Le rétrécissement aortique valvulaire

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Le rétrécissement aortique valvulaire
J-Ph LESBRE – CHU Amiens - K. ISAAZ - CHU St Etienne
-----C’est la plus fréquente des valvulopathies puisqu’elle représente 25 à
30% d’entre elles.
A partir d’études échographiques portant sur plus de 5000 patients
âgés de 65 ans et plus, Stewart estime sa prévalence à 2% montant à 4% au-delà de 85
ans.
L’écho Doppler occupe une place prépondérante dans son diagnostic,
et a totalement supplanté l’hémodynamique.
L’intervention ne doit être proposée que lors de l’apparition des
premiers signes fonctionnels.
Rappelons enfin que la surface normale de la valve aortique est de 2.5
à 3.5 cm².
- qu’il y a apparition d’un souffle lorsque la surface diminue de 25%
- qu’il y a apparition d’un gradient de pression lorsque la surface est
<1.5 cm²,
- enfin qu’il y a apparition de signes fonctionnels et que l’on parle de
RA chirurgical lorsque la surface est inférieure à 1 cm² et le gradient moyen
50 mmHg.
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I/ ETIOLOGIES ET ANATOMOPATHOLOGIE
Le rétrécissement aortique valvulaire peut être congénital (RA
congénital en dôme) ou acquis : cas le plus fréquent.
A - RA congénital
Dans la forme uni ou tricuspide , il ne représente guère que 4% dans
les séries chirurgicales de l’adulte, en particulier la série de 300 cas publiée par ACAR.
Ici, la valve est transformée en un diaphragme bombant, percée en son centre d’un
orifice plus ou moins étroit “ en gicleur ”.
En revanche, dans sa forme bicuspide, il est fréquent puisque
représentant 26 % dans la série de ACAR. Elle représente 26% dans la série de ACAR.
La bicuspidie est une malformation très fréquente puisque touchant
1% de la population. Cette malformation conduit à une “ usure ” plus rapide des valves
en raison d’une ouverture incomplète créant des turbulences favorisant fibrose et
calcification précoces. Cette forme touche les sujets un peu plus jeunes, et va se
traduire par l’apparition d’un souffle vers la cinquantaine, il y a pratiquement toujours
association d’une fuite aortique, car la mauvaise qualité des cusps s’accompagne d’un
prolapsus de la plus grande d’entre elles.
B - RA acquis
1 - RA dégénératif ou maladie de Monckeberg
Il représente 56% dans la série d’ACAR. Il n’y a pas de symphyse
commissurale, mais des calcifications d’évolution centripète, débutant au niveau de
l’anneau aortique pour gagner le bord libre des sigmoïdes. Ces calcifications peuvent
devenir proliférantes, massives, en chou fleur, et gagner la racine de la grande valve
mitrale, et le septum à l’origine de troubles de conduction.
Cette maladie n’est observée que chez les patients âgés de plus de 70
ans, habituellement hypertendus. L’orifice est transformé en un dé filé de quelques mm
de diamètre, à la fois rétréci et incontinent.
L’hypertension, l’hypercholestérolémie, et surtout, l’insuffisance
rénale dialysée constituent des facteurs favorisants principaux de ce RA dégénératif.
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2- Etiologie rhumatismale
Elle représente 14% dans la série de ACAR.
Elle est identifiable au plan anatomique comme échographique par
l’existence d’une symphyse commissurale centripète allant de la périphérie à la partie
centrale.
Les valves sont à la fois rétractées et épaissies par fibrose cicatricielle.
L’orifice résiduel est triangulaire et central, les calcifications apparaissent sur la face
valvulaire des commissures. L’évolution sténosante est lente, et il faut 10 à 20 ans pour
constituer une sténose aortique (évolution plus lente que pour l’orifice mitral).
Il y a bien souvent association d’atteinte mitrale.
3 - Les causes plus rares sont représentées par
. la maladie de Paget
. la polyarthrite rhumatoïde
. l’ochronose
C - Lésions extravalvulaires
L’aorte ascendante est dilatée et le maximum de dilatation intéresse le
bord droit de l’aorte ascendante entre 3 et 5 cm au-dessus du plancher sigmoïdien, au
point d’impact du jet.
