AK1988_15_1-2_49-62

publicité
• Ann. Kinésithér., 1988, t. 15,
©
Masson,
nO
MISE AU POINT
1-2, pp. 49-62
Paris, 1988
Stretching et préparation musculaire à l'effort
Michèle ESNAULT
Kinésithérapeute, EPS, Formatrice du Centre de Formation Continue «Bois Larris», B.P. 01, F 60260 Lamorlaye.
Introduction
La technique de l'étirement musculaire actif
est de maniabilité délicate car elle doit répondre
à des besoins spécifiques dans la phase de
préparation à l'effort, différents de ceux de la
phase qui suit l'exercice. D'autre part, elle
s'adresse à des muscles pour la plupart, constitués de plusieurs faisceaux d'orientations différentes les unes des autres, dont elle devra
toucher le maximum de fibres. Nous prendrons
pour exemple l'étirement de muscles s'attachant
totalement ou partiellement autour de l'articulation de la hanche pour illustrer l'utilisation
optimale des trois degrés de liberté de la hanche.
En aucun cas étirement et assouplissement se
confondront. L'assouplissement vise l'amplitude
maximale globale, tant dans le muscle que dans
l'articulation.
La contribution
capsulaire et
ligamentaire n'y est pas négligeable. L'assouplissement relève de la compétence de l'entraîneur.
L'étirement musculaire, plus analytique restera
localisé à un seul segment de membre et
cherchera à exclure toute tension articulaire
excessive notamment au niveau du genou, de la
hanche et du rachis. Un muscle bien entraîné
est un muscle fort et souple. Contractilité et
extensibilité sont testées dans les bilans qui
suivent une lésion musculaire tant en amplitude
passive, muscle non contracté, qu'en résistance
active, muscle contracté (fig. 1). Une préparation
musculaire efficace se devra de rendre le muscle
performant en extensibilité et en contractilité car
il faut se rappeler que la lésion musculaire
Rédigé en mars 1987.
Tirés à part: M. ESNAUL T, à J'adresse ci dessus.
survient rarement en allongement maximal mais
surtout lors de la survenue soudaine d'une
contraction maximale sur un muscle pris au
dépourvu comme c'est le cas pour le quadriceps
lors d'une sortie d'appareil, en gymnastique,
avec réception sur les deux pieds, genoux fléchis,
avec un déséquilibre imprévu du haut du corps.
L'étirement musculaire utilisé dans la préparation à l'effort ne devra jamais être réalisé à froid
mais après que l'athlète ait effectué 10 à 15 mn
de son échauffement habituel. Au mieux, les
exercices d'étirement seront réalisés juste avant
le passage à l'exercice.
,
~I'
..~@
/~\
~
~~':
..
....
.
.•.
..~...~~J
/J
FIG 1. - Le médecin du sport examine les réparationsd'accidents
musculaires à l'aide de mesures illustrées ici :
1. extensibilité des ischio-jambiers par flexion du tronc,
2. extensibilité des ischio-jambiers, genou en extension par
élévation du membre inférieur,
3. extensibilité du quadriceps, en flexion de genou,
4. extensibilité du droit antérieur en flexion de genou et
extension de hanche,
5. résistance du quadriceps à la contraction excentrique.
(Durey).
50 Ann. Kinésithér., 1988, t. 15, n° 1-2
Préparation à la mobilité musculaire
maximale
EP
c
ES
ES
FACTEURS INTRINSÈQUES DE LA MOBILITÉ
LONGITUDINALE
EP
Tous les muscles n'ont pas la même chance
d'atteindre la même extensibilité et en réalité,
c'est leur fonction qui définit leurs limites. Un
muscle de longue action (jig. 2), fusiforme, dont
les fibres musculaires sont parallèles aux fibres
tendineuses se laissera étirer sans grande résistance. Il est habitué, dans sa fonction à travailler
en contraction concentrique. Un muscle de
courte action, penné, présente des fibres musculaires implantées obliquement sur deux lames
tendineuses. Il est constitué pour travailler en
freinage ou travail négatif et aura une amplitude
d'extensibilité réduite. C'est le cas des ischiojambiers, du triceps sural. Le muscle droit antérieur présente une structure non homogène puisque sa portion supérieure est pennée et sa portion
inférieure est fusiforme. Les lésions anatomiques
FIG 2. - L'angle d'attaque des fibres musculaires sur le tendon
d'insertion détermine le classement en muscles de « longue
action» ou de « courte action ».
a. Le muscle de longue action, aux fibres fusiformes : les
tendons d'origine et d'insertion se trouvent « en série» dans le
prolongement
des fibres musculaires,
il y a possibilité de
raccourcissement important •. lors de la contraction •.
