pendant les 28
années de submersions de la plaine. Il en fut trouvé des traces lors des travaux
d’adduction d’eau dans les années 1900 ; cet ancien bourg se situait au-dessous du
Prégentil, (vers le cimetière actuel). On retrouvait aussi au-dessous de la Garde des
anneaux de fer, scellés dans le rocher où venaient s’amarrer les barques de pèche ou les
bacs de passage d’une rive à l’autre.
Par le débordement général des eaux, due à la catastrophe de 1191, toutes
communications par la vallée avaient été détruites, toutes relations avec Saint Laurent du
Lac rompues ; la capitale de l’Oisans n’était plus rien pour le reste du pays.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Le commerce et les affaires, chassés de cette localité mourante s’étaient réfugiés dans un
village voisin : La Garde. Situé en face du Bourg, un peu au-dessus de la plaine et
presque au centre des communautés du mandement, il devint, tant que durera le lac, le
point de réunion administratif et commercial et remplira un rôle prédominant à l’égard du
reste de la contrée.
Les communautés ne pouvant accéder directement au village de la Garde, elles étaient
obligées de recourir à la navigation et les barques des pécheurs de saint Laurent du Lac
devenaient leurs moyens de transport. Tout autour du lac, des points d’abordage servaient
de ralliement aux passagers.
Le commerce du bétail avait besoin pour se soutenir de foires et de marchés ; la Garde fut
le rendez-vous des réunions de ce genre, des marchés hebdomadaires et des foires
annuelles se tinrent régulièrement sur un emplacement à proximité du village.
Le 14 septembre 1219, le barrage naturel affouillé par les eaux, céda et s’écroula dans la
nuit ; une énorme masse d’eau s’engouffra dans la gorge, la parcourut avec violence d’un
formidable ouragan, brisant et emportant tout dans son cours furieux, arbres, terres,
villages entiers, rasant la vallée de Séchilienne, inondant Vizille et la plaine de Grenoble.
« C’était la nuit, Grenoble affluait d’étrangers, le lendemain était jour de foire. La
population fuit, éperdue ; les uns parviennent à gagner les hauteurs du Rabot, d’autres se
réfugient sur les toits des maisons et des églises, au haut des tours, un grand nombre se
pressent à la porte du pont de pierre afin de fuir par la montée Chalemont, mais la porte
est fermée et la rivière, surmontant les parapets du pont, engloutit ces malheureux. Le
Dauphin Guigues VI eut grand peine à atteindre sa maison forte de Saint Martin le Vinoux.
Il entrevit dans cette catastrophe la colère du ciel et fit le vœu de se croiser… »
Extrait du livre : « Souvenirs des montagnes d’Oisans » - Marius Hostache
Bien que réduit, le lac exista encore pendant plus de trois siècles, renaissant parfois, tel le
4 août 1465 après un effroyable orage d’été.
En 1540, réduit à une « flaque », il acheva de disparaître…
Dès que la plaine eut été rendue à elle-même, on songea tout aussitôt à l’assainir et à y
établir la culture. Le Dauphin fit appel aux cultivateurs des contrées voisines en leur
assurant la concession du sol qu’ils viendraient travailler. Le sol répondit bientôt avec
largesse aux espérances des laboureurs…
Grâce aux relations routières très fréquentes entre l’Auvergne et l’Oisans et en particulier
avec l’abbaye Saint Chaffre, l’Oisans et surtout les communautés du Vénéon, ainsi que le
« Bourg d’Oisans », furent pris sous la bienveillante protection de cette dernière.
Dès le XIII° siècle, le bourg de Saint Laurent est redevenu, après la catastrophe de 1219,
le centre d’intérêt des villages de la région et de toute sa population.
Au XIV° siècle, le bourg possède la seule banque Lombarde de la région.
En 1337, parait à plusieurs reprises la mention d’un médecin installé au bourg de Saint
Laurent.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
En 1345, un garde général des forets, agissant pour le compte
du Dauphin, est nommé à la résidence du bourg.LA FOIRE –
LES MARCHES
La seule foire qui paraisse explicitement dans l’Oisans médiéval est la foire de
marchandises à la Saint Jean Baptiste, (24 juin), dans la ville de Bourg d’Oisans ; cette
foire se tenait en réalité pendant un moi à peu près, soit une quinzaine avant et une
quinzaine après la nuit de la Saint Jean. On ne saurait préciser la date de sa fondation,
mais les comptes de Châtellenie n’en mentionnent l’existence qu’en 1315…
Le Bourg d’Oisans est le seul centre de la région où se tiennent des foires de
marchandises jusqu’à la fin du XVI° Siècle ; à cette époque, en 1584, une autre foire et un
marché sont fondés au Mont de Lans, sur la demande de plusieurs « marchands » de la
Grave et du Villard d’Arène.
En 1345, la foire du Bourg, joue son rôle normal d’organe exportateur et importateur pour
le pays ; aux exportations figurent des céréales, des fromages, des toiles de chanvre et de
la laine… Des faux, vendues en « grandes » quantités, indiquent une petite métallurgie
prospère.
Les chevaux, mules et ânes, ainsi que le bétail bovin, les porcs, moutons, brebis et
chèvres, (bien que moins prépondérants), sont aussi sur la liste des exportations de cette
foire.
Revenu de la ferme des foires du Bourg d’Oisans aux XIV° et XV° siècles
d’après les comptes de Châtellenie :
1332
1337
1342
1347
1352
1360
1368
1380
1389
1395
1394
1397
1413
1414
1416
0
0
10 FLORINS DELPHINAUX
4
8
40
56
40
54
63
71
70
67
73
71
1427
1428
1429
1430
1431
1432
1433
1434
1436
1453
1454
1455
1456
1457
1458
86 FLORINS DELPHINAUX
84
84
88
86
84
100
108
75
102
80
85
82
60
65
Il est frappant de constater la baisse des dernières soumissions sur le tableau ci-dessus ;
ce n’est pas seulement un indice de dépression économique général – au milieu du XV°
siècle, ce serait surprenant – c’est encore et surtout un indice presque certain du déclin de
cette foire, dont il ne restera, en 1700, lors de « la révision des feux », ni trace, ni
souvenir…
Mais la foire de la Saint Jean, n’est pas la seule manifestation
commerciale du Bourg d’Oisans ; un marché, qui aussi loin
que les documents mous permettent de remonter, s’est
toujours tenu le samedi, a été le seul de tout l’Oisans du
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Moyen Age. Ce marché procure aux habitants l’essentiel de
leur approvisionnement. Il est, contrairement à la foire,
parvenu jusqu’à nous et se déroule toujours le samedi…LA
ROUTE DU LAUTARET
L’existence de la route du Lautaret est probablement la raison de la venue de l’homme sur
ce pays.
Avant les Dauphins, les deux prieurés de Saint Laurent et de la Garde, les nombreuses
églises rattachées à Oulx et à Saint Chaffre sont certainement liées à la circulation entre
France et Italie ; comme le prieuré clunisien de Vizille, ce sont des étapes sur le chemin
du Saint Siège, des asiles, (telle l’auberge du « Logis de l’Escu de France » au Bourg en
XVI° siècle), pour les pèlerins, des postes de surveillance.
Dès le début du Moyen Age, cet itinéraire semble être préféré par les pèlerins de la
France centrale, tandis que ceux du nord et de l’Angleterre passent par la Maurienne.
D’ailleurs cette « petite route » semble à toute époque s’effacer devant celle du
Champsaur et de la Durance ; mais le long de celle-ci, le Dauphin n’a jamais réussi à faire
prévaloir complètement son autorité sur une féodalité locale puissante, tandis qu’en
Oisans et en Briançonnais, dès le XIII° siècle, il est pratiquement seul maître : c’est
pourquoi, la circulation officielle préférera toujours l’Oisans.
