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Histoire de la pensée économique
Alain Marciano
Exam : question de cours  réponse précise
Citation à commenter  voir méthodologie
Chapitre 1 : Les Physiocrate et la naissance de la doctrine libérale
Le terme physiocrate vient du grecque, il a été composé à partir du terme « Physis » qui signifie
« nature », et de « kratos » qui veut dire puissance. Ca repose sur l’idée de la puissance de la nature :
la richesse vient de la nature, et donc de l’agriculture.
Le terme a été inventé par un physiocrate français qui s’appelle Dupont De Neumours. Et la
physiocratie c’est une école de pensée qui est typiquement et uniquement française. Elle n’a eu lieu
qu’en France, ne s’est développée qu’en France, et il n’y a que des physiocrates français. Par ailleurs,
elle est limitée dans le temps puisque sa durée de vie a été relativement courte, entre 1756 et 1780
environ. Toutefois, elle a eu une importance relativement grande, par son impact sur d’autres
économistes, en particulier sur Adam Smith (il a été influencé par les physiocrates), sur Marx. C’est
chez les physiocrates que l’on trouve les origines de la comptabilité nationale.
En fait la physiocratie marque la naissance de l’économie politique, c-a-d d’une conception de
l’économie comme discipline qui permet d’expliquer le fonctionnement des sociétés, la vie
politique. On ne s’intéresse plus uniquement à l’économie au sens stricte du terme, mais à
l’économie dans la société, dans la politique, dans les institutions.
Remarque : Le terme économie politique a été utilisé pour la première fois en 1615 par un
économiste français (Montchrétien) dans un ouvrage « Traité d’économie politique ». C’est
intéressant parce que le terme d’apparait qu’une seule fois dans le livre (dans le titre). Mais entre
1615 et 1756, ce terme n’est plus utilisé. On recommence à utiliser ce terme avec les physiocrates. A
la fin, c’est Adam Smith qui va vraiment inventer le concept d’économie politique (la développer
etc…)
Il y a 2 personnages particulièrement intéressants chez les physiocrates :


François Quesnay (le plus important)
Mirabeau
I. La critique du mercantilisme :
L’époque ou écrivent les physiocrates c’est l’époque du règne de Louis XV en France, et Quesnay
était le médecin de Louis XV. Ca va avoir un impact sur certaines de ses idées, il envisage la
circulation des richesses dans une économie comme la circulation du sang dans un corps humain.
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Louis XV a régné de 1723 à 1774, c’est la période qui précède la révolution française (important), et
d’une certaine façon la période dans laquelle écrivent les physiocrates est une période de crise. Cette
crise est triple :
o Crise budgétaire : L’Etat français est très endetté et toutes les tentatives pour
renflouer les finances publiques ont échouées.
o Crise politique : Cette crise politique est une conséquence de la crise budgétaire,
mais est aussi liée à la fin de la guerre de 7 ans, qui a duré de 1756 à 1763, et à
l’issue de cette guerre, la France perd toutes ses colonies américaines (canada,
Louisiane), ses colonies en Inde, ce qui évidemment renforce la crise des finances
publiques, et affaibli le pouvoir politique.
o Une crise agricole : Une crise de subsistance, il y a eu beaucoup de mauvaises
récoltes qui ont entrainé des famines. Il faut garder à l’esprit qu’à cette époque-là,
les gens se nourrissent principalement de pain. Donc la question du prix du blé est
une question centrale parce que dès que le prix du blé augmente, les gens meurent
de faim.
Pour les physiocrates, cette triple crise n’est pas le signe que la France est pauvre, mais montre que
la France est mal gérée. Il y a un des physiocrates qui s’appelle Herbert qui publie un ouvrage en
1755 qui s’intitule « essai sur la police générale des grains » (police des grains = réglementation des
prix du grain). Herber calcule que la France pouvait produire de quoi nourrir 31 millions d’habitants,
alors que la population à l’époque était estimé à environ 18 millions de personne. Ce qui veut dire
que ce n’est pas un problème de richesse, c’est un problème de gestion, et pourquoi est-ce qu’il y a
un problème de gestion ?
Pour les physiocrates, le problème de gestion vient des mercantilistes, donc la crise à été
provoquée par les mercantilistes.
Définition Mercantilisme : auteurs : Colbert, Montchretien. C’est une doctrine qui met l’accent sur le
commerce comme un moyen de créer des richesses. Pour eux, c’est le commerce, l’échange, qui crée
de la richesse. Et la richesse pour les mercantilistes, se mesure de façon monétaire. Pour le
mercantilisme français, le commerce est central, mais aussi l’industrie. C’est le commerce et
l’industrie qui créent de la richesse. Evidemment, l’agriculture dans cette approche vient en second
plan, elle est considérée comme secondaire, ou en tout cas n’est pas considérée comme un moyen
de créer de la richesse.
Pour les physiocrates, cette approche de l’économie est totalement fausse parce qu’elle met
l’accent sur le superflue (le commerce et l’industrie), et elle oublie ce qui est nécessaire (l’agriculture).
Par conséquent, pour sortir de cette crise, il faut renverser la logique mercantiliste et donner à
l’agriculture la place centrale et mettre le commerce et l’industrie au second plan.
Ils ne sont pas les premiers à avoir ces idées-là. Le premier à avoir présenté cette distinction entre
superflue et nécessaire (commerce et l’industrie / agriculture) c’est un économiste français du 17iem
siècle qui s’appelle Pierre le Pesant de Boisguillebert. Dans un ouvrage de 1695 « le détail de la
France sous le règne présent ». Il dit que la richesse vient de l’agriculture, et l’erreur des
mercantilistes, l’erreur de Colbert, est d’avoir oublié l’agriculture. Par ailleurs, il dit que la richesse ne
se mesure pas par l’importance de la masse monétaire, mais dans les biens qui sont produits. Il a
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donc une conception matérielle de la richesse (la richesse c’est un ensemble de bien, pas une
quantité d’argent). Autre élément très important : Boisguillebert propose une représentation de
l’économie sous la forme d’un circuit (la circulation des richesses dans l’économie permet de faire
fonctionner cette économie). Pour faire circuler les biens, il faut laisser la liberté du commerce, et la
liberté des échanges. C’est pour ça qu’on retrouve l’idée de libéralisme, il est fondamental de laisser
circuler les biens crée par l’agriculture selon les physiocrates. Cela se traduit par une formule qui est
très connue : « Laissez faire, laissez passer ». Donc pas de réglementation, pas de contrôle du
commerce, pas de protectionnisme.
II. Les principes économiques de la physiocratie
1. La théorie du produit net.
C’est une théorie qui est inventé par Quesnay. Il part de l’observation du fonctionnement
d’exploitations agricoles en établissant une comptabilité de ces exploitations. Il élabore une
comptabilité de ces exploitations, et dans cette comptabilité il invente un certain nombre de notions
comptables. Les deux notions les plus importantes sont les notions de produit brut et de produit net.


produit brut mesure la richesse du pays.
Et le produit net mesure la différence entre la richesse qui est obtenue par la production
(richesse produite), et la richesse qui est dépensée pour produire.
Quand Quesnay parle de richesses, il parle de richesses matérielles (comme Guillebert). Il écrit : « les
richesses d’une nation ne se règlent pas par la masse des richesses pécuniaires ». Ce n’est pas la
quantité de monnaie qui existe dans une économie qui permet de dire si cette économie est riche ou
pas, c’est la quantité de bien disponible.
Dans cette logique-là, l’industrie et le commerce ne créent pas de richesses, parce qu’elle ne crée pas
de bien. La classe des producteurs, la classe des artisans, des industriels et de commerçants, est
appelée par Quesnay la classe stérile. Stérile au sens où elle ne crée pas de richesse matérielle.
Exemple : Un menuisier qui fabrique une table ne crée pas de richesse, parce qu’il ne crée pas de
matière, la quantité de matière qu’il y a dans la table est exactement la même que la quantité de
matière dans le bois utilisé pour créer la table. Les artisans se contentent de transformer les biens.
Le produit net de cette classe stérile est égal à 0, parce que la richesse qui est créée a la même valeur
que ce qui a été dépensé pour créer cette richesse.
La seule classe productive, la seule classe qui crée des richesses, c’est l’agriculture. C’est la seule
classe qui crée un produit net positif. Parce que le travail de l’agriculteur est, d’après les physiocrates,
complété par le travail de la nature. Plus précisément (Nemours) : « Dieu est le seul producteur ».
Il reste une troisième classe qui est importante : La classe des propriétaires fonciers (les agriculteurs
ne sont pas propriétaires). Cette classe n’est pas non plus une classe productive (produit net = 0).
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La classe des propriétaires et la classe stérile jouent un rôle dans le fonctionnement de l’économie,
même si leur produit net est nul, parce qu’elles contribuent à faire circuler les richesses.
Comment ces trois classes fonctionnent ensemble ? voir tableau économique.
2. Le tableau économique (Quesnay).
Le tableau économique décrit le circuit que suivent les richesses à la fois matérielles et monétaires
dans l’économie. Cette idée de circulation des richesses est inspirée de la circulation du sang dans le
corps humain. Boisguillebert avait déjà proposé une représentation de l’économie sous la forme d’un
circuit, et un autre économiste (Cantillon) a aussi proposé une représentation de l’économie sous la
forme d’un circuit.
L’un de ceux qui a été inspiré par Quesnay et son tableau économique est Marx. Par ailleurs, on peut
dire que toute la comptabilité nationale trouve ses origines dans le tableau économique. C’est un
tableau qui est donc assez intéressant parce qu’il a inspiré des économistes importants, des idées
importantes.
La première formulation du tableau économique date de 1758. La deuxième version (la plus courante)
date de 1766, et c’est devenu la version de référence parce qu’elle introduit une notion importante
qui est la notion d’avance.
Les avances, ce sont les ressources qui sont nécessaires à la production. Il distingue 2 types
d’avances :


Les avances primitives : C’est ce que les économistes appellent maintenant le capitale fixe
(les machines, les immeubles, tout ce dont on a besoin de fixe pour produire).
Les avances annuelles : Ce qu’on appelle le capitale circulant (matières premières)
Il introduit un troisième concept, qui est le concept de reprise. Les reprises ce sont les ressources qui
sont prélevées pour reconstituer des avances (forme d’amortissement).
_________________________________ Fin séance 1 ______________________________________
Remarque : Ce tableau économique ne représente que les flux c.-à-d. la circulation de l’argent et la
circulation de matière. Tout le capital fixe, qui sert à produire, n’est pas représenté dans le tableau
économique.
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Explication du schéma sous forme de tableau :
5 milliards dans
l’économie, distribué
comme ça :
Classe productive
Classe propriétaire
Classe stérile
2 milliards
2 milliards
1 milliard
Représente les avances
annuelles
Ce sont des revenus (qu’ils tirent de
la location de leurs terres)
Avances annuelles.
Ces 2 milliards de revenu des
propriétaires proviennent d’un
paiement qui a été fait l’année
précédente par les agriculteurs.
Pour Quesnay, les propriétaires
répartissent leur revenu en 2 type
de dépenses : 50% d’achats faits
aux agriculteurs, et 50% a la classe
stérile. Il s’agit d’un flux sortant,
c’est de l’argent que les
propriétaires dépense, et il s’agit
d’un flux monétaire (c’est de
l’argent).
Dépenses :
Donc ici les agriculteurs
reçoivent 1 milliard des
propriétaires
La classe stérile reçoit 1
milliard des propriétaires.
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La classe stérile utilise cet
argent pour acheter 1
milliard aux agriculteurs (des
matières premières
nécessaires à la production)
et 1 milliard pour acheter de
la nourriture.
Donc les agriculteurs
gagnent encore 2 milliard en
flux monétaire.
La classe productive a gagné
3 milliards.
La classe productive va
utiliser le milliard qu’elle a
reçu des propriétaires pour
acheter des biens auprès de
la classe stérile.
Il lui reste 2 milliards, qui
vont être utilisés pour louer
les terres aux propriétaires
(rente).
Le 1 milliard restant (sous
forme de matière première)
va être utilisé par la classe
stérile pour reconstituer les
avances annuelles pour la
période d’après.
Enfin, les 2 milliards
d’avance des agriculteurs
restant vont servir d’avance
annuelle pour l’année
suivante.
Les 2 milliards d’avance annuelle c’est du capital circulant, quelque chose utilisé pour produire.
Et il faut bien voir qu’il y a parfois 1 milliard en flux monétaire, et parfois c’est en flux réel
(marchandise).
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Autre façon de le voir : La classe agricole met en vente 3 milliards de produits agricole, achetés pour
1 milliard par les propriétaires (subsistance), 1 milliard par les stérile (subsistance) et 1 milliard pour
les stérile (matières premières).
Les propriétaires ont un revenu de 2 milliard, qui provient de la rente payée par les agriculteurs. Ils
vont dépenser cet argent en achetant 1 milliard de subsistance aux agriculteurs, et 1 milliard de biens
a la classe stérile
La classe stérile a 1 milliard d’avance annuelle (matière première qu’elle va utiliser pour produire).
Elle va utiliser ce milliard pour acheter des subsistances à la classe productive, ensuite elle va gagner
1 milliard des propriétaires, qu’elle va dépenser en achat de matières premières à la classe
productive. Donc il reste 1 milliard de matières premières à la classe stérile, qui va constituer son
avance annuelle pour la période suivante.
Il faut voir chaque milliard comme des recettes mais aussi des dépenses, d’une part des biens
produits et de l’argent reçu de la vente des biens. Il y a un équilibre entre les flux entrants et les flux
sortants pour chaque classe.
On peut aussi représenter le même tableau sous la forme de flux monétaires et de flux réels. (bleu
flux réel, rouge flux monétaires).
Pr
1 milliard de biens de subsistance
1 milliard de produits manufacturés
Rente 2 milliards
Achats de subsistance (1 milliard)
A
achat d’1 milliard
Achat d’1 milliard de produit manufacturés
S
1 milliards de produits manufacturés
Achat d’1 milliard de biens de subsistance + 1 milliard de matières premières
1 milliard de biens + 1 milliard de matières premières
Le bouclage du circuit est assuré par la classe des propriétaires (ce qui permet d’équilibrer le tableau).
En effet, c’est assuré par les 2 milliards qu’ils dépensent à part égale auprès des 2 autres classes. Si la
proportion des dépenses des propriétaires entre les agriculteurs et la classe stérile, cela va affecter
l’équilibre d l’économie. 
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-
Si les propriétaires dépensent + auprès de la classe stérile, cela va entrainer un déclin de
l’économie puisque les agriculteurs vont avoir moins de ressources pour produire.
-
Si les propriétaires dépensent + auprès des agriculteurs, cela va entrainer une croissance de
l’économie parce que les agriculteurs vont produire plus, et comme ce sont les seuls à
produire de la richesse  croissance.
Mais l’équilibre dépend de la répartition parfait entre les 2 classes.
3. La liberté du commerce.
La liberté du commerce correspond au laisser-passer.
Pour garantir le bon fonctionnement de l’économie, il faut que les richesses et les biens puissent
librement circuler. Aussi bien dans le pays, qu’avec les autres pays. Cette liberté du commerce est le
seul moyen, pour les physiocrates, permettant la vente des produits agricoles à un « bon » prix. Un
bon prix c’est un prix qui est suffisant pour permettre aux agriculteurs à la fois de payer la rente et
les impôts, mais aussi de dégager un profit permettant d’investir pour les années suivantes. Donc les
physiocrates sont favorables au libre-échange.
A l’inverse, le protectionnisme va entrainer une surabondance de grains à l’intérieur du pays
(puisque les grains ne peuvent pas circuler librement avec les autres pays, il y en aura trop qui
resterons en France), et donc si l’offre augmente, les prix baissent. Donc il faut du libre-échange.
Cette idée du libre-échange va connaitre un certain succès dans le sens où elle va être mise en œuvre
par une loi du 18 juillet 1764. Elle va donc être mise en pratique par une politique publique. Cela
s’explique par le fait que les physiocrates étaient très proches du pouvoir politique et donc auront
influencé la décision du roi. Cette loi autorise l’exportation libre des grains.
Malheureusement, le résultat a été contraire à ce que les physiocrates espéraient. La conséquence
n’a pas été la baisse du prix, elle a été une hausse des prix, ce qui a entrainé le mécontentement des
français (hausse du prix du pain), et donc le roi a annulé cette loi, et on est revenu au
protectionnisme.
A partir de 1770, l’importance des physiocrates commence à décliner, et avec la mort de
Louis XV, leur influence va disparaitre complètement.
4. La croyance dans l’ordre naturel.
La croyance dans l’ordre naturel correspond au laisser-faire.
Pour les physiocrates la société est réglée par un ordre providentiel qui est voulu par Dieu. Il existe
un ordre naturel qui s’impose aux hommes et en particulier aux gouvernants. Cet ordre naturel
prend la forme d’un certain nombre de lois qui forment ce qu’on appelle le droit naturel. C’est le
droit naturel qui gouverne la société au sens où c’est le droit naturel qui dit aux gouvernements ce
qu’ils doivent faire.
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Exemple de règle qui correspond au droit naturel : Le respect de la propriété privé.
En même temps, puisqu’il existe un ordre naturel, les gouvernements n’ont pas grand-chose à faire,
simplement laisser cet ordre naturel s’exprimer.
Anecdote : le Roi demande à Quesnay :
-
« que feriez vous si vous étiez roi » il répond
-
« sire, je ne ferais rien ».
-
« mais alors qui gouvernerait ? »
-
« Les lois » (sous entendu, les lois naturelles), donc il faut laisser faire selon les physiocrates.
(Important) Dupont de Nemmour (1768) définit l’économie : « La science économique n’est rien
d’autre que l’application de l’ordre naturel aux gouvernements des sociétés ».
____________________________Fin séance 2_____________________________
Remarque : Il y a plusieurs niveaux de réflexion chez les physiocrates.

Le premier est plus fondamental. C’est le niveau de la réflexion philosophique. Cela concerne
la réflexion sur l’ordre naturel (comment fonctionne la société, le rôle de Dieu…). Ce niveau
est fondamental parce qu’il détermine les autres. Le niveau philosophique détermine la
conception technique.

Le second c’est le niveau technique, scientifique. Ce niveau correspond aux concepts
économiques (tableau économique, produit net, avances).

Le niveau des politiques publiques. Ce qu’on doit faire pour gérer la société quand on est au
pouvoir. Ça se traduit par le laisser-faire / laisser-aller.
Aujourd’hui, les économistes ne s’intéressent qu’au second niveau. Comme si on pouvait faire des
modèles sans avoir d’idées philosophique sur la nature, le monde, les Hommes. Chez les économistes
qu’on va voir, il y a aussi ces 3 niveaux.
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Chapitre 2 : L’école classique britannique et ses prolongements continentaux.
Le terme d’économie politique classique (qu’on utilise pour désigner Smith, Ricardo, Malthus …) a
été inventé par Karl Marx. Selon lui, l’économie politique classique cherche à comprendre en
profondeur le fonctionnement du système économique bourgeois ou encore du capitalisme, en
particulier en mettant l’accent sur les rapports de production. Pour Marx, le trait distinctif de cette
économie classique c’est d’avoir proposé le concept de valeur travail. Parce que pour lui, la valeur
des biens est fondée sur le travail qui est incorporé dans les biens.
Donc l’économie politique classique est importante parce qu’elle comprend les rapports de
production et elle les comprend parce qu’elle propose une théorie de la valeur travail.
Pour Marx, le premier économiste classique est William Petty (1623 – 1687). C’est le premier à
proposer une théorie de la valeur travail.
Marx oppose l’économie politique classique à ce qu’il appelle l’économie politique vulgaire.
L’économie politique vulgaire c’est donc une économie qui se contente des apparences et qui se
contente de vulgariser un certain nombre de concepts de façon à faire l’apologie, la justification du
capitalisme.
L’économie politique classique comprend en profondeur, l’économie politique vulgaire se contente
des apparences et adopte une démarche politique ou idéologique visant à justifier l’ordre social
bourgeois, le capitalisme. En terme économique, cette démarche non scientifique se traduit
évidemment par l’abandon du concept de valeur travail (on ne définit plus la valeur par le travail), et
par l’adoption d’un certain nombre de concepts tels que la théorie de la valeur utilité, la théorie de
l’offre et de la demande…
Il existe une autre définition de l’économie politique classique (donnée par Keynes) qui est
beaucoup plus large. Keynes inclus dans l’économie classique des économistes néoclassiques : Les
classiques sont les économistes qui croient dans l’efficacité des marchés et dans l’absence de crise de
surproduction.
Ça va quand même un peu dans le même sens que Marx (le capitalisme ne fonctionne pas bien tout
seul).
Un autre intérêt de ces définitions, est de souligner une caractéristique importante des économistes
classiques qui est que pour ces économistes il n’y a pas de pensée économique en tant que tel.
L’économie est forcément politique dans le sens où elle cherche à expliquer avec des concepts
économiques le fonctionnement de la société. Ils ne se contentent pas d’expliquer des phénomènes
économiques. Ils expliquent tout, ils expliquent l’ordre social.
Cette approche est possible parce que ces personnes écrivent à une époque où il n’y a pas une
division du travail entre les sciences. Donc on trouve dans leurs travaux un mélange de philosophie,
psychologie, histoire, économie.
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I. Les précurseurs.
1. L’ordre spontané et l’harmonie naturelle des intérêts.
Cette double idée est une idée centrale du libéralisme parce qu’à partir du moment où les intérêts
individuels s’harmonisent spontanément les uns avec les autres, il n’est plus nécessaire de prendre
des mesures de politique économique pour obliger les gens à collaborer, à coopérer entre eux
(puisqu’ils le font spontanément). Cela veut dire que les marchés sont toujours équilibrés, il n’y a pas
de défaillances (pas de crises).
C’est une idée très ancienne, qui remonte à un économiste Bernard de Mandeville (1670-1733). Il est
intéressant parce que son travail représente bien l’ordre spontané et l’harmonie naturelle des
intérêts dans ce qu’elle a de plus extrême. Il était médecin, en 1705 il a publié un poème qui
s’appelle « The grumbling hive » (la ruche murmurante). Et le sous-titre « ou les fripons devenus
honnêtes gens ». Le poème a connu un tel succès, en particulier à cause de son contenu polémique,
et il a écrit une version longue qui est paru en 1714 et qui s’appelle « la fable des abeilles ».
L’argument est le suivant : Les vices privés sont peut-être moralement condamnables, mais sont
économiquement et socialement utiles. Ça veut dire que l’envie, la jalousie, l’appât du gain, l’orgueil,
l’intérêt personnel… sont les fondements d’une société riche et prospère.
A contrario, les vertus telles que la bonté, l’humilité, la charité, la bienveillance, conduisent au
désordre et à la pauvreté.
La démonstration de Mandeville repose sur l’histoire d’une ruche. Il imagine des abeilles (dans une
ruche prospère), mais elles ont tous les vices privés. Mais, prise de remord, les ruches demandent à
Jupiter d’être transformées en abeilles vertueuses. La conséquence c’est que toutes les industries (en
particulier liées au luxe) disparaissent, le chômage arrive, et la prospérité disparait. L’idée sousjacente c’est que grâce à ces vices privés les individus travaillent, cherchent à obtenir des richesses,
innovent, inventent, et donc ça entraine la prospérité économique. Il y a donc un mécanisme de
composition des actions individuelles qui permet à ces actions de se combiner les unes avec les
autres et qui conduit à l’équilibre et à la prospérité. Chacun fait ce qu’il veut de son côté en ne se
préoccupant que de son propre intérêt, il y a une sorte de rivalité entre les individus qui est créatrice
de richesses.
Mandeville : « Le pire des individus travaille au bien commun ». (Aujourd’hui, supprimer l’économie
souterraine ça appauvrirait l’économie par exemple).
Mandeville dit que si les individus ont des comportements non moraux, cela crée de l’efficacité (il ne
se préoccupe pas du tout de la question de la répartition des richesses, parce qu’il pense que de
toute façon la société sera plus riche).
Donc le raisonnement se fait en terme d’efficacité parce que Mandeville pense que la prospérité
globale de l’économie va augmenter et pas en terme de répartition des richesses. Donc, toute idée
de morale sociale (travailler pour le bien des autres…) est totalement contre-productive. Plus vous
aidez les pauvres, plus vous contribuez à la pauvreté.
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Chez Mandeville on retrouve la même idée d’ordre spontanée que chez les physiocrates mais avec
une différence fondamentale qui est que chez les physiocrates l’ordre spontané est naturel (il vient
de Dieu) alors que chez Mandeville l’ordre est spontané parce que chacun poursuit son intérêt
personnel sans se préoccuper des autres.
Donc dans le passage des physiocrates à Mandeville, la dimension naturelle à disparu.
2. Ordre spontané et sympathie
Hume : Un des plus grands philosophe, représentant d’un courant « les lumières écossaises ». Par
opposition au courant des lumières (représenté en particulier par Kant). Hume et Kant sont en
opposition.
L’approche Kantienne est fondée sur la raison et sur la rationalité. Les lumières écossaises sont
fondés sur les sens. La différence c’est que pour les rationalistes (Kant), tout notre savoir provient de
la raison. Les êtres humains sont différents de tous les autres êtres vivants parce qu’ils sont dotés de
raison. Pour les lumières écossaises, tout notre savoir provient des sens (5 sens).
Condillac compare un être humain privé de ses sens à une statue (ce n’est qu’un objet).
_________________________________Fin séance 3_________________________________
Hume a écrit en 1739 « Le traité de la nature humaine ». Cet ouvrage est intéressant pour 2 concepts
particuliers :

Sa théorie de la connaissance c.-à-d. son explication de la manière dont les êtres humains
acquièrent des connaissances. Dans la vision rationaliste, notre savoir nous vient de notre
raison, mais pour Hume, les êtres humains ne sont pas doté d’une raison à priori. On ne peut
pas connaitre grâce à notre raison, mais grâce à nos sens ou à notre expérience. Ce n’est que
parce que j’ai l’expérience de quelque chose que je vais savoir.
Plus généralement, pour Hume, l’être humain est une page blanche, qui reçoit des
impressions de son environnement. Les impressions se regroupent par catégories et donc
progressivement, vont donner naissance à du savoir et à de la connaissance. On peut
regrouper les impressions en 2 grandes catégories : des impressions de plaisir et des
impressions de douleurs.
Et le motif principal de l’action individuelle va être d’essayer d’obtenir le plus de plaisir et le
moins de douleur possible. On va retrouver cette idée chez les utilitaristes et en particulier
l’un des plus importants : Bentham.
Donc ce qui est intéressant c’est que le savoir est lié à l’expérience individuelle, et donc cela
signifie que chaque individu a ses propres connaissances, son propre savoir, lié à son
expérience, et qui est totalement différent du savoir de tous les autres individus. Cela signifie
que cette approche est complètement individualiste et on peut dire que chaque expérience
est justifiée ou légitime (« tout le monde à raison »). Cet individualisme fonde le libéralisme
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(quand on est libérale, on est individualiste), et donc l’unité de base de la société ici c’est
l’individu (chaque individu).
Cela pose un problème, qui est : « comment peut-t-on expliquer la cohérence de la
société ? ». Comment peut-t-on expliquer qu’en général les sociétés soient ordonnées et
pacifiques, si le principe de base c’est l’individu.