b. lorsque la fibre musculaire attaque le tendon latéralement,
la traction sur la lame tendineuse ·distale n'est pas linéaire et
le raccourcissement est moins important. Il s'agit de l'exemple
typique du muscle de courte action. (Butel)
FIG 3. - Modèle de Hill qui détaille les principales composantes
du muscle: au centre, les éléments contractiles représentés par
la fibre musculaire. De chaque côté, en ES, les éléments élastiques
séries, c'est-à-dire les tendons sur lesquels s'insèrent les fibres
musculaires •.en EP, les éléments élastiques parallèles, c'est-à-dire
les enveloppes conjonctives des muscles, des paquets de fibres et
le sarcolemme.
J10lfl"ll
r<'$$ ••••
FIG 4. - Les muscles antérieurs de cuisse d'après Poirier. Cette
figure montre l'enroulement des muscles autQur du fût fémoral
et la présence de nombreuses expansions aponévrotiques autour
du genou.
Ann. Kinésithér.,
surviennent le plus fréquemment sur sa portion
supérieure, plus fragile par constitution.
D'après le modèle mécanique de Hill qui a
l'avantage d'être clair, même s'il a le désavantage
de ne pas faire apparaître (jig. 3) la notion de
visco-élasticité musculaire, nous voyons que lorsque le tissu contractile est inactif, son extensibilité
sera limitée par la résistance des éléments élastiques parallèles (E.P.) constitués des enveloppes
conjonctives externes (aponévrose) et internes du
muscle (sarcolemme et gaines de faisceaux musculaires). L'allongement
musculaire maximal
exploitera la structure de filaments glissants. Il
ne dépassera jamais 40 à 50 % de la longueur de
repos car il sera freiné par la faible extensibilité
des éléments élastiques parallèles (4 à 9 % de leur
longueur de repos) leur fournissant un engainage
protecteur. Pour atteindre l'allongement maximal, il faudra que le muscle soit inactif, non
contracté volontairement. Ce type d'étirement
sera nommé: tension passive.
Le muscle est constitué de faisceaux à
orientation propre par rapport à l'axe longitudinal du membre. Lors de la recherche de mobilité
maximale, il faudra jouer sur le fait que la
1988, t. 15, nO 1-2
51
hanche présente trois degrés de liberté et que la
combinaison de 2 à 3 de ces degrés sera
susceptible de toucher plus particulièrement tel
ou tel faisceau.
Le quadriceps (fig. 4) présente des fibres
médianes longitudinales par le droit antérieur
et le crural, des fibres externes obliques en bas
et en dedans, spiralées autour du fémur, des
fibres internes obliques en bas et en dehors par
les vastes.
Le premier temps de l'étirement en tension
passive pour le quadriceps passe par une flexion
de genou maximale, talon-fesse, suivie d'une
recherche d'extension
de hanche maximale
(fig. 5). L'exercice se réalise dans un plan
purement sagittal et s'adresse aux fibres médianes du quadriceps, en particulier le droit
antérieur à sa partie haute. Le sujet s'astreint
à ne pas creuser les reins.
Le deuxième temps consiste à ajouter à
l'extension de hanche, une rotation interne de
hanche. Le talon est porté en dehors de la fesse.
Ce sont les fibres internes du quadriceps, le vaste
interne, qui sont étirées plus particulièrement
(fig. 6) bien que ce dernier soit monoarticulaire.
FIG 5. - Étirement du quadriceps en tensionpassive. Talon-fesse,pousser le genou en arrière sans creuser les reins,pendant 6 secondes.
FIG 6. - Étirement du vaste interne en tension passive talon-fesse, tirer le pied en dehors, hanche en rotation interne.
FIG 7. - Étirement du vaste interne et du droit antérieur ou tension passive, talon-fesse, tirer le genou en arrière puis en abduction.
FIG 8. - Étirement du vaste externe en tension passive talon-fesse, tirer le pied vers la fesse opposée, hanche en rotation externe,
chercher l'extension et l'adduction de hanche.
52
Ann. Kin ésith ér., 1988, t. 15, nO 1-2
FIG 9. - Position de départ pour étirer le quadriceps en couché dorsal, genou fléchi, pied à plat au sol, cheville tenue par la main
homo-latérale.
FIG 10. - Premier temps de l'étirement du quadriceps: lever la hanche en extension en roulant vers la gauche le genou restant
haut.
FIG 11. - Deuxième temps de l'étirement du quadriceps: abaisser le genou vers le sol, faire basculer le pied en même temps.
FIG 12. - Troisième temps de l'étirement du quadriceps: repousser le genou vers l'avant.