Au début du XV° siècle, les marchands nomades utiliseront
cette route entre les foires de Lyon et celle de Briançon.LE
DAUPHINE DES ROIS
Désormais réuni à la France, le Dauphiné allait conserver cependant, pendant près d’un
siècle, (de 1349 – 1440), un statut particulier : le premier Dauphin de la maison de France
eut souci de respecter les usages et les institutions de cette région.
Désireux de s’attirer les bonnes grâces de ses nouveaux sujets, il les exempta de certains
impôts.
Le Dauphiné ne demeura pas un spectateur impassible de la « Guerre de cent ans », pour
laquelle il fournit d’importants contingents d’hommes d’armes.
La guerre avec la Savoie avait repris pour le malheur du Dauphiné, qui vit ses troupes
écrasées par l’armée du comte de Savoie.
En cette fin de siècle, vers l’année 1374, plusieurs milliers de malandrins se répandirent
dans la province et portèrent la terreur dans la région sous le nom de « Grande
compagnie ».
Sur les rives de l’Isère, apparaissaient des idées provinciales et séparatistes ; près d’un
siècle s’était écoulé depuis l’annexion jusqu’au règne du Dauphin Charles III, (le futur roi
de France Charles VII), mais l’intégration se fait lentement… Paris était bien loin …
La population fut surprise en 1438, quand le Dauphin Louis compta prendre, lui-même, les
rennes de l’administration de la province et y fixer son séjour. Il réforma la fiscalité,
accorda sa protection aux banques. Peu à peu, le Dauphiné devenait un état « séparé et
bien distinct de la France ».
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Charles VII suivait avec inquiétude les faits et gestes de son fils ; il reprit possession du
Dauphiné, lorsque ce dernier se mit à lever des troupes ; le Dauphin prit la fuite pendant
que les notables du Dauphiné s’empressaient de faire soumission auprès du Roi de
France.
Avant la Guerre de cent ans, il est incontestable que les communautés de l’Oisans étaient
riches. Aux malheurs de la guerre s’ajoutèrent la peste noire et ses effets, ainsi que la
famine.
Venue du Comtat vers la fin de l’année 1348, la peste reparut à Romans en 1361 et les
épidémies se succédèrent, la permanence des mortalités constitue désormais un aspect
essentiel de la vie locale.
La peste atteint Grenoble ainsi que l’Oisans entre 1410 et 1427 ; la vallée du Vénéon fut
éprouvée à trois reprises entre 1428 et 1447.
Après ces dures épreuves, le Grésivaudan qui s’étendait sur la vallée de l’Isère, l’Oisans,
la Matheysine et le bas du cours du Drac, ne représentait après 1474 que 40% de la
population enregistrée en 1339.
Mais la peste et la famine ne sont pas les seules catastrophes, le feu, lui aussi, doit être
combattu :
1427
1447
1458
Le hameau principal de Venosc brûle complètement
La Grave annonce que le tiers de la paroisse a brûlé
Le Bourg voit brûler la plupart de ses maisons
Au XV° siècle, le seul centre qui attire quelque peu les
immigrants est le Bourg d’Oisans où déjà le déséquilibre entre
récoltes et besoins atteste d’une vie urbaine assez active.LES
GUERRES D’ITALIE
Quatre rois de France visitèrent successivement notre région du Dauphiné et de Grenoble,
sa capitale, amenant à chaque fois, des réjouissances sans nombre ; arrivèrent aussi les
armées suivant chaque visite royale, ainsi que les réquisitions de vivres et de fourrages
que nécessitent leurs intendances.
Pour alimenter l’effort de guerre des rois, l’argent est nécessaire ; aux malheurs de ces
guerres s’ajoutent la famine, les inondations et la peste… Le peuple gémit et grogne…
Le seigneur de Bayard, (Pierre Terrail 1476 – 1524), allait entrer dans l’histoire sous le
nom de « Chevalier sans peur et sans reproche » du à ses exploits guerriers ; mais le
seigneur de Bayard fut aussi un administrateur talentueux, ce qui lui attira l’estime de ses
concitoyens.
Du XIV° au XV° siècle, l’Oisans comptait aussi, parmi ses habitants, un certain nombre de
petits seigneurs possédant, sauf l’hommage au souverain, les plus grandes propriétés,
qu’ils avaient acquises, soit par donations, transactions, soit comme récompenses ou
dédommagements des services ou des biens donnés pendant les guerres. Des familles,
autrefois florissantes dans le pays, n’ont laissées que quelques ruines pour traces de leurs
passages. Les guerres des Dauphins avec les comtes de Savoie avaient commencé à
dégarnir les manoirs de l’Oisans. Plus tard, les expéditions d’Italie finirent d’achever cette
noblesse d’Oisans.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Les privilèges tombèrent avec leurs possesseurs ; les fortunes
se dispersèrent, les titres et les noms eux-mêmes se perdirent
et le temps, frappant à son tour sur les donjons seigneuriaux,
les renversa enfin à côté des chaumières vassales.LES
GUERRES DE RELIGION
A part deux « séditions », (à Romans – 1560, et à Vienne – 1561), tout était calme encore,
Catholique et protestants vivaient en paix, malgré les massacres, les pillages et les
tortures de l’inquisition.
Le premier mars 1562, le massacre de soixante huguenots à Wassy, (Haute Marne),
déclencha en Dauphiné une riposte des protestants, qui prirent les armes suivant le baron
des Adrets, (1513-1587), leur chef. Après quelques mois de luttes et de massacres, les
protestants étaient maître du Dauphiné en septembre 1562.
En 1576, le traité de Beaulieu ramena la paix ; mais un troisième acte allait commencer,
(1577-1590), après la désignation de Lesdiguières comme chef des réformés dauphinois.
Il reconquit de nombreuses places en Dauphiné, puis sa capitale Grenoble où trois
semaines de combat furent nécessaires. Lesdiguières fit une entrée triomphale dans
Grenoble où il établit son pouvoir, avec modération pourtant.
Huit ans plus tard, l’édit de Nantes, (1598), allait jeter les bases de concorde. Malgré cela,
la lute contre Charles-Emmanuel de Savoie n’était pas finie et il ne fallut pas moins de dix
ans à Lesdiguières pour lui permettre de venir à bout de cet adversaire.
La paix fut signée à Lyon en 1601.
Après des guerres incessantes, le Dauphiné était dans une situation désolante…
« Cette province (…) est à présent à la veille de son entière ruine. (…) Le peuple est
tellement épuisé de moyens et réduit à une telle pauvreté et désolation, qu’il ne lui reste
plus d’autre exercice que du désespoir. »
E. Rabot, (premier président du parlement)
Dans le plan d’invasion, le Bourg d’Oisans était un point essentiel à occuper, étant la clef
de passage pour ce côté des Alpes.
Les habitants, peu favorables aux idées nouvelles n’étaient pas disposés à seconder ce
projet.
Une troupe de protestants, conduite par le conseiller Ponat ; gouverneur de Grenoble, vint
assiéger le Bourg en 1562 et voulut en forcer l’entrée ; la population repoussa seule cette
première attaque. Pour se garantir d’une nouvelle attaque, elle appela à son secours des
troupes catholiques, qui firent du Bourg un de leurs principaux boulevards.