Cette dilatation est asymétrique et peut être anévrysmale, et exige un
changement de l’aorte ascendante quand le diamètre dépasse 50 mm.
Le ventricule gauche est le siège d’une hypertrophie ventriculaire
gauche concentrique sans dilatation cavitaire, avec forte augmentation de l’épaisseur
pariétale comprise entre 12 et 20 mm.
Rappelons que la finalité de cette hypertrophie est de normaliser la
contrainte pariétale régie par la loi de Laplace : t = pression X rayon/épaisseur.
Les coronaires sont volontiers augmentées de calibre mais pas au
prorata du degré d’hypertrophie ventriculaire gauche. Il y a donc là le substrat de
l’insuffisance coronarienne fonctionnelle.
Elles peuvent être dans ¼ des cas environ le siège d’une athéromatose
significative, dans 8% des cas, on retrouve des stigmates anatomiques d’embolie
coronarienne (Normand).
La valve mitrale est elle même, dans plus de la moitié des cas, le siège
de calcifications annulaires prédominant au niveau de la racine de la petite valve.
Ces calcifications peuvent être à l’origine de sténoses mitrales dites
“ extrinsèques ” parce que respectant les commissures et engainant la face ventriculaire
des feuillets mitraux.
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II/ PHYSIOPATHOLOGIE
La sténose produit un obstacle fixe à l’éjection du ventricule gauche.
Il apparaît un gradient de pression holosystolique entre le ventricule
gauche à pression élevée et l’aorte ascendante à pression normale ou basse.
Les conséquences anatomiques sont l’hypertrophie concentrique du
ventricule gauche avec masse myocardique augmentée (Loi de Laplace). Le ventricule
garde des dimensions internes normales, s’il n’y a pas de fuite significative associée.
Conséquences sur les flux : le flux aortique est propulsé à très haute
vitesse, en particulier au niveau du jet central laminaire qui peut atteindre 4 à 6 m/sec.
dans les sténoses aortiques serrées chirurgicales voisines de 0.75 cm².
Le débit cardiaque au repos est conservé, en particulier pendant toute
la phase compensée où l’augmentation de tension pariétale est compensée par une
diminution du rayon et une augmentation de l’épaisseur de la paroi ventriculaire
gauche.
Les signes fonctionnels sont la conséquence directe de l’obstruction :
syncope et angor d’effort.
A la phase décompensée, le débit cardiaque au repos est diminué, et
apparaissent alors la dyspnée d’effort puis la dyspnée de repos.
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III- CLINIQUE
Il faut souligner la très longue latence fonctionnelle du rétrécissement
aortique qui ne “ parlera ” que lorsque la surface devient inférieure à 1 cm².
Dans la maladie de Monckeberg, c’est par le jeu des calcifications que
l’évolution s’opère dans le sens de l’aggravation de la sténose et de l’apparition des
signes fonctionnels.
- L’angor d’effort s’observe dans ¾ des cas de rétrécissement aortique
sévère. Il correspond au plan physiopathologique dans le ¾ des cas à une insuffisance
coronarienne fonctionnelle ; dans 25% des cas, il correspond à une insuffisance
coronarienne organique.
- Syncopes d’effort : elles s’observent dans 40% des cas de RA sévère.
Elles sont souvent révélatrices de la maladie, car elles amènent à consulter.
Elles peuvent être remplacées par des équivalents mineurs :
étourdissements, vertiges, instabilité déclenchés par des efforts physiques significatifs.
Au plan physiopathologique, elles correspondent à l’absence d’augmentation du débit
cardiaque à l’effort par conséquence de la sténose valvulaire fixe et à la redistribution
du débit cardiaque au niveau des masses musculaires actives quadricipitales au
détriment de la sphère céphalique.
C’est donc par le biais de l’ischémie cérébrale d’effort que surviennent
syncope et étourdissement.
- La dyspnée d’effort est un signe révélateur fréquent observé dans un
tiers des cas. Elle s’explique par la dysfonction diastolique, conséquence de la forte
hypertrophie ventriculaire gauche. C’est pourquoi, elle peut précéder en fait de
plusieurs années la dyspnée de repos ou l’oedème aigu du poumon qui est retrouvé
dans un tiers des cas de rétrécissements aortiques chirurgicaux.
