Directives de Pratiques Cliniques EASL: les pathologies vasculaires

Directives de
pratique clinique
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Directives de Pratiques Cliniques EASL:
les pathologies vasculaires du foie
Association européenne pour létude du foie*
Directives de pratique clinique
Introduction
Les aections vasculaires du foie, bien quaectant moins de
5 patients sur 10.000, représentent collectivement un certain
nombre de pathologies rares qui représentent un important
problème de santé, au monde entier, dans le domaine des mala-
dies du foie. Une caractéristique commune de la plupart de ces
troubles est qu’ils peuvent provoquer de lhypertension portale
non-cirrhotique avec un taux élevé de morbidité et de mortalité
en résultant. En outre, un intérêt particulier tient compte du fait
que les patients sont généralement jeunes avec une espérance de
vie par ailleurs normale qui peut être nettement raccourcie s’ils
ne sont pas gérés de manière adéquate.
Les progrès dans la connaissance des troubles hépatiques vas-
culaires sont entravés par le petit nombre de cas et un nombre
limité détudes évaluant l’histoire naturelle, la physiopathologie
ou la thérapie.
Cependant, ces dernières années, l’intérêt pour ces troubles a
augmenté, comme en témoigne laugmentation du nombre de
publications sur ce sujet. De plus, lEASL a encouragé ce regain
d’intérêt en parrainant une conférence monothématique, en Juin
2012 à Tallinn, sur les troubles vasculaires du foie, et en propo-
sant un guide EASL de pratiques cliniques sur la question.
Ces directives ne couvriront pas toutes les aections vasculaires
possibles du foie, mais sont principalement basées sur les sujets
discutés pendant la conférence monothématique: syndrome de
Budd-Chiari, thrombose non-cirrhotique de la veine porte, hy-
pertension portale idiopathique, syndrome dobstruction sinu-
soïdale, malformations vasculaires hépatiques de télangiectasie,
de thrombasthénie héréditaire et de thrombose de la veine porte
dans la cirrhose.
Des lignes directrices ont été rédigées selon des études publiées
extraites de Pubmed. Les éléments de preuve et des recomman-
dations ont été classées selon la Classication des Recommanda-
tions de Développement et du Système d’Evaluation (GRADE).
La force de la preuve a été classée en trois niveaux: élevée (A),
modérée (B) ou faible (C), tandis que le grade de recommanda-
tion la été en deux niveaux: fort (1) ou faible (2) (Tableau 1). Plus
la qualité de la preuve est élevée, plus une forte recommandation
est justiée. Si aucune preuve claire nexistait, des recommanda-
tions ont été fondées sur les opinions acceptées des membres du
comité de rédaction.
Les facteurs étiologiques de la thrombose veineuse splanch-
nique chez les patients sans pathologie hépatique sous-jacente.
Au cours des dernières décennies, plusieurs facteurs étiolo-
giques de la thrombose veineuse splanchnique (TVS), y compris
le syndrome de Budd-Chiari (SBC) et la thrombose de la veine
porte (TVP), ont été identiés. Ceux-ci peuvent être divisés en
facteurs locaux et systémiques. Les facteurs de risque locaux
pour le développement du SBC comprennent des tumeurs ma-
lignes solides ou des kystes qui compriment le tube veineux [1].
La TVP est le plus souvent considérée comme une complication
de la cirrhose du foie ou de tumeurs malignes hépatobiliaires.
Dautres facteurs de risque locaux sont la chirurgie intra-ab-
dominale et des infections ou inammations dans labdomen.
Les facteurs de risque systémiques peuvent être identiés dans
la plupart des patients atteints de TVS. Dans une vaste étude
multicentrique européenne in vivo sur des patients avec un SBC
(n = 163) ou de TVP (n = 105), les facteurs prothrombotiques
étaient présents dans, respectivement, 84% et 42% des cas. [2,3]
(Tableau 2). Ces données sont compatibles avec des études ré-
trospectives antérieures, à laide doutils de diagnostic similaires
[4,5]. Dans dautres parties du monde, particulièrement en Asie,
dautres facteurs étiologiques sont observés, y compris la mala-
die de Behçet, les nappes (aussi connues comme obstructions
membraneuses) de la veine cave inférieure (VCI) et les kystes
hydatiques [6,7]. La plupart des études ont été réalisées chez les
adultes avec TVS. Chez les enfants présentant des facteurs pro-
thrombotiques, les TVS semblent jouer un rôle étiologique im-
portant, cependant la TVS peut aussi être causée par des facteurs
spéciques à lâge, comme la septicémie néonatale et le cathété-
risme ombilical [8].
