Biomatériaux à Base de Fibres Protéiniques Naturelles Isabelle Marcotte Prof. Adjointe Département de Chimie Université du Québec à Montréal 1 Structure des protéines – acides aminés ● Les protéines sont des polymères d’acides aminés R NH3+ C COO- H ● La nature du groupe R sur la chaîne latérale marque la différence entre les acides aminés ● Apolaires, aromatiques, polaires, chargés (+) ou (-) 2 Structure des protéines – acides aminés ● 20 acides aminés naturels: APOLAIRES ET ALIPHATIQUES POLAIRES NON CHARGÉS CHARGÉS POSITIVEMENT CHARGÉS NÉGATIVEMENT AROMATIQUES http://trc.ucdavis.edu/biosci10v/bis10v/week2/2webimages/ch5-amino-acids.jpg 3 Acides aminés ● Nomenclature Alanine Ala A Arginine Arg R Asparagine Asn N Aspartate Asp D Cystéine Cys C Glutamine Gln Q Glutamate Glu E Glycine Gly G Histidine His H Isoleucine Ile I Leucine Leu L Lysine Lys K Méthionine Met M Phénylalanine Phe F Proline Pro P Sérine Ser S Thréonine Thr T Tryptophane Trp W Tyrosine Tyr Y Valine Val V 4 Structure des protéines ● Les protéines sont composées d’acides aminés reliés entre eux dans une séquence donnée par des liaisons amides aussi appelées liens peptidiques ● Voici la nomenclature des protéines: ● Les chaînes peptidiques ont un sens, donc deux extrémités différentes: ● ● ● N-terminale avec groupe ammonium libre C-terminale avec groupe carboxyle du dernier acide aminé On donne la séquence d’une protéine en commençant par le C-terminal Koolman & Röhm (2004) 5 Structure des protéines ● Le lien peptidique est stabilisé par mésomérie ● Liaison plane ● N’est possible qu’avec un apport d’énergie important ● La rotation autour du lien C-N n’est pas libre ● Les rotations ne sont possibles qu’autour des liaisons ● simples La rotation entre 2 plans peptidiques est décrite par les angles dihèdres et y ● ● rotation autour de N-Ca y rotation autour de Ca-C′ R O R O R C y C Ca N Ca H N H Ca H H H ● Le squelette (backbone) d’un polypeptide est constitué des atomes C′-N-Ca ● ● ● C′ = carbonyle Ca = carbone lié à l’azote et portant le groupe substituant C = carbone du groupe R directement lié au Ca Koolman & Röhm (2004) 6 Structure des protéines ● Pour des raisons stériques, seules certaines combinaisons d’angles dihèdres sont possibles. ● Diagramme de Ramachandran ● Relation entre les angles et y = 0o y = 180o La distance entre les carbonyle est trop petite = -139o y = +135o permis = -57o y = -47o interdit = 180o y = 0o Les groupements NH entreraient en collision a = Feuillet antiparallèle ar = Hélice a droite p = Feuillet parallèle al = Hélice a gauche C = hélice de collagène Koolman & Röhm (2004) 7 Structure des protéines ● Diagramme de Ramachandran ● Montre que la plupart des combinaisons /y sont interdites (rose). ● Ex.: combinaison = 0o/y = 180o ● Ex.: combinaison = 180o/y = 0o ● Montre qu’il existe des espaces conformationnels où on retrouve la plupart des structures secondaires des peptides et protéines ● Ces zones (vertes) sont favorisées sur le plan stérique ● ● Ex.: combinaison = -139o/y = 135o feuillet antiparallèle ● Ex.: combinaison = -57o/y = -47o hélice a droite Les conformations correspondant aux zones jaunes sont possibles mais moins favorables sur le plan énergétique 8 Structure des protéines ● Rappel: on distingue ● Ex.: insuline Structure primaire ● C’est la séquence en acides aminés ● Structure primaire Structure secondaire ● Domaine de la chaîne peptidique ayant une conformation définie stabilisée par des liaisons hydrogènes internes ou externes (entre 2 chaînes peptidiques) ● ● 20 Hélices a, feuillets , etc. Structure tertiaire ● Conformation 3D d’une protéine bâtie à partir d’éléments de structure secondaire et de fragments non ordonnés ● 6 Structure secondaire Structure tertiaire Structure quaternaire ● Association de protéines par des interactions non covalentes pour constituer des complexes Koolman & Röhm (2004) 9 Structure des protéines ● Structures secondaires les plus courantes: ● Hélices, feuillets