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cyanobacterie

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MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
Les cyanobactéries et leurs toxines
Cécile Bernarda,*
RÉSUMÉ
SUMMARY
Une des conséquences des déséquilibres du fonctionnement des écosystèmes aquatiques est l’apparition d’efflorescences de micro-organismes
photosynthétiques dont l’étendue et la fréquence sont actuellement en augmentation. Parmi ces micro-organismes, les proliférations de cyanobactéries
perturbent non seulement le fonctionnement des écosystèmes aquatiques
par la biomasse qu’elles génèrent mais elles présentent des risques sanitaires
lorsqu’elles produisent des toxines. Les cyanobactéries sont des procaryotes
qui présentent une grande diversité de formes et de tailles regroupée en
trois grands types : i) unicellulaire, ii) coloniale et, iii) filamenteuse pluricellulaire. Une autre caractéristique des cyanobactéries est la diversité des
métabolites qu’elles synthétisent. Parmi ces métabolites, les cyanotoxines
sont particulièrement importantes, regroupées selon leurs effets toxiques
en hépatotoxines, neurotoxines et dermatotoxines. Les hépatotoxines sont
les toxines les plus fréquemment rencontrées dans l’environnement mais le
nombre de cyanobactéries neurotoxiques est en constante augmentation.
Divers mécanismes sont impliqués dans la production de toxines par les
cyanobactéries allant de l’échelle moléculaire aux facteurs de contrôle à
l’échelle des écosystèmes ce qui rend problématique la prédiction du niveau
toxicité associé à une efflorescence de cyanobactéries. Ces mécanismes
font intervenir entre autres, les variations de biomasse de cyanobactéries,
la diversité génétique des populations, la diversité des variants de toxines
et l’état physiologique des cellules. L’interdépendance de ces mécanismes
entre eux et les facteurs environnementaux les contrôlant sont complexes.
Ainsi, les niveaux de toxicité observés in situ sont très variables ce qui rend
difficile la gestion du risque induit par le potentiel toxique et la toxicité des
cyanobactéries. Afin de gérer au mieux les risques associés aux cyanobactéries et aux cyanotoxines, dans un contexte de fréquentations des plans
d’eau par les populations humaines, des mesures de gestion sont proposées
afin d’allier au mieux usages et risques des plans d’eau ou des rivières.
Cyanobactéries – cyanotoxines – écologie microbienne – ressources en eau –
santé des écosystèmes – santé publique
1. Introduction
L’eau douce est une ressource indispensable à la vie,
notamment pour les populations humaines. L’enjeu majeur
vis-à-vis de cette ressource concerne le maintien de sa disponibilité tant en quantité qu’en qualité au titre des services
UMR7245 CNRS-MNHN
Molécules de communications et adaptation des micro-organismes
Muséum national d’Histoire naturelle
57, rue Cuvier
75231 Paris cedex 05
Cyanobacteria and cyanotoxins
One of the consequences of environmental and human
perturbations on aquatic ecosystems is the increase
of blooms of photosynthetic microorganisms (in freshwater and marine ecosystems), which extent and
frequency are currently increasing. Among these
microorganisms, cyanobacterial blooms strongly affect
the aquatic ecosystems functioning by the biomass
they produce and through the possible production
of toxins. Cyanobacteria are microorganisms that
belong to the kingdom of bacteria. They have a wide
variety of shapes and sizes, grouped into three main
types : i) unicellular ii) colonial and iii) filamentous
multicellular. Cyanobacteria produce a large variety
of molecules and metabolites including toxins. They
are grouped into three main families according to
their toxic effects : hepatotoxins, neurotoxins and
dermatotoxins. Hepatotoxins are most frequently
encountered in the environment, but the number of
species producing neurotoxins is in constant increase.
Various mechanisms are involved in toxin production
by cyanobacteria. They involve, among others, the
change in biomass of cyanobacteria, the genetic
diversity of populations or species, the diversity of
variants of toxins and the physiological state of cells.
The interdependence of these mechanisms and the
environmental factors controlling them are complex.
Thus, levels of toxicity observed in situ are highly
variable making it difficult to manage the risk posed
by the toxic potential and toxicity of cyanobacteria.
In order to better manage the risks associated with
cyanobacteria and cyanotoxins in the context of
human population’s exposition (e.g. bathing, sealing,
fishing, drinking water…), management measures
are proposed to combine the best uses and risks of
freshwater water ecosystems.
Cyanobacteria – cyanotoxins – microbial ecology –
freshwater resources – ecosystems and human health.
a
* Correspondance
[email protected]
article reçu le 5 novembre 2013, accepté le 14 décembre 2013.
© 2014 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.
et usages multiples qu’elle offre. Indépendamment des
influences humaines, les propriétés des systèmes aquatiques sont gouvernées par des lois biologiques, chimiques
et physiques reliées de multiples façons qui en définissent
la quantité et la qualité. Mais les eaux de surface sont
particulièrement vulnérables à l’anthropisation liée à
l’augmentation des apports en nutriments et polluants
(e.g. rejets urbains, activités agricoles, élevage…). Ainsi,
les activités humaines se superposent aux processus
naturels en les modifiant et en provoquant des ruptures
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Figure 1 – Distribution des cyanobactéries au sein de l’arbre du vivant.
Modifié d’après Cracraft et Donoghue, 2004. Quelques genres de cyanobactéries sont représentés par des photographies.
Source A. Couté, C. Duval et C. Bernard, MNHN.
de leurs équilibres (Water in a changing World, 2009 UN
WWD Report n° 3). Une des conséquences de ces déséquilibres dans les écosystèmes aquatiques est l’apparition
d’efflorescences de micro-organismes photosynthétiques
(e.g. les cyanobactéries) dont l’étendue et la fréquence
sont actuellement en augmentation [1]. Ces efflorescences
constituent une nuisance au regard des risques sanitaires
qu’elles engendrent en raison de leur capacité, parfois, à
produire des toxines.
2. Les cyanobactéries : origine,
nature et diversité morphologique
2.1. Définition
Les cyanobactéries appartiennent au règne des bactéries
dans l’arbre du vivant (figure 1). Ce sont des organismes
phylogénétiquement anciens, de type procaryotes Gramnégatifs, vivant dans un large éventail d’écosystèmes [2].
Morphologiquement, les cyanobactéries sont très diverses
allant des petites formes unicellulaires (formant le picoplancton, dont la taille est inférieure à 2-3 μm), jusqu’aux
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// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
formes de plus grandes tailles, coloniales, filamenteuses
ou ramifiées. Certains groupes ont des cellules spécialisées comme par exemple les hétérocytes (lieu de fixation
de l’azote atmosphérique, N2) et les akinètes (considérées
comme des spores). Les cyanobactéries ont la particularité de présenter des propriétés communes à la fois
aux organismes photosynthétiques eucaryotes (appelées
communément « les microalgues ») et/ou aux bactéries.