Létiologie du SBC et de la TVP souvent multifactorielle. Dans
létude in vivo, une combinaison de deux ou plusieurs facteurs
prothrombotiques, génétiques ou acquis a eu lieu dans 46% des
SBC et 10% des patients atteints de TVP [2,3]. Pour la TVP, un
facteur thrombotique a été trouvé chez 36% des patients avec
un facteur de risque local [3]. Chez les patients atteints de SBC,
18% avaient même trois facteurs de risque. Chez plus de 60%
des patients diagnostiqués avec une TVS avec thrombophilie hé-
réditaire, aucun facteur de risque supplémentaire na été trouvé.
rombophilie héréditaire et acquise
Le terme «thrombophilie» dénit à la fois les maladies, tant hé-
réditaires qu’acquises, qui sont associées à un risque accru de
thrombose veineuse, et se caractérisent par un état dhypercoa-
gulabilité [9]. Les deux déciences, héréditaire ou naturelle, des
inhibiteurs du système de coagulation, une augmentation des
taux de facteurs de coagulation et des mutations génétiques des
facteurs coagulants sont associés à un risque accru de TVS. La
prévalence des déciences héréditaires de lantithrombine, la
protéine C et la protéine S, est dicile à évaluer chez les patients
atteints de TVS, à la suite dune diminution de la synthèse hépa-
tique qui est souvent rencontrée chez ces patients. Le traitement
avec des antagonistes de la vitamine K (AVK) entrave aussi le
diagnostic de la protéine C et le décit en protéine S.
Reçu le 20 juillet 2015 ; accepté le 20 juillet 2015
Collaborateurs: Président: Juan Carlos Garcia-Pagán; Membres du comité: Elisabetta
Buscarini, Harry L.A. Janssen, Frank W.G. Leebeek, Aurelie Plessier, Laura Rub-
bia-Brandt; Marco Senzolo, Jeorey N.L. Schouten, Armando Tripodi. Membre du
Conseil dadministration de l’EASL: Dominique C. Valla.
*Correspondance : EASL Oce, 7 rue Daubin, CH 1203 Genève, Suisse.
E-mail: easloce@easloce.eu
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La prévalence de la carence en antithrombine est comprise entre
0-5%, tant dans les SBC que TVP, le décit en protéine C entre
dans la prévalence de la FVL et la variante du gène de la pro-
thrombine G20210A dans les SBC et TVP reste non résolue.
La prévalence des anticorps antiphospholipides (AAP) dans les
SBC et TVP a été estimée à environ 5-15% [2-4]. Cependant,
dans la plupart des études, une seule mesure dAAP a été eec-
tuée alors que, selon les lignes directrices actuelles de cette me-
sure doit être répétée au bout de 12 semaines an de conrmer
la présence dAAP [16].
En plus des facteurs de risque mentionnés ci-dessus pour la
TVS, des études plus récentes ont cherché à savoir si des niveaux
accrus de pro-facteurs coagulants ou des troubles de la bri-
nolyse sont associés à un risque accru de TVS. Les taux élevés de
facteur VIII se retrouvent chez les patients atteints [17,18]. Une
augmentation signicative de thrombine endogène, quel que
soit le trouble thrombotique ou de thrombophilie sous-jacente a
également été observé dans les TVP [18]. Une hypobrinolyse,
dénie par une augmentation du temps de lyse du caillot, a éga-
lement été associée à un risque accru de SBC. Cela a été prin-
cipalement déterminé par laugmentation de niveau de l’inhi-
biteur dactivateur tissulaire du plasminogène. Jusqu’à présent,
l’importance de ces résultats pour le pronostic et le traitement
des TVS navait pas été étudié [19].
Néoplasmes myéloprolifératifs
Les néoplasmes myéloprolifératifs (NMPs) sont une cause
sous-jacente commune de la thrombose veineuse abdominale.
Les néoplasmes myéloprolifératifs (NMPs) sont une cause ini-
tiale commune de la thrombose veineuse abdominale. Les
NMPs sont des troubles chroniques des cellule souche héma-
topoïétiques cloniques caractérisés par une surproduction de
granulocytes mûrs et fonctionnels, de globules rouges et/ou de
plaquettes. Une des complications principales de NMPs est le
développement de complications thrombotiques artérielles et
veineuses causées par l’agrégation plaquettaire accrue et la géné-
ration de thrombine [19,20].