Le concept de sympathie (sympathy en anglais, veut dire bienveillance, compassion). C’est un
principe qui permet à chaque individu d’éprouver les mêmes sentiments que les autres
individus. On éprouve de la compassion pour les autres parce qu’on est capable d’éprouver
les mêmes sentiments que les autres individus. On retrouve ça chez Adam Smith aussi, si je
vois quelqu’un souffrir, par compassion (« sympathy ») je vais éprouver une forme de
souffrance. Smith parle de quelqu’un qui voit un père pleurer son enfant. Evidemment,
l’homme qui voit ça, par « sympathy », ressent la souffrance de l’autre personne.
Donc par la sympathie, les individus communiquent entre eux, ce qui va avoir une
conséquence qui est que la sympathie donne naissance à des obligations morales. Cela veut
dire que, pour quelqu’un comme Hume (qui est individualiste), l’ordre social n’est pas fondé
uniquement sur l’intérêt personnel, mais aussi sur ce principe moral de compassion pour
autrui, de bienveillance. Il est important de noter qu’il y a une dimension morale très forte
dans cette pensée. Et on va retrouver cette dimension morale chez Adam Smith.
II. Le libéralisme d’Adam Smith.
Adam Smith (1723 – 1790) est un économiste philosophe écossais. Il a écrit en particulier 2 ouvrages
fondamentaux :
-
« La théorie des sentiments moraux » (1759)
-
« Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations » (1776). Cet ouvrage est
supposé marquer le début de l’économie politique classique. C’est Adam Smith qui fonde
l’économie politique avec la richesse des nations.
Il y a un concept central dans la théorie de Smith, c’est le concept d’échange. Il faut se souvenir
qu’Adam Smith écrit la richesse des nations au début de la révolution industrielle. A un moment ou la
société se transforme, s’organise de plus en plus autour du marché. Donc il est marqué par ce qu’il
observe, et cette importance croissante du marché. Pour lui le marché est important parce que les
êtres humains se caractérisent par un trait psychologique qui est la propension à échanger. Cette
propension à échanger va par exemple donner naissance à la division du travail.
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Il se pose 2 questions :
-
Pourquoi est-ce qu’on échange ? Quelles sont les motivations des individus dans les
échanges ? LA on va avoir 2 motivations, l’intérêt personnel et la sympathie ou la
bienveillance
-
Pour échange, il faut être d’accord sur la valeur des biens qu’on échange, mais qu’est-ce qui
fait la valeur des biens ?
1. « Le problème Adam Smith ».
« das adam smith problem » a été mis en avant par des philosophes allemands tels que Hegel, Marx.,
dans la deuxième moitié du 19ièm siècle. Hegel et Marx pensaient qu’il y avait une contradiction
fondamentale dans la pensée de Smith. Evidemment, pour Marx, l’objectif était de critiquer la
pensée de Smith.
Le problème : La théorie des sentiments moraux est un traité de philosophie morale dans lequel
Smith explique l’importance de la sympathie et de la bienveillance dans les comportements humains.
Il écrit : « il existe dans la nature humaine certains principes qui poussent l’Homme à s’intéresser à
la fortune des autres et qui lui rendent son bonheur indispensable. ». Donc, cette citation montre
que les individus sont préoccupés, se sentent concernés par la situation des autres individus.
En revanche, dans la richesse des nations, Smith ne parle que d’intérêt personnel. Il y a cette
fameuse phrase : « ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que
nous attendons notre diner, mais de leur soucis de leur intérêt propre. ».
Donc pour Hegel et Marx, il y a une contradiction entre ces deux ouvrages.

On peut la résoudre en disant qu’il existerait une séparation entre d’un côté les activités
économiques qui sont fondées uniquement sur l’intérêt personnel, et d’un autre côté toutes
les autres activités qui seraient fondées sur la bienveillance. Selon cette interprétation, Smith
va même plus loin, puisque donc selon lui il ne faut pas que les échanges marchands soient
fondés sur la bienveillance. D’une certaine façon, on retrouve ici les idées de Mandeville
puisqu’on a l’idée que la richesse marchande, l’échange, est fondé uniquement sur l’intérêt
personnel. Cela voudrait dire que la bienveillance n’est pas possible sur les marchés et
l’intérêt personnel n’est pas possible en dehors des marchés.
Cette explication est assez peu crédible parce que les motivations individuelles sont
mélangées. On peut avoir des relations basées sur l’intérêt personnel dans la famille, avec les amis,
on peut avoir aussi des relations basées sur la bienveillance dans des entreprises. Donc les
motivations individuelles se mélangent.

Autre résolution du problème : l’intérêt personnel est nécessaire pour qu’il y ai de la
bienveillance. Cela veut dire que je suis bienveillant vis-à-vis d’autrui parce que cela satisfait
mon intérêt personnel. Toutes les théories économiques de l’altruisme sont fondées sur
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l’intérêt personnel et font reposer l’altruisme sur l’interdépendance des fonctions d’utilités.
L’utilité d’un individu dépend de sa propre consommation, mais aussi de la consommation
d’un autre individu j : Ui = Ui(Xi, Xj). Cela veut dire que si l’individu j consomme +, l’utilité de i
augmente. Par conséquent, si i fait un cadeau à j, il augmente l’utilité et la satisfaction de j, et
donc il augmente sa propre satisfaction.
Donc il n’existe pas vraiment de problème, les deux ouvrages sont complémentaires : Soit
parce qu’ils font références à 2 types d’action (explication peu crédible), soit parce que les 2
motivations se mélangent dans les actions individuelles (plus crédible).
2. Valeur et répartition des revenus
A/ Une théorie de la valeur travail.
Smith propose une innovation dans son approche de la valeur. Il est le premier à distinguer valeur
d’usage et valeur d’échange. La valeur d’usage mesure donc l’utilité que procure la consommation
d’un objet particulier, et la valeur d’échange mesure la valeur que prend un objet dans l’échange. Le
résultat très important c’est que pour Smith, l’utilité ne joue qu’un rôle secondaire dans la
détermination de la valeur. Plus précisément, un bien qui n’a pas d’utilité, aura une valeur
d’échange nulle, mais à l’inverse, ce n’est pas l’utilité que procurent les objets qui détermine la
valeur que va prendre cet objet dans l’échange.
Smith prend l’exemple : Paradoxe de L’eau et des diamants : C’est ce qui permet de comprendre
pourquoi la valeur ne se détermine pas par l’utilité. L’eau est un bien très utile, donc il a une grande
valeur d’usage, mais il a une valeur d’échange faible. D’un autre côté, les diamants sont des biens qui
ont une valeur d’échange très importante, mai une valeur d’usage relativement faible.
Remarque : Evidemment ici on parle plutôt de l’utilité sociale des marchandises que de l’utilité
individuelle.
Avec ce paradoxe, Smith pense illustrer que la valeur d’usage, l’utilité, ne peut pas fonder la valeur
d’échange.
 La valeur des biens est donc déterminée par le travail. Le travail est la mesure réelle de la
valeur des marchandises. Evidemment le travail est lui-même une marchandise, donc la
valeur du travail est aussi déterminée par le travail.
Ça peut être interprété de plusieurs façons :

La valeur est déterminée par la quantité de travail nécessaire à la production des biens.
Autrement, la valeur est déterminée par la quantité de travail incorporée dans les biens.
Cette interprétation est une théorie de la valeur travail incorporée.

La valeur est déterminée par la quantité de travail que permet d’acheter ou de commander
les biens. (théorie de la valeur travail commandée).
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
La valeur est déterminée par la quantité de travail que le consommateur aurait dû effectuer
pour fabriquer le bien. (pas intéressante)
Smith semble hésite entre la première et la seconde théorie. Il dit que dans les sociétés primitives la
valeur repose effectivement sur le travail incorporé dans les biens, parce que dans ces sociétés, tous
les individus travaillent et possèdent entièrement le produit de leur travail. Il n’y a ni propriétaire
terrien, ni propriétaire de capital qui ne travaille pas et avec lesquels le travailleur devrait partager le
produit de son travail. Le travail s’échange directement contre le travail.
Exemple des daims et des castors : Si un individu met un jour pour attraper 2 daims, il va les
échanger contre un bien qu’un autre individu aura mis aussi 1 jours à capturer (le castor). Donc 2
daims vont s’échanger contre 1 castor parce que les 2 biens incorporent la même quantité de travail.
La situation va changer dans les sociétés non primitives (plus évoluées) parce que la terre est
possédée par des propriétaires terriens, et le capital par des capitalistes. Le propriétaire terrien et le
capitaliste vont tous les deux demander un revenu (une rente, le profit) au travailleur, ce qui
implique que le travailleur ne possède plus la totalité de son travail puisqu’il donne une partie du
produit de son travail à des individus qui ne travaillent pas. Par conséquent, dans ces sociétés
évoluées, le prix des marchandises ne dépend pas que du travail incorporé. Il dépend aussi de la
rente et du profit c.-à-d. il dépend aussi d’autres éléments que la quantité de travail nécessaire à sa
production.
Par conséquent, on ne peut pas appliquer la théorie de la valeur travail incorporée aux sociétés
évoluées capitalistes. On est donc obligé d’utiliser la théorie de la valeur travail commandée, ce qui
signifie que dans une société moderne, un homme est riche ou pauvre suivant la quantité de biens
qu’il peut acquérir c.-à-d. suivant la quantité de travail qu’il peut commander.
Remarques :
-
Cette théorie s’oppose à la fois à la théorie mercantiliste de la richesse et à la théorie des
physiocrates.
-
Cette conception de la valeur est complètement tautologique (circulaire), parce que le prix
des marchandises est donc déterminé par la quantité de travail que ces marchandises
commandent (peuvent acheter). Le travail est aussi une marchandise, donc le prix du travail
est déterminé par la quantité de travail que le travail commande, ce qui veut dire qu’au final,
le prix des marchandises est déterminé par le prix des marchandises.
Supposons que l’heure de travail valle 5 euros, donc un i=objet qui vaut cinq euros va
pouvoir commander une heure de travail, mais le travail se paye 5 euros parce qu’il peut
commander des objets pour une valeur de 5 euros.
_______________________________fin du cours 4 _________________________________
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Pour résumer la valeur chez Adam Smith est fondée plutôt sur la valeur d’usage. La valeur d’usage
est fondée sur l’utilité, mais l’utilité de détermine pas la valeur d’échange, puisque la valeur
d’échange est déterminée par le travail, et plus précisément par le travail que commande le bien, c.à-d. la quantité de travail que permet d’acheter un bien. Ceci n’est valable que dans les sociétés
« évoluées ». Dans les sociétés « primitives » on a une théorie de la valeur travail incorporée (le
travailleur s’approprie la totalité de son travail).
Smith utilise donc une théorie de la valeur travail commandée parce qu’une partie de la valeur des
biens (rente ou profit) n’est pas déterminée par le travail (donc on ne peut plus utiliser une théorie
de la valeur travail incorporée).
On va retrouver cette idée-là chez Malthus.
D’une certaine façon, on pourrait dire que Smith propose une vision un peu historique de la
détermination de la valeur dans le sens où il explique que la valeur dépend du type de société.
Suivant le type de société, la valeur est plutôt déterminée par le travail incorporée ou commandé.
Quoi qu’il en soit, que l’on utilise l’une ou l’autre de ces théories, il se pose un dernier problème :
Comment mesurer cette valeur ? Comment choisir une unité de compte, une unité de mesure qui
soit invariante.
La première à laquelle on pense c’est la monnaie. Smith dit que la monnaie n’est pas une bonne
façon de mesurer la valeur d’échange parce que si le prix exprimé en monnaie d’un bien change, on
ne saura pas si ce changement est dû à une variation de la valeur de la marchandise ou une variation
de la valeur de la monnaie. Donc cette mesure monétaire de la valeur correspond à ce qu’on appelle
le prix nominal, et le prix nominal est incertain.
Il faut trouver une mesure qui ne varie pas. Smith propose d’utiliser le prix du blé comme mesure de
la valeur d’échange, il pense que c’est une mesure invariante. Le prix du blé peut varier dans le court
terme, mais à long terme il va demeurer stable parce qu’à cette époque le blé est la base de
l’alimentation, donc c’est une marchandise dont on ne peut pas se passer. Donc quand on doit
mesurer la valeur d’échange, on doit la mesurer en terme réel en utilisant le prix du blé.
Le prix du blé va aussi déterminer les salaires, puisque les salaires sont le revenu du travail, le travail
est une marchandise.
B/ La répartition des revenus :
Pour les économistes classiques, il existe 2 types de répartition : une répartition primaire et une
répartition secondaire. Cela signifie que les revenus se répartissent en 2 catégories : les revenus
primaires et les revenus secondaires.

Les revenus secondaires : Ce sont des revenus de redistribution, de transfert. En particulier
les intérêts (sur les prêts), et les salaires versés aux travailleurs improductifs. Les travailleurs
improductifs sont ceux qui ne participent pas à la fabrication, au transport ou à la
commercialisation des objets. En particulier, on trouve les personnes qui travaillent dans les
services, ce sont des travailleurs improductifs (à l’époque il y a pas beaucoup de services, les
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avocats, médecins, prof) et donc leur revenus sont des revenus secondaires (même si ce sont
des salaires).

Les revenus primaires : C’est le revenu des travailleurs productifs, qui est important pour
comprendre l’origine de la richesse. On distingue 2 catégories de revenu primaire :
o Les revenus de la propriété : Ils sont composés par la rente (revenu des propriétaires
terriens) et le profit (revenu des capitalistes). Ces deux revenus sont des revenus
résiduels parce qu’ils sont obtenus par différence, c’est ce qui reste après que le
revenu du travail ai été payé.
Remarque :

Smith ne propose pas du tout de théorie de la rente, il ne s’y intéresse pas.

Par ailleurs, il n’y a pas de revenus spécifiques pour les entrepreneurs. C’est
une catégorie à part, spécifiques, ce ne sont pas des capitalistes comme les
autres. En économie, ils sont très importants parce qu’ils innovent, créent
des nouveautés. Le premier à avoir insisté sur le rôle des entrepreneurs c’est
Say, et Schumpeter.
Mais pour Smith, l’entrepreneur est rémunéré soit comme capitaliste (profit),
soit avec un salaire, lorsqu’il est le salarié d’un capitaliste. Donc
l’entrepreneur, chez Smith, n’est pas distingué comme un agent économique
particulier.
o Le revenu du travail (le plus important) : Le salaire est la source de tous les autres
revenus. Le travail est la source de la richesse et le salaire est la source des revenus
qui circulent dans l’économie. Ce salaire peut avoir 2 valeurs comme n’importe
quelle autre marchandise. Donc chaque marchandise a deux prix : un prix naturel et
un prix courant. Il existe donc un salaire naturel, et un salaire courant.

Le prix courant et le salaire courant : C’est le salaire qui est déterminé par les
conditions d’échanges, c’est donc le prix de marché (confrontation offre et
demande).

Le prix naturel ou le salaire naturel : Il représente la somme des revenus
(salaire, rente et profit) qui ont été dépensés pour produire ce travail. Dans
le cas du travail, le salaire naturel c’est ce qui a été dépensé pour produire le
travailleur, c’est la valeur des biens qui est nécessaire à l’existence du
travailleur. Ca correspond donc au salaire de subsistance.
Evidemment, le salaire courant peut différer du salaire naturel (salaire de
subsistance). Dans une économie en croissance par exemple, le salaire courant va
être plus élevé que le salaire naturel. En effet, dans une période de croissance, la
demande augmente, donc la demande de travail augmente, et donc les salaires
augmentent aussi. Cela veut dire que la croissance économique protège les
travailleurs, puisqu’elle leur assure un salaire plus élevé que leur salaire de
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subsistance. Ceci n’est possible que si la croissance est continue, parce qu’il y a une
contrepartie à cet écart positif entre le salaire courant et le salaire naturel : Si le
salaire courant est supérieur au salaire naturel, cela va entrainer une augmentation
de la population. Et si la population augmente, l’offre de travail augmente, et si
l’offre de travail augmente, le salaire baisse. Ca veut dire que sur le long terme, on
ne peut pas espérer qu’il y ai une différence entre le salaire courant et le salaire de
subsistance, dans le long terme le salaire courant va nécessairement tourner autour
du salaire de subsistance. Et cette idée que le salaire courant ne peut pas différer de
manière significative du salaire de subsistance c’est ce qu’on a appelé la loi d’airain
des salaires.
A l’inverse, si le salaire courant est inférieur au salaire de subsistance, les gens ne
peuvent plus subsister, ils meurent, la population baisse, l’offre de travail baisse, le
salaire augmente.
Donc dans l’économie, il y a des mécanismes contre lesquels on ne peut pas lutter et
qui se reproduiront systématiquement.
3. Division du travail et théorie de la main invisible
Le terme de main invisible apparait une fois dans la richesse des nations. « Ce n’est que dans la vue
d’un profit qu’un homme emploi son capital, et en dirigeant cette industrie de façon que son
produit ai le plus de valeur possible, il ne pense qu’a son propre gain ; En cela, il est conduit par
une main invisible à remplir une fin qui n’entre nullement dans ses intentions. ».
La fin en question, c’est la richesse de la nation, la prospérité. Chacun contribue à la prospérité parce
qu’il poursuit son propre gain (son propre intérêt), et surtout sans l’avoir voulu. Donc le mécanisme
de la main invisible nous dit que les actions individuelles ont des conséquences inattendues,
personne n’a cherché ce qui se passe, personne n’a cherché à produire la situation qui arrive, mais ça
arrive malgré tout. C’est pour ça qu’on parle aussi d’ordre spontané. Ces conséquences inattendues
peuvent être positives ou négatives.
La conséquence inattendue positive la plus importante c’est la division du travail. C’est quelque
chose que personne n’a cherché, mais ça se produit. Pourquoi ? La division du travail c’est en fait la
conséquence involontaire de cette propension à échanger qui caractérise les Hommes. Cette
propension à échanger conduit les individus à vouloir produire plus pour pouvoir échanger plus, et
donc à diviser leur travail parce que c’est le meilleur moyen pour permettre cette augmentation de
production.
Le travail est la source de la richesse des nations à condition qu’il soit organisé de manière efficace c.à-d. à condition qu’il soit divisé. S’il y a un mécanisme de main invisible qui conduit à la division du
travail et à la prospérité générale, il n’est pas nécessaire d’intervenir dans le fonctionnement de
l’économie, donc il n’est pas nécessaire que l’Etat intervienne. Donc Smith est plutôt favorable à une
intervention minimale de l’Etat, mais cela ne signifie pas que cela doit être une intervention nulle.
L’Etat peut intervenir pour 2 types d’activités :
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-
Pour protéger les droits de propriété (fonction régalienne, l’état protecteur)
-
Pour produire certains biens. L’Etat doit pouvoir produire des biens indispensables au
fonctionnement de la société mais qui ne dégagent pas assez de profit pour être produits par
des entreprises privées (des biens publics). Il est même d’accord pour que l’Etat corrige les
défaillances du marché, c.-à-d. les défaillances de la main invisible.
Quand la main invisible entraine des conséquences négatives, Smith est favorable à
l’intervention de l’Etat, en particulier, Smith est favorables aux lois pour lutter contre la
pauvreté, parce que cette pauvreté était un produit négatif de la main invisible.
Donc il est favorable au laisser-faire, mais avec un Etat qui peut intervenir malgré tout. Smith
n’était donc pas un ultra libéral.
4. Accumulation, croissance et commerce extérieur.
La main invisible fonctionne à l’intérieur des nations, mais aussi entre les nations, et la division du
travail existe aussi entre les nations. Il existe un ordre spontané, une harmonie naturelle, des intérêts
entre les individus mais aussi entre les nations. Cette harmonie est fondée sur la division
internationale du travail, et le libre échange (le commerce).
Le commerce est donc l’origine d’une forme de paix et de stabilité entre les nations, c’est aussi la
source de la prospérité des nations en général, et en particulier la liberté du commerce permet
d’éviter que les économies tombent dans ce que Smith appelle l’état stationnaire c.-à-d. sans
croissance.
Explication : L’accumulation (l’investissement) est la condition de la croissance économique. En
même temps, l’accumulation est rendue possible par l’épargne. Or, qui épargne ? Ce sont les
capitalistes, donc l’épargne vient du profit. Le profit est la condition, le moteur de la croissance
économique. Malheureusement, le taux de profit que reçoivent les capitalistes va baisser dans le
long terme parce que les possibilités d’investissement sont de moins en moins importantes, donc la
rémunération des capitalistes est de plus en plus faible.
La conclusion c’est que dans le long terme, les économies tendent vers une situation de croissance 0
parce qu’il y a de moins en moins de profit et donc de moins en moins d’investissement et de
croissance. Pour sortir de cette situation, la seule solution est le commerce avec les autres pays. En
effet, ce commerce offre des débouchés aux capitaux, il offre des possibilités d’investissement. Et
grâce à ses investissements, le taux de profit va remonter.
Ces possibilités de croissances sont renforcées par la division internationale du travail et la
spécialisation des pays. Smith propose une théorie en fonction de la spécialisation en termes
d’avantage absolu.
Le libre-échange et donc le laisser-passer garantie la croissance économique et permet d’éviter l’état
stationnaire.
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Conclusion : D’une certaine façon, il est clair que Smith a donné des éléments permettant de fonder
la doctrine libérale puisqu’il justifie le laisser-faire (main invisible, division du travail) et le laisserpasser (division du travail, liberté du commerce). Donc d’une certaine façon Smith défend le
libéralisme, il est aussi défenseur de l’intérêt personnel puisqu’il dit « ce n’est qu’en se préoccupant
de soi qu’on contribue au bien des autres ». Toutefois, son approche contient des éléments qui sont
différents de la doctrine libérale radicale. Smith n’est pas un ultra libéral parce qu’il considère quand
même que la sympathie, la bienveillance jouent un rôle important dans le fonctionnement de
l’économie et des sociétés. Il y a donc une dimension morale dans le libéralisme de Smith.
Smith n’était pas un idéaliste, ce n’était pas un idéologue, et il se rend parfaitement compte des
imperfections du marché, des imperfections du mécanisme de main invisible. Donc il ne dit pas que
le marché, le capitalisme, le libéralisme, est un système parfait. C’est un système qui doit être corrigé,
et l’intervention de l’Etat peut permettre cette correction. Mais évidemment, l’intervention est
seulement là pour corriger les défaillances, pas plus. Ou encore, Smith croit fondamentalement dans
l’harmonie naturelle des intérêts individuels.
III. Malthus et la loi de la population
Malthus partage avec Ricardo une forme de pessimisme qui n’existe pas chez Adam Smith. Adam
Smith était fondamentalement optimiste, alors que Malthus et Ricardo sont pessimistes.
Ca s’explique par le fait que Malthus et Ricardo écrivent à des périodes totalement différentes de la
période à laquelle écrivait Smit. Smith écrivait au début de la révolution industrielle à une époque où
les effets positifs de la révolution industrielle dominaient. Malthus et Ricardo écrivent à un moment
où les effets négatifs de la révolution industrielle se manifestes pleinement, on peut voir
concrètement que la révolution industrielle a un effet très négatif.
Par ailleurs, la révolution industrielle a entrainé une augmentation de la population très importante
en Angleterre, ce qui a obligé l’Angleterre à importer des céréales, des grains, qui a conduit aussi à
une augmentation des prix, et qui a conduit à l’imposition d’un système de taxes mobiles dans les
lois qui s’appellent les « Corn Laws ». Les propriétaires fonciers n’étaient pas satisfaits des
importations de grains, parce que ça faisait baisser les prix. Ils ont donc obtenu que soit votées des
lois (les Corn Laws) qui introduisent des taxes mobiles : Quand le prix baissait, les impôts
augmentaient pour maintenir le prix du blé à un certain niveau.
C’est un aspect que Smith n’a pas pris en considération, le rôle du politique dans l’économie.
En bref, la situation est beaucoup moins optimiste qu’au début de la révolution industrielle. Ce
contexte la va énormément marquer Malthus.
Malthus (1766 – 1834) : Il a étudié les mathématiques à Cambridge, a obtenu son diplôme en
1788 et la même année est devenu pasteur dans une petite église « Oakwood ». En 1805, il est
devenu professeur d’histoire, politique, commerce et finance et le titre a été changé en professeur
d’histoire et d’économie politique. Donc Malthus est en fait le premier professeur d’économie
politique en Angleterre.
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1. Malthus, La loi de la population ou l’utilité de la misère ?
A/ La croissance de la pauvreté et les lois d’aides aux pauvres.
______________________________fin séance 5_________________________________
Le 26 septembre pas cours d’histoire.
(contexte : révolution industrielle, qui produit un certain nombre de résultats négatifs)
Autre élément de contexte qui va fortement influencer Malthus : La croissance de la pauvreté a la fin
du 18° siècle et les lois qui existaient en Angleterre pour aider les pauvres (les « Poor Laws »).
En Angleterre il y a une relativement longue tradition d’aide aux pauvres. Les premières lois datent
du début du 17° siècle, l’idée principale qui en ressort était que les paroisses devaient aider les
personnes qui ne pouvaient pas gagner suffisamment d’argent en travaillant. Donc chaque paroisse
avait l’obligation d’aider les pauvres et pour cela pouvait prélever un certain impôt.
L’un des problème qui se pose dans ces mesures, c’est que certaines paroisses étaient riches,
d’autres étaient moins riches, et donc il y avait des inégalités entre les paroisses (les paroisses les
plus riches pouvaient mieux aider les pauvres … ), donc il y avait des mouvements de population de
façon à aller dans les paroisses les plus riches pour chercher de l’aide.
On a observé au fur et à mesure une croissance de la pauvreté, donc de plus en plus de besoins
d’aide, et de moins en moins de capacité à aider au cours du 17° siècle. Il y a eu un moment ou le
système est devenu incapable de faire face à la pauvreté, dans les années 1790. Au début de ces
années, la pauvreté était tellement importante qu’un système a été mis en place, qu’on appelle le
système de Speen Hamland.
En fait, en 1795, dans le village de Speen Hamland, il a été décidé de donner aux travailleurs un
revenu dépendant du prix du pain. Plus précisément, quand le prix du pain dépassait un certain
niveau, les personnes qui travaillaient recevaient immédiatement un revenu complémentaire. On
peut dire que ce système est similaire au revenu minimum d’insertion. C’est une sorte de RMI dans le
sens où c’est un revenu qui ne dépend pas du travail (il faut travailler pour l’obtenir, mais ce n’est pas
un revenu du travail), et c’est un complément par rapport au coût de la vie. Donc c’est une avancée
sociale relativement forte.
On pourrait dire que si le salaire tombe en dessous du salaire de subsistance, il y avait un
complément versé pour que le revenu soit au moins égal au revenu de subsistance.
On parle de système de Speen Hamland parce que ça n’a jamais été voté légalement, c’est
simplement arrivé comme ça, et a connu un succès énorme.
Très rapidement, le nombre de personnes bénéficiaires de ces redistributions a augmenté, d’autant
plus que peu de temps après, la guerre avec la France et donc le blocus continental instauré par
Napoléon et les mauvaises récoltes ont entrainé des augmentations du prix du pain, du prix du blé, et
donc il y a eu de plus en plus de bénéficiaires de ce système.
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Il y a un autre élément qui explique ce succès. Les entreprises avaient intérêt à ce que ce système
fonctionne, elles avaient intérêt à proposer des salaires plus bas parce qu’elles savaient qu’un
complément serait versé aux travailleurs. On se retrouve avec un système qui a du succès parce que
non seulement les travailleurs le demandent, mais les entreprises sont contentes qu’il existe
également.
Le système a été abrogé en 1834.
Il faut retenir qu’on est dans une période où il y a beaucoup de pauvres et des lois pour aider les
pauvres.
B/ Faut-il vraiment aider les pauvres ?
Il y a eu des débats autour de ces lois sur la pauvreté. Parmi les gens qui étaient favorable à ces aides,
il y avait un philosophe : Godwin (qui était un ami du père de Malthus).
Godwin a publié un ouvrage en 1793 qui s’appelle « political justice » dans lequel il défend les
systèmes, les lois d’aide aux pauvres. Il admet tout a fait que les lois d’aides aux pauvres vont
entrainer une augmentation de la population (qui va devenir le problème central pour Malthus), mais
d’un autre côté, il pensait aussi qu’en contrepartie, un changement de la nature humaine (dans les
comportements, mentalités) allaient permettre de faire face à ces augmentations de population, et
en particulier, il pensait que les gens seraient de plus en plus éclairés, la raison allait l’emporter sur
les sens et les plaisirs intellectuels allaient se développer et progressivement allaient remplacer les
plaisirs du sexe. Donc sa conclusion c’est qu’on peut aider les pauvres, parce que ces mesures d’aides
vont permettre le développement des capacités intellectuelles des pauvres ce qui va limiter
l’augmentation de la population.
Malthus n’est pas du tout d’accord avec cet argument, il trouve Godwin trop optimiste. Ce qui le
conduit à ce pessimisme, c’est ce qu’il observe dans sa propre paroisse. Au moment où il arrive dans
cette paroisse, il se produit un mini boom de la population. Pendant la période qui va de 1789 à 1798,
on observe environ 16 baptêmes par an, et 5 enterrements. Cette observation va influencer
fortement Malthus.
Il constate la chose suivante : « Les gens à Oakwood sont petits, ils sont petits parce qu’ils sont mal
nourris, ils sont mal nourris par ce qu’ils sont trop nombreux, et ils sont trop nombreux parce qu’ils
sont incapables de faire preuve de retenu morale. ». C’est cet argument qui va être au cœur de sa
théorie sur l’évolution des populations.
C/ La loi sur la population.
Malthus écrit donc l’ouvrage « essai sur le principe d’une population » publié en 1798
(anonymement). Il pensait que sa thèse était tellement pessimiste que ce serait mal perçu. Il s’avère
que l’ouvrage est un succès phénoménal, il publie donc dès 1803 une deuxième édition (avec son
nom) et il y aura en tout entre 1798 et 1827 6 éditions.
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L’argument : Malthus part d’un exemple qui est celui du rythme d’évolution de la population dans
l’économie américaine. Il pense que l’on peut dire que la population dans ces colonies double tous
les 25 ans. Cela veut dire que la population augmente à un rythme qui est celui d’une progression
géométrique (1, 2, 4, 8, 16….).
En revanche, les subsistances augmentent simplement sur le rythme d’une progression arithmétique
(1, 2, 3, 4, 5…). Donc si on part de la situation actuelle (1798) où il y a, supposons, 1 milliards
d’habitants pour 1 milliards de subsistances. On voit que si on passe d’une année à l’autre, très
rapidement les subsistances ne suffisent plus pour nourrir la population.
Il donne deux chiffres : Il dit que dans 3 siècles, la population sur la terre sera de 4096 milliards, et les
subsistances seront de 13 milliards, ce qui signifie qu’il y a 4083 milliards d’habitants en trop !
Malthus est tout à fait conscient du fait que comparer ces deux ratio n’est pas très réaliste, parce
qu’on arrivera jamais a 4096 milliards parce que les gens vont mourir avant, il y a des mécanismes
qui vont empêcher l’évolution de la population.
D/ Comment résoudre le problème posé par cette loi ?
Nous avons 2 variables, la population et les subsistances. En réalité, on ne peut pas agir sur les
subsistances, on ne peut pas les augmenter, parce que la quantité de terre est limitée et donc les
rendements des terres sont décroissants.
Donc la seule variable d’ajustement c’est la population. Pour ca il y a trois mécanismes de contrôle :