Les caractéristiques communes aux cyanobactéries et
aux bactéries sont : i) l’absence de membranes nucléaire
et plastidiale, de mitochondries, de réticulum endoplasmique et de dictyosome et, ii) la présence d’une paroi
cellulaire caractéristique des bactéries Gram- comprenant
de la muréine) [3]. Comme les microalgues eucaryotes, les
cyanobactéries possèdent de la chlorophylle a et deux
photosystèmes (les photosystèmes I et II). Elles utilisent
l’eau comme donneur d’électrons et font une photosynthèse
productrice d’oxygène. Elles possèdent des pigments photosynthétiques particuliers, communs à certaines algues
(e.g. les Rhodophytes ou les Cryptophytes) appelées les
phycobiliprotéines. Certains genres de cyanobactéries ont
aussi de vraies ramifications et des jonctions cellulaires
permettant les échanges de cellule à cellule.
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
Figure 2 – Échelle des temps géologiques et émergence des cyanobactéries.
Adapté de Cavalier-Smith, 2010. Ma : milliard d’années.
2.2. Origine évolutive des cyanobactéries
D’un point de vue systématique, les cyanobactéries représentent un groupe évolutif monophylétique au sein des
eubactéries [4]. Les nombreuses phylogénies réalisées
à l’aide de différents marqueurs montrent que ces organismes ont été un des premiers groupes à diverger au
sein de la lignée bactérienne ancestrale [5]. Ce groupe a
en effet une origine très ancienne et serait apparu juste
après les bactéries mésophiles réductrices de sulfates
(figure 1). Leur origine évolutive reste cependant sujette
à controverse. Diverses études utilisant des traces fossiles proposent que les cyanobactéries soient apparues
il y a 3,5 milliards d’années [6]. Mais une analyse plus
récente, combinant des données paléobiologiques et des
comparaisons phylogénétiques, datent l’apparition des
cyanobactéries de la fin de l’archéen, il y a 2,7 milliards
d’années (figure 2). À la période précambrienne (2,50,5 milliards d’années), les cyanobactéries ont constitué
l’essentiel de la biomasse vivante et ont permis alors un
accroissement du taux d’oxygène et une diminution du
taux de CO2 de l’atmosphère terrestre. Un héritage vivant
de cette « Ère des cyanobactéries » est constitué par les
stromatolithes (figure 3) que l’on retrouve par exemple en
Australie (Shark bay).
Les cyanobactéries jouent encore à l’heure actuelle un rôle
majeur dans le cycle de l’oxygène. En effet, selon la théorie
endosymbiotique, elles seraient à l’origine des organelles
spécialisées dans la photosynthèse chez les eucaryotes
que sont les chloroplastes [7].
2.3. Classification taxonomique
des cyanobactéries
La classification des cyanobactéries, d’un point de vue
taxonomique, est gouvernée par deux codes : 1) le Code
international de nomenclature botanique (ICBN « Code of
Figure 3 – Stromatolithes en formation
(Shark bay, Australie).
© A. Couté, MNHN.
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Tableau I – Classification des cyanobactéries et correspondance
entre le Code international de nomenclature botanique [10]
et le Code international de nomenclature des procaryotes [11].
Code international
de nomenclature
des procaryotes
Code international
de nomenclature
botanique
Section I, II
O/Gloeobacterales
Synechococcales
Formes unicellulaires, coccoïdes ou coloniales. Multiplication
des cellules par scissiparité et/ou formation d’exospores.
Disposition radiale des thylacoïdes.
Section II
Chroococcales
Formes coloniales. Multiplication par division.
Section III
Pseudanabaenales,
Oscillatoriales
Formes filamenteuses unisériées, sans différenciation cellulaire
(hétérocytes et akinètes), sans ramification,
avec une division cellulaire perpendiculaire à l’axe du filament.
Section IV
Nostocales
Formes filamenteuses avec différenciation cellulaire
(hétérocytes et akinètes). Division cellulaire en un seul plan.
Section V
Stigonematales
Formes filamenteuses avec différenciation cellulaire
(hétérocytes et akinetes), et des ramifications (vraies ou
fausses) et une division cellulaire en plusieurs plans.
Brève description
Les formes principales de cyanobactéries sont illustrées figure 4.
Figure 4 – Principaux plans d’organisation des cyanobactéries.
botanical nomenclature ») [8] et le
Code international de nomenclature
des procaryotes (ICNP « International code of nomenclature of prokaryotes ») [9].
La classification botanique est basée
sur la morphologie des cellules, la
présence d’enveloppes ou de gaines,
le type de division cellulaire et des
données de phylogénétique moléculaire. La classification d’Hoffman et
ses collaborateurs de 2005 est l’une
des propositions les plus récentes ;
elle reconnaît 6 ordres, 30 familles
et plus de 250 genres [10].
La classification des procaryotes
considère les caractéristiques morphologiques et certaines propriétés
physiologiques, cytologiques et biochimiques de cultures de cyanobactéries axéniques ; elle n’est pas basée
sur le concept d’espèce [11-13].
Cependant, ces deux classifications
reconnaissent les mêmes sections ou
ordres (tableau I) et les différences
se situent principalement dans les
taxons inférieurs (e.g. le niveau de
l’espèce).
La systématique des cyanobactéries
est en perpétuel remaniement et l’on
peut s’attendre à d’autres changements dans les prochaines années
avec l’avancement des techniques
de génomique et de bioinformatique
[14, 15].
2.4. Diversité
morphologique et
principales caractéristiques
fonctionnelles
2.4.1. Diversité morphologique
Adapté de Couté et Bernard, 1999 ; Couté et Leitao, 2005.
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// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
Les cyanobactéries présentent une
grande diversité de formes et de
tailles (figure 4). Elles sont cependant regroupées en trois grands types
d’organisation morphologique : i) unicellulaire, ii) coloniale et, iii) filamenteuse pluricellulaire.
Les cyanobactéries unicellulaires
peuvent présenter des formes de
type sphérique, cylindrique ou encore
ovoïde. La multiplication cellulaire de
ces individus se fait par fission binaire
[16]. Les organismes présentant ce
type de morphologie et ne formant
pas de colonies sont généralement
des picocyanobactéries dont la taille
est < à 2-3 μm (e.g. Synechococcus).
