LA SCHIZOPHRENIE

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LA SCHIZOPHRENIE
Définition
Etymologiquement, le mot schizophrénie signifie : perte de l’unité (schize) de l’esprit
(phrénie).
Le résultat de cette perte d’unité psychique en est une triple incohérence :
- de la pensée,
- des propos,
- du comportement.
-A- Signes cliniques
-1- Signes cliniques positifs
 L’hallucination
L’hallucination est une perception sans objet à percevoir.
On distingue :
 Les hallucinations psychosensorielles (auditives +++, cénesthésiques ++,
olfactives +, gustatives, visuelles). Les plus
caractéristiques sont les hallucinations auditives (une
voix interpelle le sujet, lui parle, lui donne des
ordres…) et cénesthésiques (sensations physiques à
type de tensions douloureuses dans la tête ou les
organes sexuels, dans le cœur, ondes traversant le
corps...). Ces phénomènes peuvent être élémentaires
(son simple, …) ou complexes (plusieurs voix
connues ou inconnues) ;
Les hallucinations intra-psychiques : sensation
de voix ou de dialogue incoercible «dans la tête».
Chez la majorité des patients schizophrènes, on
retrouve un syndrome particulier qui se caractérise
ainsi :
 Au début par des hallucinations intra-psychiques affectivement neutres (ni
menaçantes, ni bienveillantes) ;
 viennent ensuite des phénomènes de devinement de la pensée (le sujet a la
sensation que tout le monde sait ce qu’il pense), de commentaires ou d’écho des actes
et des pensées (un commentaire intra-psychique sur ce qu’il pense ou fait : «tiens, il
pense à sa sœur», «tiens, il mange un œuf»...) ;
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 enfin, sont associées des hallucinations psychosensorielles malveillantes, des
phénomènes d’influence et d’automatisme de la pensée (pensées ressenties comme
étrangères, automatiques, incoercibles : le sujet parle de télépathie) ainsi que des
phénomènes d’automatisme moteur (actes ressentis comme imposés et incoercibles).
Les phénomènes hallucinatoires, de télépathie et d’automatisme peuvent évidemment être
la cause d’actes inattendus.
 Le délire schizophrénique
 Il est surtout illogique et incohérent.
 Il est le plus souvent à thèmes persécutifs mais
aussi mystiques, mégalomaniaques, d’invention.
 Ces délires sont à la fois hallucinatoires,
interprétatifs, intuitifs et imaginatifs :
Les hallucinations peuvent être intra-psychiques,
psychosensorielles, ou à type d’automatisme
mental.
L’interprétation consiste à donner un sens erroné
à une situation. Par exemple, le malade éprouve
un sentiment d’hostilité de l’environnement à son endroit.
L’intuition est une conviction qui s’impose au sujet : intuition que l’interlocuteur est
malveillant ou devine ses pensées.
L’imagination participe à toute construction délirante même si celle-ci est incohérente !
 L’Angoisse
 Elle est toujours majeure, extrêmement douloureuse. Elle
peut générer soit une agitation, soit au contraire un état de
stupeur.
 Dans la forme la plus sévère, le patient ne peut même pas
verbaliser cette angoisse : elle se lit sur son visage et se voit
dans ses attitudes.
 Elle peut même être anidéique c'est-à-dire sans contenu :
elle ne peut donc même pas être énoncée !
 L’Agitation
 Elle est à la fois induite par l’angoisse, le délire, les
hallucinations et l’automatisme, la désorganisation psychique
et comportementale.

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-2- Signes clinique négatifs
 L’Autisme
 L’autisme est une perte de contact avec le monde
environnant : en retrait, peu bavard, peu réactif, le
sujet autiste vit en son monde intérieur (plus
angoissant et douloureux qu’agréable). C’est pour
ne pas ignorer le fait que ce repli sur soi n’exclut ni
fantaisies imaginatives, ni angoisse, ni pensées
délirantes que Bleuler a proposé de remplacer le
terme «démence précoce» par celui de
«schizophrénie».