Préventifs : les mécanismes qui empêche la population de trop se reproduire. C’est le
contrôle des naissances, l’abstinence, la retenue morale

Les mécanismes positifs : Ce sont des mécanismes à postériori, c.-à-d. une fois que la
population s’est reproduit. Les famines, les guerres, les épidémies, la pauvreté… Tous ces
phénomènes sont des modes de contrôle positif de la population.
Donc il existe bien des moyens.
La malthusianisme c’est cette idée selon laquelle il existe des moyens qui éliminent les excédents de
population. Une politique malthusienne consiste a laisser disparaitre tous les individus (ou animaux,
ou entreprise) qui sont en surplus par rapport à ce que le marché peut absorber par exemple.
Malthus pensait aussi que les pauvres sont ceux qui se reproduisent le plus, le problème de la
population ne vient pas des riches.
Tout de même, pour Malthus les individus sont quand même capable de prévoir les effets négatifs
d’une trop grande reproduction, ils sont capables en particulier de prévoir les coûts liés au fait
d’avoir trop d’enfants, et donc ces capacités d’anticipation conduisent les gens à faire preuve d’une
retenue. Donc il n’est pas nécessaire de contrôler leur comportent, ils peuvent se contrôler euxmêmes.
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E/ Malthus et la théorie de la sélection naturelle.
La théorie de la sélection naturelle en biologie a été inventée par 2 biologistes : Wallace et Darwin.
Darwin a publié « l’origine des espèces » en 1859. Il cite 1 économistes dans cet ouvrage, Malthus.
Malthus occupe une place particulière chez Darwin, puisqu’il explique que c’est en lisant « l’essai sur
la population » de Malthus, qu’il a trouvé l’idée de la sélection naturelle. Donc Darwin attribue à
Malthus l’inspiration principale qui l’a conduit au principe de sélection naturelle. L’idée que Darwin
retiens, c’est l’idée que les espèces (les hommes, les animaux ou les plantes) produisent plus de
descendants que ce qui pourra en survivre. Cela conduit Darwin à proposer 2 principes qui sont les 2
principes qui expliquent la manière dont les espèces évoluent :

Un principe de sélection : Une partie des trop nombreux individus qui sont nés va disparaitre
spontanément.

Un principe de survie : Ne peuvent survivre que les meilleurs des individus (meilleurs c.-à-d.
les mieux adaptés).
L’explication des deux principes : Produire trop de descendants crée un environnement concurrentiel
et donc il n’y a que ceux adaptés qui vont survivre. Ce processus est totalement spontané et non
intentionnel.
2. Les grands thèmes de l’économie malthusienne
Malthus est essentiellement connu pour sa loi sur la population, pour son impact sur Darwin (qui
sont assez mal vu).
Il y a un commentateur de la fin du 19° siècle qui résume la pensée de Malthus en disant : « Malthus
croyait que l’offre des biens pouvait excéder la demande et donc que ça allait entrainer des crises de
surproduction, et c’est à peu près tout ce à quoi il pensait en terme économique. ». Dans ces
conditions, on peut difficilement dire que Malthus était véritablement un économiste. Pourtant,
Malthus a été le premier professeur d’économie politique en Angleterre, il a été très proche de
Ricardo et de Jean-Baptiste Say, et il a aussi écrit des ouvrages économiques relativement
intéressants en particulier « principe d’économie politique » (1820), et ses idées économiques sont
relativement intéressantes et innovantes pour l’époque et en particulier sur les 3 aspects qu’on va
voir :
(Valeur travail, rente, et demande)
A/ La théorie de la valeur travail chez Malthus.
Il faut parler du Ricardo, parce que Malthus réagit à ce qu’a dit Ricardo
Ricardo a critiqué la théorie de la valeur travail commandée de Smith, et a proposé une théorie de la
valeur travail incorporée.
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Malthus, lui, va prendre une position entre Smith et Ricardo. Il accepte la critique que Ricardo fait de
la théorie de valeur travail commandée (tautologie) mais il n’accepte pas la théorie de la valeur
travail incorporée parce que « le travail qui est employé à la production des marchandises ne
détermine pas leur coût, et donc ne détermine pas leur rapport d’échange, parce qu’au coût du
travail on doit ajouter le profit et la rente. ».
Et donc entre les deux, Malthus préfère choisir la théorie de la valeur travail commandée. La valeur
d’une marchandise a toujours pour mesure la quantité de travail contre lequel elle peut s’échanger.
En plus, il ajoute un élément qu’on ne trouve ni chez Smith, ni chez Ricardo, concernant l’écart
possible entre le prix courant et le prix naturel du travail (ou des marchandises en général). Il admet
que le prix courant peut différer du prix naturel de manière relativement durable à cause du jeu de
l’offre et de la demande ce qui veut donc dire que Malthus abandonne la théorie de la valeur travail,
puisqu’il admet qu’à certains moments, le prix des marchandises va être déterminé non plus par les
quantités de travail commandé mais par la situation sur le marché.
C’est une innovation très importante parce que c’est en quelque sorte le premier à avoir imaginé que
le prix des marchandises allait être déterminé par la confrontation de l’offre et la demande.
B/ Théorie de la rente différentielle
_________________________________Fin séance 6___________________________________
La rente c’est le loyer payé par les locataires (paysans) c’est le revenu des propriétaires terriens,
propriétaires foncier.
Malthus a une vision différente de Smith. Smith a une idée de la rente fondée sur l’idée de monopole
c.-à-d. que la rente est un revenu de monopole c.-à-d. que c’est parce que les terres sont rares et que
les propriétaires sont en situation de monopole, qu’il existe une rente. Et comme il y a une situation
de monopole, les subsistances (ce qui est cultivé) se vendent à un prix supérieur à leurs coûts de
production et donc il y a une rente. Donc la différence entre le prix de vente et le cout de production
constitue la rente.
Malthus s’écarte de cette approche la parce qu’il fait dépendre la rente de la fertilité des
terres et elle est donc liée à la notion de rendement agricole décroissant. Selon lui les terres n’ont
pas toutes la même fertilité. Su certaines terres, l’augmentation de la quantité de travail engendre
des produits moins que proportionnels (rendements agricoles décroissants)  plus on utilise de
travail moins on produit.
Cette différence de rentabilité entre les terres donne naissance à une rente pour les propriétaires
fonciers.
Ce qui intéresse Malthus c’est de lier sa théorie de la rente avec les théories de la population.
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 Comme la population augmente, il y a une augmentation de la demande pour les
subsistances, or les subsistances sont produites à partir de terres de moins en moins fertiles,
ce qui conduit à une décroissance de la rente.
C’est important de retenir l’idée que la rente n’est pas liée au monopole mais à la fertilité, et que la
rente diminue à cause de l’évolution de la population. Donc Malthus ne fait qu’aborder la question
de la rente.
(On parlera de la rente avec Ricardo)
C/ La contestation de la loi de l’offre de Jean-Baptiste Say
Il est connu pour avoir inventé la loi de l’offre que l’on connait sous l’expression « toute offre crée sa
propre demande ». Il dit : « une offre de produit est une demande simultanée de produits » (ce n’est
pas la même chose que « toute offre crée sa propre demande » !).
Ce que ça implique, c’est que si la loi de Say est vérifiée, alors les crises de surproduction sont
impossibles et donc qu’il faut libérer l’offre pour pouvoir être certain d’éviter les crises.
Il a fondé tout ce qu’on appelle les théories de l’offre (années 1980).
La loi de Say a été étiquetée « loi de Say » par Keynes, c’est lui qui a identifié cette loi, et il va dire
que les crises de surproductions sont possibles, et si on veut les éviter il ne faut pas agir sur l’offre
mais sur la demande !
Malthus va s’opposer à Jean-Baptiste Say, et proposer en contrepartie une théorie de la demande.
L’idée de Malthus c’est que Say a tords parce que contrairement à ce qu’il dit les crises de
surproduction sont tout à fait possible et elles sont possibles à cause de 2 problèmes que Say ignore.

Le premier point que souligne Malthus, c’est le rôle de la demande effective.
Demande effective = demande qui est solvable. La demande qui est susceptible d’être faite
par ceux qui en ont les moyens. Cette demande est une condition nécessaire pour
l’écoulement de l’offre. Pour qu’il y ait une demande solvable dit Malthus, il faut que les
travailleurs aient un emploi, or rien de garantit que les travailleurs auront un emploi, par
conséquent, la consommation peut être insuffisante pour assurer l’écoulement de l’offre, la
vente des produits qui sont offerts.

Le second problème que souligne Malthus c’est l’épargne. Il insiste sur le rôle et le problème
que peut représenter l’épargne. Pour Say, l’épargne n’est pas un problème dans le
fonctionnement de l’économie parce que les sommes qui sont épargnées à un moment
donné seront immédiatement (ou pas, mais peu importe) réinvesties, réinjectées dans
l’économie. Donc on a un flux permanent d’épargne et de désépargne dans l’économie. Il n’y
a jamais de fuite dans le système économique (pendant qu’il y en a qui épargnent, il y en a
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qui désépargnent). Cette conception est liée au fait que pour Say les agents économiques ne
thésaurisent pas !
Malthus est en désaccord : Son argument est que l’épargne peut être trop importante (pas
compensée par une désépargne) parce que la consommation est insuffisante.
Il faut se souvenir que c’est l’épargne qui fonde la croissance parce que c’est l’épargne qui
fonde l’investissement. Mais seul les capitalistes sont en mesure d’épargner, et pas les
salariés. Malthus souligne un problème, qui est que la propension à consommer décroît avec
le revenu. Donc plus les gens sont riches, moins ils consomment (proportionnellement) et
donc plus ils épargnent.
Malthus explique que lorsque le revenu augmente, l’épargne augmente et la consommation
baisse (proportionnellement). L’épargne va entrainer une augmentation de l’investissement,
une accumulation plus importante, et donc va entrainer une augmentation de l’offre. Mais
dans le même temps, la consommation va être insuffisante et donc la demande va être
insuffisante  l’offre (alimentée par l’épargne) augmente moins vite que la demande (pas
assez alimentée par la consommation) Crise de surproduction.
Pour ces deux raisons, le rôle de la demande effective et la trop grande importance de l’épargne,
Malthus conclue qu’on risque bien d’avoir des crises de surproduction.
Cette argumentation va le conduire à formuler un certain nombre de recommandations de politiques
publiques et en particulier 2 qui sont intéressantes :

Il propose de diviser la propriété foncière (morceler les propriétés et augmenter le nombre
de propriétaires) de façon à ce qu’il y ai plus de propriétaires moins riches. Il dit : « 30 ou 40
propriétaires ayant des revenus de 1000 à 5000 livres sterling feraient naitre une demande
effective bien plus forte qu’un seul propriétaire ayant 100 000 livres de rente ». Donc il
s’oppose à la grande propriété, au fait que ce soit un petit nombre d’individus qui possèdent
toutes les terres.

Il propose « d’entretenir » les consommateurs improductifs. Il faut qu’il y ai un nombre
suffisant de consommateurs improductifs c.-à-d. de gens qui consomment sans produire. Ces
consommateurs improductifs alimentent la demande sans alimenter l’offre, puisqu’ils ne
produisent rien. Ces consommateurs improductifs permettent donc de réduire l’écart entre
l’offre et la demande. S’il y a des consommateurs improductifs, cela réduit le nombre de
travailleurs improductifs, cela réduit le nombre d’individus qui sont néfastes et qui
alimentent l’offre sans suffisamment alimenter la demande.
Le concept important dans la pensée économique de Malthus c’est le concept de demande. Au 19°
siècle, l’économie de l’offre est représentée par Say, et celle de la demande par Malthus.
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IV. Le pessimisme de Ricardo
Ricardo (1772 – 1823) : Il a commencé à travailler à 14 ans avec son père, et a 21 ans il a monté sa
propre entreprise de courtage en bourse ce qui lui a permis de devenir riche et aux alentours de 40
ans, il a pris sa retraite, et a été élu au parlement et a écrit en même temps deux ouvrages
relativement importants d’économie, en particulier en 1817 : Les principes d’économie politique et
de l’impôt.
Ses thèses :
1. La théorie de la valeur travail de Ricardo
Comme Smith, Malthus … Ricardo refuse de considérer que la valeur des biens est fondée sur l’utilité
que les gens en retirent. Il accepte donc une théorie de la valeur fondée sur le travail. C’est
intéressant de voir que des auteurs aussi différents idéologiquement, ont tous les deux la même
théorie de la valeur. Mais, à la différence de Smith, Ricardo adopte une théorie de la valeur travail
incorporée parce qu’il critique la valeur de travail commandée.

Il dit que la détermination de la valeur d’un bien selon cette théorie est totalement circulaire
(tautologique).

Ricardo souligne un autre point qui est de dire que dans une théorie de la valeur travail
commandée, il y a un autre problème : La valeur des biens n’est pas indépendante de la
répartition des revenus parce que si les salaires changent, les prix des biens vont changer. Il
dit que si les salaires changent, les prix des biens vont changer aussi, donc leur valeur va
changer, donc on peut en déduire que la valeur des biens changent parce que la répartition
entre salaire et profit change.
Donc la valeur des biens va dépendre de la manière dont sont répartis les revenus entre les
salaires et les profits. C’est un problème, parce qu’on est dans une théorie de la valeur travail,
la valeur des biens doit dépendre du travail, elle ne doit pas dépendre de la répartition des
revenus. Cette théorie de la valeur travail commandée se contredit.
Explication :
Si les salaires augmentent avec des profits constants, puisque les salaires déterminent la
valeur des biens, la valeur des biens va augmenter parce que la quantité de travail que ces biens
commandent augmente.
Mais si les salaires augmentent à profit constant, il y a une seconde conséquence : La
répartition des revenus entre salaire et profit change.
Ça veut dire que la valeur des biens est affectée par la répartition des revenus entre salaire et
profit ! Cela signifie que la valeur des biens n’est plus totalement dépendante du travail.
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Ricardo choisit donc une théorie de la valeur travail incorporée. Dans ce cas, la valeur des biens est
indépendante de la répartition des revenus, puisque dans ce cas la valeur dépend uniquement des
conditions techniques de production.
Ricardo ajoute une distinction entre le travail direct et le travail indirect : Le travail direct c’est la
quantité de main d’œuvre nécessaire à la production, et le travail indirect c’est le travail qui est
utilisé pour produire le capital.
2. La répartition des revenus et la rente chez Ricardo
Pour Ricardo on a des revenus primaires et des revenus secondaire (comme Smith), et il ne
s’intéresse qu’aux revenus primaires c.-à-d. salaire, profit et rente.

Le salaire, c’est le revenu du travail, et ce salaire se fixe d’après lui au minimum de
subsistance parce que tout écart entre le salaire courant et le salaire naturel va se résorber
automatiquement à cause des mouvements de population. Donc il y a un phénomène de
régulation naturelle des salaires. (Ricardo est pas très original ici)

Le profit : La encore Ricardo n’est pas très original. Le profit est la différence entre le prix du
bien produit et son coût de production qui correspond à sa valeur (une valeur déterminée en
termes de travail). Par conséquent, le profit est un revenu qui dépend du travail mais en
même temps c’est un revenu qui n’est pas issu du travail (les capitalistes ne travaillent pas,
et se contentent d’encaisser la différence entre le coût de production et le prix de vente).