Les formes unicellulaires peuvent
également former des agrégats au
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
Figure 5 – Représentation schématique
de l’organisation d’une cellule végétative
de cyanobactérie.
2.4.2. Diversité cellulaire
En plus des cellules végétatives non différenciées, la présence
de formes cellulaires spécialisées ajoute à la diversité des
formes et des fonctions présentes chez les cyanobactéries.
Ces types cellulaires regroupent i) les hétérocytes, qui ont la
capacité de fixer l’azote atmosphérique N2, ii) les akinètes, qui
sont des formes de résistance ou des spores et, iii) les hormogonies, les baeocytes, les nanocytes et les mégacytes, qui
sont des formes de dispersion chez certaines cyanobactéries.
2.4.3. Enveloppe cellulaire
Les cyanobactéries ont une enveloppe cellulaire de type Gramnégative. Cependant, certaines d’entre-elles présentent des
caractéristiques des bactéries Gram-positives (e.g. le contenu
lipidique de la paroi [17]). Chez les cyanobactéries filamenteuses, l’espace périplasmique est continu ce qui permet la
communication entre cellules (e.g. chez les Nostocales [18]).
A : membrane de thylacoïdes
B : enveloppe cellulaire
C : carboxysome
CPG : granule de cyanophycine
T : thylacoïdes
P : granules de polyphosphate
N : nucléoplasme
G : granules de glycogène
PB : phycobilisome
GV : vésicules à gaz
Adapté de Stanier et Cohen-Bazire, 1977.
sein d’un mucilage (composé entre autres d’exopolysaccharides) suite à des divisions cellulaires multiples
et former des colonies de forme plus ou moins régulière selon les espèces considérées (O/Chroococcales,
figure 4).
Les formes filamenteuses (ou trichomes), issues de divisions
cellulaires sur un plan unique, présentent des organisations
de type unisériées (O/Oscillatoriales, O/Pseudanabaenales,
O/Nostocales ; figure 4) ou plurisériées (une ou plusieurs
séries de cellules jointives). Certaines d’entre elles sont
pourvues d’une gaine de polysaccharides, ou sont entourées d’une couche de mucilage ou encore présentent
des ramifications (vraies ou fausses, O/Stigonematales,
figure 4). Les formes filamenteuses se dispersent généralement par fragmentation du trichome au niveau de
cellules dégénérescentes appelées nécridies.
2.4.4. Photosynthèse et antennes pigmentaires
Au cours de l’évolution, les cyanobactéries ont été les premiers organismes procaryotes dotés de deux photosystèmes
capables d’utiliser l’eau comme donneur d’électron et de
produire de l’oxygène. Les photosystèmes de type I et II
sont similaires chez les cyanobactéries et le phytoplancton
eucaryote. Chez ces derniers, les deux photosystèmes I
et II sont localisés à l’intérieur de la membrane des thylacoïdes. Chez les cyanobactéries, les antennes collectrices
de l’énergie lumineuse, appelées phycobilisomes (figure 5),
sont attachées en périphérie de ces membranes [19]. Les
phycobilisomes sont constitués de phycobiliprotéines,
organisées en un assemblage de disques radiaires, formant
une structure tridimensionnelle (figures 6 et 7). Il existe
quatre types principaux de phycobiliprotéines : l’allophycocyanine, la phycocyanine, la phycoérythrine et la phycoérythrocyanine. La nature des chromophores (phycocyanobiline, phycoroubiline, phycoerythrobiline) constituant les
phycobiliprotéines détermine les longueurs d’onde de la
lumière pouvant être captée puis utilisées pour la photosynthèse. De manière générale, les cyanobactéries utilisent la
lumière dans l’orange et le vert (entre 500 et 660 nm [20]),
Figure 6 – Phycobilisomes de cyanobactéries.
A
Figure 7 – Ultrastructure des thylacoïdes.
A
B
A. Structure des phycobilisomes en lumière rouge (RL) ou en lumière verte (GL). Les
disques rouges représentent la phycoérythrine et les disques bleus la phycocyanine.
B. Différence de coloration de cyanobactéries à gauche en lumière rouge et à droite en
lumière verte.
Les phycobilisomes sont localisés sur les membranes
externes des thylacoïdes.
t : thylacoïde ; Pb : phycobilisome. Barre d’échelle = 2 μm.
D’après Lichtlé et al., 1996.
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Figure 8 – Cellules de Microcystis sp.
cyanobactéries entre la surface où se
réalise la photosynthèse, avec production
d’hydrates de carbone, et des zones plus
profondes de la colonne d’eau où les
hydrates de carbone sont consommés
par respiration.
3. Les facteurs
de contrôle
des proliférations
de cyanobactéries
© C. Bernard, MNHN.
© H. S. Pankratz.
A. Observation au microscope photonique d’une colonie de cellules de Microcystis.
B. Observation en microscopie électronique à transmission d’une coupe transversale de cellule en division.
Grossissement : x31 500. Les structures en « nid d’abeilles » représentent des sections transversales de vésicules à gaz.
3.1. Les facteurs de
contrôle des proliférations
de cyanobactéries
Les cyanobactéries ont une distribution géographique et écologique très
Adapté de Walsby, 1994 [22].
vaste : des glaciers aux déserts, des eaux
douces aux plus salées, des mares aux
Figure 9 – Schéma simplifié des principaux facteurs de contrôle
sources hydrothermales. Leur multiplicade la dynamique du phytoplancton et des cyanobactéries.
tion massive conduit à des « blooms »,
fleurs d’eau ou encore efflorescences.
Les études paléontologiques ont montré que le phénomène d’efflorescence
des cyanobactéries n’est pas seulement
contemporain. La plus ancienne mention d’un tel phénomène a été faite par
De Candolle (1825) [23], à propos d’une
prolifération d’Oscillatoria (= Planktothrix
rubescens), colorant en rouge vif le lac
de Morat (Suisse), événement décrit à
l’époque sous le nom de « sang des
Bourguignons ».
Depuis, de nombreux travaux ont été
publiés sur les efflorescences à cyanobactéries et leur déterminisme [24]. De
ces études, il ressort un consensus clair
sur la diversité et la complexité des facteurs contrôlant les proliférations de cyanobactéries. Ces facteurs interviennent
à de larges échelles comme celui de
l’augmentation globale de la température
[24, 25], à l’échelle régionale telles que
Les interactions complexes au sein de la communauté biotique ainsi que les principaux facteurs abiotiques jouant
sur la dynamique de cette communauté sont représentées par des flèches.
la nature et/ou la taille du bassin versant
D’après Catherine, 2009 [32].
