LEUCEMIE LYMPHOIDE CHRONIQUE A.Madani Service d’hématologie et Oncologie Pédiatrique Hôpital 20 aout 1953 I/ INTRODUCTION - DEFINITION La leucémie lymphoïde chronique (LLC) est une hémopathie maligne lymphoïde B caractérisée par une prolifération monoclonale de cellules lymphocytaires de phénotype B d'aspect cytologique mature et dont les fonctions sont déficientes. Elle a été individualisée par Ehrlich en 1845 au sein des leucémies chroniques. Appelée autrefois "lymphadénose chronique" "Lymphomatose" ou "Lymphose", elle suscite actuellement un regain d'attention grâce aux progrès de l'immunologie qui ont permis de mieux la définir et à la meilleure appréciation des facteurs pronostiques qui a permis un traitement adapté ainsi que la découverte de nouveaux agents thérapeutiques. Nous envisagerons l'étude des aspects épidémiologiques, étiopathogénique et physiopathologiques de la LLC avant d'aborder l'étude clinique et paraclinique qui permet d'établir les critères du diagnostic positif ainsi que les éléments pronostiques. Nous finirons par le chapitre du traitement avec ses indications et les éléments de surveillance. II/ EPIDEMIOLOGIE La LLC est la plus fréquente des leucémies chez l'adulte. Elle représente 30% de toutes les leucémies de l'adulte. Cette fréquence est variable selon les régions. Elle est plus basse en Asie avec un taux de 2.5% au Japon et en chine. Par contre elle est de 38% au Danemark. Le sex-ratio est de 2. L'âge moyen de survenue est aux alentours de 60 ans. La LLC est exceptionnelle avant 30 ans et son incidence augmente avec l'âge atteignant 30.4 cas/100.000 habitants à 80 ans. IV/ ETIOPATHOGENIE La cause de survenue de la LLC est inconnue. Des facteurs génétiques ont été incriminés vu l'incidence élevée dans la fratrie d'un patient. Un risque élevé de LLC a été rapporté en cas d'exposition aux pesticides. Il a été prouvé l'absence de relation entre la LLC et l'exposition aux radiations. La relation entre LLC et viroses, contrairement à d'autres syndromes lymphoprolifératifs reste très spéculative. V/ PHYSIOPATHOLOGIE 1/ PRECURSEUR TUMORAL Les Lc de la LLC se développent à partir d'une sous population de Lc B; ce sont les Lc B CD5 +. Ils ont d'abord été retrouvés au niveau de la bordure du centre germinatif du ganglion et dans la rate. Ils représentent 15% des Lc du sang normal. Ce sont des Lc porteurs d'un marqueur T (CD5). La prolifération tumorale passe par plusieurs étapes: - Une expansion polyclonale - puis une transformation en prolifération monoclonale induite par différents mutagènes - enfin, une accumulation de Lc B CD5+ tumoraux. 2/ MONOCLONALITE La nature clonale de la prolifération a été prouvée par l'expression à la surface des cellules d'une seule chaîne légère d'immunoglobuline kappa ou lambda et d'une seule chaîne lourde portant le même déterminant idiotypique et la même spécificité antigénique que la chaîne légère.. L'étude des réarrangements des gènes des Ig a confirmé la nature clonale de la prolifération leucémique. 3/ ONCOGENES ET GENES SUPPRESSEURS DE TUMEUR L'expression des proto-oncogénes bcl1 (associé au LNH de grade intermédiaire et la Leucémie à ProLymphocytes) , bcl2 ( associé au LNH folliculaire) et bcl3 sont rarement exprimés dans la LLC. Aucune anomalie des gènes suppresseurs de tumeur n'a été associée à la LLC. 4/ CYTOGENETIQUE Les études cytogénétiques de la LLC sont difficiles à réaliser par les techniques de routine car l'induction des divisions cellulaires est difficiles. Des anomalies chromosomiques ont été retrouvées chez 50% des patients porteurs de LLC. La trisomie 12 reste l'anomalie la plus fréquente. Les anomalies de structure porte essentiellement sur le bras long des chromosomes 11, 13 et 14 . 