Lorsque les protestants, en 1568, eurent été contraints à quitter les villes de la province,
un certain nombre d’entre eux vinrent se réfugier dans les montagnes d’Oisans. Les
communes de la Grave, Besse, Clavans et Mizoën furent leurs principales retraites et
devinrent le théâtre de disputes sanglantes ; le feu de la discorde menaçait de tout
détruire, lorsque le gouverneur de Grenoble, Gordes de Simiane, accourut avec une
troupe pour l’éteindre dans son foyer même.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Bientôt, le Bourg d’Oisans se vit de nouveau en butte aux attaques protestantes ; menées
par le capitaine de La Coche, qui voulut enlever cette place aux catholiques. Il y mit donc
le siège avec une troupe assez forte, enlevant toute idée de résistance à la population. Le
Bourg tomba au pouvoir des Huguenots…
Un nouvel échec essuyé dans les environs de Grenoble l’obligea à rappeler ses troupes ;
le Bourg venait d’échapper pour la seconde fois à la domination protestante.
Ce fut alors l’apparition de Lesdiguières, maître déjà de plusieurs places dans le Haut
Dauphiné, qui jugea l’occupation du Bourg comme nécessaire à ses opérations. Il
s’avança par le Valbonnais et le col d’Ornon, avec l’intention de surprendre le Bourg ;
cette tentative périlleuse n’eut pas le succès qu’il s’était promis… Les défenseurs du
Bourg allèrent attendre les Protestants à l’endroit dit « le fond des roches » près de la
Paute et les forcèrent à rétrograder dans la vallée.
Attaqué de nouveau en 1586, le Bourg fut pris et cette fois définitivement occupé par les
Protestants.
Pour assurer la possession de cette place, Lesdiguières la couvrit d’un fort qui lui tenait
lieu de citadelle et y plaça une garnison de 200 fantassins et de 50 cavaliers. Pour
protéger les communications du Bourg avec la Mure et la région du Trièves, il fit garder,
par une redoute fortifiée, le chemin vers cette contrée à travers les gorges de la Lignare.
Ainsi défendu, le Bourg d’Oisans resta aux Huguenots jusqu’en 1588, que leur enleva le
capitaine catholique de Maugiron, après trente jours de siège.
Ce fut le dernier acte de ces collisions dans l’Oisans.
Lorsque le Bourg eut été repris, toutes les fortifications
élevées par Lesdiguières furent détruites, tous les travaux de
défense rasés.LE DAUPHINE ET LESDIGUIERES
Le Dauphiné entreprit, une fois de plus, de relever ses ruines et de panser ses blessures.
Sa chance fut de trouver, à ce moment de son histoire, en la personne de Lesdiguières,
un gouverneur à la mesure de l’œuvre à accomplir. Confirmé dans ses fonctions par Henri
IV, il allait jouer désormais le rôle d’un véritable vice-roi pour la province.
« Que diriez-vous de monsieur de Lesdiguières qui veut se faire Dauphin » se serait
exclamé, Henri IV, en pleine cour…
Né au château des Diguières, en Champsaur, François de Bonne, (1543-1626),
appartenait à la petite noblesse terrienne.
On le surnomma « le renard du Dauphiné » après sa lutte contre Charles-Emmanuel de
Savoie de 1591 à 1601 où il montra son génie militaire.
En tant que gouverneur du Dauphiné, il prit les mesures nécessaires pour ramener la
prospérité, une justice exacte, une finance saine. Il inventa l’urbanisme Grenoblois, il
entreprit une série de grands travaux : digues de protection contre les inondations,
remparts, routes… Il édifia deux grandes demeures, l’une à Vizille, (1602-1624), l’autre à
Grenoble. Il fit raser des taudis et bâtir des quartiers neufs, il ouvrit des écoles et stimula le
commerce et l’industrie.
Claudine de Béranger, sa première femme, mourût en 1608 ; en 1614 assassinant
l’encombrant mari de Marie Vignon, Lesdiguières l’a prise comme deuxième femme.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Louis XIII le nomma connétable de France en juillet 1622, il fut le dernier à porter se titre.
Il mourut à Valence, à l’age de 83 ans. A la fin, le duc de Lesdiguières tenait 78
communautés rassemblées en quelques mandements et dominait ainsi totalement
l’Oisans, la Mathésine et le Champsaur.
Son œuvre fut poursuivie par sa famille pendant plus d’un demi siècle.
A l’égal de ceux d’Humbert II et de Louis II, son destin restitua relief et identité à une
conscience provinciale dont, sous les Valois, l’originalité s’était estompée…
Aux malheurs des guerres de religions, succéda un fléau non moins terrible ; la peste
faisait alors le tour du monde…
Le Bourg vit périr un grand nombre de ses habitants. D’un autre côté, les inondations
partielles, causées par les débordements de la Romanche, vinrent désoler et appauvrir la
population de la plaine d’Oisans.
Lesdiguières, devenu gouverneur du Dauphiné, s’empressa alors de faire des travaux
devant s’opposer aux divagations capricieuses des torrents. Mais ce ne fut pas la dernière
catastrophe pour le Bourg d’Oisans, qui vit dans l’intervalle de ces deux derniers siècles,
tous les fléaux réunis le frapper : le feu détruisit presque toutes les maisons du Bourg le
12 janvier 1781.
« Louis Dussert, châtelain du Bourg et mandement d’Oisans, 1 er. échevin du corps
municipal et A. Balme, greffier, représentent que le vendredi 12 janvier à midi, par un
accident, dont la cause ne fut pas découverte, le feu a pris aux bâtiments de maison,
grange et écurie de R. Bérouard, lequel, en un instant, s’est communiqué aux deux
bâtiments voisins ; les habitants ne purent l’arrêter en raison d’un vent impétueux étant
survenu… L’incendie s’étendit à toutes les habitations. De tous le Bourg, il ne reste que
l’église, la chapelle des Pénitents, le presbytère, la Providence, la maison de ville et sept
maisons ou greniers.
Tous les habitants du Bourg, tant aisés que d’autres, furent réduits à la dernière misère et
pauvreté ; les foires et les marchés, de même que le commerce et le passage de la route
de Grenoble à Briançon, furent interrompus, il ne parait plus dans ce misérable bourg
qu’un tas de murs écroulés et clapiers… »
Ce dernier évènement, donna lieu à un acte de générosité de la part de
M. Le Marquis De Viennois, qui vivait alors dans l’Oisans.LE MARQUIS
DE VIENNOIS
Monsieur de Viennois, quoique possesseur d’une grande fortune et de riches demeures,
aimait à habiter en été son modeste manoir de Bourg d’Oisans. Pour les habitants du
Bourg, il était un père et pour tous, un protecteur et un appui. Sa bonté s’étendait sur
toutes les communautés du mandement où il avait ses droits à exercer et souvent, il leur
fit abandon des redevances héréditaires auxquelles elles étaient tenues envers lui.
Le jour du 12 janvier 1781, où éclata l’incendie, une population de 1600 âmes venait d’être
chassée de ses foyers en plein cœur de l’hiver ; un immense effort de charité était
nécessaire pour la sauver.
Informé du sinistre, le marquis de Viennois, habitant Grenoble, assuma pour lui cette
tâche généreuse. Par ses soins et de ses propres deniers, des vivres, des vêtements
furent envoyés et distribués, des logements furent assurés aux victimes de l’incendie. Non
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
content de les secourir, il s’occupa de leurs avenirs et résolut de rendre leurs domiciles
aux incendiés qui ne pourraient le reconstruire eux-mêmes.