 L’Emoussement affectif
 L’émoussement affectif ne protège pas de
l’angoisse. Il est une manifestation du
désinvestissement du monde environnant, familial
notamment. Le sujet n’éprouve plus d’amour pour
son entourage, il ne réagit plus aux sollicitations
affectives. Il apparaît indifférent.
 L’Indifférence émotionnelle
 L’indifférence émotionnelle donne à ces patients un aspect
lointain, comme s’ils étaient ailleurs, peu ou pas concernés par le
présent, les autres, leur propre situation.
 L’Apragmatisme ou incapacité d’agir
 L’apragmatisme trahit un déficit
d’énergie, de capacité à vouloir s’engager
dans l’action. Les conséquences sociales
sont souvent graves : chute du rendement
scolaire, incapacité à maintenir un travail,
difficulté à se lever, à se concentrer...
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-B- Signes de désorganisation
 La perte d’unité psychique (encore appelée dissociation ou discordance)
La perte d’unité psychique peut se
manifester par des signes discrets :
maniérisme gestuel ou verbal qui donne une
impression de surcharge ou perte de fluidité
du geste et du discours. A l’extrême, ceci peut
aller jusqu’à des stéréotypies gestuelles
(parole explosive, balancement saccadé du
cou) ou des comportements déroutants : éclats
de rire dans une situation grave ou, au
contraire, pleurs inattendus.
 L’Incohérence idéique et verbale
 L’incohérence idéique* et
verbale peut aller à l’extrême
jusqu’à une schizophasie** :
bouillie de mots et de phrases
incompréhensibles par l’emploi de
mots inconnus ou mal venus, perte
de la syntaxe, absence de
construction de la pensée et du
discours. Plus souvent, il s’agit
d’une perte de cohérence : pensée
floue et peu logique, discours
allusif, déductions inattendues,
associations d’idées saugrenues.
Incohérence idéique : relâchement des associations des idées (flou de la pensée), troubles du
jugement et du raisonnement aboutissant à l'état d'incohérence de la pensée et des propos.
** Schizophasie : désorganisation du langage par perte de la logique grammaticale et
sémantique.
 Bizarreries comportementales
 Les bizarreries du comportement pourront être
évidentes : tenues vestimentaires singulières, attitudes
non adaptées, mode de vie surprenant. Bien sûr, à elle
seule, l’originalité ne peut soutenir un diagnostic de
trouble schizophrénique ! Les bizarreries de
croyances, de raisonnement et de comportement
peuvent pourtant attirer l’attention de l’entourage.
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 La désocialisation
 La perte des capacités d’adaptation à la vie de tous les jours avec désocialisation est
un des résultats de la désorganisation. Un signe fréquent est l’inversion du rythme de
vie : lever très tardif vers 14 heures ou 15 heures et vie nocturne solitaire, parfois
bruyante et gênante pour la famille.
Un des objectifs des soins sera de limiter cette désocialisation en aidant les
capacités du patient non altérées par la maladie : sur le plan intellectuel, affectif et
social.
-C- Autres signes
 Les signes comportementaux
Beaucoup d’anomalies du comportement peuvent masquer ou révéler un trouble
schizophrénique : toxicomanie, anorexie-boulimie*, troubles des conduites sexuelles,
tentative de suicide...
Il importe donc d’être vigilant face à tous troubles comportementaux survenant à
l’adolescence ou à l’âge adulte jeune, car plus le diagnostic de trouble schizophrénique
est porté tôt plus le traitement est facilité et le pronostic amélioré.

Anorexie : trouble du comportement alimentaire à type de perte de l'appétit se manifestant
par une restriction alimentaire excessive d'origine psychique (anorexie mentale) ou
organique.
*Boulimie : trouble du comportement alimentaire à type d'absorptions compulsives d'une
quantite excessive d'aliments, en peu de temps et sans plaisir, souvent suivies de
vomissements provoqués.
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 Les signes émotionnels
Des manifestations d’angoisse telles que crises spontanées d’angoisse ou provoquées
par des objets ou situations (phobie d’objet, phobie sociale) nécessitent que soit écarté
le diagnostic de trouble schizophrénique. Il en est de même pour toute dépression à
l’adolescence.