La rente : Ricardo est le premier à proposer cette théorie de la rente différentielle qui
Malthus a simplement esquissé. Il s’éloigne complètement de l’idée que la rente puisse être
liée au monopole comme on le trouve chez Smith.
Remarque : La théorie de Ricardo est influencée par les évènements qu’il observe dans le
monde agricole en Angleterre à cette époque-là. L’agriculture anglaise se caractérise par un
mouvement croissant depuis le début du 18° siècle de concentration des propriétés (il y a de
moins en moins de propriétaires, la taille des propriétés est de plus en plus grande) et
surtout la propriété se concentre dans les mains des aristocrates, des nobles.
Cette concentration est la conséquence d’un mouvement qu’on appelle le mouvement des
enclosures. C’est un mouvement de clôture des champs et qu’on observe surtout en
Angleterre. Ce mouvement signifie que les propriétaires ou les gens qui utilisaient les champs,
étaient obligés par la loi de clôturer les champs et de supporter le coût de la clôture, ce qui a
conduit à supprimer beaucoup de petites propriétés en particulier parce que les gens
n’avaient pas les moyens de clôturer, et qui a contribué à cette concentration.
L’un des inconvénients de ce mouvement c’est que beaucoup d’agriculteurs ont été obligés
d’abandonner leur métier, il y a eu une forte migration vers les villes, et ces personnes sont
devenus des ouvriers dans les usines de la révolution industrielle.
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Une conséquence plus positive, a été que l’augmentation de la taille de ces propriétés a
permis des gains de productivité très importants, des innovations importantes (machines,
engrais…) et donc plus de rentabilité de l’agriculture.
Ces propriétaires terriens (nobles) obtiennent un revenu sans travailler, comme pour le profit
ce revenu est une différence entre les gains réalisés sur la terre et le coût de production
(rente différentielle parce que c’est une différence, parce que le prix de vente du blé est
supérieur au coût de production).
Ce que théorise Ricardo, c’est le fait que la rente est liée aux différences de fertilité des
terres et donc peut se définir comme un surplus dégagé sur des terres de fertilité inégales et
parce qu’il existe des terres de fertilité inégales.
______________________________ Fin séance 7 _________________________________
Le fait qu’il y ai cette différence de fertilité se traduit par une hypothèse de rendement
marginaux décroissants. La seconde hypothèse faite par Ricardo c’est que la quantité de
terres fertiles est limitée. Cela signifie donc que plus on met de terres en culture (et on en a
besoin parce que la population augmente) moins ces terres cultivées sont fertiles. Donc on a
encore un lien avec la loi de la population et Malthus, qui est que l’accroissement de la
population se traduit par cette mise en culture de terres de moins en moins fertiles.
Evidemment, au fur et à mesure que l’on met des terres moins fertiles en culture, il apparait
une différence entre le produit obtenu sur ces terres moins fertiles et le produit qui est
obtenu sur les terres plus fertiles.
Le produit obtenu (quantité de grain)
GA
GB
GC
GD
GE
∏
w
A
B
C
D
E
F
Terres mises en culture
(Plus on s’éloigne de l’origine, moins les terres sont fertiles)
Ce produit est obtenu avec une certaine quantité de travail, lequel travail est rémunéré par un salaire
(noté w) et il est aussi produit par du capital, (noté ∏, le profit qui va au capitaliste qui apporte les
machines)
Les conditions de production sont fixes (la quantité de capital et de travail par unité de terre sont fixe)
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La terre E est ce qu’on appelle la terre marginale, puisque c’est la terre marginale, sur la terre
marginale, le produit sert uniquement à rémunérer le travail et le capital. On voit que sur cette terre
E il n’y a pas de rente, parce que le produit est épuisé totalement dans le paiement du salaire et du
capital.
Si on mettait en culture une terre encore moins fertile, (terre f), le produit serait à peine suffisant
pour payer les salaires et ne permettrait de payer ni profit, ni rente, ce qui veut dire que cette terre
ne présente aucun intérêt et donc ne va effectivement pas être mise en culture.
Si la terre F rapportait un produit qui est supérieur à w, alors c’est la terre F qui serait la terre
marginale et plus la terre E. Donc la terre marginale c’est la terre pour laquelle le salaire et le profit
épuise le produit, et la terre suivante est celle pour laquelle le produit correspond uniquement au
salaire.
On peut annuler F :
Le produit obtenu (quantité de grain)
GA
GB
GC
RenteA
RB
RC
∏
GD
RD
GE
∏
E
w
A
B
C
D
E
Terres mises en culture
Sur toutes les autres terres, il y a une rente.
(Important :)Pourquoi le taux de profit est-il uniforme ? Parce qu’il y a une rente. S’il n’y avait pas de
rente, les capitalistes conserveraient la partie du produit qu’ils ne versent pas aux travailleurs (il
gagnerait la différence entre le produit et le salaire). Mais cette situation n’est pas possible, il n’est
pas possible qu’il n’y ai pas de rente parce que les capitalistes vont se faire concurrence pour obtenir
la possibilité de cultiver les terres les plus fertiles et donc ils proposent aux propriétaires la plus
grande partie de leur produit, donc dit autrement, le capitaliste utilise une partie de son profit pour
acheter le droit de produire sur des terres fertiles.
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On a un processus de concurrence entre les fermiers capitalistes qui conduit à une égalisation des
taux de profits.
C’est l’uniformité des profits qui donne naissance à la rente.
Sur la terre marginale (E), la rente est = 0. C’est un problème parce que s’il n’y a pas de rente, le
propriétaire n’a aucun intérêt à louer la terre, donc cette explication se heurte à cette difficulté.
Comme expliquer l’existence d’une terre marginale sur laquelle la rente serait = 0 (impossible).
Pour expliquer ce problème, Ricardo propose un deuxième raisonnement qui repose sur l’idée de
rente intensive. Il s’agit d’interpréter ce graphique en termes de travail et de productivité du travail.
Les colonnes de l’histogramme ne représentent plus des terres différentes, mais des travailleurs de
moins en moins productifs. Le premier travailleur a une productivité mesurée par GA, et ainsi de
suite. Et donc le dernier travailleur (le travailleur marginal) est celui dont la productivité permet de
dégager un produit qui couvre son salaire et le profit du capitaliste. Donc le travailleur marginal est
celui dont le produit ne dégage pas de rente donc cela veut dire qu’il existe bien des rentes sur
chaque terre mais ces rentes ne sont pas produites par tous les travailleurs.
Sur chaque terres, même les moins fertiles, il y a une rente, mais ce ne sont pas tous les travailleurs
qui dégagent de la rente il y a un travailleur marginal sur chaque terre qui ne dégage pas de rente.
On a une approche extensive de la rente qui correspond au premier graphique avec un raisonnement
par catégorie de terre, et on a une approche intensive de la rente avec un raisonnement par
catégories de travailleurs. Mais, dans les deux cas, la rente est calculée de la même façon, par
différence.
3. Le laisser faire selon Ricardo :
C’est un peu paradoxale, parce que Ricardo n’est pas un économiste libéral, il est très critique du
capitalisme, et pourtant, il était favorable à la liberté du commerce et au libre-échange et pendant
une grande partie de sa vie il va s’opposer aux mesures protectionnistes qui étaient prises en
Angleterre à cette époque–là. Il y a des lois (Corn Laws) qui étaient protectionnistes, et visaient à
assurer une rente aux propriétaires fonciers, en faisant varier le prix du blé de façon à maintenir une
rente pour les propriétaires fonciers. Ces lois font augmenter les salaires, et donc les industriels et les
capitalistes se plaignent du fait qu’à cause de ces lois, le prix du travail soit plus élevé, mais il faudra
attendre 1846 pour qu’elles soient abrogées.
Il a plusieurs arguments en faveur du libre-échange :

Le libre-échange permet le retour automatique à l’équilibre de la balance des paiements. Cet
argument est fondé sur la théorie quantitative de la monnaie qui dit que le niveau des prix
est déterminé par la quantité de monnaie en circulation dans l’économie (si la quantité de
monnaie est multipliée par 2, les prix sont multipliés par 2 etc…). Pour limiter la quantité de
monnaie en circulation dans l’économie et donc contrôler l’inflation, Ricardo propose un
mécanisme qui est le mécanisme de l’étalon or (indexer la quantité de monnaie émise par la
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banque centrale sur la quantité d’or possédée par la banque). Ce mécanisme, ajouté au
libre-échange, permet l’équilibre spontané de la balance des paiements.
S’il y a un déficit commercial, les importations sont supérieures aux exportations, cela va
signifier une sortie d’or du pays pour pouvoir payer la différence entre importation et
exportation. Et donc cela va signifier une baisse de la quantité d’or disponible dans le pays et
donc en vertu de la théorie quantitative de la monnaie et de l’étalon or, une baisse des prix,
ce qui veut dire que les marchandises produites dans le pays deviennent moins cher que les
marchandises importées, donc les exportations augmentent, les importations diminuent, et
le déficit va se réduire. Le processus va se poursuivre jusqu’à ce que la balance des
paiements soit retournée à l’équilibre.
Donc libre-échange + étalon or conduisent à l’équilibre automatique et spontané de la
balance commerciale.

Le libre-échange est bénéfique en vertu de la théorie des avantages comparatifs. Ricardo
s’oppose à la théorie de Smith (théorie des avantages absolus) qui dit que chaque pays a
intérêt à se spécialiser dans la production des biens dans lequel elle possède un avantage
absolu. Smith avait utilisé dans son exemple 2 pays (Portugal, grande Bretagne) et 2 biens
(vin, drap). Mais Smith considérait un cas spécifique qui est le cas dans lequel chaque pays
possède un avantage absolu. La théorie des avantages absolus ne donne pas de réponse dans
le cas où un pays possède des avantages absolus dans la production de tous les biens. C’est le
cas que va étudier Ricardo :
Il fait l’hypothèse qu’il n’y a pas de monnaie, on raisonne en terme réel. La seule différence
entre les pays consiste dans le temps de travail nécessaire à la production d’une unité de
bien. Sur les marchés nationaux, les prix relatifs sont déterminés en terme de travail
incorporé (il applique la théorie de la valeur travail) et les salaires sont égaux entre les pays.
Donc on peut effectivement comparer les biens en fonction de la quantité de travail qu’il faut
pour les produire.
Vin
Drap
Portugal
80
90
Angleterre
120
100
Ces chiffres représentent la quantité de travail qu’il faut pour produire une unité de bien. A
partir de ce tableau on peut déterminer les taux d’échange entre les biens.
-
Pour l’Angleterre : Avec 100 unités de travail, on peut produire une unité de drap ou
100/120 = 0,833 unités de vin ce qui veut dire qu’une unité de drap s’échange contre
0,833 unité de vin. 1 unité de vin s’échange contre 1,2 unité de drap.
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-
Ca veut dire qu’en Angleterre, si je produits une unité de drap, je renonce à produire
0,833 unité de vin. Si je produits une unité de vin, je renonce à produire 1,2 unité de drap.
Ca veut dire aussi, que le coût de production d’une unité de drap (en termes de vin) est
égal à 0,833 et le coût de production d’une unité de vin (en termes de drap) est égal à 1,2.
____________________________________ Fin séance 8 _________________________
Pour le Portugal : Même type de raisonnement  1 unité de drap = 1, 125 unités de vin
et une unité de vin = 0, 888 unités de drap.
Ce qui est intéressant de noter : le Portugal a des avantages absolus dans la production
des deux biens c.-à-d. que le Portugal devrait, si on suit la théorie de Smith qui dit que les
pays devraient se spécialiser dans leurs avantages absolus, le Portugal devrait se
spécialiser dans la production des deux biens. Or Ricardo montre que les pays devraient
se spécialiser dans la production du bien pour lequel ils ont un avantage relatif et non
absolu.
Il est moins couteux de produire du drap en Angleterre qu’au Portugal, parce que si on
produit 1 unité de drap en Angleterre on renonce à 0,833 unités de vin, et quand on
produit une unité de draps au Portugal, on renonce à 1,125 unités de vin. Donc ça coute
relativement moins cher en vin de produire du draps en Angleterre qu’au Portugal.
De la même façon, produire une unité de vin coute 0,888 unités de drap au Portugal, et
1,2 en Angleterre, donc cela coute relativement moins cher de produire du vin au
Portugal qu’en Angleterre.
On peut aussi exprimer ça en terme de productivité :
1 litre de Vin
1 mètre de drap
Portugal
1/80
1/90
Angleterre
1/120
1/100
On voit encore que la productivité est meilleure au Portugal qu’en Angleterre (de façon
absolu). Si on appliquait la théorie des avantages absolus, le Portugal étant plus productif devrait se
spécialiser dans la production des deux biens. Si on raisonne en terme relatif, c.-à-d. si on compare
les 2 productivités, c.-à-d. si on fait le rapport entre la productivité du vin en Angleterre et la
productivité du vin au Portugal :
(1/120) / (1/80) = 0,66
(1/100) / (1/90) = 0,9
De ces deux chiffres, on peut conclure que l’Angleterre est désavantagée dans le cas de la production
des deux biens en termes absolus, mais le désavantage de l’Angleterre est moins grand dans le cas de
la production de draps que dans le cas de la production de vin. C.-à-d. que la productivité relative de
l’Angleterre est meilleure dans un cas que dans l’autre.
Si on fait le rapport dans l’autre sens, on va voir que le Portugal possède un avantage relatif dans la
production de vin  (1/80)/(1/120) = 1,5 et (1/90)/(1/100) = 1,1.
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Si on compare la situation avant le libre-échange et après le libre-échange (avant la spécialisation, et
après la spécialisation) :
o Avant le libre-échange et donc avant la spécialisation : Pour produire 2 unités de drap
il fallait 190 heures (100 heures en Angleterre, et 90 au Portugal). Pour produire 2
litres de vin, il fallait 200 heures. Donc un total de 390 heures.
o Avec le libre-échange et donc avec la spécialisation : Pour produire 2 unités de drap,
il faudra 200 heures. Pour produire 2 litres de vin, il faudra 160 heures. Donc au total
360 heures.
On observe que globalement, on va économiser du temps de travail avec le libre-échange. Il
fallait 390 heures pour produire ces biens, maintenant il en faut 360 donc on économise 30
heures de travail donc c’est plus efficace. Globalement, le groupe formé par ces deux pays a
gagné du fait de la spécialisation parce qu’on utilise moins de travail pour produire ces biens,
donc le coût de ces biens est plus faible.

Le libre-échange empêche la réalisation de l’état stationnaire (état sans croissance). Ricardo,
comme Smith, pense que la croissance économique est commandée par l’évolution des
profits. C.-à-d. que ce qui permet de générer de la croissance c’est qu’il y ai des profits et que
ces profits augmentent. Il pense aussi que les taux de salaire sont constants et vont rester
constants (puisque le taux de salaire se fixe au taux de salaire naturel). Par ailleurs, les rentes
vont augmenter (on l’a vu, parce qu’on met en culture des terres de moins en moins fertiles,
l’écart de rentabilité entre les terres les plus fertiles et les moins fertiles augmentent, et donc
comme les taux de salaires restent constant et que les profits vont baisser aussi, c’est la
rente qui augmente). La conclusion de Ricardo, c’est que si les profits baissent et que les
rentes augmentent, il y aura de moins en moins de croissance économique.
Le seul moyen pour permettre de la croissance c’est de permettre aux profits de ne pas
baisser. Or, le profit baisse parce les capitalistes cèdent une partie de leur profit au rentier,
donc le profit baisse parce que la rente augmente.
Donc la conclusion de Ricardo c’est que pour qu’on évite un état sans croissance, il faut faire
en sorte que les rentes n’augmentent pas.
Le problème c’est que les mécaniques qu’on a vu, font que les capitalistes sont obligés de se
faire concurrence. Le seul moyen pour que la rente baisse, c’est de baisser le prix du blé. Si le
prix du blé baisse, à ce moment-là ce que les capitalistes vont gagner va pouvoir être
conservé par eux grâce à la baisse du prix.
Le seul moyen de faire baisser le prix du blé, c’est le libre-échange, parce que si on reste dans
l’économie fermée, le prix du blé ne pourra pas baisser.
Cette idée qu’avec le libre-échange on peut échapper à l’état stationnaire parce que cela
permet de maintenir les niveaux de profit, d’éviter que les niveaux de profits baissent.
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IV. L’utilitarisme :
Avec l’utilitarisme on revient à une question fondamentale en science sociale, qui est celle de la
justice sociale, de l’efficacité. En effet, l’utilitarisme se pose la question de savoir comment
déterminer si une action (un comportement individuel) ou une mesure politique économique est
justifiée. Quel est le critère qui permet de déterminer si une action ou une mesure est bonne,
légitime, justifiée ou efficace ?
Ce critère d’évaluation c’est l’utilité. On évalue une action, une politique, un phénomène, en
fonction de l’utilité qu’elle procure à la collectivité. Bentham va inventer un critère qui est le critère
du plus grand bonheur du plus grand nombre  ce qui est utile c’est ce qui permet d’avoir le plus
grand bonheur du plus grand nombre.
Remarque importante : L’utilitarisme est une doctrine conséquentialiste c.-à-d. que la valeur d’une
action ou d’une politique découle de ses conséquences, se détermine par ses conséquences. Donc
une action est bonne ou efficace si elle a de bonnes conséquences. Le conséquentialisme s’oppose
aux approches déontologiques. Les approches déontologiques ce sont des approches qui évaluent
selon des principes définis à priori, on ne se pose pas la question des conséquences, mais du principe
(par exemple, ne pas mentir, ne pas tuer).
Exemple : Rembourser les soins de santé peut être évalué de 2 manières :
-
D’un point de vue déontologique, la santé doit être prise en charge par l’Etat parce que
moralement, il y a un principe qui dit qu’il faut défendre l’intégrité de la vie humaine.
D’un point de vue conséquentialiste : L’opération est justifiée à partir du moment ou les
conséquences sont avantageuses, c.-à-d. que le coût de l’opération va être compensé par
les bénéfices qu’on peut en attendre.
Bentham va donner cette dimension conséquentialiste à la science économique.
1. Jeremy Bentham : Utilitarisme et Ordre social :
Bentham (1748 – 1832) : Il vivait à Londres à l’époque des lumières. Il va être très proche des
révolutionnaires français. La question fondamentale qu’il se pose c’est de trouver un fondement à la
morale qui soit acceptable par tous (scientifique, objectif) et qui ne se soit pas appuyé sur des
préceptes religieux. Ce critère universel, il va le trouver dans une observation qui est que les êtres
humains cherchent à se procurer du plaisir, et à éviter la souffrance. Il en déduit que le principe
moral fondamental c’est la recherche du bonheur c.-à-d. la recherche du plaisir et l’évitement de la
douleur donc le bonheur c’est la différence entre les deux.
Donc les actions des gens sont motivées par cette volonté qui est de maximiser (Bentham a inventé
ce terme !) l’écart entre plaisir et douleur. Bentham cherche à déterminer ce qu’il appelle une
arithmétique des plaisirs de façon à augmenter le bonheur du plus grand nombre d’individus (ça ne
veut pas dire de tous les individus).
Il semble admis que s’il faut sacrifier un individu pour augmenter le bonheur du plus grand nombre,
alors ce sacrifice est légitime.
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Pour les utilitaristes, ce qui est justifié c’est ce qui rapporte de l’utilité à la collectivité.
__________________________ Fin séance 9________________________
Le plaisir et la douleur ont l’air subjectif (Bentham cherche un principe objectif), alors Bentham
identifie 7 critères qui permettent de mesurer objectivement sur le plaisir et la douleur. Donc il dit
qu’on peut exprimer objectivement le plaisir et la douleur. Il cherche à fonder une arithmétique des
plaisirs.
Ce qui est fondamental, c’est que pour l’utilitarisme (et on ne peut parler d’utilitarisme qu’à cette
condition), cette maximisation doit être faite au niveau collectif. Il faut favoriser le plus grand
bonheur du plus grand nombre. Donc quelque chose qui est moral, c’est quelque chose qui
contribue au plus grand bonheur du plus grand nombre.
Chaque fois qu’une décision doit être prise l’utilitarisme exige que :



On détermine les conséquences associées aux différentes options possibles.
Il faut évaluer les conséquences du point de vue de l’utilité des individus qui sont affectés par
chaque option.
On choisit l’option dont les conséquences sont telles que la somme des utilités individuelles
est au moins aussi grande que la somme des utilités individuelles associées à chaque autre
option.
Remarque : Le terme de plaisir et d’utilité sont synonymes chez Bentham.
Donc ce qui est moral, ce qui est efficace, c’est ce qui augmente la somme des utilités pour une
communauté donnée.
Il faut ajouter des précisions :


Quels sont les individus qui sont concernés par la mesure des utilités ? Autrement dit quels
sont les individus dont on doit additionner les utilités pour savoir si on va augmenter le
bonheur de la collectivité. Par exemple, où est-ce qu’on doit placer la limite concernant la
communauté qui va être prise en compte ? est-ce qu’on doit uniquement prendre une
communauté locale, nationale, internationale ?
Mais c’est aussi des questions telles que : Quel type d’être vivants on prend en compte ? (les
animaux par exemple)
Il y a un philosophe australien (Singer) qui a écrit là-dessus, et pour lui, il faut inclure les
animaux aussi dans le calcul du bien-être collectif.
Comment agréger les utilités individuelles ? Pour Bentham, il suffit de faire la somme des
utilités individuelles. Pour d’autres, (par exemple John Stuart Mill) il faut faire la moyenne c.à-d. prendre la somme des utilités individuelles et diviser par le nombre d’individus. On parle
dans ce cas d’utilitarisme moyen.
On peut aussi envisager de faire une moyenne pondérée (on n’est pas obligé de considérer
que l’utilité de chaque individu a la même importance).
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
De quelle utilité parle-t-on ? La réponse diffère selon les économistes. Là encore, Bentham a
la vision la plus simple de tous, pour lui il s’agit de prendre en considération le plaisir et la
souffrance dans un sens purement matériel. Donc on dit que Bentham a une vision hédoniste
c.-à-d. fondée uniquement sur le plaisir et sur l’utilité matérielle (il ne fait pas la différence
entre les plaisirs matériels et les plaisirs intellectuels contrairement à Mill).
Pour Bentham, l’utilité est une propriété des objets (donc elle provient des caractéristiques des
objets), donc l’utilité est objective, et de façon un peu extrême, on pourrait dire que le même objet
va provoquer la même utilité chez tous les individus.

La comparaison interpersonnelle des utilités : La maximisation du plaisir pour la collectivité,
la recherche du plus grand bonheur du plus grand nombre, n’a de sens que si on peut
mesurer et surtout comparer les utilités individuelles. Donc il faut qu’on puisse dire si une
mesure de politique économique rapporte plus ou moins d’utilité qu’une autre mesure de
politique économique et surtout, il faut savoir combien chaque mesure de politique
économique rapporte. Cette addition d’utilité est particulièrement difficile si on considère
que les utilités sont subjectives mais, pour Bentham, les utilités sont objectives donc on peut
les quantifier, les additionner sans difficulté.
Donc on raisonne en terme d’utilité cardinale. Bentham avait conscience des problèmes que
ça suppose (utilités objectives pas très réaliste), il a suggéré de passer par la monnaie pour
mesurer les utilités individuelles (l’utilité que procure la consommation d’un bien est égal à la
somme que cet individu est disposé à payer pour l’obtenir).
Donc maintenant on sait quels sont les individus dont on va mesurer l’utilité, on sait quelle utilité,
comment on va la mesurer, et comment on va les agréger. Avec ces 4 critères, on peut comprendre
comment se met en œuvre le principe utilitariste de Bentham.

Comment on fait pour savoir si une politique économique maximise l’utilité collective ? Qui
maximise l’utilité collective ? Lorsqu’on décide de construire un aéroport, si on a une vision
cout / avantage, comment on calcule la somme des utilités de chaque individu, et qui le
calcul.
Smith aurait répondu en utilisant le principe de la main invisible, c.-à-d. que pour Adam
Smith la maximisation de l’utilité collective se fait de manière spontanée (si il y a un marché,
interactions  maximisation des utilités collectives).
Rappel : Le marché permet de conduire à la plus grande utilité pour la collectivité. Le principe du
marché c’est : Chaque individu peut acheter ce qu’il a envie d’acheter, et puisse payer le prix qu’il a
envie de payer. Donc l’allocation des ressources se fait de manière efficace parce que chacun paye ce
qu’il a envie de payer (sous contrainte du budget).
Bentham refuse cette idée d’une harmonie naturelle des intérêts, il pense que l’ordre social
ne sera pas spontané, parce qu’il pense que la poursuite des objectifs privés par chaque
individu ne contribue pas à maximiser l’utilité collective. Par conséquent, il faut orienter les
actions individuelles de façon à s’assurer que chaque individu va agir en faveur du plus grand
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bonheur du plus grand nombre. C’est le législateur et la loi qui vont s’assurer que les
individus agissent dans le bon sens (fassent ce qui est moral).
Donc le législateur va devoir mesurer les plaisirs et les souffrances et mettre en place un
système de règle qui va dissuader les actions qui sont mauvaises (c.-à-d. qui ne contribuent
pas au plus grand bonheur du plus grand nombre) et de façon à encourager les actions qui
sont bonnes.
Pour les individus qui sont réticents (c.-à-d. les individus qui refusent de respecter les règles
morales), Bentham dit qu’il faudra mettre les individus en prison. La prison a un but de
rééducation. Bentham invente une prison qui s’appelle le Panoptique. Ce qui est intéressant
c’est l’architecture. Le panoptique c’est la forme que vont prendre la plupart des prisons qui
sont construites au 19° siècle dans le monde. Il y a un point central ou se trouve le gardien, et
il y a des rayons autour (ça ressemble à un soleil). Le principe c’est que les prisonniers
doivent se sentir observés et regardé sans voir leur gardien. Le but c’est que c’est plus
économique, on peut surveiller plus de monde avec moins de gardiens.
Le panoptique sert aussi pour les ouvriers. Cela peut être la forme que peut prendre l’usine
(il faut surveiller les ouvriers aussi).
Par ailleurs, le panoptique a une double visée éducative. Il doit éduquer non seulement les
prisonniers mais aussi les visiteurs.
Ca nous mène à un dernier point sur la définition de l’utilitarisme, qui est la question du sacrifice.