[26] ou encore à l’échelle du plan d’eau
comprenant les interactions entre facteurs
abiotiques (e.g. apports en nutriments) et facteurs biotiques
dont les longueurs d’ondes ne sont pas exploitables par le
(e.g. pression des prédateurs). L’ensemble de ces facteurs
phytoplancton eucaryote [21].
sont inter-reliés entre eux, tel que représenté par le schéma
2.4.5. Les vacuoles à gaz
simplifié en figure 9, montrant les relations complexes entre
Certaines cyanobactéries possèdent des vacuoles à gaz leur
ces différents facteurs de contrôle.
permettant de réguler leur positionnement dans la colonne
Parmi ces facteurs, les effets du changement climatique sont
considérés comme ayant un impact croissant sur la nature et
d’eau [22]. Les vésicules à gaz (figure 8), qui composent ces
l’intensité des efflorescences de cyanobactéries [1]. En effet,
vacuoles, sont des structures inertes, de nature protéique,
les cyanobactéries présentent une croissance supérieure aux
perméables au gaz. La régulation de la flottabilité se fait par
autres organismes phytoplanctoniques au-dessus de 25 °C
accumulation/dégradation de molécules de poids molécuet les températures élevées leur apportent ainsi un certain
laire élevé (e.g. les hydrates de carbone), ainsi que par la
avantage compétitif [27]. Le réchauffement des masses
synthèse et/ou la perte de ces vésicules. Schématiquement,
d’eau peut entraîner une stratification de la colonne d’eau
la régulation de leur flottabilité permet une migration des
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// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
Figure 10 – Exemples d’efflorescences de cyanobactéries
dans les plans d’eau ou en rivières générant de fortes biomasses.
Efflorescence de Microcystis.
© B. Marie, MNHN.
Efflorescence de Planktothrix.
© C. Bernard, MNHN.
Efflorescence d’Aphanizomenon.
© C. Bernard, MNHN.
Efflorescence de Cylindrospermopsis.
© M. Bouvy, IRD.
Efflorescence de Dolichospermum (anc. Anabaena).
© C. Bernard, MNHN.
Efflorescence de Phormidium.
© C. Quiblier, MNHN.
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460 //
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de baignades ou aux bases de loisirs
sont peu engageants pour les utilisateurs
(figure 10). Leur densité cellulaire peut
Genres
Toxines
également endommager les systèmes
de potabilisation de l’eau.
Dolichospermum (anc. Anabaena), Anabaenopsis, Aphanizomenon (incluant
Anatoxines
Cuspidothrix), Cylindrospermum, Hydrocoleum, Lyngbya, Microcystis, Oscillatoria,
Parmi les cyanobactéries, seuls quelques
Phormidium, Planktothrix, Raphidiopsis, Woronichinia
genres forment principalement les effloDolichospermum (anc. Anabaena), Anabaenopsis, Annamia, Aphanizomenon,
Microcystines
rescences dans les plans d’eau ou les
Arthrospira, Calothrix, Fischerella, Geitlerinema, Gomphosphaeria, Hapalosiphon,
cours d’eau, en milieu tempéré. Parmi
Leptolyngbya, Limnothrix, Lyngbya, Merismopedia, Microcystis, Nostoc, Oscillatoria,
eux sont répertoriés les genres : AphaniPhormidium, Planktothrix, Plectonema, Pseudanabaena, Radiocystis, Spirulina,
Synechococcus, Woronichinia
zomenon, Cylindrospermopsis, Dolichospermum (anc. Anabaena), Microcystis,
Dolichospermum (anc. Anabaena), Aphanizomenon (incluant Cuspidothrix),
Saxitoxines
Nodularia, Planktothrix en milieu planctoCylindrospermopsis, Limnothrix, Lyngbya, Phormidium/Geitlerinema, Raphidiopsis,
nique et Phormidium/Lyngbya en milieu
Scytonema
benthique (tableau II et figure 11) [34].
Cylindrospermopsines
Aphanizomenon, Cylindrospermopsis, Lyngbya, Oscillatoria, Raphidiopsis, Umezakia
Ces genres présentent des caractérisNodularia
Nodularines
tiques écologiques qui leur sont propres
Trichodesmium
Palytoxine
et ne se retrouvent pas dans le même
Lyngbya
Lyngbyatoxine
type de milieu et/ou à la même période
Limnothrix
Limnothrixine
de l’année. Ainsi les genres Dolichospermum (anc. Anabaena) et AphanizoLyngbya
Debromoaplysiatoxine
menon, cyanobactéries hétérocytées,
Lyngbya, Phormidium, Schizothrix, Symploca
Aplysiatoxine
se développent généralement en début
Hydrocoleum, Trichodesmium
Ciguatoxine
de période estivale le genre Microcystis
En gras sont indiqués les genres les plus fréquemment décrits comme produisant des cyanotoxines.
leur succède plus tardivement dans la
saison [35]. De la même manière, au
sein du genre Planktothrix, deux génotypes forment des
ce qui favorise également les genres de cyanobactéries à
efflorescences : le génotype « vert » Planktothrix agardhii
vésicules à gaz [27].
et le génotype « rouge » Planktothrix rubescens. Alors, que
L’augmentation de la température des eaux continentales
P. agardhii est caractéristique des lacs eutrophes et peu
est également considérée comme l’une des principales
profonds, P. rubescens se retrouve dans des lacs profonds,
causes de la migration d’espèces dites « tropicales ou
en profondeur et à son optimum de lumière [36]. Les genres
subtropicales » vers les zones tempérées (e.g. CylindrosMicrocystis, Dolichospermum (anc. Anabaena) et Aphapermopsis raciborskii [28, 29]. La germination des spores
nizomenon sont présents dans une diversité de milieux,
ou akinètes nécessitant une température minimale devienindépendamment de leur profondeur et ce, certainement
drait possible dans ces plans d’eau dont la température
en raison de leur capacité de migration verticale dans la
augmente.
colonne d’eau [37].
L’augmentation des flux de nutriments (e.g. azote, phosUne des conséquences des proliférations de cyanobactéphore) provenant de sources ponctuelles et/ou diffuses
ries est non seulement la perturbation et le déséquilibre du
entraîne une eutrophisation croissante des masses d’eau.
fonctionnement des écosystèmes aquatiques par la bioCes nutriments sont principalement issus d’activités
masse qu’elles génèrent mais également par leur capacité
humaines aussi bien rurales qu’urbaines [30]. Le niveau
à produire des toxines [38].
d’eutrophisation des plans d’eau a pour conséquence
directe le développement des cyanobactéries [31, 32].