Les données de l’examen physique :
. la présence d’un souffle systolique éjectionnel, c’est à dire
mésosystolique ne couvrant pas toute la systole, séparée de B1 et de B2 par une césure,
crescendo decrescendo, maximum au foyer aortique et irradiant sur les vaisseaux du
cou de tonalité rude, râpeuse, serratique, associée à une extinction franche du 2ème
bruit par immobilité des sigmoïdes aortiques pétrifiées.
Le pouls aux 4 membres est petit, difficile à percevoir : “ pulsus
parvus et tardus ” des anciens auteurs. L’existence d’un thrill sera recherchée
systématiquement au niveau du foyer aortique principal : il n’existe que pour des
sténoses chirurgicales à gradient élevé > à 70 mmHg.
On recherche des signes de stase pulmonaire : absent à ce stade. La
tension artérielle est normale sans augmentation de la différentielle ou élevée :
l’hypertension favorisant la génèse du RA.
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IV/ EXAMENS PARACLINIQUES
. Le téléthorax révèle simplement une dilatation post-sténotique de
l’aorte ascendante et parfois des calcifications valvulaires.
Le rapport cardiothoracique reste normal du fait de l’HVG
concentrique.
. L’ECG révèle des signes d’hypertrophie ventriculaire gauche
systolique : RV5 > 30 mm, RV6 > 25 mm, associée à des ondes T négatives et
asymétriques.
. L’Echo Doppler : c’est l ’examen clef puisqu’il permet le diagnostic
de sténose aortique, de son type, de sa sévérité, de son retentissement ainsi que
l’évaluation des autres valves.
a) Le diagnostic de sténose aortique repose sur l’épaisseur anormale et
la limitation de l’ouverture des sigmoïdes aortiques : les valves aortiques normales sont
fines (1-2 mm) et s’ouvrent à plus de 17 mm dans une aorte dont le diamètre est
compris entre 30 et 37 mm.
Dans la sténose aortique, les sigmoïdes sont anormalement épaissies et
leur ouverture < 17 mm.
Dans les sténoses sévères, l’ouverture intersigmoïdienne est <8 mm.
Dans tous ces cas, est retrouvé en TM le signe cher à Gramiak : des
calcifications rubanées occupent la lumière aortique et délimitent un orifice aortique
très restreint en forme de boutonnière de chemise ou de haricot
b) Le diagnostic du type de la sténose
 e diagnostic de sténose congénitale se porte sur la coupe
L
longitudinale parasternale grand axe objectivant la déformation en dôme du plancher
sigmoïdien au moment de la systole et l’orifice étroit en gicleur. En diastole, le dôme
se prolabe dans la chambre de chasse en inversant son rayon de courbure.
Cette image est commune à la sténose congénitale en dôme et à la
sténose sur bicuspidie, bicuspidie identifiée au mieux en coupe parasternale petit axe :
cette coupe permet d’identifier 2 cusps inégales au lieu de 3 séparées par un raphé
épais.
 a maladie de Monckeberg s’identifie en incidence parasternale
L
grand axe sur la présence d’un massif calcaire dense, témoignant de la pétrification
massive de l’orifice.
En systole, les sigmoïdes antérieures et postérieures ne sont animées
que de petits mouvements d’ouverture délimitant un chenal tortueux et étroit.
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Le rétrécissement aortique rhumatismal est reconnu aux symphyses
commissurales solidarisant les sigmoïdes et épaississant de façon très franche les
commissures et délimitant un pertuis central étoilé losangique.
Il faut souligner qu’à un stade tardif, chez un sujet âgé, par le jeu des
calcifications massives, il n’est plus possible de différencier la forme anatomique
originelle.
c) Diagnostic de sévérité :
Il est basé essentiellement sur la planimétrie et surtout le Doppler.
L’utilisation du second harmonique permet maintenant d’obtenir chez
les sujets échogènes une bonne définition de la surface de l’orifice aortique en coupe
transverse transthoracique. Pour l’équipe de Roudaut cette détermination serait
possible dans près de 80% des cas. En fait, cette détermination reste malheureusement
difficile chez les sujets âgés, peu échogènes et à orifice massivement calcifié. Même
par voie oesophagienne, la planimétrie reste un exercice difficile, et ne peut être
considérée comme fiable que dans une moitié des cas.
