Thèmes de réflexion 1. Valeurs d’usage et valeur d’échange, conceptions subjective et objective C’est dans l’Antiquité qu’apparaît la question de la valeur. La distinction est mise entre valeur d’échange et valeur d’usage. Le prix relatif d’un bien par rapport à un autre est la valeur d’échange. La valeur d’usage quant à elle, désigne l’utilité d’un bien, évaluée soit de manière objective et générale (selon Quesnay, Smith, Ricardo et Marx notamment) soit de manière subjective (Turgot, Condillac, Jevons et les Néoclassiques) et donc variable d’un individu à l’autre : elle est relative au besoin. En se basant sur un point de vue objectif, c'est-à-dire une base mesurable en théorie L’autre conception, celle subjective de la valeur : Jevons en 1862 fait apparaître une subjectivité dans la détermination de la valeur. Dès lors, la théorie néoclassique adopte la conception de la valeur basée sur un raisonnement à la marge, c'est-à-dire liée l’analyse des effets provoqués par de petites variations de certaines variables ou à l’utilité dégagée par la dernière unité échangée et à la satisfaction des autres besoins. Jusqu’à Adam Smith (classique), une valeur d’échange élevée s’expliquait d’une valeur d’usage élevée. Or avec Smith et son paradoxe de l’eau et des diamants, la valeur d’usage n’explique plus totalement la valeur d’échange. 2. La loi de L’offre et de la demande La loi de l'offre et de la demande est l'un des éléments essentiels expliquant le fonctionnement d'une économie de marché. L’offre est la quantité d’un certain bien proposé pour un prix donné. La demande est la quantité d’un certain bien que des consommateurs ou acheteurs désirent pour un prix donné. La rencontre de l’offre et de la demande se fait sur un marché. Lorsqu’un bien est vendu sur un marché à un prix pour lequel les consommateurs demandent plus de biens que ce qui est proposé, le prix tend à augmenter. De l’autre côté, le prix aura tendance à diminuer quand l’offre dépasse la demande. Le mécanisme d’ajustement du prix et de la quantité conduit le marché à un point d’équilibre. La loi de l'offre et de la demande nous montre que, sur n'importe quel marché, il existe toujours un niveau de prix qui supprime la pénurie (ou l'excédent) et qui équilibre la quantité offerte et la quantité demandée (pour ce prix, les producteurs sont prêts à vendre la même quantité de biens que celle que les consommateurs veulent acheter). Un tel niveau de prix est qualifié d'optimal, parce qu'il maximise les avantages et minimise les inconvénients, pour les vendeurs comme pour les acheteurs. Ce niveau de prix, qui résulte de l'offre et de la demande, détermine un équilibre qui est qualifié de stable, ce qui signifie que si l'on s'éloigne de cet équilibre, des mécanismes automatiques (ceux du marché) ramènent vers l'équilibre ; c'est ainsi, par exemple, que pour un niveau de prix inférieur à l'équilibre, il existera un excès de la demande sur l'offre qui va provoquer une hausse des prix qui perdurera jusqu'au retour à l'équilibre ; cette hausse des prix, en particulier, va pousser les producteurs à augmenter l'offre, résorbant ainsi la pénurie potentielle. Ce mécanisme de rééquilibrage repose naturellement sur la libre variation des prix. En ce sens, le blocage des prix, leur fixation autoritaire par les pouvoirs publics, constituent toujours une aberration économique. Si le prix est fixé à un niveau trop élevé, la surproduction est inévitable ; c'est par exemple le cas de nombreux produits agricoles, à l'intérieur du marché commun, pour lesquels il existe des prix garantis qui favorisent une surproduction et créent les excédents que l'on connaît. Un raisonnement identique peut être appliqué au marché du travail, où un salaire minimum trop élevé est créateur de chômage. En sens inverse, si le prix est fixé par les pouvoirs publics à un niveau trop bas (prétendument pour empêcher l'inflation), la demande excède l'offre, ce qui entraîne la pénurie : l'exemple du contrôle des loyers explique largement les pénuries de logement que l'on a pu observer. Ce type de déséquilibre est encore plus évident dans les économies planifiées, où tous les prix sont bloqués et où se développent les pénuries, les files d'attente et le marché noir. 3. La spécificité de l’analyse marxienne de la valeur le dernier classique, à savoir Karl Marx, a pris pour base de ses recherches et de ses analyses une théorie objective de la valeur, qu'il a nommé (et il considérait cela comme un apport majeur à la théorie économique) : la valeur-travail : pour Marx, la valeur est déterminée par une quantité de travail incorporée dans le produit, lors de sa fabrication par l'ouvrier. Selon lui la valeur vient entièrement du travail. Cela implique que le patron ne peut prélever son profit que sur la valeur créée par les travailleurs. Quels que soient les salaires qu'il leur accorde, il les exploite. Il est dans sa nature de patron de les exploiter. La première formulation de la théorie de la valeur-travail se trouve chez Adam Smith. Incapable de prendre la suite de l'Ecole scolastique et des auteurs qu'il connaissait (Cantillon, Condillac, Galiani), Smith dissocie complètement la valeur d'usage et la valeur d'échange, et cherche un étalon pour mesurer cette dernière. Cet étalon invariable, il croit le trouver dans le travail. Ricardo, de la même manière, dans son exemple du joaillier laborieux, évoque l'estime des consommateurs : il est payé deux fois plus par heure qu'un travailleur ordinaire pour cette raison. Il se réfère donc aux "valeurs" présentes dans la tête des consommateurs. Marx reprendra la même idée par sa notion de "travail socialement nécessaire", c'est-à-dire une espèce de moyenne d'heures de travail pour une tâche donnée, moyenne impliquée, à un moment donné dans le temps et dans l'espace, par l'état de la technique, du savoir-faire, des moeurs, des désirs, etc. Un problème se pose néanmoins : les valeurs des marchandises ne sont pas réglées uniquement par les quantités de travail incorporées, mais aussi par la "longueur du temps qui doit s'écouler avant qu'elles puissent être portées sur le marché", comme dit Ricardo. Ce qui signifie que la valeur d'une pièce de tissu n'a pas la même composition que celle d'un avion supersonique. Si Ricardo admettait que cette théorie était une approximation, Marx, lui, la transformera en vérité absolue. Il s'est demandé comment des marchandises qui paraissent si diverses, si hétérogènes quant à leur valeur d'usage pouvaient être rendues comparables entre elles. La solution, qu'il trouve chez Smith et Ricardo, c'est que les marchandises sont toutes le produit du travail, toutes du "travail cristallisé". C'est ainsi qu'elles peuvent s'échanger. Une théorie objective de la valeur (comme la valeur-travail) est incapable d'expliquer qu'on accorde pas la même valeur au premier et au deuxième verre d'eau qu'on peut boire en plein désert, quand bien même celui qui a extrait l'eau a eu la même peine à puiser le premier verre que le second. De même, la théorie de la valeur objective est incapable d'expliquer pourquoi la valeur d'un aliment sera différente pour quelqu'un qui adore en manger et quelqu'un qui le déteste, quand bien même cela ne change rien à la quantité de travail apportée. Et également cette théorie est incapable d'expliquer (en sus de la manière dont on peut fixer une valeur objective à un produit) pourquoi un gramme d'or extrait de manière très pénible, et un gramme d'or extrait de manière très facile (ou relativement plus facile) ont en fait la même valeur à l'échange, alors que l'extraction n'a pas mobilisé la même quantité de travail