Il a précédemment été estimé que les NMPs sont observés chez
30-40 % de patients avec SBC ou TVP, tandis que cest la cause de
seulement une minorité dautres types daccident thromboem-
boliques veineux [2,3,11,21,22]. Les NMPs sont diagnostiqués
sur base de plusieurs critères incluant les changements de cel-
lules sanguines périphériques caractéristiques (niveaux dhémo-
globine accrus et hyperplaquettose) et des découvertes de moelle
osseuse. Chez des patients TVS, cependant, la pertinence entre
les critères généralement utilisés pour le diagnostic des NMPs
sont débattus. En raison de l’hypertension portale menant à hy-
persplénisme et lhémodilution, lhyperplaquettose caractéris-
tique et lérythrocytose peuvent être masqués [23]. Auparavant,
le diagnostic des NMPs chez ces patients était appuyé sur les
résultats de biopsie de la moelle osseuse (MO) et la croissance
des colonies érythroïdes en labsence dérythropoïétine exogène,
appelée colonies érythroïdes endogènes spontanées ou CEE.
Ceci pourrait également être utilisé pour identier les patients
à risque d’aggravation de NMPs [23]. Aujourd’hui, la mutation
JAK2V617F, une mutation de gain de fonction commune me-
nant à lélaboration de NMP, est d’une importance majeure dans
la stratégie diagnostique de NMP. Cette mutation est présente
chez presque tous les patients atteints de maladie de Vaquez et
dans environ 50% des patients atteints de thrombocytémie es-
sentielle et de myélobrose primaire. La mutation JAK2V617F a
été détectée chez un grand nombre de SBC non sélectionnés et
de patients TPV. Dans une méta-analyse récente de la prévalence
de NMPs et de leurs sous-types ainsi que JAK2V617F et son rôle
de diagnostic dans ces troubles rares a été signalé [24]. Dans le
CBS, la prévalence moyenne de NMPs et de JAK2V617F était
respectivement, de 40,9% et 41,1%. Dans la TVP, la fréquence
moyenne de NMPs et de JAK2V617F était de 31,5% et 27,7%,
respectivement. Les NMPs et JAK2V617F étaient plus fréquents
chez SBC par rapport à la TVP. Vaquez était plus répandu chez
les SBC que les TVP. Le dépistage, chez les patients JAK2V617F
TVS sans caractéristiques hématologiques logique typique iden-
tiées, de NMPs et de SBC, dans 17,1% et 15,4% de patients exa-
minés pour SBC et TVP, respectivement [24].
On peut en conclure que, chez tous les patients avec TSV, une
histologie MO et un dépistage de JAK2V617F doivent être ef-
fectués dans le cadre du diagnostic standard [25]. Dans certains
cas, le NPP est dicile à diagnostiquer et des tests supplémen-
taires, tels que des frottis sanguins périphériques, les taux déry-
thropoïétine endogène ou la formation de colonies érythroïdes
in vitro peuvent être ajoutés à lalgorithme de diagnostic, comme
Tableau 1. La preuve et la classication de recommandation (adapté du système GRADE).
Le classement des preuves Notes Symbole
Haute qualité D’autres recherches sont très peu susceptibles de changer notre conance dans l’estimation de l’eet. A
Qualité moyenne D’autres recherches sont susceptibles d’avoir un impact important sur notre conance en l’évaluation de l’eet
et peut changer l’évaluation.
B
Faible ou très faible D’autres recherches sont très susceptibles d’avoir un impact important sur notre conance dans l’estimation
de l’eet et sont susceptible de changer l’estimation. Toute estimation de l’eet est incertaine.
C
Le classement des preuves Notes Symbole
Forte recommandation justiée Les facteurs inuençant la force de la recommandation comprenaient la qualité des données, les résultats
présumés pour patient et le coût
1
Recommandation plus faible Variabilité dans les préférences et les valeurs ou plus d’incertitude probable: une recommandation faible est
justiée.
La recommandation est faite avec moins de certitude: coût plus élevé ou consommation de ressources
2
Tableau 2. Facteurs étiologiques dans le syndrome Budd-Chiari et la
thrombose de la veine porte [48,52,73].
BCS TVP
Facteur de risque Fréquence (%) Fréquence (%)
Thrombophilie
Héréditaire 21 35
Acquise 44 19
Néoplasme myéloprolifératif 49 21
JAK2 positif 29 16
Facteurs hormonaux 38 44
Contraceptifs oraux 33 44
Grossesse 6 0
HPN (Hémoglobinurie paroxystique nocturne) 19 0
Autres facteurs systémiques 23 n.d.