et coudes Hélice a Hélice de collagène < +130o < y < +155o -80o < = -57oy = -47o -50o Antiparallèle = -139o y = +135o Parallèle = -119o y = +113o Coudes Type I Type II Koolman & Röhm (2004) 10 Quelques biofibres protéiniques structurales ● ● ● Il existe plusieurs fibres protéiniques naturelles intéressantes ● Actine, collagène, élastine, kératine, soies, etc. Applications biologiques ● Mobilité, échafaudage (scaffolding), stabilisation et protection Caractéristiques structurales de quelques protéines: Protein fibre Secondary structure Collagens General primary sequence (Gly-X-Y) X, Y = variable amino acid with Pro and Hyp the most frequent Collagen triple helix Elastin Val-Pro-Gly-Val-Gly Cross-linked polymer chains without secondary structure Mammalian akeratins Ala-Glu-Gln-Phe-Arg-Asp-Gln Mostly a-helices Resilin None Cross-linked polymer chains without regular secondary structure Bombyx mori Gly-X with X = Ala, Ser, Thr, Val. High occurrence of Gly-Ala-Gly-AlaGly-Ser repeats Dominated by -sheet, presence of a-helices Spider dragline silk spidroins (Ala)n, Gly-Gly-X for spidroin I and Gly-Pro-Gly-Gly-X/Gly-Pro-Gly-GlnGln for spidroin II where X = variable amino acid Ala-rich -sheet crystallites and Gly-rich 31-helix domains. cocoon silk fibroin Scheibel (2005) Arnold & Marcotte (2009) Most found repeats 11 Collagène ● Protéine la plus abondante chez les mammifères ● ● ● Représente environ 25% de l’ensemble des protéines Tissu connecteur de la peau et des os Retrouvé dans le byssus de la moule ● X, Y = acide aminé variable, Pro et Hyp surtout ● 3 chaînes de collagène enroulées pour former une triple hélice de 1.4 nm de diamètre et 300 nm de longueur Souvent agrégées en ballots semblables à des câbles de plusieurs m de diamètre Hyp ● Séquence primaire générale: (Gly-X-Y) ● Structure secondaire: ● ● In vitro, les molécules de collagènes purifiées s’auto- ● assemblent spontanément pour former des fibres identiques à celles générées in vivo Peuvent former des gels rigides Koolman & Röhm (2004), Scheibel (2005), Hart & Gehrke (2007) 12 Élastine ● Protéine retrouvée chez les vertébrés et les insectes ● Les artères élastiques ● Aorte, artères pulmonaires ● Les alvéoles pulmonaires ● Expansion/compression alvéolaire (respiration) ● Le derme ● Rôle de soutien ● Propriétés semblables au caoutchouc qui donnent de l’élasticité aux tissus ● Protéine durable dont la demi-vie est de l’ordre de 70 ans ● Plus d’un milliard de cycles étirement/relaxation pendant cette période ● Protéine non structurée ● Séquence la plus répétée: Val-Pro-Gly-Val-Gly ● Très réticulée entre les résidus Lys pour donner un réseau extensif de fibres et de feuillets Debelle & Tamburro (1999), Li & Daggett (2002), Scheibel (2005) 13 Kératine a ● Protéine retrouvée chez la plupart des animaux ● Fonctions ● ● Stabilise les cellules épithéliales Protéine-échafaudage des ongles, cheveux, plumes, sabots, laine, etc. ● ● ● Composée d’hélices-a 2 hélices forment une superhélice gauche Les superhélices s’assemblent en tétramères pour former un proto-filament 8 proto-filaments s’assemblent pour former un filament ● Séquence la plus répétée: Ala-Glu-Gln-Phe-Arg-Asp-Gln ● Structure: ● ● Les cheveux sont formés de plusieurs filaments pour former un brin de 20 m de diamètre Kaplan (1998) , Duer et al. (2003), Koolman & Röhm (2004), Scheibel (2005), Vasconcelos et al. (2008) 14 Fibroïne ● Compose la soie des cocons produits par les vers à soie tels que le ● ver domestique Bombyx mori Faite de 2 polypeptides liés par des ponts disulfures ● Un de haute masse moléculaire (~390 kDa) et l’autre de faible masse (~26 kDa) ● Structure secondaire ● ● ● Dominée par les feuillets qui forment des microcristaux dans la fibre Présence d’hélices-a Domaines cristallins de Gly-X où X = Ala, Ser, Thr, Val 10-25 m de diamètre ● La plus répété = GAGAGS ● Régions « linkers » composées d’une 40 aine d’acides aminés ● Séquence de 25 acides aminés identiques incluant des