Ces bienfaits signalés portèrent leurs fruits dans l’esprit des habitants et l’occasion se
présenta, quelques années après, pour eux de témoigner d’une manière touchante leur
gratitude envers celui qui les avait aidés.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
MANDRIN
La guerre avec le Duc de Savoie, provoqua, au début du XVIII ème. siècle, le passage
incessant de troupes sur le pied de guerre, accompagné de leurs traditionnels pillages;
mais l'armée n'est pas la seule à effectuer ses réquisitions" , en 1755, surgissant de la
Savoie, Mandrin et sa troupe pille les caisses publiques de Bourg d'Oisans, devant la
population apeurée et s'enfuie vers le Col d'Ornon...
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
LES MINES DE L'OISANS A LA FIN DU XVIII EME SIECLE
De tout temps, les richesses du sous-sol de l'Oisans avaient éveillé les rêves et les
convoitises des Seigneurs du pays; les Dauphins, avec les mines de Brandes avaient
exploité de nombreux sites, nécessitant d'énormes travaux, dont les vestiges demeurent
parfois jusqu'à nos jours. Les conditions d'extraction difficiles, ainsi que l'épuisement des
filons, avaient peu à peu plonger ces exploitations dans un profond sommeil.
Il fallut attendre la fin du 18 ème. siècle et les deux découvertes minéralogiques de
Chalanches et de la Gardette pour que la minéralogie et la métallurgie prennent un
nouveau souffle.
LA MINE DE CHALANCHES
"En 1768, un berger, partis à la recherche de quelques bêtes‚ égarées sur les montagnes
de Chalanches, fit la découverte d'une pierre à l'éclat particulier; intrigué, notre berger
ramène au village sa découverte, et, bientôt transformé en métallurgiste amateur, le réduit
en poudre, puis le fait fondre...
Au cours d'un voyage à Grenoble, il présenta aux orfèvres de cette ville le produit de son
labeur, qui tous lui affirmèrent qu'il s'agissait d'argent natif !..."
Bientôt, la découverte ne fut plus un secret pour les habitants du petit village d'Allemont et
de ses environs; attirés par l'argent, nombre d'entre eux montèrent aux Chalanches et
commencèrent à fouiller. Nos apprentis mineurs avançaient rapidement, oubliant, dans
leur ardeur, de consolider les galeries ... un rocher se détacha de l'une des parois et
s'abattit sur sept d'entre eux.
Informé, le gouvernement fit étudier le gisement et confia l'exploitation à M. Binelli,
minéralogiste piémontais.
Les résultats ne se firent pas attendre, la mine dégagea rapidement des profits permettant
en 1769 la construction de la "fonderie d'Allemont".
Cet établissement, dédié à l'industrie métallurgique, acquis au fil des années une
réputation considérable dans le pays. Lieux de production et d'étude, la mine des
Chalanches, ainsi que la fonderie furent les rendez-vous des "savants" et voyageurs de
l'époque; Dolomieu, Murray, Diétrich, Guettard, ..., bien des noms illustres venu étudier le
gisement, les méthodes d'exploitation et de traitement.
La mine fut concédée au Conte de Provence par son frère, le Roi Louis XVI, et resta sous
son contrôle jusqu'en 1792; à cette date, elles devint propriété nationale et fut exploitée au
compte de l'état.
Bien que florissante jusqu'alors, la production déclina...
En 1804, la concession est reprise successivement par différentes sociétés privées, qui
n'arriveront pas à redresser la situation...
En 1850, la concession des Chalanches est abandonnée.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
LA MINE DE LA GARDETTE
A la suite de la découverte par un cristallier, en 1717, d'une pièce de quartz ornée de
plusieurs branches d'or fin, la présence d'un filon à la Gardette devenait indiscutable...
Gardés dès 1725, par les gens de Monseigneur le Duc de Bourbon, grand maître des
mines du royaume, les premières fouilles furent entreprises en 1733 et 1763, sur ordre du
Roi, sans donner, malheureusement tous les résultats escomptés...
Fasciné par la beauté du cristal de la Gardette, attirés par l'attrait de l'or, et rêvant toujours
de découvrir "le filon", les cristalliers reprirent rapidement leurs recherches; en 1770, l'un
d'eux, Laurent Garden, fit la découverte des "premières pépites d'or", et s'empresse de les
faire examiner par le directeur de la Fonderie d'Allemont, M. Binelli, qui, malgré la
présence des échantillons, doute de leur provenance et ne prend pas l'affaire au sérieux...
En 1779, M. Binelli étant remplacé au poste de direction de la fonderie par l'ingénieur
Schreiber, Laurent Garden décide de lui présenter les échantillons qu'il a amassés depuis
sa première découverte; Schreiber, très intéressé, se rend sur les lieux...
"Je visitai, plusieurs fois, très exactement le filon partout où il se montrait au jour et dans
les endroits où il avait été sondé. Je confrontait la gangue avec l'échantillon entre lesquels
je remarquai une parfaite ressemblance et je fis commencer des recherches à l'endroit où
l'échantillon avait été rencontré..."
Les échantillons communiqués au superintendant de Monsieur le Conte de Provence, la
mine de la Gardette est incluse à la concession des Chalanches et les travaux
d'exploitation commencent dès 1781.
Les crédits débloqués sont importants; l'étude méthodique du filon permit à l'ingénieur
Schreiber de faire creuser plusieurs puits dans la partie ouest, la plus riche du filon...
En 1786, le premier lingot d'or provenant du minerai de la Gardette, la première mine d'or
exploitée officiellement en France, sort de l'usine d'Allemont; de cette production, fut tirée
une médaille commémorative, frappée par la Monnaie de Paris et gravée par Dupré,
ayant la légende suivante :
"Prémices de l'or tiré des mines d'Allemont offertes au Roi par Monsieur,1786".
Ces premiers résultats, pleins de promesses, ne furent pas confirmés au fil de
l'exploitation; la production déclina peu à peu, l'or était pourtant présent, mais en quantité
insuffisante!...
En 1787, les évènements politiques aidant, l'ingénieur Schreiber fit interrompre les travaux
d'exploitation de la mine de la Gardette...
En 1805, sur les conseils de M. Héricart de Thury, Napoléon songe à reprendre
l'exploitation de la mine; la chute de l'Empire en décida autrement et la mine resta
fermée...
Les cristalliers, pendant cette période d'inexploitation officielle, reprirent leurs recherches,
parvenant avec de faibles moyens à une exploitation des quartz assez rentable...
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
En 1832, la concession de la Gardette est accordée par ordonnance royale à une
compagnie privée, "La Compagnie des mines d'or de la Gardette"; cette opération se
révèle n'être, à l'origine, qu'une sombre spéculation boursière.
En 1838, l'exploitation de la mine reprend avec la création de nouvelles galeries; le rapport
est des plus faibles, les cristaux, comme lors de l'exploitation dirigée par l'ingénieur
Schreiber, couvrant une partie des frais d'extraction... Malgré tous les efforts fournis, la
mine déficitaire ferme en 1840.
Mais l'or attire toujours et la concession de la Gardette eut de très nombreux exploitants
jusqu'en 1904...
LA NAISSANCE DE LA REVOLUTION
La Révolution Française a pris naissance en Dauphiné, bien que l’on ne voie percer aucun
désir d’insurrection contre l’ordre établi, mais au contraire de défense en faveur de
Grenoble.
La vie est difficile, à cette époque, le poids des impôts et la cherté de la vie se font sentir
sur la population ; dès 1763, le parlement du Dauphiné avait refusé d’enregistrer des édits,
trop rigoureux en matière fiscale. En novembre 1771, ce parlement fut dissous, comme
tous les parlements de France, par décision du chancelier Maupéou, ministre de Louis XV.
Lorsque Louis XVI, en 1775, rétablit le parlement, la population de Grenoble avait donné
libre cours à sa joie.