 Les signes idéiques
Les difficultés de concentration intellectuelle, des idées obsédantes doivent également
faire évoquer le diagnostic de trouble schizophrénique éventuellement confirmé par
d’autres signes cliniques (bizarreries, incohérence, signes positifs ou négatifs…).
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-D- Formes cliniques de début
L’âge de début de la schizophrénie se situe vers la fin de l’adolescence (pic de fréquence
entre 16 et 25 ans).
Trois formes cliniques de début
sont possibles :
début brutal en quelques jours ou
semaines;
début subaigu : période de
manifestations non spécifiques
d’anxiété, dépression pendant
quelques semaines ou mois, suivie
de l’émergence de symptômes
psychotiques caractéristiques tels
que hallucinations ou autisme* ;
début insidieux et progressif.
* Autisme : repli sur soi se traduisant par une perte des interactions émotionnelles, affectives
ou intellectuelles avec l'environnement.
 Les formes à début brutal
Les formes à début brutal peuvent s’exprimer de différentes manières :
 Une bouffée délirante : épisode psychotique aigu d’apparition soudaine (moins de
48h), non imputable à une prise de toxiques. Le délire est transitoire à mécanismes et
thèmes polymorphes (à multiples facettes) : souvent hallucinations auditives,
mécanismes imaginatifs et intuitifs et idées délirantes de persécution, mystiques,
mégalomanie... ; à propos d’un tel épisode on parle de «coup de tonnerre dans un
ciel serein», tant rien ne laissait présager un tel accès.
La bouffée délirante aiguë rétrocède en moins de 4 semaines : sinon il s’agit d’un
mode d’entrée dans un trouble chronique schizophrénique ou d’un équivalent de
premier accès de trouble bipolaire (maladie faite d’accès dépressifs et d’accès
d’excitation euphorique avec des intervalles plus ou moins longs libres de
symptômes psychiques) ;
 Un état d’excitation maniaque euphorique marqué par ce qu’on appelle des signes
d’atypicité parce que surprenants lors d’un état d’excitation euphorique : idées
délirantes, euphorie peu évidente malgré l’excitation voire dimension anxieuse plus
manifeste que l’optimisme ou l’euphorie

 Une dépression associée à des éléments dissociatifs (bizarreries, froideur
affective) et délirants : la dépression est un état émotionnel douloureux que le
déprimé sait décrire, expliquer à son interlocuteur ; la schizophrénie est au contraire
un état indicible où l’émoussement affectif et émotionnel va devenir de plus en plus
patent ;

 Un comportement impulsif tel que délinquance sans profit, automutilations
étranges, toxicomanie : 40 % des sujets entrant dans un processus schizophrénique
ont consommé ou abusé de haschich ;
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
 Un état pseudo-confusionnel où l’incohérence idéo-verbale est telle que la
pensée, les propos, le comportement sont désorganisés, le sujet incapable de
s’orienter en proie à une vive angoisse.
 Les formes à début subaigus
 Toute manifestation
anxieuse ou dépressive
excessive survenant à
l’adolescence doit faire
évoquer le risque d’une
pathologie psychotique
débutante : chez beaucoup de
sujets atteints de
schizophrénie on retrouve
rétrospectivement de telles
manifestations qui, souvent,
n’avaient pas suffisamment
attiré l’attention.
 La crise d’adolescence est
une réalité qu’il faut savoir
gérer en offrant tout à la fois attention et écoute, autorité et limites aux expressions
caractérielles ou comportementales de l’adolescent ; il faut éventuellement avoir la
perspicacité de débusquer des manifestations à caractère pathologique :
dysmorphophobies*, interrogations récurrentes sur l’identité, le sens de la vie,
angoisses indicibles.
*Dysmorphophobie : conviction ou préoccupation à propos d'une disgrâce corporelle
existante ou exagérée.
