même si les mosquées de l’UOIF, à peu près le cinquième au quart de ces centres, échappent à
cette classification. Ainsi, les modèles comoriens, turcs, marocains, algériens possèdent leurs
spécificités propres de transmission, où l’alphabétisation dans la langue d’origine (arabe ou
turc) et les rudiments de morale islamique jouent un rôle central.
Deux exemples sont développés, illustrant deux contextes historiques et ethniques
différents. Ainsi, on a, avec Argenteuil, l’exemple d’une longue expérience d’implantation
musulmane de travailleurs immigrés en usine, où les différences entre centres islamiques sont
bien campées et où les modèles turcs et algériens sont illustrés et avec Montpellier et Lunel,
l’exemple d’une immigration plus récente, majoritairement marocaine, d’origine paysanne et
moins stable dans la cooptation de ses enseignants.
2/ Les écoles privées musulmanes, former une élite
L’augmentation du nombre d’écoles privées musulmanes est rapide et récente : on
compte aujourd’hui 964 élèves scolarisés en primaire et en secondaire dans ces écoles. )
L’augmentation rapide et récente du nombre d’écoles privées musulmanes est à mettre
en relation avec plusieurs facteurs, dont l’action militante des Frères Musulmans, ici
encore omniprésents comme porteurs de projets, dans la perspective d’instauration d’une
« citoyenneté musulmane », la crise de l’école publique, qui est un argument de promotion
des établissements privés musulmans et enfin la prohibition du voile dans les établissements
scolaires publics par la loi de 2004, qui a « boosté » les projets éducatifs de la communauté
musulmane. Mais les stratégies d’excellence sont porteuses de sécularisation, comme dans
l’enseignement privé catholique.
Les ouvertures de ces établissements, bien que récentes connaissent depuis cinq ans un
certain dynamisme : outre l’école élémentaire de La Réunion, sous contrat avec l’Etat depuis
1990, un lycée, le lycée Averroes de Lille est passé sous contrat d’association depuis 2008 et
un autre, le lycée collège Al Kindi en banlieue lyonnaise, est en passe de contractualiser avec
l’Etat. Un collège, celui d’Aubervilliers, a essuyé un refus, et trois autres, un à Marseille, un
à Vitry et un à Villeneuve saint Georges sont en attente alors que deux derniers, un à
Toulouse et un à Saint Quentin en Yvelines n’ont pas encore déposé de demandes de
contractualisation. Des projets d’écoles primaires fleurissent, où la présence des mouvements
tabligh ou salafiste est plus apparente, mais dont la solidité n’est pas encore prouvée.
Sur 10 établissements existants, cinq sont labellisés UOIF. Si pour les responsables de
l’UOIF, la construction de mosquées et l’organisation de séminaires religieux étaient des axes
fondamentaux dans la prédication frériste, la construction d’écoles est vue comme une étape
supplémentaire dans la dynamique de réislamisation et de conservation de l’identité
islamique. Mais ces établissements sont confrontés au dilemme de l'extension versus élitisme,
à savoir que la majorité des dossiers de demandes d'inscription font apparaître des
niveaux très moyens, voire médiocres au vu des ambitions de l'établissement.
Contrairement aux autres structures d’enseignement islamique (écoles coraniques et
instituts supérieurs islamiques), une école privée musulmane nécessite la mobilisation de
sommes d’argent considérables et les grandes organisations musulmanes telles que l’UOIF
sont les seules à pouvoir assumer de tels coûts.