Par ses remontrances au pouvoir, le parlement était la voix de la province. Au début du
mois de mai 1788, Louis XVI revint sur sa décision, il décida de « casser les reins des
parlements » ; pour Grenoble, cela signifiait près de 4000 personnes travaillant au palais
du parlement que la ville perdrait et qui la faisait vivre. Le parlement de Paris refusa
d’enregistrer les édits de mai ; ceux de province suivirent son exemple.
A Grenoble, le lieutenant général de Clermont-Tonnerre voulut faire enregistrer les édits
manu militari.
Les membres du parlement furent exilés sur leurs terres le 30 mai et en reçurent l’ordre le
7 juin au matin. Ce fut la « Journée des Tuiles », la population se souleva.
Devant les morts et les blessés, Clermont-Tonnerre craignit d’être allé trop loin, il ordonna
à la garnison de regagner ses quartiers et suspendit l’exécution de l’édit. La foule courut
aussitôt aux domiciles des principaux parlementaires et leur fit ovation.
Tout se termina dans des cris de joie et des chansons, mais le pouvoir avait capitulé, le
premier sang de la révolution avait coulé dans la rue …
Le 21 juillet 1788, au château de Vizille, se réunirent en assemblée, ecclésiastiques,
nobles, tiers états dans le but de défendre les intérêts du parlement du Dauphiné.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
La discussion dura jusqu’à trois heures du matin et aboutit à faire retirer, par le roi, les
nouveaux édits, de rétablir le parlement du Dauphiné t autres tribunaux, de convoquer les
états généraux du royaume.
Ces états généraux du Dauphiné, (les premiers depuis 1628), eurent lieu à Romans le
premier décembre 1788 ; ils désignèrent les députés de la province représentant celle-ci
aux états généraux du royaume : au nombre de 24, ils partirent pour Versailles où
incarnant la « Grande Province, berceau de la révolution », il furent applaudis en entrant
dans la salle de l’assemblée où ils apportaient une véritable charte de réforme de m’état.
La plaine des Sables, qui est aujourd’hui la partie la plus florissante et la plus productrice
de la plaine d’Oisans, est restée inculte jusqu’à la fin du XVIII° siècle.
Les habitants propriétaires limitrophes des terrains communs ont
défriché une certaine étendue de terrain et en retirèrent de belles
récoltes. Les membres du corps municipal pensent alors, avec raison,
que toute la plaine pourrait ainsi être mise en culture, ce qui serait d’un
grand secours et d’un bon profit…Dans les assemblées générales du 13
octobre 1776 et du 6 juillet 1781, il est décidé, afin d’y parvenir de
demander l’autorisation de partager cette immense étendue inculte
entre tous les habitants du pays. Par arrêt du 30 avril 1782, le partage de
ces communaux est ordonné, mais le partage ne se fit pas sans heurt et
passions ; il y eut des pleurs et des grincements de dents. Les paisibles
propriétaires qui cultivent aujourd’hui leur portion ne se doutent peutêtre pas que leurs grands-pères ont mis tant d’ardeur à l’obtenir…LA
PLAINE D’OISANS… DES INONDATIONS…
Malgré les travaux de monsieur de Lesdiguières pour endiguer les débordements de la
Romanche, les inondations de la plaine de Bourg d’Oisans continuèrent :
Nous trouvons encore dans le registre paroissial de la Garde de nouvelles calamités,
(archives de l’Isère) :
« Dans la nuit du 15 octobre 1778, il tomba une pluie si abondante et si rapide, après les
pluies ordinaires et fréquentes pendant cet automne, qu’elle a causé des dégâts affreux.
La plaine du Bourg d’Oisans a été de nouveau inondée, les pont emportés, des
coulements de terrains un peu partout dans les communes environnantes. Les maisons
sont presque toutes submergées. Le ruisseau de Sarenne fait, dans sa chute, des bruits si
épouvantables, qu’il semble vouloir tout précipiter dans le grand cloaque de la plaine.
On ne peut parvenir après plusieurs jours à Bourg d’Oisans qu’à la nage, de sorte que l’on
n’avait presque jamais rien vu de pareil, mais heureusement il ne périt personne… »
« En 1788, la Lignare débordait, ayant emporté le pont ; la pauvre communauté de Bourg
d’Oisans, à bout de ressource, ne put rétablir la circulation entre le Perrier, Chantelouve et
Ornon… »
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
LA REVOLUTION FRANCAISE
Le Dauphiné, « Berceau de la révolution » fut bientôt dépassé par sa propre révolution. En
1790, il vit disparaître son parlement et fut divisé en trois départements :
-l’Isère
-la Drome
-les Hautes Alpes
Il ne connut, à la différence de tant d’autres provinces, ni troubles graves, ni menaces
sanglantes. Les seuls excès furent commis lors de la « grande peur » pendant l’été 1789.
Dès la fin de l’année 1790, les biens de l’église furent vendus. Le 14 août 1792,
l’assemblée législative adopta une loi imposant aux prêtres de prêter serment
constitutionnel, sous peine d’exil ; beaucoup préférèrent partir…
Le 2 septembre 1792, l’assemblée stipula que les biens des émigrés seraient vendus,
prenant cette rigueur contre les nobles dauphinois vivants en Savoie, en Suisse et en
Rhénanie.
Le 11 juillet 1792, la patrie est en danger, la guerre avait été déclarée à l’Autriche le 22
avril 1792.
L’ardeur révolutionnaire du Dauphiné ne cesse de diminuer, retrouvant les excès des
massacres de septembre. Kellermann, commandant en chef de l’armée des Alpes, arrive
à Grenoble le 4 février 1793 et ne tarde pas à bousculer les troupes autrichiennes en
Savoie.
Autant les Dauphinois étaient modérés quatre années après,
autant ils se montèrent sévère pour cette occasion ; dans le
seul département de l’Isère, 82 prêtres insermentés furent
bannis…LA GRAVE : ISERE OU HAUTES ALPES ?
Le canton de la Grave, qui se compose de deux communes seulement, la Grave et Villard
d’Arène, faisait partie autrefois de mandement de l’Oisans et dépendait ainsi qu baillage
du Grésivaudan.
Lors de la division du territoire de la France en départements, l’option fut laissée aux
habitants des deux communes entre les deux départements : l’Isère ou les Hautes-Alpes ?
Ils se décidèrent pour faire partie de ce dernier pour des considérations d’intérêts fort
légitimes. On lit à ce sujet dans une notice forestière du département des Hautes-Alpes
par M. Gariel, ancien conseiller à la cour royale de Grenoble :
« Lors de la circonscription des départements, on laissa aux habitants de la Grave le choix
entre les départements de l’Isère et celui du Haut Dauphiné ou des Hautes-Alpes ; ils
optèrent pour ce dernier, en prétendant que ce fut sous la foi de la promesse que leur
firent les députés du Briançonnais de les rendre communistes des bois du Monestier et
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
qu’on ne leur a pas tenu parole. Cette dernière commune, en effet, comme les autres du
canton qui prend son nom, possède beaucoup de bois qui devaient être forts beaux en
1790, puisqu’ils sont encore aujourd’hui en état de fournir quelques pièces de construction
aux communes du canton de la Grave et beaucoup aux fortifications de Briançon.
Quoi qu’il en soit, les habitants de la Grave ont toujours regrettés cette
erreur. Ils étaient liés géographiquement et humainement avec l’Oisans
dont les sentiments, de part et d’autres, sont toujours restés
fraternels.UN BIENFAIT POUR EN RENDU…
Durant la terreur de 1793, monsieur de Viennois, arrête comme suspect, était incarcéré à
Grenoble et paraissait menacé dans ses jours.