 Les formes à début insidieux et progressif
Elles sont les plus difficiles à
diagnostiquer :
 fléchissement physique et psychique :
apragmatisme*, clinophilie** ; désintérêt
ou centres d’intérêt bizarres ; perte de
l’hygiène ; inversion du rythme de vie (
vie nocturne plus ou moins bruyante et
repli sous la couette le jour ) ;
 baisse du rendement intellectuel avec
retentissements scolaire, professionnel et
social ;

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 modifications du caractère et de l’affectivité : irritabilité, colères
dysproportionnées, rires incompréhensibles, repli sur soi, isolement, froideur
affective ;
 troubles du comportement : conduites toxicomaniaques (abus d’alcool et de
substances psychoactives), troubles des conduites sexuelles et alimentaires,
conduites agressives ;
 Préoccupations hypochondriaques ou dysmorphophobiques (préoccupation
excessive à propos d’une disgrâce corporelle) ;
 Trouble de l’identité de genre ou transsexualisme : conviction d’appartenir au
sexe opposé (identité psychologique de femme dans un corps d’homme ou
inversement).
* Apragmatisme : incapacité d'accomplir des actes courants.
** Clinophilie : perte d'activité et d'énergie avec tendance à rester anormalement au
lit, en dehors des périodes habituelles (nuit...).
-E- Formes clinique à la période d’état
 La schizophrénie paranoïde
 Elle représente la forme la plus fréquente.
 Elle débute après 20 ans et avant 30 ans.
 Les symptômes positifs* sont au premier plan.
 Elle évolue spontanément par intermittence ou d’un seul tenant :
soit vers un appauvrissement du délire et un retrait autistique,
soit vers un enkystement du délire** avec paraphrénisation*** : les idées
délirantes sont fantasques, à l’échelle du cosmos.
* Symptômes positifs : agitation, angoisse, délire, hallucinations.
** Enkystement du délire : situation où la conviction délirante ne progresse plus tout en
restant entière et tue.
*** Paraphrénisation : prolifération imaginaire du contenu délirant qui dépasse le monde
environnat jusqu'à devenir cosmique.
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 L’Hébéphrénie

Son début est précoce, avant 20 ans.
Les signes négatifs sont au premier plan : autisme, émoussement affectif et
émotionnel, altération des capacités cognitives.

L’activité délirante est pauvre

L’adaptation sociale est rapidement compromise.
*Hébéphrénie : trouble schizophrénique débutant précocement (hébé = jeunesse), le plus
souvent de type déficitaire.
 L’Hébéphrénie-catatonie
La dissociation est marquée sur le plan psychomoteur : stéréotypies, maniérisme
gestuel ou comportemental.
Le syndrome catatonique associe :
négativisme : opposition, repli, esquive du contact physique, refus de la
main tendue ;
inertie psychomotrice : passivité, suspension des gestes ;
catalepsie : rigidité avec persévération des attitudes imposées ou spontanées
hyperkinésies : impulsions verbales et/ou gestuelles, décharges motrices.
négativisme : opposition, repli, esquive du contact physique, refus de la main
tendue ;
inertie psychomotrice : passivité, suspension des gestes ;
catalepsie : rigidité avec persévération des attitudes imposées ou spontanées
hyperkinésies : impulsions verbales et/ou gestuelles, décharges motrices.



 Schizophrénie dite pseudonévrotique ou pseudopsychopathique
Il existe des manifestations à type de trouble anxieux (trouble panique, phobique),
hystérique (théâtralisme, suggestibilité) ou obsessionnel.
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Ceci peut induire des erreurs diagnostiques et des impasses thérapeutiques. Ces
manifestations dites pseudonévrotiques ne doivent pas faire méconnaître les
symptômes schizophréniques caractéristiques sous-jacents : flou de la pensée et du
propos comme premier degré de désorganisation, croyances et convictions
irrationnelles et illogiques comme premier stade du fonctionnement délirant,
indifférence affective et émotionnelle comme premier palier des manifestations de
repli autistique.

