HISTOIRE Chapitre 2 L’invention de la citoyenneté dans le monde antique Texte 1 : la démocratie Athénienne selon Périclès D'après Thucydide, Périclès (461-399) prononce en 431 une oraison funèbre en l'honneur des guerriers morts au combat dans la guerre qui oppose Athènes et ses alliés à Sparte et ses alliés (la guerre du Péloponnèse). Il fait également l'éloge d'Athènes, de ses institutions et de ses héros. L'inhumation terminée, un orateur, désigné par la république parmi les hommes les plus remarquables et les plus considérés, fait l'éloge funèbre qui s'impose […] Pour faire l'éloge des premières victimes, ce fut Périclès, fils de Xanthippos, qui fut choisi […] prononça le discours suivant : « Les exploits guerriers qui nous ont permis d'acquérir ces avantages, l'ardeur avec laquelle nous-mêmes ou nos pères nous avons repoussé les attaques des Barbares ou des Grecs, je ne veux pas m'y attarder ; vous les connaissez tous, aussi je les passerai sous silence. Mais […] la nature des institutions politiques et des mœurs qui nous ont valu ces avantages, voilà ce que je vous montrerai d'abord […] Notre constitution politique n'a rien à envier aux lois qui régissent nos voisins ; loin d'imiter les autres, nous donnons l'exemple à suivre. Du fait que l'État, chez nous, est administré dans l'intérêt de la masse et non d'une minorité, notre régime a pris le nom de démocratie. En ce qui concerne les différends particuliers, l'égalité est assurée à tous par les lois ; mais en ce qui concerne la participation à la vie publique, chacun obtient la considération en raison de son mérite, et la classe à laquelle il appartient importe moins que sa valeur personnelle ; enfin nul n'est gêné par la pauvreté et par l'obscurité de sa condition sociale, s'il peut rendre des services à la cité. La liberté est notre règle dans le gouvernement de la république et dans nos relations quotidiennes la suspicion n'a aucune place ; nous ne nous irritons pas contre le voisin, s'il agit à sa tête ; enfin nous n'usons pas de ces humiliations qui, pour n'entraîner aucune perte matérielle, n'en sont pas moins douloureuses par le spectacle qu'elles donnent. La contrainte n'intervient pas dans nos relations particulières ; une crainte salutaire nous retient de transgresser les lois de la république ; nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n'étant pas codifiées, impriment à celui qui les viole un mépris universel. En un mot, je l'affirme, notre cité dans son ensemble est l'école de la Grèce […] » Thucydide, Guerre du Péloponnèse /II, chapitres XXXIV-XLI, éditions GF, p. 133-137. Texte 2 : une critique de la démocratie Athénienne par Aristophane Dans « Les Cavaliers » l’auteur de théâtre athénien Aristophane fait une sévère critique de la démocratie athénienne. Dans cette comédie Démos symbolise le peuple athénien. Il est sous l’influence de Cléon, un riche marchand (c’est un véritable personnage Athénien). Un groupe politique qui s’appelle « les cavaliers » cherche à écarter Cléon du pouvoir en lui trouvant un adversaire à sa taille. Un oracle (une sorte de devin dont les avis sont très respectés) prédit qu’un marchand d’andouilles sera capable de séduire Démos et d’écarter Cléon. Démosthène (un des « cavaliers ») part à la recherche de ce marchand d’andouilles pour le convaincre de « faire de la politique ». Voici un extrait de leur dialogue : LE MARCHAND D'ANDOUILLES. Dis-moi, comment moi, un marchand d'andouilles, deviendrai-je un grand personnage ? DÉMOSTHÈNE. C'est pour cela même que tu deviendras grand, parce que tu es […] un homme du bas-peuple. LE MARCHAND D'ANDOUILLES. Je ne me crois pas digne d'un si grand pouvoir. DÉMOSTHÈNE. Hé ! hé ! pourquoi dis-tu que tu n'en es pas digne ? […] Es-tu fils de gens beaux et bons ? LE MARCHAND D'ANDOUILLES. J'en atteste les dieux, je suis de la canaille. DÉMOSTHÈNE. Quelle heureuse chance ! Comme cela tourne bien pour tes affaires ! LE MARCHAND D'ANDOUILLES. Mais, mon bon, je n'ai pas reçu la moindre éducation […] DÉMOSTHÈNE. […] La démagogie ne veut pas d'un homme instruit, ni de mœurs honnêtes ; il lui faut un ignorant et un infâme. Mais ne laisse pas échapper ce que les dieux te donnent, d'après leurs oracles. LE MARCHAND D'ANDOUILLES. Oui, l'oracle me désigne ; mais […] comment pourrai-je de gouverner Démos ? DÉMOSTHÈNE. Tout ce qu'il y a de plus simple. Continue à faire ce que tu fais, brouille toutes les affaires comme tes tripes ; séduit Démos en l'embobinant avec des salades : tu as tout ce qui fait un démagogue, une voix de canaille, une origine misérable, un langage ordurier : tu réunis tout ce qu'il faut pour gouverner. Aristophane, Les cavaliers, 424 avant JC. 769757445 Page 1