résidus chargés absents des régions cristallines Soie native non lavée ● Cocon recouvert de séricines ● Protéines (20-310 kDa) qui collent les deux polypeptides et maintiennent la structure du cocon ● Fibroïne possède une grande résistance mécanique + résistance à la protéolyse ● Biocompatible une fois dégommée Shao & Vollrath (2002), Huang et al. (2007), Vepari & Kaplan (2007) 15 Spidroïne ● L’araignée produit différents types de soie ● Fil de trame, cocon, nid, pièges ● Le fil de trame de la soie d’araignée est composée de spidroïnes I et II ● ● Motifs répétés de poly-Ala (8-10 résidus) Séquences riches en Gly dont le plus abondant est GGX ● (X = Gln, Ala, Tyr, Ser ou Leu) ● Spidroïne produite dans une glande dans l’abdomen de l’araignée ● Pas de structure secondaire définie à l’état liquide ● Domaines de poly-Ala majoritairement en feuillets-, incluant des régions micro-cristallines Domaines riches en Gly en hélices 31 Domaines sont orientés avec les chaînes principales parallèles à l’axe de la fibre 1-4 m de diamètre ● Structure de la fibre: ● ● ● Van Beek et al. (2002), Sponner et al. (2005), Marcotte et al. (2007) 16 Spidroïne ● Le fil de trame de l’araignée est une fibre naturelle de haute performance qui combine élasticité et résistance ● FIl de trame, N. edulis Ténacité de la soie rapportée dès 1887 par le Dr Goodfellow (Tombstone, Arizona) ● La soie d’araignée est plus résistante et élastique que celle du ver à soie ● Applications potentielles: ● Gilets pare-balles, cordes d’escalade, tendons artificiels, sutures nonallergènes Nephila edulis ● Sa culture en masse présente encore un défi majeur ● Essais de production de masse ● Par bactéries, baculovirus, chèvres, plants de tabac et pommes de terre génétiquement modifiés Goodfellow (1887), Colgin & Lewis (1995), Scheller et al. (2001), Scheibel (2005), Hakimi et al. (2007), Marcotte et al. (2007) 17 Propriétés mécaniques – définitions ● Quelques attributs fonctionnels des biomatériaux et propriétés mécaniques Attribut fonctionnel Définition Propriété du matériau Unité Extensibilité Capacité d’un matériau à être étiré sans rupture Élongation à la rupture, max Sans unités Élasticité Capacité de se déformer de façon réversible sans perte d’énergie sous l’action d’une force Résilience % Résistance - strength Contrainte maximale qu'un matériau peut supporter avant de se rompre. Contrainte à la rupture, max N·m-2 Ténacité - toughness Résistance à la fracture d’un matériau sous contrainte. Quantité d’énergie par volume qu’un matériau peut absorber avant de rompre Énergie à la rupture J·m-3 Rigidité - stiffness Résistance d’un matériau élastique à la déformation sous contrainte Module d’élasticité, Einit Contrainte - stress Action (force) extérieure sur un matériau (traction, compression, etc.) Déformation- strain Changement de dimension d’un matériau avant et lors de l'application d'une contrainte Gosline et al. (2002) N·m-2 N·m-2 18 Propriétés mécaniques – biofibres protéiniques ● Graphique contrainte/déformation ● ● Fil de trame et soie viscide sont les plus résistantes* Protéines caoutchouteuses (résiline et élastine) au bas du graphique++ * ● Se déforment (s’étirent) sous une contrainte faible ● Sous contrainte, une fibre ou un ● matériau va éventuellement céder. Ils vont se fracturer ou subir une déformation permanente. * ++ Bower (2002), Gosline et al. (2002) 19 Propriétés mécaniques – biofibres protéiniques ● Propriétés mécaniques extraites du graphique précédent ● Le fil de trame de l’araignée est la fibre naturelle la plus tenace ● Plus performante que l’acier et le Kevlar ● Plus extensible et résistante que le collagène ● La nature améliore les propriétés des fibres au moyen d’assemblages particuliers ● Byssus de la moule Gosline et al. (2002) 20 Propriétés mécaniques – byssus ● Amélioration des propriétés mécaniques du collagène ● ● Partie proximal plus élastique Partie distale plus résistante PreCol-D PreCol-P Histidine-rich