Le troisième temps ajoute une abduction
arrière de la hanche de manière à étirer la région
haute et interne du quadriceps (fig. 7).
Le quatrième temps placera, par un changement de prises manuelles la hanche en légère
adduction arrière et rotation externe. Le talon
est porté vers la fesse opposée (fig. 8). C'est le
vaste externe qui est ciblé ici.
L'étirement, pied libre donc en chaîne ouverte, a exploité les trois degrés de liberté de la
hanche. En chaîne fermée,;pied au sol, la hanche
sera travaillée également dans plusièurs plans
mais à aucun moment elle ne sera placée en
position d'étirement articulaire maximale, la
tension musculaire bridant les positions
extrêmes. En couché dorsal, la position de
départ de l'étirement du quadriceps sera genou
fléchi, et haut, pied au sol près de la fesse,
cheville tenue par la main homolatérale (fig. 9).
Le premier temps de l'étirement consistera à
réaliser lentement une extension de hanche, en
roulant vers le côté opposé, et en gardant le
genou haut (fig. 10).
Le deuxième temps consistera à abaisser le
genou vers le sol (fig. 11); tout en restant tourné
vers la gauche, en extension de hanche. La
hanche est portée en adduction et rotation
interne.
Le troisième temps ajoutera une poussée
longitudinale du genou dans le prolongement du
fémur (fig. 12). L'étirement sera maximal si le
sujet ajoute, enfin, une rétroversion du bassin
de façon à accentuer l'extension de hanche.
FACTEURS EXTRINSÈQUES DE LA MOBILITÉ
MUSCULAIRE
L'utilisation des trois degrés de liberté de la
hanche contribue à préparer l'environnement
musculaire constitué de tissu conjonctif de
remplissage, aréolaire, très déformable (fig. 13).
Ce dernier dans les mouvements de grande
amplitude, suit les contractions musculaires et
se trouve comprimé et déformé. De plus, le
muscle cohabite avec ses voisins et doit pouvoir
être légèrement mobile par rapport à eux, autour
de l'axe osseux. Son aponévrose d'enveloppe lui
fournit un élément de lubrification transversale,
activée par les étirements utilisant abductionadduction et rotations axiales. Ce système
profond de glissement peut-être altéré lors de
lésions musculaires intersticielles (fig. 14). L'hématone envahit les espaces intermusculaires et
ensuite la fonction de la cuisse est perturbée
même si les fibres musculaires cicatrisées sont
susceptibles d'assurer une mobilité longitudinale
satisfaisante.
L'étirement avec trois composantes articulaires de la hanche exploite la structure
conjonctive collagène tridimensionnelle des élé-
Ann.
Kin ésithér. ,
1988,
t.
15,
nO
1-2 53
ments élastiques parallèles du muscle, ainsi
constitué pour subir des contraintes p1uridirectionnelles (fig. 15). A un moindre degré est
mise en tension l'aponévrose d'enveloppe du
muscle, formé de deux à plusieurs feuillets
d'orientation collagène différente de manière à
subir les déformations venues de l'intérieur lors
des contractions
et étirements
musculaires
(fig. 16).
RESPECT DE LA VASCULARISATION
MUSCULAIRE
FIG 13. - Les espaces de glissement profonds d'après Testut et
Jacob. Lorsque des musc/es sont synergiques, ils sont séparés par une
épaisseur réduite de tissu intersticiel, lorsqu'il s'agit de musc/es
antagonistes, la loge entière est séparée de la voisine par une forte
épaisseur de tissu intersticiel très lâche contenant de la graisse.
A chacune des fibres musculaires est attribué
un réseau capillaire longitudinal circulant à la
surface du sarco1emme puis pénétrant en profondeur grâce à des ramifications transversales
(fig. 17). Cette densité vasculaire nous incite à
respecter le flux sanguin en excluant les étirements prolongés. Sachant, que tout étirement
comprime le réseau, une durée de 6 secondes
nous semble répondre aux impératifs vasculaires
tout en atteignant la déformabilité recherchée
dans le tissu conjonctif puisque Sven A. Së1veborn affirme qu'il faut 6 secondes au tissu
conjonctif pour atteindre sa longueur maximale.
Noyaux
des fibroblastes
Fibre collagène (à disposition oblique
par rapport au plan antérieur)
FIG. 14
FIG. 16
FIG. 15
FIG 14. - Lors de la rupture d'un vaisseau, suite à un incident sportif, le sang a tendance à envahir les cloisons inter-musculaires,
gènant ainsi la mobilité transversale des musc/es d'une même loge (Durey).