Le Doppler reste donc la pierre d’angle du diagnostic de sévérité basé
sur le calcul du gradient moyen et le calcul de la surface.
Le Doppler continu, véritable vélocimètre de globules rouges, permet
de déterminer par voie apicale et par voie suprasternale la vitesse sanguine
transsténotique. Alors que la vitesse au niveau de l’orifice aortique normale est voisine
de 1 m/sec. dans les sténoses aortiques cette vitesse monte au voisinage de 5 à 6 m/sec.
L’application de l’équation de Bernoulli (G = 4V²) permet de
transformer cette courbe de vélocité instantanée en courbe de gradient instantané dont
le plus élevé est le gradient instantané maximal correspondant au pic de vélocité du
flux aortique. Le gradient moyen est obtenu par transformation quadratique point par
point de la courbe de vélocité aortique.
Il faut souligner que le gradient maximal instantané ne correspond pas
au gradient pic à pic des hémodynamiciens mais que par contre, la corrélation entre
gradient moyen Doppler et gradient moyen hémodynamique est remarquable avec un
coefficient de corrélation à 0.92 dans les études hémodynamiques et Doppler
simultanées de Currie et de Danielsen. Rappelons que l’on parle de sténose aortique
serrée lorsque le gradient moyen est >50 mmHg.
La détermination de surface
C’est à Skjerpe et Hatle que l’on doit en 1985 l’introduction de
l’estimation de la mesure non invasive de la surface de la sténose aortique uniquement
par écho Doppler en utilisant le principe de continuité de la dynamique de fluide :
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A tout instant, le débit passant par la chambre de chasse aortique est
égal au débit transsigmoïdien, ce qui peut s’écrire :
ITV Ao X SAo = ITV chambre de chasse X surface chambre de
chasse
d’où SAo =
ITV ch. ch x S ch. Ch
équation où
ITV transsténotique
ITV transsténotique correspond à l’intégrale temps vitesse du flux
sténotique en Doppler continu.
ITV chambre de chasse est l’intégrale temps vitesse du flux systolique
de la chambre de chasse ventriculaire gauche mesurée en Doppler pulsé.
Surface chambre de chasse est déterminée à partir du diamètre D de la
chambre de chasse mesurée en écho bi dimensionnelle sur la coupe parasternale grand
axe et égale à D2/4.
SAo = surface fonctionnelle de la sténose aortique.
Skjerpe rapporte une excellente corrélation entre surface écho Doppler
et hémodynamique (R=0.87) : de nombreux travaux sont depuis venus confirmer la
fiabilité remarquable de cette méthode.On parle de sténose aortique sévère lorsque la
surface est <1 cm² pour les anglo-saxons, <0.75 cm² pour les européens. Il faut tenir
compte de la surface corporelle de l’individu et on parle de sténose aortique
chirurgicale lorsque la surface aortique est <0.45 cm²/m² de surface corporelle.
d) Diagnostic du retentissement :
Le retentissement est double :
a u niveau ventriculaire, c’est le degré d’hypertrophie pariétale et
l’état de la fonction contractile appréciée par la fraction d’éjection. Ce dernier
paramètre est primordial et son fléchissement pousse à l’intervention en cas de RA
serré.
a u niveau aortique, c’est le degré de dilatation de l’aorte ascendante
qui peut être anévrysmale (D 55 mm) dans les bicuspidies sténosantes et conduire à
un remplacement de ce segment aortique.
e) Evaluation systématique des autres valves (mitrale en particulier)
Place du cathétérisme gauche
Il n’a plus sa place aujourd’hui car non exempt de risques et
totalement supplanté par l’écho Doppler qui fournit les mêmes renseignements que lui.
L’étape hémodynamique se résume donc aujourd’hui à la seule coronarographie.
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V/ FORMES CLINIQUES
Nous analyserons la sténose aortique en insuffisance cardiaque et la
sténose aortique congénitale de l’enfant.
1- En insuffisance cardiaque
La sténose aortique y revêt un aspect extrêmement trompeur : le
souffle devient minime en imposant pour un banal souffle de sténose aortique. Il peut
même être totalement absent, c’est dire que toute insuffisance cardiaque du sujet âgé
mérite un écho Doppler systématique pour ne pas méconnaître le diagnostic de
rétrécissement aortique chirurgical.