Au-delà de l’augmentation des flux de nutriments, les
4. Risques sanitaires liés aux
activités humaines ont conduit à la création d’un certain
nombre de plans d’eau présentant des conditions favocyanobactéries et leurs toxines
rables au développement des cyanobactéries. Citons par
exemple la création de sablières pour l’extraction de sables
Le principal risque sanitaire lié aux cyanobactéries réside
et de gravats en région Ile-de-France. Ces plans d’eau
dans leur capacité à produire des métabolites toxiques.
de petite taille et peu profonds ont des caractéristiques
Les niveaux de toxicité observés in situ sont très variables
géomorphologiques propices à l’eutrophisation [33] et aux
ce qui rend difficile la gestion du risque induit par les effloproliférations de cyanobactéries.
rescences de cyanobactéries.
Tableau II – Liste des genres de cyanobactéries formant des proliférations
et potentiellement toxiques.
3.2. Les proliférations de cyanobactéries
et leurs conséquences
Les efflorescences de cyanobactéries sont une source
de nuisances de plus en plus importante sur le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Elles sont parfois
la cause d’odeurs nauséabondes et à l’origine du mauvais goût de l’eau et de la chair des poissons. La couleur
intense et l’aspect de l’eau qu’elles confèrent aux aires
60
// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
4.1. Les toxines de cyanobactéries
La diversité des métabolites, dont les toxines de cyanobactéries, a été décrite de manière exhaustive en 2006
par Welker et von Dörhen et van Apeldoorn et al. [39, 40].
Les cyanotoxines sont regroupées principalement en trois
familles, selon leurs effets toxiques : les hépatotoxines, les
neurotoxines et les dermatotoxines. Les hépatotoxines
sont les toxines les plus fréquemment rencontrées dans
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
Figure 11 – Genres principaux de cyanobactéries formant des efflorescences
et potentiellement producteurs de cyanotoxines.
Genre : Planktothrix.
© L. Brient, CNRS.
Genre : Cylindrospermopsis.
© C. Bernard, MNHN.
Genre : Aphanizomenon.
© C. Duval, MNHN.
Genre : Phormidium.
© I. Echenique, MNHN.
Genre : Dolichospermum (anc. Anabaena)
© A. Couté, MNHN.
Genre : Microcystis.
© C. Bernard, MNHN.
l’environnement [34] mais le nombre d’espèces de cyanobactéries neurotoxiques est en augmentation ces dernières
années [41- 44].
4.1.1. Les hépatotoxines
Les hépatotoxines regroupent trois principales familles
de toxines : les microcystines, les nodularines et la
cylindrospermopsine.
4.1.1.1. Les microcystines
Les microcystines sont produites par une diversité de
cyanobactéries incluant les genres formant principalement des efflorescences tels que Microcystis, Planktothrix, Aphanizomenon, Dolichospermum (anc. Anabaena)
(tableau II).
Les microcystines sont des heptapeptides cycliques (entre
800 et 1100 Da) avec i) un acide aminé atypique appelé
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Figure 12 – Structures chimiques des principales toxines de cyanobactéries.
A
A
B
C
D
E
F
G
C
H
A. Microcystines (I) et nodularines (II) (les acides aminés en position X et Z
sont variables, R = H ou CH3).
B. Cylindrospermopsine.
C. Anatoxine-a (I), homoanatoxine-a (II).
D. Anatoxine-a(s).
62
// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
E. Saxitoxines.
F. β-N-methylamino-L-alanine (BMAA).
G. Lyngbyatoxin.
H. Aplysiatoxine.
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
groupement Adda (la N-méthyldéhydroalanine ou Mdha
et l’acide 3-amino-9-méthoxy-2,6,8-triméthyl-10-phényl-4,6diénoique) et, ii) deux acides aminés variables en
position X et Z (figure 12). À ce jour, plus de 100 variants
de microcystines ont été identifiés.
Les microcystines sont des inhibiteurs puissants des phosphatases eucaryotes de types 1 et 2A [39]. Ces toxines
pénètrent au niveau du foie via les canaux biliaires et
entraînent une modification de la phosphorylation des
protéines. Une des conséquences est la désorganisation
du cytosquelette des hépatocytes pouvant entraîner une
lyse cellulaire voire même une hémorragie hépatique. Les
microcystines sont également suspectées d’être des promoteurs de tumeur [40].
Chez l’homme, le cas le plus grave de toxicité décrit à ce
jour fait suite à la dialyse de patients insuffisants rénaux
avec de l’eau contaminée aux microcystines conduisant à la
mort de 50 patients [45]. Elles sont également suspectées
d’induire des carcinomes hépatiques pour les populations
consommant de l’eau contaminée [46].
4.1.1.2. Les nodularines
Les nodularines sont des heptapeptides cycliques présentant des analogies de structure avec les microcystines,
dont le groupement Adda. Huit variants ont été décrits à
ce jour [47] (figure 12). Les nodularines ont été identifiées
au sein du genre Nodularia [34]. Par leur mécanisme de
toxicité, les effets des nodularines sont équivalents à ceux
des microcystines [47].
4.1.1.3. La cylindrospermopsine et ses dérivés
La cylindrospermopsine (figure 12) est un alcaloïde atypique
de 415 Da présentant une unité guanidine cyclique. Elle a
été caractérisée chez Cylindrospermopsis raciborskii [40]
mais un nombre croissant de taxa sont décrits comme synthétisant la cylindrospermopsine ou ses dérivés (tableau II).
Il existe deux variants de cette toxine la 7-épicylindrospermopsine et la désoxycylindrospemopsine. La cylindrospermopsine présente une toxicité non spécifique via
l’inhibition de la synthèse protéique. Un effet mutagène de
ce métabolite est également suspecté [40, 48].
L’anatoxine-a est une amine secondaire de 165 Da soluble
dans l’eau. Son homologue méthylé, l’homoanatoxine-a
(179 Da) présente une structure et des effets toxiques très
similaires. Ces molécules induisent une dépolarisation de
la membrane post-synaptique et entraînent la mort par
arrêt respiratoire [50]. L’anatoxine-a(s) est, quant à elle,
un ester de phosphate d’une N-hydroxyguanine cyclique
de 252 Da. Son mode d’action se caractérise par l’inhibition de l’acétylcholinestérase provoquant une paralysie
musculaire due à une surexcitation des axones au niveau
post-synaptique [40].