La mise en place du système juridique prôné par Bentham peut conduire au sacrifice d’un ou
de plusieurs individus si le plus grand bonheur du plus grand nombre le réclame. C’est
problématique, on a une doctrine morale qui justifie de sacrifier certains individus…
Bentham n’a pas donné de réponse à ça puisque le problème a été soulevé après.
Les utilitaristes ont répondu à cette critique en utilisant le principe de la décroissance des
utilités marginales, et le raisonnement à la marge. L’utilité marginale des individus qui sont
bénéficiaires du sacrifice est décroissante alors que la désutilité marginale des personnes qui
sont sacrifiées est croissante.
Ca signifie qu’avantager une partie de la population au détriment d’une autre augmente leur
utilité mais moins que cela ne diminue la désutilité des perdants. On peut dire qu’en
raisonnant à la marge, ce que gagnent les gagnants est toujours moins important que ce que
perdent les perdants. Cette explication justifie qu’on ne puisse pas sacrifier de manière
répétée toujours les mêmes personnes. C’est donc une explication dynamique, cette
explication ne dit pas qu’on ne puisse pas décider d’un coup de sacrifier une partie de la
population.
Conclusion : Quel est l’héritage de l’utilitarisme ? L’utilitarisme est un fondement du marginalisme,
en particulier du marginalisme de Jevons. Jevons a repris l’approche hédoniste de Bentham c.-à-d.
qu’il considère comme Bentham que l’être humain est à la recherche du plaisir et essai d’éviter la
souffrance et il considère aussi que l’utilité et le plaisir sont synonymes. Mais il y a quelques
différences. Chez Jevons, l’utilité n’est pas une propriété des objets mais elle est subjective (propre à
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chaque individu). Par ailleurs, Jevons ne cherche pas à établir une théorie morale, il cherche à
développer une théorie économique.
Après Jevons, les économistes ont commencé à prendre leurs distances par rapport à l’utilitarisme et
surtout par rapport à l’utilitarisme de Bentham. En particulier, 2 points :
-
-
ils ont renversé la relation qui existe entre utilité et préférences. Chez Bentham, un
individu choisit de faire « a » plutôt que « b » parce que l’utilité que lui procure « a » est
supérieure à l’utilité que lui procure « b ». Donc il y a un lien de causalité entre l’utilité et
l’action. Pour les économistes contemporains, ce sont les préférences qui font l’utilité :
Le fondement de l’action individuelle ce sont les préférences. Ce n’est pas parce que
l’utilité de a est > l’utilité de b que je fais a, mais parce que je préfère a. Donc l’utilité ici
n’est pas causé par les préférences, l’utilité est simplement une représentation des
préférences.
Les économistes contemporains (début du 20°) : (Pareto) ont une approche ordinale de
l’utilité, c.-à-d. qu’ils ont abandonné l’approche cardinale de l’utilité de Bentham, et par
conséquent ils ont abandonné le besoin de faire des comparaisons interpersonnelles
d’utilité. L’optimum de Pareto a un avantage énorme par rapport au critère de Bentham
c’est qu’il n’a pas besoin de comparaison des utilités.
Donc en fait, l’économie contemporaine a résolu l’un des problèmes centraux de
l’utilitarisme (comparaison interpersonnelle des utilités) en le faisant disparaître et en
expliquant que l’on peut savoir comment maximiser le bien-être collectif sans cette
comparaison. L’optimum de Pareto a d’autres problèmes et en particulier il est partiel, ça
signifie qu’il existe souvent des options que l’on ne peut pas comparer en vertu de
l’optimum de Pareto, il ne permet pas de comparer tous les états possibles de la société.
2. L’utilitarisme de John Stuart Mill
_____________________ Fin séance 10 _____________________
John Stuart Mill (1806 – 1873) : Son père James Mill était un ami de Bentham. James Mill était
convertit aux idées de Bentham, et en particulier au sujet de l’éducation. Il pensait que si on
changeait l’environnement dans lequel vivaient les gens, on pouvait changer leur caractère, leur
personnalité. James Mill a décidé d’élever son enfant selon ces principes Benthamiens. En
l’occurrence, il avait décidé de prendre son fils comme un sujet d’expérience éducative et donc il
voulait façonner son fils en agissant sur son environnement sur l’éducation qu’il allait lui donner. Très
vite, James Mill a appris à son fils tout ce qu’il pouvait lui apprendre.
A 3 ans, John Stuart Mill avait appris le grec, à 8 ans le latin, entre 8 et 12 ans il apprend la géométrie,
l’algèbre, le calcul différentiel, et avant 13 ans il avait écrit une histoire de Rome, une histoire de la
Hollande, et un abrégé d’histoire universelle. A 14 ans il a fait un séjour en France avec la famille du
frère de Bentham (à Montpellier notamment, à la faculté des sciences) où il a suivi des cours de
chimie, géologie… A 15 ans, il s’est retrouvé familiarisé avec les idées de Bentham sur l’utilitarisme
etc… En 1826 (à 20 ans) il a fait une sorte de dépression et pendant une dizaine d’années il n’a plus
rien fait. Il faut attendre 1843 pour qu’il écrive un ouvrage vraiment important, qui s’appelle le
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système de logique déductive et inductive. Cet ouvrage de méthodologie et de philosophie va lui
apporter une grande réputation plus précisément en philosophie, et en 1848 il va écrire principe
d’économie politique qui sera son principal ouvrage d’économie.
Il a aussi été élu au parlement, il s’est engagé dans beaucoup de luttes sociales, en particulier pour le
droit des femmes dans la société anglaise. Il s’est marié en 1851.
A) L’apport méthodologique de John Stuart Mill :
Les réflexions méthodologiques de J.S. Mill ont joué un rôle très important en sciences économiques,
elles ont dominées la méthodologie économique pendant très longtemps, et ca reste une référence.
La méthodologie de l’économie c’est essentiellement la question de savoir comment est-ce qu’on fait
de la science économique, quelles méthodes on doit utiliser pour faire de la science économique ?
De manière plus générale, la science économique est-elle une science ?
Son problème de départ : Il est attaché à l’économie classique mais en même temps, cette économie
classique a un certain nombre de défauts :
o Elle semble reposer sur des prémices (hypothèses) fausses
o Elle est difficile voire impossible à tester
o Les prédictions qu’elle fait semblent fausses.
En plus, pour lui, une théorie scientifique doit être jugée par rapport aux faits. Cela veut dire que ce
qui permet de dire si une théorie est scientifique ou pas, c’est dans le rapport à la réalité, dans le
rapport aux faits. Il était très influencé par le positivisme d’Auguste Comte. Pour Comte, la seule
science qui mérite d’être appelée une science c’est la sociologie qu’il appelle aussi la physique sociale.
Le but de cette sociologie c’est d’étudier les phénomènes observables et de relier ces phénomènes
par des lois. Donc cette sociologie est une science parce qu’elle est basée sur l’expérimentation (elle
est non seulement élaborée à partir des faits, mais validée empiriquement).
Mill adhère à cette idée, c.-à-d. que pour lui une science doit être empirique, reliée aux faits. Il
oppose 2 types de méthodes :
o La méthode à postériori : C’est une méthode inductive, qui donc induit des
conclusions générales à partir de l’observation de faits particuliers
Exemple : Supposons : 1970 on observe une croissance faible et un taux de chômage
qui augmente légèrement. En 1990 on observe une croissance assez faible, et un
taux de chômage qui augmente légèrement. En 2000 on observe une croissance plus
soutenue et un taux de chômage qui baisse.
Donc on a observé ces faits, on peut en inférer (induire) que le taux de croissance et
la variation du taux de chômage sont reliés de manière négative.
o La méthode à priori : C’est une méthode mixte, elle mélange l’induction et la
déduction. Dans ce cas, on raisonne à partir d’hypothèses qui sont obtenues par
induction mais pas par induction à partir du phénomène observé. En plus, on déduit
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des propositions à partir de ces hypothèses qui permettent d’expliquer le
phénomène que l’on cherche à expliquer.
Exemple : Supposons que l’on cherche à comprendre l’effet de l’introduction d’un
impôt sur la demande d’un bien quelconque. La méthode à priori suppose que :
Dans un premier temps on va formuler un certain nombre d’hypothèses qui ne
concernent pas le marché du bien en question.
A partir de ces hypothèses on déduit des propositions qui permettent de prédire
l’effet que l’on cherche à expliquer.
Ce type de méthode est typiquement le type de méthode qu’on utilise aujourd’hui en
économie.
Aujourd’hui on utilise une méthode hypothético-déductive, on fait des hypothèses, incorporées dans
des modèles, et les modèles permettent de faire des propositions ou prédictions.
3 questions qui se posent :



Les hypothèses doivent-elles être réalistes ? Dans la plupart des cas, les économistes ont
répondu que non, ce qui est important c’est la justesse des prédictions qu’on peut faire.
Ces prédictions sont vérifiées sur le passé, donc elles ont un statut très ambigu.
Aujourd’hui, la science économique (orthodoxe) utilise ce type d’approches. Dans le passé, il
y a eu beaucoup de débats entre les économistes pour savoir s’il fallait utiliser cette méthode
hypothético-déductive ou une méthode inductive. Il y a un courant d’économistes « Les
institutionnalistes » qui défendait une position opposée, ils disaient qu’il fallait partir de
l’observation de faites pour établir un certain nombre de propositions (méthode à postériori).
La différence principale entre cette approche et l’approche orthodoxe, est que cette
approche inductive ne peut pas proposer de généralisations, de prédictions parce qu’elle ne
parle que des faits (à un moment donné, à un endroit donné). C’est pour cette raison qu’elle
a disparu.
Pour John Stuart Mill (comme pour Auguste Comte) la « vrai » science doit utiliser une méthode à
postériori. C.-à-d. que la sociologie de Comte est une vrai science parce qu’elle utilise une méthode à
postériori. Le problème est que l’économie ne peut pas utiliser la méthode à postériori parce que :



Les données empiriques qui sont accessibles et utilisables en économie ne sont pas des
données expérimentales mais sont des données d’observation. Puisque ce ne sont pas des
données expérimentales, on ne peut pas utiliser l’expérimentation pour comprendre la
nature des relations entre les phénomènes observés.
Le deuxième obstacle qui se pose est que les phénomènes économiques sont des
phénomènes complexes qui mettent en jeu un grand nombre de facteurs qui sont
interconnectés. Il est donc très difficile d’isoler certaines relations.
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L’économie ne pouvant pas utiliser cette méthode expérimentale, elle doit utiliser la méthode à
priori (on formule des hypothèses à partir desquelles on va déduire des propositions que l’on peut
tester). Précisément, l’un des hypothèses fondamentale que l’on fait en économie politique est que :
« L’homme est un être qui désire posséder des richesses, qui préfère un gain plus important à un
gain plus faible » ce que Mill appelle l’hypothèse d’avidité rationnelle.
Donc l’économie politique s’intéresse uniquement à ces comportements individuels motivés par
l’avidité rationnelle. Mill : « l’économie politique fait abstraction de tout autre passion ou motif
humain ».
Pour Mill, cette hypothèse n’est absolument pas réaliste, il insiste sur le fait qu’aucun économiste ne
pense que les êtres humains sont comme ça, mais il faut faire des hypothèses réductrices pour
pouvoir isoler certains faits que l’on va expliquer.
Grace à la méthode à priori, l’économie peut quand même faire un certain nombre de propositions
que l’on peut tester empiriquement. L’économie est une science au sens de cette méthode à priori.
B) La théorie économique de John Stuart Mill
Mill est réputé pour avoir réalisé une synthèse de la pensée classique. Il y a quand même certaines
originalités dans son approche, l’une d’entre elle étant la distinction qu’il fait entre la production et
distribution des richesses : Pour Mill,


la production des richesses obéit à des lois naturelles, donc il est impossible de la modifier.
Elle échappe au contrôle des Hommes.
En revanche, la distribution des richesses est le produit de la volonté des Hommes. Ca signifie
que si la société à un moment donné décide que la production des richesses n’est pas
répartie équitablement, la société peut décider de corriger cette situation par la distribution.
Ce sont donc les Hommes qui décident ce qui est juste ou injuste en matière de répartition
des ressources. C’est très important, parce que John Stuart Mill introduit un élément
normatif, un jugement de valeur dans l’économie politique.
Ce qui est important dans sa synthèse, c’est la théorie du salaire que propose Mill. Il repart d’une
idée que l’on trouve chez Smith qui est que les salaires dépendent du rapport entre la population et
le capital de la façon suivante : on suppose qu’à un moment donné dans une économie il existe une
somme de richesse qui est consacrée uniquement au paiement des salaires. Cette somme peut
évoluer au cours du temps en fonction de l’épargne et des investissements, mais à un moment précis,
cette somme est donnée.
Cela veut dire que la somme qui va être répartie entre les travailleurs sous forme de salaires est
donnée. Et donc le salaire individuel va dépendre du nombre de travailleurs. Le salaire est déterminé
uniquement par le nombre de travailleurs. Ce raisonnement conduit à une implication : Si on
augmente les salaires, cela va se faire au détriment de l’emploi.
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Son opinion à propos de ce point a évolué au cours du temps et il a fini par admettre qu’il y avait
d’autres facteurs qui pouvaient déterminer les niveaux des salaires. Mais, fondamentalement, c’est
la population des travailleurs qui détermine le niveau des salaires individuels.
Deuxième point important de cette synthèse : La théorie de la valeur qu’il propose :
Fin séance 11
Il cherche à expliquer la valeur d’échange. Quels sont les critères qui expliquent qu’un objet va avoir
une valeur d’échange, c.-à-d. une valeur sur un marché.

Il considère 2 facteurs qui sont déterminants pour expliquer la valeur d’un objet :
o L’utilité : Pour qu’un objet possède une valeur, il faut qu’un objet soit utile. L’utilité
correspond à la satisfaction d’un désir chez Mill, et est déterminée par « la
disposition à payer de l’acheteur ». Cette disposition à payer entretient un rapport
avec la valeur d’échange, il faut évidemment que le prix soit inférieur à ce que
l’individu est prêt à payer (disposition à payer) pour obtenir le bien. En disant cela,
Mill reconnait la nécessité de l’existence d’un surplus du consommateur (prix –
DAP = surplus). Mill a donc déjà l’intuition de ce concept avant Marshall.
o La difficulté d’acquisition d’un objet : Elle dépend de 3 facteurs :
 Elle peut provenir d’une limitation absolue de l’offre (œuvres d’arts, la
terre…). Ca s’applique à tous les biens qui ne peuvent pas être produits en
quantités importantes.
 Elle peut provenir des conditions de production : La manière dont on va
combiner le capital et le travail pour obtenir le bien. Cela signifie que le bien
est difficile à acquérir parce qu’il est couteux à produire.
 La difficulté d’acquisition d’un objet peut provenir de la loi des rendements
décroissants. Les objets sont difficiles ou pas à produire, mais leur
production va être limitée à cause de ces rendements décroissants, ce qui
peut impliquer que ces objets soient difficiles à acquérir.