Facteurs locaux 0 21
SBC: Syndrome de Budd-Chiari; TVP: thrombose de la veine porte; HPN:
Hémoglobinurie paroxystique nocturne; S.D. sans données
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suggéré par lOMS [26]. Récemment, deux groupes de recherche
ont rapporté simultanément la présence de mutations soma-
tiques dans le gène codant calréticuline (CALR), une protéine
présente dans le réticulum endoplasmique et impliquée dans la
régulation de la voie signalisation STAT [27,28]. Ces mutations
ont été détectées en utilisant le séquençage de lexome entier chez
la majorité des patients atteints NMP avec JAK2 non muté. Les
mutations de CALR étaient absentes chez les patients atteints de
polyglobulie essentielle, et se sont produites dans 80% des pa-
tients atteints de thrombocytémie essentielle JAK2 négative et
de myélobrose primitive. Dans deux études récentes [29,30],
les mutations de CALR ont été évaluées chez les patients atteints
de TVS, étant positives chez 0,7 et 1,9% des patients, respecti-
vement. Le taux augmente lorsque, seuls les patients avec NMP
étaient considérés (2,3 et 5,4% respectivement). En eet, CALR
a été trouvé positive chez, respectivement, 9,1% (de 1 patient
sur 11) et 30% (de 4 patients sur 13) de JAK2 NMP négatif. Le
mécanisme pathogénique exact de la TVS dans la NMP reste à
résoudre mais, en plus de l’érythrocytose caractéristique et de
la thrombocytose, les anomalies fonctionnelles des plaquettes et
leucocytes semblent avoir un rôle pathogénique [31].
Autres facteurs étiologiques
L’hémoglobinurie paroxystique nocturne (HPN) est un trouble
hématologique rare acquis des cellules-souches hématopoïé-
tiques et est le plus fortement associé au SBC [32]. Une HPN a
été rapportée chez 9-19% des patients testés pour SBC [11,33],
alors qu’une prévalence de 0-2% a été rapportée dans la TVP [3].
Le mécanisme exact pour le développement de TVS est encore
inconnu [33]. Les patients avec une population de cellules HPN
supérieure à 60% des granulocytes semblent être à un risque
accru de thrombose [34]. Un test de HPN doit systématique-
ment être eectué dans tous les SBC et envisagé chez les patients
sourant de TVP [35]. Les maladies auto-immunes médiées, les
maladies inammatoires de l’intestin, la vasculite, la sarcoïdose
et la maladie du tissu conjonctif peuvent également être asso-
ciées à des TVS, bien que ces troubles ne soient guère observés
dans létude in vivo, la maladie de Behçet est particulièrement
observée dans la région méditerranéenne [36]. Dautres causes
rares de vasculite comprennent les infections à cytomégalovirus
et la maladie cœliaque [37,38].
Les facteurs hormonaux, y compris l’utilisation de contracep-
tifs oraux et la grossesse sont considérés comme des facteurs de
risque de TVS. Les contraceptifs oraux ont été révélés être asso-
ciés, à un risque deux fois moindre pour le SBC [10,39]. Pour
la TVP, le risque peut être augmenté légèrement, mais cela na
pas encore été bien établi [10]. Il convient de noter que, chez de
nombreux patients atteints, dautres facteurs étiologiques conco-
mitants ont été identiés.
Les facteurs étiologiques et leur importance dans le traitement
Le diagnostic du facteur étiologique sous-jacent pour le dé-
veloppement de la TVS est important, car il peut y avoir des
implications thérapeutiques ou pronostiques. Par exemple, la
présence d’un trouble thrombotique peut inuencer la durée du
traitement anticoagulant chez les patients atteints de TVP. Pour
les patients atteints de SBC, le traitement anticoagulant à vie est
justié, compte tenu de la gravité de la maladie. Chez les per-
sonnes atteintes de TVP aiguë, un traitement anticoagulant est
donné pendant 6 mois. Cependant, un traitement à long terme
est parfois donné, en fonction du trouble sous-jacent. D’une ma-
nière générale, la durée du traitement anticoagulant est forte-
ment dépendant du risque de thrombose récurrente. Bien que
seulement quelques études rétrospectives aient mis laccent sur
le risque de récidive chez les TVP, ces études ont révélé que létat
prothrombotique sous-jacent était un prédicteur indépendant
de la thrombose récurrente [40-42]. Dautre part, le risque de
saignement chez ces patients, qui présentent souvent de l’hé-
morragie variqueuse, doit être pris en compte. Par conséquent,
les lignes directrices récentes ont suggéré une thérapie anticoa-
gulante à long terme, uniquement aux personnes présentant
des facteurs de risque sous-jacents thrombophiliques, comme
mutation homozygote de la FVL et variante du gène de la pro-
thrombine [43]. Cependant, dautres lignes directrices indiquent
que les défauts thrombophiliques ont une valeur prédictive in-
certaine pour la récidive et les décisions relatives à la durée du
traitement anticoagulant, si fondée sur des preuves, les résultats
des tests ne le sont pas [44]. Des études de suivi sont nécessaires
pour établir la durée du traitement anticoagulant en particulier
ceux sans ou avec de légers troubles thromboemboliques. Les
lignes directrices actuelles ne prennent pas en charge les tests
des autres membres de la famille en cas d’un défaut de thrombo-
philie est identié [45].