Histidine-rich Elastin-like 50% Ala/Gly Pro/ser abundant Val/Phe (hydrophobic) abundant Silk fibroin 60% Ala/Gly Longer Ala stretches (10-14) than PreCol-P) 0% Pro 128 nm P Collagen Collagen 34% Gly 20% (Pro-Hyp acidic acidic Proline rich Elastin-like Silk fibroin Histidine-rich Histidine-rich 34% Gly 20% (Pro-Hyp D NG Arnold (commun. person.), Coyne et al. (1997), Waite et al. (1998), Holten-Andersen & Waite (2008) 21 Biomatériaux – définition ● Définition: Matériaux naturels ou synthétiques utilisés en contact avec des systèmes biologiques ● ● Applications médicales surtout Autres utilisations: croissance cellulaire en culture, applications biotechnologiques comme arrays pour diagnostic génétique, tests de protéines du sang, etc. ● Incluent matériaux synthétiques ou naturels modifiés ● ● Métaux, céramiques, polymères, verres, carbones, matériaux composites, collagène, etc. Moulés, machinés, recouvrement (coatings), fibres, films, mousses, gels… Ratner et al. (2004) 22 Biomatériaux – conception ● La conception des biomatériaux est intrinsèquement liée à leur application ● ● Demande d’incorporer des informations physiques, chimiques et biologiques Exemples: ● Pour guider les cellules dans des tissus fonctionnels via migration cellulaire, adhésion ou différentiation ● Pour se dégrader à une vitesse équivalente à la formation et à la régénération de nouveaux tissus fonctionnels ● Pour offrir un support mécanique approprié, à niveau avec le développement d’un tissu fonctionnel ● On doit connaître les caractéristiques d’un matériau (propriétés de volume et de surface) AVANT toute application médicale, et anticiper les changements qui se ● produiront in vivo pendant son utilisation Importance de la recherche sur les biomatériaux, de leur caractérisation ● ● ● ● Propriétés mécaniques Biocompatibilité Biodégradabilité Bioactivité Ratner et al. (2004) 23 Biocompatibilité ● Défi important pour les applications biologiques ● Premières études de biocompatibilité remontent à 1829 ● Matériaux d’or, argent, plomb, platine implantés dans le chien ● 1949: on trouve que le téflon montre peu de réactions biologiques contrairement au polyéthylène, nylon, Lucite et cellophane ● Celles sur les matériaux en plastique = années ’40 ● 1949 = Première observation de la biocompatibilité telle que définie de nos jours ● Implantation de lentilles intraoculaires en PMMA ● Sir Harold Ridley, M.D. ● « Guérison stable sans irritation ou inflammation » ● « Capacité d’un matériau à remplir une application spécifique avec une réponse immune de l’hôte appropriée » (Williams, 1987) ● Définition: ● ● ● ● Résistance à la formation de caillots de sang Résistance à la colonisation bactérienne Sans réponse immunogène Guérison sans complications Ratner et al. (2004) 24 Biodégradation ● Définition: ● Détérioration d’un matériau par l’action d’un organisme vivant conduisant à des changements de propriétés physiques ● Détérioration dépend de la structure chimique, de la morphologie et des dimensions d’un matériau, de même que de son environnement biologique ● Bien que le corps offre un environnement de pH neutre, faible concentration de sel et température relativement peu élevée, un matériau doit faire face aux mécanismes qui ont évolué pour débarrasser un organisme vivant de substances étrangères ● ● ● Augmentation de la vitesse de corrosion de métaux par protéines adsorbées Dégradation oxydative par des agents oxydants et enzymes secrétés par les cellules Dégradation hydrolytique ● Réaction avec H2O catalysée par des acides, bases, sels ou enzymes Ratner et al. (2004) 25 Biodégradation ● Échelle de temps: ● De minutes à années ● Peut être prévue après un temps déterminé après implantation ● Exploitable ● Contrôle de la biodégradation afin de restaurer la structure intégrale d’un tissu et sa fonction ● Le taux de dégradation doit correspondre au taux de croissance tissulaire ● Les produits de dégradation peuvent être toxiques mais aussi conçus