L’état stationnaire : Mill est la seul des économistes classiques pour lequel l’état stationnaire
est une bonne chose. L’état stationnaire c’est un état sans croissance. Pour lui l’état
stationnaire est bon, parce que c’est un état sans concurrence. C’est cet élément là qu’il
trouve positif.
Il s’opposait à la concurrence parce qu’il considérait que l’état naturel de l’homme n’est pas
de lutter sans fin pour sa survie. Au contraire, il était favorable à une société dans laquelle
personne n’aspirerait, ne souhaiterait devenir plus riche que ce qu’il n’est déjà. Cette
situation sans concurrence, sans souhait de s’enrichir sans fin c’est exactement l’état
stationnaire.
C’est un des aspects les plus remarquables de la pensée de Mill, et c’est intéressant de noter
qu’il réalise cette synthèse de l’économie classique en arrivant à une conclusion qui est
opposée à ce que les autres économistes classiques défendaient. C’est d’autant plus
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remarquable que Mill a la réputation d’être libéral. Sa pensée a été revendiquée par les plus
grands économistes libéraux et ultralibéraux du 20° siècle, en particulier Hayek.
Hayek est des fondateurs du courant des économistes autrichiens (ultralibéraux), il a été
conseillé de Margaret Thatcher. Une de ses idées les plus originales c’est celle de la
privatisation de l’émission de monnaie. Il était un grand admirateur de John Stuart Mill, et a
contribué à faire de Mill un économiste libéral.
Malgré cela, le libéralisme de Mill doit être jugé avec beaucoup de précautions, il était
favorable à l’intervention de l’Etat, contre la concurrence etc…
On va voir maintenant les prolongements de l’économie classique sur le continent.
V. Le libéralisme économique sur le continent européen.
1. Jean Baptiste Say et l’impossibilité des crises :
La pensée de JB Say est d’actualité. Ça fait 50 ans qu’elle est redevenue d’actualité, mais en
particulier ces dernières années. Il dit que pour éviter les crises, il faut favoriser l’offre.
C’était un entrepreneur, et un économiste qui a eu beaucoup de contacts avec les économistes de
son époque en particulier avec Malthus, Sismondi, … Il peut être présenté comme un continuateur
de la pensée d’Adam Smith. Ses ouvrages de référence : En 1803 parait la première édition de son
traité d’économie politique ou simple exposé de la manière dont se forment, se distribuent et se
consomment les richesses. Ce sous-titre est intéressant pour 2 raison.
-
-
Il faut noter la référence aux richesses. L’économie politique s’intéresse aux richesses et
on voit ici que cette idée est très proche de l’idée qu’avait Smith sur l’économie politique
et les richesses.
Ce sous-titre nous donne une définition de l’économie qui est la science qui étudie la
manière dont se forment, se distribuent et se consomment les richesses. C’est une des
définitions de l’économie, cette définition nous dit que l’économie se définit par son
objet, par son champ, ce qui signifie que dans l’ensemble des activités humaines, il en
existe un certain nombre qui ont une dimension économique, et l’économie doit se
limiter à étudier ces activités-là.
Remarque : Il existe une offre définition de l’économie : L’économie se définit par sa
méthode, et non pas par son objet. En particulier, cette méthode qu’on applique au
comportement de choix. L’économie est une méthode que l’on peut utiliser pour étudier
tous les comportements de choix (Le premier à esquisser cette idée-là est Robbins en
1932). Cette définition nous dit que l’économie n’a plus d’objet spécifique mais peut
étudier tous les comportements de choix.
Remarque : Becker ne dit pas que les gens (par exemple) se marient parce qu’ils font un
calcul coût avantage, il dit que on peut expliquer leur comportement en faisant
l’hypothèse qu’ils font un calcul coût avantage.
Essentiellement aujourd’hui, l’idée c’est que l’économie est une méthode qu’on peut appliquer pour
expliquer toutes sortes de phénomènes.
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Say a écrit 2 autres ouvrages intéressants : 1815 : « un catéchisme d’économie politique » et 1830
« un cours d’économie politique ».
A) Le rôle des entrepreneurs pour Say :
Say est l’un des premiers à avoir souligné l’importance des entrepreneurs dans le fonctionnement de
l’économie. L’entrepreneur n’avait pas de statut particulier chez les classiques (ils ne faisaient pas la
différence entre l’entrepreneur et le capitaliste).
Say va donc isoler cet individu particulier et en faire le pivot de l’activité économique, donc
quelqu’un de différent du capitaliste.
Evidemment, dans un système où il n’y a que 3 types de revenu (salaire, profit, rente), il est difficile
de faire une place à l’entrepreneur. Il faudrait lui inventer un revenu spécifique, ce que Say ne fera
pas. Le revenu de l’entrepreneur sera un revenu tiré de la vente du même type que les salaires. Mais
pour pouvoir considérer l’existence des entrepreneurs, Say doit expliquer ce que ces individus
produisent.
Pour lui, les entrepreneurs sont des gens qui produisent des services. Or, chez les classiques, le
travail qui produit les services est considéré comme un travail improductif, et donc pour Smith,
Ricardo, etc… les services ne sont pas productifs.
Say va se démarquer de cette position en considérant que les services sont productifs, donc les
entrepreneurs produisent aussi de la richesse donc l’activité des entrepreneurs contribue à la
richesse des nations.
Il n’ajoute donc pas vraiment de catégorie d’individu, mais élargit la définition que donnaient les
classiques du travail productif. Cette approche va avoir une conséquence qui est que la définition que
Say retiens de la richesse est beaucoup plus large que la définition de Smith.
B) La loi des débouchés :
Pendant tout le 19ièm siècle, il y a une question qui se pose et qui intrigue particulièrement les
économistes classiques c’est la question de savoir s’il peut exister des crises de surproduction
généralisées. Cette question se pose en particulier parce que d’un côté la plupart des économistes
classiques à l’exception de Malthus considèrent que la réponse théorique à la question est non, donc
ils pensent qu’il n’y a pas de limite à l’accumulation capitaliste et donc il y aura toujours des
débouchés à une production croissante.
D’un autre côté, il y a un certain nombre de phénomènes qui semblent montrer que les crises de
surproduction sont tout à fait possibles.
Donc Say est celui qui va véritablement théoriser l’impossibilité des crises de surproduction
généralisées. Ca implique que les crises qui surviennent sont nécessairement attribuables à des
causes extra économiques et donc sont parfaitement évitables dans le cas du fonctionnement
normal du système.
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Il propose la « loi des débouchés » qui dit en particulier que : « tout offre crée sa propre
demande » parce que nous achetons des produits avec des produits, il écrit aussi « la production
ouvre des débouchés aux produits ».
Cette loi signifie que les crises de surproduction générales sont impossibles mais il est tout a fait
possibles qu’il existe des crises de surproduction particulières c.-à-d. qu’il peut y avoir des
déséquilibres sur certains marchés mais ces déséquilibres se compenseront avec des déséquilibres
sur d’autres marchés. Donc les déséquilibres se compensent. Ces déséquilibres partiels sont possibles
parce que il peut se produire une mauvaise allocation du capital, mais c’est totalement impossible
c’est que tous les marchés puissent être en surproduction en même temps.
Donc au niveau global de l’économie, (la somme des demandes par marchés) la somme des
demandes sera égale à la somme des offres.
Plus précisément, la demande dont Say parle c’est à la fois la demande potentielle et effective (Say
ne fait pas la différence entre les deux). C’est précisément sur ce point que Malthus s’opposait à Say
en disant la demande effective peut être insuffisante. Pour Say, la demande potentielle est toujours
égale à la demande effective c.-à-d. que tout revenu, tout pouvoir d’achat se traduit nécessairement
en demande. Malthus disait au contraire, un pouvoir d’achat n’implique pas forcément une envie
d’acheter proportionnée.
Remarque sur l’épargne : Say considère que l’épargne n’est pas une fuite dans le circuit économique
parce que cette épargne se traduit immédiatement en investissement, (donc par définition épargne
investissement).
Il existe 2 catégories de biens, les biens de consommation et les biens d’investissements. Il existe
aussi 2 types d’affectations du revenu : une partie du revenu est affectée à l’achat de biens de
consommation, et une autre à l’épargne. La partie du revenu affectée à la consommation correspond
à l’achat de biens de consommations et la partie affectée à l’épargne correspond à l’investissement.
Cette égalité a un sens particulier chez Say : C’est l’épargne qui conditionne l’investissement.
L’épargne n’est jamais un problème pour le fonctionnement de l’économie.
Pour que la loi des débouchés soit vérifiée, il faut une hypothèse fondamentale sur la monnaie : La
monnaie doit être neutre, c’est un simple intermédiaire des échanges, elle n’a pas de valeur en ellemême, et donc les agents économiques ne la conservent pas pour elle-même. Donc elle n’est pas
thésaurisée et comme le disait Say, la monnaie est un voile qui facilite les échanges et c’est
précisément parce que la monnaie est un voile qu’on peut dire que les produits s’échangent contre
des produits. Donc cette formule « les produits s’échangent contre les produits » ne nous dit pas que
Say résonnait dans une situation de troc, mais que Say considérait la monnaie comme un voile donc
comme neutre.
C) L’explication des crises
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Fin séance 12
L’idée principale c’est que la loi des débouchés garantit l’impossibilité des crises économiques (crises
de surproduction généralisées, c.-à-d. que les crises partielles sont possibles, mais on ne peut pas
avoir des déséquilibres sur tous les marché en même temps). Donc globalement, dans l’économie les
déséquilibres se compensent. Donc la demande ne peut jamais être insuffisante. C’est évidemment
le point avec lequel Keynes sera en total désaccord.
Les crises sont possibles si des évènements exogènes viennent perturber le fonctionnement de
l’économie. On peut avoir des catastrophes naturelles, mais aussi et surtout les interventions
politiques. Toute législation abusive, toute intervention trop systématique de l’état dans le
fonctionnement de l’économie va non seulement entrainer un déséquilibre, mais ce déséquilibre va
être durable.
Donc pour résumer les crises de surproduction durable ne sont possibles que si elles sont produites
par l’intervention de l’Etat.
De manière sous-jacente, l’idée que Say met en avant dans la loi des débouchés est celle que les
activités économiques se coordonnent spontanément, sans besoin d’intervention extérieure.
Donc cette loi est une autre version de la main invisible avec 2 différences. Premièrement, Say ne
met pas l’accent sur l’intérêt personnel de manière aussi marquée que Smith. En plus, il insiste
beaucoup plus sur l’offre que ce que faisait Smith. C’est aussi une autre version de la théorie qu’on
trouvait chez Mandeville dans la fable des abeilles.
Cette croyance dans un ordre spontané est ce qui caractérise fondamentalement le libéralisme. On
va en voir une autre explication.
2. Les harmonies naturelles de F. Bastiat.
Bastiat (1801 – 1850) : Il a eu une vie « tragique » parce qu’il est mort jeune de la tuberculose et il a
subit beaucoup d’échecs pendant son existence. Il a été élu à l’assemblée nationale en 1848 et
connait une réputation posthume qui est relativement importante en particulier chez les libéraux
pour deux raisons :
-
-
Une raison technique : Il a écrit des ouvrages qui font référence : « les sophismes
économiques » et « les harmonies économiques ». Dans ces ouvrages il développe une
idée fondamentale qui est l’idée de l’ordre spontané et de l’harmonie naturelle des
intérêts individuels.
Dans les années 60, l’acteur Reagan a enregistré la lecture de certains textes de Bastiat
pour des raisons de propagande des idées libérales, certains chefs d’entreprise
Américains lui avaient demandé de faire ça. C’est après avoir lu Bastiat que Ronald
Reagan a été convertit au libéralisme et à plus ou moins décidé de s’engager en politique.
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Bastiat n’est pas vraiment un théoricien de l’économie, c’est surtout un journaliste, un pamphlétaire.
Il a écrit des textes visant à tourner en ridicule les pratiques qu’il dénonçait.
Qu’est-ce que nous dit Bastiat ? 2 idées principales :
A) Une certaine analyse de l’Etat :
Bastiat est l’un des premiers à avoir systématiquement stigmatisé l’intervention de l’Etat, souligné les
limites de l’intervention de l’Etat. Son argument principal est que l’Etat n’agit pas pour défendre
l’intérêt général mais prend ses décisions sous la pression de groupes d’intérêts (aujourd’hui les
lobbies). Il prétend que tous ceux qui affirment agir au nom de l’intérêt général ne font en fait que
défendre des intérêts privés, ils déguisent leurs intérêts privés sous l’intérêt général pour une raison
évidente : l’intérêt général n’existe pas. De ce fait, on ne peut pas prétendre être motivé par l’intérêt
général.
Les conséquences de cette croyance ou de ce postulat :
-
-
L’Etat intervient de manière nécessairement injuste parce qu’il favorise certains intérêts
au détriment d’autres intérêts
L’Etat intervient de manière totalement désordonnée puisque ces interventions
obéissent à des intérêts privés, et donc chaque fois qu’on groupe fait pression sur l’Etat,
l’Etat va essayer de le satisfaire.
Dès que l’Etat a commencé à intervenir dans le fonctionnement de l’économie, il ne peut
plus s’arrêter (si on a dit oui à quelqu’un, il faut dire oui à un autre, oui à tous …).
(Cercle vicieux)
Le corolaire de ce raisonnement là c’est que ce n’est pas en changeant de gouvernement que l’on va
changer la situation, la seule façon de supprimer le problème c’est de supprimer l’Etat. On voit un
élément de radicalité dans la pensée de Bastiat parce qu’il ne s’agit pas seulement de repenser l’Etat,
ça ne serait qu’une solution temporaire.
On dit que l’Etat est « capturé » (terme anglais) par des groupes d’intérêts ce qui veut donc dire que
l’Etat défend bien les intérêts des gens qui se sont appropriés cette quantité.
Remarque : Ce qui est intéressant c’est que ces économistes libéraux ont une conclusion sur le rôle de
l’Etat très proche des conclusions Marxistes. Pour lui, l’Etat ne défend pas l’intérêt général de la
population, mais les intérêts de la bourgeoisie, et les libéraux qui suivent Bastiat (courant des choix
publics notamment) ont exactement la même logique que Marx. La différence c’est que chez Marx
c’est un phénomène qui est liée à des classes sociales (l’état défend une classe sociale) alors que chez
les libéraux, l’état ne défend pas des classes sociales, il défend des groupes privés.
Cette capture de l’Etat par des groupes de pression est évidemment mauvaise parce qu’elle va à
l’encontre de l’intérêt de tous et en particulier elle entraine un gaspillage social parce qu’elle
transforme les situations de concurrences en situation de monopole et le monopole représente un
coût social par rapport à la concurrence.
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Ces idées-là sont relativement banales aujourd’hui. Bastiat est un des premiers à les mettre en avant
mais il ne fait pas ça de manière véritablement théorique. Il le fait dans des écrits qui sont plus des
articles de journaux.
2 exemples :
-
Le cas de la ligne de chemin de fer Paris -> Madrid : Vers la fin des années 1830, on a
discuté de la création d’une ligne de chemin de fer en Paris et Madrid, et on se
demandait où devait passer le train, et où devait s’arrêter le train (même question
aujourd’hui quand on veut faire une ligne de TGV). Certains parlementaires (bordelais en
l’occurrence) ont essayé de faire pression sur le gouvernement pour obtenir un arrêt à la
gare de Bordeaux. Evidemment au prétexte que cet arrêt serait bénéfique à l’économie
locale. Mais à ce moment-là, si Bordeaux a le droit à un arrêt, alors pourquoi pas un arrêt
à Angoulême, Poitier, Orléans… Dans chaque cas, cet arrêt serait défendu au nom de
l’intérêt général, on arriverait à ce que Bastiat appelle le chemin de fer négatif (trop
d’arrêts). Donc Bastiat pousse à l’extrême un des arguments mis en avant par les
parlementaires de Bordeaux pour bien montrer qu’une fois que l’Etat est intervenu pour
orienter l’activité économique alors il n’y a plus de limite.
-
La pétition des marchands de chandelles : C’est un texte ironique écrit par les marchands
de chandelles pour demander au gouvernement de protéger l’industrie de la chandelle
contre la concurrence déloyale du soleil. L’argument est que les marchands de
chandelles ne peuvent pas lutter contre le soleil, et donc ils demandent à l’Etat de
prendre une loi pour obliger les individus à boucher leurs fenêtres ce qui les obligerait à
acheter plus de chandelles donc permettrait aux fabricants de chandelle d’embaucher
plus de gens, ça distribuerait des revenus, ce qui profiterait donc à tout le monde.
On voit bien ce que Bastiat dénonce, il dénonce le fait que l’Etat prenne des lois pour
favoriser certains individus qui font croire que leurs bénéfices privés vont bénéficier à la
collectivité. Bastiat conclu que cet exemple montre que tout le monde veut vivre au
dépend de l’Etat, tout le monde veut obtenir des bénéfices de l’intervention de l’Etat en
oubliant que l’Etat vit au dépend de tout le monde.
Les marchands de chandelles mettent en avant un bénéfice que l’on pourrait obtenir
grâce à la nouvelle loi qu’ils demandent, mais ne tiennent pas du tout compte des coûts
que cette loi va faire peser sur la collectivité. Donc l’élément fondamental dans la pensée
de Bastiat, c’est qu’on a d’un côté des choses positives qui se voient, et d’un autre des
choses négatives qui ne se voient pas. Toute la capture de l’Etat repose sur cette
ambiguïté, surévalué ce qui se voit, et sous-évaluer ce qui ne se voit pas.
B) Concurrence et ordre spontané :
Puisqu’il critique l’intervention de l’Etat, Bastiat est favorable à une organisation de la production sur
un mode concurrentiel. Donc il plaide pour le laisser-faire, pour la non intervention de l’Etat. Ce
laisser faire est justifié en particulier par ces différences fondamentales entre « ce qui se voit et ce
qui ne se voit pas ». Pour Bastiat toute action humaine (donc toute mesure de politique économique)
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a deux conséquences, une positive et une négative. Mais aussi, des conséquences visibles et des
conséquences invisibles.
L’interventionnisme a deux caractéristiques :
-
Il a des conséquences positives qui se voient
Des conséquences négatives qui ne se voient pas
La concurrence à des caractéristiques opposées :
-
Elle a des conséquences qui peuvent être négatives et se voient
Des conséquences positives qui ne se voient pas
Lorsqu’on compare les deux, on va avoir tendance à privilégier l’interventionnisme, parce que ce
qu’on voit est positif, alors qu’on ne voit pas ce qui est négatif. Le problème, c’est que les
conséquences qu’on ne voit pas sont les conséquences de long terme ce qui veut dire que même si
la concurrence à des conséquences négatives dans le court terme, elle aura des positives dans le long
terme, le contraire pour l’interventionnisme.
Donc sur le long terme ce qui l’emporte c’est la concurrence.
Au niveau international, Bastiat est pour la libre circulation des biens et personnes et donc
évidemment contre le protectionnisme. Selon lui, les mesures qui sont prises pour protéger les
économies nationales n’obéissent pas à des objectifs économiques, mais à des objectifs politiques.
Elles sont prises pour favoriser certaines industries et donc sont prises au dépend du reste de la
population.
Et puis, le protectionnisme a des conséquences de court terme qui peuvent être positives mais qui
seront négatives dans le long terme. Donc on a ici une vision relativement cohérente et assez
radicale des relations entre l’Etat, le politique et l’économique. B
Bastiat ne va pas être celui qui sera le plus radical dans ce sens-là, il y a un penseur Belge : Molinari
qui va pousser la logique de l’harmonie naturelle des intérêts jusqu’à sa forme la plus ultime, puis
qu’il va aller jusqu’à remettre en question toute intervention de l’Etat en particulier 2 exemples :
-
La monnaie : Molinari est contre le monopole d’Etat en matière d’émission de monnaie.
Il est donc favorable à une organisation concurrentielle de cette émission de monnaie.
Donc il défend l’idée que les banques et même n’importe quelle institution devraient
avoir le droit d’émettre la monnaie qu’elles veulent et les agents économiques
choisiraient parmi toutes ces monnaies en concurrence celles qu’ils préfèrent.
L’avantage de ce type de monnaie est que seule la monnaie dans laquelle on a confiance
resterait en circulation dans l’économie, c.-à-d. seules les meilleures monnaies.
(Problème, concurrence instable, soit des monnaies très locales, soit un système de
monopole et on revient à la situation d’avant). La différence c’est que si cette
concurrence entre monnaie dérive vers une situation de monopole, alors ce monopole
aura été la conséquence d’un processus de concurrence.
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-
Molinari défend aussi la suppression de l’intervention de l’Etat dans le domaine de
l’enseignement. Il s’oppose à l’enseignement d’Etat au sens où il s’oppose à
l’enseignement monopolisé par l’Etat parce qu’il considère que l’Etat impose ses désirs
et ses objectifs aux individus et donc oriente l’éducation dans un sens qui n’est pas
favorable au développement des individus, à la prospérité économique. Donc c’est aussi
un problème de développement individuel. Donc, le seul moyen d’éviter cet
endoctrinement des individus par l’Etat est de restituer la production de l’éducation au
secteur privé sans que l’Etat n’ait le droit de subventionner ce secteur privé.
Molinari pousse le raisonnement jusqu’au bout, il remet en cause l’intervention de l’Etat aussi pour
les fonctions régaliennes telles que la police, la justice, la défense … et donc considère que toutes ces
activités peuvent être légitimement confiées au secteur privé qui sera plus efficace que l’Etat en
matière de production de ces biens. Donc c’est un côté anarchiste chez Molinari, et pour distinguer
son anarchisme libéral de l’anarchisme de gauche traditionnel, on a inventé un terme : Le
mouvement libertaires.
Molinari est un libertarien ou des anarcho-capitalistes.
Fins séance 13
Partie 2 : Les réactions contre l’économie classique
Pendant tout le 19° siècle on va voir se développer la pensée classique, on va aussi voir apparaître
l’économie mathématique (avec Cournot), donc d’une certaine façon on voit se développer une
certaine forme d’économie qui est relativement libérale, qui a tendance à expliquer (comme on l’a vu
avec Say) que les crises économiques sont passagères, et que l’économie est en développement, en
croissance. En parallèle on va voir se développer une pensée un peu plus progressiste qui est la
pensée socialiste. D’une certaine façon la socialisme va se nourrir des crises économiques, des
tensions sociales qui apparaissent dans la société suite à la révolution industrielle.
Premièrement, les conditions de travail dans les usines sont catastrophiques, les gens travaillent très
longtemps, les enfants commencent à travailler très jeunes. Les parents ont besoin que leurs enfants
travaillent puisque ça leur fait un revenu supplémentaire. Il n’y a pas de syndicalisme ouvrier, toutes
les tentatives qui sont faites pour créer des syndicats sont réprimées très rapidement dans la
violence.
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Donc l’économie est peut-être dans une situation de croissance, mais cette croissance se fait à un
coût social qui est très élevé. C’est une société très violente. Les économistes libéraux sont
persuadés que la violence peut disparaitre par le commerce (c’est l’idée de Montesquieu, ce qu’il
appelait le doux commerce), le commerce est un moyen de supprimer la violence. Les penseurs
socialistes et en particulier Marx ont une vision totalement différente puisqu’ils pensent que la
société capitaliste est une société fondamentalement violente basée sur une opposition entre classes
sociales, et ces conflits ne peuvent se résoudre que par la violence (chez Marx, la révolution).
Au cœur de l’économie politique, il y a cette idée de violence, de conflit, d’ordre et de désordre, et
on a vu comment les libéraux résolvent cette question, par le commerce, et on va voir maintenant
comment les socialistes proposent d’aborder la question.
Il faut faire la différence entre le socialisme scientifique et le scientifique préscientifique.
Section 1 : Le socialisme préscientifique français :
Le socialisme scientifique ce sera le socialisme de Marx, c’est lui-même qui utilisera ce terme pour
qualifier sa pensée. La différence principale entre le socialisme scientifique et le socialisme
préscientifique, c’est la suivante :
Le socialisme scientifique propose ou cherche à comprendre le fonctionnement de la société
capitaliste et se limite à cet aspect en mettant l’accent sur les concepts comme le concept
d’aliénation, de lutte des classes. Le socialisme préscientifique (que Marx appelle le socialisme
utopique) n’a pas de base théorique sérieuse donc il ne peut pas vraiment comprendre les raisons du
fonctionnement du système capitaliste (ou la manière dont fonctionne le système capitaliste) et
s’intéresse essentiellement à un problème (auquel Marx ne s’intéresse pas du tout) qui est la
description de la société post-capitaliste (utopique) ce qui pour Marx est impossible à faire
précisément parce que la société post capitaliste n’est pas encore là. Donc on ne peut pas savoir
comment elle va fonctionner et toute description de cette société capitaliste tient plutôt du roman,
de la littérature, plutôt que de la science.
Tous les penseurs socialistes préscientifiques sont persuadés que le changement de la société
capitaliste à une société socialiste se fera de manière progressive grâce à un homme providentiel,
d’un messie, se fera par contagion, parce que cet homme providentiel aura réussi à convaincre les
élites de la société dans laquelle il vit de la nécessité du changement. Pour Marx, cette position est
très naïve parce que les élites en place ne vont pas accepter de céder leur position et de changer de
société et donc le changement ne peut arriver que de manière conflictuelle.
Un des principaux préscientifique est Saint-Simon. Il était comte et a abandonné son titre à la
révolution française. Il a développé une théorie qu’on peut appeler l’industrialisme parce que ce c’est
un socialisme qui repose sur l’industrie et qu’il différencie quand même du libéralisme.
1. La théorie de l’histoire de Saint-Simon (1760-1825).
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Comme tous les socialistes, il a avant tout une théorie de la manière dont l’Histoire se déroule. Il
pense que les sociétés humaines suivent une processus, une évolution qui contient du progrès (..) et
qui alterne des périodes de crises avec des périodes de croissance, des périodes d’ordre avec des
périodes de désordre.
Donc il y a cette idée que les sociétés humaines évoluent vers plus de progrès, donc il y a une
tendance vers le progrès mais cette tendance consiste dans une succession de phases de conflits et
de phases pacifiques.



Les phases pacifiques, les phases d’ordre sont des phases de création pendant lesquelles les
sociétés fonctionnent autour de valeurs communes qui assurent la cohésion sociale, et la
croissance est possible dans ces phases là parce qu’il y a cette cohésion, cette cohérence
autour de valeurs communes.
Les phases de crises, de désordre, sont des périodes de destructions pendant lesquelles tout
ce qui a était construit avant est remis en cause ou détruits. C’est nécessaire parce qu’il s’agit
de préparer la phase suivante, qui sera une nouvelle phase de croissance, d’ordre. Donc ces
phases de destruction sont des phases de destruction créatrice d’une certaine façon.
Il y a cette succession jusqu’au moment où on atteint le moment du passage à la société
socialiste. Il n’y a pas de raison de précipiter le changement, le changement arrivera quand il
arrivera. C’est comme chez Marx, mais chez Saint-Simon contrairement à marx, il y a cet
homme providentiel qui aura compris que « c’est le moment ».
Pourquoi est ce que cette alternance de phase conduit à un changement qui doit arriver au
début du 18° siècle ?
Le début du 18° siècle est la dernière phase critique qui annonce une phase « organique », une
nouvelle phase de progrès, et la révolution française marque la basculement vers cette nouvelle
phase. Saint-Simon va expliquer comment il faut préparer l’avènement de la société socialiste.
Plus précisément, il identifie 3 états de la société, c.-à-d. 3 périodes dans l’histoire des Hommes
-
-
d’abord les sociétés primitives qui sont fondées sur l’usage de la force : dans lequel le
pouvoir va à ceux qui possèdent la force militaire.
La période des sociétés de légiste : fondées sur le droit (celle qui précède la révolution
française). Ce qui domine dans cette période, c’est le savoir, la connaissance, le droit
comme base du pouvoir, de la domination.
La période des sociétés industrielles : Fondées sur l’industrie mais aussi sur la science. La
période qui s’annonce au début du 19° siècle est cette période dans laquelle le but sera
donc de produire des richesses, des biens, d’organiser le travail de façon à améliorer
cette production industrielle, et donc la production industrielle, la science, remplacent la
guerre, la conquête et même le droit comme mode d’organisation politique, de la
société…
On voit chez Saint-Simon un peu la même chose que chez Montesquieu et chez les libéraux dans le
sens où la violence peut être supprimée non pas par le commerce mais par l’industrie.
2. Le rôle de l’industrie.
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C’est en 1824 que Saint-Simon a inventé le terme d’industrialisme pour mettre l’accent sur
l’économie tout en se distinguant du libéralisme. La différence fondamentale avec le libéralisme,
c’est la notion de planification. Dans le libéralisme, l’ordre est spontané, il émerge dans un processus
ascendant c.-à-d. que l’ordre est la conséquence, le résultat des actions individuelles, mais il n’y a
aucune intentionnalité, aucun désir de créer de l’ordre. Pour l’industrialisme, il y a au contraire l’idée
ou la notion que l’ordre est planifié, il est produit intentionnellement donc l’ordre est le résultat d’un
processus descendant.
Donc Saint-Simon pense qu’il faut organiser le fonctionnement de la société comme il faut organiser
le processus de production dans les entreprises. Et donc l’industrie devient un principe politique.
Pour bien comprendre ce que signifie l’industrialisme, il faut penser à une parabole qu’a inventé
Saint-Simon : Imaginons que la France perde en 1 jour 3000 personnes, les 50 meilleurs de chaque
science, de chaque industrie, de chaque métiers. Alors, le pays ne s’en relèverait pas. En revanche,
imaginons que la France perde tous les ministres, hommes politiques, nobles, religieux, alors il n’en
résulterait aucun mal politique. Saint-Simon a été poursuivi pour avoir écrit ça, parce qu’on l’a accusé
d’apologie du crime, d’incitation au crime. Cette parabole nous montre que pour Saint-Simon, les
personnages importants dans un pays sont ceux qui produisent des richesses et pas les
administrateurs, les gestionnaires, les propriétaires.
Donc on voit que Saint-Simon n’oppose pas les patrons aux ouvriers par exemple, il oppose ceux qui
produisent à ceux qui ne produisent pas. Cette idée-là est au cœur de cette doctrine industrialiste.
Deux caractéristiques de cette société peuvent être soulignées :
-
-
Dans la société industrielle ce sont les industriels qui remplacent les hommes politiques.
Donc les hommes politiques sont enlevés du système, ils n’ont plus de responsabilité,
parce que « il faut libérer l’industrie des interventions des pouvoirs politiques » et parce
que les seuls qui ont vraiment l’habitude ou les capacités de résoudre les problèmes
d’organisation ce sont les industriels. Donc l’industrialisme de Saint-Simon est une
doctrine profondément technocratique.
Il faut soustraire l’industrie à la concurrence. L’organisation de l’économie doit-être
encadrée par une constitution industrielle, il faut aussi des tribunaux de commerce et
des tribunaux d’industrie, il faut des conseils d’industrie, et toute cette structure
institutionnelle conduit donc à un gouvernement qui est un gouvernement industriel, et
ce gouvernement industriel est ce qu’on pourrait appeler une administration des choses
c.-à-d. une administration de la production, des objets et on gouverne les hommes
comme s’ils étaient des objets.
Retenir : l’aspect socialiste est dans la planification.
Le Saint-Simonisme a attiré relativement peu de personnes, on va parler de secte à propos d’eux,
mais malgré cela, il va avoir une influence indirecte relativement importante, beaucoup d’industriels
français du 19° siècle seront convaincus par les idées de Saint-Simon, par exemple Lesseps qui est
l’ingénieur du canal de Suez. On trouve des héritiers de Saint-Simon jusqu’à aujourd’hui, les
socialistes français ne sont pas indifférents aux thèses de Saint-Simon.
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Section 2 : Le socialisme scientifique de Marx.
1. La théorie de la valeur travail.
A/
Marx adopte le même point de départ que les économistes classiques à savoir, le concept de valeur
travail. Donc pour Marx la valeur est fondée dans le travail. Il cherche à comprendre ce qu’est la
valeur, mais il adopte une position de philosophe, ce qui le distingue évidemment des classiques (qui
abordaient le problème en économistes) et c’est pour cette raison qu’il reproche aux classiques
d’avoir discuté la question de la valeur sans avoir essayé de la comprendre. Alors pour Marx, la
valeur n’est pas une propriété naturelle des objets, donc elle n’obéit pas à une loi économique qui
serait universelle, mais est liée à une forme particulière et historiquement déterminée d’économie,
en l’occurrence l’économie marchande capitaliste.
Donc autrement dit, le concept de valeur va dépendre du type de société dans laquelle on se trouve
puisqu’elle est historiquement déterminée et en particulier elle va dépendre du rapport qui existe
entre les individus, du rapport qui existe dans le processus de production, puisque tout ce qui nous
détermine dépend de notre place dans le processus de production.
Donc en fait la valeur n’est pas simplement un rapport entre des objets, mais c’est avant tout un
rapport entre des individus. Ce rapport est déterminé par le processus de production, la valeur est le
produit d’un rapport de force, de domination, entre des individus, entre des membres de différentes
classes sociales.
Dans cette discussion sur la valeur, il y a un point très important, c’est la différence entre les notions
d’abstrait et de concret, et cette différence est fondamentale parce qu’elle permet de comprendre le
concept d’aliénation. Donc la valeur des marchandises (y compris le travail) ne peut être comprise
qu’en introduisant cette distinction entre abstrait et concret et ce point-là est un point que les
classiques ont totalement ignoré. Ils ont ignorés le fait que la valeur a une dimension concrète et une
dimension abstraite.
________________________ fin séance 14 __________________________
Cette distinction entre abstrait et concret est particulièrement importante quand on cherche à
comprendre le rôle du travail dans la valeur.
Le travail comme toute marchandise a donc ses deux dimensions, abstraite et concrète.