FIG 15. - Tissu conjonctif serré, non orienté, constituant
les gaines fasciculaires
musculaires
et tendineuses
(Warwick
et Williams).
FIG 16. - Orientation oblique defibres de collagène dans deux feuillets d'aponévrose. Cette disposition permet une résistance isotropique
à l'étirement, quelle que soit la direction de celui-ci (Maillet).
54
Ann.
Kinésithér.,
1988, t. 15, n° 1-2
cotonneux et lent, impropre à fournir un effort
de type explosif. C'est pourquoi il faudra
complémentariser la préparation en amplitude
par une préparation en puissance en ajoutant à
l'étirement une contraction isométrique maximale à la limite de l'excentrique. L'exercice sera
nommé: tension active.
Préparation musculaire à la contractilité
et à la rapidité
ApPORTS DE LA TENSION ACTIVE
FIG 17. - Vascularisation
d'une fibre musculaire
(Karpovitch).
LA TENSION PASSIVE SERA LA TECHNIQUE
EXCLUSIVE DES ÉTIREMENTS À RÉALISER
APRÈS L'EXERCICE
Que ce soit pour retrouver l'amplitude perdue
pendant l'effort ou pour soulager un muscle ou
une région douloureuse. Ici encore l'étirement
ne sera pas tenu plus de 6 secondes afin de ne
pas ischémier la musculature.
LE MUSCLE ÉTIRÉ EN TENSION PASSIVE
À SA LONGUEUR MAXIMALE N'EST PAS PRÊT
À L'EFFORT
Un muscle étiré et contracté volontairement
(fig. 18) est beaucoup mieux perçu qu'en tension
passive. Mieux perçu, il sera mieux utilisé. La
boucle sensori-motrice est parfaiteme~t préparée
à l'exercice de coordination.
La combinaison étirement-contraction développe une chaleur interne diminuant la viscoélasticité musculaire donc susceptible d'augmenter la vitesse de la contraction.
Ajouter à l'étirement une contraction isométrique, permet d'entraîner une tension intramusculaire maximale susceptible de mettre à l'abri
des accidents. La tension sera maximale sur les
éléments élastiques séries (tendons) (fig. 19) et
La recherche d'extensibilité maximale permettra des mouvements amples et aisés puisque
agonistes et antagonistes travailleront sans rencontrer de résistance réciproque. Mais un muscle
étiré en tension passive est un muscle froid,
Fibre musculaire
FIG 18. - Le muscle est composé à la fois de tissu contractile
et extensible (fibres musculaires) et de tissu non contractile
inextensible (cloisons conjonctives périmysiales).
Lors de la contraction, le périmysium est détendu (en a), il est
mis en tension pendant l'allongement (en b) (Wirhed).
FIG 19. - Effet des différents régimes musculaires sur les
éléments du modèle mécanique de Hill :
à gauche en position de repos, la tension est faible dans les
éléments élastiques en série et en parallèle car l'élément
contractile est relâché;
à droite, la contraction de l'élément contractile augmente la
tension dans les éléments élastiques en série.
Ann.
la jonction myo-tendineuse
apparent ou non apparent).
(sur
le tendon
6
1
1
1
:;
~
80"
;
n
60f-
è~
40
...,
CONDITIONS
EFFICACE
D'UNE
TENSION
ACTIVE
,
1
1
1
i
1
1
1
c:
Longueur musculaire optimale
courbe
tension-longueur
d'un sarcomère(fig. 20) incite à exclure les positions
d'allongement extrême car la force de contraction isométrique y est très faible du fait de la
faible surface de contact entre les filaments
d'actine et de myosine. L'étirement développera
le maximum de tension si le muscle est en
position moyenne d'allongement. Ainsi pour le
quadriceps la tension active sera réalisée par une
extension de hanche maximale et une flexion de
genou moyenne (fig. 21).
Tronc vertical, poids du corps réparti également sur les deux pieds, le sujet repousse le
genou arrière vers le bas, sans toucher le sol.
,9
..
"
1
1
1
20".
0'
f-
à"27 ,.~
01'0
La
FIG 20. - La courbe tension-longueur
du sarcomère :
en haut, (es différentes étapes de l'allongement, le maximum
de tension se trouvant dans la plage moyenne,.
en dessous, le coefficient de recouvrement des fibres d'actine
et de myosine :
55
. 5
t
,
" '00
1988, t. 15, na 1-2
Kinésithér.,
3-0
longueur du sarcomêtre (JI)
3·651' <a+b)
"4::::::::::::::::
,/
::::::::::::::::1>
-2·20-Z·2514Ib+c)Il::::::::::::;':: ::::::::::;;>
B
D
-2'0514Ib)3
~
4
-<t::::::::::::::::~::::::::::I>
-~B5-I-90f!lb-")-
K
u ..::::::::::::::::~::::JlfD
r)-~
5
Ir:::::::::::::::
-1-65141t1::::::::::::::::
.•
-~os,.~zJ6
~
Fm. 20
en 1. un allongement maximal à la limite de·la rupture,
en 6. le raccourcissement maximal avec impaction des filaments
(Wright).