Dans le cas d’un néoplasme myéloprolifératif sous-jacent
(NMP), le traitement anticoagulant avec AVK doit être prescrit
indéniment pour la TSV. Presque tous les patients NPP, de nos
jours, sont traités avec de l’aspirine. Cependant, il est encore im-
possible de savoir si laspirine doit être ajoutée au traitement des
patients avec TVS NPP traité avec AVK. Bien qu’un avantage
potentiel de laspirine chez les patients avec TVP et MPN ait été
observé dans une étude rétrospective, cela devrait être conr
dans des études prospectives [44,46]. Les patients NPP doivent
être traités avec une thérapie antiproliférative, tel que l’interféron
alpha ou l’hydroxyurée, an de normaliser le nombre de cellules
du sang périphérique. Chez les patients atteints de Vaquez, un
hématocrite <45% devrait être recherché [47]. Le diagnostic de
l’HPN sous-jacente chez les patients atteints de TVS peut avoir
des implications importantes sur le traitement. Le traitement à
long terme avec de léculizumab peut être indiqué chez ces pa-
tients [35].
Recommandations:
1. Examiner les patients avec SBC et TVP pour les facteurs pro-
thrombotiques locaux et systémiques sous-jacents. L’identi-
cation d’un facteur de risque ne devrait pas empêcher de cher-
cher des facteurs de risque supplémentaires (A1).
2. Le bilan consiste en un diagnostic des facteurs de thrombophi-
lie, héréditaires et acquis, des néoplasmes myéloprolifératifs,
l’hémoglobinurie nocturne paroxystique et les troubles au-
to-immunes (A1).
3. Examiner des patients, tant avec un SBC qu’avec une TVP pour
des facteurs de risque locaux, y compris les maladies inam-
matoires intra-abdominales et des tumeurs malignes abdomi-
nales (A1).
4. Le dépistage de la thrombophilie devrait inclure la protéine
S, la protéine C et les niveaux d’antithrombine, la mutation de
FVL, la variante prothrombine du gène G20210A, les anticorps
antiphospholipides (APA). En cas de la positivité APA, ceci de-
vrait être répété après 12 semaines (A1).
5. Test de néoplasmes myéloprolifératifs en testant la mutation
de JAK2V617F chez les patients à TVS, et les individus avec un
nombre de cellules sanguines périphériques normales (A1).
Chez les patients à mutation JAK2V617F négative, le dépistage
de la mutation calréticuline doit être eectuée et, si les deux
sont négatifs, l’histologie de la moelle osseuse doit être envisa-
gée. Les patients doivent être référés à un hématologue (B2).
6. Traiter la maladie sous-jacente adéquatement (B1). En cas de
MPN sous-jacent, on devrait administrer un traitement anticoa-
gulant à vie pour ces patients SVT (B1).
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Le syndrome de Budd-Chiari
Le SBC est déni comme lobstruction de l’écoulement vei-
neux hépatique qui peut être situé dans les petites veinules
hépatiques jusquà lentrée de la VCI dans loreillette droite [1].
Lobstruction d’écoulement hépatique liée à la maladie car-
diaque, la maladie péricardique ou le syndrome dobstruction
sinusoïdal (SOS) est exclue de cette dénition. Le SBC peut
être classié en:
i) primaire, provoqué par une thrombose en l’absence de
compression de lespace occupé par des lésions, invasion
par néoplasie ou parasites
ii) secondaire, autrement.
Étant donné les implications thérapeutiques et pronostiques
diérentes, nous discuterons seulement du SBC primaire.
