
3- À titre d’exemple : maraîchages en Algérie et au Maroc ; lait en Tunisie ; céréaliculture sèche et tomate industrielle en
Turquie, etc.
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Techniques, sciences et innovation
relativement moins nombreux, parviennent à nourrir une population non agricole de
plus en plus importante, tout en dégageant des excédents destinés à l’exportation.
Parallèlement à ce déclin de l’agriculture au Nord, on assiste à un développement des
industries de transformation et de la grande distribution qui occupent une place de
plus en plus importante et jouent un rôle majeur dans la régulation des filières. Les pro-
grès scientifiques et les nombreuses innovations technologiques ont abouti à la mise au
point d’un grand nombre de nouveaux produits. Réalisées tant sur le plan organisa-
tionnel que sur le plan des formes matérielles de l’échange des produits et des informa-
tions, notamment à travers les chaînes d’approvisionnement de type « Supply Chain
Management» (SCM), ces innovations ont permis de diminuer les coûts des produits
alimentaires, d’améliorer leur qualité et de répondre aux besoins des populations.
Dans les pays du sud et de l’est de la Méditerranée (PSEM), l’urbanisation rapide a
engendré une certaine division spatiale du travail avec le développement de la commer-
cialisation, de la transformation et des échanges extérieurs des produits agro-alimen-
taires au détriment de l’autoconsommation. Outre la modernisation de l’agriculture,
l’efficacité des filières agro-alimentaires dépend de plus en plus fortement de la mise à
niveau des secteurs industriel et de la distribution. Or cette évolution n’a pas toujours
été accompagnée par une transformation des formes d’organisation des échanges qui
demeurent plus ou moins traditionnelles, voire archaïques. L’industrie alimentaire et
les circuits de distribution restent atomisés et fragmentés, tandis que la logistique est
embryonnaire dans la plupart des pays.
La faiblesse de l’environnement scientifique et technique ainsi qu’une maîtrise insuffi-
sante des méthodes de management et de gestion augmentent la vulnérabilité de ces
filières tout en compromettant leur rentabilité et leur compétitivité. Pour beaucoup de
produits, l’allongement de la chaîne agro-alimentaire a provoqué des déséquilibres, en
termes de quantité, de qualité et de prix, entre les différents secteurs (agriculture, trans-
formation, distribution). Malgré des progrès réalisés dans certains PSEM, et pour
quelques produits seulement3, la productivité agricole, et surtout celle des secteurs en
aval, n’a pas connu les améliorations exigées d’abord par la forte progression de la
demande alimentaire, puis par l’urgence de la compétitivité imposée par la récente
ouverture des marchés.
En dépit d’une base agro-climatique commune, spécifique à la zone méditerranéenne,
la structure, le fonctionnement et les performances des systèmes agricoles et agro-
alimentaires restent, on le voit, très différents au Nord et au Sud. La valeur ajoutée par
actif agricole est de 18000 dollars dans la Méditerranée européenne contre 1952 dol-
lars dans les PSEM (soit 9,2 fois supérieure). Cet écart s’est creusé sur la période 1990-
2003 compte tenu de l’évolution différenciée des productions mais aussi du nombre
d’actifs agricoles, en forte diminution au Nord et en augmentation dans les PSEM. Cette
fracture Nord-Sud risque de s’élargir à l’avenir, avec l’avènement de nouvelles techno-
logies et la volonté affichée par les pays européens dans le cadre de la stratégie de Lisbonne
de les utiliser pour «devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus
dynamique, capable d’une croissance économique durable…»
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