FIG 21. '- Étirement du quadriceps en tension active. La hanche arrière est en extension et le genou moyennement fléchi,. le poids
du corps est égal sur les deux pieds. Repousser le genou arrière vers le bas, sans toucher le sol, pendant 6 secondes.
FIG 22. - Étirement du vaste interne en tension active. Pied arrière en diagonale arrière, genou fléchi. Repousser le genou arrière
en bas et en dehors.
FIG 23. - Étirement du vaste externe en tension active. Pied arrière en rotation interne sur une diagonale postérieure, hanche arrière
en rotation interne. Repousser le genou arrière vers le bas.
r..;
\
56
Ann. Kin ésithér., 1988, t. 15, nO 1-2
L'équilibre est maintenu par la contractionétirement du quadriceps placé ainsi à la limite
de la contraction excentrique, fonction essentielle du quadriceps dans les réceptions sur les
deux pieds. Dans ce plan sagittal, la totalité des
fibres est étirée. Pour préparer particulièrement
les fibres internes du groupe musculaire antérieur de la cuisse, il suffit de placer le membre
inférieur en diagonale arrière, pied en rotation
externe au départ et de pousser le genous en bas
et au-dehors (fig. 22), vaste interne et adducteurs
sont étirés ensemble.
La rotation interne de hanche, pied en
diagonale arrière permet de cibler le vaste
externe et le tenseur du fascia-lata. Le sujet
repousse son genou en bas en dedans, sans
toucher le sol (fig. 23).
La préparation optimale du quadriceps passe
donc par un secteur d'étirement que l'étoile de
Tissié permet de visualiser (fig. 24). Le plan
antéro-postérieur
utilisé exclusivement est insuffisant car il ne permet d'utiliser que l'extension de hanche. La diagonale arrière autorise à
/
r'F'I~J
.,
Quadriceps
FIG 24. - Les repères de position du pied d'après l'étoile de Tissié,
en fonction du groupe musculaire que l'on désire étirer. Sont
déterminés ainsi des secteurs d'étirement pour le côté droit.
ajouter l'abduction et la rotation axiale, donc
de coller de plus près au geste sportif.
La règle des 6 secondes s'applique autant à la
tension active qu'à la tension passive:
- pour respecter la vascularisation musculaire,
- pour atteindre l'extensibilité maximale du
tissu conjonctif,
- pour maintenir une contraction isométrique
maximale utile.
La brièveté de l'étirement permet au muscle
de se préparer à l'effort sans entamer ses
réserves.
Utilité de la tension active et tension passive
dans la rééducation et en phase de
réadaptation à l'effort
Un muscle immobilisé, suite à une intervention chirurgicale sur le genou par exemple, ou
à un traumatisme portant sur un segment de
membre ou un membre en entier, se doit de
retrouver une fonction parfaite pour permettre
à l'athlète de retrouver son niveau de performance. En cela, les exercices d'étirement en
tension passive contribueront au retour à une
mobilité musculaire optimale. Ils précèderont les
exercices d'étirement en tension active à visée
remusculante, entraînant plus de contraintes au
sein des fibres musculaires et à la jonction
myotendineuse. Tension active et passive participeront par la sollicitation de la sensibilité
profonde à la reprogrammation
neuromotrice,
pilier de la rééducation et de la réadaptation du
membre inférieur du sportif blessé. La difficulté
pour le kinésithérapeute résidera essentiellement
dans l'opportunité de faire réaliser exclusivement de la tension passive puis de passer à la
tension active le jour où il l'estimera nécessaire.
Utilisation optimale des trois degrés de
liberté de la hanche pour les muscles
s'attachant sur le bassin
ÉTIREMENT
DES ADDUCTEURS
Les adducteurs représentent le type même du
groupe musculaire constitué de plusieurs faisceaux à orientation différente dans l'espace.
Ann. Kin ésithér. , 1988, t. 15, n° 1-2
57
Basmajian nous livre un modèle du grand
adducteur gauche (fig. 25) soulignant la différence entre les fibres hautes à direction horizontale et les fibres postérieures à direction verticale.
Dans les gestes sportifs et la vie de tous les jours,
chacun de ces faisceaux entre en jeu, dans un
secteur angulaire déterminé de la hanche.