Dans des pays Occidentaux, la thrombose de veine hépatique
pure est la plus commune [48] alors quen Asie, l’IVC pure ou
combinée, le bloc veineux IVC/HEPATIQUE prédomine. Les
conséquences physiopathologiques incluent lobstruction, qui
mène à la congestion sinusoïdale, l’ischémie et, nalement,
la nécrose hépatocellulaire. Ils peuvent aboutir à la brose
centrolobulaire, l’hyperplasie régénératrice nodulaire et/ou la
cirrhose.
Manifestations cliniques
Le tableau clinique est hétérogène et sétend de labsence de
symptômes à l’insusance hépatique foudroyante [1,49]. Une
présentation asymptomatique est souvent associée à la pré-
sence de grands réseaux veineux hépatiques. Dans une étude
de prospective multicentrique sur un grand nombre de pa-
tients avec un SBC au diagnostic, l’ascite était présente chez 83
% de patients, l’hépatomégalie chez 67 %, la douleur abdomi-
nale chez 61 %, des varices œsophagiennes chez 58 % et une
hémorragie gastro-intestinale chez 5 % [2]. Dans, approxima-
tivement, 15 % des cas, le SBC et la TVP arrivent simultané-
ment [2,50]. Les options thérapeutiques et le pronostic ont
tendance à être plus mauvais chez les patients SBC-TVP [50].
Les études d’imagerie présentent des nodules hépatiques chez
60-80% des patients atteints de SBC. Ils sont généralement bé-
nins et sont le résultat des troubles de la perfusion. Bien que,
ces nodules soient généralement petits, dans la plupart des cas
de moins de 4 cm de diamètre, multiples (souvent plus de 10
lésions), hypervascularisés et diusés dans le foie. Un motif
pathognomonique nest pas détecté par la tomodensitométrie
(TDM) ou par résonance magnétique (IRM). L’incidence cu-
mulative du carcinome hépatocellulaire (CHC) en SBC a été
démontrée de 4% (après un suivi moyen de 5 ans) [51]; donc,
le diagnostic diérentiel est essentiel. La biopsie a été suggé-
rée chez les patients atteints d’un nombre inférieur ou égal à
trois nodules, des nodules dun diamètre supérieur ou égal
à 3 cm, l’hétérogénéité ou le rinçage à la phase veineuse, des
changements dans deux techniques d’imagerie consécutives,
ou une augmentation des niveaux dalpha-foetoprotéine [51].
Cependant, la caractérisation radiologique et histologique des
nodules hépatiques chez les SBC ne peut pas compter sur les
critères bien établis de HCC dans la cirrhose et la seule re-
commandation formelle est la surveillance multidisciplinaire
étroite et minutieuse.
Diagnostic
Le diagnostic est établi avec la conrmation radiologique sans
équivoque de lobstruction de lécoulement veineux hépatique.
Léchographie Doppler a une sensibilité diagnostique de plus
de 75% et est l’investigation de première intention [1]. Si un
échographiste expérimenté nest pas disponible, l’imagerie
par résonance magnétique et de lévaluation CT sont utilisées
pour la conrmation du diagnostic [1,48]. Une phlébographie
est recommandée si le diagnostic reste incertain ou pour la
caractérisation de lanatomie avant le traitement. Si l’imagerie
na pas démontré lobstruction des grosses veines, une biopsie
du foie peut être réalisée an d’évaluer une petite thrombose
de la veine hépatique.
Traitement
Lalgorithme thérapeutique par étapes recommandée pour le
SBC, basé sur un grand nombre rétrospectif et une série pros-
pective de [2,52,53] patients est résumée à la gure 1.
Les patients atteints de SBC ont souvent besoin d’un traite-
ment pour les ascites et les varices. Ces traitements doivent
être administrés suivant les mêmes recommandations de trai-
tement que pour lascite et lhypertension portale dans la cir-
rhose.
Les patients atteints du SBC devraient recevoir un traitement
anticoagulant dès que possible pour une durée indétermi-
née, dans le but de réduire le risque dextension de caillot et
de nouveaux épisodes thrombotiques [1,2,52,54]. Selon la
recommandation pour la thrombose veineuse profonde, le
patient doit être traité avec l’héparine de bas poids molécu-
laire (HBPM) pendant au moins 5 à 7 jours, et également avec
un traitement anticoagulant par voie orale, avec des AVK,
visant à un rapport normalisé international (RNI) entre 2 et
3. L’HBPM peut être arrêtée lorsque le RNI se situe dans la
norme cible pour deux mesures consécutives.