Les formes pseudopsychopathiques de schizophrénie soulèvent souvent des
questions diagnostiques particulièrement difficiles. On appelle «psychopathie» un
désordre comportemental caractérisé par l’impulsivité, l’instabilité affective et
sociale, l’appétence marquée pour les toxiques, la propension aux conduites
délinquantielles et la marginalité. Ce désordre débute à l’adolescence et s’atténue
vers la trentaine sauf quand il a conduit à une mort accidentelle, une maladie
alcoolique ou une autre toxicomanie, une condition d’invalide consécutivement à un
accident. Certains psychopathes présentent des bouffées délirantes aiguës… et
certains schizophrènes présentent des comportements de type psychopathique. Dans
ce dernier cas, au fil du temps, les symptômes de schizophrénie deviennent de plus
en plus évidents et les conduites psychopathiques s’amendent en quelques années.
 Schizophrénie dysthymique* ou trouble schizo-affectif
 Cette forme périodique associe des éléments schizophréniques (dissociation,
délire) à des éléments thymiques (maniaques ou dépressifs ou mixtes). Les périodes
inter-critiques sont marquées par la persistance d’une dissociation discrète. Cette
forme clinique est sensible aux thérapeutiques préventives des accès maniaques ou
dépressifs, telles que le lithium ou d’autres thymorégulateurs**, ce qui lui confère
un pronostic relativement favorable.
* Dysthymie : morosité dépressive chronique. Synonime : personnalité dépressive (triste,
inquiète, peu festive).
** Thymorégulateur : médicament capable de stabiliser les variations de l'humeur excessive
dans un sens euphorique
-F- Les diagnostics différentiels
 La bouffée délirante aigue
 Elle correspond à l’éclosion
soudaine d’un délire transitoire à
thèmes et mécanismes
polymorphes (à multiples facettes).
 L’interrogatoire des proches
concernant l’absence de chronicité
du trouble et d’antécédents
psychiatriques est essentiel.
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
 La bouffée délirante peut être un accident psychiatrique sans lendemain ou une
porte d’entrée vers la schizophrénie ou vers le trouble bipolaire.
 Autres délires
 Les délires paraphréniques* surviennent vers 40 ans. Ils se différencient des
schizophrénies par une absence de dissociation et la coexistence d’une pensée
fabulatoire. L’intégration sociale est souvent conservée.
 La psychose hallucinatoire chronique est un délire chronique non dissociatif. Il
survient plus souvent chez la femme après 40 ans. Il peut être ignoré pendant
plusieurs années derrière un comportement apparemment normal. Les hallucinations
sont surtout auditives, cénesthésiques** (sensation d’être violée durant le sommeil),
olfactives (sensation de gaz toxiques). Il s’agit presque toujours d’un délire de
persécution.
 Le délire paranoïaque se différencie des
schizophrénies par un âge de début plus tardif (à
partir de 30 ans), l’absence de dissociation, un
mécanisme unique interprétatif et des thèmes
surtout persécutifs. Le délire est systématisé,
c’est-à-dire logiquement construit, d’où la
capacité de ces sujets à faire partager leurs
convictions à d’autres.
*Paraphrénisation : prolifération imaginaire du
contenu délirant qui dépasse le monde environnant
jusqu'à devenir cosmique.
** Cénesthésie : perception de sensations au niveau
du corps.
 Troubles bipolaires
 Ce trouble est caractérisé
par des alternances d’accès
euphoriques et d’accès
dépressifs séparés par des
intervalles de temps sans
symptômes.
 Les épisodes maniaques ou
dépressifs peuvent
s’accompagner d’éléments
psychotiques (hallucinations,
idées délirantes). Mais les
périodes intercritiques sont libres de symptômes psychotiques.
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 Etat limite ou border line
 La personnalité border line est marquée par des relations interpersonnelles
chaotiques, des alternances d’idéalisation et de dévalorisation, de dépendance et
d’hostilité, et beaucoup d’impulsivité.
 Ce diagnostic est souvent évoqué chez l’adolescent et l’adulte jeune, parfois pour
différer un éventuel diagnostic de schizophrénie par trop peu d’arguments actuels
pour mettre en œuvre des traitements antipsychotiques.
-G- Evolution de la schizophrénie
 Les schizophrénies sont des pathologies chroniques débutant avant l’âge de 30
ans.