avec une action spécifique Importance de comprendre les mécanismes de dégradation, l’environnement direct du biomatériau et ses propriétés physico-chimiques pour contrôler sa biodégradation Ratner et al. (2004) 26 Bioactivité ● Certains biomatériaux doivent jouer un rôle biologique ● Promouvoir la migration, l’adhésion ou la différentiation de cellules, la croissance cellulaire et la liaison aux tissus environnants Human bone marrow cells growing on a Spidrex® tissue scaffold. http://www.orthox.co.uk/Technology 27 Biomatériaux – historique ● Après la WWII, les céramiques, métaux et matériaux polymériques de haute performance ont attiré l’attention des chirurgiens ● ● ● ● Possibilité d’utiliser ces matériaux durables, nouveaux, inertes pour remplacer des parties du corps malades ou endommagées Ingénieurs et scientifiques collaborent avec les médecins Protection des patients et réglementations gouvernementales minimales ● ● Tests sur les animaux / exigence vs biomatériaux Cette époque a permis d’établir les fondations des idées et matériaux pour le domaine des biomatériaux Les premiers biomatériaux: ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● ● Implants dentaires (1809 or – 1964 titane) Lentilles intraoculaires (1949) Valves vasculaires (1952) Pacemaker (1959) Valve cardiaque (1960) Prothèse de hanche (1958-1961) Prothèse de genou (1968-1972) Rein articifiel Cœur artificiel (1969) Implants mammaires en silicone (début ’60) Stents (fin 1980’s) Ratner et coll. (2004) http://www.sjmprofessional.com/EN-US/ProductLibrary/Pages/Regent-Valve-HP-Series-Standard-Valve.aspx http://dentalimplantbasics.net 28 Fibres naturelles et matériaux – pourquoi? Une question de force et d’élasticité ● Les fibres naturelles offrent une gamme de propriétés mécaniques, de structures chimiques et de fonctions biologiques pouvant être exploitées pour fabriquer de nouveaux matériaux structuraux biotechnologiques ● Les fibres protéiniques naturelles sont généralement fortes et élastiques Une question de ressemblance ● Les biopolymères sont très similaires et parfois identiques aux macromolécules que l’environnement biologique est préparé à reconnaître et à gérer d’un point de vue métabolique ● ● Pourrait supprimer les problèmes de toxicité, d’inflammation et de reconnaissance cellulaire souvent provoqués par les matériaux synthétiques Introduit la possibilité de concevoir des biomatériaux qui fonctionnent biologiquement au niveau moléculaire plutôt que macroscopique Gosline et al. (2002), Marcotte et al. (2007) 29 Fibres naturelles et matériaux – pourquoi? ● Biodégradabilité par les enzymes naturellement présents, garantissant la métabolisation de l’implant par des mécanismes physiologiques ● ● Désavantage pour la durabilité d’un implant Avantage pour un matériau devant remplir une fonction spécifique dans un temps donné ● On peut contrôler la durée de vie et la dégradation d’un biopolymère par réticulation ou autre modification chimique ● Plusieurs applications possibles en tant que fibres naturelles ou modifiées ● Désavantages: ● ● ● Souvent immunogènes Se décomposent à haute température ● Problème potentiel de mise en œuvre du matériau Variabilité naturelle (intraspécifique, interspécifique, d’un tissu à l’autre) ● Difficile de garantir des spécifications rigides pour le manufacturier Gosline et al. (2002), Ratner (2004) 30 Assemblage de protéines in vitro – quelques méthodes ● Pour utiliser des fibres protéiniques dans la conception de biomatériaux, on doit pouvoir les assembler dans des conditions contrôlées in vitro ● Auto-assemblage ● ● ● Méthode la plus courante Formation de fibres par polymérisation ou agrégation Dépend de la structure moléculaire de la fibre, du pH, de la force ionique, de la température ● Électrofilage (electrospinning) ● ● ● Utilise un champ électrique pour filer des fibres très fines (typiquement à l’échelle du micro ou du nano) à partir d’un liquide Réalisé avec soie, collagène, élastine, fibrinogène