L'étirement actif se devra de toucher successivement chacun de ces faisceaux, en exploitant, sans
changer de position de départ, les trois degrés
de liberté de la hanche.
Martinez souligne (fig. 26) l'action rotatrice
externe du moyen adducteur et son action de
traction sur le bassin. Nous allons inverser ces
principes liés à la contraction dynamique pour
les utiliser dans l'étirement: jouer.sur la rotation
dans la position de départ et jouer sur le bassin
dans l'étirement propre.
La position de départ est un écart frontal
moyen, genoux tendus et pieds en rotation
interne. Le premier temps de l'étirement sera une
FIG. 25
FIG. 26
FIG 25. - Disposition des fibres du grand adducteur gauche, en
fonction des insertions d'origine et de terminaison. (Basmajian).
FIG 26. - Effet de l'action des muscles abducteurs sur la position
relative du bassin et du membre inférieur.
A gauche, pieds ancrés au sol, la traction des adducteurs entraine
une rotation interne relative du bassin par rapport au fémur.
A droite, fémur libre, le moyen adducteur entraÎne une rotation
externe du fût fémural (Martinez).
FIG 27. - Premier temps de l'étirement des FIG 28. - Deuxième temps de l'étirement
adducteurs droits en tension active. Pieds en des adducteurs en tension active: ajouter
rotation interne, genoux tendus. Hancher 'à à l'abduction une flexion de hanche.
gauche pour augmenter l'abduction de hanche droite.
FIG 29. - Troisième temps de l'étirement
des adducteurs en tension active : ajouter
au deux temps précédents une rotation du
bassin controlatérale.
58 Ann. Kin ésithér., 1988, t. 15, n° 1-2
abduction relative du bassin, côté à étirer
(fig. 27). Les fibres hautes se trouvent mises en
tension.
Le deuxième temps ajoutera une flexion de
hanche, dos plat, à l'abduction (fig. 28).
Le troisième temps entraînera le bassin en
rotation controlatérale, côté opposé à l'étirement
(fig. 29).
Les deux derniers temps ciblent le faisceau
moyen du grand adducteur et le moyen adducteur.
Le troisième faisceau du grand adducteur, à
direction longitudinale sera nettement étiré par
le même exercice en rotation externe de hanche,
avec le même enchaînement
d'abduction
flexion - rotation, sans à-coup, d'une durée
globale d'environ 6 secondes (fig. 30).
Dans cet exercice l'articulation de la hanche
n'est pas mise à contribution mais la tension des
adducteurs est perçue d'une manière aiguë car
ces derniers sont en contraction pendant la durée
de l'étirement. Une perception du même ordre
est impossible lors de l'emploi des grands écarts
où articulations des hanches et des genoux se
trouvant placées en position extrême, l'étirement
est plus diffus.
ÉTIREMENT
DES ISCHIO-JAMBIERS
Adducteurs et ischio-jambiers obéissent à la
loi de la rotation axiale de McConaill (fig. 31) :
Tout muscle s'attachant
sur le côté d'une
diaphyse imprimera une rotation axiale au
segment de membre. Les adducteurs s'insérant
sur la ligne âpre, en arrière du plan des insertions
pubiennes et en arrière de l'axe mécanique du
fémur, entraînent
ce dernier lors de leur
contraction concentrique, en rotation externe
lorsque le pied est libre.
Les ischio-jambiers d'insertion commune sur
la tubérosité ischiatique se divisent en groupe
interne à terminaison tibiale interne et en muscle
externe à terminaison péronière et tibiale externe.
Ils ont ainsi une composante rotatoire sur le
fémur, lorsque le genou est vérouillé en extension.
Cette composante rotatoire devient composante
rotatoire axiale du genou lorsque celui-ci est
fléchi. Des coupes étagées de cuisse situent le
groupe musculaire ischio-jambiers par rapport au
fémur et aux autres groupes musculaires. Une
section haute au niveau de la pointe du triangle
de Scarpa fait apparaître la situation postérointerne des ischio-jambiers (fig. 32 a). Une coupe
à la partie moyenne du fémur les montre en
situation postérieure pure (fig. 32 b). Une coupe
passant à la partie supérieure de la région poplitée
les situe à la partie postérieure et externe du
membre (fig. 32 c).
Les ischio-jambiers ont donc une action dans
le plan de l'abduction-adduction
et une action
rotatrice axiale sur le fémur, genou en extension.
T
FIG 30. - Étiremelll des fibres 100igitudinales du grand adducteur. pieds en rotation externe. Enchaîner comme figures 27, 28,
29.