 La qualité de l’évolution 5 ans après le début de la maladie est très largement
prédictrice du devenir 20 ans plus tard : d’où l’importance d’un traitement aussi
précoce et actif que possible pendant les premières années et, au contraire, la
conscience qu’au-delà il faut davantage gérer l’évolution que vouloir l’infléchir.
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-H- Eléments pronostics à court et à long terme
 Eléments pronostiques à court et à long terme
Sont des facteurs de mauvais pronostic :
le sexe masculin,
un isolement sociofamilial,
un niveau socioculturel défavorisé,
une mauvaise adaptation sociale et socioprofessionnelle prémorbide,
un début précoce (avant 18 ans) et/ou insidieux des troubles,
une prédominance des symptômes négatifs,
une prise en charge tardive par rapport aux premiers symptômes,
une résistance à la thérapeutique,
une évolution continue des troubles.
Il importe de savoir que :
le devenir après 5 ans d’évolution est très largement prédicteur du devenir à 20 ans ;
l’évolutivité du trouble schizophrénique tend à s’atténuer après 5 ans.
 Evolution à long terme :
Le devenir à long terme est de 3 types :
a) dans les meilleurs cas, cicatrisation de la maladie : les symptômes sont devenus
beaucoup moins évidents et compatibles avec une vie autonome et quasi-nouvelle ;
b) à l’opposé, évolution justifiant le terme de démence précoce excluant toute autonomie
du fait de l’importance des signes de désorganisation, de l’autisme* et des
hallucinations. Ces patients ont besoin d’une aide institutionnelle : hélas, le nombre de
places disponibles en France aujourd’hui est très largement insuffisant ; la fermeture de
lits d’hôpitaux psychiatriques sans création de structures alternatives crée une situation
anormalement douloureuse pour bien des patients et leurs familles ;
c) enfin, évolution continue avec des périodes d’accalmie ou au contraire d’accentuation
de la symptomatologie, même si globalement la maladie a tendance à s’apaiser au fil du
temps. Ces patients accèdent souvent à une autonomie partielle.
* Autisme : repli sur soi se traduisant par une perte des interactions émotionnelles, affectives ou
intellectuelles avec l'environnement.
-I- Examens paracliniques
Il n’existe (hélas) aucun examen paraclinique capable de valider ou d’invalider le
diagnostic de trouble schizophrénique.
Cependant, certaines anomalies peuvent soit aider au diagnostic, soit participer à
l’évaluation pronostique. Certains de ces examens restent aujourd’hui du domaine de la
recherche.
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-J- Facteurs prédisposants
 Le taux de schizophrénie est plus élevé dans la parenté au 1er degré d’un patient
schizophrène que dans la population générale (5 à 8 % versus 1 %).
 La prévalence vie-entière de la schizophrénie est de :
40 à 50 % chez les jumeaux monozygotes d’un patient atteint de schizophrénie,
40 % chez les enfants dont les deux parents sont atteints de schizophrénie,
5 à 8 % dans la parenté de premier degré (fratrie, enfants),
4 % dans la parenté du deuxième degré (oncles, tantes, cousins, neveux, nièces).
 Il existe donc bien un facteur génétique. Cependant, celui-ci n’est pas suffisant puisque
chez les jumeaux monozygotes qui ont strictement le même équipement génétique le taux
de concordance n’est pas de 100 % mais de 40 à 50 %.
-K- Facteurs précipitants
Les facteurs environnementaux peuvent jouer le rôle de facteurs précipitants lorsqu’ils
sollicitent les capacités d’adaptation au-delà des possibilités du sujet. On estime que ces
facteurs comptent pour 40 à 60 % dans le déclenchement du trouble.
Certaines substances sont dites psychotogènes en raison de leur capacité à déclencher
des symptômes psychotiques :
amphétamines, LSD, cocaïne… De nos
jours, la consommation de cannabis est
un évident facteur précipitant de
schizophrénie : 40 % des sujets atteints
de schizophrénie ont consommé et abusé
de cannabis. Le cannabis s’avère être un
facteur précipitant pour les sujets
vulnérables.
L’isolement social et affectif est un autre facteur précipitant, ce qui peut surprendre en
regard de la propension au retrait autistique de ces patients.