Fabrication de treillis pour membranes, génie tissulaire, pansements Scheibel (2005) 31 Assemblage de protéines in vitro – quelques méthodes ● Filage humide (wet spinning) ● ● ● ● Technique qui mime le processus naturel de production de la fibre Protéine surexprimée dans un organisme ● Soie d’araignée en bactéries ou baculovirus La solution de protéine est pompée à travers une filière et extrudée dans un bain de coagulation pour former une fibre La fibre est tirée vers une solution de réticulation ● ● ● ● ● L’élongation du fil stimule le développement de régions cristallines La réticulation et la cristallinité modulent, entre autres, la résistance des fibres La réticulation dépend des acides aminés présents dans la protéine et des conditions de filage Demande que la protéine soit sous forme étendue en solution Réticulation spontanée entre les chaînes voisines de certains acides aminés ● cystéine ● Agents de réticulation peuvent être employés ● ● ● Photo-réticulation des Tyrosine interchaînes par catalyse métallique Transglutaminase pour créer liens entre lysine et glutamate (laine) Glutaraldéhyde entre lysine et tyrosine Kim et al. (2005), Scheibel (2005), Poole et al. (2009) 32 Biomatériaux de fibroïne – introduction ● La soie du ver à soie et de l’araignée ont des propriétés qui en font des fibres de choix pour des applications non textiles ● ● ● ● ● ● Stabilité environnementale Biocompatibilité in vitro/in vivo Biodégradabilité protéolytique contrôlée Flexibilité morphologique Possibilité de traitements en solvants aqueux ou organiques Surface modifiable ● Adsorption ● La surface hydrophobe des matériaux de soie attire ou repousse les protéines selon le PI et l’hydrophobicité de la protéine, et le pH de la solution – Adsorption de BMP-2 ● Chimiquement ● ● ● Fibroïne peut être fonctionnalisée par réaction chimique avec les chaînes latérales des acides aminés Chimie du carbodiimide qui utilise les groupes amine ou carboxyle Limitée par le contenu en acides aminés modifiables – ● ● ● Ex.: Seuls 3.3% des acides aminés contiennent des groupes carboxyliques dans la chaîne latérale (Ex.: glutamate, aspartate) Modification au RGD, au BMP-2 La sériciculture permet d’obtenir la fibre en grande quantité (400 000 tonnes/an) La fibroïne peut être régénérée sous différentes formes: ● Fibre, éponge, gel, film Sofia et al. (2001), Karageorgiou et al. (2004), Vepari & Kaplan (2007) 33 Biomatériaux de fibroïne – applications ● La soie de ver à soie est utilisée depuis des siècles pour les sutures ● Tendons surtout ● Utilisée avec succès pour: ● ● Pansement, génie tissulaire d’os, cartilages, tendons et ligaments On a également utilisé la fibroïne comme matrice pour des applications biomédicales impliquant la culture cellulaire, l’immobilisation d’enzymes, et des gels pour dosage oral Vepari & Kaplan (2007) 34 Biomatériaux de fibroïne – formes ● Silk III = soie assemblée à l’interface air/eau = structure en hélice ● Silk II = sous forme de fibre = structure en feuillet- ● ● Structure qui exclut les molécules d’eau Insoluble dans plusieurs solvants incluant des acides et bases faibles et des chaotropes ● Silk I = soie sous forme soluble = sans structure ● ● In vitro en solution aqueuse Se convertit en Silk II lorsqu’exposée à la chaleur ou en passant à l’état de fibre (physical spinning), ou si exposée au MeOH ou au KCl Vepari & Kaplan (2007) 35 Biomatériaux de fibroïne – mise en œuvre ● ● Conception de matériaux de différentes morphologies à partir de formulations aqueuses ou en solvants organiques des fibres naturelles de soie On doit d’abord dissoudre les fibres en milieu aqueux avant de les transformer dans le format souhaité dégommage/purification/décreusage moulinage dissolution autres formes solubilisation partielle Vepari & Kaplan (2007) 36 Biomatériaux de fibroïne – mise en œuvre ● Autres morphologies obtenues à partir de fibroïne dissoute tapis non tissés films éponges aqueuses ou traitées