Un taux élevé de complications hémorragiques lors de lan-
ticoagulation (jusquà 50% des patients) a été rapporté chez
nombre patients SBC, diagnostiqués entre 1995 et 2005
[55]. Dans une cohorte prospective plus récente de patients
diagnostiqués entre 2005 et 2007, des complications hémor-
ragiques étaient moins fréquemment observées (17% des
patients), probablement due à une meilleure gestion de lan-
ticoagulation lors de procédures invasives ou la prophylaxie
adéquate pour l’hypertension portale [53].
Le traitement de la cause prothrombique sous-jacente (par
exemple MPNs) devrait être logiquement entamé simultané-
ment. En eet, les avantages du traitement précoce pour un
syndrome myéloprolifératif sous-jacent ont été suggérés dans
une analyse de cohorte rétrospective [56].
Lexpérience de corriger l’obstruction de lécoulement veineux
hépatique avec la thrombolyse est limitée. De bons résultats
ont été rapportés chez des patients sourant d’une thrombose
récente et incomplète, traités par perfusion locale et précoce
Traitement médical
Angioplastie / endoprothèse (stents) /
thrombolyse
Shunt portosystémique in-
trahépatique transjugulaire (SPIT)
Gree du foie
Fig. 1 Algorithme thérapeutique point par point recommandé pour le
syndrome de Budd-Chiari.
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dun agent thrombolytique associé à une angioplastie ou un
stenting [57]. Les complications, cependant, peuvent être fa-
tales [58].
Des sténoses partielles ou segmentaires sont présentes chez 60
% des patients avec l’obstruction IVC et 25-30 % d’entre eux
avec l’obstruction de la veine hépatique [59]. Langioplastie
ou stenting de cette sténose pourrait rétablir le drainage phy-
siologique du sang portal et sinusoïdal. La resténose postan-
gioplastique est fréquente, mais peut être réduite quand faite
en association avec une endoprothèse. Le placement erroné
dune endoprothèse peut mettre en péril la performance ul-
térieure d’un SPIT ou la transplantation orthotopique du foie
(TOF). En général, langioplastie/stenting est le traitement
dénitif pour moins de 10 % des patients SBC occidentaux
[53]. Lecacité peut être plus grande dans dautres régions du
monde où il y a une prévalence plus haute de cette forme spé-
cique de SBC [60].
Les patients atteints de SBC non sensibles au traitement mé-
dical ou qui ne sont pas aptes à une angioplastie / stenting
doivent être traités avec des techniques dérivées. Il n’y a au-
cune explication claire pour expliquer pourquoi certains pa-
tients ne répondent pas au traitement médical, donc les carac-
téristiques de réception des SPIT des patients SBC dièrent
dun centre à un autre. Certains critères ont été proposés:
léchec clinique au traitement a été considéré quand les critères
de réponse complets ou en cours faisaient défaut [52]. Une
réponse complète a été envisagée lorsque lensemble des six
critères suivants ont été atteints et stables: (1) l’absence dascite
cliniquement détectable, avec des taux de sodium sérique et
une créatinine normale, en labsence d’un traitement diuré-
tique, ou de diurétiques à faible dose (Spironolactone 75 mg
/ j. ou Furosémide 40 mg / j.) et une consommation modérée
de sel; (2) l’augmentation du facteur de coagulation V à un
niveau supérieur à 40% de la valeur normale; (3) une diminu-
tion de la bilirubine sérique conjuguée à un niveau inférieur à
15 mg / L; (4) labsence de la première ou récurrente hyperten-
sion portale – liée à des saignements pendant la prophylaxie
primaire ou secondaire avec des bêtabloquants non sélectifs
ou avec un traitement endoscopique; (5) aucune apparition
d’infection bactérienne spontanée; et (6) la réponse IMC a été
considérée comme lorsque les trois critères suivants ont été at-
teints sur une base d’évaluation de 2 semaines: (1) en présence
dascite, un équilibre de sodium et deau négatif a été obtenu
en utilisant des diurétiques à faible dose et une consomma-
tion de sel modérée, ainsi que les niveaux de sodium sérique
et de créatinine normaux, ou avec laugmentation de sodium
sérique, si initialement faible et la baisse des niveaux de créa-
tinine sérique si initialement élevée; (2) le niveau du facteur
V augmenté, si initialement faible; et (3) taux de bilirubine
sérique conjugué diminué si initialement élevé. Ces critères de
réponse doivent être validés dans des études futures.