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-L- Les traitements
 Les Neuroleptiques
C’est en 1952 à l’hôpital Sainte-Anne à Paris que J. Delay et P. Deniker démontrèrent
l’efficacité de la chlorpromazine sur les symptômes schizophréniques.
Une nouvelle classe de médicaments appelés neuroleptiques allait naître.
On distingue :
les neuroleptiques les plus antihallucinatoires (halopéridol, amisulpride) ;
les neuroleptiques les plus sédatifs (chlorpromazine, loxapine, cyamémazine) ;
les neuroleptiques les plus desinhibiteurs (amisulpride).
Tous ces médicaments ont en commun la capacité d’induire des signes de maladie de
Parkinson (raideur, tremblements) du fait de leur action antidopaminergique.
 Les Neuroleptiques atypiques
A la fin des années 80 on a redécouvert les propriétés thérapeutiques d’un vieux
médicament neuroleptique, la clozapine, capable d’améliorer des schizophrénies
résistantes aux autres médicaments. A la suite, une nouvelle catégorie de médicaments
a vu le jour : les neuroletptiques atypiques (dits atypiques parce que peu ou pas
capables de provoquer des signes de maladie de Parkinson) ou nouveaux
antipsychotiques. Ces médicaments sont : olanzapine, rispéridine, sertindole,
aripiprazole.
Ces médicaments constituent un progrès puisque :
ils agissent mieux sur l’ensemble des symptômes de schizophrénie ;
ils sont mieux tolérés sur le plan neurologique en n’induisant pas de raideur, pas de
tremblements. (traités par des anti-parkingsoniens)
 Traitements psychologiques
Psychothérapie de soutien et d’accompagnement
La psychothérapie de soutien et d’accompagnement, évidemment nécessaire, est basée
sur une relation de confiance (parfois peu évidente pour un patient vivant avec un
sentiment d’hostilité). Elle repose plus facilement sur une équipe qu’une personne
unique. D’où la plus grande fréquence de prise en charge de tels patients par un suivi
psychiatrique où travaillent ensemble médecins, psychologues, infirmiers, travailleurs
sociaux…
Cette prise en charge permet ainsi d’aider à prendre certaines décisions sociales
auxquelles ces patients sont confrontés avec difficulté : vivre seul, en famille ou en
foyer ? Maintenir ou distancier une relation ? faire un projet social ou le différer ?
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Psychothérapies d’inspiration analytique

Différentes stratégies peuvent être mises en place pour aborder la schizophrénie sous
un angle analytique : groupes thérapeutiques, psychodrame, psychothérapie
individuelle.
Certains schizophrènes tirent avantage de telles stratégies. Ceci en raison d’une
appétence individuelle pour ce type de démarche et d’une vocation doublée d’un
savoir-faire spécifique de l’équipe en charge du patient.
Les TCC
Elles sont appliquées aux patients atteints de trouble schizophrénique et reposent sur
des techniques de rééducation cognitive et comportementale dont l’ambition est
l’amélioration des capacités d’autonomie.
 En pratique : le traitement
Précocement, au stade des signes éventuellement annonciateurs tels que anxiété,
dépression, modification notable du comportement à l’adolescence ou l’âge adulte
jeune, repli sur soi, inversion du rythme de vie :
évaluation clinique aboutissant à retenir ou écarter le diagnostic de trouble
schizophrénique ;
mise en place d’un accompagnement, y compris accompagnement psychothérapique
et aide à l’orientation scolaire, universitaire ou professionnelle.
A ce stade, l’intérêt de mettre en route un traitement antipsychotique n’est pas
démontré.
Il faut cependant savoir qu’en moyenne le retard au diagnostic et à la mise en route
d’une chimiothérapie est de 3 à 5 ans, ce qui n’aide pas le pronostic.