au solvant hydrogels Vepari & Kaplan (2007) 37 Biomatériaux de fibroïne – tapis non tissés ● Deux types de tapis ● ● Non homogènes ● Solubilisation partielle des fibres de soie dans l’acide formique avec un peu de CaCl2 Homogènes ● Obtenues par électrofilage ● Fibres d’un diamètre de quelques nm à quelques m tout dépendant du traitement ● Électrofilage possible avec PEO; donne des fibres plus solides ● Traitement au MeOH des tapis de soie ● ● Pour augmenter le contenu en feuillets- Changement de porosité dû à la déshydratation ● ● ● Grand rapport surface/aire et rugosité propices à l’adhésion cellulaire Prolifération cellulaire Guident la formation de tissu connecteur vascularisé et réticulaire ● Intérêt: ● Ex.: ajout BMP-2 + hydroxyapatite pour promouvoir différentiation de hMSC Vepari & Kaplan (2007) 38 Biomatériaux de fibroïne – films ● Préparation: ● Films moulés à partir de solution aqueuse ou de solvants organiques ● Par mélange à d’autres polymères ● Modification des propriétés mécaniques et de la biodégradabilité ● On a avantage à générer des microstructures dans les films pour augmenter leur rugosité propice à l’adhésion cellulaire ● ● ● ● ● Mélange avec PEO + traitement au MeOH pour augmenter la cristallinité Contenu en PEO directement relié à la rugosité Mélange avec cellulose augmente la résistance mécanique Par traitement au MeOH ● Perméabilité des films de fibroïne pure à H2O et O2 dépend du contenu en Silk I et Silk II Recouvrement sur polymères comme polyuréthane et polycarbonate ● Augmente la prolifération et l’adhésion de fibroblastes ● Applications exploitent le capacité à permettre l’adhésion cellulaire ● ● Bandages Formation de tissu osseux ● Modification au RGD / couplage au BMP-2 Vepari & Kaplan (2007) 39 Biomatériaux de fibroïne – hydrogels ● ● ● Réseaux 3D de polymères qui gonflent en solution aqueuse sans s’y dissoudre Formés de structures en feuillets- Préparation: ● ● À partir de solution aqueuse de fibroïne La gélation est accélérée par: ● ● ● ● ● ● Augmentation de la concentration en fibroïne Augmentation de la température Augmentation de la concentration en Ca+2 Diminution de pH La température et la concentration en fibroïne permettent de contrôler la taille des pores Propriétés modifiables par combinaison à d’autres polymères ● Silk–elastin-like protein polymers (SELPs) ● ● ● Contenu en eau de l’hydrogel dépend uniquement du temps de gélation et de la concentration en biopolymère Propriétés non affectées par le pH, la force ionique et la température Applications: ● ● ● Vectorisation de cellules et de cytokines Promotion de la prolifération cellulaire Dosage oral contrôlé de médicaments ● Dépend de la concentration en fibroïne Kim et al. (2004), Vepari & Kaplan (2007) 40 Biomatériaux de fibroïne – éponges ● A.K.A. scaffolds, treillis tridimensionnels, échafaudages ● Applications en génie tissulaire pour: ● ● ● 200 m Adhésion, prolifération et migration cellulaire Transport de nutriments et de déchets Remplacement d’os ● Nouvel os en 8 semaines ● Préparation: -20oC, 250 mM NaCl ● ● À partir de solution de fibroïne (aqueuse et solvants) Au moyen de porogènes, par moussage ou lyophilisation ● ● ● Porogènes = sel (ex.: NaCl) ou sucres Peut fabriquer des gradients de pores en empilant des porogènes de tailles différentes Solvant = hexafluroisopropanol (HFIP) qui ne solubilise pas le sel ou les sucres ● Éponges à base de solvant ● Ainsi, l’éponge reflète la taille des porogènes ● Peuvent aussi être préparées par addition d’une petite quantité de solvant (comme MeOH et EtOH) avant le moulage et la congélation Vepari & Kaplan (2007), Byette et al. (2009), 41 Biomatériaux de fibroïne – éponges A) Empilement des porogènes solubles B) Ajout de la solution de fibroïne dans un solvant C) Diffusion de la solution entre les interstices D) Lavage à l’eau pour dissoudre le porogène, produisant des éponges avec gradients de pores Vepari & Kaplan (2007) 42 Biomatériaux de fibroïne – éponges ● Éponges à base d’eau ● ● Préparées à partir de prorogènes et en variant la concentration en fibroïne Porogènes = sels ● Solution supersaturée en sels ● Les sels donnent des tailles de pores de 500 – 940 mm ● Porogènes insolubles ● Ajout de la solution de fibroïne sur les billes de paraffine, lyophilisation, immersion dans MeOH, séchage à l’air ● Billes lavées avec hexane et éponges séchées sous vide ● ● L’augmentation de la concentration en fibroïne améliore la résistance de l’éponge Surface plus rugueuse que les éponges à base de solvant ● Explicable par solubilisation partielle du sel ● Meilleure adhésion cellulaire ● ● Plus grande porosité et meilleure résistance mécanique Meilleure dégradation enzymatique Vepari & Kaplan (2007), Uebersax et al. (2008) 43 Biomatériaux de fibroïne – propriétés non mécaniques ● Biodégradation ● ● ● ● ● ● Les fibres de fibroïnes conservent plus de 50% de leurs propriétés mécaniques après 2 mois d’implantation in vivo ● Définie comme biomatériau non dégradable par l’United States Pharmacopeia Se dégrade par l’action des protéases La vitesse de biodégradation des biomatériaux de soie peut être reliée à leur traitement, à leur contenu en feuillets- cristallins et aux conditions mécaniques et biologiques au site d’implantation Les films se biodégradent plus rapidement que les fibres de fibroïne ● Pour les films = perte de masse et augmentation de la cristallinité Pour une taille de pores similaires, la biodégradation des éponges aqueuses est ralenti avec l’augmentation de la concentration en fibroïne Pour une taille de pores similaires, les éponges à base de solvant se dégradent plus lentement que les éponges aqueuses ● 65% en masse après 21 jours contre dégradation complète en 4 jours pour les éponges aqueuses ● ● Attribuable à la rugosité et différences de cristallinité On pourrait réguler la biodégradation des matériaux de soie en contrôlant: ● Structure (masse molaire, cristallinité) et morphologie (porosité, taille des pores, rugosité) Vepari & Kaplan (2007) 44 Biomatériaux de fibroïne – propriétés non mécaniques ● Stérilisation ● ● ● Caractéristique particulière aux biomatériaux de soie Se fait par autoclavage sans changement de morphologie ou de cristallinité Se fait au moyen d’oxyde d’éthylène, de radiation- ou avec 70% éthanol Vepari & Kaplan (2007) 45 Biomatériaux de fibroïne – dans l’avenir ● Fibres protéiniques naturelles comme source d’inspiration à la conception de biomatériaux synthétiques ● Commercialisation des biomatériaux et implantation chez l’humain ● ● ● Déjà: sutures, éponges Remplacement osseux? Réparation moelle épinière, nerfs, … Nerve cells growing along fibres (purple) produced from a specially modified silk. The supporting Schwann cells, whose nuclei are shown in blue, attach to the fibres and support the growth of the nerve cells. http://news.bbc.co.uk/2/hi/science/nature/5172422.stm 46 Bibliographie ● Articles: ● Arnold & Marcotte (2009) Studying natural structural protein fibers by solid-state nuclear magnetic resonance, Concepts Magn. Res. 34A, 24-47. ● Byette, Marcotte, Pellerin, Paquin & Mateescu (2009) Effects of salt concentration and freezing temperature on the preparation of silk fibroin porous scaffolds for cell culture applications, in preparation. ● Colgin and Lewis (1995) Spider silk: a biomaterial for the future, Chem. 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A protein like BMP-2 can be introduced via amine groups reacting with the activated silk to form amide bonds. Cyanuric activated polyethylene glycol (PEG) reacts with amine and hydroxyl groups on silk fibroin surface. (C) Coupling of PEG on silk fibroin films generates a more hydrophilic surface and reduced attachment of human mesenchymal stem cells (hMSCs). (D) Coupling BMP-2 to silk fibroin films via carbodiimide coupling results in increased calcium deposition (increased calcein labeling) by differentiated hMSCs. Vepari & Kaplan (2007) 51