4.1.2.2. Les saxitoxines et dérivés
La famille des saxitoxines est composée de la saxitoxine,
de la néosaxitoxine et de leurs dérivés (figure 12). Les
saxitoxines constituent une famille très diverse de toxines
communément appelées toxines paralysantes, et sont
responsables du syndrome IPFM (intoxication paralysante
par fruits de mer). Ces toxines ont été décrites pour la
première fois chez les dinoflagellés marins, mais on les
retrouve chez un nombre croissant de cyanobactéries
d’eau douce appartenant aux genres Aphanizomenon,
Cylindrospermopsis, Dolichospermum (anc. Anabaena),
Lyngbya et Phormidium (tableau II).
La saxitoxine est une trialkyle tetrahydropurine d’une
grande solubilité et stabilité dans l’environnement [51].
Les variants de la famille des saxitoxines se regroupent en
formes non-sulfatées (STX et néo-STX), mono-sulfatées
(gonyautoxines ou GTXs) et -di-sulfatées (C-toxines). Ces
toxines inhibent les canaux sodium voltage dépendants
bloquant ainsi l’influx nerveux.
4.1.2.3. La BMAA (ou β-N-méthylamino-L-alanine)
La BMAA (figure 12) est un acide aminé non-protéogénique. Cette molécule, dont les cibles restent mal connues,
pourrait être liée à des maladies telles que la sclérose
amyotrophique latérale, la maladie d’Alzheimer ou de Parkinson [49, 52]. Sa distribution au sein des cyanobactéries
est extrêmement large puisque près de 95 % des souches
testées sont identifiées comme capables de produire ce
métabolite toxique [49]. Cette large distribution ainsi que les
risques associés sont actuellement en cours d’évaluation.
4.1.2. Les neurotoxines
Les neurotoxines de cyanobactéries se regroupent en deux
familles principales : les anatoxines et les saxitoxines. Récemment la BMAA (β-N-méthylamino-L-alanine), un nouveau
métabolite à effet neurotoxique a également été décrit [49].
4.1.2.1. Les anatoxines
Les anatoxines (figure 12) sont des alcaloïdes de faible
poids moléculaire, spécifiques des cyanobactéries [40].
La production d’anatoxines a été mise en évidence chez
plus de dix genres (tableau II). Jusqu’à récemment, cette
famille de toxines a principalement été décrite chez les
Nostocales appartenant aux genres Dolichospermum (anc.
Anabaena) et Aphanizomenon ainsi que chez les Oscillatoriales appartenant au genre Phormidium. Cependant, il
semble qu’elle soit beaucoup plus répandue au sein des
cyanobactéries comme l’atteste leur mise en évidence au
sein des genres Microcystis (Chroococcales), Planktothrix
(Oscillatoriales) et Raphidiopsis (Nostocales).
4.1.3. Les dermatotoxines
Les symptômes dermatotoxiques liés à la présence de
cyanobactéries ont principalement été décrits en milieu
marin et semblent peu fréquents en eau douce. Un certain nombre d’alcaloïdes ont été isolés de cyanobactéries
marines et sont suspectés d’être à l’origine de dermatites
(figure 12). Il s’agit de des lyngbyatoxines, des aplysiatoxines et de la debromoaplysiatoxines, ces deux dernières
étant également suspectée d’être promotrices de tumeur
et activateurs de la protéine kinase C [40].
4.2. Déterminisme de la production de toxines
La concentration en toxines mesurée in situ est très
variable, ce qui rend d’autant plus difficile la gestion du
risque induit par les efflorescences de cyanobactéries.
Divers facteurs environnementaux et mécanismes moléculaires à celui des populations de cyanobactéries sont
impliqués et rendent problématique la prédiction du niveau
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global de toxicité associé à une efflorescence donnée. Ces
mécanismes font intervenir entre autres, les variations de
biomasse de cyanobactéries, la diversité génétique des
populations, la diversité des variants de toxines et l’état
physiologique des cellules. L’interdépendance de ces
mécanismes entre eux et les facteurs environnementaux
les contrôlant sont complexes.
4.2.1. Variations de biomasses en cyanobactéries
La source la plus évidente d’évolution des concentrations
en microcystines observables in situ trouve son origine
dans la capacité des cyanobactéries produisant des
microcystines à proliférer et à dominer la communauté
phytoplanctonique. Les niveaux de toxicité observés
sont donc indirectement liés aux variables contrôlant la
dynamique des populations de cyanobactéries et des
relations complexes existant au sein des écosystèmes
aquatiques (figure 9). Cependant, la plupart des études
s’accordent à dire qu’il n’existe qu’une relation limitée (de
l’ordre de 50 % de variance expliquée) entre les concentrations en microcystines mesurées et les niveaux de biomasses de cyanobactéries potentiellement productrices
de microcystines [53, 54]. D’autres mécanismes au niveau
populationnel et/ou individuel sont donc impliqués pour
expliquer la part de variabilité indépendante des évolutions de biomasse.
4.2.2. Diversité génétique des populations
de cyanobactéries
Au sein des populations naturelles de cyanobactéries,
plusieurs génotypes coexistent et ces derniers sont impossibles à distinguer d’un point de vue morphologique. Par
ailleurs, ces génotypes peuvent ou non porter les gènes
impliqués dans la synthèse des toxines [55]. Depuis quelques
années, des méthodes de biologie moléculaire (PCR quantitative : qPCR) sont utilisées avec succès pour étudier les variations des génotypes au sein de populations naturelles [55, 56].
Cependant, les abondances en génotypes toxiques ne permettent d’expliquer qu’une part de variance comparable à
celle obtenue par l’étude de la relation avec la biomasse
globale de cyanobactéries (e.g. 54 % : [56]). De plus, les
facteurs qui contrôlent la dynamique de ces sous-populations restent méconnus [56].
4.2.3. Diversité des variants de microcystines
et voies de biosynthèse non-ribosomales
Les voies de biosynthèse des cyanotoxines (microcystines, cylindrospermopsines, anatoxines et saxitoxines) sont non-ribosomales et impliquent des complexes enzymatiques dont les gènes sont organisés en
modules (figure 13). La régulation de la synthèse de ces
enzymes influence de manière qualitative et quantitative
la production de toxines [57]. L’organisation modulaire
Figure 13 – Exemple de voie de biosynthèse non ribosomale des cyanotoxines.
Sur cette figure est illustrée la voie de biosynthèse des microcystines impliquant diverses enzymes pour la synthèse de la molécule finale.
D’après Dittman et al., 2013 [57].
64
// REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460
MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
des domaines d’adénylation constitue une source de
diversité des métabolites. Les gènes impliqués peuvent
subir des événements de recombinaisons génétiques
homologues impliquant un même cluster de gènes ou
des clusters différents. Ces événements peuvent survenir au sein d’un même génome ou provenir d’ADN libre
d’autres cyanobactéries (transferts horizontaux) [57].