La dimension concrète du travail (ou le travail concret) : Elle représente le travail qui est
effectivement mis en œuvre dans le processus de production pour produire un bien (mis en
œuvre en pratique, dans les usines, dans les entreprises pour produire un bien). C’est donc la
dépense d’énergie des individus qui est effectuée sous une forme déterminée (à un moment,
à un endroit précis, dans un processus de production particulier). Le travail concret va être
différent suivant les endroits, les conditions dans lesquelles on se situe.
Le travail abstrait : Renvoi à l’idée que le travail est l’essence de l’Homme. Par exemple la
différence entre les Hommes et les animaux, ce n’est pas la raison comme chez Descartes,
c’est le fait que les Hommes travaillent pour Marx. Ce travail abstrait existe
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indépendamment des formes concrètes qu’il prend c.-à-d. le fait de travailler comme un
menuisier, comme un maçon, ce sont des formes concrètes, mais l’ouvrier et le maçon, tous
deux travaillent et dans cette dimension abstraite du travail ce sont des êtres humains. Il
existe donc indépendamment des processus de production.
C’est ce travail abstrait qui fonde la substance de la valeur. Autrement dit c’est parce que
les marchandises sont le produit du travail qu’elles ont une valeur mais le produit du travail
abstrait et pas le produit du travail concret.
L’importance de cette distinction réside dans le fait qu’elle permet de comprendre le phénomène de
l’exploitation (au sens de Marx). Sans cette distinction, l’exploitation serait difficile à comprendre.
B/ Le travail socialement nécessaire :
Marx adopte donc une théorie de la valeur travail comme les économistes classiques mais il est plus
proche de Ricardo que des autres dans le sens où il considère que la valeur d’une marchandise est
donnée par la quantité de travail nécessaire à sa production. Donc Marx adopte une théorie de la
valeur travail incorporée. Il rajoute une distinction que ne fait pas Ricardo : Une distinction entre le
travail direct et le travail indirect.
-
Le travail direct : Marx l’appelle le travail vivant.
Le travail indirect : Marx l’appelle le travail mort. Ca correspond au travail qui a été
nécessaire pour produire les moyens de production.
La valeur d’une marchandise va être déterminée par ce que Marx appelle le temps de travail
socialement nécessaire pour produire cette marchandise. Ce travail socialement nécessaire c’est en
fait la quantité moyenne de travail (en temps) nécessaire pour la production d’une marchandise.
Marx déduit un résultat de cette idée de temps de travail socialement nécessaire : Si une entreprise
utilise une technique de production qui est obsolète va donc avoir besoin de plus de travail que ses
concurrents et donc va vendre les marchandises qu’elle produit plus cher que ses concurrents et elle
va être désavantagée par rapport à ses concurrents. De manière symétrique, une entreprise qui
innove va utiliser moins de travail que ses concurrents et donc va vendre ses marchandises moins
cher que ses concurrents.
Ce raisonnement est intéressant pour la conclusion qu’il permet de tirer : Les entreprises vont avoir
une forte incitation à innover parce que cela leur permet de réduire la quantité de travail qu’elles
utilisent de façon à donc vendre les marchandises moins cher que les autres mais les entreprises qui
innovent et donc qui utilisent moins de travail que les autres font moins de plus-value c.-à-d. moins
de profit. Donc il y a une contradiction entre 2 mouvements : D’une part la volonté de réduire la
quantité de travail pour vendre moins cher et d’autre part la nécessité d’utiliser du travail pour
réaliser de la plus-value.
2. L’exploitation capitaliste :
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A/ La valeur du travail :
Marx se distingue de la tradition de la valeur du travail classique (qui considère que le travail luimême est une marchandise) en considérant que le travail n’a pas de valeur. Donc on peut dire que le
travail n’est pas une marchandise. Le travail n’a pas de valeur parce que le travail est la substance de
la valeur. On ne peut pas chercher la substance de la substance du travail puisque le travail est la
substance des marchandises.
Pourtant les ouvriers reçoivent un salaire donc ils reçoivent un paiement pour l’utilisation de leur
travail. Mais pour Marx le salaire ne correspond pas à la valeur du travail, mais a la valeur de
l’utilisation de la force de travail. Donc Marx substitue la marchandise force de travail à la
marchandise « travail ». Et donc ce qui est vendu aux capitalistes quand le travailleur travail, ce n’est
pas son travail mais sa force de travail.
Même si on change le nom, la question reste la même, quelle est la valeur de la force de travail ?
Marx l’explique exactement comme les classiques en termes de subsistance : La valeur de la force de
travail est donnée par la quantité de travail qui a été nécessaire à sa production. C’est une théorie de
la valeur de travail appliquée à la force de travail.
Il y a une autre différence fondamentale avec les classiques : Le salaire n’est pas un salaire naturel
comme chez les classiques. Chez les classiques c’est quelque chose de naturel au sens où dès qu’on
s’éloigne du salaire de subsistance, il y a des forces qui le ramène au salaire de subsistance. Chez
Marx le salaire est produit par une structure sociale, la structure économique, la structure de
production et n’a rien de naturel. Donc si on change de société, si on change de structure de
production, le salaire ne sera plus déterminé de la même façon.
B/ Exploitation et plus-value.
Marx n’est pas le premier à parler de plus-value, Proudhon avant lui avait aussi parlé de plus-value,
avec des concepts similaires. Donc la plus-value mesure l’exploitation des travailleurs et elle existe
précisément parce que les travailleurs sont exploités. Pourquoi y a–t-il cette exploitation ?
Il y a exploitation parce que le revenu qui est perçu par le travailleur ne représente qu’une partie de
la rémunération de son travail. L’explication est la suivante : Le revenu qui est la contrepartie de la
valeur produite se partage entre le capitaliste et le travailleur mais le capitaliste ne produit aucune
valeur (le seul à produire de la valeur est le travailleur), cela veut dire que le travailleur ne reçoit pas
la totalité de ce qu’il produit, de la valeur qu’il créée et l’écart entre les deux est la plus-value.
Donc la plus-value c’est la différence entre la valeur créée par le travailleur et la valeur reçue par le
travailleur. Cette plus-value est appropriée par le capitaliste. On peut comprendre la plus-value de la
façon suivante : S’il faut payer 8 heures de travail pour que le travailleur reproduise sa force de
travail, alors le capitaliste va lui payer ses 8 heures, mais si le travailleur est employé 10 heures, alors
les 2 heures de différences ne seront pas payées au travailleur. Ces 2 heures représentent la plusvalue, donc l’exploitation du travailleur par le capitaliste.
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Proudhon considérait cette exploitation (et donc la plus-value) comme du vol. Le capitaliste vole les 2
heures qu’il n’a pas payé au travailleur.
Pour Marx, la plus-value n’est pas du vol, parce que le capitaliste paye au travailleur ce qu’il doit lui
payer. Il doit lui payer le salaire de subsistance, il lui paye. Cela veut dire que la plus-value est
inévitable dans une société capitaliste, ce n’est pas de l’abus de pouvoir de la part du capitaliste,
c’est simplement le produit du fonctionnement normal du système. Cela provient du fait que la
société capitaliste est divisée en classes, que d’un côté il y a ceux qui possèdent les moyens de
production, et d’un autre côté les prolétaires.
Les travailleurs sont obligés d’accepter sinon ils n’ont pas de salaire, et d’une certaine façon les
capitalistes n’ont pas le choix, s’ils n’exploitent pas les travailleurs, leurs entreprises vont faire faillite.
3. Comment le système fonctionne-t-il ? La dynamique des sociétés capitalistes
A/ La logique de capitaliste
Marx fait la différence entre 2 cycles de reproduction ou d’accumulation du capital.
-
-
Le cycle de reproduction simple : Caractérise les sociétés marchandes, d’échange. Dans
ces sociétés, la logique de fonctionnement est de vendre pour acheter donc on a un cycle
que Marx appelle le cycle de Marchandise – Argent – Marchandise : Les marchandises
d’une valeur M s’échangent contre de l’argent qui permet d’acheter d’autres
marchandises. M -> A -> M. L’objectif de ces sociétés est bien d’acheter des biens.
Le logique capitaliste est complètement inversée, il ne s’agit plus de vendre des
marchandises pour acheter des marchandises, mais d’acheter pour vendre. Le but de la
société capitaliste c’est de vendre. Et donc le point de départ de la société capitaliste ce
ne sont pas des marchandises, mais c’est l’argent A, il l’utilise pour acheter des
marchandises, qui vont lui permettre d’obtenir plus d’argent : A –> M -> A.
Donc le gain monétaire est identifié par Marx comme étant l’objectif du capitaliste. On
peut dire ici que la finalité de l’accumulation capitaliste est de gagner de l’argent.
Le cycle de reproduction élargi. Dans ce cycle : L’argent du capitaliste qui provient d’une
accumulation primitive lui permet d’acquérir un certain capital productif P qui est formé
de capital constant et de capital variable. A  P = C + V  M = C + V + pl  A*. Ce
capital lui permet d’obtenir une certaine quantité de marchandise dont la valeur
correspond au capital fixe + capital variable + la plus-value (pl).
Donc on voit que l’argent initial (primitif) permet de produire une valeur qui pour partie
rembourse le capital productif, mais aussi une partie supplémentaire (la plus-value).
Ces marchandises permettent de gagner de l’argent
M  A*, A* étant > au A initial (grâce à la plus-value).
C’est pour cette raison que Marx parle de cycle de reproduction élargie, parce que la
quantité d’argent à la fin est différent que celle du début.
B/ L’accumulation du capital
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Comment le capitaliste va-t-il utiliser l’argent qu’il récupère à l’issue du processus d’accumulation ?
-
Il rembourse les avances initiales
Il utilise la plus-value pour sa consommation personnelle mais aussi pour acheter du
capital supplémentaire.
Donc grâce à la plus-value, le capitaliste peut augmenter la quantité de capital qu’il utilise pour
produire donc on a bien un phénomène circulaire : La plus-value permet l’accumulation, donc plus la
plus-value est grande plus l’accumulation peut être importante, donc plus il obtient de plus-value
etc… Du côté des ouvriers et des capitalistes, à court terme le cercle est relativement vertueux parce
que l’exploitation permet aux travailleurs malgré tout de gagner de l’argent, et aux capitalistes de
continuer à fonctionner. Par contre à long terme, ce phénomène d’accumulation contient en luimême les conditions de la destruction du système. Donc le fonctionnement même du système
capitaliste conduit le système à sa destruction.
C/ La concentration capitaliste et l’évolution du système
La dynamique du système capitaliste conduit le système à sa perte et cette destruction va s’observer
par le fait qu’il va y avoir de plus en plus de crises économiques. C’est donc une logique totalement
opposée à la logique de J.B. Say. Contrairement à Say, Marx est persuadé que le système capitaliste
ne peut pas échapper aux crises, que ces crises de surproduction sont à la fois possibles et inévitables.
La notion de crise est l’essence même du capitalisme, c’est un régime qui fonctionne de crise en crise.
Il est inutile d’essayer de les empêcher parce que leur répétition va conduire à la disparition du
système.
Il y a une sorte de fatalisme, laissons le système fonctionner, et quand les crises seront de plus en
plus dramatiques, le système va finir par disparaitre.
Au cœur de l’explication que Marx donne des crises qui caractérisent le système capitaliste, se trouve
la monnaie. Chez Say la monnaie ne peut pas être la cause des crises, chez Marx la monnaie est la
cause des crises.
La monnaie est la cause des crises pour 2 raisons :
-
-
Les agents épargnent et thésaurisent de la monnaie (exactement ce qui ne peut pas
arriver chez Say). Par conséquent il y a des fuites dans le système et c’est donc la
première raison des crises de surproduction.
Dans le système capitaliste tout s’achète et tout se vend c.-à-d. que tout est monétisé,
marchandisé (transformé en bien) et cette caractéristique expliquerait le fait qu’un acte
d’achat ne soit pas nécessairement suivit pas un acte de vente parce qu’il y aurait des
circonstances dans lesquelles les individus préfèrent ne pas transformer leurs ressources
en marchandises (ne pas acheter) et donc créent des conditions pour qu’il y ai des crises
de surproduction.
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D/ La baisse tendancielle du taux de profit
C’est justement un des éléments qui va expliquer la chute du capitalisme. Cette idée on la trouve
chez les classiques comme Ricardo ou Mill (l’idée que les capitalistes vont faire de moins en moins de
profit, de moins en moins investir, et que ça va conduire à l’état stationnaire). La différence est que
Marx attribue la baisse du taux de profit non pas à des conditions objectives (pas que les terres sont
en quantités limités, …) mais vient du mode de fonctionnement spécifique de l’économie capitaliste.
Donc la baisse tendancielle du taux de profit est la caractéristique de la société capitaliste.
Le raisonnement de Marx :

Le taux de profit c’est le rapport entre les profits obtenus et les capitaux investis. A l’échelle
de l’économie, les profits sont équivalents à la plus-value. Les capitaux sont à la fois le capital
fixe et le capital variable. Donc le taux de profit c’est r =
=
=
Donc l’évolution du
taux de profit va dépendre de la plus-value sur le capital variable et de C/V.
(pl / V) : La plus-value sur le capital variable représente le taux de plus-value ou encore le
taux d’exploitation. C’est le rapport entre le travail qui est pris aux travailleurs et le capital
variable qui est payé aux travailleurs.
Et (C/V) représente la composition organique du capital ce que les économistes
néoclassiques appellent l’intensité capitalistique (K/L en macro).
On voit ici que si le taux d’exploitation augmente, alors le taux de profit va augmenter, donc
plus on exploite les travailleurs, plus il y a de profit, et en même temps si la composition
organique du capital augmente, alors ça fait diminuer le taux de profit.
Donc ces 2 facteurs évoluent en sens inverse.
Ce taux de profit évolue sous la double influence du taux d’exploitation (pl /v) et de
l’intensité capitalistique (c/v).
---------------------------- Fin séance 15 --------------------------- Pour Marx, la composition organique du capital (en tendance) augmente (K/L augmente,
donc l’intensité capitalistique augmente, donc la quantité de capital par travailleur
augmente).
Ceci s’explique parce que les capitalistes cherchent à faire des économies sur les couts de
MO, et le meilleur moyen pour le faire c’est d’employer moins de main d’œuvre.
Donc la quantité de capital par rapport au travail augmente ou encore la partie du capital
qui est utilisée pour acheter des machines prend de plus en plus d’importance par
rapport au paiement des salaires et ça signifie aussi que l’accumulation (capitaliste) se
fait plutôt en faveur du capital constant que du capital variable. Par conséquent cette
tendance que les capitalistes ont à augmenter le capital par rapport au travail (a
dépenser + d’argent pour acheter une machine que pour payer les travailleurs) entraine
la baisse du taux de profit.
Donc les capitalistes en tant qu’individus agissent contre les capitalistes en tant que
classe sociale.
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Un corolaire de cette évolution est que le nombre de chômeurs va avoir tendance à
augmenter. Ce qui contribue à constituer ce que Marx appelait une armée industrielle
de réserve.
-
Dans le même temps, Marx écrit que le taux d’exploitation va rester constant ou en tout
cas ne va pas augmenter suffisamment pour diminuer les effets de l’évolution de c/v.
On arrive bien à la conclusion que le taux de profit r baisse.
2 remarques :


Il existe un certain nombre de contre-tendances qui peuvent retarder la baisse tendancielle
du taux de profit (par exemple l’augmentation de la productivité) mais ça ne fait que retarder,
ça ne contredit pas la tendance générale du phénomène.
Cette évolution n’est pas linéaire mais elle se fait de manière chaotique, par une succession
de crises qui vont toutes conduire au même résultat de manière de plus en plus violente. Le
résultat c’est évidemment la fin du capitalisme et l’idée générale de Marx c’est que le
capitalisme va disparaitre dans des crises de plus en plus violentes.
Donc il y a un peu la même idée que chez les classiques d’une tendance vers l’état stationnaire, à la
différence que pour les classiques l’état stationnaire est un état plus ou moins paisible alors que pour
Marx l’état stationnaire n’est pas paisible, c’est la dernière étape avant la disparition du capitalisme.
Marx renverse l’économie politique parce qu’il utilise l’économie politique puisqu’il l’utilise pour
expliquer la fin du système et pas pour le légitimer. Et d’une certaine façon Marx est le dernier à faire
de l’économie politique au sens où c’est un peu le dernier a avoir une vision globale de l’évolution
des sociétés.
Les économistes qui suivent Marx vont se concentrer sur une approche scientifique. Les économistes
desquels on va parler maintenant vont rentrer dans la période de la transformation de l’économie
politique en science économique. Les premiers dont on va parler sont ceux qui sont les moins
scientifiques …
Section 4 : Le marginalisme
C’est une idée qui apparait vers la fin du 19° siècle. C’est considéré comme une découverte multiple
parce que c’est découvert par plusieurs économistes plus ou moins à la même époque dans des
endroits différents et de manière indépendante (environ 1870).
Les économistes concernés sont Léon Walras (en Suisse), Carl Menger (a Vienne) et Jevons (a
Cambridge).
On parle souvent de révolution marginaliste, c’est un tort, il n’y a pas eu de rupture dans l’évolution
des idées.
1. L’école de Lausanne
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On parle de l’école de Lausanne par référence aux deux économistes qui ont occupé la chaire
d’économie politique dans cette université qui sont Walras et Pareto.
1) Walras (1834-1910): Economie pure et équilibre général :
Il est arrivé en économie politique de manière relativement tardive, il a essayé plusieurs fois de
rentrer à l’école polytechnique, il a échoué 2 fois, il a échoué à l’école des Mines, il a écrit un roman
en 1958 (échec), puis il décide de se remettre à l’économie politique mais il n’obtiendra la chaire à
Lausanne qu’en 1870 et il restera à Lausanne jusqu’en 1892 et c’est en 1874 que parait la première
édition de son ouvrage de référence (éléments d’économie politique pure). C’est l’ouvrage dans
lequel il parle de la théorie de l’équilibre général et dans lequel il pense démontrer l’existence de
l’équilibre général.
L’influence de Walras est essentiellement posthume, son travail va rester quasiment ignoré jusque
dans les années 1950. Son travail va être exhumé et réutilisé par 2 économistes américains
essentiellement, Arrow et Debreu (ce sont Arrow et Debreu qui démontrent l’équilibre général).
A. Les 3 branches de l’économie politique et sociale :
Qu’est-ce que l’économie politique selon Walras : L’économie politique c’est la science qui étudie la
richesse sociale.
Walras définit la richesse sociale comme : L’ensemble des choses matérielles et immatérielles qui
sont rares c.-à-d. qui d’une part nous sont utiles et d’autre part n’existent à notre disposition qu’en
quantité limitée.
On remarquera ici un élément important qui est le concept de rareté : la richesse est définie en
termes de rareté mais il est aussi intéressant de voir que la rareté est définie en termes d’utilité.
Il utilise 3 caractéristiques pour définir ce qui est rare :
-
-
La rareté se définie par l’appropriabilité : Les choses rares sont appropriables. Personne
ne va s’approprier ce qui est inutile ou abondant et réciproquement tout le monde a
envie de s’approprier ce qui est utile et rare.
Les choses rares sont valables et échangeables : On voit implicitement que Walras
abandonne l’idée de la valeur travail.
Les choses rares sont multipliables au sens où on a intérêt à produire les choses rares
pour pouvoir les échanger, les vendre…
Conclusion : La richesse sociale est appropriable, échangeable et reproductive. Ce qui fait la richesse
c’est donc tout ce qui a ces caractéristiques.
L’économie politique c’est donc cette science qui étudie les richesses, mais il y a plusieurs façons
d’étudier la richesse sociale, donc il y a plusieurs façons de concevoir l’économie politique et plus
précisément il y a plusieurs niveaux dans l’économie politique.
Pour comprendre ces 3 façons, il faut savoir que Walras par de l’idée que la science étudie les faits et
il classe les faits en 3 catégories :
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

Les faits naturels : Ce sont ceux qui concernent les rapports entre les objets et ces faits
naturels sont étudiés par les sciences pures. Ici l’objectif est de découvrir la vérité.
Les faits humanitaires : 2 catégories, ils concernent :
o Les rapports entre les hommes et les objets : Cela relève de ce que Walras appelle les
sciences appliquées (ou de l’art). Le but est de découvrir ce qui est utile en étudiant
les rapports entre les hommes et les objets.
o Les rapports entre les hommes : Domaine de la morale, l’objet est de découvrir ce qui
est juste.
On a donc 3 types de sciences, les sciences pures qui découvrent la vérité, les sciences appliquées qui
découvrent ce qui est utile, et la morale. Cette trichotomie se retrouve dans l’économie politique.
Ces 3 niveaux d’études de faits se retrouvent dans l’économie politique. On a donc 3 formes
d’économie politique.
a) L’économie politique pure :
C’est donc une science exacte, du même type que la physique etc… Walras établit de manière
évidente l’idée que l’économie politique pure est une science physico-mathématique. Cette science
étudie l’échange, la détermination des prix sous un régime hypothétique de libre concurrence
absolue. Ce n’est pas une science qui est ancrée dans la réalité, elle ne repose donc pas sur une
approche inductive mais uniquement sur une approche déductive. Les conclusions de cette théorie
pure sont des théorèmes qui sont logiquement démontrés, donc ils ne se préoccupent pas de
réalisme, c’est une approche abstraite qui représente une situation idéale.
Les conclusions de cette théorie pure sont toujours vraies à partir du moment où le raisonnement est
logique. Cette théorie vise à trouver ce qui est vrai.
Cette économie politique pure exclu tous les jugements de valeur ou normatifs. Walras ne juge pas la
concurrence, il se contente d’en décrire scientifiquement le fonctionnement. Il sépare donc de
manière radicale les jugements moraux des jugements scientifiques.
b. L’économie politique appliquée :
C’est un art, son objet est de comprendre, d’expliquer la production de la richesse sociale et
l’organisation de l’industrie. Son critère ce n’est plus le vrai, c’est l’utile. Elle cherche les règles qui
permettent de produire utilement la richesse sociale. Cette économie politique appliquée s’intéresse
au fonctionnement de tous les domaines de l’économie (agriculture, industrie, commerce etc…).
Il existe une troisième branche :
c. L’économie sociale :
C’est une branche de la morale (ce n’est pas une science) qui traite de la répartition de la richesse
sociale entre les hommes dans un objectif de justice. L’idéal de justice selon Walras c’est celui de la
révolution française « liberté, égalité, fraternité ». Donc il faut une répartition de la richesse qui soit
équitable ce qui le conduit à des conclusions assez surprenantes, en particulier il considère que pour
que la richesse sociale soit la plus équitable possible il faut que l’état s’approprie toutes les terres.
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Il a écrit : « mon but est de faire dire un jour que j’ai su être socialiste en restant libéral ». Cette
approche méthodologique est fondamentale chez Walras.
B. La logique de l’équilibre général
La logique de l’équilibre général relève de l’économie politique pure. Donc il s’intéresse à l’équilibre
général dans une perspective d’échange et son but est de montrer que l’échange volontaire entre
individus bien informés, motivés par leur intérêt personnel et rationnels peut conduire à une
organisation de la production et a une distribution des richesses à la fois efficace et mutuellement
avantageuse. La seule interaction sociale qui est prise en compte par Walras c’est celle qui se réalise
sur des marchés. Les agents économiques interagissent en tant qu’individus (pas de classe sociale,
pas de syndicats, pas de Cartels…) donc c’est une analyse totalement individualiste et Walras cherche
à comprendre comment les actions de ces individus se coordonnent.
Pour faire cette démonstration, Walras a besoin des prix et donc la coordination des actions
individuelles et l’obtention de l’équilibre général se fait à partir des prix ce qui veut dire que tout le
modèle de Walras est en fait une théorie des prix.
Mais les prix permettent d’expliquer comment on va arriver à l’équilibre, mais si on parle d’équilibre
général il faut aussi prendre en compte l’interdépendance des marchés ce qui n’est pas nécessaire si
on raisonne en équilibre partiel. C’est précisément ce que fait Walras, qui pense qu’il est possible de
représenter cette interdépendance par un système d’équations simultanées. Donc chaque marché va
se représenter par 3 types d’équation : une équation de demande, une équation d’offre et une
équation d’équilibre.
Donc à retenir tout repose sur la flexibilité des prix, et la représentation de l’économie se fait pas un
système d’équation.
Sur chaque marché, chaque agent économique va adopter un raisonnement à la marge c.-à-d. qu’il
va égaliser les utilités ou les productivités marginales pondérées par les prix.
Fin séance 16
C) L’équilibre général
L’équilibre général c’est la situation qui existe quand on a un système de prix tel que :
-
Sur chaque marché l’offre = demande.
Chaque agent est capable d’acheter et de vendre exactement ce qu’il souhaite acheter et
vendre
Toutes les firmes et tous les consommateurs sont capables d’échanger précisément ces
quantités de biens qui maximisent leur profit et leurs utilisés.
Il faut noter que cet équilibre général est un équilibre réel c.-à-d. que la monnaie ne joue aucun rôle.
Dans le modèle Walrasien un bien est défini comme le numéraire mais ce bien n’affecte pas le
fonctionnement des marchés. Cet équilibre général est possible parce que les marchés sont
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concurrentiels. La détermination de l’équilibre général se fait dans le cadre de l’économie politique
pure c.-à-d. de l’analyse d’une situation idéale (situation concurrentielle pour Walras).
L’équilibre général est possible aussi parce que les agents cherchent à maximiser une fonction
objectif (utilité, profit). Autrement dit, parce que les agents ont un comportement qui est prévisible,
ils ne font pas n’importe quoi.
Enfin, l’équilibre général est possible parce que les prix sont flexibles. On peut l’opposer à
l’ajustement Marshallien qui lui se fait par les quantités.
2 questions se posent à propos de l’équilibre général :

La question de l’obtention théorique de cet équilibre général (donc résolution analytique du
modèle) : Walras est persuadé qu’il a démontré l’existence de l’équilibre général parce qu’il a
construit un système d’équation et d’inconnues dans lequel il y a autant d’équations que
d’inconnues. Donc on peut résoudre le système et trouver une solution, et évidemment le
fait qu’il y ai autant que d’équation que d’inconnues n’est ni une condition nécessaire ni
suffisante de l’existence d’une solution au système. Il peut y avoir plusieurs solutions, donc
plusieurs équilibres, ou pas du tout, et dans le cas où il y a une solution il est possible que
cette solution n’ai aucun sens économique (par ex. prix négatifs).
Par conséquent, Walras n’a pas démontré l’existence de l’équilibre général, les premières
démonstrations formelles sont faites dans les années 1930, et ce sont Debreu Mc Kenzie et
Arrow qui l’ont vraiment démontré.
Remarque : La démonstration la plus aboutie a été faite par Debreu dans un ouvrage « théorie de la
valeur ». Debreu a été obligé d’inventer un concept pour pouvoir démontrer l’existence de l’EG, c’est
le concept de quasi-concavité.
Donc l’équilibre général est un problème qui est résolu techniquement, théoriquement (même si
Walras se trompe). Maintenant il faut trouver le processus qui permet d’obtenir la solution pratique
à ce problème.