5/ ANOMALIES DU SYSTEME IMMUNITAIRE La LLC a longtemps été décrite comme une accumulation de Lc immuno-incompétents. On observe chez les patients porteurs de LLC une hypogammaglobulinémie dans 10 à 60% des cas responsables de complications infectieuses sévères ou répétées. La pathogénie de cette hypogammaglobulinémie est incertaine. Une Ig mononclonale de type IgM le plus souvent est retrouvée dans environ 5% des cas de LLC. VI/ ETUDE CLINIQUE 1/ CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE Les circonstances de découverte sont très variables; parfois c'est le patient qui découvre lui même une adénopathie, plus rarement, la LLC se manifeste par des complications hématologiques ou infectieuses. En fait, c'est le plus souvent au cours d'un bilan systématique qu'est notée une hyperleucocytose sanguine chez un sujet apparemment en bonne santé. a/ Manifestations hématologiques Le trouble hématologique le plus souvent inaugural de la LLC est représenté par l'anémie hémolytique autoimmune qui se manifeste par une anémie d'installation aiguë avec ictère d'allure non cholestatique. L'anémie par envahissement médullaire est d'installation trop lente pour être inaugurale. b/ Manifestations infectieuses Ce sont souvent des infections virales répétées ou graves qui amènent à réaliser un bilan qui montre une hyperleucocytose. c/ Etat général L'état général est le plus souvent conservé, permettant au patient de mener une vie normale. d/ Adénopathies Parfois, le patient consulte lui même pour une adénopathie le plus souvent cervicale d'évolution lente et dont il ne s'est pas soucier au début. 2/SIGNES PHYSIQUES L'examen clinique peut être strictement normal ou retrouver: a/ Adénopathies Les adénopathies de la LLC sont traditionnellement décrite comme bilatérales, symétriques, indolores et mobiles par rapport aux plans superficiel et profond. Leur taille n'excède pas en général 4 cm. Elles siègent en général au niveau cervical mais peuvent être diffuses au niveau de toutes les aires ganglionnaires. Le nombre d'aires ganglionnaire atteint doit être minutieusement marqué car il est pris en compte dans la classification pronostique. b/ Splénomégalie Elle peut être associée ou non aux adénopathies. Elle est généralement de taille modérée. Elle est considérée comme une aire ganglionnaire dans la classification. c/ Hépatomégalie Elle est rare, considérée comme une aire ganglionnaire dans la classification. d) Signes hématologiques Des signes cliniques d'anémie peuvent être retrouvés. L'anémie peut être due à l'envahissement médullaire, à l'hypersplénisme ou à une anémie hémolytique auto-immune se manifestant alors par une anémie d'installation aiguë avec ictère. La LLC peut aussi se manifester, mais rarement par un tableau hémorragique rarement dû à la thrombopénie par infiltration médullaire mais à une thrombopénie d'origine auto-immune. e/ Etat général L'état général des patients atteints de LLC est souvent conservé avec un indice de performance à 0 ou 1 AU TOTAL: On se retrouve le plus souvent devant un homme de la soixantaine à l'état général conservé qui consulte pour des adénopathies à caractères particuliers ou est adressé pour une hyperleucocytose retrouvée sur un bilan systématique. VII/ ETUDE PARACLINIQUE A/ EXAMENS PORTANT LE DIAGNOSTIC POSITIF DE LLC Elle permet de poser le diagnostic de LLC en réunissant des critères minimum actuellement admis pour parler de LLC. 1/ HEMOGRAMME Examen essentiel dans le cheminement du diagnostic de LLC. Il s'impose devant les signes cliniques ( ADP, SMG, Sd anémique, Sd hémorragique). L'hémogramme peut montrer des