A la nouvelle de cette arrestation, la population du Bourg d’Oisans s’émeut à son tour et
tremble pour la vie de son bienfaiteur. Aussitôt, des pétitions motivées et pressantes sont
dressées en sa faveur et une députation est choisie parmi les habitants pour aller porter
au Comité de Salut Public, leurs vœux et leurs supplications.
Tout inflexible qu’il était, le Comité ne put résister à cet
hommage imposant de la reconnaissance et le marquis fut
rendu à la liberté avec éloges pour son véritable
patriotisme.L’EMPIRE
Sous le régime Napoléonien, l’ancienne province commença à faire l’expérience de la
départementalisation. Grenoble avait comme préfet M. Fournier, brillant administrateur, qui
fit construire la route du Lautaret, assécha les marais de Bourgoin, réorganisa
l’enseignement secondaire, donna un nouvel essor à l’université, fouette le
développement économique et artistique, protégea les chercheurs.
Les Dauphinois ne demandent qu’à retrouver l’ordre et la paix ; quand ils durent ratifier en
1804, la proclamation de l’Empire, les Dauphinois apportèrent à Napoléon 90 000 « OUI »
contre 10 « NON » seulement.
Mais ils leur fallut, comme le reste de la France, fournir de nombreux contingents pour la
Grande Armée.
En 1814, les Autrichiens entrèrent en France par la Suisse, bientôt Lyon capitula ;
Voreppe, « Porte des Alpes », est prise le 11 avril 1814.
Napoléon fit ses adieux à l’armée et prend le chemin de l’île d’Elbe…
Grenoble est occupé du 19 eu 28 mai 1814.
L’année suivante, 1815, l’empereur revient ; le 7 mars, il était à Laffrey. Le même jour,
Grenoble lui réserve un accueil triomphal. Le 20 mars au soir, il arrive aux Tuileries.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
La deuxième invasion de la province du Dauphiné fut
Par la journée du 9 juillet, par l’entrée dans Grenoble d’une division austro sarde qui y
resta cinq mois.
A Briançon, l’ennemi avait trouvé un adversaire coriace ; le général Eberlé défendit la ville
pendant trois mois, d’août à novembre 1815. Ce fut la pin de l’épopée napoléonienne qui
s’acheva dans les deuils, les humiliations et les dettes.
Oublié au fond de ses terres de montagnes, que ne traversait
aucune route commerciale active, l’Oisans languissait, abattu
et découragé, lorsque sous l’Empire, le rétablissement de son
ancienne voie vint le tirer de sa torpeur et releva toutes ses
espérances.LA RESTAURATION
L’Isère éprouvait bien peu d sympathie pour Louis XVIII.
C’est dans ce contexte qu’arriva l’affaire Didier, avocat, ancien directeur de l’Ecole de droit
de Grenoble, qui avec l’aide de quelques paysans de Mathésine et de l’Oisans, crut
pouvoir recommencer les cents jours de l’Empereur. Il tenta dans la nuit du 4 au 5 mai
1816 de s’emparer de Grenoble et échoua ; 24 conjurés furent condamnés à mort. Didier
fut exécuté le 10 juin 1816 sur la place Grenette. Cette répression rendit Luis XVIII plus
impopulaire encore… Les habitants de l’Isère restaient du parti de la révolution.
En 1829, la ville de Grenoble réserva un accueil triomphal ai général La Fayette,
considéré comme le « champion irréductible des libertés publiques ».
Après la révolution de 1830, le régime de Louis Philippe ne fut guère plus aimé de la
population. Marthe Camille Bachasson, comte de Montalivet, (1801-1880), ministre de
l’intérieur dut réprimer des émeutes, dont celle de Grenoble qui ensanglanta les rues de la
ville le 12 mars 1832 par 26 morts pour la plupart des femmes et des enfants.
La révolution de 1848 fut accueillie avec enthousiasme ; la République était désirée du
peuple qui fut déçu le 2 décembre 1851 par le coup d’état mettant fin, une fois encore, aux
espérances des libéraux et des démocrates.
En 1852, l’empereur Napoléon III venant à Grenoble, reçut un accueil cordial ; en 1860, la
sympathie des Grenoblois à son égard avait augmenté.
En France :
- Début de la conquête d’Algérie.
- Guerre de Crimée.
- Louis Vicat, (1786-1861), avait découvert le ciment artificiel,
la première cimenterie naquit à Grenoble en 1835.
- Les mines de Mathésine fournissent en abondance leur anthracite aux usines
régionales.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
En 1869, Aristide Bergès équipe la première grande chute d’eau.LA
ROMANCHE ET SES CAPRICES …
« La commune de Bourg d’Oisans est un pays bien malheureux, pays célèbre par ses
désastres. Nous voila encore inondés. L’hiver avait été doux et contre à l’ordinaire, il était
tombé peu de neige dans les montagnes qui entourent le plaine de l’Oisans ; cette plaine
était recouverte de récoltes donnant les plus grandes espérances. Dans les premiers jours
de mai, la température s’était refroidie, une neige abondante couvrit cette partie des Alpes,
qui forme un immense entonnoir, dont la plaine est le bassin. Les circonstances
défavorables nous inspirent quelques craintes, elles ont été justifiées. Une pluie de longue
durée, un vent chaud du midi ont fait fondre subitement la neige nouvellement tombée, et
de tous côtés, les eaux se sont précipitées dans la plaine.
Dans la matinée du 28, la générale a été battue dans les rues de Bourg d’Oisans et toute
la population s’est portée sur les digues de la Romanche et de ses affluents, où il pouvait
y avoir quelques dangers. Toute la population, avec énergie qui méritait un meilleur
succès, malgré une pluie battante, a entrepris une lutte contre les eaux qui, à chaque
minute, grossissaient, envahissant le sommet des digues ; on faisait des bourrelets de
terre et des faseinages ; ce travail a duré toute la journée du 28 et la nuit du 28 au 29
jusqu’à 5 heures du matin.
Le 29 à 5 heures du matin, malgré les efforts inouïs, les digues des deux rives, dans la
plus grande partie de leu longueur, ont été submergées, l’eau a vaincu. (…), les deux tiers
du terrain cultivé de la commune, les plus productifs de la plaine. »
Dans plusieurs villages, l’eau atteint le plancher du premier étage. La population est
réfugiée dans les combles. Les pauvres gens n’avaient pas de provisions, d’autres avaient
quelques réserves, mais ont été surpris par les eaux et tout est perdu ; un grand nombre
manque des choses indispensables à la vie, tous ont besoin d’être secourus. (…)
Dix jours après, il donnait des détails supplémentaires :
(…) elle fait éprouver une perte immense, a découragé la population qui, comptant sur les
travaux des digues élevées à grands frais, a vu en une heure ses travaux de longues
années et ses espérances détruites, (…)
J’ai fait enlever, mettre en sécurité tous les individus qui se trouvaient pris par les eaux
dans leurs habitations où ils pouvaient courir un danger. (…) J’ai fait distribuer du pain à
ceux qui en manquaient ; je suis allé partout où j’ai pu pénétrer, j’ai vu bien des douleurs
et j’ai taché d’encourager… »
Extraits d’une lettre de M. Arnol, Maire de Bourg d’Oisans au Préfet de l’Isère,
Archives de Bourg d’Oisans
Ces périodes spéciales d’angoisse, faites surtout d’incertitudes et de craintes ont souvent
ébranlé la ténacité des habitants, mais le découragement n’est jamais de longue durée ; il
semble même que les plus cruelles et terribles épreuves, en donnant de la gravité aux
esprits leur inspirent comme un besoin de dévouement et les font se ressaisir en des
élans de volonté énergique.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
M. Marius Hostache – « Souvenirs des montagnes
d’Oisans »LA III° REPUBLIQUE
La proclamation de la III° république, le 4 septembre 1870, fut accueillie avec satisfaction
dans la plupart des communes du Dauphiné qui saluèrent le nouveau régime garant de
l’indépendance nationale, « symbole d’ordre et de liberté ».