~
FIG 31. - La loi de rotation axiale d'après McConaill, la force F
exercée par le muscle est divisée en traction T et abduction A,
avec une composante de rotation R. Ceci est dû au fait que le
tendon distal s'insère toujours sur le côté de la diaphyse
(kfcConaill et Basmajian).
Ann. Kin ésith ér., ]988, t. ]5, nO ]-2
59
,""'"
r""tr
.",.-",
,\".,1 ••
....
.1"•.
1""
1·.:J'°lj/L
J,j'll.{.
;111.
fi ••.ml.',··
l"'m.'It"·""~~I""'"
:
'J,< •• ,;'If>f1r1'n".u.",
.\'. ;,,, !F11"ol (u[du."'f"n"
':1 dit .' •••••;.mnul,..flli_
••••
.\' . .,4,' ..",rtnH' •.•••.••.•
·
FIG. 32 a
FIG. 32 c
FIG 32. - Changement d'orientation des ischio-jambiers dans le
sens vertical :
a. Section au tiers supérieur, les ischio-jambiers {engrisés}sont
placés dans le quart interne de la partie postérieure de cuisse;
b. En section au tiers moyen, les ischio-jambiers se trouvent
dans le quart moyen de la région postérieure;
c. Dans une coupe de la partie inférieure de la cuisse, les
ischio-jambiers se trouvent dans le quart externe de la face
postérieure de la cuisse.
Les musc/es ont donc cravaté diagonalement le fût fémoral
{Poirier}.
FIG. 32 b
La position de départ place le membre
inférieur en flexion de hanche moyenne en
rotation interne, en flexion dorsale du pied qui,
tendant les jumeaux, évitera une tension trop
importante sur les coques condyliennes d'un
genou présentant un léger récurvatum.
Le premier temps de l'étirement (fig. 33)
consiste à tirer le bassin en arrière, en légère
antéversion de manière à localiser la flexion à
la hanche.
FIG 33. - Premier temps de l'un des exercices d'étirement des
ischio-jambiers en tension active. Pointe de pied relevée, tournée
en rotation interne. Tirer le bassin en arrière pour accentuer la
flexion de hanche {= antéversion du bassin}.
60
Ann. Kinésithér.,
1988, t. 15, nO 1-2
FIG 34. - Deuxième temps de l'étirement des ischio-jambiers en
tension active. Tourner le bassin vers la jambe avant. Le biceps
fémoral est particulièrement ciblé.
Le deuxième temps de l'étirement (fig. 34)
consistera à faire tourner le bassin vers la jambe
avant. Le fémur, côté étiré se trouve ainsi placé
en adduction-flexion-rotation
interne. La tension
est perçue comme maximale sur le biceps
fémoral. En fin d'étirement seulement, le sujet
pourra incliner le tronc vers le genou en gardant
le dos plat et fléchir le genou opposé.
ÉTIREMENT
DU TENSEUR DU FASCIA LATA
ET DES MUSCLES INTRINSÈQUES
DE LA
HANCHE
L'adduction utile à l'étirement des ischiojambiers sera également à rechercher, en extension de hanche, cette fois, pour mettre en tension
le deltoïde fessier (fig. 35) constitué de muscles
courts se jetant sur une bandelette fibreuse,
ilio-crurale.
Afin de ne pas entraîner de tension lombaire,
le sujet se place face à l'espalier, en chevalier
servant, avec adduction et extension de hanche
arrière (fig. 36). Il se penche en avant afin
d'obtenir
une rectitude
lombaire
pendant
l'extension-adduction
de hanche. L'extension de
hanche est accentuée c'est le tenseur du fascia
FIG 35. - La région externe de la cuisse montrant la bandelette
ilio-tibiale, (l'insertion sur la crête iliaque a été retirée car elle
recouvre le muscle moyen fessier). Les deux corps musculaires
qui se jettent sur la bandelette ilio-tibiale sont très visibles : à
gauche, lesfibres inférieures et latérales du grand fessier, à droite
le muscle tensor fascia larae. (Poirier).
lata et le petit fessier qui sont ciblés. Si la hanche
est en rectitude c'est le moyen fessier qui se
trouve étiré (fig. 37).
Lorsque le sujet passe à la position debout
devant l'espalier, avec extension adduction de
hanche, genou en extension, c'est la totalité du
système musculo-fibreux externe de la cuisse qui
se trouve mis en tension (fig. 38). Cet étirement
peut rendre service dans les douleurs de la face
externe de la cuisse, après l'exercice. Le pied
Ann. Kinésithér., 1988, t. 15, n° 1-2
FIG 36. - Étirement du tenseur du fascia-
lata en tension passive avec protection
lombaire. Chevalier servant avec extension
et adduction de hanche arrière. Tronc
penché en avant.