anomalies portant sur la lignée lymphoïde ou sur toutes les lignées. Il montre une hyperleucocytose 50000/mm3 au dépend des LC a/ Lignée lymphoïde Il existe de façon constante une hyperlymphocytose sanguine. Classiquement 50.000 Lc/mm3. Parfois le taux de Lc dans le sang est très augmenté dépassant les 100.000/mm3 ou au contraire, l'élévation du taux n'est pas très importante variant entre 5 et 10.000/mm3 nécessitant alors la preuve de la monoclonalité de la prolifération lymphocytaire (cf infra critères diagnostiques). b/ Polynucléaires neutrophiles le chiffres des PNN est en général normal. Une neutropénie peut être observée en phase terminale de la maladie ou être secondaire à une chimiothérapie. c/ Lignée érythrocytaire Le taux d'Hb peut être normal avec des constantes hématimétriques normales. On peut retrouver une anémie qui peut être due à l'infiltration médullaire et alors normochrome normocytaire arégénerative ou secondaire à une AHAI et alors normo ou légèrement macrocytaire régénérative. Le taux d'Hb est très important à préciser ainsi que le mécanisme d'une éventuelle anémie car il rentre dans la classification pronostique. ( Hb < ou > 10g/dl) d/ Lignée plaquettaire Comme pour le taux d'Hb, le taux de plaquettes peut être normal, ou diminué et dans ce dernier cas la thrombopénie est soit due à l'infiltration médullaire ou un mécanisme auto-immun. le chiffre de plaquettes fait également partie de la classification pronostique (Plaq < ou > 100.000/mm3) 2/ FROTTIS SANGUIN C'est un examen fondamental. Il permet de: - Préciser la morphologie des Lc circulants et ainsi faire la différence sur la plan cytologique avec d'autres syndrome lymphoprolifératif - De classer la LLC selon la classification FAB Les Lc de la LLC apparaissent classiquement très proche des Lc normaux formant une prolifération dite "monotone". Ce sont de petits Lc, matures. Souvent, sont notées quelques atypies cellulaires à type de chromatine qui est moins dense ou au contraire plus sombre disposée en mottes plus proche que celle du plasmocyte, le cytoplasme peut être très restreint donnant l'impression de noyaux nus ou "Ombre de Gümprecht". On peut également retrouver au sein de cette prolifération, des cellules plus atypiques, de taille plus importante à chromatine fine, nucléolée, un cytoplasme plus abondant, basophile, contenant des grains azurophiles. Peuvent exister également des cellules prolymphocytaires. Les pourcentages des Lc typiques, proLc et cellules atypiques est à la base de la classification cytologique de la LLC établie lors du "International Workshop on CLL" (IW on CLL) en 1989: - LLC typique: plus de 90% de Lc typiques - LLC mixte ou LLC/LPL: Prolc entre 11% et 54% - LLC atypique: Cellules hétérogènes mais proLc<10% 3/ MYELOGRAMME Les anomalies observées au niveau de la NFS vont imposer la pratique d'une exploration cytologique de la MO. Le pourcentage de l'infiltration médullaire par les Lc est un critère diagnostique de la LLC. Le myélogramme montre une infiltration médullaire par des Lc représentant plus de 30% des cellules nucléées au sein d'une moelle riche. L'aspect des Lc médullaire est identique à celui du sang périphérique. 4/ IMMUNOPHENOTYPE L'étude immunophénotypique est essentielle pour porter le diagnostic de LLC B Les Lc de la LLC sont positifs à: - Marqueurs B: CD19, CD20, CD21, CD24 - HLA DR - CD5 Ils portent des Ig de surface Ils sont négatifs à: CD10, FMC7 5/MONOCLONALITE La preuve de la monoclonalité de la prolifération est apportée par l'expression à la surface cellulaire d'une seule chaîne légère d'Ig. Cette étude est réservée aux cas où les éléments de diagnostic morphologique et immunophénotypique ne permettent pas de conclure. 