Ces événements contribuent à accroître la diversité des
gènes impliqués dans la synthèse des toxines et donc
la diversité des toxines elles-mêmes.
4.2.4. Impact de l’état physiologique
sur la production de toxines
Au niveau individuel, l’état physiologique a un impact sur
le taux de production de cyanotoxines. Ainsi, il est communément admis que les cyanobactéries présentent des
taux de production en microcystines maximaux durant la
phase exponentielle de croissance [58, 59]. Le taux de
croissance est le plus souvent corrélé positivement au
taux de production de microcystines. Cependant, cette
relation est susceptible d’être altérée par des facteurs
externes qui rendent difficiles la prédiction de la production
de toxines par la mesure unique du taux de croissance.
Wiedner et al. [53] ont montré que la relation entre le taux
de croissance et la production de microcystines disparaît
en conditions saturantes de lumière chez Microcystis
PCC 7806 tandis qu’elle reste positive en conditions
limitantes de nutriments [60]. En ce qui concerne l’impact
de la disponibilité en nutriments, Downing et al. [58] ont
montré que le quota cellulaire (production moyenne par
cellule) en microcystines est corrélé positivement avec
le taux d’assimilation et le contenu cellulaire en azote, et
est relié négativement au taux de fixation du carbone, au
taux d’assimilation du phosphore et à la concentration
cellulaire en phosphore sur une culture en phase stationnaire de Microcystis aeruginosa.
L’état physiologique module également la structure des
toxines dans une même souche. Citons par exemple
l’augmentation de la production de MC-RR au dépend
de MC-LR en fonction de la lumière [61], montrant ainsi
que les paramètres environnementaux ont une action sur
l’abondance relative des variants produits par une souche
donnée. D’autres facteurs, tels que la température ou la
concentration en nutriments peuvent également moduler
la proportion de variants de toxine produits. Ces facteurs
environnementaux pourraient influencer la disponibilité
intracellulaire en différents acides aminés avec des conséquences sur le variant de toxine synthétisé [62].
En conclusion, de nombreux facteurs s’exprimant à différentes échelles modulent la production de toxines tant
d’un point de vue qualitatif que quantitatif avec des conséquences sur leur toxicité.
4.3. Risques pour la santé humaine
et animale et conséquences économiques
4.3.1. Risques liés à la contamination directe
Dans les écosystèmes aquatiques continentaux, les biomasses phytoplanctoniques peuvent atteindre des concentrations en chlorophylle supérieures à 100 μg.L-1. Cette
biomasse en cyanobactéries peut engendrer une forte
concentration en toxines dans le milieu. Dans ce contexte,
le risque de contamination directe pour l’Homme intervient essentiellement par ingestion d’eau contaminée ou
par contact.
En 1878, Francis fut le premier à relier la présence d’efflorescences à cyanobactéries à la mortalité d’animaux
domestiques en Australie. Récemment, la mort de chiens
dans le Jura et dans les gorges du Tarn a été directement
imputée à la présence d’anatoxine-a, neurotoxine produite
par des cyanobactéries benthiques du genre Phormidium
[41, 42]. Le cas le plus grave d’intoxication humaine par
des cyanotoxines s’est produit en 1996 dans un hôpital
du Brésil où cinquante personnes sont décédées suite à
une hémodialyse effectuée par voie intraveineuse avec de
l’eau contaminée par des microcystines [45].
Les cyanotoxines engendrent également des problèmes
dans les exploitations agricoles ou dans les parcs zoologiques pour les animaux s’abreuvant dans une réserve
d’eau contaminée. De plus, le problème de la salubrité des
cultures maraîchères a été soulevé lorsque celles-ci sont
arrosées avec de l’eau contenant des cyanotoxines [40, 63].
Par ailleurs, la majorité des eaux de boisson provient de
réservoirs d’eau de surface et leur contamination par des
cyanobactéries potentiellement toxiques représentent un
souci permanent pour les gestionnaires de traitement et de
distribution des eaux [64, 65]. Dans les filières de traitement
d’eau potable, les proliférations de cyanobactéries peuvent
provoquer un encrassement des filtres, ce qui complique
le processus de traitement des eaux.
Les aires de baignade et d’activités nautiques avec des
efflorescences à cyanobactéries toxiques représentent le
danger majeur pour l’homme. Ce risque est plus élevé pour
les enfants qui sont susceptibles d’avaler d’importantes
quantités d’eau en nageant ou en jouant [66]. Il faut également tenir compte des sports nautiques tels que le ski
nautique, l’aviron, le canoë, etc. qui produisent des aérosols pouvant contenir des toxines qui sont alors inhalées
et sont au contact de la muqueuse des voies aériennes.
Des études menées chez la souris ont montré que les
effets toxiques de l’anatoxine-a étaient plus importants
si la toxine était administrée par instillation nasale plutôt
que par absorption orale [67].
En milieu côtier et dans certaines conditions environnementales, les cyanobactéries peuvent proliférer comme
par exemple l’espèce Lyngbya majuscula. Cette cyanobactérie est souvent associée à des problèmes dermatologiques [68].En 2010, une soixantaine de personnes
ayant fréquenté la plage de N’Gouja à Mayotte ont présenté des syndromes d’irritation cutanée et respiratoire,
vraisemblablement à la suite d’inhalation d’embruns et/
ou d’activité de baignade. L’apparition de ces syndromes
irritatifs a été concomitante à une efflorescence massive
dans l’eau, de cyanobactéries potentiellement toxiques
du genre Lyngbya. Lyngbya majuscula peut synthétiser de
nombreuses toxines dont les cibles et les effets peuvent
être très divers. Les toxines les plus communément associées à des effets chez l’homme sont la lyngbyatoxine A,
l’aplysiatoxine et la débromoaplysiatoxine. In vitro, ces trois
toxines sont des promoteurs de tumeur, l’aplysiatoxine
induisant une transformation cellulaire et la stimulation
de la synthèse d’ADN.
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2014 - N°460 //
65
4.3.2. Risques liés à la bioaccumulation des toxines
Si les cyanotoxines sont connues pour s’accumuler dans
les coquillages filtreurs, le risque d’intoxication suite à une
ingestion de bivalves d’eau douce est faible puisqu’ils ne
sont consommés qu’exceptionnellement. En revanche, les
cyanobactéries vendues comme compléments alimentaires
peuvent présenter un risque potentiel pour le consommateur ainsi que l’a démontré une étude récente [69].
