Colorations usuelles en bactériologie 1/5 Colorations usuelles en bactériologie D’après Françoise Baledent www.devsante.org Biologiste, Centre hospitalier Robert-Ballanger, Aulnay-sous-Bois. Les techniques de coloration sont utilisées pour l'examen direct des produits pathologiques puis pour l'identification des colonies obtenues après mise en culture de ces produits pathologiques. La réalisation de frottis de bonne qualité est une condition préalable à toute coloration. I. Réalisation des frottis .Ils doivent être réalisés le plus rapidement possible après le prélèvement. .Les frottis doivent être étalés en couche mince et régulière, puis séchés et fixés. A. Etalement Les lames doivent être parfaitement propres et dégraissées. 1. Produits pathologiques On utilise, selon les cas : .un écouvillon .une pipette .une anse de platine L'étalement doit être aussi mince que possible : la dilution des produits épais est parfois nécessaire. NB. Si liquide (urines, ascite, pleural ... ) : frottis à partir de culots de centrifugation. 2. Étalement à partir de milieux de culture On étale les gouttes de suspension bactérienne en un film mince et régulier : .soit par un mouvement régulier et circulaire à l'aide d'une anse de platine, en décrivant des spirales partant du centre vers l'extérieur → un étalement de 2 à 3 cm de diamètre .soit en tirant de façon uniforme l'effilure d'une pipette Pasteur (figure n° 4). B. Séchage Doit se faire autant que possible à la température du laboratoire. .A la rigueur en posant la lame sur une platine chauffante réglée à 37°, ou en la maintenant dans l'air chaud au-dessus de la veilleuse d'un bec Bunsen. .Proscrire un séchage trop brutal, à une température trop élevée (altération de certains constituants, en particulier la paroi bactérienne). Colorations usuelles en bactériologie 2/5 C. Fixation de la préparation .Doit s'effectuer sur une préparation sèche. Plusieurs méthodes peuvent être utilisées : 1. Fixation à l'alcool à froid Ce procédé doit être recommandé pour les produits pathologiques Il peut être employé quel que soit le produit traité. On peut utiliser : .l'alcool méthylique absolu (recommandé pour les produits pathologiques) .l'alcool éthylique absolu ou à 95° 2. Fixation par l'alcool flambé .Doit être réservée aux cultures bactériennes. .Ne pas l’utiliser pour les produits pathologiques .Il est prudent de mettre au préalable de l'eau au fond de la cuve de coloration. Recouvrir la lame d'alcool à 95°, laisser quelques secondes de contact, égoutter, puis enflammer l'alcool restant. Laisser refroidir. 3. Fixation par la chaleur .Bonne méthode pour les cultures bactériennes. .Ne pas l’utiliser pour les produits pathologiques .Une goutte de suspension bactérienne est déposée sur la lame .La lame, tenue à l’aide d’une pince métallique, est passée à plusieurs reprises et très brièvement au dessus de la veilleuse d’un bec Bunsen ; souffler sur la goutte pour accélérer l’évaporation et pour éviter un réchauffement trop important. .La fixation est terminée lorsque tout le liquide est évaporé. en Quelle que soit la technique de fixation employée, la lame doit être rincée à l'eau distillée, égouttée et séchée avant d'être colorée. II. Coloration au bleu de méthylène La coloration la plus informative est la coloration de Gram. Dans le cas ou les réactifs nécessaires ne seraient pas disponibles, une coloration au bleu de méthylène peut apporter des informations concernant la morphologie des germes. A. Préparation du bleu phéniqué (de " Kühne ") Dans un mortier, broyer et mélanger : Bleu de méthylène (pour microbiologie) 20 g Phénol cristallisé 20 g Alcool à 95° 100 ml Reprendre par 100 à 200 ml d'eau distillée .Laisser reposer pendant 24 heures .Compléter à 1 000 ml, .Filtrer, .Conserver en flacon bouché .Filtrer à nouveau avant l'emploi. Colorations usuelles en bactériologie B. La coloration .Recouvrir le frottis à l’aide du colorant et laisser agir 1 minute. .Rincer abondamment à l'eau du robinet jusqu'à élimination des colorants en excès. .Sécher à l'air .Examiner au microscope, objectif à immersion x 100. III. Coloration de