6/ CRITERES DE DIAGNOSTIC POSITIF Les critères de diagnostic positif rapportés par le IW on CLL sont: - Lymphocytose sanguine >5000/mm3 faite de petits Lc matures persistants plus de 4 mois sans aucune autre cause - Démonstration de la clonalité de la prolifération. - Infiltration médullaire par ces mêmes Lc > 30% des cellules nucléés. Toutefois, la démonstration de la clonalité de la prolifération n'est pas obligatoire quand le taux de Lc est < 10 ou 15.000 et persistant et avec un phénotype typique. B/ AUTRES EXAMENS 1/ BIOPSIE OSTEO-MEDULLAIRE La BOM n'est pas nécessaire au diagnostic, mais elle garde une valeur pronostique en fonction du type de l'infiltration médullaire. Quatre différents types d'infiltration médullaire ont été décrits: nodulaire, interstitielle, mixte nodulaire et interstitielle et diffuse. La forme diffuse constitue un facteur de mauvais pronostic. Dans les cas d'infiltration nodulaire, la BOM peut avoir un apport diagnostique car le myélogramme peut ne pas être probant. 2/ BIOPSIE GANGLIONNAIRE La biopsie ganglionnaire ne trouve son indication que dans les cas où il existe un problème de diagnostic différentiel avec des LNH en phase leucémique ou pour documenter une transformation de la LLC. 3/TEST DE COOMBS DIRECT Indiqué quand on suspecte une AHAI associée. 4/ IMMUNOGLOBULINES SERIQUES Une diminution des gammaglobulines est observée dans 10 à 60% des cas. Elle serait due à un dysfonctionnement des Lc B non clonales résiduels. Une Ig monoclonale, le plus souvent de type IgM, est retrouvée lors de la LLC dans 5 à 50% des cas. 5/ BILAN PRETHERAPEUTIQUE Il comporte une évaluation des fonctions rénale, hépatique et cardio-vasculaires nécessaires chez des patients âgés et souvent tarés. Un groupage ABO/Rh est également indiqué pour d'éventuels transfusions de CG ou UP Une radiographie pulmonaire est demandée à la recherche de foyers infectieux. Au terme de l'examen clinique et des examens paracliniques qui ont permis de poser le diagnostic positif de LLC, le patient est classé selon la classification de Binet ou celle de Rai qui ont la même valeur pronostique. Elles sont basées sur le nombre de sites ganglionnaire atteint (La splénomégalie étant considérée comme un site ganglionnaire dans la classification de Binet), le taux d'Hb et le taux de plaquettes. Stade 0 Lymphocytose sanguine et médullaire isolées sans adénopathies ni splénomégalie stade I Stade 0 ( hyperleucocytose) et adénopathies sans splénomégalie ni hépatomégalie Stade II Stade 0 et splénomégalie et/ou adénopathies et/ou hépatomégalie Stade III Stade 0 et anémie (Hb<11g/dl) qu'il y ait ou non adénopathies ou splénomégalie ou hépatomégalie Stade IV Stade 0 et thrombopénie (Plaq<100.000/mm3 ) qu'il y ait ou non adénopathies ou splénomégalie ou hépatomégalie Classification de RAI Stade A Hb10g/dl et Plaq 100.000/mm3 2 aires ganglionnaires palpables au maximum Stade B Hb10g/dl et Plaq 100.000/mm3 3 aires ganglionnaires palpables ou plus Stade C Hb< 10 g/dl ou Plaq< 100.000/mm3 Classification de BINET VIII/ DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL Le diagnostic différentiel à l'étape clinique est vite résolu par le réalisation d'un hémogramme qui montre dans le cas d'une LLC une hyperlymphocytose. Le problème se pose pour les hyperlymphocytoses polyclonales bénignes dites réactionnelles et les autres syndromes lymphoprolifératifs en phase leucémique. 