FIG 37. - Étirement du tenseur du
fascia-Iata en tension passive. Pousser
la hanche arrière en dehors.
61
FIG 38. - Étirement du tenseur du fascia-
lata et du moyen fessier debout. Pousser
la hanche arrière vers le dehors.
39. - Étirement
du tenseur du fascialata et du moyen fessier debout. Hanche
arrière en extensionadduction. Poids du
corps égal sur les deux
pieds. Pied arrière en
flexion dorsale sur son
bord externe.
FIG
arrière est relevé en flexion dorsale maximale
afin d'éviter des contraintes en varus au niveau
du genou (fig. 39). Le poids du corps est réparti
également dans les deux pieds dans les deux
exerCIces.
L'étirement en tension passive
contribue a soulager les
douleurs ressenties après
l'effort
Les lombalgies d'effort sont fréquentes quelle
qu'en soit leur origine. L'étirement de la nappe
aponévrotique lombo-sacrée (fig. 40)sollicite les'
mécano-récepteurs de forte densité dans le tissu
FIG 40. - Le carrefour entre la région lombaire - crêtes iliaques,
met en évidence la taille considérable de l'aponévrose lombosacrée. {Poirier}.
62 Ann. Kinésithér., 1988, t. 15, n° 1-2
du tronc, vers le haut et en avant (fig. 41).
L'espace costo-iliaque se trouve ainsi augmenté.
Le deuxième temps de l'étirement consistera
en un enroulement dorso-thoracique autour du
sternum tout en maintenant la traction sur le
coude (fig. 42). La région lombaire est restée
plate mais la région costo-iliaque se trouve
fortement étirée. Il est bien entendu utile
d'alterner l'étirement à droite puis à gauche et
éventuellement de répéter plusieurs fois l'exercice jusqu'à obtention de la sédation de la
douleur, contrairement aux étirements de la
préparation à l'effort qui ne doivent être réalisés
qu'une seule fois avec une vigueur maximale.
FIG.41
FIG.42
FIG 41. - Premier temps de l'étirement de l'aponévrose lombosacrée et du grand dorsal en tension passive. Tronc dans le
prolongement de la jambe arrière, coude au-dessus de la tête.
Tirer ,avec la main opposée, le coude dans le prolongement du
tronc, en haut et en avant.
FIG 42. - Deuxième temps de l'étirement de l'aponévrose du
grand dorsal: maintenir la traction sur le coude puis s'enrouler
autour du sternum, région lombaire plate.
fibreux et sera susceptible de court-circuiter
l'afférence des réseaux nocicepteurs provenant
de la région lombaire.
La position de départ fixe activement le bassin,
donc les insertions basses de l'aponévrose du
grand dorsal, par une demie fente avant, genou
arrière tendu, tronc dans le prolongement de la
jambe arrière, coude haut maintenu par la main
opposée.
Le premier temps de l'étirement consiste en
une traction sur le coude dans le prolongement
Références
1. BUTEL J. et coll. - Rôle fonctionnel des muscles ischiojambiers. Incidences pour l'entraînement
et la rééducation
du sportif. E.M C. Instantanés médicaux, nO 3, 1981.
2. DUREY A., BOEDA A. - Médecine du football. Paris,
Masson, pp. 126-121, 1978.
3. KARPOVITCH P, SINNING W : Physiology of muscular
activity. Toronto. Saunders company, 7, 1971.
4. KA YSER C. - Physiologie, système nerveux et muscle. Paris,
Flammarion,
1287, 1963.
5. MCCONAILL M., BASMAJIAN J. - Muscles and movements.
Baltimore, The Williams and Williams Company, pp. 87-89,
1969.
6. MAILLET M. - Les tissus de soutien. Collection histologie
et histophysiologie humaines. Paris Vigot, 35, 1979.
7. MARTINEZ C. - Monographies de Bois-Larris. La hanche.
Paris, Masson, 27, 1982.
8. POIRIER P. - Traité d'anatomie humaine. Myologie. Paris,
Masson. 198, 215, 216, 233, 236, 493; 1901.
9. TESTUT L., JACOB O. - Traité d'anatomie topographique.
Tome II. Paris, Doin, 878; 1906.
10. WARWICK R., WILLIAMS P. - Gray's anatomy. Edinburgh,
Longman, 40; 1973.
11. WIRHED R. - Sport-Anatomie und Bewegungslehre. Stuttgart, Schattaver Verlag, 18; 1984.
12. WRIGHT S. - Physiologie appliquée à la médecine. Paris
Flammarion,
100, 252, 1973.
Téléchargement