Les poissons d’eau douce sont également susceptibles
de bioaccumuler des cyanotoxines [70]. Le risque pour
l’homme lié à la consommation de poissons contaminés
est peu pris en compte car les données manquent pour
réaliser une évaluation du risque. De la même manière,
peu de données sont disponibles concernant le risque
d’intoxication par ingestion de bivalves marins contaminés par les cyanobactéries. Les cyanobactéries marines
appartenant principalement aux genres Synechococcus
et Prochlorococcus ne sont pas répertoriées à ce jour
comme productrices de toxines.
rRecommandations liées aux cyanobactéries :
le cas de la France
La reconnaissance à l’échelle européenne de l’importance
qu’il faut accorder à la préservation des eaux de surface est
illustrée par la Directive Cadre sur l’eau (DCE ; 2000/60/EC).
Cette directive propose un cadre administratif pour la gestion
intégrée des bassins versants des cours d’eau. L’objectif de la
DCE est d’atteindre un niveau de « bonne qualité » des masses
d’eau à travers l’Europe à l’horizon 2015. La DCE n’intègre
pas la problématique des cyanobactéries mais propose un
cadre général pour mieux gérer l’impact de l’eutrophisation
issue de l’intensification des activités humaines.
La prise en compte du risque sanitaire issu des proliférations de
cyanobactéries est quant à elle relativement récente. Le rapport
de 1998 de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) [71],
faisant suite à l’étude épidémiologique de Pilotto et al. [72],
est encore à l’heure actuelle le document de référence pour
les recommandations relatives aux cyanobactéries [73].
Ces recommandations se basent sur trois types d’indicateurs afin de faciliter les possibilités d’implémentation en
fonction des moyens disponibles.
4.3.2.1. L’eau de boisson
Depuis 2001, un décret a fixé la limite maximale de 1 μg.L-1
d’équivalent microcystine-LR totale pour l’eau potable
(applicable depuis décembre 2003), suite à la valeur guide
provisoire de l’OMS. Cette valeur correspond à la concentration maximale, après traitement, considérée comme
ne pouvant entraîner de toxicité aiguë (ce qui n’exclut
pas des effets de toxicité chronique). Le programme des
contrôles sanitaires officiels pour le réseau public d’eau
potable stipule que les microcystines doivent être analysées dans l’eau de surface brute, au point de distribution,
uniquement dans les cas de prolifération de cyanobactéries détectées par observation visuelle et/ou d’après des
résultats analytiques.
4.3.2.2. Les activités récréatives
Le Conseil supérieur d’hygiène publique de France s’est
basé sur les recommandations de l’OMS pour émettre un
avis (CSHPF du 6 mai 2003). Cet avis a ensuite fait l’objet
d’une circulaire produite par la Direction générale de la
santé applicable aux zones de baignades et d’activités
nautiques (circulaire DGS/SD7A 2003/270, 2004/364,
2005/304). Un arbre de décision a été mis en place pour
les gestionnaires locaux des plans d’eau (circulaire DGS
n° 2033-270 7a). En cas de concentrations élevées et
persistantes de cyanobactéries, un système de contrôle
strict est mis en œuvre, sur la base visuelle et d’observations microscopiques.
Trois niveaux de mesures de gestion sont identifiés en
fonction des concentrations de cyanobactéries (tableau III).
À l’heure actuelle, malgré le risque pour la santé publique
que représentent les neurotoxines de cyanobactéries,
aucune recommandation n’a été mise en place par l’OMS
pour ces toxines. Seuls l’Australie, le Brésil et la Nouvelle-Zélande ont proposé récemment des concentrations
seuils pour les saxitoxines (3 μg.L-1) et les anatoxines (de
1 à 6 μg.L-1).
Contrairement aux phycotoxines, aucune méthode
d’analyse n’est préconisée concernant la détection des
cyanotoxines.
Tableau III – Recommandations françaises pour la gestion des risques
liés aux cyanobactéries dans les plans d’eau utilisés pour les activités récréatives.
Niveau 1
les activités
Si le nombre de cellules est compris entre 20 000 et 100 000 cellules/mL ± 20 %, avec une majorité de cyanobactéries
récréatives sont toujours autorisés et le public est informé par des affiches. Les inspections visuelles sont intensifiées sur une base quotidienne.
L’échantillonnage pour le comptage et l’identification des cyanobactéries doit être effectué au moins tous les quinze jours.
Niveau 2
Si le nombre de cellules est > 100 000 cellules/mL ± 10 %, la recherche de microcystines est réalisée.
la baignade et les activités nautiques sont limitées.
r Si la concentration en microcystines exprimée en équivalent MC-LR est < 13 μg/L
la baignade est interdite et les activités nautiques sont limitées.
r Si la concentration exprimée en équivalents MC-LR est > 13 μg/L
Dans tous les cas, le public est informé.
Niveau 3
Apparition d’efflorescences et « d’écumes » de cyanobactéries sur les zones de baignade
toutes les activités dans ces zones sont interdites.
Les restrictions ne doivent pas être appliquées obligatoirement sur tout le plan d’eau. D’autres zones sans efflorescences et/ou « écumes » bien
visibles peuvent rester ouvertes. La notion « d’écume » est à la discrétion des gestionnaires du plan d’eau particulièrement pour les cyanobactéries
n’en formant pas telles que celles appartenant au genre Planktothrix.
D’après Chorus, 2012.
66
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MICRO-ORGANISMES PATHOGÈNES DE L’EAU
5. Conclusion
Les cyanobactéries par leur origine ancienne, leur rôle
dans l’histoire de la terre telle que nous la connaissons,
leur diversité de formes, de couleurs, leurs capacités
d’adaptation aux environnements les plus variés sont des
micro-organismes fascinants. Les capacités adaptives
des cyanobactéries s’appuient sur des propriétés fonctionnelles qui, lors de ruptures des équilibres naturels des
écosystèmes aquatiques, font qu’elles prolifèrent jusqu’à
produire de fortes biomasses. Ces biomasses ont des
conséquences en retour sur le fonctionnement des écosystèmes aquatiques mais également sur l’Homme par
les toxines qu’elles produisent. Les facteurs environnementaux qui contrôlent la dynamique des cyanobactéries
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ainsi que la production de toxines sont complexes, ce qui
rend le niveau de toxicité difficilement prévisible. Afin de
gérer au mieux les risques liés aux cyanobactéries et aux
cyanotoxines, dans un contexte de fréquentations des
plans d’eau par les populations humaines, des mesures
de gestion sont proposées afin d’allier au mieux usages
et risques des plans d’eau ou des rivières.
Remerciements
Cet article de synthèse s’appuie, entre autres, sur les manuscrits de
thèse d’Arnaud Catherine (2009), d’Aurélie Ledreux (2010) et de Solène
Thomazeau (2010).
Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de
conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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