Plus important que le changement de régime politique, était le bouleversement
économique de la « houille blanche » ; il marque la naissance de la grande industrie de la
région. Plusieurs Dauphinois commencèrent à travailler dans la fabrication de conduites
forcées, turbines, vannes et matériels électriques.
En 1883, la première ligne à haute tension est posée entre la gare de Jarrie, (à coté de
Vizille), et la place Grenette, (au centre de Grenoble). L’électrochimie et
l’électrométallurgie commencèrent à se développer, tandis que prospéraient le textile, la
ganterie et les industries du cuir, du ciment et du papier.
Le Dauphiné innova dans le domaine du tourisme :
- 1874 Création du Club Alpin
- 1875 Création de la Société des Touristes du Dauphiné
- 1889 Création du premier Syndicat d’Initiative de France à Grenoble
- 1894 Création du premier Ski-club de France
Malheureusement, la guerre interrompit les grandes idées touristiques ; la grande guerre
coûta une grande partie de sa jeunesse à la région, une génération ne s’était pas écoulée,
que les affiches de mobilisation reparaissaient sur les murs dauphinois…
En septembre 1939, les hommes rejoignaient leurs postes, neuf mois
plus tard, arrivait la débâcle : le repli du gouvernement français.LES
VOIES FERREES DU DAUPHINE
En 1893, la concession de chemin de fer reliant Jarrie à Livet, puis à Bourg d’Oisans est
accordée à la compagnie privée V.F.D, (Voies Ferrées du Dauphiné), le 17 février.
Les travaux sont engagés rapidement et le 9 décembre 893, une première section de voie
est mise en service, « Jarrie – Rioupéroux », devenant le terminus pour quelques mois.
A peine ce tronçon terminé, que les V.F.D. envisagent de relier cette ligne à Grenoble.
Bourg d’Oisans vit arriver le train pour la première fois dans sa vallée dans l’année 1895.
La gare du Bourg servit à la fois de terminus pour le service local et de station de
correspondance pour de nombreuses destinations dans l’Oisans et le Briançonnais. Il faut
ajouter à ce trafic de voyageurs, un trafic commercial de minerai de charbon de la mine de
l’Herpie vers Huez, qui est la seule mine qui connut une certaine activité dans l’Oisans au
milieu du XX° siècle.
On voit donc apparaître, après 1905, deux embranchements ferroviaires particuliers, l’un
reliant la gare des V.F.D. au téléphérique transportant le charbon de l’Herpie, l’autre pour
une entreprise privée.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
En 1920, la compagnie privée des V.F.D. connaissait des difficultés économiques, le
département prend la relève et devint la Régie Départementale des Voies ferrées du
Dauphiné. La nouvelle régie fait procéder à la remise en état des voies et du matériel ;
avec l’appui du Conseil Général de l’Isère, elle pense à éliminer les dernières locomotives
à vapeur en électrifiant la voie de l’Oisans et en prévoyant des tracteurs puissants et des
automotrices rapides… Cela ne se fera jamais, depuis des années les transports
ferroviaires sont mis en difficultés par les automobiles, les camions et les cars.
Les V .F.D. réagissent et rachètent leurs concurrents les uns après les
autres ; en 1935, ils sont maîtres chez eux. A cette même époque, les
services voyageurs pour l’Oisans sont confiés aux autobus de la
régie.LA MINE DE L’HERPIE
« Partant de Bourg d’Oisans, non loin de la gare des V.F.D, le câble reliant les mines de
l’Herpie pour transporter le charbon de la mine à Bourg d’Oisans fut construit au début du
XX° siècle. D’une longueur de sept kilomètres, il était, à ce moment là, considéré comme
l’un des plus longs et des plus audacieux d’Europe.
Certains pylônes ne mesuraient pas moins de 70 mètres de hauteur, tel celui construit à la
Garde, près de la mairie, d’autres moins hauts vers Maronne ou la plaine de Bourg
d’Oisans.
La traversée des prairies de Brandes, jusqu’à la mine de l’Herpie, les pylônes supportant
le câble étaient construits en bois. (…)
La société des mines des Grandes Rousses succéda à l’exploitation familiale des « Broy »
d’Huez. Au début du siècle, cette société employa une main d’œuvre importante, recrutée
en majeure partie parmi les gars des villages du Haut Oisans. Ils étaient nombreux en
hiver, mais dès la bonne saison, soit que la fonte des neiges rendait les travaux dans la
mine dangereux, soit que les travaux des champs les appelaient au village, bien peu
restaient à la mine. »
Pendant près de cinquante années, l’exploitation d’anthracite de l’Herpie était prospère, au
moins en apparence, le transport de charbon était acheminé de l’Herpie au Bourg
d’Oisans au moyen de bennes suspendues sur le câble portant cinq cent kilos d’anthracite
chacune.
Les boulets étaient fabriqués dans l’usine du Bourg, mais la deuxième guerre mondiale
vint ralentir la production et chuta après la catastrophe de 1950, qui coûta la vie à une
dizaine d’ouvriers qui moururent carbonisés, dans le dortoir, un soir d’hiver ; une
avalanche écrasa un dortoir construit en bois, les braseros qui chauffaient ce bâtiment,
enflammèrent le dortoir. Les ouvriers, surpris dans leur sommeil, ne purent sortir.
D’après Marius Hostache – « Souvenirs des montagnes
d’Oisans »1939… 1945
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
C’est en Dauphiné, que furent livrés les derniers combats de la bataille de France en juin
1940…
L’armée des Alpes bloquait le verrou de Voreppe, jusqu’au 25 juin au matin. Combat sans
espoir, puisque la veille, la France avait signée l’armistice.
Le Dauphiné se trouva dans la zone non occupée où le gouvernement de Vichy
entretenait des apparences économiques.
Secrètement, la résistance s’organisait.
En février 1943, la naissance du service du travail obligatoire fit prendre le maquis à de
nombreux « réfractaires ».
Dès la fin de l’année 1942, était née l’idée de transformer le plateau du Vercors en une
vaste « citadelle » ; ce plan fut approuvé par Jean Moulin et reçu comme nom de code :
« Plan montagnard ». En fait, tous les principaux massifs des Alpes servirent de refuges
aux résistants, mais le Vercors était le principal.
Le 6 juin 1944, les accès du plateau furent bouclés par la résistance.
Le 21 juillet, l’assaut allemand se déclencha ; au total, les Allemands avaient engagé plus
d’une division contre 4000 Français mal armés et très peu entraînés.
Le 24 juillet, toute résistance avait cessé en Vercors…
Les Allemands se livrèrent à une abominable répression, incendiant les fermes, tuant des
hommes, des femmes, des enfants et mettant le comble à l’horreur en achevant
froidement les blessés du maquis rassemblés dans la grotte de la Luire.
Le 15 août 1944, le gros des forces alliées prend pied sur la côte du Var et entreprend de
remonter la vallée du Rhône. Une brigade de cavalerie motorisée américaine s’engage sur
la route Napoléon… Le 21 août 1944, elle atteint Gap…
Le 22 août, elle fit son entrée dans Grenoble.