1/LYMPHOCYTOSE POLYCLONALE Une hyperlymphocytose peut être retrouvée lors des infections virales (MNI, CMV), la toxoplasmose et certaines infections bactériennes comme la coqueluche. La lymphocytose est en générale modérée à 30 à 40.000/mm3 avec des Lc atypiques. Sur le frottis, les Lc sont de taille différentes, certains ont un cytoplasme hyperbasophile et on ne retrouve pas l'aspect monotone du frottis. L'étude immunophénotypique montre une prolifération plutôt de type T. Il n'existe pas d'infiltration médullaire. 2/ LYMPHOCYTOSES MONOCLONALES B Elles sont constituées par les autres proliférations lymphoïdes matures et les formes leucémiques des LNH. Elles peuvent être distinguées de la LLC par des particularités cliniques, par la cytologie et l'étude immunophénotypique. a/ Leucémie prolymphocytaire Elle est caracterisée par une splénomégalie et l'absence d'adénopathies. La lymphocytose est très importante > 100.000/mm3. Le prolymphocyte est de taille plus grande, un noyau rond avec un volumineux nucléole, une chromatine modérément mottée. le rapport nucléo-cytoplasmique est plus bas que dans le Lc de la LLC. Les prolymphocytes constituent la majorité des cellules lymphoïdes du sang. Les marqueurs immunologiques sont également différents avec un CD5 négatif et la FMC7 positif b/ Leucémie à tricholeucocytes Elle se manifeste par un syndrome d'insuffisance médullaire avec une importante splénomégalie comme seul Sd tumoral. L'hémogramme montre le plus souvent une pancytopénie avec monocytopénie. Dans de rares cas de formes hyperleucocytaires avec tricholeucocytes circulants, elle peut être confondue avec la LLC. L'étude cytologique et cyto-chimique permet de faire le diagnostic différentiel. Le tricholeucocyte (Ou cellule chevelue = Hairy Cell) est une cellule de taille plus importante que le Lc de la LLC, le noyau parfois clivé est à chromatine modérément mottée, sans nucléole, le cytoplasme est pâle et plus étendu. La membrane plasmique présente des expansions chevelues sur toute la circonférence. La réaction des phosphatases acides tartrate résistantes est positive. L'immunophénotype montre une positivité au CD25, CD11c, FMC7 et une négativité au CD5. c/ Lymphome splénique à lymphocytes villeux Il associe une splénomégalie volumineuse à une hyperlymphocytose modérée. Les cellules lymphoïdes circulantes sont caractérisées par un cytoplasme portant de petites villosités localisées à un pôle de la cellule. L'étude immunophénotypique montre une positivité du FMC7. Le CD25 et CD5 sont négatifs. d/Lymphomes folliculaires en phase leucémique Ils se manifestent par des adénopathies diffuses. La population lymphoïde circulante est volontiers pléomorphe avec des cellules à noyau souvent clivé. La biopsie ganglionnaire dans ce cas montre une architecture tumoral folliculaire. Le DC10 est positif. Le tableau ci-après résume les phénotypes des syndromes lymphoprolifératifs B posant un problème de diagnostic différentiel avec la LLC SmIg CD5 CD20 CD10 CD25 CD23 FMC7 CD11c LLC ++ + + - +/- + +/- +/- LPL ++ +/- + +/- - +/- + - HCL ++ - + - + - + + SLVL ++ +/- + +/- +/- +/- + +/- LNH folliculaire ++ +/- + +/- - +/- + - 3/PROLIFERATIONS MONOCLONALES T Regroupent la LPL T, l'ATLL, la Leucémie à LGL et le Sd de Sézary. L'étude cytologique et immunophénotypique porte le diagnostic. IX/ EVOLUTION L'évolution de la LLC est très variable. Un certain nombre de patients reste stable pendant de très nombreuse années et peuvent mener une vie normale. Les complications les plus fréquemment rencontrées sont les infections, les cytopénies, les transformations cytologiques et histologiques et les tumeurs secondaires. 