Darwin contre le (néo)libéralisme
Le néolibéralisme, c'est la tentative des propriétaires des plus gros capitaux de
la finance et de l'industrie de mettre enfin en application au niveau mondial la vieille
théorie du libéralisme, selon laquelle aucune règle ni structure publique ne doit faire
obstacle au libre jeu du marché des marchandises, du travail et des capitaux.
Cette théorie est vieille : elle était déjà formulée lorsque s'est déclenchée la
Révolution française, et elle a joué un rôle dans la fédération contre-révolutionnaire
des bourgeois riches et des aristocrates en France, ainsi que dans le règlement final
des guerres napoléoniennes.
L'application de cette théorie conduisait la Révolution industrielle qui imposait
à l'Angleterre le « capitalisme à la Manchester » : elle y répandait la misère sociale
inimaginable que décrit parfaitement Charles Dickens dans ses romans...
Vers le milieu du dix-neuvième siècle, la bourgeoisie britannique ressentit le
besoin de faire face à la montée du socialisme : en 1848, le « Manifeste du parti
communiste » de Karl Marx et Friederich Engels venait de placer le mouvement
scientifique de la pensée au cœur de l'essence du socialisme.
Pour le système d'exploitation capitaliste, le développement d'une revendication
de socialisme scientifiquement fondée représentait, et représente toujours, un danger
mortel : le caractère scientifique de l'économie capitaliste est éminemment discutable,
et une telle discussion, conduite selon les critères de la science, qui exige de
commencer la connaissance dans l'observation de la réalité et d'avancer pas à pas en
établissant la vérité de chaque pas au moyen du seul critère indépendant des sociétés
humaines, qui est le critère matérialiste, une telle discussion a toutes chances de
conduire à une condamnation du système économique capitaliste, et d'ailleurs, cette
discussion a déjà eu lieu maintes fois : elle a toujours abouti à cette conclusion ( voir la
note ci-dessous ).
En 1836, Charles Darwin débarquait du Beagle ; en 1839, il publiait son
« Voyage d'un naturaliste autour du monde ».
En 1859, il publiait son ouvrage aujourd'hui le plus connu, « De l'origine des
espèces par la sélection naturelle ou la préservation des races favorisées dans la
lutte pour la vie ».
Entre temps, Charles Darwin communiquait ses observations et découvertes
dans les sociétés savantes britanniques ; les milieux religieux que l'on qualifierait
aujourd'hui d'intégristes lui opposèrent violemment le récit biblique et répandirent des
interprétations absurdes de ses théories, telle que celle selon laquelle « l'homme
descendrait du singe », qu'il a toujours réfutées.
Lors de la publication de « De l'origine des espèces », quelques grands bourgeois
riches d'Angleterre furent enthousiasmés par le concept de la « Lutte pour la vie » :
ils s'en emparèrent et présentèrent désormais la concurrence capitaliste et son éternel
aboutissement, la concentration des capitaux entre les mains des plus riches, comme
la forme que prendrait la « Lutte pour la vie » en passant de l'écologie à l'économie. Ils
baptisèrent « Darwinisme social » cette théorie hasardeuse et s'en servirent pour faire
obstacle aux progrès du socialisme scientifique.
Sans attendre, Charles Darwin a désavoué le « darwinisme social », afin de
défendre la valeur scientifique de ses travaux. Il avait entrepris de comprendre