Les techniques dérivées, soit les shunts ou SPITS chirurgi-
caux, ont pour but de transformer le système porte en voie
découlement [61]. Le shunt chirurgical le plus fréquemment
eectué est le shunt mésentérique avec un stent polytétrauo-
roéthylène (PTFE) ou autologue en interposition de la veine
jugulaire. Il est plus facile à faire que le shunt portocaval côte
à côte lorsque lhypertrophie du lobe caudal est présente. Les
shunts chirurgicaux sont inecaces si on associe la thrombose
IVC ou une compression sévère de la VCI à une hypertrophie
du foie. Dans cette situation, certains groupes ont eectué un
shunt méso-auriculaire ou un shunt cavo-auriculaire plus un
shunt porto-cave.
Les shunts chirurgicaux nont pas montré dêtre un avantage de
survie indépendant dans les cohortes de patients avec le SBC
[62,63]. Ceci est probablement relié au haut taux de mortali-
té inhérent de la population de malades avec un SBC sévère,
aussi bien quau taux élevé de dysfonctionnement/thrombose
des shunts [64-66]. D’autre part, les SPITS ont une morbidi
inférieure et un taux de mortalité plus faible que la chirurgie
et sont réalisables chez la plupart des patients avec une obs-
truction IVC et dans ceux avec une sténose IVC sévère. Une
récente étude européenne rétrospective multicentrique por-
tant sur 124 patients atteints de SBC, traités avec des SPITS,
sans transplantation orthotopique du foie (TOF) a montré une
excellente survie de 1 à 5 ans (88 % et 78 %, respectivement)
[67]. Ces résultats ont été conrmés par une étude prospec-
tive récente [53]. Des stents PTFE réduisent la récidive pos-
topératoire dobstruction ou de dysfonctionnement [53,67].
Le placement de SPITS chez les patients avec SBC exige une
formation spéciale. En eet, dans plus de 45 % des cas, une
approche transcavale (injection directe dIVC intrahépatique)
peut être exigée pour compléter la thrombose des veines hépa-
tiques [67].
La TOF (transplantation orthotopique du foie), chez les pa-
tients atteints de SBC, est associée à une survie similaire [68]
à celle obtenue chez les patients initialement traités par SPITS
[67]. Il a été suggéré que le placement antérieur de SPITS peut
rendre une TOF postérieure plus dicile si elle est nécessaire.
Cependant, cela na pas été conrmé dans des études plus ré-
centes [67,69]. La récidive du SBC peut se produire après la
TOF. L’incidence de cette complication a nettement diminué
depuis le début du traitement anticoagulant précoce après
évaluation du terrain biologique et de sa poursuite à vie. Une
exception pour la nécessité danticoagulation pourrait être
chez les patients qui ont le trouble thrombotique corrigé par
TOF (par exemple, la thrombophilie héréditaire. L’histoire na-
turelle de NMP doit également être considérée dans le cadre
post-transplantation.
Il y a des patients avec des SBC graves qui peuvent être trai-
tés directement avec une TOF, sans utilisation antérieure de
SPITS. Cependant, jusquà présent il n’y a pas de méthode
able pour identier ces patients [53,67].
Budd-Chiari et la grossesse
La grossesse chez les patientes atteintes du SBC a un excellent
résultat, dû à des patientes qui ont une maladie bien contrôlée.
Le résultat fœtal est moins favorable, mais il a été rapporté
que les grossesses atteignant la 20ème semaine de la gestation
sont associées à un pronostic fœtal acceptable, même si 76%
connaissaient un accouchement prématuré [70]. Les AVK
sont associés à un risque élevé de malformations congénitales
et de fausses couches [71]. Par conséquent, un test de gros-
sesse doit être fait le plus tôt possible, et les mères séroposi-
tives devraient passer à l’HBPM avec surveillance périodique
de lactivité anti-Xa.
Pronostic
Il y a eu diverses tentatives pour déterminer les paramètres
ou les combinaisons de paramètres qui peuvent prédire le
pronostic chez les patients atteints par le SBC [53,62,67,73].
Bien que tous ces indices pronostiques soient valables pour
lévaluation de la survie sans transplantation et la survie sans
thérapie invasive, leur exactitude prédictive est suboptimale
pour une utilisation chez les patients dans la pratique clinique
quotidienne [74]. Développement du HCC ou de la progres-
sion de la maladie hématologique peut modier le pronostic
du SBC.
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Directives de Pratiques Cliniques EASL: les pathologies vasculaires

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