Lorsqu'il existe une relation médecin-patient, la loi et l'éthique reconnaissent au médecin un devoir de
diligence, ainsi que l'obligation de ne pas abandonner ce patient. Ce devoir peut toutefois être limité si
le patient a une possibilité raisonnable d'obtenir des services de soins de santé ailleurs.
Le médecin n'a pas non plus de devoir de diligence envers une personne qui n'est pas déjà son patient,
et il n'est donc pas légalement obligé de traiter cette personne. Il y a toutefois des exceptions à cette
règle, et la récente jurisprudence reconnaît le devoir de dispenser des traitements dans les services
d'urgence, même en l'absence d'une relation médecin-patient préalable. Dans ce dernier cas, le devoir
de diligence se justifie du fait que la population compte sur les soins des médecins dans les hôpitaux
qui disent offrir des soins d'urgence2.
En vertu du droit de la responsabilité délictuelle, la portée du devoir de diligence est déterminée en
fonction des actions d'une personne raisonnable. Donc, pour déterminer la portée du devoir de diligence
que la loi reconnaît à la Dre Penser, il faut considérer ce qu'un médecin raisonnable ferait dans la même
situation. Cette norme de la décision raisonnable limite le devoir de diligence qui est exigé d'un
médecin, et ces limites raisonnables expliquent qu'un médecin puisse, par exemple, rentrer chez lui le
soir, prendre des vacances et être rémunéré pour son travail. Cependant, même s'il est généralement
reconnu que de telles limites existent, le débat persiste sur la question de savoir quel niveau de risque
personnel est raisonnable en vertu du devoir de diligence du médecin3. Pour déterminer si la Dre Penser
est légalement tenue de mettre sa santé en péril pour traiter les patients, il faut tenir compte du niveau
de risque qu'un médecin raisonnable serait disposé à prendre pour traiter ses patients dans des
circonstances similaires.
Q2. La loi reconnaît elle à la Dre Penser le droit de refuser de s'acquitter de ses obligations?
Au Canada, de nombreuses instances ont adopté des lois sur la santé et la sécurité au travail qui
accordent généralement à un travailleur le droit légal de refuser de travailler si le travailleur a des
raisons de croire que les conditions physiques du lieu de travail pourraient mettre sa sécurité en péril.
Ce droit est cependant limité pour certains, notamment pour les travailleurs qui ont la responsabilité de
protéger la sécurité publique (c. à d. les pompiers, les policiers et les personnes participant au
fonctionnement d'un hôpital) et qui ne peuvent refuser de travailler si le danger fait partie normalement
de leur travail ou si le refus mettra en péril la vie, la santé ou la sécurité d'autres personnes.
La question est donc de savoir si des circonstances comme celles décrites dans le cas présent
constitueraient un danger qui fait partie du travail normal d'un médecin. Depuis l'expérience du SRAS
et face à la menace croissante d'une pandémie de grippe, les médecins sont conscients des risques
d'exposition à de graves maladies infectieuses qui sont associés à leur spécialité particulière. Donc, en
adoptant une spécialité particulière, les médecins consentent implicitement aux risques et aux
responsabilités qui sont associés à ce travail4. Cependant, on peut aussi prétendre que prendre des
risques importants pour sa santé constitue un acte extraordinaire qui déborde du devoir professionnel
de diligence. S'il n'existe aucune relation médecin-patient préalable, aucun scénario d'urgence ni
aucune attente légitime envers la prestation de soins, et qu'il existe d'autres moyens raisonnables
d'obtenir des soins, on pourrait faire valoir que le médecin n'est pas tenu de dispenser des soins qui
comporteraient des risques pour sa santé, supérieurs aux risques associés à la prestation normale des
soins par un médecin.
Q3. La Dre Penser a t elle l'obligation éthique de traiter les patients qui ont contracté la nouvelle
maladie infectieuse?
La Dre Penser devrait examiner divers principes et sources d'information pour déterminer si elle a ou
non l'obligation éthique de traiter les patients atteints de la nouvelle maladie infectieuse.
L'obligation professionnelle qu'a le médecin de traiter les patients repose sur le principe éthique de la
bienfaisance, lequel traduit l'obligation morale du médecin de contribuer au mieux être des patients5.
La relation médecin-patient se définit généralement comme une relation fiduciaire, tant sur le plan
juridique qu'éthique. Cette définition reconnaît la vulnérabilité particulière des patients qui s'en
remettent aux médecins pour les soigner. Dans cette relation fiduciaire, les médecins sont tenus d'agir