1/ LES INFECTIONS Elles représentent la cause majeurs de morbidité et de mortalité lors de la LLC. Elles touchent plus de 80% des patients et sont responsables de 60% des décès. Elles sont surtout d'origine bactérienne, affectent surtout l'appareil respiratoire, l'appareil urinaire et la peau. Les infections virales sont surtout dues à l'herpès simplex ou le zona. La susceptibilité aux infections lors de la LLC est due essentiellement à une hypogammaglobulinémie et à un déficit de l'immunité humorale mais aussi cellulaire ou encore à la neutropénie secondaire à la chimiothérapie. 2/ CYTOPENIES Il s'agit surtout de l'anémie et de la thrombopénie. La neutropénie est moins fréquente. Elles peuvent être dues à: a/ Cytopénies d'origine auto-immune. Elles peuvent être inaugurales ou survenir au cours de l'évolution de la LLC. La neutropénie d'origine auto-immune est très rare. b/ Cytopénies par hypersplénisme Elles se voit en cas de SMG importante c/ Cytopénies par insuffisance de production médullaire Se voient lors des stades avancés de la maladie. 3/ TRANSFORMATION Une évolution vers des formes plus agressives, en particulier le développement d'un LNH de haut grade (Sd de Richter) ou une LPL ou rarement en LAL ou MM ont été décrite. Le Sd de Richter survient dans 3 à 10% des cas. Il doit être évoqué cliniquement devant des adénopathies qui deviennent très volumineuses et compressives. Le diagnostic est posé par la biopsie ganglionnaire. Il s'agit le plus souvent de LNH à grandes cellules de type immunoblastique. Le pronostic est alors très réservé. 4/CANCERS SECONDAIRES Le risque de cancer secondaire est jusqu'à 8 fois plus important que dans une population témoin. Son incidence est de 6 à 15%. Ce' sont essentiellement des cancers de la peau, du poumon et du colon. La chimiothérapie peut également être responsable de développement de néos secondaires. X/ FACTEURS PRONOSTIQUES 1/ CLASSIFICATION ANATOMO-CLINIQUES La valeur pronostique des classifications de Binet et de Rai a été confirmé par des études rétrospectives puis prospectives. Elles sont actuellement à la base des décisions thérapeutiques. La survie médiane selon le stade passe de 14 ans pour le stade A à 5 ans pour le stade B et à 2.5 ans pour la stade C. 2/ASPECT DE LA BOM Les infiltrations médullaires diffuses sont considérées comme de mauvais pronostique comparées aux infiltrations non diffuses. La survie médiane passant de 14 ans à 4 ans. 3/ ANOMALIES CYTOGENETIQUES Un caryotype normal confère un pronostic plus favorable que s'il existe des anomalies complexes et multiples. 4/ AUTRES FACTEURS D'autres facteurs comme le chiffre des lymphocytes ont été considérés comme facteur pronostiques mais il s'est avéré qu'il était corrélé au stade. XI/ TRAITEMENT Le traitement de la LLC n'a pas constitué pendant longtemps un pôle d'intérêt pour les équipes médicale du fait de la fréquence des formes bénignes, et de l'âge avancé des patients. La meilleure caractérisation de l'affection, tant sur le plan diagnostique que pronostique ainsi que la découverte d'agents thérapeutiques nouveaux, ont permis des études comparées et des indications mieux précisées. 1/ MOYENS THERAPEUTIQUES a/ Chimiothérapie cytotoxique - Monochimiothérapie Depuis longtemps, le Chlorambucil a constitué le seul agent utilisé dans la traitement de la LLC de façon continue ou discontinue respectivement à la dose de 0.1mg/kg/j ou 0.3 mg/kg/j x5j. Il a permis de stabiliser la maladie dans les stades A et B associé ou non aux corticoïdes. Dans les stades C, il s'est avéré insuffisant. - Polychimiothérapie Plusieurs protocoles peuvent être utilisés avec une efficacité comparable. Il associent souvent un alkylant, un poison du fuseau avec ou sans anthracycline. COP: Vincristine: Endoxan: PDN: 1mg/m2 J1 300mg/m2 40 mg/m2 J1 J1 à J7 Toutes les 3 semaines CAP: associant Endoxan, Doxorubicine et Prédnisone CHOP LLC: Vincristine: 