L’obtention pratique (« empirique » ≠ réalité) de l’équilibre général : Walras invente ce qu’il
appelle un mode de résolution par tâtonnement qu’il qualifie d’empirique, de pratique, et
même d’effectif. Ces termes ne contiennent pas de dimension réaliste, ils ne renvoient pas à
un réalisme quelconque. Les analyses que Walras propose du tâtonnement sont des analyses
abstraites, et le processus qu’il propose est un processus lui-même abstrait, idéal, qui permet
sur un marché idéal de parvenir à des prix d’équilibre idéaux. La dimension pratique porte
simplement sur l’obtention de cet équilibre dans ce monde idéal. Le tâtonnement serait
réaliste si on était dans ce monde idéal de concurrence pure et parfaite.
Ce tâtonnement : Walras le décrit sous la forme d’un marché unique, une sorte de bourse
aux échanges dans laquelle des prix sont criés au hasard. Walras utilise une forme passive
« sont criés », il ne dit pas « quelqu’un cri les prix » donc il définit un phénomène totalement
impersonnel, ce qui veut dire qu’il y a un doute sur la nature de celui qui crie les prix. On a
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pris l’habitude de parler de commissaire-priseur Walrasien mais il n’y a absolument aucune
certitude que Walras entendait bien qu’il puisse y avoir un commissaire-priseur.
Donc on a ce marché, sur lequel les prix sont criés au hasard, sur la base de ces prix, chaque
agent économique détermine les quantités offertes et demandées de façon à ce que les
utilités et les profits soient maximisés, ensuite ces quantités sont agrégées et 2 situations
sont possibles : Si tous les marchés sont à l’équilibre alors on est dans une situation
d’équilibre général et le problème est résolu. Si les marchés ne sont pas en équilibre alors les
prix vont être modifiés suivant le principe de la concurrence et on tâtonne jusqu’à avoir
atteint l’équilibre général.
L’important c’est qu’il n’y a aucun échange qui se réalise effectivement si les prix ne sont pas
les prix d’équilibres, il n’y a aucune transaction en dehors de l’équilibre. Le processus de
tâtonnement est un processus fictif qui précède la réalisation de l’échange.
Pour Walras, cette condition est une condition fondamentale, et si elle n’était pas observée,
cela voudrait dire que des échanges pourraient avoir lieu à des prix faux (qui ne sont pas
ceux qui correspondent à la réalisation théorique de l’équilibre général).
D) Le socialisme de marché
Fondamentalement, l’idée du socialisme de marché est d’appliquer le modèle Walrasien à une
économie socialiste et d’expliquer le fonctionnement du socialisme à partir du processus de
tâtonnement.
Cette idée du socialisme de marché a été formulée en réponse à des attaques d’un économiste
Autrichien (Ludwig von Mises). Son argument est de dire qu’une économie socialiste n’est pas viable
parce qu’il n’y a pas dans ces économies de monnaie et pas de prix. Donc pour Mises, aucune
économie ne peut fonctionner sans prix parce que sans prix les agents économiques ne peuvent pas
évaluer les biens donc ne peuvent pas échanger, les entreprises ne peuvent pas produire parce
qu’elles ne savent pas quelle quantité produire si elles n’ont pas de prix, donc Mises explique que les
prix monétaires sont indispensables à la transmission des informations dont les agents ont besoin
pour faire leur calcul économique.
Mises fait cette démonstration en 1920 dans un ouvrage « le calcul économique en régime
collectiviste ». Cet ouvrage a donné naissance à un débat autour de la possibilité du calcul
économique dans une économie socialiste.
Rappel : La théorie Marxiste de la valeur est une théorie de la valeur travail donc dans cette logique
c’est le travail qui détermine la valeur des biens cela veut donc dire que la valeur des biens n’est pas
déterminée sur le marché. Par conséquent, les prix ne sont pas du tout indispensables au calcul
économique.
Le socialisme de marché a donc été élaboré en réaction à la position de Mises. C’est une théorie qui
se développe dans les années 1930.
-
Dickinson (1933) : « les systèmes d’équilibre économiques tels qu’on les trouve décrits
chez Walras ne sont pas des descriptions réalistes de la société actuelle mais des visions
prophétique d’une économie socialiste future ».
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-
Oskar Lange (1936) : Il explique précisément comme peut fonctionner cette économie
socialiste de marché et la description qu’il donne correspond parfaitement au modèle
Walrasien mais déplacé dans la réalité. C.-à-d. que le commissaire-priseur se trouve
incarné dans une institution qu’il appelle le bureau central de planification qui joue le
rôle de crieur de prix. Il annonce les prix aux agents économiques qui font leur calcul, et
si les prix sont différents des prix d’équilibre alors une autre étape du processus de
tâtonnement se met en place, etc… jusqu’à l’équilibre. En fait, Lange supposait que le
bureau central de planification allait pouvoir faire tous les calculs de maximisation de
fonction d’utilité et de profit que font normalement les agents économiques dans une
économie de marché de façon à calculer les prix de l’équilibre général.
Ce système suppose quand même que le planificateur central puisse avoir accès à
suffisamment d’information pour pouvoir calculer les prix. Ca suppose une capacité de
collecte d’information énorme, ça suppose aussi que le planificateur central dispose de
relais lui permettant d’avoir ces informations et ça suppose aussi des capacités de calcul
énormes.
- Hayek : Il va critiquer cette approche : Il dit que les capacités de calcul qui sont
nécessaires pour faire fonctionner une économie sont telles qu’il est impossible de les
regrouper dans une seule entité. Une économie de marché fonctionne parce qu’elle est
décentralisée.
- Roemer (fin 90’) : Il a essayé de réactualiser le débat sur le socialisme de marché en
disant que grâce aux ordinateurs et aux capacités de calcul des ordinateurs modernes, il
était possible d’envisager de nouveau le socialisme de marché. Ca n’a pas eu beaucoup
de succès, parce que l’idée de faire fonctionner une économiste socialiste comme une
économie de marché est une idée totalement artificielle, parce que les deux systèmes
sont incompatibles.
2) Pareto : sociologie, économie et optimalité
Fin séance 17
Pareto est né en 1848 à Paris (mort en 1923). Il a commencé à travailler comme ingénieur dans une
entreprise de chemin de fer, et en 1893 il a pris la suite de Walras à Lausanne (chaire d’économie
politique). Il a écrit 2 ouvrages importants, un manuel d’économie politique, et un traité de
sociologie générale.
Pareto est mort juste au moment où le parti fachiste (Mussolini) est arrivé au pouvoir en Italie.
Pareto considérait le fachisme comme quelque chose de positif dans l’évolution des société, il voyait
ça comme une réaction contre la décadence bourgeoise. Même s’il considérait que certaines dérives
étaient possibles dans le fachisme (en particulier il avait conscience du danger de restriction des
libertés individuelles), il a accueilli favorablement l’arrivée de Mussolini au pouvoir et a été nommé
comme représentant de l’Italie à la commission du désarmement de la société des nations en 1922.
Au début de l’année 1923 le gouvernement de Mussolini propose de le nommer comme sénateur
mais il meurt avant d’avoir pu officiellement être nommé.
Donc clairement il y avait des liens entre l’idéologie fachiste et Pareto. On trouve des idées assez
surprenantes dans sa sociologie, et s’il y a une proximité à établir avec le fachisme c’est à ce niveaulà.
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A) La philosophie sociale de Pareto
Pareto insiste sur la distinction qu’on doit faire entre l’approche que l’on peut adopter en tant
qu’économistes qui est une approche idéologiquement neutre et l’approche que l’on peut adopter
en sociologie qui elle a une dimension idéologique.
L’économie et la sociologie sont les 2 composantes de la science sociale, qui a 2 branches, l’approche
scientifique, pure, idéologiquement neutre, et l’approche sociologique.
On a chez les économistes cette idée que la science économique doit être neutre, et dénuée de tout
jugement de valeur.
Quand il fait de la sociologie, Pareto a une conception peu démocratique de la société. Dans son
traité de sociologie, il fait la distinction entre 2 types d’action :
-
-
Actions logiques : Elles sont beaucoup moins nombreuses que les secondes, ce sont les
actions qui correspondent à celles de l’homo-économicus (les actions économiques en
gros). Il explique que les actions logiques ce sont des actions telles que le but objectif est
identique au but subjectif et ces actions consiste à articuler des moyens et des fins. La
mise en œuvre de ces moyens pour atteindre des fins est identique du point de vue
subjectif et objectif, ce qui explique que ces actions puissent faire l’objet d’une approche
parfaitement scientifique.
Ce sont les actions rationnelles de l’analyse économique d’aujourd’hui. Pareto évacue
toute subjectivité de la rationalité
Actions non logiques : Les actions dans lesquelles il y aura un écart entre la dimension
subjective et la dimension objective.
L’économie va étudier les situations dans lesquelles les individus ont des comportements
parfaitement logiques, et il va donc définir l’économie politique pure comme une construction
hypothétique qui correspond au cas où les individus ont des comportements logiques. Cette
dimension hypothétique signifie que l’économie politique pure n’a pas de dimension réaliste
(proximité avec Walras). Mais, cette étude permet de tirer un certain nombre de loi de ces
constructions hypothétiques, et c’est à ça que renverra le concept d’optimum de Pareto.
La sociologie s’occupe donc des actions non-logiques et c’est à cette étude que Pareto consacre son
traité de sociologie générale. Il y décrit l’évolution des sociétés humaines. Il part du principe que
toute société humaine est divisée en 2 catégories :
-
Une couche inférieure :
Une élite :
formé des individus qui ont des capacités supérieures, mais d’une part il existe dans ces élites des
individus moins capables que d’autres et d’autre part, dans la couche inférieure de la population il y a
aussi des individus avec des qualités supérieures. La société fonctionne autour de la circulation des
élites. Les individus qui ont des qualités supérieures mais qui sont nées dans la couche inférieur
parviennent à accéder aux élites (sorte de promotion sociale) et remplacent les individus qui ont des
qualités inférieures dans les élites. Cette circulation des élites permet un renouvellement quasi-
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permanent de la classe dirigeante et ce renouvellement permet à la classe dirigeante de se maintenir
au pouvoir.
Cette dynamique permet de comprendre le fonctionnement normal des sociétés humaines. Mais, à
certains moment de l’histoire, la circulation des élites devient insuffisante, donc le renouvellement
de la classe dirigeante ne peut plus se faire et donc les individus de mauvaise qualité de la classe
supérieure ne sont plus remplacés, les individus de la classe inférieure ne peuvent plus accéder à la
classe supérieure, donc la société se fige et on ne peut sortir de cette situation que par un révolution.
B) La théorie de l’utilité ordinale de Pareto
Rappel : L’utilité est un concept clé de l’utilitarisme (en particulier Benthamien) et plus précisément,
ce qui est central dans l’utilitarisme c’est l’idée que l’utilité peut être mesurée et quantifiée.
L’utilitarisme Benthamien a une conception cardinale de l’utilité, cette conception cardinale vient du
fait que l’utilité est une propriété intrinsèque des objets, c.-à-d. que les objets ont la propriété
d’engendrer de l’utilité, de la satisfaction, parce qu’ils satisfont des besoins des individus. L’utilité ne
vient donc pas des individus, de la perception que les individus ont des objets. Par conséquent,
l’utilité n’est pas subjective mais objective (parce qu’elle vient des objets) et donc peut être
quantifiée, mesurée.
C’est important parce que Pareto va s’éloigner de cette conception-là.
A la fin du 19° siècle, il y a des économistes comme Edgeworth qui pensent que l’on peut mesurer la
satisfaction que l’on retire de la consommation d’un bien et Edgeworth est influencé par les travaux
de psychologie expérimentale qui sont menés à son époque. Il écrit Mathematical Psychics, l’idée
que l’on peut proposer une théorie mathématique de la psychologie humaine, donc que l’on peut
quantifier la satisfaction que l’on retire de la consommation d’un bien. Pour effectuer cette mesure,
il invente un appareil « Hedonimètre » qui est une machine psychophysique qui permet de mesurer
le bonheur en enregistrant le niveau de satisfaction, de plaisir, ressenti par les individus. Il a une
vision cardinaliste de l’utilité.
Remarque : Aujourd’hui, cette idée de mesurer le bonheur que ressentent les individus redevient à la
mode (analyse économique du bonheur). Dans ces travaux, la mesure du bonheur est
essentiellement faite par des enquêtes et des expériences. On peut aller plus loin avec la neuroéconomie et on peut essayer de mesurer les satisfaction des individus en posant des électrodes.
A la même époque (fin 19°) commence à se développer une autre conception de l’utilité qui
considère que l’utilité n’est pas une propriété des objets mais est une expression des préférences des
individus. L’utilité n’est donc plus considérée comme objective mais devient subjective, et est
totalement liée aux choix que font les individus. Et c’est exactement la position que va adopter
Pareto qui considère qu’on n’a pas besoin de mesurer les utilités pour comprendre les choix des
individus mais qu’il suffit d’ordonner les différents biens. Conception ordinale de l’utilité, on
n’associe plus un chiffre à l’utilité, mais un ordre entre les biens en fonction des préférences des
individus.
Pareto considère que chaque individu est capable d’attribuer aux biens :
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-
Un nombre identique à 2 situations jugées équivalentes
Un nombre d’autant plus grand que l’utilité associée est forte.
Donc pour représenter les préférences des individus Pareto propose d’utiliser des courbes
d’indifférence qui indiquent comment les individus classent les différents biens et les différentes
combinaisons de biens.
Le premier à avoir parlé de courbe d’indifférence c’est Edgeworth, mais il part des niveaux d’utilités
qui ont été mesurés, pour construire des courbes d’indifférence. Donc les courbes d’indifférences
d’Edgeworth mesurent et représentent une utilité cardinale. Le nombre qui est associé à chaque
courbe représente un niveau d’utilité chez Edgeworth.
Pareto n’a pas du tout la même approche des courbes d’indifférences. Il part des courbes et non pas
de l’utilité, le nombre affecté à chaque courbe ne traduit pas un niveau d’utilité mais indique un rang
dans un classement, une hiérarchie des niveaux d’utilités.
On a 2 conceptions totalement opposées des courbes d’indifférence, une conception cardinaliste et
une conception ordinaliste.
C) Utilité et ophélimité
Pareto conserve le concept d’utilité mais il lui attribue un domaine particulier parce qu’il distingue 2
types de satisfaction :
-
-
Les satisfactions purement économiques : Correspondent à ce que Pareto appelle
l’ophélimité. Donc quand un individu consomme un bien, il ne retire pas de l’utilité il
retire de l’ophélimité. Ces satisfactions proviennent de la consommation de biens et
services. (Ophellimos veut dire utile en grec, Pareto invente ce mot pour distinguer les
satisfactions économiques des satisfactions non économiques).
Les satisfactions qui ne sont pas purement économiques : Elles concernent ce qui est
bénéfique à la collectivité, ce qui veut dire que ce qui est utile chez Pareto c’est ce qui est
bénéfique à la collectivité, l’utilité concerne ce qui est socialement utile alors que
l’ophélimité concerne ce qui est individuellement et économiquement utile.
_____________________ Fin cours 18 ______________________
Pareto a présenté ce concept d’ophélimité dans son traité de sociologie de sociologie, donc les
économistes n’ont pas trop prêté attention à ce concept.
L’ophélimité a un certain nombre de caractéristiques qui la distingue de l’utilité :
-
L’origine des satisfactions :
o Ophélimité : On désigne les satisfactions qui proviennent de la consommation de
biens et services par les individus (satisfaction strictement individuelle).
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o
-
L’utilité : concerne les satisfactions plus larges, les satisfactions qui proviennent
de la consommation de biens et services mais aussi des satisfactions collectives.
En termes de préférences individuelles :
o Les préférences qui définissent l’ophélimité sont des préférences strictement
individuelles. Ui = (Xi) (L’utilité de l’individu i ne dépend que de sa propre
consommation).
o Les préférences qui définissent l’utilité intègrent une forme d’interdépendance
entre les individus Ui = (Xi, Xj). L’utilité que l’individu retire dépend de sa propre
consommation ET de celle des autres.
Remarque : EN économie l’interdépendance des fonctions d’utilités est courant maintenant puisque
c’est de cette façon que l’on représente l’altruisme c.-à-d. un individu altruiste se préoccupe de sa
propre satisfaction mais aussi de celle des autres.
-
-
Les préférences qui concernent l’ophélimité s’expriment sur les marchés en revanche les
préférences qui concernent l’utilité s’expriment dans n’importe quel contexte
institutionnel, par exemple un individu peut retirer de la satisfaction parce qu’il fait partit
d’une collectivité et dans ce cas pour désigner cette satisfaction on parlera d’utilité et
pas d’ophélimité.
Les préférences qui déterminent l’ophélimité
o sont données et exogènes, ça signifie qu’on ne va pas chercher à expliquer les
préférences, et donc l’analyse économique cherche à expliquer uniquement les
comportements. Les économistes s’intéressent à l’ensemble des comportements
individuels parce qu’ils supposent que les préférences sont données.
o En revanche les préférences qui engendrent de l’utilité sont considérées comme
endogènes parce qu’elles sont déterminées par les interactions entre les
individus, les préférences des individus vont évoluer en fonction de leurs
interactions avec les autres.
Le concept d’ophélimité c’est le concept que Pareto utilise pour son optimum.
D) L’optimalité Parétienne.
La définition de l’optimum de Pareto correspond à un état social qui représente le maximum
d’ophélimité pour la collectivité, pour la société. Pareto introduit le critère d’optimalité, juste après
avoir étudié l’équilibre général concurrentiel. Donc l’optimum de Pareto est (pour Pareto) une
propriété de l’équilibre général concurrentiel.
« En situation de concurrence pure et parfaite, quand l’équilibre a lieu en 1 point où sont tangentes
les courbes d’indifférences des contractants alors les membres de la collectivité considérés jouissent
du maximum d’ophélimité. »
Donc en situation concurrentielle parfaite on atteint l’optimum de Pareto. On rejoint les théorèmes
de l’économie du bien-être.
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Remarque importante : Pareto introduit l’optimalité dans un cadre d’économie pure, dans cette
situation idéale, abstraite de l’économie pure, l’optimum est une situation désirable mais cela ne
signifie pas que cela soit vrai en dehors de ce cadre. En dehors de ce cadre, le critère de l’optimalité
n’est qu’un critère parmi d’autres, il doit être complété par des critères éthiques, politiques,
moraux… pour pouvoir définir ce qu’est un état social désirable. Par conséquent, Pareto n’a jamais
dit que le maximum d’ophélimité était une fin, et donc n’a jamais dit que la maximisation de l’utilité
économique devait être recherchée comme un critère de bienêtre social. C’est donc une réduction
des économistes du 20° siècle que d’avoir identifié ce critère de l’optimum de Pareto comme un état
souhaitable.
2. L’école Autrichienne
Historiquement on considère que l’économie autrichienne fait partit du marginalisme. Le courant
née dans les années 1870 avec la publication des principes d’économie politique en 1871 par Carl
Menger. Le terme d’économie autrichienne est inventé un peu plus tard, après la publication du
second ouvrage de Menger en 1883 qui s’intitule « les investigations sur la méthode des sciences
sociales et de l’économie politique en particulier ». Le terme a été inventé par Gustav Schmoller
pour désigner la pensée de Menger (il était opposé à Menger), de façon péjorative.
Evidemment, les premiers économistes Autrichiens au sens économique étaient autrichien mais à
partir de la deuxième moitié du 20° siècle le courant de l’économie autrichienne s’est largement
exporté aux Etats-Unis et aujourd’hui il désigne une école sans lien géographique aucun.
Ce qui caractérise le courant autrichien c’est essentiellement l’individualisme, les individus sont le
point de départ de l’économie autrichienne. Ce sont les individus qui agissent, les phénomènes
économiques sont des phénomènes qui résultent des actions individuelles.
Deuxième caractéristique fondamentale : Les économistes autrichiens sont subjectivistes c.-à-d. que
c’est la subjectivité de chaque individus qui les poussent à agir et cette subjectivité se décline en
termes économiques : La valeur en particulier est conçue de manière subjective, l’utilité, ce qui
signifie que l’on ne peut pas représenter les utilités des individus par des fonctions d’utilités
mathématiques parce que toutes représentation formelle est objectiviste au sens où si on veut
représenter l’utilité d’un individu par une fonction mathématique alors on en fait un objet, un objet
qui peut être connu. Donc cette approche-là ignore totalement la subjectivité individuelle.
Troisième élément important : Les économistes autrichiens mettent l’accent sur la notion de
processus donc un marché n’est pas un moyen d’obtenir une allocation optimale des ressources mais
c’est un processus dans lequel se confrontent les différents plans des individus et donc c’est un
moyen de coordonner les actions individuelles. Retenir : Le marché autrichien est totalement
différent du marché des économistes néoclassiques. Les économistes autrichiens défendent le
marché mais pas de la même façon que les néoclassiques.
1. Le fondateur de l’économie autrichienne : Carl Menger (1840 – 1921) :
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Même si Menger est considéré comme un marginaliste, son apport à l’économie est totalement
différent de l’apport de marginalistes comme Walras et Jevons.
Les caractéristiques de l’école autrichienne se retrouvent chez Menger. Et point important, toute
cette approche autrichienne est opposée à l’utilisation des mathématiques en économie.
Un élément central dans les travaux de Menger c’est son approche méthodologique.
A) La méthodologie
Quand il publie son ouvrage en 1871, le monde académique germanophone en sciences sociales est
dominé par ce qu’on appelle l’école historique allemande qui développe une approche qu’on appelle
l’historicisme et le représentant principal de cette école c’est Schmoller. Schmoller va essayer de
limiter la diffusion des principes d’économie politique de Menger, en particulier parce qu’une partie
de l’argumentation de Menger est opposée à l’école historique allemande, et en réponse à Schmoller,
Menger va écrire son second ouvrage sur la méthodologie des sciences sociales et de l’économie
politique dans lequel il développe sa critique de l’historicisme et c’est à ce moment-là que Schmoller
invente le terme d’économie autrichienne, et c’est aussi à ce moment-là que commence ce qu’on va
appeler la querelle des méthodes.
L’opposition est la suivante :
-
-
Pour l’école historique allemande, on ne peut rendre compte d’un phénomène socioéconomique qu’en le replaçant dans son contexte historique, c.-à-d. en le représentant
comme un évènement singulier dans un moment de l’histoire et ne peuvent donc être
représentés justement que comme des évènements particuliers. Ca veut dire qu’on ne
peut pas dans cette approche établir de loi générale à partir des évènements particuliers
et d’une certaine façon faire de l’économie c’est faire de l’histoire des faits.
Le courant de l’institutionnalisme s’est inspiré de l’école historique allemande, ça repose
sur une approche inductiviste : On accumule des faits en espérant qu’on voit apparaitre
un certain nombre de régularités. On n’a pas de théorie à priori.
Pour Menger, la principale erreur de cette approche réside dans le fait qu’il y ai une
confusion entre la théorie et l’histoire. Il distingue entre ces 2 façons d’appréhender les
phénomènes une approche historique qui étudie les phénomènes dans leur dimension
individuelle et une approche théorique qui étudie les phénomènes de manière générale
donc en postulant que tous ces phénomènes individuels ont des caractéristiques
communes que l’on va pouvoir regrouper dans des lois ou des propositions générales.
Menger va plus loin en distinguant 2 façons de faire de la théorie :
o La recherche exacte qui consiste à adopter une approche idéalisée et abstraite
des phénomènes (économie pure).
o La recherche empirique réaliste qui analyse les phénomènes dans leur
environnement.
Menger choisit d’appréhender les phénomènes économiques par cette approche
théorique exacte.
2 remarques :
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Cette approche part des individus, et plus précisément du fait que les individus
cherchent à satisfaire des besoins et sont motivés par leurs intérêts personnels et donc
c’est un peu comme chez John Stuart Mill. Menger ne dit pas que dans la réalité les
individus sont motivés uniquement par leur intérêt personnel, mais qu’on peut faire
cette hypothèse et que cela va permettre de comprendre les comportements.
En partant des comportements individuels, on va pouvoir expliquer les phénomènes
collectifs par la mise en évidence de relation causale entre un certain nombre de
variables : Par ex : lorsque les besoins augmentent, les prix augmentent. Mais cette loi
que l’on va obtenir n’est vraie que dans le cadre de l’économie théorique exacte mais
pas forcément empiriquement parce que la réalité ne correspond pas au modèle de
l’économie exacte. La loi qu’on trouve est très utile du point de vue de la recherche
exacte parce qu’elle est logiquement vraie et elle est toujours vraie même si elle n’est
pas vérifiée empiriquement
B) La théorie de la valeur :
Il a une approche de la valeur subjectiviste, la valeur d’un bien n’est pas liée au bien lui-même, ce
n’est pas une propriété des objets, mais la valeur provient des préférences individuelles, de la
manière dont les individus cherchent à satisfaire leurs besoins avec ces biens. Mais il refuse les
approches de type hédonistes c.-à-d. qu’il ne fonde pas la valeur sur le plaisir que les individus
retirent, le comportement des individus est rationnel et conduit les individus à choisir tel ou tel bien
pour satisfaire leurs besoins. Il y a une correspondance entre la satisfaction d’un besoin et la
consommation de biens, ce qui revient aussi à dire que les biens sont définis par rapport à leur
capacité à satisfaire des besoins, donc les biens sont définis de la manière suivante (4 propriétés pour
qu’on puisse dire qu’un objet est un bien économique) :




Il doit exister un besoin humain
L’objet doit posséder des propriétés qui lui permettent de satisfaire ce besoin
L’individu doit reconnaitre cette aptitude à satisfaire ce besoin
L’individu doit pouvoir employer cet objet pour satisfaire ce besoin.
2 choses en plus :


La satisfaction de la consommation est décroissante jusqu’à la saturation.
Les biens sont consommés en unités entières qui sont consommées successivement.
Menger va construire une table dite table de Menger d’intensité des besoins qui est la
représentation de la loi de Gossen sur la décroissance des utilités marginales. Gossen était un
psychologue allemand.
En ligne il indique les degrés d’intensité de satisfaction des besoins. En colonne les besoins et les
biens que les individus consomment et que Menger classe en 10 catégories.
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Il représente 10 classes de biens et de besoins qui vont du plus urgent aux moins urgents. Les degrés
d’intensité de satisfaction pour la consommation de la première unité de chaque bien vont de 10 à 1.
Pour chaque bien, en colonne, il représente l’utilité que représente la consommation de chaque
unité supplémentaire pour chaque catégorie de bien.
C’est la première représentation qu’on a de la décroissance des utilités marginales.
Cette table permet de comprendre comment l’individu va se comporter c.-à-d. permet de
comprendre l’idée de la maximisation de l’utilité. Si l’individu possède un budget de 10 euros et que
le prix des biens est de 1 : Il va consommer ce qui est dans le triangle rouge. Pour le voir on peut
déterminer toutes les combinaisons qu’il peut se procurer de façon à maximiser sa satisfaction.
_______Fin cours________
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