Lorsque le diagnostic est posé, c’est-à-dire à l’étape du premier épisode psychotique
avéré :
la chimiothérapie antipsychotique est mise en route, ses effets étant évalués : après 10
à 15 jours pour l’angoisse, 6 semaines pour les hallucinations et la désorganisation, 3
mois pour le délire et l’autisme ;
en cas d’échec de la chimiothérapie on discute soit une autre médication
antipsychotique qui pourra être efficace, soit un traitement par
électroconvulsivothérapie (12 à 15 séances) ;
maintien d’une chimiothérapie antipsychotique pendant 1 à 3 ans minimum ;
définition des modalités psychothérapiques et sociales susceptibles d’aider.
En cas de nouvelle phase processuelle, stratégie identique à celle qui avait été mise
en place pour un premier épisode.
En dehors des phases processuelles se pose la question du choix des traitements les
plus stimulants et préventifs d’une éventuelle rechute : psycho et sociothérapie avec
ajustement des choix et posologies de médicament.
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Certains neuroleptiques et antipsychotiques sont disponibles en forme dite retard : 1
à 2 injections intra-musculaires par mois sont équivalentes à une prise quotidienne per
os. Ceci peut faciliter la gestion du traitement de patients ambivalents dans leur
adhésion aux soins.
A retenir :
les troubles schizophréniques nécessitent des soins prolongés sur plusieurs années ;
une cicatrice fréquente est la persistance d’une ambivalence face aux soins : à
l’extrême, ceci peut être une cause de non stabilité pendant plusieurs années, le patient
interrompant son traitement avec une rechute dans les 3 mois qui suivent (les
médicaments neuroleptiques et antipsychotiques continuent à produire leur effet
durant plusieurs semaines après l’arrêt de la prise).
 Les stratégies thérapeutiques

Aménager les conditions de vie
Le but est d’éviter une désocialisation en aidant au maintien d’une activité ou à
la réinsertion sociale. Différentes structures existent pour aider ceux qui n’ont pas
assez de capacités pour s’adapter au milieu ordinaire : une hospitalisation de jour,
des clubs thérapeutiques, des ateliers protégés...
Si besoin, il faut mettre en place les conditions :
de logement : aide au logement, lieu de vie, appartement thérapeutique, foyer;
de travail : reclassement professionnel, emploi protégé ou à mi-temps au sein
d’une entreprise, statut de travailleur handicapé, centre d’aide par le travail (CAT);
financières : allocation adulte handicapé ou non spécifique, mesures de protection
des biens (sauvegarde de justice à court terme puis tutelle ou curatelle).

Les traitements médicamenteux
La chimiothérapie repose sur les médicaments neuroleptiques classiques ou
antipsychotiques nouveaux encore appelés neuroleptiques atypiques.
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Les formes débutantes de schizophrénie sont souvent prises en charge en milieu
hospitalier.
Le traitement de première intention repose sur les neuroleptiques atypiques
(plutôt que les neuroleptiques classiques) en raison d’une efficacité similaire et
d’une meilleure tolérance.
Quelques exemples :
rispéridone de 4 à 12 mg/j
olanzapine de 5 à 20 mg/j
amisulpride de 50 à 1200 mg/j
aripiprazole de 15 à 30 mg/j
La posologie est progressivement augmentée jusqu’à l’obtention de la dose
efficace.
Pour juger de l’efficacité du traitement, un délai de 6 à 8 semaines est
nécessaire concernant les symptômes positifs (hallucination, délire, angoisse,
agitation) et de trois mois pour les symptômes négatifs (autisme, émoussement
affectif, indifférence émotionnelle, apragmatisme).
Le traitement au long cours est maintenu à dose minimale efficace (obtenue
après éventuelle diminution progressive du traitement initial) de manière
ambulatoire.
Un traitement neuroleptique retard (injection intramusculaire toutes les 2 à 4
semaines) peut se discuter afin d’assurer une meilleure observance du traitement.
En effet, certains neuroleptiques classiques (halopéridol, pipotiazine) ou
atypiques (rispéridone) offrent cette possibilité.
En cas de schizophrénie résistante (absence de réponse à au moins deux
séquences de traitements appartenant à deux classes chimiques différentes,
administrées à posologie efficace sur au moins 6 semaines), on utilise de la
clozapine entre 200 et 600 mg/j. Une surveillance hématologique stricte est
nécessaire en raison de la toxicité hématologique de ce produit.
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