L’écho Doppler comme la clinique peut être trompeur dans ces formes
en insuffisance ventriculaire gauche : le gradient anormalement bas (<35 mmHg) en
raison du bas débit cardiaque peut suggérer à tort une sténose modérée sur
cardiomyopathie. Le test à la Dobutamine revêt ici un très grand intérêt diagnostic et
pronostic : dans les RA serrés avec réserve contractile, il est observé une franche
augmentation du débit de la fraction d’éjection, la surface restant < 1 cm². Le pronostic
est favorable si l’on confie le malade au chirurgien (88% de vivants 5 ans après la
chirurgie pour le groupe de Guéret). Dans les RA sans réserve contractile, il n’y a pas
de variation de débit ni de la fraction d’éjection sous Dobutamine témoignant d’une
dysfonction myocardique irréversible (séquelle d’infarctus étendu ou cardiomyopathie
associée) : ici le pronostic est très sombre et la mortalité voisine de 75% à 1 an qu’il y
ait ou non remplacement valvulaire.
2- Sténose aortique du nourrisson
Chez lui aussi, le rétrécissement aortique est le plus souvent
valvulaire. C’est une cardiopathie assez rare, 5 à 8%, grave, et qui nécessite un recours
thérapeutique en urgence. Le tableau clinique est celui d’une défaillance cardiaque
sévère survenant dans les premiers mois de la vie, c’est plus rarement un souffle ou un
malaise qui motive le 1er examen. Le nourrisson est polypnéïque, son foie est gros. On
perçoit un souffle systolique de type sténotique. A la palpation, la faiblesse des pouls
aux 4 membres est un excellent élément diagnostique. La radiographie ne révèle jamais
un coeur de volume normal : il est une fois sur 2 déjà très gros avec arc inférieur
gauche bombant, les poumons sont le siège de stase.
Jadis, indication d’une hémodynamique en urgence. C’est aujourd’hui
l’échographie qui fait le diagnostic différentiel entre fibroélastose, hypoplasie du coeur
gauche et une sténose aortique congénitale. Cette dernière forme nécessitant une
dilatation par ballonnet ou une valvulotomie.
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VI/ EVOLUTION
La sténose aortique est une affection évolutive par le jeu des
calcifications.
Cette notion est fondamentale et implique la surveillance régulière des
malades en les prévenant de l’aggravation inéluctable de la maladie au fil des ans.
Le pronostic spontané est bon, tant que le patient est asymptomatique.
Il est mauvais dès que l’expression fonctionnelle devient franche.
Différentes études de la littérature ont montré que l’espérance de vie
moyenne est de 5 ans lorsque surviennent les syncopes, 4 ans lorsque surviennent les
angors d’effort, 2 ans lorsque surviennent les premières manifestations d’IVG, et de 6
mois lorsqu’il y a manifestation de l’insuffisance cardiaque.
La mort subite représente un tiers du mécanisme des décès : cette mort
subite peut relever d’une insuffisance coronarienne fonctionnelle lors d’un effort
excessif, d’un bloc auriculoventriculaire.
Dans les autres cas, elle survient par oedème aigu du poumon (role++
de la fibrillation auriculaire) par insuffisance cardiaque progressive, par endocardite
(10 à 15% des cas) ou par infarctus du myocarde.
Retenons qu’il y a de grandes différences évolutives selon la nature du
rétrécissement aortique :
Le RA congénital voit sa surface fixe pendant 2 à 3 décades avant de
s’aggraver par le jeu des calcifications surajoutées.
Le RA rhumatismal progresse très lentement, beaucoup plus lentement
que le Monckeberg.
Le RA calcifié sénile a une progression plus rapide que les 2 autres
étiologies, du fait des calcifications massives. En moyenne, la surface valvulaire
diminue de 0.1 cm² par an.
Chez les dialysés, l’évolution est beaucoup plus rapide de l’ordre de
0.25 cm²/an. C’est dire :
- que tout patient asymptomatique doit être prévenu du risque de
l’aggravation et de survenue des symptômes et de la nécessité d’une surveillance
régulière tous les 6 mois au début pour évaluer la vitesse évolutive.