Dans la vallée du Rhône se produisirent de durs accrochages ; Valence ne fut libéré que
le 31 août et Lyon le 3 septembre 1944.
Tout le Dauphiné était redevenu français…V.F.D. : SUITE ET FIN
En 1939, la régie est certes une importante compagnie d’autobus, mais, grâce à la ligne
de l’Oisans, qui a conservé la totalité de son trafic marchandise et aux deux lignes de
banlieues, pou Gières et Monbonnot, elle a aussi une activité ferroviaire importante.
La situation se détériore gravement à partir de 1940, les autobus équipés de gazogènes
circulent moins vite et sont rares, le trafic routier sur l’Oisans est complètement suspendu ;
la régie qui a conservé tout son matériel, fait reprendre du service aux tramways sur la
ligne de l’Oisans.
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
Peu à peu, les citadins retrouvent le chemin du Bourg d’Oisans pour se procurer du
ravitaillement aux nombreuses fermes de la région. Le dimanche, le trafic croît
démesurément ; un tram qui accepte les voyageurs avec des colis est une providence.
En 1944 de nombreux sabotages auront lieu pour empêcher les trains de marchandises
desservant les usines de la Romanche, requises par les Allemands, de circuler.
A la libération, le réseau est totalement à bout de souffle… Sans l’avoir cherché, ce
réseau et son personnel ont acquis un capital de sympathie et de respect en raison des
services rendus à tous pendant l’Occupation.
En 1946, le premier août, le service Livet – Bourg d’Oisans est abandonné et est confié
aux autobus et aux camions de la régie.
Le trafic, en 1960, sur la voie ferrée d’Oisans va en diminuant ; l’électrochimie n’a plus de
raison de venir s’installer près des centrales électriques. Les usines les plus récentes sont
conservées en bon état, mais sans être développées, on renonce aux plus anciennes…
La modernisation insuffisante, les voies traversant les villages, la voie ferrée posait des
problèmes gênants…
A la fin de l’année 1964, le trafic ferroviaire est arrêté sur la
partie Vizille – Livet.BOURG D’OISANS… SON IMPLANTATION
Trois raisons décidèrent les « Bourcats » sur le choix de l’implantation de leur ville, qui
peuvent facilement s’exprimer :
- REFUGE
Situer leur ville hors d’atteinte des nombreuses
inondations de la ROMANCHE…
- PASSAGE
Avoir le village à l’endroit le plus facile pour traverser ce
torrent fougueux afin de faciliter les liaisons commerciales.
- CARREFOUR
Etre à l’intersection de plusieurs voies de communication,
chemins reliant des villages d’altitude avec la voie romaine
GRENOBLE – BRIANCON
L’implantation du bourg ayant été choisie, les Bourcats s’installèrent sur le versant le
moins en pente de la vallée ; ce village « Saint Laurent au bord du Lac » eut un
développement difficile, qui jusqu’à nos jours fut découpé en cinq grandes périodes :
1er. époque :
Avant 1191, « Saint Laurent au bord du Lac »
2° époque :
De 1191 à 1219, « Saint Laurent du Lac »
3° époque :
De 1219 au XVIII° siècle
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
4° époque :
XIX° siècle
5° époque :
Epoque actuelle
PREMIERE EPOQUE
Avant 1191, « Saint Laurent au bord du Lac »
Le développement du village se fait suivant l’axe de la voie Grenoble – Briançon,
(ancienne route), avec un bâti plus dense au carrefour de cette voie et des chemins allant
aux villages d’altitude des Villards…
DEUXIEME EPOQUE
De 1191 à 1219, « Saint Laurent du Lac »
Les villageois, devant la montée des eaux du Lac St. Laurent, sont obligés de se réfugier
dans la partie « haute » de St. Laurent du Lac, qui leur servira de refuge jusqu’en 1219,
date à laquelle la rupture du barrage libéra la Plaine d’Oisans…
TROISIEME EPOQUE
De 1219 au XVIII° siècle
Les habitants du Bourg reprirent possession de la partie « basse » de leur village enfin
rendu par le Lac St. Laurent…
QUATRIEME EPOQUE
XIX° siècle
Le changement de tracé de la route Grenoble – Briançon, (plus en aval du Bourg), donna
au bâti un axe nouveau. Elle emprunte maintenant un tracé plus direct et en plaine,
(contrairement à l’ancien qui était taillé à flanc du talus de pied du versant) et emprunte en
amont la digue le long de la Romanche…
CINQUIEME EPOQUE
Epoque actuelle
Le bâti s’est étendu dans toutes les directions ; les contraintes
d’ensoleillement en sont l’une des causes principales.
L’étalement du bâti en aval et en amont du Bourg d’Oisans
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Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
devient important, les accès aux villages d’altitude sont
devenus secondaires.MORPHOLOGIE
L’étude morphologique du plan actuel du Bourg d’Oisans nous montre deux choses :
-La rue Général Bataille est ses prolongements suivent une courbe de niveau située
à la cassure entre une pente douce et une pente plus forte. En plan, son aspect
courbe vient du fait que, suivant une horizontale, elle est située sur le cône de
déjection créé par le ravin de Saint Antoine.
-Les rues et passages perpendiculaires à la rue Général Bataille convergent vers le
sommet du cône de déjection du ravin de Saint Antoine ;
Elles suivent donc les lignes de pente les plus fortes ; ce sont des rues qui ont été
percées dans les 3° et 4° époques.
Si l’on s’intéresse aux voies, (schémas ci-dessus), la
transparence des époques est assez nette ; les parties les plus
découpées par des rues étroites et orthogonales entre elles
font référence aux premières époques, alors que les larges
rues percées en biais sont contemporaines.BIBLIOGRAPHIE
« HISTOIRE DU DAUPHINE »
P. DREYFUS
QUE SAIS JE ? – P.U.P.
« HISTOIRE DU DAUPHINE »
B. BLIGNY
E. PRIVAT
« L’ISERE AUTREFOIS »
C. MULLER
E. LOUIS
4 SEIGNEURS
« L’ISERE EN MOUVEMENT »
C. MULLER
E. LOUIS
4 SEIGNEURS
« L’OISANS
ETUDE GEOGRAPHIQUE »
A. ALLIX
« L’OISANS
AU MOYEN AGE »
A. ALLIX
« GUIDE DU VOYAGEUR
DANS L’OISANS »
J.H. ROUSSILLON
« SOUVENIRS DES MONTAGNES
D’OISANS »
H. HOSTACHE
« L’OISANS HISTOIRE TRADITIONS
LEGENDES »
G. SENTIS
« LES VOIES FERREES DU
DAUPHINE »
marc guillou
H. BOYER
P. BOUILLIN
Page 31
L’EMPREINTE DU TEMPS
Bourg d’Oisans, à travers l’histoire…
« ETUDES CLIMATOLOGIQUE
SUR LA REGION DE BOURG D’OISANS »
M. BODELLE
I.G.A, (N° 9/1983)
« MONOGRAPHIE DE BOURG D’OISANS »
R. MENUDIER
I.G.A, (N° AB-CC 125)
« ETUDE TOURISTIQUE BOURG D’OISANS »
F. VEREL
I.G.A.
« ETUDE DU REAMENAGEMENT
D’UN ILOT A BOURG D’OISANS »
J.Y. GUIBOURDENCHE E.A.G, (N° T.E. 40)
« BOURG D’OISANS,
REHABILITATION D’UN QUARTIER ANCIEN »
A. PREGALDINY
M. GUILLOU
« GRAND’ MAISON INFORMATION »
Revus n° 1 / 4 / 6 / 8
marc guillou
Page 32
E.A.G, (N° T.E. ..)
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