1mg/m2 J1 Endoxan: 300mg/m2 J1 PDN: 40 mg/m2 J1 à J5 Doxorubicine: 25 mg/m2 J1 1 cure /3 sem x 6 cures puis 1 cure /3mois x 6 cures - Analogues des purines Ils constituent une avancée majeure dans la traitement des LLC réfractaires. La fludarabine qui est utilisée dans la LLC à a dose de 25mg/m2/j x5j toues les 4 semaines pendant 6 cures donne des taux de réponse de 17 à 74% avec jusqu'à 20% de réponse complète. Les principaux effets secondaires de la Fludarabine restent une myelo-suppression, un syndrome de lyse, une AHAI et une baisse des CD4 responsable d'infections opportunistes. L'utilisation de la Fludarabine en 1° intention montre un taux de RC allant de 25 à 74%. b/ Greffe de moelle osseuse Les allogreffes de moelle réalisées chez des patients jeunes réfractaires aux traitements standards ont donné des résultats encourageants. c/ Immunomodulateurs Les anticorps monoclonaux antiCD20, l'Il2, l'IFN ont été utilisés. Les résultats restent à confirmer. 2/ INDICATIONS Les indications thérapeutiques dépendent essentiellement du stade de la maladie. a/ Stade A Une abstention thérapeutique avec surveillance clinique (ADP, SMG) et biologique (NFS) est de mise et à fortiori les stades 0 de Rai. Seule la progression dans un autre stade fera discuter de démarrer le traitement. b/ Stades C le traitement consiste en une polychimiothérapie type CHOP ou CAP ou par la fludarabine. c/ Stades B Un traitement par Chlorambucil/Prédnisone peut être utilisé initialement. Certains auteurs les traitent de la même façon que la stade C avec des résultats similaires dans les 2 cas. d/ Patients réfractaires L'utilisation de la Fludarabine trouve ici son indication majeure. En cas de sujet de moins de 50 ans un traitement par greffe de moelle allogénique peut être proposé. e/ Traitement des complications - Cytopénies auto-immunes Leur traitement fera appel aux corticoïdes à fortes doses (2mg/Kg/J) pendant 4 à 6 semaines. - Complications infectieuses Elles doivent être traitées de façon énergique et rigoureuse car c'est la 1° cause de décès. Les Ig peuvent être indiquées quand existe une hypogammaglobulinémie profonde. XII/ EVOLUTION ET SURVEILLANCE Les patients atteints de LLC ont une médiane de survie qui peut aller jusqu'à 15 ans pour les stades A. Elle chute à moins de 3 ans pour les patients en stade C La surveillance des patients consiste à évaluer la réponse au traitement et à déceler une progression éventuelle. Les critères d'évaluation de la réponse au traitement ont été établis par l'IW on CLL. Ont été individualisées les RC les RP, la stabilité et l'aggravation. La RC se définit comme la disparition totale des ADP, de la SMG ou de l'HMG, une lymphocytose sanguine < 4000/mm3, des PNN>1500/mm3 et une moelle histologiquement normale. La RP correspond à la diminution de plus de 50% des anomalies initiales. XIII/ CONCLUSION La LLC est la leucémie la plus fréquente de l'adulte. Son diagnostic repose sur des arguments à la fois cliniques, cytologiques et immunophénotypiques. C'est une affection en général d'évolution très lente, parfois diagnostiquée sur un hémogramme fait systématiquement. Sa prise en charge a connue un essor ces 15 dernières années grâce à une meilleure définition diagnostique et pronostique et grâce à des indications thérapeutiques plus claires. BIBLIOGRAPHIE 1/ Faguet G. B: Chronic Lymphocytic Leukemia: An Updated Review J. Clin. Oncol:1994, 12;9: 1974 - 90 2/ Rozman C, Montserrat E: Chronic Lymphocytic Leukemia N.E.J.M: 1995, 333, 16: 1052 - 7 3/ Maloun K and al: Leucémie lymphoïde chronique EMC: Hématologie, 13013 B20, 1992 4/ d'Onofrio G, Zini G: Morphology of the Blood Publication Verduci 1998.