Gram Permet de différencier les bactéries selon 2 critères : leur forme et leur affinité pour les colorants. Principe : .les bactéries sont imprégnées par un premier colorant (violet de gentiane ou violet cristal) .puis elles sont fixées par un mordant, la solution de Lugol (solution d'iode) .on fait ensuite agir un décolorant (alcool le plus souvent). Suivant la composition de leur paroi : .certaines bactéries résistent à cette décoloration et apparaissent colorées en violet elles sont dites Gram positif. .d’autres bactéries ne résistent pas et ne sont plus visibles. On doit donc utiliser un deuxième colorant, de couleur rouge (fuchsine ou safranine). Ces bactéries apparaissent alors colorées en rose, elles sont dites Gram négatif. A. Composition et préparation des colorants Consulter le MO « Coloration de Gram . Les réactifs » Il existe plusieurs variantes selon que : .violet de gentiane phéniqué ou violet cristal oxalaté .agent décolorant : alcool éthylique ou mélange alcool + acétone .colorant rouge : fuschine phéniquée ou safranine B. La technique Quelle que soit le colorant utilisé la technique reste sensiblement la même .Recouvrir le frottis à l’aide du colorant violet et laisser agir pendant 1 minutes .Verser le colorant qui recouvre le frottis dans le bac de coloration .Passer le frottis sous l’eau du robinet .Recouvrir de la solution de Lugol et laisser agir pendant 1 minute .Verser le Lugol qui recouvre le frottis dans le bac de coloration .Passer le frottis sous l’eau du robinet .Projeter un jet du mélange alcool/acétone sur le frottis tenu verticalement ou en position très inclinée jusqu’à ce que l’alcool/acétone qui s’écoule ne soit plus coloré (2 à 5 sec. selon l’épaisseur du frottis ; un peu plus longtemps si le décolorant est l’alcool seul) .Immédiatement passer le frottis sous l’eau du robinet .Recouvrir le frottis à l’aide du colorant rouge (fuschine diluée ou safranine) .Laisser agir 30 secondes à 1 minute. .Chasser le colorant à l’aide de l’eau du robinet .Egoutter .Laisser sècher à température ambiante ou en s’aidant d’un sèche-cheveu. .Examiner au microscope, objectif x100 à immersion. 3/5 Colorations usuelles en bactériologie 4/5 C. Les résultats La coloration de Gram permet de classer les bactéries en deux grandes catégories : .les bactéries Gram positif : colorées en violet .les bactéries Gram négatif : colorées en rose ou rouge. Cette distinction est fondamentale car elle permet de classer les bactéries. Il faut cependant savoir que la coloration de Gram peut être variable pour une même espèce (par exemple, le pneumocoque se décolore facilement, de même, certaines bactéries Gram positif quand les colonies sont âgées). Certaines bactéries sont même dites « Gram faible » ou « Gram variable » (ex. : corynébactéries). IV. Description de la morphologie bactérienne après coloration de Gram Selon la forme, on peut distinguer : A. Les cocci Gram positif Ils peuvent être isolés ou regroupés : .diplocoques (ex. : pneumocoques, streptocoques) .en chaînettes (streptocoques) .en tétrades (sarcine) .en amas ou « grappes de raisin» (staphylocoques). B. Les bacilles Gram positif, de taille variable : petits, isolés ou regroupés en palissade comme les corynébactéries ou plus grand : Bacillus ou Clostridium aux extrémités plus arrondies, parfois sporulés. C. Les cocci Gram négatif pouvant être regroupés en « grain de café » (Neisseria). D. Les bacilles gram négatif .avec un renforcement bipolaire de la coloration (entérobactéries) .assez fins (Pseudomonas), .bacilles plus petits (comme Haemophilus ou Bacteroïdes) .incurvés (vibrion) ou très fins en forme de « moustache » ou « de vol d'oiseaux » (Campylobacter) Conclusion Les colorations usuelles et en particulier la coloration de Gram constituent un élément essentiel en bactériologie, permettant d'orienter et/ou de confirmer un diagnostic, afin d'adapter au mieux un traitement efficace. (Schémas extraits du Manuel des techniques de base pour le laboratoire médical, Organisation Mondiale de la Santé, Genève.) Développement et Santé, n° 127, février 1997 Colorations usuelles en bactériologie 5/5