- que tout patient symptomatique doit être confié au chirurgien,
d’autant que cette intervention est la plus gratifiante de l’ensemble de la chirurgie
cardiaque.
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VII / COMPLICATIONS RARES
1. Endocardite
2. Hyperexcitabilité ventriculaire
3. Troubles de la conduction
4. Embolies calcaires systémiques : classiques mais rares. Peuvent
intéresser le cerveau, le rein, les coronaires et l’artère centrale de la rétine (responsable
de pertes transitoires de la vision)
5. Hémorragies digestives
classiques ; le mécanisme est mal élucidé : idiopathique ou par
angiodysplasie
VIII/ TRAITEMENT
Il repose sur la mise en place d’une bioprothèse de type Carpentier
Edwards, pour les patients âgés de 75 ans et +, de prothèse mécanique à ailettes type
Saint Jude pour les patients de moins de 70 ans, d’homogreffes humaines ou de la
propre valve pulmonaire du patient placée en position aortique pour les jeunes patients.
La valvuloplastie aortique percutanée par ballonnet, selon la technique
de Cribier, permet de passer un cap chez les patients âgés en état critique pour qui l’on
envisage néanmoins un recours chirurgical
L’indication opératoire exige la conjonction d’un RA serré 1 cm² et
de signes fonctionnels d’intolérance. En cas d’interrogatoire ambigü, l’épreuve d’effort
rend ici de très grands services : s’il existe une absence d’élévation et a fortiori une
chute tensionnelle à l’effort, on n’hésitera pas à confier le patient au chirurgien.
Les résultats :
La mortalité opératoire est de 5% au stade compensé.
Elle est de 10 à 15% en cas d’insuffisance cardiaque ou de lésion
coronaire imposant un pontage associé.
Les résultats fonctionnels sont bons même chez les patients de 70 et 80
ans : dans la série de Logeais , portant sur + de 4000 patients âgés de 68 ± 10 ans, la
mortalité opératoire est de 7%, la survie actuarielle de 77% à 5 ans, et 56% à 10 ans.
98% des survivants ont un excellent résultat fonctionnel et se
retrouvent au stade I ou II de la NYHA. 73% sont asymptomatiques et mène une vie
normale.
Chez les sujets jeunes, chez les jeunes femmes désirant une grossesse,
l’intervention de Ross avec utilisation d’une autogreffe pulmonaire, trouve toute son
indication mais impose l’attente d’un donneur d’une homogreffe de valve pulmonaire.
Dans la série de Prat, les résultats à 10 ans sont remarquables.
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Ainsi, la qualité des résultats à long terme justifie pleinement le
traitement chirurgical du RA qui reste une affection de plus en plus fréquente touchant
avec prédilection les tranches les plus âgées de la population.
FIGURES
Figure 1 : Coupe parasternale gauche grand axe. Cliché en télésystole
chez un patient porteur d’une sténose aortique d’origine rhumatismale, calcifiée. On
peut apprécier l’ouverture sigmoïdienne mesurée ici à 8 mm. Noter le remaniement de
l’appareil sous valvulaire mitral chez ce patient porteur d’une sténose mitrale.
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Figure 2 : Coupe parasternale gauche petit axe transaortique chez un patient porteur
d’une sténose aortique calcifiée. La planimétrie est réalisable chez ce patient
particulièrement échogène. La surface est calculée à 0,6 cm².
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Figure 3 : Coupe TM transaortique : sténose aortique. Les sigmoïdes
sont épaissies, avec réduction de l’écart intervalvulaire (8 mm). On note la présence
d’échos pluristratifiés intra-aortiques systolo-diastoliques
.
Figure 4 : Mesure du diamètre de la chambre de chasse ventriculaire
gauche sur la coupe parasternale gauche grand axe (d = 2,3 cm : s = 4,15 cm²).
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Figure 5 : Enregistrement sur le même cycle par voie apicale chez un
patient porteur d’une sténose aortique du flux aortique transvalvulaire et du flux dans
la chambre de chasse ventriculaire gauche-aorte est à 63 mmHg, la vélocité maximale
aortique à 4,8 m/s, l’ITV à 125 cm.
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